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LE FIGARO ET VOUS - SEPTEMBRE 2014 - 1/5
Bienvenue chez Castel 2.0
Le club ultraparisien du 15 rue Princesse s'offre un lifting glamour.
À sa tête, des actionnaires plutôt riches, jeunes et célèbres qui rêvent
d'en faire à nouveau le lieu de référence de la nuit.
sque (détail)
réalisée par
Jean-Philippe
Delhommesur
les murs du bar
situé au rez-dechaussée de Castel.
On y reconnaît,
entre autres,
l'écrivain Michel
Houellebecq et
NOCTIS
8828141400501/GOP/OTO/1
Tous droits réservés à l'éditeur
GROUPE NOCTIS - 23 RUE DE PONTHIEU - 75008 PARIS
GROUPE-NOCTIS.COM
LE FIGARO ET VOUS - SEPTEMBRE 2014 - 2/5
C'est l'entrepreneur
Jean Castel (ci-dessous) qui
a fonde le célèbre club prive,
adresse Incontournable
de nombreuses vedettes
françaises et internationales.
v
Castel,
le club à la carte
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r LANCE TAjTCL
LE FIGARO ET VOUS - SEPTEMBRE 2014 - 3/5
LÉNA LUTAUD
HutaudCaJlefigaro.fr
avant la façade rouge du
15, rue Princesse, à deux pas de SaintGermain-des-Prés, les ouvriers donnent
les derniers coups de pinceaux. À l'étage,
sous les estampes erotiques japonaises, le
directeur artistique André (Le Baron) et le
décorateur Thomas Lenthal ajustent les
oeuvres d'art accrochées aux murs. Un
Keith Haring côtoie un collage d'Erro,
une photo d'Awen Jones, un dessin de
Topor. Des curiosités du fétichiste Pierre
Molinier sont discrètement mises en lumière. Un peu plus loin, le directeur Xavier Legrand, pierre angulaire du lieu,
teste la carte concoctée par le chef Erwan
Gestin, un ex du Meurice.
Le temps presse. Ce mercredi, à
22 heures, 350 personnalités triées sur le
volet sont attendues autour d'une coupe
de champagne. Chacune repartira avec le
sésame dont rêve le Tout-Paris : gracieusement offerte, une carte de membre, en
laiton, gravée à son nom. Pour les
500 autres « chéris » (membres, dans le
langage Castel), le grand retour à la maison, c'est jeudi. « Le gratin de la mode est
à Paris pour les défilés printemps - été 2015,
c'est le moment idéal », explique Xavier
Legrand.
Pour préserver l'esprit des lieux, aucune soirée mondaine n'est prévue. Cathy
veillera à refouler les pique-assiettes, tout
comme les photographes, les télévisions
et les téléphones portables. Tweeter un
selfie tout en ouvrant un Château Petrus ?
N'y pensez même pas. Et en cas d'urgence ? Les serveuses en tenue de soubrette
peuvent surgir à tout moment avec un téléphone en bakélite dont les « chéris »
ont glissé le numéro à leurs proches avant
de ffler chez Castel. « À leurs épouses... »,
plaisante Thomas Lenthal.
« Nous voulons une grande
colonie de gens sympas »
Après maintes tentatives, Castel rêve de
retrouver sa splendeur d'autrefois. Redevenir l'égal d'AnnabePs à Londres. Une
maison où l'on vient dîner, s'amuser,
danser, en étant sûr de toujours rencontrer quelqu'un. Dutronc en aimait les
filles. «La soirée la plus mémorable était
celle du bouclage des hebdos, de l'Express
et de l'Obs, se souvient Claude Brasseur.
Les red'chef s débarquaient et les acteurs
qui sortaient de scène les rejoignaient pour
souper.» Caroline de Monaco flirtait avec
Philippe Junot. « Avec une atmosphère à la
fois paillarde et sophistiquée, le cocktail recherche aujourd'hui est très particulier »,
souligne Thomas Lenthal. « Nous souhaitons mélanger les gens du monde entier, de
tous les âges. L'élite des affaires, du barreau, de l'édition, des médias se mêlera
aux artistes, comme la peintre Oda Jaune », détaille André. Pour une fois, aucun
accord n'a été passé avec les agences de
mannequins. « Les beautés physiques
vous donnent une ambiance sinistre, assène André. Nous voulons une grande colonie avec des gens sympas, bien élevés, insolents et drôles. »
Dans sa version 2014, la maison compte seize copropriétaires. Tous des hommes avec un certain ego. Beaucoup d'héritiers qui ont l'habitude d'être obéi.
Castel n'a pas encore ouvert que déjà les
piques se multiplient. Sur le fronton, les
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ENQUÊTE
La sélecte maison
parisienne
rouvre ses portes
mercredi.
Son ambition :
réussir un
détonant cocktail
qui mixerait
l'élite du pouvoir,
l'intelligentsia,
le gratin arty
et le monde
de la mode.
graffitis d'André réalises avant l'été ont
disparu « Ce n'est pas chez lm, ici » assené un proche Les equipes doivent déployer dcs tresors de diplomatie La
confi eric s'est formée il v a un an Lors de
lem dmei mensuel, dix copains de la limonade ont l'idée de relancei Castel
« Cinq d'entre eux Thierry! Costes, Christopher Descours (T M Weston, Bonpoint,
Pipei-Heidsieck), Stanislas Dewynter
(Chez Clement, Laperouse), Jean Moueix
(Saint-Emilion) et Dominique Paul-Mercier (Butard Enescot) étaient emballes »,
se souvient Lam cnt de Gourcuff A
37 ans, cet entiepieneur respecte gère
l'empire Noctis dix-huit lieux, phares
parisiens (Te Madam, Club 79, "\ oyo ),
des clubs chics a La Baule, Megeve et l'île
de Re
ll négocie avec le patron du Queen,
Philippe Fatien, qui a acheté Castel en de
pot de bilan en 1997 Dix-sept ans plus
tard, le heu \ ivote La clientele est volage
Elle s'amuse au Baron, au Montana, au
Mathis, au Raspoutine, en plein air comme aux jardins de Bagatelle Fanen
conseï ve les murs de Castel a\ ec sa societe Printcl, maîs cede Ic fonds dc commerce a la societe Princesse, elle-même propriete du Holding Castel Les seuls
travaux coûteront 1,5 million d'euros II
leui faut d'autres actionnaires Charles
Beigbedei, déjà associe avec Gourcutt
Des jambes
interminables
étaient
balayées par
les lumières
des projecteurs.
Nigauds que
nous étions,
nous ne
venions pas
pour cela.
Carte vintage
de membre
d'Eric Neuhoff
dans Noctis, fait venir Gregoire Chertok
Thieiry Costes contacte Gilles Lellouche
et Jean Dujardin, deux piliers des bars de
la nie Pimcesse, ainsi que Guillaume
Canet
Maîs l'mv estissement de
250000 eutos les poussent a deelînet
l'invitation lauten t de Gourcuff attire
alors T aurent Mîlchîor (Ftam) et JacquesAntoine Granjon Arment ensuite les
freres Benzaqueii (Ken Club, Klay), les
freres Houze (Galeries Lafayette), Ramon
Mac Crohon (Maison de la Truffe,
Kaspia) et Andre (Le Baron)
Ambiance masculine
Les « Seize » n'ont pas beaucoup plus de
droits qu'un membie lambda Chacun
apporte son savoir-faire A Noel, Descours offi ira une bouteille a chaque
« cheri » Mac-Crohon cree une boite de
caviar Castel Les « Seize » ont juste un
droit de veto sur Ftederic Beigbcdcr, qui
atttibuc les cartes de membres TeanYves I e Fur, proprietaire du Montana ct
du magazine Lui, ou officie le même Fie
deiic, est bien magnanime Comme plu
sieurs actionnait es sont dans le vin et le
champagne, les negociations a\ec Ri
card, LVMH et Baccardi sont tendues Au
final, Veuve Clicquot (LVMH) signe pour
un an d'exelusivite et tolère Piper Heid
sieck, propriete de Christopher Descours
Les «Seize» ne sont pas des philanthropes Castel pourra etre privatise L'objectif est d'atteindie 2000 membies La cotisation annuelle est fixée a 500 em os
Habituer les Parisiens aux regles d'un
club prive, a ne pas se snober d'une table
a une autre, re\oir sa relation aux femmes dans les boites de nuit cela ne sera
pas simple La disposition des lieux devrait aider La maison vivra sur plusieurs
niveaux Plus on grimpe l'escalier décore
d'une moquette coquine, plus l'ambiance
dev lent masculine Plus calme aussi, avec
une bibliotheque laquée lougc ct un jardin d'hiver dans les tons vert nénuphar
« Tres proustien », commente Thomas
I enthal Comme che? Annabel's a Londres, d'authentiques pissotières victoi icnncs attendent ces messieurs Avec ses
paves au sol, son réverbère, le fumoii dc
la cave donne l'impt essîon d'être dehors
« Au fay er, nous avons conser\'e le plafond
désuet avec ses poutres apparentes en f aux
bois », s'amuse Thomas Lenthal Le bai
est surmonte d'une tresque de Jean Phi
lippe Delhornnie Sagan fume Le cheveu
en bataille, c'est Houellebecq Beaucoup
de femmes mies « On identifie qui on
veut », sourit Xavier Legrand
La carte ressemble a celle de L'Ami
Louis Au hasard céleri rémoulade, cote
de veau, mousse au chocolat Le son ira
«de Duft Punk a Gainsbourg, ou a un
vieux reggae de Bob \Iarley, a\ec un quart
d'heure américain chaque soir », promet
Andre Dans ce petit monde de la nuit,
tout va tres vite Dans ti ois semaines,
Laurent de Gourcuff et sa fine equipe s au
lout si leur Castel « apris >> •
1961
Date d'ouverture
de Castel
2500
Nombre record
de membres atteint
en 1987-1988
^W J'ai un titre
purement
honorifique,
mais d'un coup,
je redeviens un
homme très
important à Paris.
C'est très très
drôle. Je me sens
comme Gilles Jacob
au Festival
de Cannes.
Tout le monde
va m'aimer !
FREDERIC BEIGBEDER PRESIDENT
DU CERCLE SAINT-GERMAINDES-PRES, L'ASSOCIATION
DES MEMBRES DE CASTEL
F^FFTPIf T
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<•! I F
LE FIGARO ET VOUS - SEPTEMBRE 2014 - 5/5
La nuit nous appartient
ERICNEUHOFF
eneuhoff (Slefigaro.fr
La tuile. Trop jeune pour avoir
connu la grande époque, trop
vieux pour appartenir au Caca's
Club de Frédéric Beigbeder:
pendant des années, ce fut mon
drame. Des psychanalyses ont
été entamées pour des motifs
plus futiles. Le soir tombait.
Après dîner, tout le monde se
demandait où aller. Nous n'avions plus l'âge de pointer au Bus
Palladium (entrée gratuite pour
les demoiselles le mardi). Il y
avait bien l'Élysées-Matignon
(trop rive droite), les BainsDouches (trop branché).
Castel? Va pour Castel. On
devait montrer patte blanche.
Aucune enseigne sur la façade.
Et toujours cette impression de
pénétrer dans le saint des saints,
de mettre les pieds dans la légende, de se retrouver dans une
chanson de Jacques Dutronc. Ce
long couloir, cette moquette, ce
papier peint. À gauche, c'était la
cantine. À un moment donné,
forcément, on s'y ravitaillait en
oeufs sur le plat, en assiettes de
frites. Pour danser, il fallait descendre. Autour de la piste, il y
avait des palmiers en métal
doré. La musique était délicieusement démodée. Je ne pense
pas que le punk, la techno aient
jamais eu ici droit de cité.
Refaire le monde
Sous le stroboscope, les filles
étaient plus belles que nulle part
ailleurs. Des robes noires s'agitaient sur des morceaux de rock.
Des jambes interminables
étaient balayées par les lumières
des projecteurs. Nigauds que
nous étions, nous ne venions pas
pour cela. Il s'agissait de refaire
le monde au foyer du rez-dechaussée, avec au fond le comptoir en zinc. Les verres ne se
comptaient plus. Paris était encore une fête.
Je me souviens d'avoir parlé
de Drieu la Rochelle avec Pascal
Thomas, d'avoir dîné avec Michel Déon et le propriétaire des
lieux (soudain, on était dans un
film de Louis Malle), d'avoir fêté
mon anniversaire au salon des
mariniers, tout en haut, dans
cette pièce décorée de maquettes
de bateaux. Une fois, j'ai vu Marc
Lambron avec sur la tête un képi
de gendarme, comme Maria
Schneider dans Le Dernier Tango
à Paris. Déjà le goût de l'uniforme? J'ai vu des hommes pleurer
et des dames rire aux éclats.
Pourquoi y avait-il deux escaliers ? La précaution élémentaire
consistait à prévoir de la monnaie pour le vestiaire. Ça n'était
pas tout. À la sortie, un clochard
faisait la manche. Il profitait de
notre état. Le jour se levait rue
Princesse. Un Denis Tillinac en
pleine forme disait: «Où va-t-on
boire ? Je n'arrive pas à me saouler quand Hy a de la musique. »
Parfois, un farfelu suggérait
de partir pour Deauville. Saint Germain-des-Prés finissait sur
les planches, comme les ramblas
à la mer. En général, les ardeurs
se refroidissaient au péage de
Mantes-la-jolie. Qu'est-ce que
c'était bien! Nous avions l'avenir devant nous et faisions semblant d'être désespérés. Il paraît
que tout cela va recommencer, à
l'identique. Il n'est pas interdit
de croire aux miracles. •
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