Le dessalement de l`eau de mer
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Le dessalement de l`eau de mer
N°4 / Juillet-Août 2005 / Recherche & Développement Le magazine de la chronique scientifique Le dessalement de l’eau de mer Infos clés Le saviez-vous ? Les premiers procédés de dessalement : Dès le IV° siècle avant JC, Aristote observe le principe de la distillation. Au XII° siècle,Adélard de Bath décrit deux expériences dans les Quœstiones naturales : « au soleil, après l’évaporation sur un rocher, l’eau de mer se transforme en sel ; lorsque le soleil fait défaut, on chauffe de l’eau de mer et sous l’effet de la cuisson on la voit également se transformer en sel. Cette métamorphose explique que la mer soit plus salée l’été que l’hiver, que les mers méridionales le soient davantage que les mers septentrionales ». Depuis les temps les plus anciens, les marins ont dessalé l’eau de mer à partir de simples bouilleurs sur leurs bateaux, mais l’utilisation à des fins industrielles est récente. Dans les années 60, les procédés thermiques sont mis au point et utilisés pour dessaler l’eau de mer. Par ailleurs, des recherches sont développées sur le procédé de dessalement par osmose inverse. 1978 : mise en service de la première unité de dessalement de l’eau de mer par osmose inverse, à Djeddah en Arabie Saoudite. 72% de la surface totale de la terre est recouverte d’eau. 97% de cette eau est salée La salinité moyenne des mers est d’environ 35 g de sel (chlorure de sodium) par litre soit 3,5% du poids de l’eau, et peut varier selon les climats : 7g/l en mer Baltique, 270g/l dans la mer Morte. La répartition des 3% restant (eau douce) est très inégale : 10 pays se partagent 60% des réserves, alors que 29 autres (en Afrique et au Moyen Orient) font face à des pénuries chroniques. Aristote Le dessalement de l’eau de mer permet notamment : d’augmenter la ressource en eau douce disponible, de fournir une solution en cas de sécheresse et de faire face aux situations de pénuries et de crises. Les objectifs de la Recherche Orienté essentiellement sur le procédé d’osmose inverse, l’objectif des recherches de Veolia Environnement est d’optimiser les conditions de fonctionnement de l’installation de dessalement par procédé membranaire. La recherche s’opère notamment dans deux directions : n le prétraitement de l’eau de mer pour limiter le colmatage des membranes à l’aval n la réduction des dépenses en énergie pour réduire le coût du dessalement et améliorer le bilan environnemental. Michel Dutang Directeur de la Recherche, du Développement et de la Technologie de Veolia Environnement. « La Recherche et Développement de Veolia Environnement travaille à faire du dessalement une solution alternative d’avenir accessible au plus grand nombre tant au niveau technologique qu’économique. » Un enjeu stratégique «Le dessalement est un enjeu stratégique pour Veolia Environnement. Il représente une ressource alternative qui apporte des réponses aux besoins en eau à court et à long terme» Antoine Frérot Président de Veolia EAU Sommaire Page 1 n Un enjeu statégique par Antoine Frérot n Le saviez-vous ? n Infos clés n Les objectifs de la Recherche Page 2 n Ce qu’il faut savoir sur… Page 3 n Zoom sur les programmes de Recherche et de Développement Page 4 n Pour en savoir plus… n Fiche technique vidéo n Contact Le dessalement de l’eau de mer Ce qu’il faut savoir sur… L’eau de mer est un bien inépuisable, mais elle contient 1000 fois plus de sel que la limite fixée par l’OMS pour pouvoir être consommée. Les techniques de dessalement de l’eau de mer les plus utilisées La distillation ou dessalement thermique. L'eau de mer est chauffée jusqu'à évaporation. Seules les molécules d’eau s’échappent, laissant en dépôt les sels et les autres substances. La vapeur d’eau est condensée pour obtenir de l'eau douce. L’osmose inverse ou dessalement membranaire : l'eau de mer est filtrée sous pression à travers une membrane. Les sels et les micro-organismes sont retenus par cette dernière. Ce procédé nécessite toutefois un traitement de l’eau en amont. Le dessalement par rapport à une filière de traitement d’eau de rivière : Les + n Solution alternative au manque n n n n d’eau Moins de réactifs chimiques Moins de production de boues Moins de coût de génie civil Qualité constante de l’eau traitée Aujourd'hui ces deux techniques se partagent sensiblement à égalité le marché mondial. Entre 1990 et 2001, le procédé d’osmose inverse est passé de 40 à 53% de part de marché, Les recherches de Veolia sont orientées vers l’osmose inverse dont les prévisions de part de marché sont de 70% (contre 20% pour le thermique et 10% pour les autres méthodes) d’ici l’horizon 2020. Les – n Consommateur de beaucoup d’énergie n Coût encore élevé n Volume d’eau produit insuffisant L’ensemble des caractéristiques de l’eau de mer à dessaler est à prendre en compte dans le choix et les paramètres de fonctionnement des procédés pour maîtriser les aspects de corrosion, de dépôts et les coûts. par rapport à l’eau de mer traitée n Perturbation du milieu marin par prélèvements et rejets d’eau très salée • Module spiralé Pièce d ’écartement Tube collecteur perforé Concentrat Sortie perméat Alimentation Description d’un module spiralé d’osmose inverse. La membrane est constituée d’une surface plane dont la perméabilité est sélective. Son objectif principal est d’éliminer le sel. Elle assure également la rétention des composants indésirables dans l’eau (micro algues, bactéries, certains virus, microorganismes, micropolluants), supprime la turbidité (eaux troubles), limite les sous-produits de désinfection et permet la production d’une eau épurée. Dans le cas de l’osmose inverse, l’élimination des éléments physico-chimiques et biologiques indésirables est quasiment totale. Qu’est-ce que l’osmose inverse ? L'osmose est un principe naturel. Si deux solutions aqueuses ayant une concentration saline différente, sont séparées par une membrane, l'eau passe spontanément de la solution la moins concentrée en sel à la plus concentrée. L’osmose inverse est basée sur le principe opposé. Elle consiste à appliquer à cette eau salée une pression importante, qui nécessite une consommation énergétique élevée, pour la faire passer à travers une membrane. Au terme de l’opération, seules les molécules d’eau traversent la membrane, fournissant ainsi de l’eau douce. Membrane Membrane Pression Concentrat Alimentation au travers de l’écarteur Qu’est-ce qu’une membrane ? Membranes Ecarteur du canal d ’alimentation Le perméat est drainé en spirale vers le collecteur Page 2 / Le magazine de la chronique scientifique / n °4 / Juillet-Août 2005 / Le dessalement de l’eau de mer Eau pure + eau de mer filtrée Eau de mer H2O Eau pure OSMOSE Eau de mer H2O OSMOSE INVERSE Le dessalement de l’eau de mer Pilote de filtration à Perth (Australie). Zoom sur les programmes de Recherche et de Développement La Recherche & Développement de Veolia Environnement travaille essentiellement sur la définition de la filière de traitement, notamment le prétraitement de l’eau pour réduire les dépenses en énergie. Recherche sur les membranes Filière de prétraitement d’un pilote de dessalement à Tawellah (Emirats Arabes Unis). Colmatage des membranes Le dépôt de matières entraîne la formation d’une couche à la surface de la membrane ce qui a pour conséquence de réduire le débit de filtration et donc les performances de l’opération. Le colmatage est responsable dans trois quarts des cas du vieillissement de la membrane. La membrane est le point clef des installations par osmose inverse. Son remplacement représente 5% du coût de traitement. Or la séparation membranaire (ou osmose) possède un talon d’Achille : le colmatage de la membrane. L'objectif du Centre d’Expertise Membrane (ARAMIS), créé en 2004 à Anjou Recherche (centre de recherche sur l’eau de Veolia Environnement) est d’identifier les matières responsables du colmatage et de préconiser les solutions de traitements efficaces et pérennes (prétraitement et cycles de nettoyage adaptés). Recherches sur le prétraitement Des travaux sont actuellement en cours à Toulon au Cap Sicié. L’objectif de l’étude est d’optimiser les performances des procédés de filtration pour le prétraitement de l’eau de mer. Ces essais permettront de connaître avec précision l’impact de différents paramètres sur la qualité de l’eau prétraitée (vitesse de filtration, hauteur de couche de matériaux filtrants…). Des essais ont également eu lieu (entre février et août 2004) sur le site d’Abu d’Abhi, en Arabie Saoudite, dans le cadre d’un projet industriel. L’étude pilote a permis de démontrer l’efficacité et la robustesse des solutions de prétraitement sélectionnées. Ces procédés aboutissent à de très bons résultats car ils permettent d’éliminer 90 à 99% des particules solides et la quasitotalité des micro-organismes. Une thèse avec l’Université de Poitiers et l’Institut océanographique de Banyuls a notamment pour but d’identifier les composés susceptibles de colmater les membranes d’osmose inverse. Avantages des procédés à membranes (pour la production d’eau potable à partir de l’eau de mer) Avant tout, ils permettent de diminuer par 3 ou 4, les consommations énergétiques par rapport au dessalement thermique. Toutefois, les chercheurs de Veolia Environnement travaillent à améliorer certains points : n gérer les résidus (concentrat) pour améliorer le bilan environnemental, n augmenter le rendement : le volume d’eau pompée est 2 à 3 fois supérieure au volume d’eau potable produite par le dessalement, n maîtriser les phénomènes de colmatage, n réduire les coûts de fonctionnement. Page 3 / Le magazine de la chronique scientifique / n °4 / Juillet-Août 2005 / Le dessalement de l’eau de mer Le dessalement de l’eau de mer Fanny Demulier, Steeve Sierra, Martin Geisler, Pierre-Yves Maurie et Hervé Suty, Pour en savoir plus… Fiche technique vidéo La chronique scientifique n°4 Découvrez en 4 minutes sur l’intranet du groupe, les recherches menées par Veolia Environnement sur le dessalement de l’eau de mer. Hervé Suty directeur d’Anjou Recherche, Groupe Veolia Environnement Témoin : Pierre-Yves Maurie rédacteur, RMTT – Veolia Transport Scénario : Marie-Odile Monchicourt / 3B Conseils Durée : 4’ 30 Tournage : 10 juin 2005 Lieu : Amphitria, Cap Sicié. SIRTTEMEU, Générale des Eaux Préparation : Fanny Demulier, Anne Dequeker-Cormont, Caroline Bellecourt, Edith Weitz Direction de la Communication de la Recherche, du Développement et de la Technologie Veolia Environnement Réalisateurs : Steeve Sierra, Martin Geisler Producteur délégué : Bruno Plasse, Dawa Productions Conception et réalisation du magazine : 3B Conseils Graphisme : Bernadette Coléno/3B Conseils Producteur : Veolia Environnement Date de la mise en ligne : Août 2005 Expert : Remerciements à Philippe Rey Ingénieur, Philippe Marteil et Jean-Christophe Schrotter, directeurs de programme, Anjou Recherche et aux équipes de Veolia Eau à Cap Sicié France. Partenariats n Caractérisation des matières organiques ESIP Poitiers esip.univ-poitiers.fr n Caractérisation du milieu marin Observatoire Océanologique de Banyuls-sur-Mer www.obs-banyuls.fr/ n Electrochimie et caractérisation des surfaces membranaires Université d’Angers : GIRPA Beaucouzé www.univ-angers.fr n Outils d’aide à la décision Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, spécialité énergétique et le GIRPA, spécialité devenir des polluants dans l’environnement. www.epfl.ch Les sites en exploitation : quelques références n Palma de Majorque (Espagne) n Abu Dhabi (Emirats Arabes Unis) n Ashkelon (Israël) Ressources documentaires Veolia Environnement Audiovisuel n La chronique scientifique N°4 : Le dessalement de l’eau de mer (voir encadré) n Veolia Environnement Vidéo conférence sur Ashkelon en Israël par Bruce Durham, Veolia Water, AFAS – 50è anniversaire du CERN http://agenda.cern.ch/askArchive.php 7 mai 2004 Brochure : Développer les ressources alternatives. Dessaler l’eau de mer Sites spécialisés Les précédentes chroniques scientifiques 1 – Les légionelles 2 – Le bioréacteur 3 – La pile à combustible www.edsoc.com European Desalination Society www.cea.fr Commissariat d’Energie Atomique www.veoliawatersystems.com Veolia Water www.commission-europeenne.fr Commission Européenne Page 4 / Le magazine de la chronique scientifique / n °4 / Juillet-Août 2005 / Le dessalement de l’eau de mer Publications n Impact of conventional pre-treatment prior reverse osmosis desalination membranes on fouling potential of seawater LCEE/ESIP UMR CNRS 6008 Université de Poitiers,France. Sophie Rapenne et Hervé Gallard. Observatoire Océanologique de Banyuls, Université Pierre et Marie Curie, UMR CNRS No 7621 and 7628, Banyuls-sur-Mer Cedex, France. C. Courties, J.-P. Croué, P. Lebaron Anjou Recherche, Veolia Water Research Center Maisons-Laffitte – France Sophie Rapenne, Jérôme Leparc Publications présentées à la AWWA Membrane Technology Conference, Phœnix, mars 2005 n Tools for membrane autopsies and antifouling strategies in seawater feeds (revue) University of Angers, UMR-MA105, Laboratoire des Sciences de l'Environnement et de l'Aménagement, M. Pontie, A. Thekkedath, J. Duchesne, University of Poitiers, LCEE/ESIP UMR-CNRS 6008, Sophie Rapenne Anjou Recherche, Veolia Water, Valérie Jacquemet, Jérôme Leparc, Hervé Suty. n La mer, terreur et fascination, Bibliothèque Nationale de France, Seuil 2004 Crédit photographique Barthélemy l’Anglais, Livre des propriétés des choses, photographie tirée de l’ouvrage, La mer, terreur et fascination, Bibliothèque Nationale de France, Seuil 2004 (page de couverture). Cadre réglementaire Directive cadre européenne (DCE) du 22 décembre 2000, transposée en droit français par la loi du 21 avril 2004 Projet de loi sur l’eau - Bruno Sido Contact Direction de la Recherche, du Développement et de la Technologie 36, rue de Liège 75008 PARIS - France Tél. : +33 (0) 1 71 75 06 60 Fax. : +33 (0)1 71 75 10 40 Mail : [email protected]