Impact de la globalisation sur la régionalisation : approche analytique

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Impact de la globalisation sur la régionalisation : approche analytique
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Impact de la globalisation sur la
régionalisation : approche
analytique
Yahya yahyaoui
Professeur à la Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales
d’Oujda (Maroc)
Senoussi SEID ABAKAR
Doctorant à la Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales
Oujda (Maroc)
[email protected]
Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3
éme
numéro : septembre 2014
Yahya YAHYAOUI & Senoussi SEID ABAKAR
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Résumé
Impact de la globalisation sur la régionalisation
Cet article est consacré à l’étude de l’impact de la globalisation sur la
transformation des pays et des villes en relation avec la régionalisation. Notre
analyse s’appuie sur l’évolution des Investissements Directs Etrangers (IDE) des
Firmes Multinationales (FMN) à l’origine de la globalisation, et de la recrudescence
des formes de l’intégration économique régionale. La globalisation exige de la
flexibilité pour permettre aux Firmes Multinationales de démarrer leurs processus
potentiels de délocalisation/relocalisation de leurs activités en interaction entre
les éléments du triptyque IDE-firmes multinationales-territoires d'accueil. D’un
côté, les particularités de la régionalisation dans la globalisation nous paraissent
résulter du processus institutionnel aboutissant à des formes de régionalisation ou
d'accords politiques intergouvernementaux qui ont un rôle catalyseur pour offrir
l’avantage compétitif des firmes multinationales; et d’un autre côté, l'attractivité
des territoires reposant sur une série d'avantages absolus de localisation porte une
importance d'autant plus fondamentale que les firmes retiennent, comme
territoires d'accueil de leurs investissements, uniquement ceux qui renforcent leur
compétitivité.
Mots clés : Globalisation, Investissement Direct Etranger (IDE), Régionalisation,
Avantages compétitifs de Firmes Multinationales (FMN), Avantages absolus de
territoires.
Abstract
Impact of globalization on regionalization
This article focuses on the consequence of globalization on the
transformation of countries, cities into regionalization. Our analysis is based on the
evolution of Foreign Direct Investment (FDI) of Multinational Companies origin of
globalization discussed extensively in the economic literature, talked and renewed
forms of regional economic integration. Globalization requires flexibility for
Multinational Companies start their potential relocation process or relocation of
their activities in interaction between elements of the tripartite FDI- multinational
firms - territories. On the one hand , the characteristics of regionalization in
globalization seems arise following the institutional process leading to forms of
regionalization policies or intergovernmental agreements that provide a catalyst
for the competitive advantage of multinational firms , and other hand, the
attractiveness of regions based on a series of absolute location advantages carries a
much more fundamental that companies retain as host territories of their
investments, only those that strengthen their competitive importance.
Key words:
Globalization, Foreign Investment, Regionalization,
Multinationals Competitive Advantage, territories Absolute Advantage.
Firms
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Introduction
La globalisation a entraîné une redéfinition des règles du jeu des stratégies
d'investissement des firmes multinationales et a intensifié la concurrence
internationale sur le marché des biens et services et entre les territoires
potentiellement attracteurs des implantations des entreprises.
Cette globalisation fait référence, d'une part, au commerce international
qui a connu une croissance soutenue depuis les années 1970, et d'autre part,
à la mobilité transfrontalière du capital financier et du transfert technologique.
Elle est accompagnée d'une forme d'hégémonie des conceptions néolibérales en
matière d'attraction des Investissements Directs Etrangers (IDE) qui s’est imposée
au début des années 1980.
Cette thèse néolibérale est caractérisée par la suppression progressive des
barrières commerciales et des obstacles à la mobilité des facteurs.
L'internationalisation des échanges commerciaux et la répartition des cycles de
production entre pays ont contribué à la formation de zones économiques
intégrées ou en voie d’intégration, ce qui a permis de libérer les choix de
localisation des entreprises.
Ainsi, pour attirer les IDE, la région doit avoir une série d'avantages de
localisation, comme le profit, la proximité, la région d'accueil des investissements,
la main d’œuvre, la qualité des futurs sites et l’image de marque, etc. qui
renforcent la compétitivité des firmes multinationales.
Cette dialectique de l'économie globale comme nouvelle configuration des
pays est tributaire de synchrone entre les composantes du tripode IDE-firmes
multinationales- régions d'accueil.
Par ailleurs, les analyses de localisation intéressent de plus en plus les
responsables publics qui cherchent à attirer des investisseurs, à susciter le
développement régional ou local et à connaître les nouveaux besoins des
entreprises en matière de localisation.
La première section de cet article traitera de la spécificité de la globalisationrégionalisation et du point de vue des économistes, des politologues, des
sociologues et des géographes sur ce sujet. La seconde sera centrée sur l'examen
des interactions entre les trois (3) composantes : IDE-firmes multinationalesrégions d'accueil qui ont fait évoluer les deux concepts de globalisation et de
régionalisation.
1. Les concepts de globalisation et de régionalisation
L’internationalisation repose sur des échanges de diverses natures,
économiques, politiques, culturels entre nations qui peuvent être en situation de
paix ou en conflit, en situation de complémentarité ou encore de concurrence.
La mondialisation fait référence à l’extension des échanges internationaux et
transnationaux à l’échelle mondiale, aboutissement de la rapidité des transports et
des moyens de communication dans la civilisation contemporaine.
La globalisation est un nouvel espace démographique, géographique
délocalisé constitué des activités économique, politique, sociale et culturelle.
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Les premières réflexions sur ce sujet ont été conduites par BUZZELL (1968),
puis BARNET,R and MULLER (1975), SORENSON, R WIECHMANN, U (1975). En
1997, le Fonds Monétaire International (FMI), a défini la globalisation comme «
la croissante interdépendance économique des pays du monde par le biais de
transactions transfrontalières de biens, de services et de flux de capitaux
augmentant en volume et en variété, et par le biais de la diffusion rapide et
étendue de la technologie ».
Aujourd’hui, cette définition présente certaines limites : d’abord, elle exclue,
les entreprises,
les
associations
professionnelles,
les
organisations
internationales, etc. qui ont un rôle important dans le développement de
l'intégration supranationale des économies. Ensuite, la globalisation a induit des
modes opérationnels nouveaux imposés par l'ouverture des frontières
(coopérations inter-firmes, décomposition-recomposition de la chaîne de valeur,
délocalisations…). Et enfin, la globalisation a provoqué le décloisonnement des
marchés nationaux.
Contraints de répondre aux exigences de l’environnement interne et
externe, les Etats ont été amenés à uniformiser leurs lois et leurs villes pour attirer
l’IDE et accueillir les FMN dans leur région.
1.1 Les particularités de la régionalisation dans la globalisation
La régionalisation est un terme qui se rapporte à plusieurs formes allant de
la régionalisation administrative, régionalisation par les collectivités locales
existantes, décentralisation régionale, régionalisation politique, ou autonomie
régionale (régionalisme institutionnel), jusqu’ à la régionalisation par les autorités
fédérées.
Cette reconfiguration de villes en bloc géographique consiste à les
homogénéiser pour les pousser à démontrer leurs atouts, par la mise en place de
politique de développement local notamment l’offre de biens et services publics
fournis par l’Etat et les collectivités locales, comme les infrastructures, les formes
d’organisations socio-économiques, l’accessibilité des marchés, la formation et les
coûts de la main d’œuvre, la présence de sous traitants, de donneurs d’ordre et de
fournisseurs de services, le climat, la proximité de la mer ou de la montagne, etc.
Dans cette ouverture, l’espace géographique attire aujourd’hui les décisions
des entreprises, les coûts de transport et la segmentation des marchés
internationaux contraignants des choix de localisation qui s’imposent à elles en
réduisant sensiblement leurs zones d'influence.
Cette régionalisation a pour objectif de créer un environnement propice
pour captiver les flux d'investissements directs et de capitaux comme conditions
préalable et fondamentale à la réussite du développement local.
Il faut également souligner que les facteurs politiques, géographiques,
fiscaux, techniques et macroéconomiques restent des critères intangibles.
Cependant, lors de toute étude, les régions et pays sont en tout état de cause mis
en concurrence, classés et notés par les FMN à partir de leurs priorités en matière
de localisation.
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En outre, les performances économiques des régions s’expliquent par la
stabilité politique et aussi par l’existence de structures spécifiques de
communication et de réseaux d’acteurs, c’est-à-dire de cultures historiques
régionales avec leurs profils de communication, de conflits et de coopération.
Suivant cette démarche, les régions deviennent alors un intermédiaire entre
les villes en vue de renforcer les forces nécessaires pour leur positionnement dans
le contexte d’une concurrence tant nationale qu’internationale.
La régionalisation reste porteuse d’avantages notamment en termes de
marchés, d’emplois, de coûts, des autorisations d’installation de complexes
commerciaux ou de loisirs, ou bien de zones industrielles et économiques. Ces
avantages permettent aux entreprises de s’inscrire au niveau international tout en
recherchant des connexions et la formation de clusters au niveau régional afin de
produire de manière plus souple, plus rentable et mieux répondre aux attentes de
leurs clients.
1.2 Relation entre IDE-firmes multinationales-territoires d'accueilglobalisation
La logique d’attractivité des territoires/compétitivité des firmes repose sur la
vision smithienne de la spécialisation internationale et de l'avantage absolu source
des gains et de libéralisation des échanges commerciaux.
Le choix d’une région au sein d’un pays sera davantage conditionné par les
offres des territoires et les demandes des firmes seront en adéquation, ce qui
rendra moins volatiles les IDE.
La figure ci-après nous illustre l’interaction entre globalisation et
régionalisation.
1.3 Lien entre Globalisation, FMN et IDE
La nature de cette relation tripartite est la FMN qui sera à l'origine de l’IDE.
L’évolution et les formes d’IDE sont la conséquence de la globalisation. A ce titre,
DIORY , M a mentionné que la multinationalisation des entreprises serait le produit
de quatre phases d'évolution:
1. L'étape de l'exportation simple: la phase commerciale;
2. L'étape de l'implantation multidomestique : la phase de délocalisation;
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3. L'étape de la coordination régionale: la phase de l'adaptation régionale;
4. L'étape de la globalisation : la phase de l'intégration mondiale.
Pendant le premier stade, « l'internationalisation s'opère exclusivement par
exportation en
commençant par le pays d'origine, alors que l’opération
d'implantation à l'étranger est nulle ou limitée
à des
bureaux de
représentation commerciale». À ce niveau, l'entreprise en question n’entraine
pas réellement des flux d'IDE.
La deuxième étape est caractérisée par l’implantation. «Les réseaux
commerciaux et logistiques se développent sur les marchés d'exportation, suivis
effectivement de l'implantation de quelques sites d'assemblage. A ce stade, nous
remarquons quelques délocalisations opérées vers des pays à bas coûts de
production. Cependant, la production à haute valeur ajoutée, ainsi que les
fonctions de recherche et de décision demeurent localisées dans le pays
d'origine. L'activité des différentes filiales nationales est peu ou pas
coordonnée ».
Durant la troisième phase, « la part de production et du chiffre d'affaires à
l'étranger augmentent sensiblement. Avant cette étape, l'activité des filiales
étrangères était autonome. Pendant cette phase, elle est restructurée sur une
base régionale. En outre, nous observons que l’appel à des fournisseurs et soustraitants locaux s’intensifie au détriment des exportations à partir du pays
d'origine. A ce niveau, l'IDE se multiplie, suivant des formules d'implantation
(acquisitions, joint-ventures, alliances, etc.). Ce mouvement est accompagné par
l’installation des centres de recherche à l'étranger pour permettre une meilleure
adaptation des produits aux marchés locaux ».
Durant la dernière phase, « les ventes dans le pays d'origine ne symbolisent
plus qu'une part minime du chiffre d'affaires ; puisque les exportations à partir
du pays d'origine diminuent sensiblement, alors que la gamme complète des
modes d'internationalisation est utilisée, en fonction des nécessités, pour
permettre le développement des implantations à l'étranger.
Ainsi, chaque État souhaite désormais attirer le maximum de flux et
augmenter ses stocks d'IDE. Pour cela, l’État doit donc modifier ses stratégies en
conséquence, comme l’indiquent DEBLOCK, C. BRUNELLE, D. et RIOUX, M « les
marchés nationaux sont aujourd'hui presque entièrement décloisonnés et
l'économie mondiale est plus intégrée que jamais. Force est de constater
qu'entreprises et gouvernements ont changé leurs stratégies. Alors que les
premières, tirant parti de ce nouvel environnement, réorganisent leurs activités en
fonction d'une concurrence devenue globale, les seconds, loin d'être des acteurs
passifs de la globalisation, se sont de leur côté engagés dans des stratégies qui
visent, elles aussi, à répondre aux exigences de ce nouvel environnement.
En particulier, nous avons observé que pour les entreprises la poursuite de
l'efficacité passe de plus en plus par les voies d'une intégration en profondeur de
leurs activités. Tandis que, parallèlement les États ont de plus en plus tendance à
lier souveraineté avec compétitivité ».
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Désormais, nous assistons à une globalisation des marchés des biens et
services qui se sont traduite par une intensification de la concurrence
internationale et locale en matière d’attraction des flux d’IDE.
1.4-Firmes Multinationales et Investissements Directs Etrangers
En 1984 HELPMAN et MARKUSEN ont proposé leurs modèles des
différentes incitations pour l’IDE en faisant la distinction entre l’IDE vertical et
l’IDE horizontal.
Pour HELPMAN (1984) les FMN pourraient avoir intérêt à fragmenter
géographiquement leurs activités. Les différences en dotation relative et de
rémunération des facteurs et les différences assez accentuées des intensités
factorielles des différents stades de la production encourageraient les firmes
multinationales à fractionner leur production, en localisant les activités intensives
en main-d'œuvre non qualifiée dans les pays à bas salaire et leurs activités
intensives en travail qualifié comme les R&D, marketing et la finance dans les
pays possédant une main d’œuvre qualifiée. Ce modèle signale trois indications:
• les différentes phases de la production ont lieu dans des pays différents;
• les IDE sont véhiculés entre les pays du Nord vers et les pays du Sud;
• les IDE et le commerce seraient complémentaires.
A l’instar de HELPMAN, dans la même année MARKUSEN (1984) a préconisé
un modèle considérant l’IDE comme une stratégie permettant aux FMN d’avoir
accès aux marchés des pays d’accueil de l’investissement à un moindre coût. Cellesci seraient incitées à détourner les droits de douane et à décharger les coûts de
transport en installant des usines identiques et en produisant les mêmes biens
dans des pays différents (IDE horizontaux). Il s’agit d’une stratégie rationnelle
lorsque les contraintes au commerce sont élevées. Ainsi, ce modèle prévoit que
la taxation de restrictions commerciales encouragerait les IDE horizontaux et que
ceux-ci se substitueraient au commerce. Dans le cas inverse, dans une région où
les biens et services peuvent circuler librement, il n’y aura pas d’IDE à condition
que la péréquation des prix des facteurs soit satisfaite. En conséquence,
l’ouverture commerciale (réduction de droits de douane ou accords
commerciaux) diminuerait les entrées d’IDE.
En 2002, MARKUSEN a présenté un modèle théorique connu sous le nom
de « knowledge-capital model » qui part de l'idée de l’existence des actifs à base de
connaissances créant des économies d’échelle au niveau de la firme. Ces actifs sont
la R&D, le marketing, le travail scientifique et technique, la différenciation de
produits, les finances et le management. Les caractéristiques de ces actifs sont les
suivantes:
• Le découpage: les services des actifs à base de connaissances peuvent
être séparés géographiquement de la production et ils peuvent être fournis aux
usines à l’étranger à un coût supposé faible ;
• L’efficacité du travail qualifié: les actifs à base de connaissances sont
intensifs en travail qualifié par rapport à la production finale ;
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• L’association: les actifs à base de connaissances peuvent être scindés entre
les différentes usines sans réduire les services fournis à une usine en
particulier tels que les biens publics.
La conclusion à tirer de cette observation est que les symptomatiques (1) et
(2) sont le fondement des incitations des entreprises multinationales préférant
localiser leurs sièges sociaux et leurs usines dans des pays différents. Les
premiers se localiseront là où le travail qualifié est abondant et les deuxièmes dans
les pays où le travail non qualifié est bon marché. Par contre, la caractéristique
publique des actifs à base de connaissance à l’intérieur de la firme (3) incite les
entreprises à avoir des usines produisant les mêmes biens dans des pays différents.
1.5-Régionalisation et Firmes Multinationales
Depuis 1986, les politiques protectionnistes adoptées dans la plupart des
pays ont cédé la place à un processus de libéralisation. Cette politique a stimulé les
stratégies d'investissement des firmes multinationales et la concurrence entre les
régions potentiellement attractrices des implantations d’investissements des
entreprises étrangères. La concurrence au plan local se voit de plus doublée par
une concurrence entre villes-régions, qui pour partie s’exerce également au niveau
international. Dans cette transformation, la quête d’une cohérence spécifique de
chaque région est justifiée et largement acceptée dont l’objectif est de favoriser
un développement régional porté par les villes .
Dans un passage en 1999, ANDREFF.W disait la « logique d'attraction des
IDE s'est largement substituée aux politiques étatiques de restrictionréglementation des implantations des firmes étrangères ».
La littérature économique nous montre que les choix de localisation des
firmes dans le cadre de l'économie globale tiennent compte des trois (3)
comportements stratégiques des entreprises en matière d'IDE qui sont:
- une stratégie primaire ou d'accès aux ressources naturelles du sol et du
sous-sol;
- une stratégie horizontale ou de marché;
- une stratégie verticale ou de minimisation des coûts.
La première a pour but la quête d'approvisionnements manquant dans le
pays d'origine, ou encore ces ressources sont de meilleure qualité et/ou de
moindre coût à l'étranger par rapport au pays d’origine.
la stratégie de marché a pour objectif de produire d’un côté, pour le
territoire d'implantation une gamme de biens qui est reproduite intégralement ou
partiellement par rapport à celle de la maison-mère tout en tenant compte des
caractéristiques locales de la demande, et d'un autre côté, elle s’applique à des
pays où le niveau de développement est semblable c'est-à-dire les investissements
considérés sont de type Nord–Nord, croisés et intrabranches.
Quant à la troisième stratégie dite verticale, vise à rationaliser la
production et génère des flux d'investissement de direction Nord-Sud encouragés
par les divergences de niveau de développement des pays partenaires, ce qui
donne lieu à des afflux d'investissement de caractère simultanément unilatéral et
intersectoriel.
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1.6-Régionalisation et attractivité des IDE
En 1996 A. GILES a signalé que « la décentralisation de l'État se réfère au
processus par lequel les politiques nationales sont ajustées à l'économie
mondia1isée. L'importance que prennent les investisseurs influence les
gouvernements dans la gestion d'une saine économie ».
En outre, le Bureau International du Travail en 1997 a dénoté que les
autorités publiques doivent préserver une crédibilité financière au risque de voir
les investisseurs se retirer de sorte que les États deviennent en concurrence pour
l'attrait des capitaux étrangers.
Dans ce cas, les États sont contraints à reformer leur cadre réglementaire
de manière à répondre aux besoins du marché pour inciter les FMN à
privilégier un espace national ou régional plutôt qu'un autre dans l'objectif de
préserver les emplois générés et les retombées économiques qui en
découlent.
Cette politique de décentralisation permet à la région de prendre des
initiatives par rapport au gouvernement central.
En outre, les enjeux socio-économiques auxquels doivent répondre la
région peuvent dissuader les investisseurs dans leur décision d’investir, et ce à
cause de l’incertitude du climat d’affaires que cela engendre. A contrario, un
contexte économique et social propice peut s’avérer être un atout pour la
région.
2. Avantages Absolus Des Territoires Et Avantages Competitifs Des Firmes
Quels sont les facteurs importants dans l’investissement à l’étranger qui
expliquent les débouchés du territoire national en termes d’activités économiques?
En s’appuyant sur les travaux de M. PORTER (1988) qui a souligné que les
avantages compétitifs peuvent résulter de deux sources: celles qui réduisent les
coûts de production (innovations technologiques ou coûts des facteurs de
production) et celles qui permettent la différenciation des produits (marques,
publicité, concurrence monopolistique). Les nouvelles approches économiques de
Paul KRUGMAN (1991) dans la Nouvelle Géographie Economique et DUNNING en
2009 permettent de mieux comprendre la localisation des FMN en y intégrant les
problématiques reliées au contrôle de la chaîne de production au niveau des
régions d’investissement sélectionnées.
2.1 Avantages absolus des territoires
Les avantages absolus de localisation se basent sur l'attractivité des
territoires.
Dans un premier temps, où le marché local doit offrir de nouvelles
opportunités aux FMN, le choix de localisation initiale sur un marché étranger
répond à deux argumentations économiques : l’offre et la demande. En ce qui
concerne la demande, la décision d’implantation au sein d’un marché est
d’autant plus facilitée par sa taille, sa richesse (exprimée en revenu par
habitant) et sa croissance. ANDREF W, en 2003, a souligné que cette démarche
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axée sur la demande se fonde sur des préférences de consommateurs et
l’accès à un marché attractif.
Coté offre, la taille du marché permet d’offrir des économies d’échelle dans
la production et par conséquent, d’amortir les coûts fixes d’implantation.
Dans un deuxième temps, les théories de l'économie internationale et plus
spécifiquement celle de RICARDO nous enseigne que les avantages comparatifs
permettent de générer des économies d’échelle. Dans ce cas, la proximité du
marché et le coût des matières premières, de l’énergie et de l’eau, etc. désignent
les avantages comparatifs que doit avoir la région. Comme l’indique DUNNING
(1988) « les économies d’échelle sont réalisées en se localisant à proximité
des ressources ». En 2011, MERENNE-SCHOUMAKER , ajoutent que « les
économies d’échelle réalisées par la qualité, la régularité et la sécurité de
l’approvisionnement en inputs de production constituent des facteurs importants
dans la localisation des activités d’une entreprise ».
Dans un troisième temps, pour pouvoir organiser le déplacement des
marchandises et du personnel, la qualité des infrastructures (route, chemin de fer,
port, aéroport, qualité des réseaux électriques et téléphoniques, internet, etc.)
disponible sur le territoire local influencent les choix de localisation des FMN. D
DUNNING en 2009, explique l’importance du rôle des coûts de transport et de
communication dans l’amélioration de la coordination des activités de FMN
suite aux décentralisations de leur production.
Dans un quatrième temps, les économies de main d’œuvre peuvent
constituer l’avantage de la région choisie pour s’y implanter. En d’autre terme, le
principal avantage de la région est sa main d’œuvre: vaillante, abondante,
intéressée à apprendre, polyvalente, son taux de rotation, le bilinguisme, etc. Les
FMN exigent que cette disponibilité de la main d’œuvre, en termes de
compétences, soit en adéquation avec leurs besoins.
Le dernier critère est l’accessibilité aux terrains et bâtiments. Les prix de ces
derniers sont des éléments décisifs dans la localisation d’une entreprise dans une
région. Les FMN sollicitent des terrains de plus en plus grands ayant une proximité
avec un environnement d’affaires attrayant et notamment avec les parcs
industriels, etc.
Une région désireuse d'attirer des IDE doit mettre en place une politique
économique multidimensionnelle à même de susciter ces avantages absolus de
territorialisation.
La recherche d’avantages comparatifs s’inscrit dans la dialectique
d’implantation des FMN sont des logiques territoriales de différenciation tant au
niveau de la stratégie globale (bénéficier de la taille du marché d’implantations en
Asie, Europe, Afrique, etc.) qu’au niveau de préférence des régions, villes ou sites
qui conviennent avec leurs cahiers de charge.
2.2 Avantages compétitifs des firmes
La recherche d’avantages comparatifs s’inscrit dans la dialectique
d’implantation des FMN sont des logiques territoriales de différenciation tant au
niveau de la stratégie globale (bénéficier de la taille du marché d’implantations en
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Asie, Europe, Afrique, etc.) qu’au niveau de préférence des régions, villes ou sites
qui conviennent avec leurs cahiers de charge.
Les motivations derrière l'internationalisation de la production des FMN sont
multiples, mais il est tout de même possible d'évoquer la quête d'avantages
comparatifs qui sont spécifiques à différentes localités. En 1993 D. M.WELLS , a
mentionné que « la globalisation conduit les entreprises à investir aux
endroits jugés profitables » de sorte que les usines du groupe sont misent en
compétition entre elles.
Beaucage (2000) a indiqué que « les firmes multinationales « répartissent
dans les pays où cela se révèle avantageux la production de leurs produits, de
certaines composantes de ces produits ou de certaines étapes de leur
processus de production».
Dans cette optique, la FMN fragmente sa production dans la perspective
d’accroître son rayonnement sur le marché et sa rentabilité financière. Pour
cela, les sièges sociaux procèdent à des transferts de production. Ces transferts
peuvent être décrits de différentes façons: délocalisation, relocalisation, soustraitance domestique ou internationale, consolidation d’activité, externalisation
et internalisation.
En outre, la compétitivité- prix reste une dimension importante des
performances des entreprises filiales de firmes étrangères sur les marchés
d’exportation, comme sur le marché national, dépendent notamment de
l’évolution des prix des biens produits localement par rapport à ceux de la
concurrence étrangère.
2.3 Régionalisation et dynamique de promotion des IDE
La conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement
(CNUCED) déclarait en 2009 avoir recensé près de 82 000 entreprises
multinationales comptant 810 000 filiales étrangères à travers le monde. Elles
n’étaient que 11 000 avec 82 000 filiales étrangères en 1977. Elles
emploieraient quelques 77 millions de personnes dans le monde.
Le nouveau rapport sur les investissements dans le monde (2012), expliquait
que les IDE offraient des opportunités et des risques. Leur montant global est
estimé de 1 500 milliards de dollars.
Les flux d'entrées d’IDE ne sont pas les mêmes pour toutes les régions,
mais ils apparaissent favorables dans les pays où les salaires compétitifs pourraient
y attirer un nombre croissant de projets d'investissement à la recherche
d'efficacité productive ou axés sur l'exportation.
Cette globalisation et l’omniprésence du commerce international
s’expliquent d’une part, par la profonde mutation de l’environnement
économique mondial depuis la Seconde Guerre mondiale, et d’autre part, par la
suppression des entraves tarifaires au commerce entre les pays et les accords
économiques régionaux qui ont stimulé le déplacement des activités
commerciales. Au fur et à mesure que le commerce se mondialisait, les
entreprises jouissaient d’un accès à un espace de « jeu » de plus en plus
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riche, tant en terme d’opportunités d’affaires que de ressources humaines,
technologiques et de matières premières.
Parallèlement, une tendance à la surenchère, menée par les Etats, quant aux
avantages institutionnels, fiscaux et financiers fournis aux investisseurs étrangers a
été notoirement observée. Cette conception qui conduit à considérer les incitations
comme la panacée en matière d'attraction des investissements est largement
inefficiente. D'une part, une grande majorité des études empiriques consacrées à
ce sujet montre manifestement que la présence d'un système d'incitation n'est
qu'au mieux un déterminant subalterne influençant la décision d'investir à
l'étranger (UNCTAD, 2012); et d'autre part, une firme multinationale tend à
privilégier l'évaluation de la rentabilité économique et non financière d'un projet
de localisation. Ce faisant, l'existence d'exonérations fiscales et autres aides
financières est négligeable pour l'investisseur, puisque sa durée effective
(traditionnellement 3 à 5ans) est fondamentalement plus courte que la
temporalité présagée de l'appréciation de l'implantation (généralement le moyenlong terme).
L’étude de l’OCDE a permis de faire ressortir deux grandes lignes de
stratégies en matière d’attraction des IDE utilisées par les pays : la promotion par «
les incitations » et la promotion par « les règles ».
La forme la plus courante des incitations est l’incitation fiscale. Celle-ci
consiste en la réduction du taux de l’impôt sur les bénéfices que doivent payer
certaines catégories d’investisseurs : les exonérations temporaires d’impôts, les
exonérations ou les ristournes de droits de douane, les possibilités
d’amortissement accéléré, les abattements pour investissement ou
réinvestissement, les réductions spécifiques sur les bénéfices bruts d’exploitation
pour le calcul de l’impôt sur les sociétés et les réductions des prélèvements de
sécurités sociales.
La deuxième forme est l’incitation financière dont les plus importantes sont
les subventions, les prêts bonifiés et les garanties de prêts : Les subventions à la
formation de la main d’œuvre, les subventions salariales, la fourniture gratuite de
terrains ou d’installations sur site, les tarifs préférentiels d’eau et d’électricité et les
garanties de prêt pour les lignes internationales, sont donc classés parmi les
incitations financières.
Les formes de stratégie fondées sur des règles couvrent un groupe plus large
et plus hétérogène d'interventions du gouvernement, qui vont de la modification
de la réglementation relative aux droits des travailleurs ou à la protection de
l'environnement, à la signature de traités d'intégration régionale avec les pays
voisins. Parmi les autres moyens du genre utilisés, il convient de citer une meilleure
protection des droits de propriété intellectuelle, le renforcement de l'Etat de droit
et l'amélioration des systèmes judiciaires, la création de zone franches ou de zones
économiques spéciales régies par une législation distincte du reste du pays, la
déréglementation des marchés et la libéralisation des règles qui régissent les
échanges et l'investissement.
Impact de la globalisation sur la régionalisation …
183
Il convient de noter que les règles qui touchent la réglementation du travail
et la protection de l'environnement se sont révélées inefficaces en matière
d'attraction des investissements étrangers, contrairement aux autres règles.
Conclusion
La globalisation de l’économie a bouleversé les modèles classiques de
production mettant en question les entreprises et les régions. Depuis quelques
décennies, nous assistons à une migration d’entreprises vers des pays offrant une
main d’œuvre à faible salaire. Ces mouvements transfrontaliers et
transcontinentaux de capitaux, d’équipements et de technique sont la résultante
de la réorganisation de la production spatiale de la production de biens. Ce
déplacement de la production a eu des effets négatifs sur le marché de l’emploi
(chômage, manque de recette fiscale, etc.) dans les pays où les entreprises ont
délocalisé certaines activités. Quand la globalisation se porte bien, la
régionalisation suit la cadence et vice versa tout en générant une tendance liée à la
conception de stratégies FMN impulsant progressivement les potentialités de
déterritorialisation entre les IDE et les territoires d'accueil.
La crise financière de 2008 a frappé l’ensemble des économies mondiales et
a ralenti des activités économiques. Cette stagnation a mis en péril les chaînes de
valeur de production mondiale. Aucun pays connecté au commerce international
n’a pu échapper à cette morosité constatée. En outre, la hausse des tensions
financières et les craintes relatives à l’économie mondiale ont diminué les cours
des matières premières, ce qui a pour corollaire une pause dans la globalisation.
Les conséquences de ce déclin des activités économiques se font sentir au
niveau de la régionalisation : beaucoup d’entreprises ont fait faillite. La fermeture
d’usines, les menaces sur les emplois directs, la relocalisation, les pertes
d’emplois, le transfert de production, les pertes de contrat... Ainsi, certaines FMN
ont été incitées à rapatrier certaines activités de pays, de provinces, de régions
et de localités pour se protéger contre ces possibles perturbations dans leurs
relations avec leurs sous-traitants régionaux.
Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3
éme
numéro : septembre 2014
Yahya YAHYAOUI & Senoussi SEID ABAKAR
184
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Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : 3
éme
numéro : septembre 2014