o Item 263 – Myasthénie - Faculté de Médecine et de Maïeutique

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o Item 263 – Myasthénie - Faculté de Médecine et de Maïeutique
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Item 263 – Myasthénie
MYASTHENIE
I. SYNDROME MYASTHENIFORME
DE LAMBERT-EATON
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I. AUTRES ANOMALIES DE LA
TRANSMISSION NEUROMUSCULAIRE
Objectifs pédagogiques
Nationaux
◗ Diagnostiquer une myasthénie.
CEN
Connaissances requises
◗ Connaître les principaux éléments physiopathologiques de la myasthénie.
◗ Citer les symptômes révélateurs les plus fréquents et les plus évocateurs.
◗ Citer les principaux arguments (cliniques et paracliniques) du diagnostic.
◗ Citer les complications graves.
◗ Connaître les principes du traitement (traitement symptomatique, traitement de fond,
médicaments prohibés).
◗ Savoir que certains médicaments sont prohibés.
Objectifs pratiques
◗ Chez un patient réel ou simulé atteint de myasthénie :
– conduire l’interrogatoire et l’examen clinique ;
– confirmer le diagnostic.
◗ Évoquer le diagnostic de myasthénie sur un ou des cas vidéo.
I. Myasthénie
La myasthénie ou Myasthenia gravis est une maladie immunologique liée à un blocage des
récepteurs de la plaque motrice par des anticorps antirécepteurs d’acétylcholine ou d’autres types
d’anticorps, traduite par une fatigabilité excessive de la musculature striée, améliorée par le repos
ou sous l’effet des drogues anticholinestérasiques.
A. Épidémiologie
La prévalence de la myasthénie se situe entre 43 et 64 par million d’habitants. Son incidence varie
entre 2 et 5 par année et par million d’habitants. Elle atteint surtout des adultes. Elle est plus
fréquente chez la femme que chez l’homme, dans une proportion de 3 pour 2, surtout entre 20 et
30 ans, alors qu’au-dessus de 60 ans les cas masculins sont les plus fréquents. La plupart des cas
sont sporadiques.
Certains antigènes HLA sont plus fréquents chez les myasthéniques. Les antigènes HLA-B8 et aussi
DR3 sont associés de façon significative aux cas féminins débutant avant 35 ans et comportant une
hyperplasie thymique. Ce typage HLA n’a pas de valeur pronostique particulière.
B. Sémiologie clinique
Le diagnostic, quelquefois évident, est souvent difficile, restant longtemps méconnu.
1. Phénomène myasthénique
Le phénomène myasthénique est un déficit de la force musculaire dont le caractère essentiel est de
s’accroître à l’occasion d’un effort (fatigabilité musculaire). La faiblesse musculaire ainsi
provoquée tantôt se limite aux muscles directement mis en action au cours de l’effort, tantôt se
manifeste à distance d’eux. La fatigabilité s’accroît au cours de la journée et se corrige au repos. Un
caractère essentiel de ce phénomène est sa correction sous l’effet des drogues
anticholinestérasiques. Le froid l’améliore.
2. Atteinte de la musculature oculopalpébrale
L’atteinte de la musculature oculopalpébrale est la plus fréquente et la plus évocatrice. Le ptosis est
unilatéral au début et peut se bilatéraliser par la suite, restant habituellement asymétrique. Parfois
présent dès le réveil, il a tendance à s’accroître en fin de journée. Il s’accompagne ou non d’une
diplopie, le plus souvent intermittente. Ptosis et diplopie sont majorés par la fatigue, la lumière, la
fixation d’un objet. La musculature pupillaire est indemne.
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3. Atteinte des muscles de la face et du cou
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4. Atteinte des muscles des membres
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5. Atteinte des muscles respiratoires
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6. Examen clinique
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7. Évolution
L’atteinte des muscles d’innervation bulbaire retentit sur la phonation, la mastication et la
déglutition. La voix s’éteint progressivement, devient nasonnée puis inintelligible. Les troubles de
la mastication apparaissent au cours des repas, le sujet se trouvant parfois dans l’obligation de
soutenir sa mâchoire inférieure avec sa main. Les troubles de la déglutition donnent parfois lieu au
rejet des liquides par le nez et peuvent sérieusement entraver l’alimentation. La dysphagie, à
l’image du phénomène myasthénique, est améliorée par le froid et aggravée par la chaleur. Une
parésie faciale bilatérale donnant un faciès atone est souvent associée aux troubles bulbaires. Dans
de rares cas, la fatigabilité des muscles cervicaux est à l’origine d’une chute de la tête en avant ou
de douleurs cervicales liées à un phénomène de contracture.
L’atteinte des muscles des membres prédomine sur les muscles proximaux, plutôt de la ceinture
scapulaire. On a décrit des formes limitées aux membres, dites pseudomyopathiques, le patient
éprouvant des difficultés pour se relever plusieurs fois d’une position accroupie. Des myalgies
orientent parfois à tort vers une maladie rhumatismale ou myositique. Les muscles extenseurs du
tronc sont parfois concernés, de même que, moins souvent, les muscles abdominaux.
L’atteinte des muscles respiratoires peut conduire à une décompensation ventilatoire rapide,
quelquefois inaugurale, qui fait toute la gravité de la maladie.
Il fait apparaître le phénomène myasthénique en utilisant des tests de répétition des mouvements
comme celui de l’abduction répétée des bras, de l’accroupissement, de l’occlusion des paupières ou
de la fixation latérale prolongée du regard. L’examen peut être normal si les symptômes sont
intermittents et s’il est réalisé en période intercritique ; il n’y a jamais de signes sensitifs,
sphinctériens, d’amyotrophie ou d’anomalies de la motricité pupillaire. Ceci contribue à la difficulté
du diagnostic de cette maladie.
L’évolution , à la fois chronique et capricieuse, faite le plus souvent d’une succession irrégulière de
poussées et de rémissions, est difficile à schématiser et à prévoir. L’effet de la grossesse est
variable, avec un risque d’exacerbation dans 30 à 40 % des cas au cours de la grossesse et un risque
d’aggravation de 30 % en post-partum. Les risques vitaux sont possibles, du fait des crises
myasthéniques se manifestant par des troubles respiratoires, avec dyspnée et encombrement.
L’évolution fatale se produit dans plus de deux tiers des cas malgré la réanimation. Ces crises
myasthéniques ne doivent pas être confondues avec les rares crises cholinergiques secondaires à un
excès de drogues anticholinestérasiques nécessitant un sevrage. Ces dernières sont souvent
précédées de signes de surdosage : fasciculations abondantes, déficit musculaire accru, nausées,
vomissements, diarrhée, coliques, hypersalivation, sudation, larmoiement, pâleur, myosis,
bradycardie.
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Les formes oculaires de myasthénie représentent 15 à 20 % des cas. L’atteinte reste limitée aux muscles
oculomoteurs tout au long de l’évolution. Il faut les distinguer d’une forme oculaire au début qui se généralise
ensuite. Ces formes posent essentiellement un problème fonctionnel. Les tests électrophysiologiques sont moins
sensibles pour le diagnostic et elles sont séronégatives dans 50 % des cas.
Cas particulier : la myasthénie néonatale
Transitoire, elle représente 1 % des myasthénies et survient chez 10 à 25 % des enfants de mère myasthénique.
Aucune corrélation n’existe avec la gravité de la myasthénie chez la mère. Les symptômes se manifestent très
précocement, durant les premières 24 heures de la vie et se prolongent 2 à 3 semaines, rarement jusqu’à
15 semaines, puis régressent spontanément. Il s’agit essentiellement d’une hypotonie associée à des troubles de
la succion, de la déglutition et de la respiration, réagissant bien aux anticholinestérasiques.
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C. Associations
1. Thymus et myasthénie
Une hyperplasie thymique (thymus macroscopiquement normal mais caractérisé par la
prolifération de follicules germinatifs à centre clair) existe dans 65 % des cas et un thymome
(tumeur thymique) dans 15 % des cas. Cette constatation conduisit à proposer les premières
thymectomies dont l’effet bénéfique est manifeste en cas d’hyperplasie thymique simple du sujet
jeune (moins de 40 ans). Les thymomes peuvent être bénins ou malins et doivent être opérés.
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2. Myasthénie et maladies auto-immunes
Des associations sont fréquentes dans environ 4 % des cas avec une polyarthrite rhumatoïde, une
anémie de Biermer, un lupus érythémateux disséminé, une sarcoïdose, un syndrome de GougerotSjögren, une polymyosite, une rectocolite hémorragique, un pemphigus, une maladie de Kaposi, un
purpura thrombopénique, une anémie hémolytique auto-immune.
Par ailleurs une affection thyroïdienne se retrouve dans 13 % des cas, aussi souvent
hyperthyroïdie (qui aggrave en général la myasthénie) qu’hypothyroïdie.
D. Examens complémentaires
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1. Tests pharmacologiques
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2. Explorations électrophysiologiques (stimulodétection répétitive)
Ils sont essentiellement les tests à l’édrophonium (Reversol®) et à la néostigmine (Prostigmine®).
Seules doivent être prises en compte les améliorations franches d’un signe objectif (ptosis par
exemple), à comparer à une injection placebo. Le test est à réaliser en milieu hospitalier (risque de
crise cholinergique).
À l’électromyogramme (stimulodétection), la réponse musculaire évoquée par une stimulation
supramaximale unique du nerf est normale. La survenue d’un décrément caractéristique de
l’affection (diminution de l’amplitude des potentiels évoqués musculaires ≥ 10 %) apparaît pour des
fréquences basses de stimulation, le plus souvent à 3 c/s (fig. 15.1). La stimulation du nerf spinal
avec enregistrement du trapèze permet l’accès à un muscle proximal dans de bonnes conditions
techniques et avec une bonne sensibilité. Dans les formes limitées aux muscles oculopalpébraux
et/ou aux muscles d’innervation bulbaire, il peut être intéressant de stimuler le nerf facial.
L’augmentation de la température musculaire s’accompagne d’un accroissement du phénomène
décrémentiel. On peut utiliser, dans un but de sensibilisation, la tétanisation représentée par une
contraction volontaire maximale de 20 à 30 secondes du muscle étudié, ou encore l’ischémie qui
favorise elle aussi la réponse décrémentielle. La sensibilité diagnostique ne dépasse pas 50 à 75 %.
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► Fig. 15.1. Chute de 30 % d’amplitude du potentiel musculaire sur le trapèze entre la 1re
et la 4e stimulation à 3 Hz à décrément. ►
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3. Recherche des anticorps antirécepteurs d’acétylcholine
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4. Scanner thoracique
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Ils sont présents chez 85 % des malades avec myasthénie généralisée et chez 50 % de ceux avec
myasthénie oculaire. Les taux sont variables et il n’existe pas de corrélation avec la gravité de la
maladie d’un patient à l’autre. Cependant, chez un même sujet, le taux peut fluctuer en fonction
de l’évolutivité de la maladie. Dans les thymomes, en particulier malins, le taux est très élevé.
Les formes sans anticorps détectés peuvent être liées à d’autres types d’anticorps (anti-MuSK,
protéine tyrosine-kinase du récepteur). Il existe aussi des formes dites « séronégatives », sans
anticorps antirécepteurs de l’acétylcholine, ni anti-MuSK.
Il explore la loge thymique à la recherche d’un thymome, bénin ou malin, ou d’un thymus
hyperplasique résiduel.
E. Pathogénie
Le phénomène myasthénique d’origine auto-immune est causé par un bloc de la transmission
neuromusculaire de type post-synaptique. L’origine de la réaction auto-immune reste inconnue. Il
est toutefois vraisemblable que l’immunogène soit proche des récepteurs d’acétylcholine humains.
Il pourrait s’agir d’un récepteur légèrement modifié (par infection virale par exemple) ou d’un
antigène étranger, viral ou bactérien, ayant une réactivité croisée avec le récepteur d’acétylcholine.
La responsabilité du thymus est importante. Les récepteurs d’acétylcholine des cellules myoïdes du
thymus entraîneraient la stimulation d’anticorps contre les récepteurs d’acétylcholine de la jonction
neuromusculaire. Le thymus serait une source de lymphocytes T « helper » stimulant la production
de ces anticorps par les lymphocytes B.
F. Traitement
1. Traitement symptomatique
Ils sont représentés par les substances anticholinestérasiques (prolongent l’action de l’acétylcholine
au niveau de la membrane post-synaptique par blocage réversible de l’acétylcholinestérase) :
pyridostigmine (Mestinon®), ambenonium (Mytelase®), à augmenter progressivement jusqu’à la
dose optimale (efficacité versus effets indésirables). Ces médicaments ont une durée d’action brève,
de 4 à 5 heures, nécessitant des prises répétées dans la journée. Le risque d’une crise cholinergique
doit faire surveiller le surdosage : effets muscariniques (hypersécrétion bronchique, intestinale,
salivaire et sudorale) et nicotiniques (fasciculations, crampes musculaires). Les spironolactones ont
parfois un effet symptomatique.
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2. Traitements de fond
Un traitement immunosuppresseur est institué si nécessaire : corticothérapie et/ou
immunosuppresseurs cytolytiques (azathioprine surtout, mycophénolate mofétil parfois). La
ciclosporine a été efficace dans des cas résistants aux autres traitements mais sa toxicité en limite
l’emploi.
La thymectomie a un effet bénéfique sur l’évolutivité de la maladie, en particulier chez le sujet
jeune de moins de 40 ans porteur d’une hyperplasie thymique. Elle est également indiquée en cas de
thymome.
Les échanges plasmatiques sont utilisés surtout en période aiguë ou pour passer un cap difficile.
Dans les mêmes circonstances, les immunoglobulines polyvalentes par voie veineuse sont aussi
efficaces que les échanges plasmatiques avec une meilleure tolérance.
On doit enfin rappeler que tous les médicaments susceptibles d’altérer la transmission
neuromusculaire sont contre-indiqués au cours de la myasthénie.
3. Précautions
On doit rappeler que tous les médicaments susceptibles d’altérer la transmission neuromusculaire
sont contre-indiqués au cours de la myasthénie.
Ces drogues sont classées selon leur mode d’action :
– présynaptique : corticoïdes, benzodiazépines ;
– post-synaptique : tétracyclines, phénothiazines, morphine, triméthaphan, triméthadone ;
– effet à la fois pré et post-synaptique : hydantoïnes, polymyxine et ses dérivés, aminosides
(surtout néomycine), lincomycine, lidocaïne, procaïnamide, quinidine, bêtabloquants, sels de
lithium, chloroquine, lactate de sodium, antagonistes calciques, carnitine.
En pratique on peut distinguer des médicaments considérés comme des contre-indications
absolues : D-pénicillamine ; curarisants ; antibiotiques du groupe des aminosides ; colimycine,
bacitracine, polymyxine et cycline injectable ; bêtabloquants même locaux ; phénytoïne, diphénylhydantoïne ; triméthadione ; dantrolène ; quinine, quinidine, chloroquine ; procaïnamide.
D’autres médicaments représentent des contre-indications relatives et peuvent être utilisés avec
prudence si nécessaire : phénotiazines ; carbamazépine ; benzodiazépines ; neuroleptiques ;
vérapamil ; lithium ; progestérone. En cas de doute chez un patient ayant besoin d’autres
médicaments, il ne faut pas hésiter à consulter le Vidal pour chercher d’éventuelles contreindications ou vérifier la liste des médicaments contre-indiqués remis habituellement au patient par
son médecin spécialiste.
4. Autres
Tout patient doit porter sur lui une carte de myasthénie et la liste des principaux médicaments
interdits. La pathologie est prise en charge à 100 % (ALD 30). La grossesse est possible sous
anticholinestérasiques, des poussées de la maladie sont possibles dans le post-partum.
II. Syndrome myasthéniforme
de Lambert-Eaton
Il est dû à une insuffisance de libération présynaptique de l’acétylcholine. Il survient habituellement
chez un sujet de sexe masculin, âgé de plus de 40 ans.
Une association à des cancers intrathoraciques se trouve dans 60 % des cas et, dans 50 % des cas, il
s’agit de cancers bronchiques à petites cellules. Dans 10 % des cas, le cancer est différent (rein,
vessie, etc.). Dans environ 15 % des cas, le syndrome myasthéniforme s’associe à une maladie
générale auto-immune (Biermer, Sjögren, etc.). Enfin, dans 15 % des cas malgré un recul de
plusieurs années, ou même après vérification anatomique, le syndrome reste isolé.
La manifestation initiale la plus fréquente est un déficit moteur des membres inférieurs accompagné
d’une fatigabilité excessive, déficit sans amyotrophie que confirme l’examen. Une faiblesse des
membres supérieurs est beaucoup plus rare. Les réflexes sont faibles ou absents, surtout aux
membres inférieurs, mais ils sont facilités et apparaissent si on les recherche immédiatement après
un effort musculaire. Des signes d’atteinte céphalique évoquant une myasthénie sont parfois
présents (ptosis, diplopie, troubles de la phonation et de la déglutition, etc.). Dans près de la moitié
des cas, une dysautonomie cholinergique est présente (troubles de la motricité pupillaire, de la
sudation, des sécrétions salivaire et lacrymale, impuissance, etc.).
L’étude électrophysiologique montre de manière caractéristique un potentiel d’action musculaire au
repos d’amplitude très diminuée par rapport à la normale et dont l’amplitude augmente de plus de
100 % immédiatement après tétanisation. À la stimulation nerveuse répétitive à fréquence rapide (10 à
50 Hz), un incrément anormal de l’amplitude du potentiel (toujours supérieur à 100 %) est noté.
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Ce syndrome est causé par les anticorps dirigés contre les canaux calcium présynaptiques voltagedépendants. Des médicaments agissant en présynaptique pour augmenter le nombre de quanta
d’acétylcholine libérés ont été proposés (3-4 diaminopyridine). Dans les formes paranéoplasiques,
l’évolution dépend du traitement du cancer. Dans les autres formes, un traitement
immunosuppresseur ou immunomodulateur peut être proposé comme dans la myasthénie.
L’examen confirme un déficit, surtout net sur les muscles de la ceinture pelvienne et des cuisses.
Aucune amyotrophie n’est retrouvée si ce n’est une atrophie modérée des cuisses. Les réflexes sont
faibles ou absents, surtout aux membres inférieurs, mais ils sont facilités et apparaissent si on les
recherche immédiatement après un effort musculaire.
III. Autres anomalies de la transmission
neuromusculaire
A. Botulisme
Dû à clostridium botulinum, il survient après ingestion de conserve avariée. Plusieurs formes
cliniques sont à séparer.
Dans la forme classique, 12 à 35 heures après l’ingestion, apparaissent des nausées et des
vomissements, des troubles de la vision, une diplopie, une sécheresse des muqueuses buccale et
trachéale, un déficit moteur généralisé à prédominance proximale. L’examen révèle une mydriase
aréactive, des troubles de la motricité oculaire intrinsèque et extrinsèque, de la motricité faciale et
pharyngée, une faiblesse musculaire descendant aux ceintures. La musculature lisse est parfois
atteinte avec dysphagie, iléus et rétention d’urines. L’évolution peut être grave par la survenue de
complications respiratoires. La progression descendante oppose ces formes à l’évolution ascendante
du syndrome de Guillain-Barré.
Les examens électrophysiologiques montrent des anomalies similaires à celles du syndrome de
Lambert-Eaton, témoignant d’un trouble présynaptique de la libération d’acétylcholine.
Le traitement comporte au stade de début le lavage gastrique et l’évacuation intestinale avec
administration d’antitoxine. Le traitement symptomatique par 3-4 diaminopyridine est efficace.
B. Autres anomalies acquises
de la transmission neuromusculaire
Il faut citer :
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– les venins de serpents (cobras, mambas, serpents de mer) : ils comportent des neurotoxines
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responsables de syndromes myasthéniformes aigus et graves. Le bloc neuromusculaire est postsynaptique dû à la fixation des neurotoxines sur les récepteurs d’acétylcholine. Certains venins
diminuent également la libération d’acétylcholine ;
– l’intoxication par le magnésium (chez l’insuffisant rénal notamment) ;
– le traitement par D-pénicillamine.
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C. Syndromes myasthéniques congénitaux
Ce sont des anomalies génétiques exceptionnelles, d’hérédité le plus souvent autosomique
récessive, dont certaines sont améliorées par les médicaments actifs sur la jonction
neuromusculaire. Elles correspondent aux « myasthénies congénitales », ne sont pas d’ordre
immunologique et ne comportent donc pas d’anticorps antirécepteur de l’acétylcholine. Il s’agit le
plus souvent d’une anomalie héréditaire des protéines constitutives du récepteur de l’acétylcholine,
plus rarement de l’acétylcholinéstérase ou de la libération de l’acétylcholine.
Points clés
Parmi les syndromes myasthéniques :
· La myasthénie auto-immune est de loin la plus fréquente :
– déficits moteurs liés à l’effort et fluctuants (ptosis, diplopie, voix nasonnée, troubles de la déglutition, muscles
de la nuque, ceinture scapulaire) ;
– diagnostic confirmé par :
. le test thérapeutique aux anticholinestérasiques (Reversol®, Prostigmine®),
. la présence d’un bloc neuromusculaire à l’électromyogramme,
. la présence d’anticorps antirécepteurs de l’acétylcholine ;
– intérêt de la recherche :
. d’une hyperplasie thymique ou d’un thymome (scanner thoracique),
. d’une autre maladie auto-immune associée ;
– traitements :
. anticholinestérasiques (Mestinon® ou Mytélase®),
. thymectomie (sujet jeune et thymome),
. immunodépresseurs (corticoïdes ou immunosuppresseurs cytolytiques),
. échanges plasmatiques ou immunoglobulines polyvalentes (pour passer un cap difficile : crise myasthénique),
. remettre une liste des médicaments formellement contre-indiqués au malade (+++) ;
– gravité de l’atteinte de la musculature respiratoire (détresse aiguë : crise myasthénique)+++.
· Les autres syndromes myasthéniques sont beaucoup plus rares :
– syndrome de Lambert-Eaton (souvent paranéoplasique) ;
– myasthénies congénitales ;
– botulisme, venins de serpents.