de la SOciété Française d`Orthopédie Pédiatrique
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de la SOciété Française d`Orthopédie Pédiatrique
N°26 La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique Février - Mars 2009 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours Bureau de la SOFOP Président : J.M. Clavert 1er Vice-Président : C.Morin - 2e Vice Président : C.Bonnard - Futur 2e Vice Président : C. Romana Ancien Président : J.F. Mallet Secrétaire Général : J.L. Jouve Trésorier : P. Lascombes Membres du Bureau : B. de Billy, S. Bourelle, P Journeau, A Kaelin, P Mary, P Wicart, Editorial SO.F.O.P. Henri Bensahel nous a quittés. C’est un des piliers des fondations de notre discipline qui s’en va. Nul ne peut nier son rôle majeur dans l’organisation internationale de l’Orthopédie Pédiatrique. Pour avoir participé aux premières grandes réunions de l’EPOS, j’ai pu apprécié son talent pour les relations internationales, pour sa vision inspirée de la réunion au sein d’une société savante de personnes qui en avaient une envie parfois très modérée. Son action ne s’est pas arrêtée à l’Europe, mais a concerné le monde entier avec un partenariat privilégié avec la POSNA et la création de l’IFPOS. Il a su aussi créer un journal international d’Orthopédie Pédiatrique indépendant de la domination américaine. C’est une oeuvre immense et définitive qu’Henri Bensahel a réussie. Qu’il en soit remercié. Cette dimension internationale ne doit pas masquer la qualité de l’équipe d’Orthopédie Pédiatrique qu’il a créée à l’hôpital Robert Debré. Georges Penneçot, son successeur à la direction du service, nous relate toute cette épopée dans ce numéro de la Gazette. Au nom de tous les Orthopédistes Pédiatres Français, je me permets d’assurer Madame Bensahel et toute sa famille de toute notre sympathie en ces moments douloureux. Le numéro de la Gazette est consacré à l’Orthopédie Pédiatrique Strasbourgeoise et à sa difficile naissance au travers des conflits franco-allemands. Ces douleurs accumulées se sont parfois révélées être de véritables atouts. C’est ainsi qu’à l’Université de Strasbourg se sont succédés les jeunes agrégés les plus brillants, Allemands et Français, dans une compétition d’excellence en vitrine de chacun des deux pays. Aujourd’hui, Strasbourg est devenue capitale de l’Europe et Fondateur J.C. POULIQUEN † Editorialiste H. Carlioz (Paris) Rédacteur en chef C. MORIN (Berck) Membres : J CATON (Lyon) P CHRESTIAN (Marseille G FINIDORI (Paris) J L JOUVE (Marseille symbolise avec son Parlement la réconciliation des anciens frères ennemis. Il a fallu beaucoup de patience et de bonne volonté pour réunir tous les orthopédistes pédiatres de la région sur un seul site et effacer toute l’héritage éclaté de l’envahisseur allemand. La culture rhénane faite de consensus et de respect de l’intérêt collectif a beaucoup aidé la réalisation d’une fusion qui a enrichi tout le monde. Strasbourg a aussi fait, en ce début d’année 2009, la une du monde de la santé par la venue de notre Président Nicolas Sarkozy pour inaugurer le Nouvel Hôpital Civil de Strasbourg, pour présenter ses voeux à tous les personnels de santé et pour installer la Mission Marescaux qui doit proposer des idées pour refonder les CHU par des ordonnances qui remplaceront les ordonnances Debré de 1958. C’est une lourde tâche et nous avons tous conscience que c’est aussi une nécessité. La recherche médicale Française est en perte de vitesse dans le concert international. Nous avons en France une des meilleures Médecines au monde. Il est urgent de nous donner les moyens de demeurer dans l’excellence. Ces réflexions touchent aussi bien la Médecine Française en général que l’Orthopédie Pédiatrique en particulier. Les CHU sont à un tournant de leur histoire. J’espère que nous aurons tous l’énergie nécessaire à bien négocier ce virage. Le message le plus important du discours de Strasbourg du Président de la République a été de bien faire la différence entre les centres hospitaliers qui auront «un seul patron», le directeur, et les CHU qui seront placés sous la protection de Valérie Pécresse avant de l’être sous celle de Roselyne Bachelot. Ce message est capital pour notre ave- R KOHLER (Lyon) P LASCOMBES (Nancy) G F PENNEÇOT (Paris) M RONGIERES (Toulouse) J SALES DE GAUZY (Toulouse) R VIALLE (Paris) et le “ GROUPE OMBREDANNE” Correspondants étrangers M BEN GHACHEM (Tunis) R JAWISH (Beyrouth) I. GHANEM (Beyrouth) Editeur SAURAMPS MEDICAL S.a.r.l. D. TORREILLES 11, boul. Henri IV CS 79525 34960 MONTPELLIER Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 nir qui doit rester fortement médicalisé dans sa gouvernance. Fin 2009, notre environnement législatif devrait être complètement transformé: loi Pécresse pour les Universités, loi Bachelot pour les hôpitaux, ordonnances Marescaux pour les CHU. Ceux qui feront de la résistance seront les perdants. Il faut utiliser cette énergie de réforme pour développer notre spécialité qui a l’immense avantage d’être très universitaire et peu concurrencée par le secteur privé. Nous avons beaucoup d’atouts pour réussir dans ce contexte de remise en cause du monde de la santé dans ses capacités de gestion, d’efficience et de qualité. Bonne année à tous les membres de la SOFOP. Bonne année à tous les Orthopédistes Pédiatres. Jean Michel CLAVERT Président de la SOFOP Edito.........................................................................1 par Jean-Michel Clavert Hommage à Henri Bensahel............................2 par Georges Penneçot Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg..........................................................3 par Ivan. Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert La technique de Luque Galveston................9 par Marie Christine Maximin-Giacomelli Ostéosynthèse des fractures épiphyso-métaphysaires de l’enfant par Broches à Butée réglable................................................ 13 par Philippe Gicquel, Ludovic Schneider Le cas du jour..................................................... 16 par Jean Langlais Le coin de l’historien....................................... 17 par Pierre Chrestian Le cas du jour : la réponse............................. 19 par Jean Langlais Ces livres qu’il faut avoir lus.......................... 20 par Rémi Kohler la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse www.livres-medicaux.com Hommage à Henri Bensahel par Georges Penneçot de le côtoyer régulièrement après qu’il eut mis fin à ses activités hospitalo-universitaires. C’est pourquoi je souhaite lui rendre l’hommage qu’il mérite en insistant sur l’homme qu’il était que n’ont connu que ceux qui ont eu l’occasion de travailler avec lui. Sa ligne de conduite a toujours été dictée par son grand humanisme, par une conception de la vie basée sur les valeurs du travail et de la famille. Au sein de son service c’était un organisateur donnant une large responsabilité à chacun de ses élèves, très proche et disponible pour le personnel infirmier. Il avait gardé un goût pour les avancées technologiques, je me souviens avec quel enthousiasme il m’avait soutenu lorsque nous débutions nos travaux dans le domaine de l’analyse du mouvement. Il n’avait cessé de me pousser dans cette voie et venait régulièrement discuter des avancées dans ce domaine. Quand il fut nommé consultant, il tint à me préciser immédiatement qu’il ne voulait pas interférer avec la façon de gérer le service. Pendant plusieurs mois il se fit discret mais toujours disponible quand je lui demandais conseil. Ces derniers temps il était moins présent, trop occupé à poursuivre ses contacts internationaux, mais dès qu’il revenait il souhaitait me raconter ce qu’il avait fait, les contacts qu’il avait eus, et les projets qu’il poursuivait souhaitant toujours m’y associer. C’est en 1992 que j’ai véritablement connu le Pr. H. Bensahel. Depuis cette date nous avons toujours entretenu des rapports chaleureux aussi bien quand je fus son agrégé, que lorsqu’il me céda la chefferie de service en 1996 pour devenir consultant, puis ensuite alors qu’il n’avait plus de fonction officielle mais qu’il gardait une activité débordante continuant à œuvrer au développement de l’Orthopédie Pédiatrique Française en ayant une action déterminante dans la création de sociétés savantes internationales et à travers son action au sein du J.P.O.. Pour les plus jeunes d’entre nous rappelons qu’il fut l’un des pères fondateurs du GEOP devenu SOFOP, que c’est sous son impulsion que fut créée l’EPOS en 1981, puis plus récemment l’IFPOS. Son action inlassable dans le domaine international a permis à l’orthopédie pédiatrique française d’avoir une reconnaissance internationale. C’est dans son sillage que les plus anciens parmi nous se sont sentis impliqués et sont devenus membres actifs de ces différentes sociétés. J’ai eu le privilège de travailler à ses côtés depuis 1992 et 2 Il accordait sa confiance aux gens, il avait toujours un a priori favorable, il a parfois révisé son jugement mais cela lui coûtait. Ses élèves lui sont restés très attachés et jusqu’à la fin ils ont gardé avec lui des rapports privilégiés ne se limitant pas au seul domaine chirurgical. Toujours disponible sa porte était ouverte, nos échanges débordaient du domaine chirurgical et bien souvent nous terminions en refaisant le monde. Je sentais dans ces conversations que sa vie s’était construite sur des bases solides mettant au premier plan le respect, la tolérance et les valeurs familiales. Il s’inquiétait régulièrement du parcours de mes enfants et me parlait avec plaisir et fierté de ses enfants et petits enfants pour lesquels il avait toujours su réserver une disponibilité importante. Le décès du Pr H. Bensahel m’a touché profondément, je m’associe à la peine de sa femme et de ses enfants et petits enfants, je souhaite que nous gardions en mémoire son action pour notre spécialité mais aussi et surtout ses qualités humaines. Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert Histoire de la Médecine à Strasbourg (JM Clavert) Histoire de l’orthopédie pédiatrique strasbourgeoise durant les occupations allemandes (JM Clavert) Strasbourg abrite une des plus vieilles Facultés de Médecine françaises, créée en 1540. Notre région a beaucoup souffert des conflits européens et c’est avec fierté qu’elle accueille aujourd’hui le Parlement européen, symbole d’identité et de stabilité pour Strasbourg. Durant son histoire Strasbourg a été plus de 4 siècles dans le Saint Empire Romain Germanique (1263-1681) qui accorda à la ville une très large autonomie et un rôle universitaire important. Elle fut ville libre du Royaume de France durant un siècle (1681-1792), puis française à la Révolution jusqu’à nos jours avec cependant deux occupations allemandes (1870-1919 et 1940-1944). Strasbourg comporte des communautés religieuses très diverses et équilibrées en volume. La cohabitation est harmonieuse depuis des siècles avec une communauté juive importante. Luther a été très suivi à Strasbourg et la communauté protestante est puissante. Malgré cette diversité et malgré des cliniques confessionnelles, Strasbourg possède un hôpital civil qui accueille toutes les communautés et tous les niveaux sociaux. Il existe une réelle égalité culturelle face à la maladie et le service public est très largement majoritaire. En-dehors de l’Hôpital civil (qui deviendra Hôpitaux Universitaires en 1991), il existe plusieurs cliniques confessionnelles mais une seule clinique de seulement 200 lits réellement privée à but lucratif. La notion de CHU a préexisté à Strasbourg aux ordonnances Debré de 1958. Très tôt, la collaboration entre l’Université et l’Hôpital civil s’est installée dans les habitudes Alsaciennes. Cela est probablement dû à la volonté allemande en 1870 d’installer une vitrine universitaire médicale à Strasbourg. Les plus brillants agrégés allemands ont été nommés à Strasbourg (dont Von Recklinghausen, Madelung). Après la première guerre mondiale, les Français ont eu la même action en nommant de jeunes professeurs particulièrement brillants (dont Leriche). La chirurgie a toujours été un pôle d’excellence à Strasbourg. La tradition allemande d’un très grand patron a structuré l’Hôpital Civil en deux grandes cliniques concurrentes et couvrant chacune toutes les surspécialités: la clinique Chirurgicale A et la Clinique Chirurgicale B. Cette tradition explique l’apparition tardive de la Chirurgie Infantile à Strasbourg car chaque clinique voulait se l’approprier. C’est durant les années 60 que la Faculté de Médecine sous la direction du Doyen Jean Clavert, a remplacé les grandes cliniques de Médecine et de Chirurgie par des services spécialisés correspondant aux disciplines d’aujourd’hui. La Chirurgie Infantile est née en 1967 de cette action. La chaire de Chirurgie Infantile a été confiée au Professeur Paul Buck. Sa tâche consistait à regrouper sous son autorité toutes les activités chirurgicales pédiatriques éparpillées dans les anciennes cliniques datant du temps allemand. Ce travail ne sera totalement achevé qu’à la fin du 20ème siècle. Les Allemands pensaient rester définitivement à Strasbourg. Ils se sont donc lancés dans de grands travaux de construction dans tous les domaines dont l’hôpital. C’est ainsi que naquirent la clinique chirurgicale qui deviendra la Chirurgie A (1884), le Centre de Traumatologie (1901), l’Hôpital Stéphanie (fondation de la Comtesse Stéphanie von Wefel Hamilton, épouse du Stathalter d’Alsace Lorraine 1912), la clinique chirurgicale qui deviendra la Chirurgie B ( 1914). Chacune de ces cliniques disposait d’un secteur de chirurgie osseuse et d’une unité d’enfants. C’est donc une situation particulièrement éclatée et généraliste que les Français retrouveront en 1944. Histoire de l’Orthopédie Pédiatrique après la deuxième guerre mondiale (C Karger) A Strasbourg, la prise en charge des enfants porteurs d’affections de l’appareil locomoteur est passée par une période « tripolaire » avant de se concentrer sur un site unique, le service de chirurgie infantile du CHU de Hautepierre. Historiquement, les deux pôles qui ont été à l’origine d’une prise en charge spécifique de l’orthopédie pédiatrique ont été : • l’Hôpital « Stéphanie » dont l’historique est rapporté par le Professeur Pierre KEHR • le Centre de Traumatologie et d’Orthopédie de la Sécurité Sociale dont la genèse est relatée par son ancien Directeur Médical, le Professeur Ivan KEMPF Jean Michel CLAVERT évoquera la création et le développement du service de chirurgie infantile du CHU, ainsi que le processus de regroupement de toute l’activité orthopédique pédiatrique Strasbourgeoise sur ce site. L’hôpital Stéphanie et le Secours orthopédique pour enfants infirmes (Pr P Kehr) Fig. 1 : L’hôpital Stéphanie et le Secours orthopédique pour enfants infirmes (Pr P Kehr). Carte postale probablement de 1919 ou 1920. La dénomination de « Asile des estropiés » est la traduction littérale de l’appellation allemande de « Krüppelheim ». 3 Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert L’origine de l’Hôpital Stéphanie L’Hôpital Stéphanie (Fig. 1), appelé plus tard « Hôpital chirurgical orthopédique Stéphanie » a été créé en 1912, alors que l’Alsace faisait partie, depuis 1870, du Reich allemand. Sa création a été l’œuvre de la comtesse Stéphanie von Wedel Hamilton, l’épouse du Statthalter (représentant de l’empereur) d’Alsace-Lorraine. Ce fut sur une idée du Professeur Fritz Lange (Fig. 4), ancien assistant de Madelung à Strasbourg, que la comtesse se décida à mettre en route une opération philanthropique dans le but de recueillir les fonds nécessaires à la création de l’Hospice Stéphanie. Le terme d’hospice ne doit pas induire en erreur : largement utilisé au début de ce siècle, repris de l’allemand Hospiz, il désigne en fait un établissement de soins. A Strasbourg, l’Hospice Stéphanie fut, dès son ouverture, un établissement de soins hautement spécialisé. L’épouse suédoise du nouveau Statthalter, la comtesse Stéphanie von Wedel, née Hamilton (1852-1937), s’attacha immédiatement à l’Alsace, se fit le défenseur du maintien de la culture et de la langue françaises dans le Reichsland et anima de nombreuses œuvres de bienfaisance. La plus importante de celles-ci fut de se dévouer à la création du Kruppelheim (foyer pour infirmes) que le professeur Lange avait en projet pour Strasbourg. Un vaste terrain fut choisi au Stockfeld, au sud du faubourg du Neuhof. Lange inspira les plans de l’architecte Karl Bonatz. La comtesse von Wedel se chargea, elle, de trouver une grande partie des fonds nécessaires, notamment grâce aux «fêtes de la fleur» qu’elle organisait dans toute la région, assurant le patronage de ces fêtes de charité dont elle fournissait elle-même les fleurs (Fig. 2). Fig. 2 : Carte postale émise au profit de l’œuvre de bienfaisance de la Comtesse Stéphanie von Wedel Hamilton. Le texte de la carte postale disait : « zu Gunsten eines KRUPPELHElMS … » (en faveur d’un Foyer pour infirme) 4 Toutes les communes de l’Alsace-Lorraine d’alors participèrent probablement à ces fêtes des fleurs, ce qui expliquera, bien plus tard, la renommée de l’Hôpital Stéphanie qui s’étendait de la frontière luxembourgeoise au nord à la frontière suisse au sud. En 1912, fut créée l’association privée (selon la Loi Locale d’Alsace-Moselle de 1908, loi toujours en vigueur de nos jours) qui s’appellera, après le retour à la France, Secours ortho pédique pour enfants infirmes en Alsace et en Lorraine. L’association avait pour membres fondateurs des particuliers, mais aussi des collectivités locales ; la plupart des communes du Reichsland d’Alsace-Lorraine (Départements d’Alsace et Moselle) s’étaient inscrites. Le futur Etablissement de soins et d’éducation pour infirmes d’Alsace et de Lorraine (Elsass-Lothringische Kruppel-Heilund Erziehungsanstalt) précisait ainsi son triple but : «Rétablir l’état des malades par un traitement chirurgical et mécano-orthopédique approprié à chaque cas. «Procurer aux malades l’instruction nécessaire pendant leur séjour. «Leur fournir les appareils et chaussures orthopédiques nécessités par leur infirmité.» En outre, l’association se proposait d’«éclairer la population sur l’importance du traitement précoce de toutes les infirmités, afin d’empêcher les déformations définitives». Alors que le Krüppelheim n’était pas encore terminé, la comtesse Stéphanie quitta Strasbourg ; victime de l’affaire de Saverne (novembre 1913), son époux avait été muté le 1er mai 1914. Dès le mois d’août 1914, Bogumil Lange (orthopédiste installé à Strasbourg et frère de Fritz Lange), mobilisé dans le Service de santé militaire, fut nommé à Strasbourg, la plus grande des villes allemandes proches du front. Il se préoccupa de faire du Kruppelheim un vaste établissement d’orthopédie de guerre (Fig. 3). C’est lui qui donnera à celui-ci le nom de sa bienfaitrice, nom qu’il porte encore aujourd’hui : Orthopädisches Lazarett Stephanienheim. L’établissement, qui sera inauguré en 1916, comportait en principe 130 lits et des ateliers pour la fabrication de prothèses, ainsi qu’une salle de classe, animée par deux enseignants. Fig. 3 : L’Hôpital Stéphanie pendant la Guerre de 1914-1918 Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert Fig. 4 : De gauche à droite, le Professeur Fritz Lange, créateur de l’Hôpital Stéphanie, le Docteur Edmond Allenbach, qui en fit un grand service d’orthopédie, le Professeur Adolphe Jung, qui le transforma en service de chirurgie orthopédique moderne du CHU de Strasbourg. 1919 – 1954 : les trente-cinq années de la direction d’Edmond Allenbach C’est après la Première Guerre mondiale que l’Hospice Stépha nie (Hôpital orthopédique) prend son essor d’établissement destiné aux enfants infirmes. Dès 1919, son directeur est Edmond Allenbach (1885-1968). Après avoir soutenu sa thèse en 1911 à la Faculté de médecine allemande, Edmond Allenbach (Fig. 4) avait été assistant de Madelung à la Chirurgische Klinik. Il était allé à Paris compléter sa formation auprès de Louis Ombrédanne, à l’hôpital des Enfants-Malades. En 1919, le professeur Sencert lui confiera à Strasbourg un poste de chef de clinique à temps partiel dans sa clinique chirurgicale A, mais Allenbach donnera sa démission en 1921. Il ne reviendra à la Faculté qu’une trentaine d’années plus tard, en 1949, succédant à Marcel Meyer comme chargé de cours d’orthopédie. Allenbach va ainsi créer un centre d’orthopédie unique en France. Utilisant la nouvelle structure édifiée et installée avant 1918, il adopte avec intelligence le «système allemand», qui sépa re formellement l’orthopédie «froide» de la traumatologie, assurée par des chirurgiens généralistes. Le plus fort contingent des malades se compose alors d’enfants atteints de déformations rachitiques. Les autres affections traitées à Stéphanie sont la tuberculose osseuse et articulaire, les scolioses, les malformations congénitales de l’appareil loco moteur, les séquelles de polio myélite. En outre, écrivit Allenbach, «tous les appareils, corsets, tuteurs, membres artificiels, chaussures orthopédiques, sont fabriqués dans les ateliers qui sont installés à l’hospice même et qui fonctionnent sous la direction et le contrôle du chirurgien en chef. L’avantage qui en résulte est immense. Il est possible de fabriquer des appareils appropriés à chaque cas et d’y apporter toutes les modifi cations devenant nécessaires». Quant à l’instruction des petits malades, elle est complétée par deux classes régulières installées à proximité des salles de malades et par des leçons particulières. En été, l’école se fait en plein air sur les galeries de cure. Enfin les infirmes guéris ou stabilisés sont orientés et guidés dans le choix d’un métier. 1936 : cession aux Hospices civils et création du sanatorium du Lac-Blanc Des difficultés financières vont obliger le Secours Orthopédique à céder l’Hôpital Stéphanie aux Hospices Civils de Strasbourg le 1er avril 1936. Les Hospices Civils de Strasbourg, pour respecter le contrat, acquièrent l’Hôtel du Lac Blanc, situé à 1145 mètres d’altitude et le font transformer en Sanatorium Orthopédique, spécialisé dans le traitement de la tuberculose osseuse par cure d’héliothérapie en altitude et d’hyper alimentation, à l’instar de ce qui se faisait alors aussi bien en Savoie qu’à Berck Plage. Cet établissement du Lac Blanc fonctionnera jusqu’en 1988 sous l’autorité du Chef de Service de l’Hôpital Stéphanie. Il sera ensuite revendu, ayant perdu sa raison d’être et parce que n’étant plus aux normes. 1958 – 1974 : les seize années de la direction d’Adolphe Jung Au départ à la retraite (1954) d’Edmond Allenbach, Adolphe Jung (1902-1992) (Fig. 4) va lui succéder en 1958, après une période intérimaire assurée par un élève du professeur Fontaine, Erwin Wiest (1915-1987). Ancien agrégé de Leriche à la clinique chirurgicale A, Jung arrive de l’Université de la Sarre où il a été directeur de la clinique chirurgicale et vicerecteur. Il vient d’obtenir à Strasbourg la chaire de patholo gie chirurgicale. Ainsi, par la nomination du professeur Jung, l’Hôpital Stéphanie devient partie intégrante du C.H.U. de Strasbourg, avec attribution de postes de chefs de cliniques et d’internes. 5 Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert Sous son impulsion, l’activité chirurgicale orthopédique se développe, les abords directs du mal de Pott, la chirurgie de la sciatique, les ostéotomies de hanche se pratiquent de plus en plus. Ses travaux font autorité, en particulier dans la chirurgie de l’artère vertébrale, le traitement chirurgical du thorax en entonnoir, l’appareillage des amputés du membre supérieur par ciné-prothèses. L’arrivée, en 1966, d’Ivan Kempf (né en 1928) (Fig. 5 et 6), nommé pro fesseur agrégé à Stéphanie où il restera pendant un an, permet de moderniser le traitement, tant orthopédique que chirurgical, des scolioses. Cette activité prendra de plus en plus d’ampleur, tant en ce qui concerne le traitement orthopédique avec les possibilités de l’atelier orthopédique qui se spécialise dans les corsets lyonnais en plexidur, de Milwaukee, que pour le traitement chirurgical des scolioses avec la technique de Harrington. En 1971, une aile supplémentaire sera édifiée, avec des blocs opératoires modernes. cette chirurgie et créera plus tard, après le départ en retraite de Gabriel Lang, un service spécialisé en chirurgie du rachis dans l’Hôpital Central. Héritier d’une tradition allemande d’orthopédie enfantsadultes, l’Hôpital Stéphanie offre un magnifique terrain pédagogique, la jeune femme par exemple atteinte de coxarthrose dysplasique ayant encore son dossier de luxation congénitale de l’enfance dans les archives, avec les radiographies de l’époque, ce qui permettra aux chirurgiens de mieux comprendre la dégradation de l’articulation par la dysplasie. 1994 voit le départ de Pierre Kehr pour le Centre de Traumatologie et d’Orthopédie de la Caisse régionale d’Assurance Maladie où il succède au Professeur Yvan Kempf et en 1995, l’équipe est transférée à la clinique chirurgicale B de l’Hôpital central. C’est là que le Professeur Jean-Paul Steib poursuit la destinée orthopédique de Stéphanie de par son activité dédiée au rachis et en particulier au traitement de la scoliose. Fig. 5 : Ivan KEMPF et Edgar STULZ au Centre de Traumatologie 1974 – 1995 : les vingt et une années de la direction de Gabriel Lang Un orthopédiste issu de la clinique chirurgicale A, Gabriel Lang (né en 1931), agrégé depuis 1965, succédera en 1974 au Professeur Jung à la tête de l’Hôpital. La même année, sera nommé agrégé et affecté à Stéphanie, Pierre Kehr (né en 1937), ancien interne et ancien assistant - chef de clinique du Professeur A. Jung. Sous leur impulsion, l’activité chirurgicale se développe fortement aussi bien dans les domaines de chirurgie pédiatrique (chirurgie de la dysplasie de hanche, scolioses, pieds bots) que de la chirurgie adulte (coxarthrose, gonarthrose, rachis). La création du Service de chirurgie infantile à l’Hôpital de Hautepierre en 1975 entraînera une progressive diminution de l’orthopédie pédiatrique à l’Hôpital Stéphanie, sauf en ce qui concerne le traitement des déviations rachidiennes. En 1982, ils incitent Jean-Paul Steib, assistant-chef de clinique à se former aux techniques chirurgicales nouvelles pour le traitement de la scoliose. Jean-Paul Steib se passionne pour 6 Fig. 6 : l’équipe chirurgicale du Centre de Traumatologie en 1965. Au premier rang, à gauche, le Professeur Paul BUCK ; au fond à droite, le Professeur Ivan KEMPF Le Centre de Traumatologie et d’Orthopédie (Pr I Kempf, C Karger) Après la guerre de 1939 – 1945, la « Clinique des Assurés Sociaux » pratiquait la chirurgie générale, comme la plupart des établissements privés de l’époque. Sous l’impulsion de son Directeur Edgar STULZ (Fig. 5), fut créé un petit secteur pédiatrique comprenant une chambre de 6 lits. Les petits patients étaient principalement opérés de pathologies digestives, ce recrutement étant favorisé par les relations Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert privilégiées qu’entretenait le Docteur STULZ avec les patrons de pédiatrie, en particulier celui de l’Institut de Puériculture. STULZ affectionnait par ailleurs la chirurgie des becs de lièvre, qu’il pratiquait sous anesthésie au Chloroforme. Lors du décès d’Edgar STULZ (1963), le Professeur Paul BUCK (Fig. 6), futur fondateur du service de chirurgie infantile du CHU, prit la relève jusqu’en 1967. Il développa significativement l’activité d’orthopédie pédiatrique et le traitement des fractures de l’enfant. Après un court passage à l’Hôpital Stéphanie (1966 – 1967), le Professeur Ivan KEMPF prit la direction de l’établissement qui prendra le nom de Centre de Traumatologie. Cette dénomination traduisait la volonté de dédier l’activité de ce Centre exclusivement à l’appareil locomoteur. Le Professeur KEMPF a, pendant toute sa carrière, montré un intérêt et une curiosité pour l’orthopédie pédiatrique. Il a effectué des visites chez QUENEAU à Paris et chez CAHUZAC à Toulouse. Il a été pendant de nombreuses années consultant dans des Instituts de pathologie neuro-orthopédique. Cette activité pédiatrique concernait principalement le grand enfant et l’adolescent, alors que les hanches et pieds des plus petits étaient traités d’abord à l’Hôpital Stéphanie, puis au service de chirurgie infantile. Le Professeur KEMPF a développé une activité de prise en charge orthopédique des scolioses, suite à des séjours au Centre de Berck, en mettant au point une nouvelle technique de confection des corsets. Il a également traité de nombreux enfants atteints de séquelles de polio, et effectué les premiers allongements de membres selon la technique de LE CŒUR. L’année 1975 a été marquée par l’ouverture d’un nouvel établissement : le Centre de Traumatologie et d’Orthopédie (C.T.O.) d’Illkirch. Bernard BRIOT, qui avait rejoint l’équipe d’Ivan KEMPF en 1972, s’est vu confier le secteur pédiatrique au nouveau C.T.O. Après un séjour aux USA (chez D. MacEWEN), il a développé la chirurgie de la scoliose par technique de Harrington, puis par Luque. BRIOT a accueilli ILIZAROV à Strasbourg et s’est beaucoup investi dans sa méthode. Le service d’enfants a été confié à Claude KARGER en 1990, suite au départ à la retraite de Bernard BRIOT. Dès 2002, une convention de fonctionnement a été établie entre le C.T.O. et le service de chirurgie infantile du Professeur Jean Michel CLAVERT, pour que les scolioses puissent être opérées au CHU de Hautepierre, compte tenu de difficultés de disponibilité de lits de soins postopératoires au CTO. En 2005, l’activité pédiatrique du C.T.O. a été définitivement transférée au service de chirurgie infantile du CHU avec transformation du poste de Claude KARGER en praticien hospitalier. Le service de Chirurgie Infantile de sa création au regroupement de toutes les activités d’Orthopédie Pédiatrique en son sein. (JM Clavert) Le service de Chirurgie Infantile a été créé au CHU de Strasbourg en 1968 (Fig. 7). Cette période correspond au moment où la Faculté de Médecine a mis fin aux grandes cliniques issues de la période allemande où un très grand patron chapeautait toutes les spécialités chirurgicales. La Clinique Chirurgicale Infantile a été confiée au Professeur Paul Buck qui était directeur du centre de Traumatologie à la suite du Pr Stulz. Il avait été le premier Agrégé du Professeur Fontaine (Clinique Chirurgicale A), élève du Professeur Leriche et de l’école d’Alexis Carrel. Un agrégé dans les années 50 avait plusieurs spécialités chirurgicales dans ses compétences. Le Pr Buck avait fait de la chirurgie vasculaire et cardiaque, de la chirurgie thoracique, de la chirurgie générale et de l’orthopédie. A l’époque, un agrégé n’était nommé que pour 9 ans comme les chefs de cliniques sont nommés Fig. 7 : le Pavillon LERICHE, site de création du service de chirurgie infantile en 1968 7 Histoire de l’orthopédie pédiatrique à Strasbourg par Ivan Kempf, Pierre Kehr, Claude Karger, Jean-Michel Clavert actuellement pour 2 ans. A l’issue de ces 9 ans, l’agrégé était obligé de se trouver une autre clinique d’accueil et c’est ainsi que Paul Buck fit une période d’activité libérale dans les cliniques privées ou confessionnelles de la ville. Il est devenu ensuite directeur du Centre de Traumatologie où il eut pour agrégé le Pr Kempf qui venait de l’Hôpital Stéphanie. Le Pr Buck était le grand spécialiste des fentes labio-palatines et il recrutait le grand Est de la France. Il fut donc choisi pour prendre en charge la chirurgie infantile naissante en 1968. Il recruta le Docteur Jean Berger, chef de clinique en Chirurgie B, chargé de l’orthopédie Infantile, et le Docteur Jean Meyer qui exerçait cette spécialité en ville. Ainsi commençait à naître une orthopédie pédiatrique en Clinique Chirurgicale Infantile à Strasbourg. La discipline continuait à exister à l’Hôpital Stéphanie et au centre de Traumatologie sous la direction du Pr Kempf qui succédait au Pr Buck. En 1978, je devenais chef de clinique, chargé de l’orthopédie pédiatrique dans un contexte très concurrentiel. Le service quittait des locaux très vétustes au Pavillon Leriche pour rejoindre le nouvel Hôpital de Hautepierre dans un environnement d’hôpital «Mère-Enfants». Ce déménagement et son environnement pédiatrique spécialisé a été très favorable. Progressivement, j’arrivais à augmenter le recrutement du service et les activités dans les années 80. L’environnement pédiatrique devenant de plus en plus nécessaire à la pratique de l’Orthopédie Pédiatrique, cette activité s’est progressivement arrêtée dans les autres cliniques. L’hôpital Stéphanie a fermé en 1995 et l’activité orthopédique pédiatrique, objet de la fondation s’est arrêtée. Le centre de Traumatologie a arrêté son activité d’Orthopédie Pédiatrique avec la venue du Dr Karger dans le service de Chirurgie Infantile en 2002. Ainsi progressivement toute l’activité d’Orthopédie Pédiatrique était regroupée dans le service de Chirurgie Infantile. L’activité d’orthopédie pédiatrique s’est également éteinte en ville avec le départ à la retraite du Dr Jean Berger en 2003. Actuellement en Alsace, toute l’Orthopédie Pédiatrique est regroupée sur le service de Chirurgie Infantile. L’hôpital de Colmar qui faisait un peu d’Orthopédie Pédiatrique a arrêté. A Mulhouse, seul JeanNoël Ligier a une activité d’Orthopédie Pédiatrique, dans un contexte libéral. Il est attaché au service de Strasbourg où il vient opérer ses scolioses. Le regroupement tardif de l’Orthopédie Pédiatrique Strasbourgeoise s’explique par l’histoire. Il a fallu près d’un siècle pour sortir de l’empreinte majeure que les Allemands ont appliqué aux hôpitaux de la ville dans le cadre d’une politique d’occupation qui se voulait brillante et définitive. La technique de Luque Galveston par Marie Christine Maximin-Giacomelli ramener vers la tige dont les deux pieds ont été introduits dans l’épaisseur des ailes iliaques. Cette technique n’a pas la prétention de corriger la rotation vertébrale car les points d’appui des fils sur les lames sont appliqués trop loin du centre instantané de rotation des vertèbres, situé au milieu du corps vertébral de chaque vertèbre. Elle permet toutefois de corriger dans les 3 plans de l’espace et d’améliorer la statique sagittale de la colonne. Le but du traitement n’est donc pas de corriger ad integrum la scoliose mais d’en arrêter la progression, tenter de redonner une plus grande ampliation thoracique et diminuer, voire stabiliser l’insuffisance respiratoire restrictive qui évolue souvent pour son propre compte malgré une correction satisfaisante de la colonne [2] permettre au patient d’avoir à nouveau une station assise confortable et pouvoir être verticalisé. En effet, la verticalisation est primordiale chez ces patients pour assurer une ventilation respiratoire efficace, un transit régulier et la lutte contre l’ostéoporose. L’ostéopénie limite souvent le choix du type d’ostéosynthèse, car les crochets deviennent alors agressifs avec un haut risque de fracture vertébrale lorsqu’ils sont mis en charge. Fig.1 : principe de réduction de la scoliose selon le technique de Luque Galveston Technique chirurgicale Principe La technique de Luque Galveston est une chirurgie d’arthrodèse postérieure du rachis avec prise pelvienne utilisant la tige en U pré formée de Moseley (Fig. 1 et 2). Elle a vu le jour au Mexique en 1972 pour traiter une fracture dislocation du rachis cervical de niveau C3-C4. Elle a été mise au point par Eduardo Luque et son collègue neurochirurgien Verdura. Eduardo Luque adapte et développe cette technique peu onéreuse pour traiter les scolioses des patients atteints de poliomyélite [1]. Le principe de correction des scolioses d’origine neuromusculaire consiste à respecter et utiliser les propriétés visco élastiques de la colonne vertébrale pour la La technique chirurgicale L’ostéosynthèse selon Luque est segmentaire, chaque niveau vertébral de T2 -T3 à L5 est relié à la tige par des fils sous lamaires, doubles, de taille 10 dixième à l’étage thoracique et 12 dixième à l’étage lombaire. Cette technique est réservée aux patients non marchant du fait du risque de lésion médullaire existant au passage des fils entre la lame et le sac dural. Le patient est installé en décubitus ventral en prenant soin de dégager les globes oculaires (risque de cécité par appui prolongé), l’abdomen (pour limiter le saignement per opératoire en l’absence d’appui sur la veine cave), les épaules en abduction et les coudes en flexion (en prenant garde de ne pas étirer les plexus brachiaux, éviter l’appui sur le nerf cubital au coude). Deux billots sont mis au niveau thoracique et un large sous les épines iliaques antérieures et supérieures. Fig. 2 : tige en U de Moseley 9 La technique de Luque Galveston par Marie Christine Maximin-Giacomelli L’enregistrement des potentiels évoqués mixtes neurogènes (PEMN) n’est pas nécessaire car les patients ne marchent pas. Un cell saver est utilisé pour compenser les pertes sanguines per opératoires. Elles peuvent être importantes, surtout chez les patients atteints de dystrophie musculaire de Duchenne. L’amplificateur de brillance est nécessaire au cours de l’intervention pour visualiser la direction de la pénétration des tiges dans les ailes iliaques. La visibilité des ailes iliaques est vérifiée avant le champage du patient. L’incision cutanée est médiane postérieure de T1 à S1. L’hémostase du tissu sous cutané est faite soigneusement à la pince bipolaire en prenant soin de ne pas brûler la peau afin d’éviter les risques de déhiscence cutanée et le risque de contamination infectieuse. L’aponévrose est ouverte sur les épineuses. Les gouttières para rachidiennes sont libérées des muscles para spinaux en sous périosté jusqu’à l’extrémité des processus transverses. L’abord non traumatique sous périosté permet de limiter le saignement. Les ailes iliaques sont ensuite préparées en les abordant directement sur leur crête ce qui crée un pont musculaire au dessus du plan des transverses, entre les crêtes iliaques et les processus transverses des vertèbres lombaires. Les articulations sacro iliaques ne sont pas ouvertes. Des pointes carrées de taille croissante vont préparer le trajet des extrémités de la tige en U. Le point d’entrée se situe à 1cm latéralement de l’articulation sacro iliaque et 1cm en dessous de la crête sur son versant endo pelvien. La direction de visée est repérée extérieurement au patient en mettant la main sur 10 le grand trochanter. Le trajet dans l’épaisseur de l’aile iliaque est subjectif car affaire de sensation manuelle pour être sûr de ne pas faire de fausse route. Il est aussi possible de libérer la face exo pelvienne de l’aile iliaque en sous périosté pour contrôler de visu l’absence d’extériorisation des pointes carrées puis de la tige. Un contrôle scopique est fait au début et à la fin du trajet de la pointe carrée de plus gros diamètre. L’étape de mise en place de la tige dans le bassin est primordiale et doit être faite avec la plus grande attention. La réduction de la scoliose va se faire au dessus de l’ancrage dans la vertèbre pelvienne. Il faut que la direction et l’assise de la base du mât soient idéales pour y accrocher une vertèbre après l’autre et relier ce système poly articulaire qu’est la colonne à son tuteur central, la tige. La taille de la tige est alors choisie. Le diamètre idéal pour sa rigidité est du 6,5 mm en inox et la longueur dépend de la taille du tronc du patient, en général elle oscille entre 33 et 35 cm. Les pieds de la tige sont alors introduits dans les ailes iliaques. Un nouveau contrôle scopique de la position des tiges est réalisé (Fig. 3). Puis chaque espace intervertébral de L5-S1 à T2-T3 est ouvert une fois les processus épineux sectionnés. Le ligament jaune est ouvert à la pince gouge puis plus largement à la pince de Kerissson pour laisser passer deux fils métalliques doubles sous chaque lame vertébrale. La prudence s’impose au sommet de la courbure et au niveau thoracique où les veines épidurales prennent la tangente et sont turgescentes. Il est bon d’avoir du Surgicel sur la table de l’instrumentiste si une hémostase s’avère nécessaire. La technique de Luque Galveston par Marie Christine Maximin-Giacomelli Puis tous les plans, musculaire, aponévrotique, sous cutané et cutané sont soigneusement fermés au fil résorbable sur deux drains de Redons placés dans le tissu sous cutané. Il s’agit d’un montage immédiatement stable qui ne nécessite pas la protection par un corset. Indications Fig. 3 : trajet de la tige dans l’aile iliaque. Les fils sont ensuite passés en sous lamaire de L5 vers T2, en douceur pour ne pas brutaliser le contenu du sac dural. Ils sont pour cela pré cintrés en hameçon dont l’extrémité est mousse (boucle du fil double brin). Chaque double fil est ensuite enroulé autour d’un bras de la tige, la partie distale à l’extérieur de la tige et la partie proximale à l’intérieur. Le double brin est tortillé dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, suffisamment solidaire de la tige pour ne pas pénétrer dans le canal médullaire (Fig. 4). A cette étape, la colonne est encore très éloignée de la tige et la trajectoire des épineuses traverse souvent par deux fois l’axe de la tige. Cette technique est réservée aux patients non marchants, soit d’origine neurologique soit d’origine musculaire, du fait du risque de lésion médullaire lors du passage des fils métalliques. Pour les patients atteints de Cerebral Palsy, F Miller [3] recommande la prise en charge chirurgicale de ces scolioses thoraco lombaires à grande courbure unique dès que l’angle de Cobb atteint 60° et que le cartilage en Y est fermé pour ne pas risquer un effet vilebrequin du fait de la croissance restante du tronc. L’angle de Cobb peut-être seulement de 30° si la réductibilité est faible sur les bending. Dans notre équipe, nous ajoutons les critères cliniques d’inconfort à savoir un appui ischiatique prédominant en station assise et la fermeture de l’angle ilio lombaire qui peut s ‘avérer être douloureux par frottement des côtes sur l’aile iliaque. Pour les patients atteints de dystrophie musculaire de Duchenne de Boulogne, les critères requis n’attendent pas la scoliose à grand rayon de courbure. Il faut pouvoir opérer ces patients avant la détérioration de la fonction cardiaque et pulmonaire dès que le cartilage tri radié est fermé. Cette fenêtre thérapeutique correspond à 5 ans après la perte de la marche. Résultats de deux études Fig. 4 : passage des fils sous la lame vertébral Une fois tous les fils métalliques placés, le serrage sur la tige se fait en plusieurs fois, toujours de la direction caudale vers la direction crâniale, ce qui permet de réduire progressivement le rachis en respectant et utilisant ses propriétés visco élastiques. Les épineuse ne franchissent parfois pas tout le long l’espace entre les bras de la tige en U ce qui donne l’image d’un dollar américain sur la télécolonne de face. Puis les extrémités des tortillons sont sectionnées à la pince coupante en laissant 1cm en place, elles sont ensuite tordues et orientées vers l’intérieur ou l’extérieur de la tige pour ne pas traumatiser les plans sous cutanés. Un dispositif de traction transversale (DTT) est placé à la partie proximale de la tige pour rigidifier le montage et stabiliser les tiges dans le pelvis. Un lavage est réalisé. La partie accessible de l’arc postérieur des vertèbres et des transverses est avivée au ciseau de Stagnara. La greffe autologue est issue des épineuses prélevées auparavant. Elle est surtout mise au niveau lombaire. Il s’agit de deux études rétrospectives concernant les patients de notre service atteints de dystrophie musculaire de Duchenne (Fig. 5) d’une part et d’autre part ceux atteints de Cerebral Palsy. La première a été réalisée en 2001 et comporte 13 myopathes opérés sur une période de 10 ans, à un âge moyen de 14 ans et 7 mois (13 -17 ans), à 5 ans de la perte de la marche. Tous présentent une insuffisance respiratoire restrictive à 56% de la capacité vitale théorique et deux d’entre eux une cardiomyopathie dilatée. 10 garçons ont une lordo scoliose pré opératoire avec une cyphose dorsale à 14° (0°-28°) et une lordose lombaire à 17° (15°-38°). L’angle de Cobb est à 30° (12°-80°) et le bassin est oblique par rapport à l’horizontale de 15° en moyenne (0°-50°). En post opératoire l’angle de Cobb est mesuré à 12° (2°-38°), le bassin oblique est à 8° (0°-36°), la cyphose dorsale à 21° (10°-34°), la lordose lombaire est à 28° (5°-46°). Au recul de 5 ans, la perte de correction est de 0,4° au niveau de la scoliose, de 2,2° pour le bassin oblique, il existe un gain de cyphose de 0,8° au niveau thoracique et la lordose lombaire reste stable. La seconde étude porte sur 31 patients atteints de Cerebral Palsy, non marchants, opérés de 1997 à 2007. Cette cohorte comporte 16 filles et 15 garçons, d’âge moyen 16 ans et 4 mois (12-17 ans) au moment de l’intervention. Le recul moyen est de 2 ans. L’angle de Cobb pré opératoire est de 80,4° (41°-118°) 11 La technique de Luque Galveston par Marie Christine Maximin-Giacomelli et le bassin oblique est à 20,7° (2°-55°). La correction permet d’obtenir un angle de Cobb à 36,5° (12°-108°) soit à 63% et un bassin oblique à 5,1° (0°-26°) soit à 73%. Au recul, la perte de correction de l’angle de Cobb est inférieure à 2° et celle du bassin oblique est de 1,3°. Nos résultats sont comparables à ceux de la littérature. Pour les patients atteints de dystrophie musculaire de Duchenne et traités par la technique de Luque Galveston, l’angle de Cobb pré opératoire est à 35,1° dans la série de Bellen [4] avec un bassin oblique à 14,4° ; la scoliose est corrigée à 68% et le bassin oblique à 77%. A plus de 2 ans de recul, la perte de correction est de 2° pour l’angle de Cobb et de 9° pour l’obliquité du bassin. Dans la serie de Bell [5], l’angle de Cobb pré opératoire est de 66° avec un bassin oblique de 18°. Ces angles sont corrigés respectivement à 54% et 42%. La perte de correction au recul de 3 ans est de 4,3° pour l’angle de Cobb et inconnue pour le bassin oblique. Dans les séries de Miller, Bulman [6], Bell et Rinsky [7], qui traitent des scolioses de patients atteints de Cerebral palsy, le pourcentage de correction de l’angle de Cobb est de 71%, 61,7%, 54% et 82%. Dans notre série, la correction est plus faible à 52,2% car la moyenne pré opératoire des angles de Cobb est plus élevée. Par contre, la correction de bassin oblique de notre série (75,5%) est dans la moyenne des corrections rapportées par ces auteurs (72,5%, 79,3%, 42% et 86,8%). Au recul, Miller constate une perte de correction de 2,6° au niveau de la scoliose et de 0,5° au niveau du bassin oblique. Conclusion La technique de Luque Galveston est donc une technique que nous utilisons pour traiter la scoliose des patients non marchants atteints de pathologie neuromusculaire. Elle est bien adaptée à ce type de scoliose et au terrain ostéoporotique du patient. Elle permet une correction satisfaisante de la déformation et sa stabilisation. Le nursing des patients peut être ainsi poursuivi dans une situation de confort pour eux, leur famille et les soignants. Tableau 1 : comparaison des résultats de la littérature utilisant la technique de Luque Galveston Fig. 5 : garçon de 13 ans DMD, radiographies pré et post opératoires de face et de profil Bibliographie 1. Eduardo Luque R. The Anatomic Basis and Development of Segmental Spinal Instrumentation. Spine, 1982, Vol. 7, n°3, 256-259 2. Miller F., Moseley C.F., Koreska J., Eng P., Levison H.: Pulmonary function and scoliosis in Duchenne dystrophy. J of Pediatr Orthop, 1998, 8, 133-137 3. Miller F. Spinal deformity. In: Miller F. Cerebral Palsy. Springer-Verlag, 2004 New York. P. 433-522 4. Bellen P., Soudon PH. , Hody JL. : La place de la chirurgie dans le traitement des séquelles des dystrophies musculaires. Acta Orthop. Belg., 1982, 48, 281-306 12 5. Bell D.F., Moseley C.F., Koreska J.: Unit Rod segmental spinal instrumentation in the management of patients with progressive neuromuscular spinal deformity. Spine, 1989, vol. 14, n° 12, 1301-1307 6. Bulman WA., Dormans JP., Ecker ML., Drummond DS.: Posterior spinal fusion for scoliosis in patients with cerebral palsy: A Comparaison of Luque Rod and Unit Rod Instrumentation. J of Pediatr Orthop, 1996, 16, 314-323 7. Rinsky LA. Surgery of spinal deformity in cerebral palsy. Twelve years in the evolution of scoliosis management. Clini Orthop 1990; 253, 100-9 Ostéosynthèse des fractures épiphyso-métaphysaires de l’enfant par Broches à Butée Réglable par Philippe Gicquel et Ludovic Schneider immobilisation plâtrée est mise en place pour 4 à 6 semaines et les broches sont ôtées généralement à 6 semaines. Fracture de l’olécrâne [3,4] (Fig. 2). Fig. 1 : broche à butée réglable [3,4] Introduction Les fractures épiphysaires ou épiphyso-métaphysaires de l’enfant requièrent un traitement adapté qui doit à la fois permettre de restaurer les surfaces articulaires et préserver les zones de croissance. Le traitement orthopédique ou l’utilisation de broches de Kirchner ne permettent pas toujours une réduction ou une stabilisation suffisante. L’usage de vis ou plaques est quant à lui souvent illicite en raison des conséquences qu’elles peuvent produire sur les cartilages de croissance par lésion de la vascularisation ou par atteinte directe liée par exemple au volume des implants. Dans le même but de préserver la vascularisation de ces zones de croissance, l’abord chirurgical doit être le plus restreint possible et une technique réalisable à ciel ouvert mais également par voie percutanée nous paraissait préférable [1]. C’est pour répondre à ces différents problèmes que nous avons développé ce concept de broches à butée réglable (Fixano® puis SBI®). Après étude biomécanique [2,4], nous l’avons appliqué à partir de 1999 aux fractures de l’olécrâne [3] puis depuis janvier 2002 à d’autres sites fracturaires avec de bons résultats cliniques et radiologiques [4,5]. Matériel et principes techniques Le principe de cette technique est d’allier la simplicité de mise en place des broches et leur faible encombrement préservant au mieux les zones de croissance, à une tenue voisine de celle d’une vis biomécanique [2,4]. Ceci est permis par l’utilisation d’une broche de 1,8 mm de diamètre, à extrémité filetée, sur laquelle est glissée après mise en place de la broche, une butée verrouillable conférant à l’implant la forme d’une vis (Fig. 1). Cette technique est applicable à de nombreux types ou localisations fracturaires et est réalisable à ciel ouvert mais également en percutané. Deux broches à extrémité filetée sont généralement utilisées et mises en place de façon divergente, après réduction de la fracture. Une butée est glissée sur chaque broche et appliquée par une pince ou au mieux par un guide mèche contre le fragment osseux (ou cartilagineux). Elle est ensuite verrouillée jusqu’à rupture du système de verrouillage autocassable. Les broches sont ensuite sectionnées. Une Fig. 2 : ostéosynthèse d’une fracture de l’olécrâne [3,4] Le patient est installé préférentiellement en décubitus latéral, bras sur support et avant-bras pendant sauf s’il y a une fracture de col radial associée justifiant d’un embrochage centro-médullaire. L’abord est généralement percutané, la réduction étant optimisée par effet poinçon et aisément contrôlable sous radioscopie. En cas de défaut de réduction, le foyer est bien entendu ouvert. Après réduction, les broches sont placées au moteur. La progression des broches est suivie sous radioscopie de manière à contrôler leur sortie à travers la corticale notamment antérieure et éviter de blesser les éléments vasculo-nerveux. Deux broches sont utilisées. Leur mise en place se fait de façon divergente, de manière à ce que leur bissectrice soit globalement perpendiculaire au trait de fracture. L’ancrage dans la corticale opposée n’est pas obligatoire mais augmente la stabilité. La butée est ensuite glissée sur la broche et appliquée contre le fragment proximal. Elle est verrouillée jusqu’à rupture du système autocassable. Une compression supplémentaire de manière à réduire au mieux le diastasis inter-fragmentaire peut alors être appliquée au moteur ou plutôt manuellement en se servant du mandrin comme d’un tournevis. La seconde broche est ensuite placée de façon similaire. Les broches sont enfin sectionnées à 2 ou 3 mm en amont de la butée. Le matériel est laissé en place 5 à 6 semaines, tout comme la contention plâtrée, de type brachiopalmaire. Fracture du condyle latéral [4] (Fig. 3). La voie d’abord habituelle, latérale ou postéro-latérale est utilisée. Le patient est installé en décubitus dorsal et le membre supérieur repose sur une tablette à bras. En cas de fracture déplacée, l’abord percutané n’est pas possible. En effet, le contrôle radioscopique de la qualité de réduction est difficile, en raison du caractère incomplet de l’ossification de la trochlée chez des patients souvent jeunes. L’intervention est réalisée sous garrot pneumatique. Après réduction, les broches sont placées au moteur de façon divergente. 13 Ostéosynthèse des fractures épiphyso-métaphysaires de l’enfant par Broches à Butée Réglable par Philippe Gicquel et Ludovic Schneider Une compression au niveau de la broche horizontale est possible évitant ainsi un diastasis articulaire, par contre elle est déconseillée pour la broche ascendante qui traverse le cartilage de croissance. Le matériel est laissé en place 5 à 6 semaines tout comme une contention plâtrée de type brachiopalmaire. être libéré et récliné en arrière. L’intervention est réalisée sous garrot pneumatique. Après réduction, les broches sont placées au moteur de façon divergente. Une compression au niveau des broches est possible chez les grands enfants, la fusion du cartilage de croissance apophysaire ne posant alors pas de problème. Le matériel est laissé en place 5 à 6 semaines tout comme une contention plâtrée de type brachiopalmaire. Fracture de la cheville [4] (Fig. 5). Le patient est installé simplement en décubitus dorsal. La réduction et la stabilisation par broche à butée est généralement réalisable en percutané, tout comme dans un vissage avec vis canulée. En effet, les éléments nobles tendineux ou vasculo-nerveux les plus proches des malléoles sont postérieurs, ce qui rend le brochage percutané peu risqué et la réduction par manœuvre externe ou par poinçonnage est souvent aisée. La mise en place des broches est faite le plus souvent parallèlement au cartilage de croissance permettant ainsi de rajouter de la compression pour fermer le diastasis fracturaire. La traversée du cartilage de croissance est parfois nécessaire, sans rajouter alors de compression hormis celle réduisant le diastasis fracturaire. Le matériel est laissé en place 5 à 6 semaines tout comme la contention plâtrée, par botte généralement. Fig. 3 : ostéosynthèse d’une fracture du condyle latéral [3,4] Fracture de l’épicondyle médial [4] (Fig. 4). Fig. 5 : ostéosynthèse d’une fracture de la cheville [3,4] Fig.4 : ostéosynthèse d’une fracture de l’épicondyle médial [3,4] La voie d’abord médiale classique est utilisée. Le patient est installé en décubitus dorsal et le membre supérieur repose sur une tablette à bras. L’abord percutané n’est pas possible en raison du contrôle nécessaire du nerf ulnaire qui doit 14 Fracture du massif des épines tibiales [5] (Fig. 6). L’intervention est réalisable par arthrotomie mais l’arthroscopie a notre préférence. L’installation se fait le plus souvent avec un appui sous la cuisse de manière à permettre une flexion aisée. Les voies d’abord classiques sont utilisées permettant une exploration de toute l’articulation et la réparation d’ une éventuelle incarcération méniscale. Une fois celle-ci levée, le fragment est réduit et fixé par la broche à butée. Dans ce cas, une seule broche est utilisée. La butée est préalablement verrouillée sur la broche à une distance de 25 à 30 mm de la pointe. La broche est ensuite introduite par la voie médiale et plantée dans le fragment puis enfoncée au moteur après réduction jusqu’à placer la butée au contact du massif des épines. La bonne réduction est vérifiée sous contrôle arthroscopique et éventuellement radioscopique. La broche est ensuite sectionnée mais juste en sous cutané de manière à l’ôter aisément 6 semaines plus tard sans avoir Ostéosynthèse des fractures épiphyso-métaphysaires de l’enfant par Broches à Butée Réglable par Philippe Gicquel et Ludovic Schneider recours à une nouvelle arthroscopie. Une immobilisation par attelle ou plâtre est mise en place jusqu’à l’ablation du matériel. quant à la stabilité notamment, nous les ont fait adopter dans quasiment toutes les fractures épiphysaires du coude de l’enfant. Dans les fractures de cheville, les broches à butée réglables sont également devenues d’utilisation fréquente, et elles se partagent les indications des fractures du massif des épines tibiales avec le vissage ou le laçage. Références Fig. 6 : ostéosynthèse d’une fracture des épines tibiales Conclusion La facilité d’utilisation des broches à butée réglable, que ce soit en percutané ou à foyer ouvert, et les bons résultats 1. Gicquel Ph, De Billy B, Karger C, Clavert JM. Olecranon fractures in children. Review of a series of 26 patients with a mean follow-up of 59 months. J Pediatr Orthop 2001 ; 21 :141-147. 2. Gicquel P, Maximin MC, Boutemy P, Karger C, Kempf JF, Clavert JM. Biomechanical analysis of olecranon fracture fixation in children. J Pediatr Orthop 2002 ; 22 :17-21. 3. Gicquel Ph, Maximin MC, Karger C, Clavert JM. Surgical technique and preliminary results of a new fixation conceps of olecranon fractures in Children. J Pediatr Orthop, 2003, 23, 398-401. 4. Gicquel Ph, Giacomelli MC, Karger C, Clavert JM. Behandlung epiphysärmetaphysärer Frakturen bei Kindern mit einem neuartigen Implantat. Der Gewindestift mit justierbarer Verriegelung (Fixano®). Treatment of EpiphyseoMetaphyseal fractures in Children with an Origina Implant. The threaded pin with an adjustable lock (Fixano®). Operat Orthop Traumatol, 2005, 17, 51– 65. 5. Gicquel P. Arthroscopie chez l’enfant. In : Encyclopédie Médico chirurgicale. Techniques Chirurgicales-Orthopédie-traumatologie. Elsevier-Masson. PSFE PDTL Un large éventail de plaques dédiées à la CHIRURGIE PÉDIATRIQUE Plaque de varisation et dérotation Plaque renforcée de varisation Plaque formable Plaque formable renforcée Integra LifeSciences Service France Immeuble Séquoia 2 • 97 allée Alexandre Borodine Parc technologique de la Porte des Alpes • 69800 Saint Priest • FRANCE ✆+33 (0)4 37 47 59 00 • fax +33 (0)4 37 47 59 99 [email protected] • www.Integra-LS.com La disponibilité de ces produits peut varier d’un pays ou d’une région à l’autre du fait de procédures d’enregistrement réglementaires ou de conditions de vente locales spécifiques. Surfix, newdeal et le logo vague Integra sont des marques ou des marques enregistrées de Integra LifeSciences Corporation ou de ses filiales. ©2009 Integra LifeSciences Corporation. Tous droits réservés. PRODUITS DESTINÉS À LA VENTE UNIQUEMENT EN EUROPE, AU MOYEN-ORIENT ET EN AFRIQUE. Le cas du jour par Jean Langlais Un jeune garçon de 10 ans se présente avec des douleurs cervicales associées à de la fièvre évoluant depuis 4 jours. Une notion de traumatisme cervical a été retrouvée dans les jours précédant l’admission. L’examen clinique retrouve une raideur du cou, sans adénopathies cervicales. Aucun déficit neurologique n’est observé. La CRP est à 95, la VS à 104 et les globules blancs à 8600 dont 74% de polynucléaires neutrophiles. Des hémocultures sont pratiquées. Les radiographies standard du rachis cervical sont normales, pas de lésions osseuses pas de modification de l’espace rétropharingé (Fig. 1). L’enfant est hospitalisé et mis en traction cervicale. A la scintigraphie on note une hyperfixation nette dans la région cervicale haute sans autre localisation infectieuse (Fig. 2). Ceci évoque soit une spondylodiscite ou une ostéomyélite vertébrale, soit une tumeur vertébrale. Sur les clichés dynamiques en flexion-extension il n’existe pas de diastasis anormal entre l’odontoïde et l’axis et donc la stabilité rachidienne est parfaite. Un examen tomodensitométrique retrouve un aspect de lyse de la partie supérieure de la dent d’odontoïde (Fig. 3). L’ IRM pratiquée confirme aussi bien en T1 qu’en T2 une lésion de l’apophyse odontoïde avec un œdème péri-lésionnel important. Elle montre un canal médullaire tout à fait sain avec un bon passage du liquide céphalo-rachidien autour de la moelle et donc l’absence de compression médullaire (Fig. 4). Quelque idée sur le diagnostic ? Conduite à tenir ? Fig. 1 : Radiographies standards initiales (J0) du rachis cervical. Fig. 2 : Scintigraphie au technétium corps entier : fixation du rachis Fig. 3 : en TDM une érosion de la partie supérieure de l’apophyse odontoïde. cervical haut sans autre foyer à distance. Fig. 4 : IRM du rachis cervical à J1 de l’hospitalisation : hyper signal de l’apophyse odontoïde et absence de lésion de la moelle. 16 Le coin de l’historien par Pierre Chrestian C’est au cours de sa réunion de novembre 2008 que la SOFOP a tenu à honorer deux de ses membres, Jean Mallet et Georges Filippe. Ils ont fait valoir, à des moments différents, les droits à cesser leur activité d’orthopédiste pédiatre. La rédaction de la Gazette remercie Pierre Chrestian, l’incontournable historien de la SOFOP, de lui avoir fait parvenir les textes accompagnant la remise des médailles. JEAN MALLET Jean Mallet m’est forcément sympathique car ce fut un orthopédiste libéral de renom avec une très forte empreinte pédiatrique. C’est un homme de rigueur, de constance, c’est ce qui lui a permis d’avoir un nom et une expérience irremplaçable dans le traitement de la luxation congénitale de hanche. Ce qui prouve que les libéraux peuvent apporter énormément à la SOFOP lorsqu’ils se consacrent à un créneau très précis et accumulent une expérience unique profitant de leur lieu d’exercice ici l’OUEST. C’est sa persévérance qui frappe. Il est l’un des pères fondateurs de la Société d’Orthopédie de l’Ouest, société d’économie mixte, hospitalière et libérale avec une revue qui est tout sauf régionale. On ne peut pas parler de Jean Mallet sans parler de son éternel complice Rey, à la clinique St Léonard dont ils ont contribué à créer le succès. Jean Mallet a été un pionnier de l’association orthopédique qui va devenir pour nous un mode d’exercice incontournable. En ce sens, il a été la aussi un novateur. Interne des hôpitaux de Paris, élève de Pierre Petit et de Godard d’Allaines, il appartient à une génération de chirurgiens « taiseux ». Il parle peu, il agit, en témoigne sa direction remarquable du « symposium sur la chirurgie des ménisques externes de l’enfant ». On peut difficilement parler de Jean Mallet sans parler de son fils Jean-François. Malgré un service de renseignement bien documenté, (bien que les renseignements généraux ne sont plus ce qu’ils étaient), je n’ai pas pu savoir si les colères séismiques étaient un apanage familial ! Je voudrai terminer ce bref hommage par une anecdote humoristique, véritable scoop qui en dit long sur le personnage : à la fin symposium sur les ménisques discoïdes pour fêter son succès, nous avons invité Jean Mallet, sur une idée de Rémi Kohler au Crazy Horse Saloon, et bien vous ne le croirez pas, il n’a jamais quitté son imperméable de la soirée ! GEORGES FILIPPE Rien de plus difficile que de brosser le portrait d’un homme modeste et discret. Ami de toujours, de 30 ans (sans la connotation ironique que l’on pourrait y voir), nous sommes passés par les mêmes épreuves, les mêmes affres, assistant à une véritable guerre entre orthopédistes et viscéralistes pour les nominations. Pire que les Capulet et les Montaigu. Ceci illustre à mes yeux sa vertu principale : la TENACITE !! Le pied et le rachis sont ses deux domaines de prédilection. C’est un rigoureux, formé à la bonne école de St Vincent de Paul, dans la droite ligne des élèves de Pierre Petit, s’inscrivant dans la continuité de cette pensée orthopédique. C’est un solide et c’est un homme sage. Pour avoir eu à traiter de nombreux malades communs, j’ai pu mesurer la profonde empathie qui l’anime et l’attachement que lui porte ses malades. Au cours d’un de nos séjours communs au Portugal dans le cadre de l’invitation de nos amis Portugais à des cycles de conférences, j’ai pu apprécier son aura dans ce pays… toujours avec modestie. C’est un de nos grands ambassadeurs ! Merci Georges pour tout, ta rigueur, ta ténacité, ton obstination ! Damsin lui succède, c’est du pareil au même. 17 MANUEL DE SURVIE DU CHIRURGIEN Revol, Servant Isbn : 9782840235521 Réunions à venir 1-4 avril 2009 Lisbonne 28ème réunion de l’EPOS 395 pages 29 avril – 2 mai Boston (USA) Réunion annuelle de la POSNA www.posna.org Prix : 33 € 4-6 juin 2009 Le Touquet Réunion conjointe SFCR-SFNCR-GES (40ème anniversaire du Groupe d’Etude de la Scoliose) 10 au 13 juin 2009 Toulouse Congrès de la Société Française de Pédiatrie et de l’Association des Pédiatres de Langue Française www.pediatrie2009.org 25-27 juin 2009 Caen Réunion commune « Franco-Britannique » Contact : JF Mallet 23-26 septembre 2009 Scottsdale, Arizona, USA 63 ème réunion de l’AACPDM (American academy for cerebral palsy) 18 Ecrit par des chirurgiens pour des chirurgiens, l’idée initiale de ce livre était celle d’une sorte de « manuel des castors juniors », de « couteau suisse » dans lequel on trouverait toutes les notions pratiques qui sont quotidiennement utiles au chirurgien, mais qu’on ne lui a pas apprises, ou mal, ou il y trop longtemps. Bien sûr, il n’était pas question de parler ici de chirurgie, puisque le lecteur est par définition hautement compétent sur le sujet. Mais quelques notions médicales de première nécessité nous ont paru utiles. L’habileté des auteurs est d’y avoir intégré un grand nombre de textes officiels, difficiles à réunir, et de fournir ainsi une base permanente et réactualisable de tout ce qui oriente et réglemente notre profession. La lecture de certains de ces textes donne « froid dans le dos ». L’impression vague de rétrécissement de l’espace mental que chacun ressent dans son activité, sans toujours trouver les mots justes pour l’exprimer, se transforme en la prise de conscience d’un terrifiant constat, au fur et à mesure que les auteurs juxtaposent les arguments : non seulement le chirurgien est menacé d’extinction, mais la chirurgie elle-même se trouve en péril… » Alain C. Masquelet Le cas du jour : réponse à un problème de “dent gâtée” par Jean Langlais Les hémocultures sont revenues positives à staphyloccocus aureus. Il s’agit donc d’une ostéomyélite du processus odontoïde. Le traitement antibiotique est débuté dès le cinquième jour de l’hospitalisation par Céfotaxime-Fosfomycine en IV pour une durée de 15 jours. En 24 heures les signes cliniques disparaissent. Un relais antibiotique per-os pendant 2 mois (Oxacilline) est institué, associé au port d’une minerve (Fig. 5). Fig. 5 : Traitement par port d’une minerve pendant 2 mois. Thibaut a été revu à 9 ans de recul. Il va parfaitement bien. Il est en première et joue couramment au football. La mobilité du cou et l’examen neurologique sont strictement normaux. Les clichés dynamiques en flexion-extension retrouvent une distance atloïdo-axoïdienne de l’ordre de 6 mm en flexion. Il montre de plus, une apophyse odontoïde surmontée d’une image osseuse, qui n’existait pas avant l’infection. Cette image osseuse est bien mobile avec le reste de l’apophyse de l’odontoïde (Fig. 6). été traités par un ou plusieurs gestes chirurgicaux. Le traitement conservateur a été proposé par certains. Mais, tous ces cas étaient des adultes. Ils ont été traités par halocast associé à des antibiotiques. La fusion atloïdo-axoïdienne peut se pratiquer secondairement et une fusion spontanée est toujours possible. Dans notre cas, nous avons évoqué le diagnostic par la scintigraphie et confirmé cette ostéoarthrite par les hémocultures et l’IRM. En effet, nous n’avons pas eu besoin de faire de ponction vertébrale en raison de la bonne réponse au traitement médical. Au début, l’examen radiologique standard était entièrement normal. Il n’y avait pas du tout d’élargissement de la région rétro-pharyngienne comme c’est souvent le cas dans ces atteintes de la charnière crânio-rachidienne. L’IRM a été pour nous la méthode la plus sûre pour montrer une infection aiguë comme cela était le cas chez beaucoup d’auteurs. Les clichés dynamiques de l’IRM sont très utiles pour rechercher une instabilité vraie occipito-cervicale avec ou sans signes cliniques de compression médullaire. La stabilité de la région atloïdo-axoïdienne et atlantooccipitale est due essentiellement au ligament cruciforme (Fig. 7). Le ligament transverse de l’atlas associé à ces deux expansions (supérieure et inférieure) suffit pour maintenir le processus odontoïdien dans sa bonne position. Nous pensons qu’il faut une atteinte de ce ligament pour avoir une instabilité. Dans notre cas, il n’y avait pas d’instabilité et donc les ligaments étaient probablement intacts. Seule la distance C1-C2 était un petit peu augmentée, vraisemblablement à cause de l’effilage de l’odontoïde. Du fait de la disposition de l’apophyse odontoïde par rapport à l’arc antérieur de C1 on pourrait se demander s’il ne s’agissait pas d’une ostéoarthrite de l’articulation antérieure C1-C2. Fig. 6 : Clichés dynamiques à 5 ans : distance atloïdo-axoïdienne à 6 mm et présence d’un « séquestre » surmontant l’apophyse odontoïde. Quoi qu’il en soit, il va très bien et nous avons décidé de ne rien lui faire de particulier et de le suivre régulièrement. Discussion L’atteinte par une infection de l’articulation antérieure atloïdoaxoïdienne est très rare chez l’enfant, seuls deux cas existent dans la littérature1, 2. Les premières descriptions de cette atteinte ont été rapportées par Makins et Abbot en 1896. Depuis cette époque, environ quarante cas ont été rapportés dans la littérature. Il s’agit essentiellement d’adultes qui ont Fig. 7 : Eléments de stabilisation de la charnière et articulation antérieure C1-C2. 19 Le cas du jour : réponse à un problème de “dent gâtée” par Jean Langlais L’odontoïde est maintenant surmonté d’une image osseuse qui semble soudée au reste de l’apophyse odontoïde qui est effilée. On peut se demander s’il ne s’agit pas, en fait, d’un séquestre osseux de l’apophyse odontoïde plutôt que d’un véritable os odontoïdeum qui serait mobile par rapport à l’apophyse odontoïde et immobile par rapport à l’arc antérieur de l’atlas sur les clichés dynamiques. En conclusion, nous pouvons dire qu’une arthrodèse C1C2 chez l’enfant doit être pratiquée s’il existe des signes de compression médullaire soit cliniques, soit radiologiques. L’IRM en flexion montrant alors qu’il existe des lésions du ligament cruciforme et/ou une destruction importante de l’apophyse odontoïde. Le traitement conservateur doit toujours être possible dans le cas contraire. Bibliographie 1 - Di Rocco M, Tasso L, Fondelli MP, Romanengo M, Giacchino R, Borrone C - Case of the month : a child with stiff neck - Eur J Pediatr 1997; 156 : 737-8 2 - Dimaala J, Chaljub G, Oto A, Swischuk L - Odontoïd osteomyelitis masquerading as a C2 fracture in an 18 month old male with torticolis : CT and MRI features Emerg Radiol 2006; 12 (5) : 234-6 Ces livres qu’il faut avoir lus par Rémi Kohler Ce titre, en forme de cri d’alarme d’un chirurgien orthopédiste de renom pour son métier et plus largement sur l’hôpital public -où il travaille depuis presque 40 ans - doit nous interpeller ! Dans son livre destiné au grand public, le Professeur L. Sedel se propose de nous éclairer sur le fonctionnement de nos hôpitaux et sur les mutations qui s’y déroulent (moins visibles mais tout aussi importantes que l’application des 35 heures !). Il se livre aussi à un acte politique, au moment où s’opère une modification profonde de notre système de soins dans son ensemble (cf Loi Hôpital Santé patient territoire). Nos dirigeants n’ont de cesse de dénoncer le déficit de l’hôpital public (la santé n’a pas de prix, mais elle a un coût – 11 % du PIB dont la moitié pour l’hôpital) et de proposer une approche comptable et « médico économique » rigoureuse (l’hôpital entreprise)pour pallier cette augmentation régulière. - Peut-on faire mieux, à moyens constants ? (voire moindres !). Certes, la crise n’épargne personne, mais ce raisonnement achoppe sur le terrain, celui que chacun de nous pourra observer comme « patient potentiel» : l’actualité récente, marquée par des dysfonctionnements hospitaliers graves a attiré l’attention sur les conditions de travail difficiles des personnels, victimes d’un profond malaise psychologique, et ne sont pas étrangères à la désaffection pour certaines carrières (chirurgie, anesthésie, infirmières.). Les enjeux, mais aussi les risques de ces orientations « politiques » doivent donc être bien pesés, et l’auteur a toute légitimité pour nous éclairer :.L. Sedel est chef de service d’un hôpital parisien (Höpital Lariboisière APHP) où il exerce son triple métier qui le passionne : chirurgien « soignant », enseignant (Professeur Paris 7) et chercheur de renom dans le domaine de la biomécanique et des biomatériaux. Il est l’actuel Président de la Société Française de Chirurgie Orthopédique (SOFCOT) et a été Conseiller ministériel (B Kouchner). - Les nombreux chapitres de son livre, bien loin du spectaculaire et de la prouesse technique, décryptent des aspects variés et mal connus du public ; ils nous aident surtout à écarter de nombreuses idées reçues en s’appuyant sur des exemples concrets, tirés de sa longue expérience : le fonctionnement des services d’urgence , du bloc opératoire, le rôle des « cadres de santé », de « l’ administration hospitalière», le poids des procédures réglementaires, la place du secteur privé à l’hôpital, l’accueil des patients en situation précaire, une comparaison avec d’autres systèmes (RU, USA), le principe de précaution…… Dans ce parcours critique -et constructif-, L. Sedel témoigne de beaucoup d’humanité et de considération pour les soignants (infirmières, aide soignantes, internes) : il les a cotoyés au cours d’une longue épreuve personnelle qu’il décrit en l’intercalant à sa réflexion de fond. Son regard, porté depuis « l’autre côté de la barrière », n’est pas le moindre intérêt de ce livre. Nul doute que cette rencontre sur ce grand problème de société qu’est l’Hôpital public attirera un public nombreux et suscitera une riche discussion. NDLR : ce texte constitue l’annonce d’une rencontre-débat dont l’invité sera Laurent Sedel, le 28 avril à Lyon, les animateurs de cette réunion étant R. Kohler, J. Riondet et J. Caton 20