Term - 7 - Bac blanc et corrigé

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Term - 7 - Bac blanc et corrigé
Dissertation appuyée sur un dossier documentaire
SUJET : Comment peut-on expliquer l'exclusion sociale aujourd'hui ?
DOCUMENT 1 :
« Les emplois précaires, à durée déterminée, l'intérim, les emplois à temps partiel imposés, les
emplois les plus mal payés se sont multipliés et, même quand ils permettent d'éviter la misère la plus noire,
ils interdisent toute installation dans la société, tout projet de vie un peu établi puisque les individus sont à
la merci des évènements. C'est dans ces groupes-là que les accidents de la vie, la maladie, la séparation
familiale, peuvent avoir des conséquences catastrophiques. [...]
« On peut légitimement parler d'exclusion et de dualisation quand les problèmes de chômage, de
précarité, de pauvreté se superposent dans les mêmes groupes et se renforcent mutuellement, créant ainsi
de véritables ensembles sociaux. Pour le dire simplement, on peut cerner toute une série de facteurs dont
l'addition fait passer de l'autre côté, du côté de l'exclusion ».
François Dubet, "Inclus/exclus : une opposition pertinente ?", in Cahiers français n°314, mai-juin 2003.
DOCUMENT 2 :
Perte d’emploi
Perte de lien
social
Rupture
familiale
Maladie
Isolement
Chômage de
longue durée
Précarité
Perte des droits
sociaux
Revenus
insuffisants
Aboutissement
de l’exclusion
J. Brémond & A. Gélédan, Dictionnaire des Sciences Economiques et Sociales, Editions Belin, 2002.
DOCUMENT 3 :
« Au-delà du cercle familial, l'ensemble des relations sociales est perturbé par le chômage. D'abord,
parce que beaucoup de ces relations s'étaient construites à partir du travail et qu'elles vont s'étioler (1)
rapidement [...]. Conscients de leur dévalorisation, de la suspicion qui, plus ou moins ouvertement, les
entoure, les chômeurs auront tendance à rompre volontairement les relations sociales qui risquent d'être
marquées par l'indifférence, la commisération (2), le mépris ou la crainte d'une demande d'aide. La rupture
s'observe non seulement dans les rapports interindividuels mais plus encore dans toutes les formes de
participation à la vie sociale, qu'il s'agisse du militantisme politique ou syndical ou de la participation à la
vie associative.
« [...] Nous n'avons pas insisté, tant le fait est évident, sur les difficultés financières auxquelles se
heurtent les chômeurs. L'allongement des durées de chômage et les restrictions apportées aux régimes
d'indemnisation font se multiplier des situations qui débouchent sur l'extrême pauvreté ».
(1) s'affaiblir
(2) pitié.
Jacques Freyssinet, Le chômage, Collection Repères, Editions La Découverte, 2002
DOCUMENT 4 :
Indicateurs de la pauvreté et de l'exclusion en France en % :
En
2002
Pauvreté
Taux de pauvreté de la population : part des individus vivant dans un ménage dont le revenu est
12,2
inférieur à 60% du revenu médian
Taux de pauvreté de la population en emploi : part des individus en emploi vivant dans un ménage
8,0
dont le revenu est inférieur à 60% du revenu médian.
(Attention, valeur pour 2001).
Minima sociaux
Persistance dans le RMI (présence supérieure à 3 ans)
48,7
Non accès aux droits fondamentaux
Taux de renoncement aux soins pour raisons financières
11,2
Taux de sortants du système scolaire à faible niveau d'études
13,4
Taux de demandeurs d'emploi non indemnisés
36,5
Part des demandes de logement social non satisfaites après un an.
33,6
Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, Rapport 2005-2006, 2006.
DOCUMENT 5 :
« La participation concrète des individus à la vie collective peut être analysée selon deux axes
principaux : celui qui définit leur rapport à l'emploi et à la protection sociale ; celui qui traduit l'ensemble
de leurs échanges et de leurs relations sociales dans la famille. [...] Or, on a assisté, au cours des deux
dernières décennies, d'une part, à la fin d'une organisation économique qui garantit le plein emploi, et,
d'autre part, à la désinstitutionnalisation des relations familiales et, en conséquence, à l'affaiblissement des
solidarités entre les membres de la famille. Sans doute l'appui familial permet-il souvent aux individus de
traverser une période difficile : les parents continuent à loger leurs enfants adultes qui ne trouvent pas
d'emploi, des membres de sa famille aident parfois financièrement le chômeur, le soutiennent par des
prestations en nature ou mobilisent leurs relations pour lui retrouver un emploi. Mais il s'agit toujours de
décisions personnelles dont beaucoup ne bénéficient pas. Ces évolutions globales de la structure sociale se
traduisent, au niveau des individus, par un risque accru de la naissance de processus d'exclusion [...] ».
Dominique Schnapper, L'exclusion, l'état des savoirs, sous la direction de Serge Paugam, 1996.
DOCUMENT 6 :
Pauvreté après transferts selon les situations d'emploi et la composition familiale en 2004 :
Taux de pauvreté
monétaire (après
transferts)
Personnes seules sans enfant
Chômage dominant
40%
Emploi à temps partiel
13%
Emploi annuel à temps plein
3%
Actifs vivant en couple sans
Deux chômeurs ; ou : un chômeur et un inactif
31%
enfant
Deux emplois annuels à temps plein
2%
Chefs de famille monoparentale Chômage dominant
37%
Emploi à temps partiel
14%
Emploi annuel à temps plein
3%
Actifs vivant en couple avec
Deux chômeurs ; ou : un chômeur et un inactif
50%
enfant(s)
Deux emplois annuels à temps plein
2%
Champ : ensemble des actifs appartenant à des ménages dont le revenu primaire est positif ou nul. Sont exclus les actifs
en couple avec un retraité ou hébergés dans un autre ménage.
INSEE - DGI, Enquêtes Revenus fiscaux 2001, actualisée 2004.
1ère et 2ème parties : formulation de la problématique à partir de l’analyse du sujet :
Décomposition des termes du sujet :
Expliquer
Définition : donner les causes
Différent de : décrire !
Différents sens : donner les causes
économiques, les causes sociales, les causes
politiques, les causes historiques, etc.
Exclusion
Définition : processus social multiforme par lequel un individu est progressivement coupé des liens
sociaux. Par définition, il y a donc très peu d’exclus (puisque rares sont les cas sans aucun lien soc)
Différent de : pauvreté, marginal, original, déviant.
Différents sens : Castel parle surtout de désafilliation (pour insister sur les relations familiales et
d’emploi) ; rupture des liens familiaux, rupture des liens dans l’emploi, rupture de liens étatiques,
rupture des liens associatifs, etc.
Analyse de la formulation : Comment peut-on expliquer = quels sont les mécanismes faisant que ?
Cadre spatio-temporel : « aujourd’hui » dans les documents : France, dans les années 1990 et 2000.
3ème étape : l’organisation de la dissertation.
Dans un premier temps, on regarde toutes les manières qu’on a de découper le sujet et qu’on a déjà vu dans l’analyse du sujet. On y
ajoute éventuellement celles apparaissant dans les documents
R1. Causes économiques, causes sociales, causes politiques.
R2. Liens dans l’emploi, liens familiaux, liens de la protection sociale.
On note tout ce qui nous permet de répondre à la problématique à partir de l’étude des documents, en n’oubliant pas de noter la
référence des documents (source + numéro du document).
D1a. Selon Dubet, certaines situations sociales conduisent à l’exclusion.
Ces situations « interdisent toute installation dans la société […] puisque
les individus sont à la merci des événements ». C’est le cas par exemple
des emplois « dits » précaires. Parmi eux, un emploi en intérim fragilise la
position sociale de l’individu. Le moindre désagrément, comme un
accident du travail, peut empêcher durablement de retrouver un emploi, ce
qu’il ne se produirait pas si l’individu était en emploi typique, donc bien
mieux couvert contre les risques sociaux.
D1b. L’exclusion sociale est d’autant plus fréquente que les individus
cumulent différents risques sociaux. Selon Dubet, c’est la superposition
des situations « de chômage, de précarité et de pauvreté » qui crée des
groupes sociaux d’exclus. Par exemple, on peut supposer que les
personnes en intérim, alternant des emplois courts à temps partiels et ne
permettant pas de vivre au-dessus du seuil de pauvreté, sont très
vulnérables et constituent les premiers individus à être socialement exclus.
D2a. Trois événements sont les déclencheurs du processus
d’exclusion selon Brémond & Gélédan : perte d’emploi, rupture familiale
et maladie sont les trois premières causes de perte de lien social, pouvant
conduire à l’isolement et in fine à l’exclusion.
D2b. L’événement le plus excluant selon Brémond & Gélédan est la perte
d’emploi : cette perte d’emploi conduit à une fragilisation des liens
sociaux et peut conduire dans le même temps à des situations de chômage
de longue durée et à des revenus insuffisants. Ces trois événements
combinés augmentent d’autant plus le risque d’exclusion.
D2c. Les deux barrières ultimes à l’exclusion sont l’existence de revenus
suffisants et le maintien des droits sociaux selon Brémond & Gélédan.
D3a. Le chômage est source d’exclusion en conduisant à des difficultés
financières, selon Freyssinet.
D3b. Le chômage est source d’exclusion selon Freyssinet en perturbant
les relations sociales dans la famille, dans l’emploi et « dans toutes les
formes de participation à la vie sociale, qu'il s'agisse du militantisme
politique ou syndical ou de la participation à la vie associative »
D3c. Le chômage est source d’exclusion selon Freyssinet par un
processus d’auto-exclusion. Le chômeur est souvent conscient du l’image
péjorative qu’on associe à sa situation. Sachant cela, il existe un risque
pour que le chômeur ait moins de contacts avec son entourage, ce qui le
conduit progressivement à ne pas plus avoir de liens sociaux.
D4a. L’emploi protège de la pauvreté et in fine de l’exclusion. En assurant
des revenus, l’emploi permet aux individus de maintenir des relations
sociales sans crainte de jugement social. Par exemple, selon l’ONPES, en
2002, tandis que 12,2% de la population totale vit avec une somme
mensuelle inférieure à 60% du revenu médian de l’ensemble de la
population, seulement 8% des personnes en emploi vivent avec une
somme mensuelle inférieure à 60% du revenu médian de l’ensemble de
la population.
D4b. L’assistance sociale est une aide qui peut conduire à un processus
d’exclusion. L’individu assisté peut en effet se voir enfermé dans
l’image d’assisté que la société lui impose et ne pas arriver à en sortir
malgré ses tentatives (recherche d’emploi, etc). Par exemple, selon
l’ONPES, en 2002, sur 100 personnes percevant le RMI, 49 le
perçoivent depuis plus de 3 ans.
D4c. Le chômage peut conduire à une situation de difficulté financière
source d’exclusion. En effet, la recherche d’emploi n’est pas toujours
compensée par des allocations chômage (selon diverses conditions). Par
exemple, selon l’ONPES, en 2002, sur 100 actifs demandeurs
d’emplois, 37 ne perçoivent aucune allocation chômage.
D5a. Les évolutions sociales récentes dans le domaine de l’emploi
conduisent à accroître les risques d’exclusion. Selon D. Schnapper, « la
fin d’une organisation économique qui garantit le plein emploi »
fragilise les individus.
D5b. Les évolutions sociales récentes dans le domaine de la famille
conduisent à accroître les risques d’exclusion. Selon D. Schnapper, « la
désinstitutionnalisation des relations familiales et, en conséquence,
l'affaiblissement des solidarités entre les membres de la famille »
fragilise les individus. Par exemple, même si un individu perd un
emploi, des liens familiaux fragiles comme dans le cas de certaines
familles recomposées ne permettent parfois pas de servir de filet de
sécurité dans l’attente d’un nouvel emploi.
D6a. L’emploi à temps plein reste la meilleure protection contre la
pauvreté et in fine l’exclusion. Par exemple, selon l’INSEE, quelque
soit la configuration familiale, seulement 2 à 3% des personnes en
emploi annuel à temps plein vivent avec un revenu annuel inférieur à
60% du revenu disponible médian de l’ensemble de la population. Par
contre, parmi les personnes seules sans enfant, 13% de ces personnes
étant de plus en emploi à temps partiel vivent avec un revenu annuel
inférieur à 60% du revenu disponible médian de l’ensemble de la
population.
D6b. La famille reste une bonne protection contre la pauvreté et in fine
l’exclusion. Par exemple, selon l’INSEE, 40% des personnes seules
sans enfant et au chômage vivent avec un revenu annuel inférieur à 60%
du revenu disponible médian de l’ensemble de la population, 37% des
chefs de famille monoparentale et au chômage sont dans cette situation,
et « seulement » 31% des actifs vivant en couple sans enfant et au
chômage sont dans cette situation.
On note également sur une feuille tout ce qu’on sait à partir du cours et qui nous permet de répondre à notre problématique.
C1. Il y a une modification de l’intégration familiale depuis les années 1960
avec : la baisse des mariages, la hausse des divorces, la pluralité croissante
des formes familiales, la pluralité croissante des calendriers de vie adulte
(vie en couple, naissance du premier enfant, etc.).
C2. Il y a une modification de l’intégration par l’emploi depuis les années
1970 avec : mode de production néotayloriste qui incite à l’individualisme,
développement des emplois précaires qui empêche la socialisation par
l’emploi, augmentation du taux de chômage qui augmente la concurrence.
C3. Robert Castel utilise l’expression « précariat » (La montée des
incertitudes, 2009) pour désigner la situation dans laquelle se place certains
individus alternant les périodes d’emploi, de chômage et d’inactivité sans
accéder de façon durable à l’emploi typique et ne pouvant de ce fait pas
accéder à l’autonomie financière.
C4. Le problème de l’exclusion apparaît plus aisément dans les sociétés
modernes à « solidarité organique » (Durkheim) puisque le poids de la
conscience collective est beaucoup moins fort et que les individus ont
beaucoup plus d’autonomie.
C5. 2007. Taux de pauvreté : au seuil de 60% : 13,4% des
individus (environ 8 millions d’individus) ont moins de 908
€/mois ; au seuil de 50%, 7,2% des individus (environ 4,2 millions
d’individus) ont moins de 757 €/mois. Smic à temps plein : 1005
€/mois net. Smic à temps partiel pour 31 heures est de 889 €/mois.
RMI est de 455 €/mois.
C6. L’Etat français contribue à créer des liens sociaux en mettant en
place des droits. Dans une logique universaliste ou dans une logique
particulariste, l’Etat reconnaît certaines situations sociales comme
normales et tend à les rendre « naturelles » aux yeux des citoyens.
C7. Les politiques d’activation font porter la protection sociale de
plus en plus sur les ménages, ce qui peut fragiliser ceux qui sont déjà
à la limite de l’exclusion.
Comment peut-on expliquer l'exclusion sociale aujourd'hui ?
Problématique : quels sont les risques sociaux, peut-être nouveaux, qui conduisent dans la France des années 1990 et 2000 à connaître
une rupture plus ou moins totale des liens sociaux ?
I.
Le risque d’exclusion sociale s’accroîtrait à mesure que l’emploi jouerait moins son rôle de protection :
A. La perte d’emploi : le premier risque social enclenchant le processus d’exclusion :
* D2b. L’événement le plus excluant selon Brémond & Gélédan est la perte d’emploi : cette perte d’emploi conduit à une fragilisation des liens
sociaux et peut conduire dans le même temps à des situations de chômage de longue durée et à des revenus insuffisants. Ces trois événements
combinés augmentent d’autant plus le risque d’exclusion.
* D3a. Le chômage est source d’exclusion en conduisant à des difficultés financières, selon Freyssinet.
D4a. L’emploi protège de la pauvreté et in fine de l’exclusion. En assurant des revenus, l’emploi permet aux individus de maintenir des relations
sociales sans crainte de jugement social. Par exemple, selon l’ONPES, en 2002, tandis que 12,2% de la population totale vit avec une somme
mensuelle inférieure à 60% du revenu médian de l’ensemble de la population, seulement 8% des personnes en emploi vivent avec une somme
mensuelle inférieure à 60% du revenu médian de l’ensemble de la population.
D4c. Le chômage peut conduire à une situation de difficulté financière source d’exclusion. En effet, la recherche d’emploi n’est pas toujours
compensée par des allocations chômage (selon diverses conditions). Par exemple, selon l’ONPES, en 2002, sur 100 actifs demandeurs d’emplois, 37
ne perçoivent aucune allocation chômage.
* D3c. Le chômage est source d’exclusion selon Freyssinet par un processus d’auto-exclusion. Le chômeur est souvent conscient du l’image
péjorative qu’on associe à sa situation. Sachant cela, il existe un risque pour que le chômeur ait moins de contacts avec son entourage, ce qui le
conduit progressivement à ne pas plus avoir de liens sociaux.
B. Mais les évolutions récentes font que certaines situations d’emploi peuvent enclencher un processus d’exclusion :
* C4. Le problème de l’exclusion apparaît plus aisément dans les sociétés modernes à « solidarité organique » (Durkheim) puisque le poids de la
conscience collective est beaucoup moins fort et que les individus ont beaucoup plus d’autonomie.
* D5a. Les évolutions sociales récentes dans le domaine de l’emploi conduisent à accroître les risques d’exclusion. Selon D. Schnapper, « la fin
d’une organisation économique qui garantit le plein emploi » fragilise les individus.
C2. Il y a une modification de l’intégration par l’emploi depuis les années 1970 avec : mode de production néotayloriste qui incite à
l’individualisme, développement des emplois précaires qui empêche la socialisation par l’emploi, augmentation du taux de chômage qui augmente la
concurrence.
* D1a. Selon Dubet, certaines situations sociales conduisent à l’exclusion. Ces situations « interdisent toute installation dans la société […] puisque
les individus sont à la merci des événements ». C’est le cas par exemple des emplois « dits » précaires. Parmi eux, un emploi en intérim fragilise la
position sociale de l’individu. Le moindre désagrément, comme un accident du travail, peut empêcher durablement de retrouver un emploi, ce qu’il
ne se produirait pas si l’individu était en emploi typique, donc bien mieux couvert contre les risques sociaux.
D6a. L’emploi à temps plein reste la meilleure protection contre la pauvreté et in fine l’exclusion. Par exemple, selon l’INSEE, quelque soit la
configuration familiale, seulement 2 à 3% des personnes en emploi annuel à temps plein vivent avec un revenu annuel inférieur à 60% du revenu
disponible médian de l’ensemble de la population. Par contre, parmi les personnes seules sans enfant, 13% de ces personnes étant de plus en emploi
à temps partiel vivent avec un revenu annuel inférieur à 60% du revenu disponible médian de l’ensemble de la population.
* D1b. L’exclusion sociale est d’autant plus fréquente que les individus cumulent différents risques sociaux. Selon Dubet, c’est la superposition des
situations « de chômage, de précarité et de pauvreté » qui crée des groupes sociaux d’exclus. Par exemple, on peut supposer que les personnes en
intérim, alternant des emplois courts à temps partiels et ne permettant pas de vivre au-dessus du seuil de pauvreté, sont très vulnérables et constituent
les premiers individus à être socialement exclus.
C3. Robert Castel utilise l’expression « précariat » (La montée des incertitudes, 2009) pour désigner la situation dans laquelle se place certains
individus alternant les périodes d’emploi, de chômage et d’inactivité sans accéder de façon durable à l’emploi typique et ne pouvant de ce fait pas
accéder à l’autonomie financière.
Transition : D3b. Le chômage est source d’exclusion selon Freyssinet en perturbant les relations sociales dans la famille, dans l’emploi et « dans
toutes les formes de participation à la vie sociale, qu'il s'agisse du militantisme politique ou syndical ou de la participation à la vie associative »
II.
Le risque d’exclusion sociale augmenterait dans le même temps en raison des mutations sociales et politiques :
A. La famille réduisait le risque d’exclusion mais semble moins capable de le faire aujourd'hui :
* D2a. Trois événements sont les déclencheurs du processus d’exclusion selon Brémond & Gélédan : perte d’emploi, rupture familiale et maladie
sont les trois premières causes de perte de lien social, pouvant conduire à l’isolement et in fine à l’exclusion.
* D6b. La famille reste une bonne protection contre la pauvreté et in fine l’exclusion. Par exemple, selon l’INSEE, 40% des personnes seules sans
enfant et au chômage vivent avec un revenu annuel inférieur à 60% du revenu disponible médian de l’ensemble de la population, 37% des chefs de
famille monoparentale et au chômage sont dans cette situation, et « seulement » 31% des actifs vivant en couple sans enfant et au chômage sont dans
cette situation.
* C4. Le problème de l’exclusion apparaît plus aisément dans les sociétés modernes à « solidarité organique » (Durkheim) puisque le poids de la
conscience collective est beaucoup moins fort et que les individus ont beaucoup plus d’autonomie.
D5b. Les évolutions sociales récentes dans le domaine de la famille conduisent à accroître les risques d’exclusion. Selon D. Schnapper, « la
désinstitutionnalisation des relations familiales et, en conséquence, l'affaiblissement des solidarités entre les membres de la famille » fragilise les
individus. Par exemple, même si un individu perd un emploi, des liens familiaux fragiles comme dans le cas de certaines familles recomposées ne
permettent parfois pas de servir de filet de sécurité dans l’attente d’un nouvel emploi.
C1. Il y a une modification de l’intégration familiale depuis les années 1960 avec : la baisse des mariages, la hausse des divorces, la pluralité
croissante des formes familiales, la pluralité croissante des calendriers de vie adulte (vie en couple, naissance du premier enfant, etc.).
B. Les politiques publiques au cœur des mutations des risques d’exclusion :
* D2c. Les deux barrières ultimes à l’exclusion sont l’existence de revenus suffisants et le maintien des droits sociaux selon Brémond & Gélédan. Les pouvoirs publics peuvent intervenir sur ce levier.
* C6. L’Etat français contribue à créer des liens sociaux en mettant en place des droits. Dans une logique universaliste ou dans une logique
particulariste, l’Etat reconnaît certaines situations sociales comme normales et tend à les rendre « naturelles » aux yeux des citoyens.
D3c + D4b. L’assistance sociale est une aide qui peut conduire à un processus d’exclusion. L’individu assisté peut en effet se voir enfermé dans
l’image d’assisté que la société lui impose et ne pas arriver à en sortir malgré ses tentatives (recherche d’emploi, etc). Par exemple, selon l’ONPES,
en 2002, sur 100 personnes percevant le RMI, 49 le perçoivent depuis plus de 3 ans.
* C7. Les politiques d’activation font porter la protection sociale de plus en plus sur les ménages, ce qui peut fragiliser ceux qui sont déjà à la limite
de l’exclusion.