Les hauts et les bas des droits successoraux américains

Transcription

Les hauts et les bas des droits successoraux américains
Les hauts et les bas des droits
successoraux américains
L
On attendait
de pied ferme
une réforme
permanente
des droits
successoraux
américains
payés par les
Canadiens
détenant des
biens chez nos
voisins du Sud.
Elle se fait
toujours
attendre.
es Canadiens sont nombreux à avoir
profité de la déflation immobilière
aux États-Unis et de l’augmentation
du dollar canadien des dernières années
pour faire l’acquisition d’une résidence
secondaire au soleil.
Savaient-ils cependant qu’un résident
canadien qui n’est ni résident, ni citoyen
américain et qui détient des biens aux
États-Unis peut avoir à respecter certaines exigences américaines en matière de
déclaration de revenus des particuliers, en
plus d’être assujetti à l’impôt américain sur
les successions ?
Chez nos voisins du Sud, on parle
davantage de taxe sur l’héritage, puisque la
succession sera imposée sur la valeur brute
totale des biens situés sur leur territoire,
contrairement à l’impôt au décès canadien
qui s’applique seulement sur la plus-value
accumulée au jour du décès. Voilà déjà une
différence de taille.
Les droits successoraux américains
(DSA) se calculent en fonction d’une
échelle progressive qui, jusqu’à tout
récemment, pouvait aller jusqu’à 45 %
(en 2009) de la valeur brute des biens
assujettis. Heureusement, la convention
fiscale entre le Canada et les États-Unis
accorde au résident canadien qui n’est pas
un citoyen américain un crédit proportionnel équivalent à celui dont bénéficient
les Américains. De plus, si des droits
successoraux sont néanmoins payables, il
sera possible de réclamer (au fédéral seulement) un crédit pour impôts étrangers
dans la dernière déclaration de revenus
d’un Canadien décédé.
Cette convention prévoyait, jusqu’à tout
récemment, un crédit égal au plus élevé des
montants suivants :
■■ un crédit unifié de 13 000 $US, qui
permet de soustraire totalement des
DSA une succession comportant des
biens situés aux États-Unis dont la
valeur est inférieure à 60 000 $US
34
mai 2011
ou
■■ un crédit proportionnel équivalent au
crédit global prévu par la législation
américaine pour un citoyen des ÉtatsUnis, pour l’année du décès, multiplié
par la proportion (en valeur toujours)
des biens américains sur le montant
total des biens de la succession.
Plus simplement, le montant du
crédit global prévu pour 2009
permettait d’obtenir une exemption
totale pour une succession dont la
valeur mondiale était inférieure à
3 500 000 $US.
Pourquoi faire aujourd’hui un rappel
des règles prévues en 2009 ?
Retournons momentanément à
l’année 2001 où, en vertu de l’Economic
Growth and Tax Relief Reconciliation Act,
le gouvernement américain prévoyait, d’une
part, la diminution progressive du taux
marginal d’imposition des DSA partant
de 55 % en 2001 pour en arriver à 45 %
en 2009, et d’autre part, l’augmentation
graduelle du crédit global, de manière à
exonérer complètement les successions
dont la valeur mondiale était inférieure à
3 500 000 $US en 2009.
De plus, cette règlementation prévoyait,
aussi surprenant que cela puisse paraître,
l’abolition complète de l’application des
DSA pour l’année 2010, et le retour aux
anciennes règles de 2001 dès janvier 2011,
soit une exemption totale pour une succession mondiale de 1 000 000 $US et moins,
et un taux d’imposition marginal applicable
de 55 %. Voilà pourquoi vous avez peut-être
entendu dire qu’un décès survenu en 2010
pouvait, dans certaines situations particulières, apporter des bénéfices fiscaux.
En fait, depuis 2004, les milieux juridique et financier attendaient une réforme
en provenance du Congrès américain, qui
devait remédier à cette étrange situation,
où les contribuables voyaient fluctuer de
manière importante la charge des DSA
www.conseiller.ca
La boîte àoutils
Sophie Ducharme
applicables selon une année ou une autre du
décès.
Or, ce n’est que le 17 décembre 2010 que
de nouvelles mesures ont été adoptées. Elles
ne visent toutefois que trois années : 2010
de façon rétroactive, 2011 et 2012. Nous
replongeons donc une fois de plus dans une
situation temporaire qui se résume principalement comme suit :
■■ l’application rétroactive des DSA pour
les successions ouvertes en 2010, avec
possibilité pour le liquidateur de faire
le choix, dans les délais prescrits, de se
soumettre aux anciennes règles (donc
aucuns droits successoraux payables, mais
conservation du coût initial des biens pour
les héritiers lors d’une imposition future)
ou encore de se prévaloir des nouvelles
règles applicables pour les années 2011
et 2012, soit :
- l’augmentation du crédit global, ce qui
exempte ainsi complètement de
l’application des DSA toutes les successions
canadiennes dont la valeur mondiale est
de 5 000 000 $US et moins;
- la réduction du taux marginal d’imposition
des DSA à 35 %, à partir de la première
tranche de 500 000 $US et plus.
Cela dit, qu’arrivera-t-il après le 31 décembre 2012 ? Bien malin qui pourra prétendre
planifier à long terme. Serait-ce en raison d’une
campagne électorale américaine imminente ?
On nous souffle à l’oreille que les Républicains
seraient enclins à abolir cette taxe, alors que les
Démocrates voudraient bien la conserver.
Dans un tel climat d’incertitude, nous vous
recommandons fortement de revoir les planifications successorales de vos clients concernés,
de manière à vous assurer de leur pertinence
et de leur justesse, à la lumière des nouvelles
règles.
En attendant, souhaitons-nous la meilleure
des chances, la saga se poursuit…
Sophie Ducharme, notaire, Pl. Fin.,
vice-présidente, Fiducie et service-conseil,
Gestion privée 1859,
Trust Banque Nationale.
mai 2011
35

Documents pareils