Docteur Folamour
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Docteur Folamour
Docteur Folamour Dr Strangelove, or How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb Réalisation : Stanley Kubrick Scénario :Stanley Kubrick, Terry Southern et Peter George (d’après son roman “ Alerte rouge ”) Photographie : Gilbert Taylor Musique : Laurie Johnson Production : Stanley Kubrick, Hawk Films Interprétation : Peter Sellers ( Mandrake, Président Muffley, Dr Folamour ), George C. Scott ( Général “ Buck ” Turgidson), Sterling Hayden (Général Jack D. Ripper ) États-Unis – 1963 – N & B – 93 mn Synopsis Paranoïaque et dépressif, le général Ripper envoie ses B 52 nucléaires bombarder l’Union Soviétique. Les machines de guerre sont lancées et il est impossible de les rappeler sans un code secret que seul connaît Ripper. La panique envahit la Maison Blanche où le président Muffley réunit un état-major de crise pour arrêter les bombardiers. Le général Turgidson, guerrier “ macho ” anticommuniste suggère qu’il faut laisser faire et profiter de la situation. Le président ne cède pas aux sirènes du “ va-t-en-guerre ” et lance une opération militaire contre la base du général Ripper pour lui faire avouer le code secret. Arrive à l’état-major de crise un étrange “ conseiller scientifique ” à l’accent allemand et à l’allure inquiétante : le docteur Folamour. Il explique comment sauver l’espèce humaine en maintenant pendant plus d’un siècle un petit groupe d’hommes sélectionnés dans un abri souterrain. Sa thèse exposée et l’auditoire convaincu, le docteur Folamour laisse apparaître sa véritable nature, tandis que les bombes explosent en série. Pistes de travail 1 – Guerre froide et paranoïa Docteur Folamour sort en 1963 en pleine guerre froide. La genèse du film est contemporaine de la crise des missiles soviétiques de Cuba. Kubrick s’inspire de la réalité et de la peur que cette situation de crise a fait naître dans l’esprit des gouvernants. Outre la folie paranoïaque du général Ripper ou l’angoisse chronique de l’ambassadeur soviétique, Kubrick s’est attaché à donner une représentation cinématographique du climat de peur qui règne à cette époque. On étudiera la scène où Ripper accuse l’ambassadeur (qui nie aussitôt) de prendre des photos du Pentagone : la mise en scène ne permet pas de dire si le diplomate est un espion ou si Ripper a tenté de l’accuser à tort, si bien qu’un doute (et c’est là l’intérêt de la scène) s’installe dans l’esprit du spectateur au sujet de leur culpabilité. Et peu importe ici de savoir si Ripper a raison ou non d’accuser l’ambassadeur (l’incident est d’ailleurs classé sans suite). L’enjeu est de mettre en évidence l’immense suspicion qui tend les rapports entre Américains et Soviétiques. Aussi la mise en scène souligne-t-elle cette crainte paranoïaque pour la légitimer plus tard au cours de la scène où l’ambassadeur prend discrètement des clichés avec une montre-appareil photo. 2 – Des personnages caricaturés Docteur Folamour est entièrement tourné sur le rapport paradoxal entre l’immense intelligence de l’homme et son incommensurable bêtise, c’est-àdire son acharnement à vouloir tout détruire avec ce qu’il produit. La dialectique mise en place (bêtise/intelligence, États-Unis/Union soviétique, ombre/lumière, vérité/apparence, mouvement/ inertie...) évite tout manichéisme béat. Plus qu’ailleurs, Américains et Soviétiques sont tenus pour responsables du grand cauchemar atomique qui menace la planète. Responsables pour cause de démence paranoïaque et de mégalomanie pour Ripper, de flegme courtois vaguement démissionnaire pour Mandrake, d’aveuglement belliciste pour Turgidson, d’ivresse de conquête pour le commandant du B-52, d’ivresse tout court pour le président soviétique, etc. En revanche, le président américain est un personnage plus nuancé (plus évolutif) que les autres. Démocrate humaniste et sentimental, il perd peu à peu ses illusions face à une situation qui lui échappe totalement et finit par prêter une oreille aux idées fascistes de Folamour. Le verre d’alcool qu’il tient en main à la fin du film est un dernier signe de son renoncement. On étudiera le personnage du docteur Folamour dont les gestes irrépressibles trahissent les efforts de respectabilité apparente. Son accent, son comportement inquiétant, son salut nazi, son «mein Führer», son nom à consonance germanique sont autant de preuves de son attachement au IIIe Reich. Retenons la séquence où il développe sa théorie nazie de sélection de la race. 3 – La satire de la guerre La critique de la guerre passe aussi par les lieux et les machines de guerre. Trois lieux ou décors divisent l’action du film : la base aérienne, le bombardier et le Pentagone. Trois espaces fermés qui ne communquent jamais que par les télécommunications omniprésentes comme si la technologie avait pris le pas sur les relations humaines. Idem pour les machines : la radio en panne dans le B-52 fou et la «machine du Jugement dernier» guident l’homme, le poussent à obéir et à agir par contrainte. Ce sont les dysfonctionnements techniques qui sont les vrais moteurs d’une intrigue et d’un destin qui échappent définitivement au contrôle des hommes. Ceux-ci n’étant plus que les rouages d’une machine infernale qui les broie. On notera encore qu’à cette «unité» du lieu clos s’ajoutent l’unité de temps (le compte à rebours stipule qu’il ne reste que 25 minutes) et l’unité d’action (les bombardiers en route vers leur cible), ceci au service de la tragédie bouffonne. La parodie tourne en dérision le mythe de la conquête américaine (western, cavalerie). Ce cauchemar apocalyptique, d’autant plus craint qu’il est vraisemblable, ne pouvait guère être traité sérieusement que sur le ton de la farce, du grotesque et de l’outrance. Remarquons l’opposition entre les explosions atomiques et la guimauve musicale de la fin. (Fiche réalisée à partir d’un dossier du CNDP)
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