Trois questions, trois visions

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Trois questions, trois visions
réseaux 4G
dossier
Trois questions, trois visions
jean-françois ferland
Des responsables des technologies au sein d’organisations, des dirigeants d’entreprises de l’industrie des TIC et des observateurs répondent à trois questions liées à la thématique de notre dossier.
Jean-Guy Rens
Associé principal
Sciencetech
Sofiène Affes
Professeur titulaire
Chaire de recherche en
communications sans fil à
haute vitesse - INRS
Québec
Montréal
Pierre Deguire
Président
PigisTelecom
Blainville
photo : Christian Fleury
1- Quels ajouts majeurs obtiendront les organisations qui adopteront hâtivement les réseaux mobiles 4G?
Jean-Guy Rens : Un écosystème industriel qu'on
appelle « Internet des objets » est en train de se
créer, où tous les objets de notre environnement
seront progressivement dotés d’intelligence et interreliés en temps réel. L’atout du 4G est de permettre
ce temps réel si utile. Toute entreprise qui entend
rester en affaires au cours des dix prochaines années
devra appartenir à cet écosystème, dont le lien sera
le 4G. Le gain de bande passante rend tout possible.
Les premiers ordinateurs avaient 4 ko de mémoire,
mais lorsqu'on s'est mis à parler de gigaoctets, ce
n'était plus la même chose. Avec le gain de la bande
passante, on pourra agir et offrir des services différemment.
Sofiène Affes : Avec le "vrai" 4G et un spectre
plus large, les avantages sont des débits beaucoup
plus élevés, soit environ deux fois plus qu'avec le
3G, et des latences moins importantes, soit d'un
facteur de dix ou plus. On augmente de beaucoup
la vitesse de transmission et le temps de réponse,
ce qui permet le développement de nouvelles
applications. Le terrain étant prêt, il faut que les
développeurs d'applications emboîtent le pas. Cela
rendra l'expérience de l'utilisateur beaucoup plus
agréable.
Pierre Deguire : Un des gros points qui influencera cette nouvelle technologie qu'est le 4G
est l'infonuagique, qui amène de nouvelles fonctions et une accessibilité accrue à bon nombre
d'applications. Cela aura une incidence au sein des
entreprises qui ont des gens mobiles et qui pourront
tirer profit d'un accès plus rapide à bon nombre
d'informations, surtout en multimédia.
2- Quels défis émaneront du déploiement progressif des réseaux 4G sur le territoire? Comment les contourner?
Jean-Guy Rens : Le grand défi du 4G est
l’intégration sans discontinuité avec la fibre optique : tout ce qui est sur un réseau sans fil doit
pouvoir transiter sur un réseau câblé et vice-versa.
Pour aborder en bonne position l’arrivée du 4G,
même si elle n'y a pas accès ou n'a pas envie de s'y
lancer immédiatement, une entreprise devrait installer du WiMax ou du LTE et tester en interne dès
aujourd’hui les services qui seront commercialisés
demain. Les entreprises qui ne peuvent pas effectuer un tel déploiement ont intérêt à collaborer
avec des universités pour explorer les concepts qui
s’appliquent à leurs domaines d’activités. Sofiène Affes : Chez des fournisseurs, avec la
technologie 4G, il y a des problèmes de nature technique aux abords des cellules, soit des interférences
qui sont dues à des chevauchements avec les cellules
voisines, et des problèmes dans le transfert d'une
cellule à l'autre. Les fournisseurs devront densifier
leurs équipements de transmission afin de combler
les "trous" de couverture.
Du point de vue de l'utilisateur final, une flexibilité des applications sera nécessaire, avec une version
élaborée qui sera disponible dans une zone 4G et
une version plus simple qui sera utilisable ailleurs.
Pour ces applications, il faudra assurer une compatibilité et une interopérabilité avec les technologies
de réseaux précédentes. L'utilisateur pourra faire
l'ajustement lui-même ou recourir à une configuration automatique [d'une version à l'autre].
Pierre Deguire : Il y aura une période de transition qui sera plus ou moins longue d'un fournisseur
à l'autre, alors que la performance des réseaux qui
sont en cours d'implantation se rapproche parfois
du « 3G avec des stéroïdes » plutôt que des spécifications du 4G. Les organisations qui adopteront
ce qu'on pourra leur livrer devront être conscientes
qu'elles n'iront pas y chercher la pleine performance
à court terme. Elles devront planifier ces aspects
dans leurs plans directeurs technologiques. Puisque
l'amplitude du service sera progressive, bien des
entreprises resteront sur les lignes de côté et attendront que les réseaux s'optimisent avant de s'y
embarquer, tandis que d'autres y verront une performance supérieure à l'habitude et se contenteront
de ce qui pourra être obtenu pour l'instant.
3- Est-ce les prochaines générations des réseaux mobiles se résumeront à des élargissements de bande passante?
Jean-Guy Rens : Il ne faut pas sous-estimer le
potentiel d’un élargissement de bande passante.
Quand l’accès Internet est passé du modem à la liaison
LNPA ou au câble, il a transformé le monde. Il en sera
de même quand le réseau sans fil passera au 4G, bien
que de façon encore plus radicale, puisque le sans-fil a
pour vocation de pénétrer partout, et non seulement
dans quelques lieux précis comme la maison et le
bureau. Les ingénieurs suggéreront sûrement d'autres
aspects technologiques, comme l'utilisation d'un nombre réduit d'antennes ou d'antennes moins hautes, ou
bien le recours à des réseaux maillés où chaque appareil mobile deviendra une antenne. Les développeurs
d'applications devront saisir qu'ils pourront utiliser de
plus en plus de bande passante et un accès universel,
où il n'y aura plus de différence entre le réseau fixe
et le réseau mobile, ce que les Sud-Coréens ont testé
longtemps et utilisent aujourd'hui.
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direction informatique novembre 2011
Sofiène Affes : Il y aura de nouvelles caractéristiques au niveau technologique que
l'utilisateur final ne verra pas, mais qui
rendront le service beaucoup plus efficace. Il y a différentes contraintes à
résoudre, par exemple au niveau du
débit total, du débit de crête, de
la latence, de l'efficacité spectrale
et de l'interopérabilité, qu'il faut
traiter afin d'atteindre les objectifs
des nouvelles générations des réseaux mobiles. Pour les opérateurs,
il y a aussi des contraintes de coûts,
de rétrocompatibilité rétroactive et de mobilité pour la desserte des usagers qui se déplaceront à grande
vitesse.
Pierre Deguire : Avec le 4G on vise
une plus grande bande passante,
mais aussi un plus grand nombre
d'utilisateurs par cellule. Cela
procurera des bénéfices dans
les grands centres où l'on
trouve une forte concentration d'utilisateurs. Ainsi,
l'usager devrait obtenir une
meilleure performance.
J'ose croire que ces tendances se poursuivront dans
le futur, mais il est difficile de
savoir si d'autres éléments dimensionnels s'y ajouteront. n
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