Malformations du vagin
Transcription
Malformations du vagin
Malformations du vagin R. Rouzier, B. Haddad et B.-J. Paniel Les cloisons vaginales peuvent être transversales ou verticales. Les cloisons transversales peuvent être uniques ou multiples, complètes ou perméables. Le bilan associe l’échographie pelvienne à l’urographie intraveineuse (UIV) et la cœlioscopie. Le traitement est urgent en cas de cloison complète avec rétention menstruelle il consiste à débrider la cloison à partir de son centre pour permettre l’écoulement menstruel. Un traitement complémentaire après évacuation de l’hématocolpos permettra une correction plastique définitive. Les diaphragmes perméables doivent bénéficier d’un geste chirurgical : la technique dite « des crevés » est la plus intéressante, elle consiste à tracer des incisions radiaires pour effacer le diaphragme. Les cloisons longitudinales divisent le vagin en deux cavités perméables, elles sont souvent asymptomatiques. Leur diagnostic est parfois difficile car la valve d’un spéculum peut masquer la cloison. Dans 90 % des cas, elles sont associées à une malformation utérine. Le bilan comprend une échographie pelvienne associée parfois à une hystéroscopie ou une hystérographie. La cœlioscopie n’est pas toujours indispensable pour compléter le diagnostic. L’IRM est particulièrement intéressante. Le traitement est chirurgical et consiste à réséquer les cloisons. Les aplasies vaginales peuvent être totales. Il existe habituellement une aplasie utérine associée (syndrome de Rokitanski). Le diagnostic est soupçonné cliniquement devant une aménorrhée primaire et confirmé par l’échographie. Le traitement est chirurgical. CLOISONS TRANSVERSALES DU VAGIN Les cloisons transversales (ou diaphragmes congénitaux du vagin) ont une épaisseur variable, plus importante lorsque plus haut situés, notamment au niveau de leur base d’insertion, mais toujours inférieure à un centimètre. Leur siège est également variable : peu audessus de l’hymen ou au tiers supérieur du vagin, surmontés alors souvent d’une voûte vaginale étriquée, en entonnoir, dénuée de véritables culsde-sac vaginaux (1, 2). Les cloisons transversales peuvent être multiples et étagées. On distingue les diaphragmes complets et les diaphragmes perméables. DIAPHRAGMES COMPLETS Ils sont découverts à la période néonatale, car source d’hydrométrocolpos, et à la période pubertaire, car source d’hématocolpos. La rétention menstruelle complète s’exprime par une aménorrhée primaire douloureuse. Chez une jeune fille âgée de treize à quinze ans, la survenue d’une crise douloureuse pelvienne à type de colique expulsive, isolée, durant de un à quelques jours, évoque la survenue prochaine de règles. Non seulement celles-ci n’apparaissent pas, mais les crises douloureuses se répètent les mois suivants ou sans périodicité, étant donné l’irrégularité habituelle des menstruations des deux premières années, devenant de plus en plus intenses et faisant bientôt place à un endolorissement permanent du pelvis avec recrudescence cyclique. Parfois, c’est le tableau trompeur d’une urgence chirurgicale : torsion de kyste ovarien, appendicite, péritonite appendiculaire, etc. La négligence d’un simple examen vulvaire ou d’un toucher rectal peut conduire alors à des interventions mutilatrices désolantes. Clinique Le morphotype est féminin. Le développement pubertaire est avancé : les seins, la pilosité axillaire et pubienne sont bien développés. 592 Pelvi-périnéologie L’examen de l’abdomen met en évidence une tuméfaction sus-pubienne, ovalaire, à grosse extrémité supérieure, plongeant en bas derrière la symphyse, de taille variable, pouvant atteindre l’ombilic de consistance fluctuante ou rénitente, mate à la percussion. Sa palpation ne réveille pas l’envie d’uriner et le sondage vésical ne l’affaisse nullement. Les organes génitaux externes sont normaux. Parfois en entrouvrant la vulve, on constate l’occlusion de l’orifice vaginal par une membrane translucide bleutée bombant lors des efforts abdominaux : hymen imperforé ou cloison transversale complète du vagin à insertion juxtahyménéale plus fréquente pour certains. Lors du toucher rectal, on perçoit une tuméfaction antérieure, médiane, rénitente, liquidienne, parfois volumineuse, emplissant le petit bassin descendant à proximité du sphincter anal et se prolongeant avec la tuméfaction perçue par la main abdominale. Parfois, l’orifice vaginal paraît normal. En raison des données procurées par le toucher rectal, il convient d’examiner à nouveau la vulve, tout en exerçant une pression manuelle sur le pôle supérieur de la tuméfaction abdominale. Cette manœuvre est un excellent moyen diagnostique, car elle provoque le bombement de la membrane obturatrice et commande l’intervention correctrice. Point n’est besoin d’examens complémentaires, le traitement chirurgical doit être rapidement entrepris. Ailleurs, l’orifice vaginal est perméable mais son cathétérisme, l’examen au spéculum ou le toucher vaginal unidigital montrent que le bas vagin se termine en voûte infundibulaire. La constatation au toucher rectal d’un hématocolpos évoque alors un diaphragme complet inséré à la partie moyenne ou haute du vagin (mais également une aplasie vaginale partielle). Examens complémentaires L’échographie confirme l’hématocolpos en montrant une image rétrovésicale arrondie, bien limitée de tonalité liquidienne, contenant quelques échos hétérogènes. Elle peut déceler un éventuel retentissement en amont : hématométrie, hématosalpinx, lame liquidienne dans le cul-desac de Douglas suggérant un reflux tubaire du sang des règles, sans toutefois avoir la précision de la cœlioscopie. Elle définit mal la limite inférieure de l’hématocolpos, lorsque celui-ci s’enfonce derrière la symphyse pubienne et ne précise pas la nature de l’obstacle : diaphragme ou aplasie vaginale partielle. Comme l’urographie intraveineuse, l’échographie montre l’absence habituelle de malformation concomitante du haut appareil urinaire et la présence dans 10 à 70 % des cas, d’une urétrohydronéphrose bilatérale, qui disparaîtra dès l’évacuation de la collection sanguine. La ponction de la poche vaginale rétentioniste suivie ou non d’opacification, est à condamner en raison du grave danger d’infection. La cœlioscopie précède habituellement le geste chirurgical. Elle montre un aspect en brioche : le tube vaginal distendu par l’hématocolpos coiffé d’un utérus normal ou arrondi, globuleux, soufflé par l’hématomètre. Elle précise parfaitement le retentissement en amont : hématométrie, hématosalpinx, reflux tubaire du sang des règles, dépôts hématiques, greffes endométriosiques, adhérences pelviennes. En cas de volumineux hématocolpos, elle sera entreprise secondairement après débridement de ce dernier, permettant de contrôler la qualité de la vidange. Traitement Il est chirurgical et doit être rapidement mis en œuvre. Il consiste à débrider largement la cloison en son centre. Un liquide comparable à du sirop de cassis s’écoule. Il importe de favoriser l’évacuation d’un hématomètre associé par une perfusion d’ocytociques et surtout de prévenir l’infection ascendante par l’administration générale et locale, immédiate et prolongée, d’antibiotiques. Dans le même temps opératoire ou dans un second temps, quelques semaines plus tard, le diaphragme sera l’objet d’une opération plastique et correctrice définitive. Évolution À distance, la vie sexuelle est le plus souvent normale, mais le problème majeur est celui de la fertilité : le taux de grossesse est de 86 % en cas d’hymen imperforé, de 47 % en cas de diaphragme complet plus haut situé. En effet, plus le diaphragme est proche du col, plus le vagin susjacent est exigu, et plus rapide est le retentissement en amont. DIAPHRAGMES PERMÉABLES Ils sont fréquents. Ils peuvent être semi-circulaires ou annulaires. Malformations du vagin Diaphragmes semi-circulaires ou falciformes Ils sont habituellement parfaitement tolérés et découverts fortuitement lors de l’examen au spéculum, qui permet également de préciser l’état de la muqueuse sus- et sous-jacente. Le toucher vaginal précise la hauteur, l’implantation, la saillie et la souplesse de la cloison. Diaphragmes annulaires Les diaphragmes annulaires intéressent toute la circonférence du vagin et ont un orifice centré ou excentré de dimensions fort variables. Haut situés, ils sont asymptomatiques. Bas situés, ils réduisent la longueur fonctionnelle du vagin et interdisent la mise en place de tampons périodiques, et plus tard les rapports sexuels sont source de dyspareunie. L’examen au spéculum les identifie. Lorsque le pertuis est difficile à voir, un nouvel examen lors des règles permet de le repérer aisément. Les diaphragmes muets sur le plan fonctionnel pourraient être respectés, mais les perspectives obstétricales représentent une indication d’intervention prophylactique. En effet, si certains diaphragmes vaginaux, en se ramollissant en fin de grossesse et s’en incorporant lors du travail au canal utérovaginal, permettent de façon surprenante l’accouchement spontané par les voies naturelles, il faut redouter la mauvaise influence du traumatisme obstétrical qui, à la faveur de l’imbibition gravidique, aboutit à l’éclatement étoilé du diaphragme obligatoirement suivi d’un rétrécissement plus serré parce que cicatriciel et fait d’une jeune mère une infirme sexuelle. Une obligation de résultat s’impose donc à l’intervention prophylactique : on ne saurait admettre qu’elle transforme une sténose congénitale souple en sténose cicatricielle épaisse et fibreuse. À la résection du diaphragme suivie de la suture des tuniques vaginales sus- et sousjacentes, il faut préférer les plasties en YV ou en Z, le procédé de Rogelio Garcia (de réalisation parfois délicate) et surtout la technique simple des crevés qui consiste à tracer des incisions radiaires tous les 30 degrés pour effacer le diaphragme puis à mettre en place un mandrin souple pour éviter le rétrécissement secondaire. Cloisons longitudinales du vagin Elles divisent le vagin en deux cavités perméables. 593 Dans 40 % des cas, elles sont cause de dyspareunie d’apareunie ou d’hémorragie lors de la défloration. Chez l’adolescente, l’inefficacité d’un tampon périodique ou la nécessité d’en placer un second permet d’évoquer précocement le diagnostic (3). Dans 60 % des cas, elles sont parfaitement tolérées et découvertes fortuitement. Des examens cliniques répétés peuvent cependant la méconnaître. Lors de l’examen au spéculum, l’asymétrie des culs-de-sac latéraux doit attirer l’attention : l’un est normalement conformé, l’autre étriqué, peu profond. De ce côté, il convient de longer la paroi latérale du vagin, de l’hymen vers le col avec un instrument mousse (pince longuette). Ce dernier s’enfouit sous la cloison refoulée latéralement. Le spéculum introduit de nouveau avec tact et douceur, lames verticales, légèrement entrouvertes puis écartées, expose alors parfaitement le septum. Les cloisons sont complètes (49 % des cas) étendues depuis le col utérin jusqu’au voisinage de l’hymen divisant le vagin en deux cavités d’amplitude égale ou inégale ou incomplètes (51 % des cas) n’atteignant pas en bas l’orifice vaginal ou se terminant au-dessous du col utérin par un bord libre falciforme. Le principal intérêt des cloisons longitudinales est d’évoquer l’existence d’une malformation utérine sus-jacente qu’il importe de définir par la pratique d’une échographie 3-4 D. Elles sont en effet surmontées d’un utérus : – bicorne bicervical dans 24 % des cas ; – cloisonné dans 58 % des cas ; – communicant dans 8 % des cas ; – normal dans 10 % des cas. Et lorsque la cloison est contiguë au massif cervical et à la voûte vaginale, elle est toujours (ou presque) surmontée d’un utérus malformé (utérus normal dans moins de 1 % des cas). Lors de l’accouchement, l’eutocie est la règle. La cloison lâche et souple est refoulée par la présentation et ne gêne en rien l’expulsion. Une dystocie des parties molles peut cependant survenir surtout en cas de cloison épaisse ou incomplète, moyenne ou basse : défaut de progression, déchirure du septum propagée à la cloison recto- ou vésico-vaginale accrochage du menton ou chevauchement de la cloison en cas de présentation du siège. En fait, le pronostic de l’accouchement est lié surtout à l’anomalie utérine sus-jacente. 594 Pelvi-périnéologie Le traitement est simple. En dehors de la grossesse, la suppression de la cloison est entreprise : à titre curatif si elle occasionne des troubles fonctionnels ou préventif si, épaisse ou partielle, elle fait redouter une dystocie des parties molles. Lorsque la cloison n’atteint pas le massif cervical, on a le choix entre la résection et la section plus simple du septum dont la rétraction élastique assure l’effacement. En revanche, lorsque la cloison atteint le massif cervical, il convient de conduire la résection tout au fond des culs-de-sac antérieur et postérieur, de façon à libérer entièrement le ou les cols et à éviter que ne persiste une bride source de dyspareunie. En début de grossesse, la découverte d’une cloison jusqu’alors méconnue fait envisager sa suppression dans un but préventif et rechercher une anomalie utérine par la pratique d’une échographie. En fin de grossesse, la vascularisation accrue et/ou l’engagement de la présentation contre-indiquent l’intervention. Lors de l’accouchement et en cas de dystocie, il faut se contenter de sectionner en son milieu la cloison, l’hémostase et la résection éventuelle dans les culs-de-sac antérieur et postérieur étant réalisées après la délivrance. Hémivagin borgne En cas d’hémivagin borgne, une cloison anormale, épaisse et résistante partie du massif cervical entre les orifices cervicaux se dirige obliquement en bas et en dehors pour s’unir sans hiatus à l’une des parois latérales du vagin à hauteur variable (4). Elle délimite : – d’un côté, un hémivagin perméable de forme normale, fonctionnel ; – de l’autre côté, un hémivagin imperforé de forme tronconique, dans lequel se développe une rétention menstruelle à la puberté. L’hémivagin borgne est tapissé d’une muqueuse volontiers cylindrique, toujours remaniée par la rétention menstruelle et, en cas d’utérus bicorne-bicervical communicant susjacent par des phénomènes inflammatoires et par des greffes endométriosiques. Robert a montré qu’il existait constamment un reliquat d’uretère qui, en bas, s’ouvre dans la poche rétentionniste ou s’il ne s’y abouche pas adhère à elle et en haut s’éparpille en minces tractus dans le tissu cellulaire lombaire après avoir croisé l’artère utérine. Le rein et l’uretère opposés sont habituellement normaux. Ce type spécial de cloisonnement longitudinal asymétrique du vagin est surmonté de façon constante d’un utérus malformé : – utérus bicorne-bicervical le plus souvent ; – utérus bicorne-bicervical communicant isthmique parfois ; – utérus cloisonné total exceptionnellement. Plusieurs hypothèses embryologiques tentent d’expliquer cette malformation ; la plus séduisante est celle du « diverticule wolffien », car elle fait intervenir une modification simple, unique dans le temps et l’espace : le défaut d’abouchement du canal de Wolf dans le sinus uro-génital à la 5e semaine. Ultérieurement, à la 6e-7e semaine, le segment de chaque canal de Wolff compris entre la naissance du diverticule urétéral et la paroi postérieure du sinus urogénital se dilate et forme la corne du sinus urogénital. La corne du côté anormal, en raison du défaut d’abouchement, ne s’incorpore pas à la paroi postérieure du sinus urogénital à la 7e semaine. Elle voit s’aboucher le canal de Müller à la 8e semaine ne participe pas à la division du sinus uro-génital en zone antérieure urinaire et zone postérieure génitale vers la 9e ou 10e semaine et voit s’atrophier le canal de Wolff qui devient canal de Gartner, ainsi que l’uretère et l’ébauche rénale qui la surmonte rendue non fonctionnelle. Clinique Cette malformation se manifeste précocement dès les premières règles par une dysménorrhée primaire intense, invalidante, prédominant du même côté croissant d’un cycle à l’autre, rebelle au traitement hormonal ou par les antiprostaglandines, bientôt suivie de douleurs pelviennes permanentes à recrudescences cycliques. L’examen au spéculum de vierge montre le bombement antéro-latéral, sous-cervical ou étendu jusqu’à l’anneau hyménéal de l’hémivagin borgne dans la cavité de l’hémivagin perméable et le refoulement en haut et en dehors du col controlatéral, souvent difficile à voir. Le toucher rectal, seul autorisé par le jeune âge des patientes, perçoit une tuméfaction pelvienne antérieure plus ou moins volumineuse, plus ou poins haut située pouvant évoquer à tort un kyste de l’ovaire et incitant à demander une échographie. Malformations du vagin Examens complémentaires L’échographie met en vedette l’hématocolpos : masse liquidienne finement échogène, allongée, ballonnée, située au-dessus et au-dessous du pubis derrière la vessie. Il est surmonté d’un utérus malformé : – en cas d’utérus bicorne-bicervical, les cornes utérines se présentent comme deux pétales efflorescents, deux masses parenchymateuses dont les cavités sont individualisables sur toute leur hauteur et qui sont d’autant plus distantes que l’on se rapproche de la région fundique. La vessie, en forte réplétion, s’enfonce en coin entre les deux hémi-utérus et confirme la séparation anatomique ; – en cas d’utérus cloisonné total (exceptionnel), la masse utérine est unique, mais pourvue de deux cavités et la face postérieure de la vessie se moule sur sa voussure antérieure. Lorsque la collection liquidienne pelvi-abdominale est ainsi coiffée de deux cavités utérines divergentes ou contiguës mais identiques, le côté de la rétention menstruelle, ne peut pas être précisé. En revanche, lorsque l’une des cavités apparaît dilatée par une hématométrie, le côté atteint se trouve indiqué. L’échographie visualise rarement un hématosalpinx, le reflux tubaire du sang des règles et jamais des greffes endométriosiques ; elle apprécie donc imparfaitement le retentissement en amont de la rétention menstruelle, mais en explorant les loges rénales, elle procure une donnée fondamentale en révélant une aplasie rénale homolatérale à la rétention. L’échographie permet d’évoquer et de préciser grandement le diagnostic, mais elle ne dispense pas toutefois de la mise en œuvre préopératoire d’une cœlioscopie. L’hystérosalpingographie (HSG), si l’âge de la patiente permet de l’envisager, est souvent difficile car l’orifice cervical est généralement refoulé en dehors et très haut par la rétention menstruelle controlatérale. Elle montre le plus fréquemment l’image en fuseau d’une corne utérine surmontée d’une trompe perméable. Cette image correspond le plus souvent à l’opacification de l’hémi-utérus perméable d’un utérus bicorne-bicervical et très exceptionnellement à celle de la demi-cavité perméable d’un utérus cloisonné total. Mais parfois, l’HSG dévoile un utérus bicorne, bicervical communicant isthmique, opacifiant successivement l’hémi-utérus 595 perméable, la communication isthmique, l’hémiutérus controlatéral, la rétention dans la poche vaginale borgne et très rarement le reliquat urétéral qui s’abouche dans cette dernière. La communication isthmique est méconnue par l’échographie, parfois décelée par l’hystéroscopie (surtout en fin de règles), toujours objectivée par l’HSG. Sa reconnaissance a un intérêt nosologique et chirurgical lorsqu’une hémi-hystérocolpectomie doit être réalisée. L’IRM abdomino-pelvienne est particulièrement utile lorsque l’échographie est d’interprétation difficile. Elle montre parfaitement l’anatomie de la malformation utéro-vaginale et l’aplasie rénale sus-jacente. La cœlioscopie montre une volumineuse tumeur abdomino-pelvienne sous-péritonéale, médiane dans le pelvis : l’hématocolpos surmonté de deux cornes utérines divergentes ou exceptionnellement d’un utérus en masse unique. Elle précise parfaitement le retentissement en amont : hématomètre, hématosalpinx, foyers endométriosiques indiquant le côté atteint, car unilatéraux, dépôts hématiques parsemant le péritoine pelvien et secondaires au reflux tubaire du sang menstruel. En l’absence de retentissement en amont, l’identification du côté en rétention est souvent impossible. Cela explique les fausses manœuvres opératoires qui ont pu être commises. L’insertion des ligaments utérosacrés sur l’hémiutérus qui n’est pas en rétention pourrait servir de guide, mais il parfois malaisé de la définir. Les données de l’échographie rénale prennent alors toute leur valeur. Traitement Le traitement entrepris au terme de cette exploration complète est exclusivement chirurgical. Le traitement conservateur est légitime dans les cas reconnus précocement, où il n’existe aucune atteinte annexielle ou péritonéale, les deux hémiutérus ayant une égale valeur fonctionnelle. Simple, il se déroule en deux temps parfois confondus : – incision par les voies naturelles de l’hématocolpos dans la zone où il bombe le plus sous perfusion d’antibiotiques et d’ocytociques ; – résection immédiate ou retardée dans son intégralité de la cloison de séparation entre l’hémivagin borgne et l’hémivagin perméable assurant une unification vaginale à plein canal. 596 Pelvi-périnéologie Le traitement radical d’exérèse est indiqué lorsque la rétention menstruelle unilatérale s’est accentuée, altérant de façon irréversible la trompe d’une endométriose florissante. L’hémi-hystérectomie est simple ; l’ablation de la poche rétentionniste parfois profondément immobilisée par les aponévroses et les ligaments pelviens est en revanche souvent laborieuse mais toujours indispensable et constamment facilitée par l’aplasie rénale homolatérale qui écarte tout danger urétéral. Aplasie vaginale totale L’aplasie vaginale totale est rare : 1 pour 4 000 à 5 000 filles. La symptomatologie en est simple. Souvent, c’est une jeune fille qui consulte pour une aménorrhée primaire : une absence de menstruation au-delà de quinze ans (15 ans étant la limité supérieure de la ménarche normale en Europe occidentale) dont la nature normo-hormonale est évidente dès l’inspection. En effet, chez cette patiente indemne d’antécédent tuberculeux ou neurologique, il n’y pas de bouffées de chaleur, de douleurs pelviennes, mais parfois un molimen cataménial cyclique. La morphologie générale est féminine. La taille est correcte, les caractères sexuels ont atteint un développement complet : pilosité axillaire et pubienne normale, seins bien conformés. La vulve est normale avec de grandes et petites lèvres et un clitoris parfaitement constitués. Le toucher vaginal unidigital se heurte immédiatement à un obstacle ferme ne se laissant pas déprimer ou reconnaît une cupule vaginale rétrohyménéale plus ou moins profonde dépassant rarement 3 à 4 cm et ayant tendance à s’approfondir sous la pression. Cette cupule vaginale est borgne, dépourvue de pertuis comme le précise le cathétérisme. Le toucher rectal démontre l’absence d’hématocolpos et surtout l’absence d’utérus. L’examen clinique permet donc de soupçonner fortement le diagnostic et d’éviter des explorations hormonales inutiles ou une hormonothérapie abusive. La courbe thermique est diphasique. Les dosages hormonaux sont normaux, mais apportent peu à la compréhension et au traitement du syndrome. Le caryotype est féminin normal. L’échographie utile chez la jeune fille prude ou pusillanime confirme le soupçon clinique. Le vagin et l’utérus ne peuvent pas être identifiés. Les ovaires actifs porteurs de follicules sont en revanche visibles, mais il convient de savoir les rechercher en situation ectopique. Les images échographiques procurées par une lame utérovaginale vestigiale épaisse ou par des cornes utérines rudimentaires fusionnées sur la ligne médiane en un nodule unique, ne sauraient être interprétées comme un utérus infantile (5). L’UIV ou l’échographie rénale révèle dans un tiers des cas (34,8 %), une malformation urinaire associée : rein pelvien unique, rein lombaire unique ou rein ectopique avec un rein lombaire controlatéral. La reconnaissance précoce d’un rein pelvien, surtout s’il est unique évitera de malencontreux traumatismes lors d’une cœlioscopie ou lors de la création chirurgicale d’un néovagin. Des radiographies du squelette sont réalisées lorsque l’UIV ou la radiographie pulmonaire préopératoire décèlent des anomalies osseuses. Celles-ci s’observent en effet dans 12 % des cas. La cœlioscopie permet en dernière analyse de certifier formellement le diagnostic d’aplasie utérovaginale lourd de conséquences psychologiques et thérapeutiques. Dans 90 % des cas, il s’agit d’un syndrome de Mayer-Rokitansky-KusterHauser. De part et d’autre du pelvis, se trouvent deux nodules musculaires pleins en forme de virgule et du volume d’une cerise : les cornes utérines rudimentaires. Elles sont surmontées : – d’un ligament rond ; – d’une trompe bien conformée ou par fois grêle ; – d’un ovaire normal et fonctionnel en position normale ou ectopique, au-dessus des vaisseaux iliaques ou aux abords du canal inguinal. Les cornes rudimentaires sont réunies par un repli péritonéal transversal et ligament large sous la partie médiane de ce dernier, à la face postérieure de la vessie, le palpateur identifie un épaississement rectangulaire sous-péritonéal – la partie supérieure de la lame vestigiale utéro-vaginale – à la base duquel viennent s’insérer de grêles ligaments utérosacrés. Parfois, l’aplasie mullérienne symétrique est plus importante. Les cornes utérines rudimentaires sont absentes et seules deux trompes grêles sont visibles. Les anomalies urinaires sont alors très fréquentes. Ailleurs, l’aplasie mullérienne symétrique est moins importante. Les cornes utérines, toujours indépendantes, sont plus volumineuses (3 à 5 cm Malformations du vagin de diamètre) et creusées d’une cavité tapissée d’un endomètre fonctionnel, mais sans trace de menstruation. Le haut appareil urinaire est normal en pareil cas. L’aplasie mullérienne peut être asymétrique. L’hémisyndrome de Mayer- Rokitansky-KusterHauser en est un exemple. Il est caractérisé par la présence d’un côté d’une corne utérine rudimentaire flanquée d’une annexe normale et de l’autre côté par la présence d’une ébauche tubaire audessus de l’ovaire voire l’absence de tout élément mullérien et même d’ovaire. Une agénésie rénale est alors constante du côté le plus aplasique. Rarement, la première consultation est plus tardive. La jeune femme a une aménorrhée primaire, mais elle consulte pour des rapports sexuels difficiles et insatisfaisants du fait de l’insuffisance de pénétration vaginale ou pour une stérilité primaire lorsque la cupule vaginale extensible s’est progressivement laissée déprimer lors de coïts successifs jusqu’à permettre une vie sexuelle normale. L’examen au spéculum révèle alors l’absence de col. Le seul diagnostic différentiel qui puisse se poser est celui du testicule féminisant ou forme complète d’insensibilité périphérique aux androgènes, mais l’étude clinique et caryotypique permet de le reconnaître. À l’âge où la patiente désire entreprendre une activité sexuelle, divers procédés permettent la création d’un néovagin. La méthode non opératoire de dilatation instrumentale de Frank doit toujours être tentée lorsqu’il existe une cupule vaginale. En cas d’échec ou en l’absence de 597 cupule, on peut avoir recours aux interventions chirurgicales suivantes : – méthode de Vecchietti ; – clivage recto-vésical par voie basse ou mixte abdomino-périnéale suivie d’épithélialisation spontanée sur moule (Dupuytren-Warton) ou du tapissage de la néocavité à l’aide des petites lèvres dédoublées de greffes de peau libre (Mac Indoe), de péritoine : – plasties intestinales (sigmoïde) (6). Références 1. Paniel BJ, Haddad B and Meneux E (1999) Malformations vaginales. In: Encycl Méd Chir: Techniques Chirurgicales – Gynecologie. Elsevier, Paris 41-855 2. Paniel BJ (1976) Malformations congenitales de l’appareil féminin. Rev Med 17: 1899-916 3. Haddad B, Louis-Sylvestre C, Poitout P et al. (1997) Longitudinal vaginal septum: a retrospective study of 202 cases. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 74: 19799 4. Haddad B, Barranger E and Paniel BJ (1999) Blind hemivagina: long-term follow-up and reproductive performance in 42 cases. Hum Reprod 14: 1962-1964, 5. Paniel BJ, Haddad B, el Medjadji M et al. (1996) [Value of ultrasonography in utero-vaginal aplasia]. J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris) 25: 128-30 6. Louis-Sylvestre C, Haddad B and Paniel BJ (1997) Creation of a sigmoid neovagina: technique and results in 16 cases. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 75: 225-9