L`homélie

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L`homélie
P. Georges Jacques Recteur
HOMELIE DE RENTREE 2013-2014
Lectures du 25ème dimanche ordinaire C
Par les évènements douloureux de la semaine écoulée, le seigneur a voulu que notre
célébration eucharistique d’entrée dans l’année académique 2013-2014 se déroule un
dimanche. Peut-être a-t-il aussi quelque chose de particulier à nous dire à partir des lectures
d’aujourd’hui. Essayons de le comprendre.
Dans les premiers jours de la semaine, nous avons réussi à accoucher d’un magnifique projet
communautaire. L’accouchement ne fut pas trop pénible, il faut le reconnaître. Accompagné
de mains de maître par l’accoucheur Gonzalo, tout s’est bien déroulé. Mais le bébé doit
maintenant grandir, se fortifier, il doit apprendre à marcher, il doit être nourri, cajolé, consolé
parfois, mis en confiance pour pouvoir s’épanouir pleinement et un jour prendre sa destinée
en main quand le temps viendra. Oui, tout est là pour que notre année soit une réussite : un
projet communautaire limpide et sérieux, 31 membres tous décidés à donner le meilleur
d’eux-mêmes, des amis et des confrères qui prient pour nous, des professeurs compétents et
dévoués, une bibliothèque et des congélateurs bien fournis. Que pouvons-nous craindre. Que
pouvons-nous demander de plus ! Même le chocolat ne manquera pas, j’en suis sûr.
Mais l’année ne sera que ce que nous en ferons. Le beau projet communautaire ne nous sera
d’aucune utilité s’il reste dans nos tiroirs, si nous ne le relisons pas de temps en temps et si
nous ne le prenons pas tous au sérieux, tout sérieux qu’il est.
Les lectures d’aujourd’hui peuvent nous y aider sur trois points : la confiance, la prière et la
solidarité.
La confiance… L’Evangile nous racontait la parabole du gérant habile et trompeur. Vous la
connaissez et la conclusion peut nous suffire. Elle nous parle de confiance.
L’an passé, Jean-Michel Laurent, notre secrétaire à la formation initiale, nous envoyait une
lettre sur la confiance. Il nous disait : « Si nous voulons qu’on nous fasse confiance, il n’y a
pas 36 manières : nous devons entrer dans des relations de confiance. La confiance se mérite
et n’est pas un droit que je peux réclamer. La réclamer en refusant de la donner est un signe
très clair que celui qui la réclame n’en est pas digne. Dans un monde idéal, le questionnement
d’un candidat par son formateur ou d’un confrère par son Provincial ne devraient pas exister :
les explications devraient être données naturellement et en vérité par une personne qui mérite
la confiance parce qu’elle la donne. »
Oui, la confiance se mérite. Elle se doit d’être mutuelle. Elle doit l’être aussi bien dans les
petites affaires que dans les grandes, comme nous le rappelait Jésus. Elle doit exister à tous
les niveaux :
Confiance en soi-même tout d’abord. Croire en ses réelles possibilités, croire en ses dons et
reconnaître ses limites, le tout dans une grande vérité et humilité. Cela me semble capital si
l’on veut avancer dans la vie. Pour cela nous avons besoin des autres. Nous avons parfois
besoin que les autres nous aident à mettre en valeur certains de nos dons, de nos talents
cachés. Nous avons besoin d’être appréciés, reconnus, parfois félicités. Nous avons aussi
besoin de frères, des vrais, pas des complices, des vrais frères qui peuvent nous aider à
prendre conscience que nous nous fourvoyons parfois et qu’il est temps de redresser la barre.
Confiance les uns dans les autres, entre candidats, entre formateurs, des candidats envers
leurs formateurs, des formateurs envers les candidats. Confiance qui demande ouverture et
vérité. Seule la vérité nous rendra libres. Seule la vérité permettra à la confiance de se
développer. La confiance, il faut l’oser. Il y a un risque, c’est vrai à tendre la main à un
inconnu qui pourrait être un ennemi. La confiance exige de prendre des risques. Tout comme
l’amour. Le propre de l’amour vrai, l’amour selon le cœur de Dieu, c’est d’aimer avec le
risque de ne pas être aimé en retour. Jésus en a fait douloureusement l’expérience.
Confiance en Dieu. C’est d’ailleurs le seul en qui nous pouvons faire pleinement confiance,
aveuglément confiance. C’est devant lui que dans le secret de notre chambre intérieure nous
pouvons nous mettre à nu et être vrai avec nous-mêmes. Car nous savons qu’il ne nous jugera
jamais, mais saura nous accueillir avec admiration ou avec miséricorde. Nous vivons cette
rencontre dans la prière, mais aussi dans les sacrements, notamment celui de la réconciliation,
le sacrement de la confiance vécue dans sa totale vérité.
Osons donc la confiance cette année. Et si nous sentons qu’elle a tendance à s’étioler, si nous
sentons qu’elle est en danger, n’attendons pas sa mort avant de lui redonner toute sa vigueur
par le pardon, par la correction fraternelle, par l’humour et par-dessus tout par la prière.
La prière… St Paul en parle dans la lettre qu’il écrit à son frère Timothée : « J’insiste qu’on
fasse des prières de demande, d’intercession et d’action de grâce » et il ajoute « pour les
hommes, pour les chefs d’état et tous ceux qui ont des responsabilités. » « Je voudrais qu’en
tout lieu les hommes prient en levant les mains vers le ciel, saintement, sans colère ni
mauvaises intentions.
Vous savez mon insistance sur la prière. Faut-il ajouter une dose aujourd’hui ? Je ne veux que
citer notre confrère Innocent Maganya, recteur à Nairobi, qui dans son homélie lors de la
messe d’ouverture de l’année académique disait ceci… et tout le monde comprenant l’anglais
je le cite dans la langue de Shakespeare : « A life dedicated to prayer will help us tend the call
and mission we have received from Christ. Otherwise we might become like monsters. My
rector in the first cycle used to say that a priest who does not pray, he is a monster. I would
say he is a public danger. Mission requires tending. That is why we are here, to prepare the
way and deepen our sense of mission. I know what I am talking about! I am talking to you as
your elder brother in this life. My other brothers here will also testify with me, that self
discipline in all these matters is paramount. We cannot just rely on the grace of God! We have
also to play our parts. We are invited to accept our mission every day, every morning. Mission
means living with open hands. »
Je signe des deux mains ce qu’Innocent a voulu dire dans son homélie à Nairobi. Un prêtre,
un candidat prêtre, un homme qui veut se consacrer à Dieu, un missionnaire qui veut annoncer
Jésus-Christ, s’il ne prie pas est un monstre, un danger public. C’est un hypocrite qui trompe
les gens.
C’est dans la prière que nous trouverons le courage de nous faire mutuellement confiance,
faisant d’abord l’expérience de la confiance avec celui sur lequel nous pouvons nous appuyer
avec certitude. Encourageons-nous sur ce chemin de prière.
La solidarité… La non-solidarité est fortement soulignée dans la première lecture tirée de la
plume très vive du prophète Amos.
Nous vivons à Abobo, où nous sommes des privilégiés avec un toit, un chambre individuelle,
trois repas par jour, de l’eau et de l’électricité en abondance, internet, un environnement qui
se prête bien aux études, bref un petit paradis, il faut bien le reconnaître. Tout cela est bien
nécessaire, j’en conviens, mais je voudrais ici vous citer ces quelques mots tirés d’un roman
lu dans l’avion qui m’amenait de Paris à Abidjan. Le livre a pour titre ‘L’équation africaine’.
Son auteur, Yasmina Khadra, par la voix d’un de ses personnages, dit ceci : « Le poisson
rouge ne peut ramener la complexité des océans à la quiétude de son bocal. »
Il suffit de faire trois pas en dehors de notre cours pour nous rendre très vite compte que la
quiétude de notre bocal, de notre cours, ne peut être le critère par lequel nous pouvons
comprendre la complexité du monde dans lequel nous vivons. Il nous faut comprendre ce
monde, le connaître par les contacts que nous pouvons avoir avec nos voisins. Mais il nous
faut plus que connaître ou analyser la réalité du monde dans lequel nous vivons. Il nous faut
en être solidaire. Je lis actuellement le livre « Jésus, approche historique » écrit par un exégète
espagnol, José Pagola. Je suis frappé de sa façon très précise de décrire la solidarité de Jésus
avec les exclus de son temps. Quand Jésus dit « Heureux les pauvres ! » il dit « Nous sommes
heureux, nous les pauvres, nous qui pleurons, nous qui sommes persécutés… » Nous ! Ce
petit « nous » dit tout de la solidarité de Jésus et de celle à laquelle il nous invite. Ne la
négligeons pas.
Confiance, prière, solidarité ! Une manière de rendre notre projet communautaire bien vivant
toute l’année 2013-2014. Nous avons officiellement accueilli nos nouveaux membres. Notre
communauté est maintenant bien formée. Allons de l’avant avec confiance.
A tous, je souhaite une belle année académique.
Que Jésus, le bon pasteur, veille sur nous et nous conduise vers de beaux et gras pâturages.
Amen !

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