I. Caractéristiques de la famille du hautbois.

Transcription

I. Caractéristiques de la famille du hautbois.
L’HISTOIRE
du
à travers les siècles
1
Sommaire
Sommaire
page 2
Introduction
page 3
Recommandations d’utilisation du dossier
page 4
Caractéristiques de la famille des hautbois
page 5
Le hautbois dans l’antiquité égyptienne et grecque
page 7
Le hautbois en Afrique et en Asie
page 8
Le hautbois en Europe au Moyen Age et à la Renaissance
page 9
Le hautbois en Europe du 16è au 18è siècles
page 12
Le hautbois en Europe au 19è siècle
page 14
Le hautbois en Europe au 20è siècle
page 15
La famille du hautbois au 20è siècle
le cor anglais
le hautbois d’amour
le hautbois baryton
page 16
page 18
page 18
Les anches du hautbois moderne
page 20
Le mécanisme du hautbois moderne
page 21
2
INTRODUCTION
Ce dossier vous permettra de découvrir un instrument peu connu du
grand public,
malgré sa longue histoire à travers les siècles.
Instrument aux nombreuses légendes,
il n’
en finit pas d’
étonner lorsqu’
on en approche tous les mystères.
Est-il vrai que les hautboïstes terminent tous fous
du fait de la pression qui leur monterait à la tête ?
Ne serez-vous pas étonnés en voyant la toute petite ouverture de l’
anche
dans laquelle le musicien souffle et avec laquelle il produit ce son
généreux ?
Comprendrez-vous les frustrations qu’
il s’
impose
pour être maître de ces deux lamelles de roseau
et dont dépendent son jeu, son expression, son plaisir ?
Prenez surtout du plaisir à écouter la musique pour hautbois
et laissez-vous captiver par son timbre !
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Recommandations d’utilisation du dossier.
Ce dossier est écrit en premier lieu pour les enseignants, afin qu’
ils puissent y trouver la réponse
à des questions d’
enfants, voire à leurs propres interrogations et à leur curiosité.
Il devrait leur permettre de choisir, pour leur travail avec les élèves, différentes pistes de recherche
selon les envies, les sujets d’
études de chacun.
? si le côté « physique » intéresse, si l’
enseignant fait fréquemment des expériences en classe,
pourquoi ne pas manipuler des herbes, du roseau (ou des tubes de PVC –gaine électrique-) en vue de
fabriquer un instrument à anches doubles, aussi rudimentaire soit-il ?
? si le côté « histoire » passionne, pourquoi ne pas faire des liens entre l’
évolution de l’
instrument
et quelques périodes historiques ?
? si l’
enseignant passionne ses élèves aux arts plastiques, qu’
il n’
hésite pas à utiliser les dernières
pages du dossier et des documents personnels pour observer, étudier les reproductions iconographiques concernant les instruments de musique et plus particulièrement le hautbois et sa famille.
? l’
écoute des styles musicaux peut procurer plaisir, faire naître un dialogue dans la classe,
susciter différents sujets d’
échanges.
? en classes maternelles, préparer les enfants à écouter des musiciens, à les observer permettra
de présenter des contes ou contes musicaux (le joueur de flûte de Hamelin –Pierre et le loup –
Piccolo, Saxo). Les enfants seront déjà plus familiarisés avec les sonorités instrumentales et
apprendront à reconnaître les timbres particuliers du hautbois.
L’
écoute d’
extraits comme Pierre et le Loup permettra de faire prendre
conscience aux enfants des liens qui existent entre les langages
musicaux et littéraires.
Grâce aux évocations qu’
ils seront amenés à faire, tant à la lecture
d’
un passage du texte qu’
à l’
écoute d’
un extrait musical, ils
confronteront, dans un débat constructif, leurs ressentis et
chercheront à donner des éléments objectifs permettant de les
comprendre.
Un vocabulaire pourra être dégagé de ces discussions, propre à
chacun des domaines.
les enfants seront familiarisés ainsi avec les notions de tempo, de
nuances, de hauteurs, de caractère, de timbres instrumentaux, …
ainsi qu’
à la construction d’
un texte, à l’
ambiance qui se dégage d’
un passage, à la lecture de la
ponctuation, à l’
attention à porter sur des mots particuliers, à l’
intonation à donner dans les
dialogues, ….
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I.
Caractéristiques de la famille du hautbois.
L’origine du hautbois est si ancienne qu’on pourrait dire qu’il
est né dans la nuit
des temps, peut-être même à la création du premier roseau
sur la terre.
L’homme primitif qui devait devenir un jour le « roseau
pensant » de Pascal,
a d’abord été un fruste roseau chantant..
Tailler une fine languette dans un tube de roseau et souffler pour obtenir un son, faire
vibrer une herbe sur les lèvres, sont des gestes que bien des hommes de la préhistoire
ont du faire, imités depuis par des milliards d’enfants et d’adultes.
Le principe de l’instrument à anche est posé.
Parmi les instruments à vent, on distingue deux familles, les CUIVRES et les BOIS
qui, depuis la nuit des temps, ont fait retentir les airs à la gloire des muses et des
dieux.
Ce n’est que beaucoup plus tard, vers le XVIè ,que le terme de hautbois est né,
lorsque l’on a cherché à établir une distinction entre familles d’instruments.
En effet, on parlait alors de « hauts-bois », instruments nobles utilisés dans les musiques
militaires, aux sons perçants et aigus (en faisaient partie les trompettes) et de « gros-bois »,
instruments plus sourds et graves, plus populaires, utilisés dans les bals, les fêtes, les tavernes.
Jusqu ‘au XVIIIè siècle, la musique était le plus souvent
destinée au plein air.
Les hautbois, par leur puissance et leur timbre perçant,
avaient une place de choix au milieu des trompettes et
des trombones, souvent dans des ensembles de cavalerie.
Avec le développement de la pratique instrumentale en
salle – musique de chambre dans les salons de la
noblesse et de la bourgeoisie – musique symphonique
dans les salles de concert, la technique
et la lutherie instrumentales ont du évoluer, jusqu’à transformer le hautbois en un instrument d’une
sensibilité et finesse remarquable.
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La première caractéristique du hautbois est la nécessité d’utiliser un accessoire afin de produire un son.
Souffler dans le tuyau de l’instrument ne suffit pas car le simple fait de souffler ne produit aucune
vibration.
Faites le expérimenter aux enfants en leur faisant souffler dans un tuyau, dans une bouteille, …
Faites-leur observer qu’un trompettiste ne souffle pas de la même façon qu’un flûtiste, ni qu’un
clarinettiste ou un hautboïste.
(vidéo ou photo d’instrumentistes – posters Fuzeau / malettes pédagogiques Fuzeau –
Lugdivine - … )
Faites des essais à partir des fiches du livret Musique et Culture
« construire, jouer » d’ARIA 2003 – le Son des Choses – fiches pages 27 - 32 - 34 – 35 - 45
L’accessoire placé au bout du hautbois par le musicien est une pièce faite de deux
lamelles de roseaux réunies sur un tube appelée anche double.
Le son est donc produit par la vibration de ces deux languettes placées entre les
lèvres et actionnées par la pression de l’air envoyé par le musicien.
De la qualité du roseau, du soin apporté à sa fabrication dépendent les qualités de
son et de musicalité
de l’instrument.
La deuxième caractéristique est celle des matériaux employés pour fabriquer l’instrument.
Le hautbois a toujours été fabriqué dans du bois. Le buis, le bois de rose étaient utilisés au XVIIIè,
on lui préfère aujourd’hui l’ébène ou le palissandre.
Aujourd’hui, des expériences amènent des facteurs à fabriquer des hautbois dans d’autres essences
de bois (cocobolo, bois de violettes, … ) , recherchant à alléger le poids du hautbois, mais aussi les
qualités de sonorité. La fibre de verre ou des matériaux composites sont également expérimentés mais
leurs résultats ne sont guère probants pour l’instant.
Le tube intérieur est formé d’une perce conique
(contrairement à la clarinette sui n’est que cylindrique).
Le nombre de trous permettant la réalisation des
différentes
notes est très variable suivant les époques et le degré de
perfectionnement de l’instrument.
Si les hautbois anciens n’étaient pourvus d’aucun
mécanisme, l’on a commencé à placer à la Renaissance
une ou deux clés qui ont facilité la technique et permis
d’augmenter le nombre de notes jouées. Aujourd’hui c’est
plus de trente trous et un mécanisme très complexe qui
permet à l’instrumentiste de faire preuve de virtuosité … .
Avec beaucoup de travail et d’entraînement et de talent !
La troisième caractéristique : Sa sonorité.
Elle est un peu nasillarde.
Tout le monde pense à Prokofiev qui, dans Pierre et le Loup, a choisi le hautbois pour dépeindre le
personnage du canard.
A écouter l’ensemble de la famille, de la bombarde, la cornemuse au prima de la cobla, ou à la reïta
arabe, cette affirmation est justifiée.
Le hautbois moderne a néanmoins perdu cette caractéristique et est devenu beaucoup plus doux.
Dans les pièces classiques, il a souvent un rôle très romantique, interprétant des phrases très
mélodieuses.
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II. Le HAUTBOIS dans l’antiquité égyptienne et grecque.
Dès l’antiquité, 2000 avant J.C., excepté les trompettes, tous les instruments à
vent étaient appelés AULOÏ ou AULOS.
Le hautbois en était l’un d’eux. Les Egyptiens, les
Grecs et les Romains connaissaient déjà l’anche
simple et l’anche double. Les instruments formés
de deux tubes reliés par un collier de cuir sont
des ancêtres du hautbois puisqu’ils utilisent une
anche double. Les AULOS anciens avaient déjà
plusieurs trous percés dans un des deux tubes.
Le deuxième ne permettait de jouer qu’un seul
son appelé bourdon (principe de la cornemuse).
Si les tout premiers instruments à anches étaient réalisés dans des végétaux
creux, l’homme primitif a assez vite utilisé des matériaux assez résistants. Le
premier étant le roseau. Les Aulos étaient en roseau puis, avec une maîtrise
technologique assurée, en buis ou en ivoire.
Ils étaient utilisés lors des animations des banquets, dans les orchestres de
processions ou de cérémonies funèbres. Mais leur jeu était très pénible et dans
certains textes de l’époque, on peut lire – les joues
distendues à l’extrême, les yeux injectés de sang des
musiciens -.
La large rondelle située à la base de l’anche double
existe déjà sur certains instruments primitifs.
On a également découvert des instruments dans
lesquels l’anche était installée non plus dans la
bouche de l’instrumentiste, mais à l’intérieur d’un
réservoir d’air assez élastique (c’est l’uticularium
romain).
(Evoluant, il donnera naissance à deux types d’instruments différents :
la cornemuse à sac et le cromorne à capuchon.
Voir plus loin.)
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III. LE HAUTBOIS en Afrique et en Asie.
Le hautbois a toujours été très apprécié dans les pays islamiques car sa sonorité puissante et son
timbre agressif sont assez envoûtants. C’est le bien connu instrument du charmeur de serpent !
Instrument populaire, il participe à tous les défilés militaires ou les
cérémonies de noces.
En Chine, il occupe une place de choix dans le théâtre classique.
Les techniques de souffle et du jeu instrumental sont très différents
d’un pays à l’autre mais n’ont guère évolué dans les pays africains et
en Asie depuis l’Antiquité.
Les instruments sont restés très rudimentaires, sans clés (ce qui
limite la tessiture), avec des anches taillées très sommairement. Ces
instruments sont beaucoup plus courts que nos instruments
modernes (entre 30 et 40cm contre 70). Leur perce et leur pavillon
sont beaucoup plus larges ce qui leur donne cette sonorité si
caractéristique.
Au Maroc, en Algérie et en Chine, le musicien place l’anche
entièrement dans la bouche lui permettant d’utiliser la technique du
son continu. Tout en jouant, il peut, en inspirant par le nez, remplir sa
bouche pour en faire un réservoir d’air ce qui lui permet de jouer sans
jamais couper le son.
(voir catalogues de Lugdivine )
Les noms dans les différents pays :
Zorna
Alghaïta
monde arabe
Raïta
Sahnaï
So-na
Afrique occidentale
Inde
Chine.
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IV. Le HAUTBOIS en Europe
au Moyen-Age et à la Renaissance
Du XIIè au XVIè siècles
Sur des manuscrits de monastères, des tableaux, des tapisseries et quelquefois sculptés
dans la pierre, on voit des représentations d’instruments à anches doubles qui nous
donnent de bonnes indications sur les
instruments joués à cette période.
Les formes étaient extrêmement nombreuses,
offrant chacune une sonorité particulière adaptée
aux circonstances dans lesquelles l’instrument était
utilisé.
Ainsi n’employait-on pas les mêmes familles
d’instruments pour les musiques festives
seigneuriales ou les fêtes paysannes.
La technique instrumentale n’étant pas évolué, la
tessiture (nombre de notes pouvant être jouées) était de fait très réduite. Afin de pallier à
cet inconvénient, on avait l’habitude d’utiliser une série d’instruments de la même famille
mais de tailles différentes.
Dans l’ensemble, les instruments à anches médiévaux portent le nom de « chalumies » ou
« muse ». Ils évoquent également un timbre, un matériau, une fonction.
A la Renaissance, la forte pratique instrumentale en Allemagne et en Italie a permis le développement
de la lutherie et l’invention de nouveaux instruments. La technique nouvellement utilisée de tournage
du bois permet une grande qualité d’exécution et un impeccable alignement des trous.
Quelques instruments du Moyen Age et de la Renaissance:
Cornemuse
Connue dans le monde entier, elle pourrait avoir comme ancêtre la « tibia utricularis »
romaine. En France elle n’apparaît qu’au IXè siècle. Elle n’avait pas le sac qu’on lui
connaît actuellement et se composait d’un seul tube muni d’un bec cachant une anche
dans un capuchon de bois. Son timbre est plus doux que le cromorne.
L’instrument à sac a connu diverses évolutions jusqu’à devenir ce que l’on connaît : un
instrument avec plusieurs tubes dont un dans lequel le musicien souffle afin de remplir
le sac (voir musette). Les autres tubes sont des bourdons. Un seul d’entre eux est percé de
trous (au moins 6). Il est appelé hautbois et permet de jouer la mélodie.
Le nom de « cornemuse » est actuellement celui donné à la
famille des instruments à sac regroupant toutes les formes
les plus diverses créées à travers toute l’Europe et l’Afrique
du Nord.
Musette
Appelé d’abord la muse, elle était là pour réjouir les gens,
pour les amuser.
Cet instrument a beaucoup évolué et il existe différents types de musette, assez éloigné les
uns des autres avec comme point commun néanmoins d’être des instruments à anches doubles.
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La musette la plus ancienne était une sorte de cornemuse fonctionnant avec sa réserve d’air
dans un sac qui était rempli avec un soufflet. Elle n’avait qu’un seul tube (le chalumeau).
Le plus petit hautbois dont la vogue était immense aux XVII et XVIIIè siècles. Elle avait
lentement remplacé la cornemuse car sa sonorité plus douce était davantage dans l’esprit
de la cour de Louis XIV et de la mode des bergeries. Appelés également hautbois pastoral,
les instruments les plus perfectionnés ont un son juste et fin.
Mais il existe également des modèles rudimentaires au son très puissant et agressif, utilisé
dans les bals populaires. Il est à nouveau en vogue en Bretagne, accompagnant la cornemuse
dans les fêtes et bals traditionnels.
« … J’allai chez Mr Hotteterre, Flûte du Roy, qui me reçut
poliment chez lui, d’une manière hautaine cependant,
faisant l’important… Il me montra une musette,
curieux instrument amélioré par lui-même de manière
à pouvoir jouer dans tous les tons. Cette musette est
joliment faite, au goût du jour. Le sac est somptuuesement recouvert de velours, entouré de franges et de
larges bordures dorées. Il y avait de nombreux
tuyaux tournés dans de l’ivoire et montés de plusieurs
clés d’argent pour faire les demi-tons.
Accompagné par un claveciniste, il joua une sonate à
la musette avec un raffinement incomparable.
Il faisait les &agréments avec tant de grâce qu’on ne
pouvait l’admirer assez ; j’eus très vite l’envie de
posséder moi-même un tel instrument, désir vite tempéré dès qu’il m’eut mentionné le prix
qui était de dix pistoles. Il me dit cependant qu’il pouvait m’en faire une à moitié prix, sans
décoration. Il donne la plupart du temps des leçons à domicile et demande pour celles-ci une
pistole par heure, ce qu’il considère comme une aumône. Je le remerciai de tous ses excellents
conseils et de sa politesse … »
Extrait du journal d’Uffenbach 25.10.1715.
Cromorne
Cet instrument est dit « à anches encapuchonnées » car l’anche
est protégée par un capuchon de bois. Le musicien n’a pas de
contact direct avec l’anche qui de fait est moins fragilisée.
On trouve la première référence
à cet instrument en Allemagne
en 1489.
Son nom signifie « corne recourbée. »
En France, l’instrument apparaît au XVIIè siècle seulement.
La plupart de ces instruments avaient six trous et
éventuellement une double-clé. Sa famille était composée d’au
moins 6 instruments, du soprano à la grande basse.
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Hautbois du Poitou
Très répandu au Moyen-Age jusqu’au XVIIè, il existe encore sous la forme d’instrument
folklorique.
Comme le cromorne, l’anche est protégée par un capuchon. Il était muni d’une clé double
en dessous de laquelle le corps de l’instrument était largement bombé.
Bombarde
Issu du chalumeau, c’est à partir de 1342 que l’on voit apparaître
son nom.
La bombarde est un instrument grave à la sonorité sourde.
Son nom évoque bien une de ses fonctions possibles.
Gilles Péquignot jouant de la cornemuse
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V. Le HAUTBOIS en Europe du XVIè au XVIIIè siècles
Au XVIè, le hautbois est un instrument fait d’une seule pièce de bois. Sa perce est
conique et large. Son pavillon est très évasé. Il est muni d’une butée contre laquelle
s’appuient les lèvres du musicien.
L’instrument joue encore en plein air, en groupes appelées « bandes » (en plus des
hautbois, on y trouve les sacqueboutes – trombones de l’époque)
C’est sous LOUIS XIV que « la Grande Bande des Hautbois du Roy » connaît sa
plus grande célérité.
La famille des hautbois est toujours nombreuse car la tessiture des instruments
reste limitée. On trouve ainsi, du plus aigu au plus grave, - le dessus de hautbois –
le haute-contre – la taille de hautbois - … .
Il faudra attendre le XVIIè siècle pour voir la famille Hotteterre (musiciens
de Louis XIV) s’intéresser à faire évoluer l’instrument.
Ils créent le hautbois baroque, instrument construit
en trois parties (longueur 60 cm) comme le hautbois
moderne. Sa forme est beaucoup plus légère, plus
étroite. Les perfectionnements apportés permettent de
gagner en stabilité de justesse, en facilités techniques.
Les facteurs se permettent également des raffinements
de mouluration typique de l’époque. Le choix du bois
était très important.
On choisissait particulièrement du buis cherché en
Turquie ou en Angleterre qui était alors placé en
terre pendant 20 ans afin qu’il acquiert toutes les
qualités attendues avant d’être tourné pour en faire
l’instrument raffiné. L’ivoire, élément décoratif,
servait à faire les bagues entre les différentes parties.
La contexture des fibres de ce bois, les dimensions de ses pores
sont avec l’anche qui le fait vibrer, la cause physique de
l’impression qu’il fait sur nos sens. Le buis doit être bien sec,
sans nœ ud et d’une porosité à peu près égale dans toute sa
longueur. Lorsque le buis est en totalité trop dur, il a un son
glapissant et trop élevé, s’il est trop mou ou trop poreux, il a le ton
bas et se détériore promptement. »
Garnier fin 18è siècle méthode raisonnée pour le hautbois.
On entend pour la première fois le hautbois baroque
en 1657 dans le ballet de Lully « l’Amour malade ».
Beaucoup plus expressif que la bombarde, il a su
rapidement captiver les compositeurs et les
instrumentistes.
On commence à installer des
clés pour pouvoir jouer des ½
12
tons.
Lully est le premier compositeur qui écrit de
très nombreuses partitions pour hautbois ou
ensembles de hautbois, dans toutes ses pièces,
d’extérieur comme d’intérieur. Ils avaient
souvent le rôle de doubler les violons.
En 1710, en Allemagne, Bach utilise pour la première fois le
hautbois comme soliste à qui il fait chanter des phrases très
expressives, en dialogue avec les chanteurs.
Les musiciens français voyageaient
à travers l’Europe et s’inspiraient de
toutes les découvertes qu’ils faisaient
Ainsi, en Allemagne, ils ont découvert
des techniques de grattage des anches
bien meilleures que les leurs, en
Angleterre, un jeu technique en
avance sur l’école française.
Bénéficiant de toutes ces nouveautés,
la facture instrumentale française a beaucoup progressé.
En 1770, le hautbois a 6 clés (souvent prévues pour être
jouées indifféremment par les droitiers ou les gauchers).
Leur fixation laisse cependant beaucoup à désirer car elle
est précaire et a une incidence sur la qualité du son.
Haendel, Telemann, Mozart et
Haydn ont écrit de très belles
pages pour cet instrument.
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VI. Le HAUTBOIS en Europe au XIXè siècle
Durant tout le XIXè siècle, à travers toute l’Europe, - en Allemagne – en Angleterre –
en Italie et surtout en France – on cherche à faire évoluer la facture instrumentale.
S’inspirant du mécanisme adapté à la flûte traversière par Boehm, ce sont les
facteurs français qui ont développé le hautbois moderne, reconnu aujourd’hui
encore à travers le monde comme la meilleure facture.
En 1825, on trouve le premier hautbois à 10 clés. Puis, en 1840, Triebert perfectionne
encore l’instrument en simplifiant le mécanisme.
C’est en 1881 qu’est apporté le grand bouleversement. G. Gillet créé le modèle
conservatoire, instrument de 64,5 cm de long.
Il a installé un système complexe de clés, de plateaux et d’axes qui les relient.
De nombreux ressorts actionnent avec légèreté ce mécanisme. (voir plus loin)
Depuis lors, il n’y a plus eu de modifications essentielles.
Cela n’empêche pas chaque facteur de hautbois d’innover, d’offrir de nouvelles
possibilités, de personnaliser leurs instruments ce qui permet aujourd’hui aux
musiciens de trouver, au milieu d’un large choix de modèles, celui qui répond le
mieux à leurs personnalités et à leurs exigences.
Sur le plan musical, les compositeurs du XIXè ont écrit les plus belles lignes mélodiques
pour le hautbois d’orchestre. Par contre, rares ont été les œ uvres écrites pour le hautbois
soliste.
Quasiment seul Robert Schumann a écrit une sonate pour
hautbois et piano. Debussy, Berlioz, Brahms n’ont pas écrit
une seule page pour notre instrument.
Ils se sont heureusement
rattrapés dans des passages
d’œ uvres symphoniques dans
lesquels ils ont réservé de
splendides phrases solistiques
au hautbois.
Robert Schumann
Johannes Brahms
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VII. Le HAUTBOIS en Europe au XXè siècle
L’instrument, comme on l’a vu dans les pages précédentes, n’a plus beaucoup évolué sur
le plan technique depuis quelques décennies. Quelques tentatives expérimentales ont
lieu néanmoins actuellement.
Les compositeurs s’intéressent également à nouveau au hautbois et, sous l’impulsion des
œ uvres commandées pour les concours, les festivals, les orchestres, le répertoire
contemporain d’étend considérablement.
Heinz Holliger, hautboïste suisse, chef d’orchestre et compositeur, a ouvert la porte de
la recherche contemporaine en adaptant une technique appropriée à l’instrument.
Pierre Pierlot a fait particulièrement briller le hautbois dans son répertoire baroque
(Vivaldi – Marcello – Sammartini- … )tandis que Maurice Bourgue a fait connaître le
répertoire du XXè siècle (Hindemith – Britten).
Depuis les années 1990, une nouvelle génération de hautboïste est née et se produit sur
les scènes internationales. L’Ecole Française est reconnue dans le monde entier et nos
jeunes artistes engrangent de belles récompenses lors de concours internationaux. Citons
David Walter – Jean-Louis Capezzali – Alexei Ogrintchouk - …
De nouveaux ensembles se forment à nouveau à travers notre pays pour
redynamiser la pratique de l’instrument à anches doubles. Ils ont repris le nom
existant au XVIIIè, lors de leur création : Les Bandes de Hautbois.
Depuis 2001, il en existe une à Mulhouse qui a pris le nom de
« l’Ill aux Roseaux ».
Ces ensembles jouent des œ uvres originales écrites au 1è et 18è siècles, des
transcriptions d’œ uvres des 1ç et 20 è siècles et des œ uvres que les compositeurs
contemporains écrivent à la demande de ces ensembles.
.
Le hautbois et le cor anglais sont entrés dans toutes les sphères
musicales, depuis quelques années.
Découvrant peu à peu le jazz, on leur fait jouer des mélodies
romantiques dans la variété, leurs sonorités sont appréciées dans la
musique contemporaine.
De plus en plus fréquemment, les hautboïstes font partie intégrante
des harmonies.
Dans la musique folklorique, les Fest Noz bretons et les ensembles de
coblas des Pyrénées Orientales, font appel
à des familiers du hautbois.
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VIII.
La famille du HAUTBOIS
le COR ANGLAIS
C’est le compagnon le plus fidèle du hautbois.
Dans un orchestre, il y a généralement deux hautbois et
un cor anglais.
Le Cor Anglais est plus grave que le hautbois
(d’une quinte), ce qui le place entre le hautbois et le basson.
HISTORIQUE
Il est difficile d’avoir des certitudes quant à l’origine
du nom de l’instrument sachant qu’il n’a rien à voir
avec la famille des cors.
Inventé en Allemagne en 1720, il fut appelé tantôt
waldhautbois, tantôt corne d’anglois. Bach l’appelait
« oboe da caccia » - hautbois de chasse –
Deux hypothèses existent :
1.
Vers 1730, un musicien français aurait découvert
lors d’un voyage chez J.S. Bach, un instrument à
anches doubles, plus grave que le hautbois qu’il
connaissait.
Il a été envoûté par la chaleur et la couleur de son timbre, et rentré
à Paris, en a fait un éloge très appuyé. Il dit avoir entendu parler
d’un « englisches horn ».
Or, de toute vraisemblance, l’instrument était nommé « engelisches
horn » traduction – cor angélique –
C’est le terme de « englisches horn » qui a été retenu en France
– cor anglais - alors qu’en Angleterre il est nommé « French Horn » !
2.
Deuxième version historique :
Le cor anglais est très vite devenu un instrument militaire. Pour
pouvoir le jouer aisément, sans danger pour le musicien, sur un
cheval, et pour faciliter le bouchage des trous assez éloignés les uns
des autres, l’instrument a longtemps été pourvu d’une courbure
importante.
D’où l’idée d’angle, de cor anglé. Une nouvelle déformation nous
amène aisément au mot « cor anglais ».
En 1815, le premier cor anglais est sorti d’un atelier de facteur
français. Il était encore courbe .
16
Ce n’est qu’en 1839 que l’instrument a bénéficié des mêmes avancées techniques
que le hautbois et que sa courbure a disparu. On lui a donc construit un corps droit
de 95,50 cm de long.
Si l’instrument est plus long, il a également deux particularités
qui lui donne sa richesse de timbre :
A l’extrémité supérieure, l’anche est placée sur un bocal, tube
métallique recourbé qui permet au musicien de bien prendre
son instrument en bouche, tout en le tenant légèrement de
côté (et non droit devant lui comme le hautbois).
A l’extrémité inférieure, le pavillon est formé
d’une enflure piriforme qui a une grande
importance sur la sonorité.
Répertoire.
Solo de Tristan et Yseult de Richard Wagner
Solo dans la Damnation de Faust de Berlioz
Solo dans le 2è mouvement du concerto pour piano en sol
de M. Ravel
Caractéristiques
Son voilé par le pavillon piriforme
Caractère facilement nostalgique
Place de l’anche sur le bocal
Pavillon piriforme (en forme de poire)
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IX.
La famille du HAUTBOIS
le HAUTBOIS d’AMOUR
Un peu plus grave que le hautbois, il se situe entre celui-ci
et le cor anglais.
Il a surtout été utilisé par J.S. Bach dans sa musique
religieuse car il est encore plus expressif que le cor anglais
ou le hautbois.
De par sa tessiture et par sa sonorité très intérieure, il se
rapproche beaucoup de la voix humaine.
Son timbre est plus discret que celui du hautbois bien que
sa sonorité soit large, expressive, voire dramatique.
Malheureusement, et pour des raisons assez mystérieuses,
le hautbois d’amour a quasiment été délaissé après Bach.
Rares et surtout éphémères en ont été les utilisations par
les compositeurs du XIXè siècle. On le redécouvre peu à
peu aujourd’hui.
Répertoire
Cantates de Bach
Maurice Ravel
X.
La famille du HAUTBOIS
le HAUTBOIS BARYTON.
Appelé également Haeckelphone du nom de son inventeur,
c’est le plus grand hautbois très peu joué et très vite remplacé
par le basson.
Instrument rare, il est à nouveau à la mode grâce à la renaissance des bandes de hautbois, ensembles d’instruments à
anches doubles. Les facteurs actuels font des recherches
intéressantes pour lui donner les mêmes possibilités techniques et expressives que le cor anglais, voire le hautbois.
De plus en plus de hautboïstes excellent dans le jeu de cet
instrument au timbre très agréable.
Gérard Fossati vient de créer un instrument au pavillon
recourbé permettant à l’instrumentiste de jouer assis et
au son de mieux parvenir aux oreilles des auditeurs.
Seuls sont connus les passages de Richard Strauss pour cet instrument.
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Observez bien ces photos et cherchez
les indices vous permettant de
reconnaître les instruments.
1
4
6
9
2
7
10
3
5
8
11
1 hautbois baryton
2 détail hautbois baryton en ébène
3 détail hautbois baryton en cocobolo
4 à gauche htb – à droite htb baryton
5 cor anglais (voir le bocal ou coude)
6 hautbois baryton
7 de gauche à droite : hautbois – hautbois baryton – cor anglais – hautbois
d’amour
8 hautbois et cor anglais
9 hautbois baryton
10 pavillon piriforme du hautbois
baryton en cocobolo
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XI. Les anches du hautbois moderne.
Nombreux sont les instruments à anches. Vous pensez à la clarinette, au saxophone.
Mais avez-vous pensé d’où provient le son de l’orgue, de l’accordéon, de l’harmonica ?
Eh oui ! Ce sont des anches qui transforment l’air en son.
L’anche de hautbois est néanmoins bien particulière.
Si pour un hautbois, la qualité de l’instrument est
important, celle de l’anche avec laquelle
le musicien joue est tout aussi capitale.
Les hautboïstes font leurs anches eux-mêmes afin de
pouvoir les adapter à leur bouche, à leur son,
à leur technique de jeu. Ils essaient ainsi d’obtenir une
réelle communion avec leur instrument.
Mais ce mariage d’amour est très tumultueux car l’anche est souvent rebelle.
Le roseau est la matière première utilisée. Il est sélectionné avec soin dans les roseraies du
sud-est de la France. Puis il est séché. Il est choisi en fonction de la texture de ses fibres qui
ne doivent pas être trop épaisses, pas trop molles ni trop dures,
assez brillantes et claires.
Il subira ensuite une série d’étapes de préparation. Chaque tube de
roseau sera coupé à la
bonne longueur puis fendu afin d’obtenir la largeur approximative
nécessaire.
Il passera dans une petite machine afin d’être taillé à la forme
extérieure adéquate.
Enfin, passant dans une troisième machine, il sera gougé :
On lui donnera la forme intérieure et on affinera son épaisseur.
Enfin, la languette de roseau sera prête à être montée
sur un tube de laiton.
Le roseau sera ligaturé avec un fil de nylon.
Commencera alors l’étape la plus délicate et ingrate :
le grattage.
Afin que l’anche puisse sonner joliment, il faut en affiner l’extrémité. On la
rendra ainsi suffisamment souple pour vibrer. Les critères de grattage peuvent
varier d’un musicien à l’autre mais ce sont surtout des lois physiques qu’il faut
respecter.
Le roseau étant un élément naturel vivant, il est très changeant et en fonction
de la météo, du taux d’humidité de l’air, le même roseau réagira différemment,
pouvant passer d’une anche de grande qualité à une anche médiocre.
Un hautboïste peut devoir gratter 10 anches avant d’en trouver une qui lui aille parfaitement.
Pour un musicien, la difficulté de réussir ses anches est toujours source de stress, de mécontentement et
de perte de temps. Ainsi des recherches sont entreprises depuis plus de dix ans afin
de remplacer le roseau, matériau trop instable, par des anches synthétiques. Elles ont la qualité
de la stabilité dans le temps. Malheureusement, leurs qualités acoustiques restent médiocres
et les musiciens ne sont pas encore prêts à se l’approprier. L’anche en roseau naturel a encore de belles
années devant elle.
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XII. La fabrication du hautbois moderne.
Le hautbois est composé de trois parties distinctes :
- le corps supérieur ou tenon du haut
- le corps principal ou tenon du bas
- le pavillon.
Aucun trou percé dans le corps de l’instrument n’est visible. Ils sont tous cachés par des touches
reliées les unes aux autres par un complexe système de mécanisme et de clés qui permettent à
l’instrumentiste de faire preuve de virtuosité tout en utilisant des doigtés faciles.
Le tube intérieur de l’instrument est conique, ce qui signifie que le diamètre intérieur est de plus
en plus large, plus l’on descend vers le pavillon.
Le corps supérieur.
La perce y est la plus étroite, de 0,5 cm à l’embouchure
à 1cm à l’extrémité.
Le haut du corps est prévu pour accueillir l’anche.
Tout au long du tube, on distingue les différentes pièces
du mécanisme :
-
les 11 touches :
* 3 plateaux assez larges sur lesquels le musicien pose ses
doigts de la main gauche: l’index, le médium et l’annulaire.
* 8 pointes qui sont de petits plateaux articulés non par les
doigts mais par un mécanisme complexe de
-
charnières, tiges creuses sur lesquelles les pointes sont
soudées, articulées par un axe et reliées aux
-
9 clés qui sont actionnées par les pouce et auriculaire gauche.
Les charnières sont maintenues sur le corps de l’instrument
par l’intermédiaire d’axes filetés pivotant et huilés, fixés sur
des boules vissées dans le bois.
Enfin, pour que les touches puissent s’ouvrir et se fermer, ils
sont munis de ressorts plats ou en aiguilles.
Le corps principal.
Il est tenu par la main droite.
Son diamètre extérieur varie de 2,5 cm à 3 cm de diamètre
pour une longueur de 25 cm (comme le corps du haut).
Cette partie commande en grande partie le registre grave de
l’instrument.
On y trouve le même type de mécanisme ( 3 plateaux,
7 pointes et 10 clés).
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Le pavillon.
Il permet de jouer la note la plus grave du hautbois (si b endessous de la portée).
Le pavillon est la partie la plus courte (13 cm de long) mais
surtout la plus large de l’instrument (5 cm de diamètre).
Il est surtout important pour la qualité de la sonorité qu’il
apporte.
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Tout ce mécanisme nécessite un réglage très fin et précis afin
d’assurer à l’instrument un fonctionnement parfait, une justesse
de son sur tout le registre, l’absence de bruits parasites et un
régularité d’émission du son.
Il est fabriqué dans un alliage de cuivre, de nickel et de zinc
appelé le maillechort.
Il est façonné à la main par un artisan spécialisé dans l’atelier
qui ajuste pièce par pièce, ponce, lime, soude afin que toutes les
pièces s’articulent parfaitement. Une fois toutes les pièces
prêtes, elles sont démontées afin de passer dans un bain
d’argent. Ce métal noble protège de l’acidité de la transpiration
des doigts.
Grâce à ce mécanisme, le musicien peut jouer 36 notes par
l’intermédiaire de 80 doigtés différents.
Fait entièrement par des artisans qui n’utilisent que très peu de machines,
il faut plus de cent heures de travail pour partir du bloc de bois séché et prêt
à être tourné et façonné jusqu’à la livraison au musicien.
Les principaux facteurs de hautbois (fabricants) sont français. Citons les marques les plus connues :
- Fossati – Rigoutat – Marigaux – Lorré –
Merci à la Maison Fossati de Montargis pour le droit aux photos.
Des instruments sont également fabriqués en Italie – Angleterre – au Japon et en Chine.
Les marques françaises sont réputées dans le monde entier et font une grande partie de leur chiffre d’affaires à l’exportation.
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