Télécharger - Lydia LAKEL alias Tsipora DAHAN

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Télécharger - Lydia LAKEL alias Tsipora DAHAN
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Autofiction interactive
VDM ou la Vie D’une Mère…
divorcée en plus
Tome 1
Lydia LAKEL
alias
Tsipora DAHAN
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Le journal de Bridget Jones ? Déjà pris
Le journal de Tsipora Dahan ? Bof, pas terrible
Le Monde de Tsipora ? Sophie l’a déjà fait
VDM – la Vie D’une Mère divorcée. Yes !
Sous-titre : A Desperate Working Mom
Merci à ma jolie muse blonde Vanina sur ce coup-là.
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Je dédie cette autofiction interactive à toutes les âmes meurtries, aux brunes,
aux blondes, aux rousses, à mes ami(e)s, aux mamans solos et aux autres.
Merci à toutes mes lectrices (et lecteurs, le cas échéant.)
Messieurs, si la lecture de cette œuvre ne vous dit rien, merci de l’offrir à
votre épouse, compagne, maîtresse, amie, copine, fille ou bru.
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Avant-propos
Entrée en matière
Genèse
Introduction
Préambule
Préface
Préliminaires, mes préférés, et vous ?
Prélude
Prémices
Prémisses
Prodrome
Prolégomènes
Prologue
Propédeutique
Petite clin d’œil à mes amis de la bibliothèque municipale de Lille.
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VDM – la Vie D’une Mère divorcée est une autofiction interactive, inspirée par
des lectures, des réflexions, des univers réels, virtuels ou oniriques, des « amis,
des amours, des emmerdes. » Entre ma vie de maman solo et ma carrière de
traductrice indépendante à plein temps, j’ai dû me trouver un nouveau 5 à 7…
du matin, pour avoir le temps d’écrire. Vous retrouverez ici un peu de moi, un
peu de vous et un peu de tous les anonymes que nous croisons au quotidien.
Alors, si comme moi, vous souhaitez découvrir rapidement la suite de nos
aventures, lisez !
Ce livre sera publié en version électronique dans un premier temps (car chacun
de mes chapitres est enrichi de ressources numériques, liens vers des pistes
musicales, des vidéos, des articles encyclopédiques), afin de le diffuser plus
largement et j'espère qu'à sa lecture, de nombreux éditeurs me contacteront
afin d’en adapter une version papier plus traditionnelle, qui deviendra un bestseller avant de devenir un blockbuster sur les écrans. On peut rêver…
Mon nom de plume est Tsipora Dahan. Je suis une jeune mère divorcée de 43,5
ans à ce jour, maman de deux adorables petits garçons de 6 et 8 ans. Je vis à
Lille, dans le nord de la France, où je suis revenue me reconstruire après un
divorce houleux et douloureux... Existe-t-il des divorces heureux ? J’écris depuis
de nombreuses années puisque je traduis la prose des autres depuis plus de 15
ans, mais je rêve à présent de vous présenter mon style, que je qualifierai de
« paradoxal » par le biais d’un médium un peu expérimental. En effet, à la vie,
comme à la plume, j’aime cultiver mes paradoxes. J’adore surprendre et être
surprise. J’aime être là où l’on ne m’attend pas, mais je ne vous en dis pas plus.
De la vie à l’autofiction et du rêve à la réalité, tout est là !
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Comme je vous le disais, chaque chapitre contiendra des références
bibliographiques, musicales, numériques, des liens vers une piste musicale ou
une vidéo permettant au lecteur de s’immerger plus profondément dans mon
univers et de comprendre mes références. Vous aurez également la possibilité
de participer aux choix lexicaux effectués. Une interaction se créera ainsi entre
nous et vous pourrez m’écrire sur mon mail perso [email protected] afin de
me
faire
partager
vos
impressions
ou
vos
tranches
de
vie.
Vous découvrirez les destinées de Tsipora et de ses amies, toutes plus
attachantes et délirantes les unes que les autres. Vous partagerez aussi leurs
lectures, leurs rêves, leurs interrogations et réflexions, leurs crises de rires, de
larmes, de boulimie ou d’anorexie, leurs déconvenues amoureuses, leurs
fantasmes, etc. N’oubliez pas que vous êtes chacune d’entre nous et comme
nous le rappelle la première leçon sur la métaphysique de Saint-Thomas
d’Aquin : « L'expérience ne se transmet pas de façon scientifique, mais comme
une opinion ou une croyance. » Je me permets donc de vous livrer mon humble
expérience afin que vous puissiez la vivre par procuration, tout comme il
m’arrive très souvent de voyager ainsi en écoutant les récits des nombreux
globe-trotters de mon entourage.
Pourquoi ce livre ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi moi ? Pourquoi vous ?
Je me suis réveillée ce matin avec une folle envie de vous écrire. Dans la
panade depuis 5 ans, j’ai enfin trouvé la solution à ma peine, à ma colère, à ma
rancœur, ma frustration, mon incompréhension. Ils ont raison tous ces
nouveaux apôtres du développement personnel, « la solution est en nous »,
encore faut-il la trouver. Nous avons chacun la nôtre, et la mienne, c’est vous !
Vous écrire me fait un bien fou ! J’ai tout essayé, les antidépresseurs, la
psychanalyse, les psychothérapies cognitives et comportementales, le sport, le
reiki, rien ne m’a apporté autant de bien être que l’expérience cathartique,
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thérapeutique, libératrice et salvatrice de l’écriture. L’introspection a du bon,
mais l’expression écrite est véritablement jouissive et jubilatoire. Ce livre est un
message d’espoir. Je m’adresse à vous, qui comme moi avez connu la
souffrance, le handicap, la maladie, la dépression, la douleur, le deuil,
l’angoisse, le stress, qui pensez que le sort s’acharne sur vous depuis de si
longues années que vous ne retrouverez jamais la sérénité. Je prends le parti
de vous parler de moi pour vous rappeler cette magnifique phrase, désormais
mondialement connue dans mon pays :
« Mes amis étaient pleins d'insouciance, mes amours avaient le corps brûlant,
mes emmerdes aujourd'hui quand j'y pense, avaient peu d'importance.»
Merci Charles pour cette magnifique chanson.1
N’hésitez pas à adapter ces expériences, ces rencontres et ces leçons à votre
vécu. Ma modeste contribution sera donc de vous rappeler que la vérité est
ailleurs, non pas sur une planète habitée par des extra-terrestres comme dans
X-Files, mais en vous. Je passerai en revue mon enfance, mon adolescence, ma
vie de lycéenne, d’étudiante, de femme active, d’épouse et de mère, afin de
tenter de vous donner les clés d’une lecture plus optimiste des événements et
de vous montrer qu’il est possible de tirer une leçon positive, un apprentissage,
même des plus grandes douleurs. Je tente de prendre du recul, de la hauteur,
de regarder la vie avec humour, au risque de vous choquer parfois, d’où le
choix d’un style paradoxal et contrasté, littéraire et prosaïque, pour ne pas dire
vulgaire, d’un format original et expérimental, visant à vous sortir de vos
habitudes de lectures classiques. Vous trouverez en moi un peu d’Eliette
Abécassis, Une affaire conjugale, avec tout le respect que je lui dois, beaucoup
d’Agnès Abécassis, Les Tribulations d’une jeune divorcée, un peu mais pas trop
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https://www.youtube.com/watch?v=yjliZAxrJ1U
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j’espère, de La femme parfaite est une connasse, de Anne-Sophie Girard et
Marie-Aldine Girard. Je viens d’achever la lecture de l’ouvrage susmentionné
d’Agnès Abécassis et je dois dire que j’ai eu un véritable coup de cœur, un vrai
fou rire dès le premier chapitre, c’était incroyable. Elle racontait sa vie et
pourtant elle parlait de moi, de mes amies, de mes rencontres, de mes
déboires. Cela me donnait le sentiment d’être exceptionnelle, et en même
temps si banale !
Heureusement, plus j’avançais dans la lecture et moins je me reconnaissais, ce
livre n’aurait eu aucun sens dans le cas contraire. Un petit sourire narquois ne
quitta cependant pas la commissure de mes lèvres jusqu’à la dernière page, car
je pensais déjà aux lignes que je vous réservais.
Je meurs d’envie de vous faire partager mes pérégrinations cérébrales :
puisqu’elles font rire mes amis, pourquoi pas vous ? Ils ne seraient pas mes
amis si je les gonflais, me direz-vous. J’aimerais donc tenter de vous faire
sourire également chers amis lecteurs. N’hésitez pas à me livrer vos
commentaires, vos tranches de vie, vos réflexions, vos coups de cœur ou de
gueule, à cette adresse : [email protected]. Je la donne bien sur les sites de
rencontres, alors pourquoi pas à ici ? Rencontrons-nous !
J’avais initialement prévu d’entrer en matière avec une adaptation de la
généalogie biblique du genre : « Au premier jour, mon aïeul Mathusalem… ».
Mais, j’ai changé d’avis. Je vous sens soulagés, non ?
« Autofiction. » N’est-ce pas antinomique ? Est-ce un oxymore ? Une fiction
peut-elle être autobiographique ? Peut-elle refléter la réalité ? Quelle
importance ? Avez-vous demandé à J.K Rowling si Harry Potter avait existé ?
Disons que je me suis inspirée de faits et de personnages réels, que j’y ai ajouté
une petite dose d’épices, de piment, de bonne humeur, de réflexion, d’analyse,
de dérision, d’ironie, d’humour ou de gravité, selon mon humeur. Je remercie
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donc Eliette et Agnès Abécassis, sans qui cette version de la vie d’une mère
divorcée n’aurait sans doute jamais vu le jour. De par mes origines et mon
patronyme, je reste dans l’univers des mères juives sépharades mais c’est un
pur hasard. Le nom ne fait pas le moine, c’est bien connu ! N’ayez crainte, cette
œuvre ne sera ni sectaire, ni communautariste, c’est trop dangereux de nos
jours. Je vous offre un palimpseste à la Gore Vidal, que j’ai eu l’immense
honneur de traduire. Je vous livrerai les tréfonds et non les bas-fonds de ma
pensée, de mon écriture, de mes lectures et surtout de mon univers onirique.
Tiens, ça rime avec … linguistique, stylistique, poétique… et bien, à quoi pensiezvous ? Quelle aventure haletante en perspective… N’ayez crainte, tout se
passera bien. « Aie confiance », comme le susurre Kaa à l’oreille de Mowgli.
Je vous laisse donc découvrir cette autofiction en guise de petite mise en
bouche, afin de vous mettre en appétit, mais n'y voyez aucun jeu de mot
salace, on se connaît à peine.
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« Cinq heures du mat' j'ai des frissons
Je claque des dents et je monte le son
Seule sur le lit
Dans mes draps bleus froissés
C'est l'insomnie
Sommeil cassé. »
(Merci à Chagrin d’Amour, 1981.)
https://www.youtube.com/watch?v=U-Zs1LzA7aU
Avertissement aux âmes sensibles, le clip a très mal vieilli.
Chapitre 1 : Tsipor Laïla, Tsipora et moi
Lille, le 10 juillet 2014, 5 heures du mat.
Depuis ma séparation (subie) et mon retour de Bordeaux, je peine à retrouver
ma joie de vivre d’antan, mon dynamisme, mon énergie, ma détermination, ma
vitalité et mon audace, d’autant que les coups durs s’enchaînent depuis 7 ans
maintenant. J’ai successivement encaissé deux césariennes en urgence, le
handicap désormais résorbé de mon benjamin (Ethan), un divorce, un
licenciement économique, le deuil de mon père et la maladie de mon frère,
dont il est remis, Dieu merci ! Et comme le rappelle la blague célèbre, reprise
par Victor Malka dans son dico de l’humour juif : « Nous les juifs, nous n’avons
qu’un seul Dieu et nous n’y croyons pas ! » Ah mince, j’avais dit que cette
œuvre ne serait pas communautariste… Mais bon, l’humour juif, je suis tombée
dedans quand j’étais petite, alors j’ai un peu de mal à m’en défaire…hommage
à mon défunt père. Malgré tous mes efforts, je n’ai donc pas réussi à rester la
jeune femme souriante et insouciante que je fus dans mes années étudiantes.
Je demeure cependant douée pour m’entourer de personnes au sens de
l’humour aussi riche que ravageur. Je leur inspire apparemment une pléthore
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de surnoms, je ne sais pas trop comment je dois le prendre, mais je ne préfère
pas me poser la question, comme vous le verrez ci-dessous, ils ne sont pas tous
flatteurs.
Le plus ancien me fut attribué par mon père, encore lui, désolée. Il m’appelait
« Tsipor Laïla » depuis mon plus jeune âge, ce qui signifie « oiseau de nuit » en
hébreu, car toute petite déjà, j’avais des problèmes d’endormissement, qui ne
m’ont d’ailleurs jamais quittée. Mon cher paternel était persuadé que je finirai
par ouvrir un bar.
À
défaut d’avoir réalisé ce projet un peu fou, je n’ai cessé
d’étudier la faune nocturne lilloise, mais j’ai préféré étudier l’autre côté du
zinc, être cliente plutôt que gérante, de peur de dilapider la recette en verres
offerts à mes ami(€)s. Je sais, mon grand cœur me perdra.
Mon nom de plume n’avait d’autre signification à mes yeux que la contraction
de ce petit surnom affectueux. Cependant, après une recherche en ligne sur
Tsipora, ce choix s’est définitivement imposé à moi, malgré les nombreuses
levées de boucliers qu’il a pu susciter. Arrêtons-nous sur la signification de ce
prénom : « celle qui attaque ». Caractère souvent associé au prénom de
Tsipora : « Solide, parfois rude. » N'est pas très souple et ne lâche pas
facilement prise. Possède une force de caractère incroyable, qui démontre une
obstination redoutable. Même lors de ses colères, elle semble rester en total
contrôle d'elle-même. Sauf après 3 verres de vin, j’avoue. Tsipora juge selon ses
critères et souvent sans concession. Ses croyances et ses valeurs morales sont
exclusives, pour ne pas dire extrémistes. Je suis une intégriste de l’athéisme.
Elle manifeste une grande raideur dans son comportement, ce qui la valorise et
la rassure. Promis, je vais me remettre au sport pour retrouver de la souplesse.
Sa forte émotivité joue bien plus le rôle de détonateur que de modulateur. Elle
est très méfiante en amour, d’où mon vœu de célibat. D’une volonté
extrêmement forte, qui induit un caractère explosif, contenu par une grande
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maîtrise, elle est pleine de fureur. Sa ténacité lui permet de venir à bout de
bien des obstacles. Elle ne sait pas agir sans se dépasser et lutte pour être
l'égale des autres, surtout des hommes. Elle possède un grand sens des
responsabilités. Une sociabilité qui varie selon ses humeurs. Très
indépendante, elle prend très tôt une distance critique avec ses relations, sa
famille d'abord, puis l'école, la religion et la société en général.2
- « Alors, frérot, après avoir lu tout cela, tu ne trouves pas que mon nom
de plume me va très bien ? Qu'est-ce qu'un nom après tout ? Si celle que
nous appelons la rose portait un autre nom, ne sentirait-elle pas aussi
bon ? »
Tiens, j’aurais parié que cette citation venait du Petit Prince et non, honte sur
moi, c’est dans Roméo et Juliette. Dire que j’ai passé 5 ans sur les bancs de la
fac à étudier toutes les pièces de Shakespeare, Alzheimer me gagne avant
l’âge.
Mais pourquoi vous raconter tout cela ?
Nombre d’entre vous peineraient à se reconnaître dans ce prénom daté et
stéréotypé, surtout affublé d’un patronyme aussi courant dans le monde juif
sépharade et aussi facile à stigmatiser, notamment sur les bancs de l’école
publique de la République française, défendant ses valeurs fondatrices :
« liberté, égalité, fraternité, » mon œil ! Retournez donc dans une cour de récré
et vous verrez comme les enfants se sentent égaux et fraternels ! J’ai rencontré
ma première insulte antisémite alors que je n’avais que 7 ans : « Sale juive »,
m’a simplement lancé l’un de mes meilleurs copains de classe du moment, lors
d’un désaccord banal et sans importance, au cours de la pause méridienne. Je
ne savais absolument pas ce que cela signifiait mais j’avais bien compris que
2
Adapté depuis http://www.signification-prenom.net/signification_des_prenoms/prenom_TSIPORA.html
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cela ne devait pas être très flatteur en raison de la présence du mot « sale. »
Un peu vexée et honteuse de ne pas comprendre son invective, j’étais bien
décidée à en parler avec mes parents le soir même. Quelle ne fut pas ma
surprise lorsqu’ils m’apprirent que certaines personnes en France, mon pays
natal, pouvaient me détester parce que j’étais différente ! Différente ? Moi ?
Pourquoi ? Pas du tout ! Je n’ai rien demandé, ni rien fait à personne. Hier, ce
petit garçon était l’un de mes meilleurs copains et aujourd’hui, il m’insulte et
est à deux doigts de me cracher dessus ! L’incompréhension totale me gagnait
et surtout le refus catégorique de laisser cette situation s’installer. Du haut de
mes 7 ans, je décidai de prendre les choses en mains et de ne pas me laisser
faire. Le lendemain matin, je fonçai droit vers lui, l’interrogeai sur le sens de ses
propos, il les réitéra et ce jour-là, pour la première fois, je sentis monter en
moi, la colère, la rage, la violence de l’injustice, et sans que je ne sus pourquoi
ni comment, sans être capable de maîtriser mes bras, ni mes forces, certes
encore toutes relatives à 7 ans, je vécus ma première rixe pour insulte
antisémite. Mes membres supérieurs se levèrent et le poussèrent avec une
puissance surprenante. Il en tomba à la renverse et le sang jaillit de sa boîte
crânienne, qui s’était violemment éclatée sur le goudron de la cour. La vue du
sang eut raison de ma fureur. J’étais tétanisée, terrifiée, pétrifiée, horrifiée. Je
ne voulais pas le blesser, mais simplement lui souligner, en alliant le geste à la
parole, le caractère intolérable de ses propos. Je ne serais pas une victime
docile. Je fus sévèrement blâmée. L’ex-camarade se remit rapidement de sa
blessure finalement superficielle. Nous passâmes le reste de notre scolarité à
nous éviter cordialement et tout rentra dans l’ordre. Ce fut malheureusement
la première fois d’une longue série. Un événement aussi banal que celui-ci peut
parfois déterminer le reste de votre vie et vous en apprendre beaucoup sur
votre nature et votre personnalité, à votre plus grande surprise d’ailleurs ! Ce
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jour-là, je décidai que j’assumerai la gestion de ma judéité, puisque de par mon
nom, j’étais juive avant d’être française aux yeux de tous. Cela ne déterminerait
cependant en rien mes choix de vie. Enfin, je ne me le suis pas tout à fait dit en
ces termes, mais c’est ainsi que je le comprends à présent. Cet événement,
somme toute, très négatif, a fait de moi, ce que je suis aujourd’hui.
« L’antisémite, » comme me surnomme les autres membres de ma famille
nucléaire. Non pas que je sois réellement antisémite, ce serait le comble, mais
disons que je ne manifeste pas un amour inconditionnel à ma communauté, ni
à Israël. Je me sens juive lorsqu’on attaque ma judéité, tout comme je me sens
maghrébine lorsque j’entends des propos racistes envers la population issue de
la diversité, comme les politiques le disent à présent. Je réagis surtout à
l’injustice sociale et ethnique, d’où qu’elle vienne, et j’en suis fière. S’il m’avait
traitée de « sale bougnoule » en raison de mes origines marocaines, je pense
que cela aurait eu exactement le même effet ! Je ne me laisse pas déterminer
par ma naissance, mes origines, mon nom, mon appartenance théorique à un
peuple, à une nation, une situation géographique, une classe sociale ou tout
autre déterminant social théorique. Cette différence, vécue comme une
souffrance pendant longtemps, j’en ai fait une force. Je cultive et j’assume mon
absence de culte (et non de culture) et ma liberté de pensée. Je ne juge, ni ne
tente de convaincre personne, mais je suis aujourd’hui en accord avec moimême dans cette posture, qui n’en est d’ailleurs pas une d’ailleurs, dans cette
croyance et cette philosophie de vie, que sont l’athéisme, l’universalisme et
l’humanisme. Je pense avoir réussi à transformer la violence d’une souffrance
exclusive en une force positive et inclusive. Passant ma vie à ne pas me laisser
déterminer par cette appartenance ethnique, je cultive le paradoxe ici en
jouant au maximum sur cette corde raide et en assumant cette identité juive
fictive ! Pour clore ce chapitre et sortir de ces digressions communautaires,
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auxquelles je m’étais pourtant jurée d’échapper, je me permets de vous
rappeler la morale de la fable de La Fontaine, Le lion et le rat : Patience et
longueur de temps font plus que force ni que rage. »