Le renouveau de la scène musicale juive par David UNGER
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Le renouveau de la scène musicale juive par David UNGER
Le renouveau de la scène musicale juive par David UNGER 12 novembre 2015, 02:08 David UNGER (Notes d'Isabelle Lemann, mise en forme d'Alas Jonas) Deuxième partie Renouveau Juif Et là, il y a une prise de conscience collective. Les artistes qui jouent une musique extrêmement bruitiste, très expérimentale, qui cherchent à casser les codes, beaucoup de ceux qui travaillent avec John Zorn, se rendent compte qu’ils sont presque tous juifs. Ce n’est pas nécessairement un sujet d’échanges ou de partages, mais certaines questions vont émerger chez des musiciens comme le pianiste, Anthony Colman, le saxophoniste Roy Nathanson, John Zorn, David Krakauer … Les Klezmatrics En amont, on trouve un petit groupe formé en 1986 par trois personnalités incontournables : le trompettiste Frank London, l’accordéoniste/guitare/chanteur yiddish Loris Sklanberg et la violoniste Alicia Svigals qui prendront le nom de Klezmatics. Ce sont eux qui ouvriront la voie de ce renouveau. Frank LONDON Lorin SKLAMBERG Alicia SVIGALS Tous les trois, assoiffés de culture juive vont s’inscrire au Yivo[1] à New york, pour suivre des cours de yiddish. Loris Sklamberg à New York, rencontre deux chanteuses yiddishiste exceptionnelles, Barbara Kirchenblat et Adrienne Cooper. Adrienne Cooper donne aussi des cours de yiddish auxquels se rendent nombre de jeunes talents plein d’envie d’apprendre, de jouer et de chanter. Ces cours deviennent une vraie fête. Il est vrai que le rapport à la Shoah, à la perte, à la souffrance est une des différences fondamentales qui existe entre les Juifs américains et les Juifs européens et leur désir de se rattacher à des racines est fort, peut-être plus fort à New York que partout ailleurs New York, est une ville de communautés et de revendications identitaires. Non seulement elles revendiquent mais elles cherchent à recréer des mondes, une Little Italy, une Little Odessa, une China Town. C’est l’une des raisons majeures pour laquelle la musique identitaire juive a émergé plus fortement à New York qu’ailleurs. Adrienne COOPER Retranscrire Les Klezmatics se lancent, lentement mais sûrement, dans cette grande aventure musicale en allant chercher dans les vieux enregistrements du début du XXème siècle, des enregistrements faits par des musiciens migrants d’Europe de l’Est vers les États-Unis enregistrés dans les années dix, vingt et trente. Groupe klezmer (Rohatyn. 1915) En Europe, on n’a pas de partitions de cette musique klezmer de tradition orale parce qu’elle est morte dans les camps, brûlée avec les hommes et les femmes. Mais quelques-uns de ceux qui ont pu s’exiler à New York ont enregistré très naturellement des lmorceaux très anciens, des trésors. Tous autour du magnétophone, Krakauer raconte comment ils procédaient en pianotant playstop-rewind, play-stop-rewind, play-stop-rewind…, écoutant, découvrant les mélodies, reconnaissant les tonalités à l’oreille, puis les rejouant sans cesse. À partir de ce travail laborieux, sur cette base, après en avoir retrouvé le langage et les codes, il fut possible d’inventer sa propre musique. Un album de 1994 des Klezmatics, Jews with horns, montre bien l’énergie new-yorkaise typique [2], le « pêchu », et le travail déjà abouti de réappropriation. Ce groupe, composé de musiciens extrêmement doués aux egos forts, se livraient a de véritables battles sur scène, David Krakauer et Frank London, trompettiste hors pair, rivalisant de virtuosité pour prendre le dessus. L’homosexualité de certains de la troupe et le fait de jouer de la Album Jews with horns 1994 Album Rhythm 'n Jews 1990 musique traditionnelle de façon un peu nouvelle, fit sensation dans la presse, ainsi que le look d’Alicia Svigel avec ses cheveux très longs, qui jouait comme une punk David Krakauer Ayant terminé ses études de musique, Krakauer s’est dit que s’il jouait de la clarinette comme les autres,il ne serait jamais qu’un Sydney Bechet de seconde zone ou un petit DeFranco. Sa décision de jouer du klezmer est lié à une sensation d’enfance Il gardait dans l’oreille le son d’un petit groupe klezmer de rue entendu près de chez lui, dont le phrasé lui rappelait le parler de sa grand-mère, comme une espèce d’accent yiddish en anglais. En l’écoutant, il a ressenti le besoin de jouer cette musique qui le ramenait à la maison, cette musique pleine d’humanité, rappelant une authenticité identitaire sans pour autant développer un discours mémoriel ou nationaliste. Il raconte qu’il a croisé une copine dans le bus qui cherchait un clarinettiste pour jouer de la musique juive. Elle ne pensait pas du tout à lui parce qu’il avait certainement d’autres projets plus sérieux que ça. Les mots lui sortis de sa bouche : je veux bien DAvid KRAKAUER essayer. Et ce fut comme une révélation. Désir de musique punk 1989, la chute du mur de Berlin. Le Rock’n Roll explose dans toute l’Europe de l’Est. Les musiciens cités qui ont une vraie notoriété en tant que musiciens hardcore, non pas en tant que juifs, sont invités à aller jouer en Europe de l’Est, surtout en Allemagne. Marc Ribot, avec son projet de l’époque, a beaucoup de succès et tourne énormément en Allemagne de l’Ouest et dans l’ex RDA. Il se rend compte de la résurgence très forte de l’antisémitisme : « Moi je jouais dans des clubs, dit-il, face à des publics qui étaient des publics hardcore, mais je ne savais pas si dans mon public il y avait des nazillons, s’il y avait des skins ou si c’était juste des jeunes qui étaient là pour s’éclater. Si c’était des fascistes, des néo-nazis ou des antifascistes. » Il est extrêmement gêné de jouer dans des clubs où la veille, le lendemain des groupes néonazis sont ou vont monter sur scène. Nombre de groupes qui n’avaient pas ressenti le besoin d’affirmer qu’ils étaient juifs, se sont demandé si leur silence n’était pas suspect face à cette histoire. Punk et judéité Ils se sont interrogés aussi sur les très grands noms de la musique rock ou punk qui ont pris des pseudos pour cacher leur identité juive. Citons des figures de l’histoire du rock comme Bob Dylan (Zimmerman), Lou Reed (Rabinowitz), Iggy Pop (Österberg),[3] des artistes comme Art Garfunkel, des musiciens comme Burt Bacharach, des leaders de groupes punk comme Marc Bolan (Feld) en Angleterre ou Richard Ale (Richard Meyers), l’un des initiateurs du punk américain. Sans que des raisons se fassent jour, un grand nombre de musiciens juifs ont ainsi participé à l’élaboration des musiques punks. Et incontestablement il y a une histoire juive de la musique punk dans l’histoire générale de la musique punk. [1] Yivo. le Centre historique juif qui a été fondé d’abord à Vilnius, dont les archives ont pu être sauvées durant la guerre, et donc avant de s’expatrier, de s’exiler à New York et c’est le Centre des cultures juives que l’on trouve à New York et qui dispensait, toujours aujourd’hui d’ailleurs, mais qui Loris Sklanberg, né à Los Angeles raconte que sa radio captait assez mal celle du Yivo. Son envie de yiddish était telle qu’il a décidé d’aller vivre à New York pour prendre des cours sur place. [2] parce que horns en musique cela veut dire les cuivres et cela veut également dire les cornes. Et c’est vrai que ça reprend cette caricature médiévale du juif avec des cornes [3] Leonard Cohen, lui n’a pas changé son nom, c’est le seul, mais il n’a pas non plus revendiqué franchement sa judéité, J’aime Commenter Partager Régine Wizenberg Paris aime ça. 1 partage À propos Écrire un commentaire... Créer une publicité Facebook © 2015 Français (France) Créer une Page Développeurs Emplois Confidentialité Cookies Choisir sa pub Conditions d’utilisation Aide