Spécialisation écologique et mode de reproduction chez le
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Spécialisation écologique et mode de reproduction chez le
Master 2 recherche : Ethologie, Ecologie, Evolution Ecole doctorale Vie-Agro-Santé Spécialisation écologique et mode de reproduction chez le puceron Sitobion avenae dans les paysages agricoles Par Bertrand Gauffre Sous la responsabilité de Manuel Plantegenest UMR BiO3P INRA-Agrocampus Biologie des Organismes et des Populations appliquée à la protection des plantes Domaine de la Motte 35653 Le Rheu Juin 2005 Remerciements ! " ( ) # $ % % ( * * + ! + ( - . + , ( ! / , % , , # * ( 1 &' 2 $3 ' 2 0' 0' 0 , * Sommaire Remerciements………………………………………………………………………...……..…….2 Introduction……………………………………………………………………….…….…...……..4 Matériel & méthode…………………………………………………………………………….….7 I Matériel biologique………………………………………………………………………..7 II Caractérisation phénotypique…………………………………………………………….8 1) Couleur……………………………………………………………………………8 2) Réponse aux conditions d’induction des formes sexuées………………………...8 III Analyse des données………………………………………………………………….....9 1) Traitement statistique des données phénotypiques……………………………….9 2) Analyses génétiques………….……………………………………………….…10 Résultats………………………………………………………………………………………...…13 I Caractérisation biologique et génétique des clones de S. fragariae………………...…...13 II Analyse génétique et phénotypique des clones de S. avenae…………………………...13 1) Structuration génétique par la plante hôte chez S. avenae………………………13 2) Etude des caractères phénotypiques……………………………………………..14 III) Relations phénotypes – génotypes………………………………………….…………18 1) Représentation globale par analyse des correspondances multiples ……………18 2) Caractérisation génétique en relation avec les traits phénotypiques…………….20 3) Arbres sur individus et sur populations………………………………....……….21 Discussion…………………………………………………………………………………………24 Conclusion………………………………………………………………………………………...28 Bibliographie……………………………………………………………………………………...29 Annexe……………………………………………………………………………………………..35 Résumé / Abstract.………………………………………………………………………………..36 3 Introduction Le sexe est partout (Simon, Rispe et al. 2002). Le mode de reproduction sexué est en effet largement prédominant chez les eucaryotes (Bell 1982). Il génère de la diversité, permet de combiner les mutations favorables et d’éviter l’accumulation de mutations délétères (Stearns 1987). A l’opposé, l’absence de mécanismes permettant de rapides changements génétiques a conduit à considérer la reproduction asexuée comme un cul de sac évolutif (Maynard Smith 1989). En conséquence, l’avantage à long terme du mode de reproduction sexué est universellement admis. Pourtant, à court terme, la reproduction asexuée est beaucoup plus efficace car elle évite le double coût théorique, lié à la production de mâles par les femelles qui sont les seuls vrais individus reproducteurs (Maynard Smith 1978) ce qui devrait conduire à une disparition rapide de la reproduction sexuée. Face à cet apparent paradoxe évolutif, plusieurs hypothèses permettant de rendre compte d’un avantage à court terme du mode de reproduction sexué ont été proposées. Elles reposent soit sur des modèles dits mutationnels (Kondrashov 1988, Peck 1994) soit sur des modèles dits environnementaux (Van Valen 1973, Williams et Mitton 1973, Bell 1982, Doncaster, Pound et al. 2000). Les modèles basés sur les mutations évoquent les effets synergiques entre les mutations délétères ou encore la sélection sexuelle pour attribuer un coût à court terme à la reproduction asexuée. Les modèles environnementaux, dont le plus célèbre est l’hypothèse de la reine rouge, suggèrent que la capacité qu’à la reproduction sexuée à générer de la diversité est sélectionnée en réponse à différents facteurs biotiques ou abiotiques. Les organismes capables de se reproduire par voie sexuée comme par voie asexuée (i.e., par parthénogenèse) sont des modèles de choix pour l’étude de ce paradoxe. L’existence chez ces organismes de patterns récurrents (géographiques et/ou écologiques) de distribution des formes asexuées et de leurs parents sexués conforte la pertinence de l’hypothèse environnementale. C’est sous le terme de parthénogenèse géographique (vandel 1928) qu’ont été décrits ces patterns de distribution. Le mode de reproduction asexué semble favorisé dans les environnements extrêmes (par exemple, plus arides) dans des habitats simples, perturbés, anthropisés ou tout simplement récents. Cependant, si la répartition géographique différentielle des formes sexuées et parthénogénétiques a été intensivement étudiée (Suomalainen 1950, Cuellar 1994, Jordaens, Geenen et al. 2000, Hoy Jensen, Enghoff et al. 2002, Kearney 2003), les études portant sur l’influence des caractéristiques écologiques des habitats d’une même aire géographique sur le mode de reproduction des organismes sont rares (Pongratz, Storhas et al. 2003). 4 Chez les pucerons la répartition des formes sexuées (qui pratiquent la parthénogenèse cyclique) et des formes asexuées (parthénogenèse obligatoire) présente un pattern « inversé » par rapport au schéma le plus répandu de parthénogenèse géographique dans lequel la reproduction asexuée, dans l’hémisphère nord, est principalement rencontrée dans la partie la plus nordique de l’aire de répartition (Rispe, Pierre et al. 1998a). Le maintien du sexe serait principalement lié chez ces insectes au fait que seules les formes sexuées sont capables de produire des œufs lesquels sont plus résistants aux basses températures hivernales et à la dessiccation que les adultes parthénogénétiques (Leather 1992, Hairston, Vanbrunt et al. 1995). Les populations asexuées (et les espèces entièrement asexuées) sont, en conséquence, généralement distribuées, en Europe, au sud et à l’ouest, dans des régions où les conditions climatiques leur permettent de se maintenir sous forme parthénogénétique tout au long de l’année (Fuller, Chavigny et al. 1999, Papura, Simon et al. 2003). Cependant, si à large échelle géographique les modes de reproduction adoptés par les pucerons sont en accord avec l’hypothèse climatique, sur une large portion de leur aire de répartition, les deux stratégies coexistent, pouvant suggérer l’existence d’autres facteurs sélectifs jouant à une échelle spatiale plus réduite, en particulier les caractéristiques locales de leur habitat. Le puceron des épis, Sitobion avenae Fabricius (Homoptera, Aphididae) est un des principaux ravageurs des cultures céréalières en Europe. L’écosystème abritant S. avenae consiste en une mosaïque de zones cultivées et sauvages lui offrant un large panel d’habitats potentiels. Les cultures se présentent comme des habitats simplifiés et soumis à de fréquentes perturbations, au contraire des zones adjacentes semi-naturelles ou sauvages caractérisées par une plus grande biodiversité et une plus grande stabilité. Suivant l’hypothèse de Glesener & Tilman (1978), le compartiment cultivé présentent donc des caractéristiques favorables à la sélection pour la parthénogenèse. Par ailleurs, S. avenae est très polyphage, colonisant aussi bien les Poaceae cultivées que les Poaceae prairiales et adventices. Plusieurs études génétiques ont mis en évidence une spécialisation écologique chez cette espèce (Sunnucks, De Barro et al. 1997, Lushai, Markovitch et al. 2002). Une étude récente (Vialatte, Dedryver et al. in press) complète ces résultats et montre que la structure génétique observée est dépendante de la tribu de l’hôte et de son statut cultivé/non cultivé. Sitobion avenae est donc un candidat idéal pour étudier, à une échelle locale, l’influence des caractéristiques spécifiques des habitats cultivés sur le mode de reproduction pratiqué. Par ailleurs, S. avenae possède un proche parent en sympatrie, S. fragariae, présent sur une gamme d’hôte semblable et qui n’est pas considéré comme une peste majeure en agriculture car il exploite préférentiellement des hôtes sauvages (notamment le Dactyle) (Loxdale et Brookes 1990). D’autre part, son cycle biologique est différent de celui de S. avenae. Ce puceron est hétéroécique, ce qui 5 signifie qu’il possède un hôte particulier, dit hôte d’hiver, sur lequel il réalise la phase sexuée de son cycle tandis que S. avenae, monoécique, réalise les phase sexuée et parthénogénétique de son cycle sur le même type d’hôte. Les croissements entre ces deux espèces sont possibles (Sunnucks, De Barro et al. 1997), essentiellement dans le sens mâle avenae * femelle fragariae (Lilley et Hardie 1996) mais la divergence des cycles biologiques explique pourquoi, in natura, les hybrides entre ces deux espèces sont rares. Les objectifs de cette étude sont donc : i) de comparer le degré d’investissement dans la reproduction sexuée entre ces deux espèces du genre Sitobion qui exploitent dans la même gamme d’hôtes potentiels préférentiellement les hôtes cultivés (S. avenae) ou sauvages (S. fragariae). ii) de vérifier, dans notre échantillon, à partir des données génétiques l’existence d’une spécialisation écologique chez S. avenae. iii) de rechercher s’il existe un lien entre la spécialisation écologique et le mode de reproduction pratiqué chez S. avenae, afin de tester le rôle des caractéristiques écologiques de l’habitat et en particulier son caractère cultivé ou non sur le maintien de la sexualité. iv) de mettre en relation différenciation phénotypique et différenciation génétique dans les populations de Sitobion avenae. Cette analyse a été conduite sur des clones des deux espèces récoltés sur différents hôtes des « habitats » cultivés (céréales) et « sauvages » (Poaceae prairiales et des marges non cultivées) et génotypés au moyen de marqueurs neutres microsatellites. Ces pucerons ont été soumis expérimentalement à des conditions de température et de photopériode induisant la production des formes sexuées et leur réponse a été observée. 6 Matériel & Méthode I Matériel biologique Les pucerons utilisés dans cette étude proviennent de lignées récoltées en mai et juin 2004 dans deux localités du bassin Rennais, le Rheu et Domagné et maintenues depuis lors sous forme clonale. Les individus fondateurs ont été prélevés sur céréales (blé, orge et avoine) et sur Poaceae sauvages (houlque laineuse, pâturin annuel, dactyle, folle avoine et brome mou) puis placés et maintenus en élevage sur plantule de blé Triticum aestivum cv Arminda. Au total, 236 clones biologiques ont été isolés. Il ont été génotypés avec 6 marqueurs microsatellite et un unique représentant de chaque génotype multilocus a été conservé. Parmi les 188 génotypes distincts obtenus l’observation de certains allèles diagnostiques (Sunnucks, De Barro et al. 1997, Figueroa, Simon et al. 1999) et l’étude des caractères morphologiques ont permis d’identifier 18 clones biologiques appartenant au taxon S. Fragariae récoltés sur houlque (14), avoine (3) et dactyle (1). La répartition des 165 clones de S. avenae étudiés en fonction du site de collecte et de la plante hôte sur laquelle ils ont été prélevés ainsi que quelques caractéristiques écologiques de celle-ci est présentées dans le tableau 1. A ces 165 clones il faut ajouter un clone que l’on peut qualifier de « généraliste » car il a été récolté 7 fois, sur 5 plantes hôtes différentes (houlque, dactyle, folle avoine, blé et avoine) et dans les deux localités d’échantillonnage. Tableau 1 : Répartition des pucerons étudiés par hôte et principales caractéristiques écologiques de celui-ci. Plante hôte Compartiment Cultivé Tribu Triticae Avenae Sauvage / Adventice Espèce Cycle Blé Orge Avoine Folle avoine Brome Dactyle Houlque Pâturin annuelle annuelle annuelle annuelle annuelle pérenne pérenne mixte Avena Bromae Poae Echantillonnage 7 Localité TOTAL Domagné Le Rheu Espèce Tribu Comp 22 18 40 61 73 12 9 21 0 12 12 64 26 26 52 6 0 6 6 92 3 19 22 34 1 1 2 0 10 10 70 95 165 II Caractérisation phénotypique 1) Couleur S. avenae présente un polymorphisme de couleur dont le déterminisme est au moins pour partie génétique. Dedryver et al. (1994) distinguent 4 types colorés, deux types clairs (vert clair et clairorangé) et deux types foncés (vert foncé et brun). Les différences entre les clones vert clair et clairorangé et entre les clones brun et vert foncé coté étant peu évidentes seules deux catégories (clair et foncé) ont été conservées pour les analyses. La coloration a été relevée pour chacun des 166 clones à 20°C – 16 heures d’éclairement journalier à 4 reprises : deux fois dans les trois jours suivant l’installation sur une nouvelle plantule et deux autres fois une dizaine de jours après le changement de plantule. Leur couleur a enfin été confirmée au cours de l’expérimentation d’induction de formes sexuées (13°C – 10 heures de photophase). 2) Réponse aux conditions d’induction des formes sexuées S. avenae présente quatre modalités de réponse aux conditions de température et de photopériode favorables à la production des formes sexuées (Dedryver, Le Gallic et al. 1998). Les clones holocycliques présentent un basculement complet vers le mode de reproduction sexué. Dans des conditions d’induction ils produisent uniquement des formes sexuées et des deux sexes (mâles et surtout femelles). A l’inverse, ceux pratiquant exclusivement la parthénogenèse et ne formant aucun sexués sont appelés anholocycliques. Chez les clones qualifiés d’androcycliques, on observe en plus des formes parthénogénétiques, la production de quelques mâles. Enfin, les clones dits intermédiaires produisent simultanément des formes sexuées, mâles et femelles, et des formes parthénogénétiques Pour chaque lignée, sept nymphes (futurs ailées) de quatrième stade larvaire ont été prélevées au sein de l’élevage et isolées sur trois plantules distinctes, afin de réaliser trois répétitions (2 nymphes pour chaque répétition). Puis elles ont été placées en enceintes climatisées à température constante (13°C) avec une photophase de 10 heures d’éclairement journalier (de 8h à 18 h). Les plantules de blé étaient changées régulièrement (dans un premier temps après 25 jours puis tous les 15 jours) et, pour supporter la croissance des populations celles-ci ont été installées sur deux plantules lors de l’avant dernier changement puis sur trois si nécessaire au dernier changement. Durant la première moitié de l’expérimentation des notations qualitatives ont été réalisées tous les 15 à 20 jours. Trois comptages précis ont ensuite été effectués à 20 jours d’intervalle 2 mois après 8 le début de l’expérimentation. Au Vivipare ailée cours Nymphe 4ème stade de ces dénombrés les comptages larves, étaient nymphes, adultes aptères et ailés asexués et les différentes formes sexuées. Andropare La séquence de production des morphes sexués chez S. avenae est présentée dans la figure 1. Les Virginipare femelles andropares qui contiennent des embryons mâles de coloration Oeuf transparence Mâle orangée sont visibles par facilement reconnaissables de même que les Ovipare larves mâles de couleur orange vif à Figure 1 : séquence théorique d’induction. rouge. Au stade adulte ailé, les mâles se distinguent par une morphologie générale plus effilée et une coloration tégumentaire thoracique accentuée et par la présence de leur organe reproducteur à la base de la face ventrale de l’abdomen. Les femelles ovipares présentent un abdomen renflé et luisant et des rhinaries (qui leur permettent d’excréter leurs phéromones sexuelles) sur les tibias leur donnant également un aspect renflé. III Analyse des données 1) Traitement statistique des données phénotypiques Indépendance entre les caractères phénotypiques Des tests du Khi² a été réalisés pour tester l’indépendance entre les caractères phénotypiques qualitatifs (types de plante hôte, mode de reproduction et couleur) pris deux à deux dans des tableaux de contingence. Pour des raisons de validité statistique (liées à la taille de nos effectifs), une correction de Yates a été appliquée sur certains tests. Analyse des proportions des différentes formes dans la descendance Le modèle linéaire généralisé a été utilisé pour analyser la proportion d’ailés produits parmi l’ensemble des d’adultes parthénogénétiques (ailés + aptères) et les proportions de mâles et d’ovipare dans la descendance des clones. Les analyses ont porté sur : (1) la proportion d’ailés 9 mesurée lors du premier comptage avant l’apparition des formes sexuées, (2) la proportion d’ovipares mesurée lors du troisième comptage alors que les clones peuvent être considérés comme complètement induits et (3) la proportion de mâles observée lors des deuxième et troisième comptage, du fait de leur apparition précoce dans la descendance et de leur faible durée de vie. Les analyses ont été réalisées avec le logiciel « R », sous l’hypothèse d’une distribution binomiale des données et avec la fonction de lien canonique logit. 2) Analyses génétiques Des réserves peuvent être émises sur l’utilisation des outils classiques d’analyse en génétique des populations pour étudier une espèce en partie clonale. En effet, l’amplification clonale de certains génotypes peut biaiser l’interprétation des données génétiques (Sunnucks, DeBarro et al. 1997; Simon, Carre et al. 2003). Dans le cas des pucerons, la situation est encore plus complexe puisqu’il y a potentiellement au sein de la même population un mélange d’individus réalisant une parthénogenèse cyclique (avec une phase sexuée) et d’individus réalisant une parthénogenèse obligatoire (sans sexualité). Les travaux théoriques n’ont jusqu‘à présent pas permis de trouver des solutions adaptées à cette situation. Cependant, les outils classiques de génétique des populations sont néanmoins couramment utilisés dans les études réalisées sur les pucerons. De plus, il a été démontré récemment par simulation que les F-Statistiques, étaient très peu sensibles au taux de clonalité (Balloux, Lehmann et al. 2003). Seules des valeurs de taux de clonalité proche de 1 provoquent une modification significative de la valeur des F-Statistiques. Dans les analyses, les « populations » ont été définies suivant différents critères : i) par la plante hôte (espèce, tribu ou compartiment sauvage ou cultivé), ii) par le mode de reproduction, en réunissant toutes les pucerons partageant le même mode de reproduction. et iii) par la couleur (claire ou foncée). Pour certaines analyses 2 de ces critères ont été combinés pour définir les populations. Analyse des correspondances multiples (ACM) Cette analyse permet de superposer les données génétiques (variables actives) avec les données phénotypiques (variables illustratives) afin d’explorer comment ces dernières s’organisent par rapport à la structure génétique. Les ACM ont été réalisées au moyen du logiciel SPAD (ver. 5.5). 10 Déséquilibres de liaison entre les locus Les locus sont dits en équilibre de liaison s’il y a indépendance statistique entre les allèles présents à chaque locus étudié, c' est-à-dire que le génotype à un locus ne dépend pas des génotypes aux autres locus. Dans le cas des pucerons, des déséquilibres de liaison nombreux peuvent être le reflet d’une absence de recombinaisons entre les locus due à la disparition totale ou partielle de la sexualité. Le déséquilibre de liaison est testé sur la base des tableaux de contingence pour chaque paire de locus dans chaque population. L’indépendance statistique des locus a été testée au moyen d’un test exact de Fisher proposé par le logiciel GENPOP (Ver. 3.3) (Raymond and Rousset 1995). Etant donné qu’un grand nombre de tests statistiques sont réalisés sur le même jeu de données, le risque qu’un résultat significatif soit le fait du hasard est amplifié. Il est donc nécessaire d’appliquer la correction pour les tests multiples de Bonferroni, en divisant le seuil de significativité de 5% par le nombre de tests réalisés. Conformité à la loi d’Hardy Weinberg L’écart à l’équilibre de Hardy-Weinberg a été analysé avec le logiciel GENPOP (ver. 3.3) pour chaque locus puis sur l’ensemble des locus dans chaque population au moyen d’un test exact (Sokal et Rohlf 1995). D’autre part, une estimation du Fis (Weir et Cockerham 1984) est calculé pour quantifier l’écart à cet équilibre. Le score test (U test) (Rousset et Raymond 1995) a été utilisé pour tester l’existence d’un excès ou d’un déficit significatif en hétérozygotes. Différenciation entre populations La différenciation entre paires de population a été testée par une méthode basée sur des permutations proposée par le logiciel F-Stat (Goudet 2001). Un seuil de significativité à 5% a été retenu après une correction de Bonferroni. Les valeurs de Fst entre les paires de populations permet de quantifier cette différenciation. Analyse de la variance moléculaire Cette analyse permet d’évaluer la contribution relative des différents facteurs étudiés dans la variance génétique totale. L’analyse de la variance moléculaire calculée par le logiciel ARLEQUIN (ver. 2.0) (Schneider, Roessli et al. 2000) est essentiellement basée sur l’analyse de la variance des fréquences géniques mais au contraire des autres types d’AMOVA, celle-ci tient compte du nombre de mutations entre 11 les différents haplotypes (Excoffier, Smouse et al. 1992). Une analyse hiérarchique de la variance partitionne la variance totale en contributions dues aux différences intra individu, inter individus et/ou inter populations. La significativité est testée avec une approche par permutations (Excoffier, Smouse et al. 1992) des haplotypes entre les individus, les populations ou les groupes de population. Arbres sur individus et sur populations Les arbres sur population et sur individus ont été construit avec le logiciel « population » en utilisant la distance des allèles partagés (DAS) (Chakraborty and Jin 1993) et selon l’algorithme du Neighbour-Joining. 12 Résultats I Caractérisation biologique et génétique des clones de S. fragariae Les 18 clones de S. fragariae de notre échantillon présentaient tous une couleur « brun clair » différente des colorations observées chez S. avenae. En réponse aux conditions d’induction, l’ensemble des clones se sont éteints après avoir produit quelques individus sexués qui n’ont pu se maintenir du fait de l’absence de leur hôte primaire. Tous les clones de S. fragariae de notre échantillon ont donc pu être caractérisés comme holocycliques. Les analyses génétiques ont montré que l’ensemble des clones S. fragariare formaient un cluster bien différencié des S. avenae et possédaient les allèles diagnostiques de cette espèce. Ces résultats suggèrent l’absence d’hybrides entre les deux espèces dans notre échantillon et justifient son utilisation comme out-group pour l’enracinement des arbres réalisés sur les données génétiques obtenues pour les clones de S. avenae. Néanmoins nous avons pu vérifier la possibilité théorique d’hybridation en réalisant des croisements qui ont produit des œufs fécondés confirmant ainsi la proximité de ces deux espèces. II Analyse génétique et phénotypique des clones de S. avenae 1) Structuration génétique par la plante hôte chez S. avenae Il n’y a pas d’effet localité significatif sur la structure génétique des populations. Une AMOVA hiérarchisée sur les facteurs localité et plante hôte montre en effet que seul le facteur plante hôte structure significativement notre jeu de données. Les populations de S. avenae échantillonnées présentent une structuration génétique qualitativement comparable à celle mise en évidence par Vialatte et al. (in press) (tableau 2). Les populations provenant des Triticeae cultivées (orge et blé) sont faiblement différenciées alors que celles provenant des Poeae sauvages se différencient entre elles et d’avec les populations provenant d’hôtes appartenant aux autres tribus. Les populations issues des Aveneae occupent une position intermédiaire, peu différenciée des populations issues des Triticeae pour la folle avoine, plus fortement différenciée pour l’avoine. 13 Tableau 2 : Différenciation génétique entre populations échantillonnées sur différents hôtes. Orge Orge Blé Avoine Folle avoine Brome Dactyle Pâturin NS NS NS NS * * * * * * * NS * * * NS * * NS * Blé 0.003 Avoine 0.05 0.05 Folle avoine 0.007 0.006 0.03 Brome 0.02 0.05 0.06 0.02 Dactyle 0.04 0.06 0.09 0.04 0.03 Pâturin 0.19 0.20 0.20 0.20 0.18 * 0.16 La différenciation génétique entre compartiment sauvage (folle avoine, brome, dactyle, pâturin) et cultivé (blé, orge, avoine), bien que significative, est faible (Fst=0.012**) toutefois, si on élimine les pucerons récoltés sur folle avoine elle devient plus importante (Fst=0.05**). Entre tribu, c’est la tribu des Poae qui se différencie le plus (Fst=0.06* avec Avenae et Fst=0.06* avec Triticae). 2) Etude des caractères phénotypiques Polymorphisme de couleur Le tableau 3 présente les nombres et proportions respectives des deux types colorés en fonction de la plante hôte d’origine. Dans l’ensemble de l’échantillon, on observe une prédominance du type clair sur le type foncé (87 p. 100). Tableau 3 : répartition des types colorés par plante hôte Plate hôte Blé Orge Avoine Folle avoine Brome Dactyle Houlque Pâturin TOTAL Foncé Effectif 1 2 1 2 0 5 1 10 22 Clair % 2.5 9.5 8.3 3.8 0 22.7 50 100 13 Effectif 39 19 11 50 6 17 1 0 143 % 97.5 90.5 91.7 96.2 100 77.3 50 0 87 Clone clair Clone foncé Les types colorés ne sont pas distribués aléatoirement sur les différents hôtes échantillonnés. La couleur dépend significativement de la tribu d’origine (la tribu des Bromeae n’étant pas incluse dans l’analyse) (df=2, Chi²=41.7 P<0.0001) et du caractère sauvage/cultivé de la plante hôte (df=1, Chi²=6.84, P<0.0001). Les clones foncés sont principalement présents sur des hôtes sauvages 14 (18/22) et 16 des 22 clones foncés ont été échantillonnés sur des hôtes appartenants à la tribu des Poeae. Près de 95 % des pucerons récoltés sur des hôtes cultivés sont clairs. Polymorphisme du mode de reproduction 20 clones n’ont produits aucun morphes sexués et peuvent être qualifiés d’anholocycliques. Pour 6 clones, lors de la dernière notation, les morphes sexués représentaient plus de 90% des individus (essentiellement des femelles). Ce sont des clones holocycliques. Pour 99 clones, désignés comme androcycliques, nous avons observé la présence de mâles sans aucune femelle ovipare. Ces derniers ne disposent pas des même capacités à produire des mâles. Ainsi, nous avons relevé chez certains la présence d’un seul mâle alors que pour d’autres nous en avons recensé plus d’une Figure 2 : Histogramme des classe d'abondance de mâles 16 nbr 12 de 10 clones 8 6 vingtaine (figure 2). 4 Dix sept clones, pour lesquels 0 nous avons détecté au moins une Clones androcycliques 14 2 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 nombre de mâles femelle ovipare sur l’ensemble des 3 répétitions ont été classés intermédiaires. Pour 9 d’entre eux nous avons trouvé que le nombre moyen d’ovipare par répétition était inférieur à 1 et pour les 8 autres ce chiffre variait de 2 à 12. Chez 11 de ces 17 clones nous avons trouvé des œufs pondus. Nous avons détecté la présence de femelles dites « atypiques ». Elles ont l’abdomen renflé, une couleur plus foncée que celle des virginopares mais ne possèdent pas les rhinaries des ovipares. Lorsqu’on les dissèque, on retrouve parfois des œufs, parfois des larves. Les « atypiques » contenant des œufs ont été notées comme « ovipares atypiques » et le clone correspondant comme intermédiaire. C’est le cas chez 24 clones. qui n’ont produit que des ovipares « atypiques ». Nous n’avons décelé la présence d’œufs pondus que pour 8 de ces clones en dépit de la présence de mâles. En se basant sur la présence/absence des différents morphes sexués, l’ensemble des clones ont pu être rangés parmi les 4 catégories définies par Dedryver et al. (1998) (tableau 4). Dans l’ensemble de l’échantillon traité, l’androcyclie est prédominante (59 p. 100). Seuls six clones sont holocycliques. 15 Plante hôte Blé Orge Avoine Folle avoine Brome Dactyle Houlque Paturin TOTAL Holocyclique Intermédiaire Effectif 1 0 1 0 0 3 0 1 6 Effectif 6 4 2 15 4 3 1 6 41 % 2.5 0 8.3 0 0 13.6 0 10 4 Anholocyclique Effectif 2 2 0 6 0 6 1 3 20 % 15 19.0 16.7 28.8 66.7 13.6 50 60 25 % 5 9.5 0 11.5 0 27.3 50 30 12 Tableau 4 : répartition des modes de reproduction par plante hôte. Androcyclique Effectif 31 15 9 31 2 10 0 0 98 % 77.5 71.4 75 59.6 33.3 45.5 0 0 59 La proportion de clones holocycliques ou intermédiaires est plus importante dans les deux tribus « sauvages » : Bromeae et Poeae. Un test du Khi² montre que le mode de reproduction pratiqué n’est pas indépendant du compartiment de la plante hôte (df=3, Chi²=14.8, P<0.01) ni de sa tribu (df=5, Chi²=26,2, P<0.0001). Tandis qu’un puceron holocyclique a un cycle que l’on peut qualifier de sexué (son génotype disparaît à chaque cycle annuel du fait de la recombinaison génétique lors de la phase de reproduction sexuée) un puceron androcyclique est fonctionnellement asexué puisque le génotype qu’il porte (sauf mutation) est conservé entre deux cycles annuels. Dans la suite, sont qualifiés de sexués les 6 clones holocycliques et les clones intermédiaires ayant produit soit des ovipares vraies soit des ovipares atypiques capables de pondre des œufs (n=31) et d’asexués les androcycliques, les anholocycliques et les « intermédiaires » n’ayant produit ni ovipares vraies ni ovipares atypiques capables de pondre (n=135). La proportion de clones sexués est plus importante dans les tribu « sauvages » (figure 3). % 40 35 Figure 3 : Proportion de clones sexués dans chaque tribu 30 25 20 15 10 5 Triticeae Aveneae Bromeae 16 Poeae Relations entre traits phénotypiques Figure 4 : Histogrammes de classe160 d'abondance d'ovipares 140 10 9 nbr 120 de clone Clones foncés 8 Clones clairs Triticeae 100 7 Avoine Folle avoine 80 6 5 Intermédiaires 4 Holocycliques Poeae 60 Bromeae 40 3 2 Intermédiaires 20 1 0 1 2 3-4 5-8 9-16 17-32 33-64 65-128 0 1 2 3-4 5-8 9-16 32 La figure 4 montrent que les ovipares ont été presque exclusivement produites par les clones foncés et qu’il existe un lien très net entre la tribu, son caractère sauvage ou cultivé et la couleur du clone. La majorité des clones clairs sont issus des tribus cultivées. Le tableau 5 présente la répartition des types de cycle reproductifs en fonction de la couleur du clone. Tous les clones holocycliques sont foncés et tous les clones androcycliques sont clairs. Sur les 30 clones clairs classés intermédiaires 24 n’ont produit que des ovipares « atypiques ». Tableau 5 : relation couleur - type de cycle de reproduction Holocyclique Intermédiaire Effectif % Effectif % Effectif % Effectif % Foncé 6 27.3 11 50 5 22.7 0 0 Clair 0 0 30 20.8 15 10.4 99 68.8 Couleur Anholocyclique Androcyclique Ces deux caractères ne sont pas indépendants (df=3, Chi²=57.2, P<0.0001). Analyse de la proportion de femelles ovipares dans la descendance La proportion d’ovipares produites dans la descendance est significativement liée au compartiment de l’hôte (ddl= 1,Chi²=232.4, P<0.0001) et à la plante hôte dans le compartiment (ddl=7, 17 64 128 Chi²=1036.5, P=0). Les pucerons du compartiment sauvage produisent significativement plus d’ovipares que les pucerons du compartiment cultivé. Analyse de la proportion de mâles dans la descendance La production de mâles est significativement liée au compartiment de l’hôte (ddl= 1,Chi²=29.01 P<0.0001) et à la plante hôte dans le compartiment (ddl= 7,Chi²=129.63, P<0.0001). Les pucerons du compartiment sauvage produisent significativement moins de mâles que les pucerons du compartiment cultivé. Etude de la production des formes de dispersion Lors de la première notation, deux mois après le début de l’induction et avant l’émergence de morphes sexués dans les colonies, les pucerons foncés avaient produit significativement moins d’ailés que les pucerons clairs (ddl=1, Chi²=357.85, P<0.0001). On retrouve cette différence dans les notations suivantes mais elle pourrait être biaisée par le fait que la descendance des pucerons comportait des morphes sexués. III Relations phénotypes - génotypes 1) Représentation globale par analyse des correspondances multiples (figures 2 et 3) Nous avons choisis de projeter les individus et les variables illustratives en fonction de l’axe 1 (qui porte 10,22 % de l’inertie totale) et de l’axe 5 (5.08 % de l’inertie totale contre 7.03% pour l’axe 2). Les pucerons sont avant tout structurés par leur couleur (variable qui est très bien représentée par l’axe 1). Les variables illustratives forment deux groupes bien séparés. Dans le premier groupe on retrouve la tribu des Poae, le phénotype sexué et la couleur foncé. Dans le deuxième groupe on trouve les tribus Avenae et Triticeae, le mode de reproduction asexué et la couleur claire. L’axe 5 permet d’isoler la tribu des Bromae qui n’est représentée toutefois que par 6 individus. 18 Clairs Foncés Holocyclique Intermédiaire Anholocyclique Intermédiaire atypique (néo-andropare) Andropare Figure 5 : Positionnement des individus par mode de reproduction sur les axes de l’ACM Bromae Poeae Sexué Sauvage Foncé Aveneae Clair Asexué Cultivé Triticeae Figure 6: Positionnement des variables illustratives sur les axes de l’ACM 19 2) Caractérisation génétique en relation avec les traits phénotypiques Diversité génétique Parmi les 166 clones de S. avenae étudiés nous avons identifié 67 allèles au total, soit respectivement 6, 13, 4, 8, 12 et 24 allèles pour les locus Sm17, Sm10, S5L, S4s, S17B et S16B et en moyenne un peu plus de 11 allèles par locus. Trois des allèles du locus S17B sont caractéristiques des pucerons foncés (les allèles 210, 212 et 214). Ils sont présents dans ce groupe de pucerons en 41 exemplaires sur 44 possibles. D’autre part, trois allèles sont très fréquents chez les pucerons clairs : 202 et 204 et surtout 195 présent chez près de 90% des pucerons clairs. Enfin, 39 clones clairs possèdent un allèle typique des pucerons foncés à l’état hétérozygote et seulement 3 individus clairs portent deux allèles « foncés ». Déséquilibres de liaisons L’analyse réalisée pour chacune des 15 paires de locus sur l’ensemble du jeu de données montre qu’il y a 11 paires significativement en déséquilibre de liaison. Lorsque les pucerons sont regroupés par couleur, 8 paires de locus sont significativement en déséquilibre dans la population « Claire » et 1 seule dans la population « Foncée ». Lorsqu’on les regroupe par mode de reproduction (sexué vs asexué) 8 paires de locus sont significativement en déséquilibre dans la population « Asexuée » et 2 dans la population « Sexuée ». Hétérozygotie et indice de fixation L’échantillon présente un excès significatif en hétérozygote si l’on considère l’ensemble des populations et l’ensemble des locus (Fis = -0.073, P-value < 0.01). L’hétérozygotie moyenne observée sur l’ensemble des locus, Ho, est de 0.7326 pour une hétérozygotie attendue, He, de 0.683. Un fort excès en hétérozygotes est observé au sein de la population « Claire » (Fis = -0.1359, Ho = 0.746, He = 0.657). Au contraire, L’hétérozygotie observée et l’hétérozygotie attendue ne sont pas significativement différentes dans la population « Foncée » (Ho = 0.644 et He = 0.642). Lorsque l’on regroupe les pucerons par mode de reproduction (sexué vs asexué), la population « sexué » ne présente pas de différence significative entre hétérozygotie observée et hétérozygotie attendue (Ho=0.69 et He=0.70) tandis qu’il y a un excès significatif en hétérozygotes dans la population « asexué » (Ho=0.74 et He=0.67). Différenciation génétique La différenciation entre les 2 types colorés est élevée (Fst = 0.1558**). 20 Si l’on ne considère que le mode de reproduction, la différenciation la plus forte est celle observée entre les holocycliques et les andropares (Fst=0.127*). Si on couple avec la couleur (tableau 6) les Fst entre mode de reproduction ne sont plus significatifs et de faible valeur lorsqu’il s’agit de populations de la même couleur. Entre couleurs différentes les Fst sont élevés. Anholo/Clair Anholo/Clair Inter/Clair Inter/Clair Andro Anholo/Sombre Holo Inter/Sombre NS NS NS * * NS * * * * * NS * NS NS 0.0015 Andro Anholo/Sombre Holo 0.0063 0.0064 0.1752 0.0564 0.216 0.115 0.2089 0.127 0.0728 Inter/Sombre 0.151 0.1951 0.1882 0.0377 0.0855 Tableau 6 : différenciation génétique entre couples mode de reproduction - couleur. 3) Arbres sur populations et sur individus L’arbre sur populations présenté ci-dessous a été réalisé avec des populations caractérisées par la couleur et le clair 6 Holocyclique Anholocyclique mode de reproduction. 15 5 11 Ces populations sont d’abord regroupées par la couleur. Intermédiaire Interm 30 L’arbre sur individus est présenté en annexe. Le groupe Andropare 99 de pucerons foncés est monophylétique PHYLIP_1 Sitobion fragariae POP 3 holocyclique foncé POP 4 75 Anholocyclique foncé POP 2 Foncés 100 Intermédiaire foncé POP 6 Anholocyclique clair POP 1 75 Androcyclique clair POP 7 Clairs 100 Intermédiaire clair POP 5 0.1 Distance DAS, Alg: NJ 21 fonc foncé Discussion Variabilité de l’investissement dans la sexualité dans le genre Sitobion Bien que l’existence de clones asexués ait été mise en évidence au sein de l’espèce S. fragariae (Figueroa, Simon et al. 1999), tous les clones de notre échantillon ont présenté une réponse identique à l’induction de formes sexuées et ont pu être caractérisé comme étant holocyclique. Au contraire, une large majorité des clones de S. avenae placés en conditions d’induction ont montré un investissement réduit dans la voie de reproduction sexuée et l’androcyclie s’est révélée le mode de reproduction dominant. Ce résultat est en accord avec l’hypothèse ayant guidé ce travail. En effet, l’exploitation préférentielle par S. avenae du compartiment cultivé caractérisé par une forte instabilité de l’habitat et une simplification des interactions biotiques se trouve associée à une prédominance de la reproduction asexuée. Au contraire, S. fragariae qui exploite un environnement plus complexe et diversifié et dont la stabilité temporelle est plus grande semble privilégier le passage régulier par une phase sexuée. Ce résultat est cohérent avec l’hypothèse de Glesener et Tilman (1978) qui suggère que l’imprévisibilité environnementale et la réduction des interactions biotiques sont les principaux facteurs favorisant la sélection de la parthénogenèse. Spécialisation écologique chez Sitobion avenae L’analyse génétique confirme l’existence d’une spécialisation écologique en rapport avec l’espèce hôte et son caractère sauvage ou cultivé chez S. avenae (Vialatte, Dedryver et al. in press). Les pucerons prélevés sur les hôtes sauvages présentent les plus forts niveaux de différenciation (entre eux et encore plus avec les hôtes cultivés) alors que les pucerons prélevés sur les hôtes cultivés s’avèrent très peu différenciés. Vialatte (in press) suggère que les plantes de la tribu des Aveneae joue un rôle d’hôte relais entre les pucerons spécialisés sur des hôtes sauvages et les pucerons exploitant les hôtes cultivés. La faible différenciation observée dans notre échantillon entre les populations récoltées sur folle avoine et celles trouvées sur orge et blé confirme l’existence d’un flux entre les Avenae sauvages et les Poaceae cultivées. C’est pourquoi, lorsque l’on regroupe les hôtes par compartiment, la différenciation génétique entre sauvage et cultivé, bien que significative, est faible. En effet, une partie importante de l’échantillonnage sur hôtes sauvages est composé de pucerons récoltés sur folle avoine. Ainsi, si on élimine cet hôte la différenciation entre sauvage et cultivé devient nettement plus importante (Fst=0.05*). Entre tribu, les résultats sont plus nets : la tribu des Poeae se différencie nettement (Fst=0.06* avec Aveneae et Fst=0.06* avec Triticeae) alors 22 que les deux tribus « cultivées » sont faiblement différenciées (Fst=0.009*). Il existe évidement un effet confondant entre compartiment et tribu, la tribu des Triticeae étant entièrement composée dans cet échantillonnage d’hôtes cultivés et la tribu des Poeae d’hôtes sauvages. Seule la tribu des Aveneae est composée d’un hôte cultivé (avoine) et d’un hôte sauvage (folle avoine). D’autre part, toutes ces plantes hôtes sont annuelles exceptés le dactyle et la houlque, et dans une moindre mesure le pâturin appartenant tous trois à la tribu des Poeae. L’absence d’effet localité sur la structure génétique des populations confirme que les capacités de dispersion des pucerons sont très importantes et bien supérieures à l’échelle, locale, de cette étude (Loxdale, Hardie et al. 1993, Llewellyn, Loxdale et al. 2003). Distribution des modes de reproduction au sein de l’espèce S. avenae. L’induction de formes sexuées nous a permis de mettre en évidence une relation entre le mode de reproduction pratiqué et les caractéristiques écologiques de l’hôte sur lequel les clones de Sitobion avenae ont été prélevés. La réponse de nos pucerons à l’induction de formes sexuées est sensiblement différente de celle obtenue lors d’études antérieures menées sur des pucerons de la même zone géographique (Simon, Baumann et al. 1999, Dedryver, Hulle et al. 2001). Une large majorité de clone se sont révélés androcycliques et une faible proportion holocycliques alors que dans ces travaux précédents le mode de reproduction intermédiaire était dominant et les clones holocycliques plus fréquents. La comparaisons entre ces résultats suggère une forte variabilité interannuelle et pourrait traduire un changement du mode de reproduction lié à la répétition d’années chaudes telles qu’elles ont pu être observées dans la dernière décennie. En dépit du faible niveau d’investissement global dans la reproduction sexuée, les résultats sont, à l’échelle infraspécifique chez S. avenae, à nouveau en accord avec l’hypothèse d’un plus grand succès de la reproduction asexuée dans le compartiment cultivé. Polymorphisme de couleur et mode de reproduction Les résultats obtenus dans cette étude confirme ceux obtenus par Dedryver et al. (2001) d’une association entre polymorphisme de couleur chez S. avenae et mode de reproduction. On peut s’interroger sur le caractère fortuit ou non de cette association. La couleur joue un rôle important dans la thermorégulation des organismes poïkilothermes. Les pucerons clairs pourraient être mieux adaptés aux températures chaudes et inversement les pucerons foncés seraient plus adaptés aux températures plus froides (Dixon 1972 dans Dedryver, Hulle et al. 2001). Cette hypothèse semble vérifiée lorsque l’on considère les variations du climat et des modes 23 de reproduction pratiqués à une large échelle géographique. Cependant, à l’échelle locale on pourrait s’attendre à ce que les pucerons asexués, qui passent l’hiver sous forme parthénogénétique, soient foncés afin de résister plus efficacement au froid hivernal. Une hypothèse alternative a été proposée pour le maintien d’un polymorphisme de couleur chez l’espèce Acyrtosiphon pisum, comme une réponse adaptative à des patterns différents de parasitisme et de prédation (Losely, Ives et al. 1997). Chez S. avenae certaines études montrent que les clones de couleur foncée tendent à être moins parasités par l’hyménoptère parasitoïde Aphidius ropalosiphi que les clones clairs (Ankersmit, Bell et al. 1986, Le Ralec comm. pers). Les meilleures performances des pucerons foncés peuvent être mises en relation avec leur mode de reproduction plutôt sexué. Cette observation pourrait signifier que les clones clairs asexués sont moins soumis à la pression de leurs ennemis naturels en cohérence avec l’hypothèse selon laquelle l’avantage du mode de reproduction asexué dans le compartiment cultivé est la conséquence d’une course coévolutive moins intense. Investissement dans les phénotypes disperseurs. Parmi les morphes parthénogénétiques, les pucerons clairs produisent significativement plus d’ailés que les pucerons foncés et ce, dès le début de l’induction, avant l’apparition des morphes sexués. Il y a donc une différence d’investissement dans la production d’ailés entre les clones foncés et les clones clairs. Les clones clairs, généralistes sur les cultures, ont des capacités de dispersion supérieures leur permettant de coloniser plus efficacement la mosaïque spatio-temporelle d’habitats que constituent les écosystèmes cultivés. Ils peuvent ainsi anticiper l’instabilité de leur habitat (Kennedy et Storer 2000). Au contraire, dans ces mêmes conditions les pucerons foncés ne produisent que très peu de morphes ailés probablement parce qu’ils sont spécialisés sur leur hôte, que celui-ci est souvent pérenne (c’est le cas de la houlque, du dactyle et dans une moindre mesure du Pâturin) et qu’ils y réalisent à la fois leur phase de multiplication parthénogénétique et leur phase de reproduction sexuée (S. avenae est monoécique et ne change donc pas d’hôte pour effectuer sa phase sexuée). Relation entre différenciation génétique et phénotypique. La différenciation phénotypiques observée chez S. avenae est en accord avec la structuration génétique obtenue à l’aide des marqueurs microsatellites. Deux clusters génétiques se dégagent : le premier regroupe tous les clones foncés et le second les clones clairs. C’est donc la couleur qui est le premier facteur de structuration génétique. 24 En résumé, on peut donc distinguer deux groupes correspondants à deux stratégies d’histoire de vie différentes : 1) couleur foncée - spécialisation sur des hôtes sauvages – mode de reproduction sexué (CSS) et 2) couleur claire - généralisme sur des hôtes cultivés - mode de reproduction parthénogénétique (CCP). Les pucerons du premier groupe ont été principalement prélevés sur des hôtes sauvages, particulièrement les hôtes de la famille des Poeae. On retrouve dans ce cluster les 6 clones holocycliques. Les clones intermédiaires de ce groupe ont tous produits de vraies ovipares. Par ailleurs, les données génétiques sur ce cluster sont caractéristiques d’une population sexuée : une seule paire de locus est en déséquilibre de liaison dans cette population qui, sur l’ensemble des locus, n’est significativement pas en déséquilibre par rapport aux proportions de Hardy-Weinberg. Cela nous indique qu’il y a dans cette population des événements de recombinaison génétique or ces recombinaisons ne peuvent pas avoir lieu lors de la reproduction parthénogénétique apomictique (Sunnucks, De Barro et al. 1997) et sont donc le fruit de la reproduction sexuée. Dans le deuxième cluster se placent la totalité des clones androcycliques. Ces pucerons proviennent majoritairement d’hôtes cultivés, i.e., issus des familles Triticeae et Aveneae. Peu de pucerons clairs ont formé de vraies femelles ovipares lors de l’induction (sur l’ensemble des 3 répétitions 5 clones en ont produit une seule et un clone en a produit 2). 24 d’entre eux ont produit uniquement des ovipares atypiques. Ces femelles semblent être plus la trace d’une sexualité passée que de vraies femelles sexuées fonctionnelles. En effet seulement 8 de ces 24 ovipares atypiques ont été capables de pondre alors qu’elles étaient toutes en présence de mâles. Par ailleurs, les données génétiques sur ce groupe sont typiquement celles d’une population asexuée (nombreux déséquilibres de liaison entre les paires de locus, fort excès en hétérozygotes). Cette situation « génétique » traduit en fait la faible fréquence des événements de recombinaison (qui ont lieu lors de la reproduction sexuée)(Delmotte, Leterme et al. 2002, Papura, Simon et al. 2003). L’excès en hétérozygotes est la conséquence de l’accumulation de mutations dans le génome de ces clones asexués qui peu à peu deviennent hétérozygotes à tous les locus (Halkett, Simon et al. 2005). Echanges génétiques entre ces deux groupes. Le locus S17B est fortement lié au caractère couleur. En effet, les populations « claire» et « foncée » possèdent deux lots d’allèles différents. Il est intéressant de noter que certains individus de la population « claire », hétérozygotes à ce locus portent un allèle typique de la population « foncée » et un allèle typique de la population « claire ». Ces hétérozygotes pourraient correspondre à des hybrides provenant de la fécondation de femelles des clones sexués foncés par des mâles des clones clairs androcycliques. La totalité de ces hybrides sont clairs et ils sont en 25 grande majorité androcycliques. Ce phénomène de parthénogenèse contagieuse dans lequel l’hybridation entre les sexués et les mâles produits par les lignées asexuées conduit à la création de nouvelles lignées asexuées est connu chez différentes espèces (Lynch 1984, Delmotte, Leterme et al. 2001, Simon, Delmotte et al. 2003). Les mâles des clones androcycliques participeraient donc activement à la reproduction sexuée et la population de clones foncés sexués inféodés au compartiment sauvage pourrait donc servir de réservoir de diversité génétique susceptible de permettre un renouvellement de la population de clones clairs asexués. Les lignées parthénogénétiques sont à long terme condamnées à disparaître bien que certaines études montrent que des taxons asexués anciens peuvent exister (Law et Crespi 2002, Normark, judson et al. 2003). Dans le cas de S. avenae ce renouvellement continu du stock de clones asexués pourrait avoir été sélectionné car il permet le maintien sur le long terme de l’asexualité. Ainsi, des clones généralistes retrouvés en proportions importantes pendant plusieurs années consécutives (Haack, Simon et al. 2000) dans le bassin rennais et au-delà semblent avoir disparu depuis l’hiver 2000 qui fut relativement froid (Dedryver comm. pers). Le fait que la production de mâles par les clones clairs soit significativement supérieure à celle des clones foncés appuie notre hypothèse et suggère une sélection de ce caractère (produire beaucoup de mâles) dans le groupe des pucerons clairs. Hypothèses sur l’émergence d’un tel système chez S. avenae. Sitobion avenae est monoécique sur graminées, il réalise l’ensemble de son cycle sur ces hôtes herbacées. Ce caractère (la monoécie) est dérivé, le caractère ancestral chez les pucerons étant l’hétéroécie (alternance entre des hôtes d’hiver, ligneux et des hôtes d’été, herbacées) (Moran 1992). Ce type de cycle est réalisé par Sitobion fragariae. On peut donc supposer que l’ancêtre commun à ces deux espèces était hétéroécique et qu’elles ont été séparées lorsque des pucerons ont modifié leur cycle en se spécialisant sur les hôtes herbacées. Cela a probablement favorisé cette augmentation de la proportion de lignées asexuées par l’élimination de la contrainte du changement d’hôte en automne pour pouvoir se maintenir pendant la saison défavorable sur un hôte primaire (Morran 1992). Pour valider cette hypothèse il serait intéressant de comparer la capacité de répondre favorablement à l’induction de formes sexuées dans des complexes d’espèces montrant comme fragariae et avenae des différence de cycle biologique (monoécie vs hétéroécie). Ensuite, au sein de S. avenae, nous sommes probablement dans une situation de « cohabitation » entre : i) un groupe « ancestral » principalement sexué mais au sein duquel apparaissent parfois des clones asexués qui se spécialisent sur un hôte particulier ii) un groupe « dérivé » qui aurait shifté en adoptant une stratégie plutôt généraliste liée à une sélection en faveur de l’asexualité, sur un 26 nouveau type d’hôtes et d’habitat : les Poaceae cultivées. L’apparente fréquence des échanges génétiques entre ces deux entités ne permet pas la mise en place de mécanismes d’isolement reproducteur qui sont primordiaux sur la voie de la spéciation écologique (Rundle et Nosil 2005). Schéma général. Cluster FSS Cluster CCP (foncé-sauvage-sexué) (clair-cultivé-parthénogénétique) . Ressource non exploitable à la mauvaise . Ressource présente tout au long de l’année saison. . Habitat instable . Habitat stable au cours du temps . Interactions biotiques ponctuelles et .Interactions biotiques nombreuses et discontinues continues . Produisent beaucoup d’ailés . Produisent peu d’ailés Asexualité favorisée Sexualité favorisée été été Hybrides parthénogénèse automne printemps automne printemps reproduction sexuée hiver plantes hôtes: maïs oeuf hiver Flux de mâles « CCP » repousses de céréales Céréales d’hiver Graminées sauvages 27 Conclusion A notre connaissance cette étude est la première à s’intéresser aux effets de l’anthropisation des écosystèmes sur le mode de reproduction d’une espèce. Chez S. avenae, il semble que l’adaptation à des habitats cultivés s’accompagne d’une différenciation génétique par spécialisation écologique associée à une modification du mode de reproduction. Les analyses montrent en effet l’existence de deux groupes, le premier présentant une coloration Claire, une affinité pour les hôtes Cultivés et une prédominance de la reproduction Parthénogénétique stricte (CCP), le second étant caractérisé par une coloration Foncée, une affinité pour les hôtes « Sauvage » et un recours plus fréquent à la reproduction sexuée (FSS). Par ailleurs, les deux entités génétiques semblent continuer à entretenir des relations génétiques par l’intermédiaire des mâles produits par les clones CCP qui viennent féconder les femelles FSS. Ainsi, les pucerons sexués et spécialisés sur les hôtes sauvages sont en quelque sorte parasités par les pucerons asexués des cultures. Selon un modèle génétique de type source-puits, la population FSS semble continuellement alimenter la diversité génétique de la population CCP grâce au mécanisme de la parthénogenèse contagieuse. Ainsi, si le climat constitue la principale cause du maintien de la reproduction sexuée chez les pucerons (Rispe, Pierre et al. 1998a, Rispe, Pierre et al. 1998b) nos résultats suggèrent que, lorsque les conditions climatiques locales permettent la coexistence de ces différents modes de reproduction, d’autres facteurs sélectifs interviennent. Les caractéristiques écologiques des habitats cultivés favorisent l’adoption du mode de reproduction asexué alors que les propriétés écologiques des habitats naturels permettent le maintien du mode de reproduction sexué. Ce travail constitue une première étape dans l’étude du rôle des caractéristiques de l’habitat sur le mode de reproduction des pucerons et de leurs conséquences sur la structure génétique des populations de ces insectes. Il serait intéressant de répéter une telle démarche expérimentale (avec un échantillonnage plus équilibré entre les compartiments et surtout les tribu) dans des régions aux caractéristiques climatiques et/ou paysagères différentes de celles de la Bretagne. Cependant, en dépit la faible différenciation génétique qui caractérisait notre jeu de données nous avons pu valider notre hypothèse. On pourrait imaginer une réponse bien plus nette sur un échantillonnage montrant une forte différenciation génétique entre les hôtes comme c’était le cas par exemple pour Vialatte (in press). Cette étude ouvre donc de larges perspectives de recherche pour appréhender sous un angle différent d’une part le paradoxe du maintien de la reproduction sexuée et d’autre part, l’impact de l’artificialisation des écosystèmes sur l’évolution de traits d’histoire de vie des espèces aussi importants que leur mode de reproduction. 28 Bibliographie Ankersmit, G. W., C. Bell, et al. (1986). "Incidence of parasitism by Aphidius rhopalosiphi in colour forms of the aphid Sitobion avenae." Entomologia Experimentalis et Applicata 40: 223-229. Balloux, F., L. Lehmann, et al. (2003). "The population genetics of clonal and partially clonal diploids." Genetics 164(4): 1635-1644. Bell, G. (1982). The Masterpiece of nature : The evolution and genetics of sexuality. Berkeley, University of California Press. 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L’une des hypothèses rendant compte de cette parthénogenèse géographique suggère que ce mode de reproduction est favorisé dans les environnements caractérisés par des interactions biotiques réduites et une forte instabilité temporelle. Les espaces cultivés possèdent fréquemment de telles caractéristiques et l’on peut donc conjecturer que la parthénogenèse y est plus fréquente que dans les habitats plus faiblement anthropisés. Le puceron des céréales (Sitobion avenae), polyphage sur Poaceae, colonise aussi bien les habitats cultivés que les prairies ou les milieux marginaux et est caractérisé par un polymorphisme de reproduction. Il constitue en ce sens un modèle biologique de choix pour tester cette hypothèse. Des pucerons récoltés sur différents hôtes des habitats cultivés (céréales) et non cultivés ont été placés dans des conditions de température et de photopériode induisant la production des formes sexuées et ont été génotypés au moyen de 6 marqueurs microsatellites. Les résultats montrent une différenciation génétique et phénotypique entre les populations issues des deux compartiments et, en particulier, que le mode de reproduction sexué est plus fréquent chez les pucerons spécialisés sur les hôtes « sauvages » alors que les pucerons préférant les hôtes « cultivés » sont très majoritairement asexués. Mots clés : puceron, maintien du sexe, agro-écosystème, parthénogenèse géographique, spécialisation écologique Abstract: Organisms that reproduce both sexually and asexually (i.e by parthenogenesis) exhibit recurrent geographic and/or ecological patterns of repartition of their reproductive modes. One hypothesis accounting for this geographic parthenogenesis suggests that this reproductive mode is favorised in environments characterised by reduced biotic interactions and strong temporal instability. Cultivated areas exhibit frequently such characteristics and it may be conjectured that parthenogenesis is there more frequent than in less anthropised habitats. The grain aphid (Sitobion avenae), polyphagous on Poaceae colonises both cultivated areas as well as meadows or wild margins and shows a reproductive polymorphism. Consequently it’s a good biological model to test this hypothesis. Aphids collected on various hosts from cultivated (cereals) and non cultivated areas were placed under temperature and day-length conditions inducing sexuals production and were genotyped using 6 microsatellites markers. Results show a genetic and phenotypic differentiation between populations originating from the two compartments and, in particular, that sexual reproductive mode is more frequent in aphids specialised on wild hosts when aphids inhabiting cultivated hosts are mainly asexual. Key-Words: aphids, sex maintenance, agroecosystem, geographic parthenogenesis, ecological specialisation 36