Escroquerie à la défîsc : comme un air de fiasco

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Escroquerie à la défîsc : comme un air de fiasco
Escroquerie à la défîsc :
comme un air de fiasco...
On saura ce matin si le tribunal décide de poursuivre
les débats ou de renvoyer l'affaire, comme l'ont demandé
la plupart des parties prenantes, parquet compris, à ce vaste
dossier d'escroquerie à la loi Girardin. Alors que des millions
d'euros sont en jeu, le fisc a même demandé un renvoi
du dossier à l'instruction concernant la fraude fiscale
reprochée au conseiller financier Philippe Savoye,
qui a bénéficié d'un non-lieu.
I
e procès, annoncé comme celui
de l'année en matière financière, était prévu pour durer dix
-/jours. Ouvert hier, il pourrait
tout aussi bien mourir dans l'œuf et se
terminer aujourd'hui, en fonction de
ce que décidera ce matin le tribunal
correctionnel de Saint-Denis. Les juges
se sont accordé 24 h de délibération,
après une matinée passée à écouter les
arguments des uns et des autres sur la
pertinence de poursuivre ou non les
débats.
Et si l'absence pour cause de citation
irrégulière du principal prévenu, Alain
Fontaine, laissait déjà planer le spectre
du report, c'est l'administration fiscale,
partie civile à l'audience, qui a allumé
une deuxième mèche en déposant des
conclusions invitant le parquet «à
mieux se pourvoir.» (Le Journal de l'île
d'hier.) Le fisc considère en effet que le
juge d'instruction en charge du dossier
«n'a pas vidé sa saisine», c'est-à-dire n'a
pas instruit tous les faits visés par la
plainte et notamment ceux de «fraude
fiscale» reprochés à Philippe et
Laurent Savoye, gérants de Réunion
Conseil Investissement (RCI) et
Savoye Gestion Investissement (SGI),
et demande donc la réouverture du
dossier.
«Les Savoye n'ont jamais été entendus
ou mis en examen sur ces faits-là. Le juge
d'instruction a considéré que ces faits
étaient une composante de l'escroquerie,
mais c'est un non-sens. L'escroquerie relève du code pénal, la fraude fiscale relève
du code général des impôts. C'est une dénaturation des faits », plaide M^' Samia
Sadar pour l'administration fiscale.
Une requête suivie par le parquet, par
la voix du vice-procureur Dominique
Auteur. Reconnaissant «un trouble», le
magistrat concède un couac «stupide».
Personne, au parquet comme chez les
nombreux mis en examen, n'a en effet
fait appel d'une ordonnance de renvoi
«tombée pendant les vacances d'août
2012» et qui accordait un non-lieu à
Philippe Savoye.
« STUPIDE »
Pour le ministère public, le volet
«fraude fiscale» instruit d'abord par la
commission des infractions fiscales
(GIF) «étaitbétonné.»
«Personne n'imaginait que Savoye bénéficierait d'un non-lieu. Il a bien réussi
son liold-up», ose le procureur, qui ne
souhaite pas que la petite trentaine
d'entrepreneurs présents à la barre «deviennent les auteurs principaux du préjudice causé au fisc et aux investisseurs. »
Et de proposer au tribunal de demander au parquet de ressaisir le juge d'instruction, «seule solution pour que ce dossier revienne en état d'être jugé.»
De quoi faire bondir l'avocat fiscaliste
qui défend les intérêts de Philippe
Savoye mais aussi de 75 des quelque
300 investisseurs sanctionnés par le
fisc et qui se sont constitués partie civile à ses côtés. «La juge d'instruction a
très justement rappelé que, si Savoye
Le tribunal doit décider ce matin de poursuivre les débats, de les renvoyer
à une date ultérieure, ou de retourner le dossier à l'instruction. (Photo d'archives
Ludovic Laï-Yu)
n'avait pas lui-même fmrté plainte en
2006, nous n'aurions pas de procès aujourd'hui », plaide M'' Philippe Cosich.
« L E FISC A PEUR »
«Le fisc n'a pas été sérieux alors qu'il
avait connaissance de faits depuis 2003,
il a ensuite infligé des amendes de 16 millions d'euros et a repris pour 16 millions
d'euros d'avantages fiscaux. L'administration a gagné près de 40 millions dans
l'affaire, et maintenant qu'elle se rend
compte qu'elle peut les perdre, elle a peur
et tente d'empêcher ce procès d'avoir lieu.
Mais la juge a vu juste en considérant que
la fraude fiscale était une composante de
l'escroquerie à la loi Girarclhi.» L'avocat
de Savoye est d'accord pour un renvoi
simple du procès, mais clans le seul but
qu'il assure la présence (.l'Alain Fontaine à l'audience.
Tour à tour, la quinzaine d'avocats
des prévumis va donner sa position sur
cette question du renvoi, mais aussi
sur celle d'un retour du dossier à l'instruction.
Force est de constater que, selon les
cas, tous n'ont pas le même intérêt à
voir le dossier d'enquête réouvert (lire
par ailleurs). Soit par opportunité de
système de défense, soit par crainte de
voir la liste des faits reprochés s'alourdir un peu plus. Le procès de l'escroquerie-record en matière de défisc'
pourrait bien se muer en record du
procès le plus court.
Sébastien
Gignoux

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