Section 1. Textes applicables Section 2. L`auteur

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Section 1. Textes applicables Section 2. L`auteur
CHAPITRE 7. LA PLURALITE D’AGENTS : L’AUTEUR, LE COAUTEUR ET
LE COMPLICE
Section 1. Textes applicables
Principe de la responsabilité personnelle : Art. 121-1 du C.P. : “ Nul n’est
responsable pénalement que de son propre fait ”.
Définition de l’auteur : Art. 121-4 du C.P. : “ Est auteur de l’infraction la personne
qui :
1° Commet les faits incriminés ;
2° Tente de commettre un crime ou, dans les cas prévus par la loi, un délit ”.
Peine applicable au complice : Art. 121-6 du C.P. “ Sera puni comme auteur le
complice de l’infraction, au sens de l’article 121-7 ”.Modalités de la complicité : Art. 121-7 :
“ Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en
a facilité la préparation ou la consommation.
Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou
de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ”.
Section 2. L’auteur
L’auteur est défini par le Code pénal (art. 121-4) comme celui qui commet les faits ou
celui qui tente de les commettre. Mais cette définition recouvre, en pratique, nombre
d’hypothèses. Deux distinctions doivent être présentées.
D’une part, l’auteur matériel est celui qui exécute, c’est-à-dire celui qui commet ou
tente de commettre les éléments constitutifs de l’infraction (l’acte matériel de commission ou
d’abstention, ainsi que l’intention concomitante à l’acte). Il ne doit pas être confondu avec
l’auteur intellectuel de l’infraction. Ce dernier fait commettre l’infraction par un tiers qui
sera, pour sa part, auteur matériel. Mais cet auteur intellectuel qui organise et ordonne
l’infraction pourra également être qualifié de complice (v. infra pour la complicité par
instigation).
D’autre part, et surtout depuis la loi du 10 juillet 2000 (loi « Fauchon ») sur les délits
non-intentionnels, il convient de distinguer l’auteur direct de l’auteur indirect (lui-même
distingué de l’auteur médiat). L’auteur direct est celui qui commet directement l’infraction
par un acte positif ou par une abstention : c’est celui dont l’acte a causé directement le
dommage subi par la victime. L’auteur indirect et l’auteur médiat, à l’opposé, sont ceux qui
ont causé indirectement le dommage. Cela correspond à deux hypothèses. L’auteur indirect
est celui qui a créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage
(c’est souvent une action qui a causé la situation originelle dont il est résulté le dommage).
L’auteur indirect est par exemple l’automobiliste qui gare son véhicule sur le trottoir obligeant
les piétons à avancer sur la chaussée (ce dont il est résulté un accident), le directeur d’usine
employant dans un atelier empoussiéré un ouvrier ayant une insuffisance respiratoire, la
personne organisant une sortie dans un lieu dangereux susceptible d’occasionner des
accidents. L’auteur médiat est celui qui n’a pas pris les mesures permettant d’éviter le
1
dommage (c’est souvent une omission qui a permis le maintien ou l’amplification d’une
situation à risque). L’auteur médiat est par exemple le maire qui n’ordonne pas la fermeture
d’une piste de ski alors que l’avalanche (qui aura lieu et ensevelira des skieurs) était
prévisible, ou celui qui confie sa voiture à une personne sachant qu’elle ne possède pas de
permis, ou celui qui accepte l’aide d’un tiers bénévole pour utiliser un appareil dangereux
dépourvu du moindre système de protection.
Section 3. Le coauteur
C’est le participant à la commission de l’infraction. Les différents auteurs d’une
infraction sont ainsi qualifiés de coauteurs. Il peut arriver que soit qualifié de complice un
coauteur, tout dépend en pratique de la façon dont sa participation à l’infraction a été
appréhendée par le juge.
Section 4. Le complice
C’est celui qui aide ou assiste à la commission de l’infraction (complicité par aide ou
assistance) ou, encore, celui qui fait commettre l’infraction soit en provoquant, soit en
donnant des instructions à celui qui sera qualifié d’auteur matériel (complicité par
instigation). Précisons d’emblée que la distinction opérée entre la complicité par aide ou
assistance et la complicité par instigation est importante quant à la répression. En effet, si la
complicité par instigation est punissable en toutes hypothèses (crime, délit, contravention, v.
art. R 610-2 du Code pénal), la complicité par aide ou assistance est punissable en toutes
hypothèses pour les crimes et les délits, mais n’est punissable en matière contraventionnelle
que si un texte spécial le prévoit (par ex. l’article R 624-1 du Code pénal).
A. Les conditions de la complicité
La complicité n’existe qu’autant qu’il y a un fait principal punissable1. Mais la
circonstance que l’auteur principal ait été relaxé est indifférente2 : le fait principal doit exister,
mais n’a pas à être puni pour que la complicité soit elle-même punissable. En outre, la
complicité suppose un acte matériel de complicité (détaillé ci-après), et cet acte matériel de
complicité (en principe un acte positif) doit être consommé. En effet, la tentative de
complicité n’est pas punissable3. Enfin, l’acte de complicité doit être antérieur ou concomitant
à l’infraction principale (la concomitance est possible en matière d’aide ou d’assistance ; la
provocation ou la fourniture d’instructions sont nécessairement antérieures à la commission
de l’infraction). Si l’aide est postérieure à la commission du délit aucune complicité ne peut
être retenue4.
1
Crim. 14 avril 1999, Bull. crim. n°81.
Crim. 8 janvier 2003, Bull. crim. n°5, dans ce cas il a été jugé que dès lors que l’existence d’un fait principal punissable, ici l’exportation
illicite de stupéfiants, a été souverainement constatée par les juges, la relaxe de l’auteur principal au motif qu’il ne connaissait pas la nature
du produit transporté, n’exclut pas la culpabilité du complice.
3
v. in fine, cependant, la loi du 9 mars 2004 qui prévoit un délit constitué par une tentative de complicité par instigation (celui qui donne
l’ordre de commettre un meurtre ou un empoisonnement).
4
Crim. 4 mai 2000, Bull. crim. n°178, l’évasion d’un condamné qui ne réintègre pas l’établissement pénitentiaire à l’issue d’une permission
de sortir constitue un délit instantané ; dès lors, n’est pas un acte de complicité punissable, faute d’un accord antérieur, l’aide ou l’assistance
apportée à l’évadé postérieurement aux faits.
2
2
Le complice peut être poursuivi pour avoir commis deux types d’actes définis à
l’article 121-7 du Code pénal. Selon la première acception, la complicité suppose un acte
matériel, l’aide ou l’assistance dont l’effet est de faciliter la préparation ou la consommation
de l’infraction, auquel s’ajoute un élément intentionnel qui est la réalisation de l’aide ou
l’assistance en connaissance de cause du caractère délictueux de l’acte de l’auteur principal.
La mention, dans l’article 121-7, de l’adverbe « sciemment » démontre la volonté du
législateur d’insister sur le caractère nécessairement intentionnel de la complicité. C’est la
complicité par aide ou assistance. Selon la seconde acception, la complicité consiste en une
provocation ou en la délivrance d’instructions visant à la commission de l’acte délictueux par
une autre personne qui sera qualifiée d’auteur. C’est la complicité par instigation.
Quel que soit le mode de complicité retenu, les juges doivent en caractériser les
éléments constitutifs5 afin que la Cour de cassation puisse exercer son contrôle de
qualification.
B. La complicité par aide ou assistance
La complicité par aide ou assistance suppose un acte matériel de participation, qui
est un acte positif, un acte de commission6. En principe, le seul fait de tolérance ne justifie pas
la prévention du chef de complicité dès lors que la seule inaction ou abstention consistant à
“ laisser faire ” ne permet pas de retenir la complicité7. Néanmoins, la Cour de cassation a
admis que celui qui promet de ne pas s’opposer à la commission d’une infraction, alors que
ses fonctions lui imposaient une telle opposition peut être retenu dans les liens de la
complicité8. De même est complice celui qui n’exécute pas son obligation professionnelle de
vérification9 ou celui qui participe, même passivement, à un groupe de personnes qui
commettent une infraction10. Aussi bien, même si le principe est l’exigence d’un acte matériel
positif, la jurisprudence admet que la participation peut résulter d’une abstention, soit que le
complice avait un devoir de surveillance ou le devoir de s’opposer à la réalisation des
infractions, soit que sa participation passive ait facilité la commission de l’infraction.
En outre, la complicité par aide ou assistance suppose un élément moral : l’acte de
complicité doit avoir été réalisé en connaissance de cause, c’est-à-dire en “ connaissance du
caractère délictueux des actes de l’auteur et la volonté de participer à leur commission ”11.
L’existence de l’intention délictueuse ne peut être incertaine et doit être constatée par le juge12
qui doit caractériser la volonté d’aider ou d’assister sciemment l’auteur principal pour qu’il
commette l’infraction 13. Aussi bien, il doit être établi que celui qui a participé à l’infraction
5
Crim. 15 avril 1972, Bull. crim. n°124 ; Crim. 23 mars 1978, Bull. crim. n°116.
Crim. 8 mars 1951, Bull. crim. n°76.
7
Crim. 21 octobre 1948, Bull. crim. n°242 ; Crim. 27 décembre 1960, Bull. crim. n°624 ; Crim. 10 avril 1975, Bull. crim. n°89.
8
Crim. 27 octobre 1971, Bull. crim. n°284 ; voir également Crim. 28 mai 1980, D. 1981, IR, 137, pour un membre du directoire qui devait
s’opposer à l’abus de biens sociaux commis par le président. En matière de presse, la Cour de cassation retient que le directeur de la
publication ayant le devoir de surveiller et de vérifier tout ce qui est inséré dans le journal, l’autorisation donnée par lui de publier un article
de presse dont il était tenu de prendre connaissance dans l’exercice de ses fonctions de surveillance et de contrôle, caractérise sa participation
personnelle et consciente en qualité de complice dès lors que n’est pas établie l’existence de circonstances, indépendantes de sa volonté,
l’ayant mis dans l’impossibilité de s’acquitter de son devoir, Crim. 14 juin 2000, Bull. crim. n°223 ; Crim. 27 octobre 1992, Bull. crim.
n°343.
9
Pour un expert comptable coupable de complicité de fraude fiscale commise par son client pour n’avoir pas exécuté son obligation
professionnelle d’organiser, vérifier, apprécier et redresser la comptabilité de son client, Crim. 15 janvier 1979, Bull. crim. n°21.
10
Crim. 20 janvier 1992, Dr. pén. 1992, 194, la présence de ce complice passif dans un groupe d’assaillants en adhérant à leur intention
délictueuse a “ fortifié ” les dits assaillants.
11
F. Desportes, F. Le Gunehec, Droit pénal général, éd. Economica, 9ème éd., p. 500.
12
Crim. 27 novembre 1952, Bull. crim. n°283 ; Crim. 19 mars 1986, Bull. crim. n°112 ; Crim. 28 juin 1995, Bull. crim. n°241 ; Crim. 9
novembre 1995, Bull. crim. n°346. La Cour de cassation censure les juges du fond qui ne relèvent aucun fait de participation consciente de
celui poursuivi en qualité de complice ; Crim. 12 décembre 1974, Bull. crim, n°349.
13
Crim. 19 juin 2001, Bull. n°148, la Cour de cassation précise que ne peut être déclarée complice du délit, la personne dont il n’est pas
établi qu’elle ait voulu ou permis la commission du délit.
6
3
avait conscience de s’associer à une infraction pénale et, par son intervention volontaire, de
favoriser la consommation de l’infraction. Le complice doit savoir que ses instructions ou son
aide serviront à l’acte délictueux14.
“ Cette nécessité d’une participation consciente conduit de prime abord à exiger qu’il y ait eu
une correspondance rigoureuse entre l’intention du complice et les faits accomplis par
l’auteur principal ”15. La simple négligence ne peut être assimilée à une participation
intentionnelle16 et la conscience du complice d’aider à une infraction doit être antérieure ou
concomitante de l’aide ou de l’assistance qui lui est imputable17.
C. La complicité par provocation ou fourniture d’instructions
La complicité par instigation recouvre tout d’abord l’hypothèse de la provocation.
Elle suppose, pour être caractérisée, l’existence de dons, promesses, menaces, abus
d’autorité ou de pouvoir. Autrement dit, la provocation doit avoir été circonstanciée,
directe et individuelle. Pour être retenue, la complicité doit avoir été suivie d’effet, c’est-àdire que le crime ou le délit ait été au moins tenté par celui qui a été provoqué. La complicité
correspond ensuite aux instructions. Ce peut être une simple incitation sans que des dons,
promesses ou menaces soient nécessaires. La fourniture d’instructions doit correspondre à des
indications précises pour rendre possible ou pour faciliter l’infraction. En outre, ces
indications doivent avoir été données en connaissance de cause, c’est-à-dire sachant
qu’elles allaient conduire à la commission (ou à la tentative de commission) d’une infraction.
Il suffit pour que les instructions soient caractérisées que des renseignements aient été donnés
ou des directives de nature à faciliter la commission de l’infraction, quel que soit son mode
d’exécution. Autrement dit, même si le mode d’exécution de l’infraction est différent des
instructions données, le complice peut être retenu dans les liens de la prévention : ce qui est
pris en considération est le fait qu’il ait donné des directives ou des renseignements pour la
commission de l’infraction et non pas que ces informations aient été suivies par l’auteur
matériel. L’intention du complice est différente de l’intention de l’auteur principal : c’est la
volonté de s’associer à l’acte délictueux de l’auteur, le fait d’avoir, en connaissance de cause
des suites possibles, donné des instructions pour la commission d’une infraction.
La loi du 9 mars 2004 a prévu, en son article 6, une nouvelle incrimination. Celle-ci
qui correspond, in fine, à un cas de complicité par instigation non suivi d’effet instaure un
nouvel article 221-5-1 au Code pénal : “ Le fait de faire à une personne des offres ou des
promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin qu’elle
commette un assassinat ou un empoisonnement est puni, lorsque ce crime n’a été ni commis,
ni tenté, de dix ans d’emprisonnement et de 150.000 euros d’amende ”. Non suivi d’effet, et
donc en l’absence de toute infraction principale, le fait de solliciter quelqu’un pour qu’il
commette une infraction, peut donner lieu à poursuites et condamnation. La loi du 9 mars
2004 a donc créé une infraction particulière permettant de réprimer le fait de “ commander ”
un assassinat ou un empoisonnement, dans l’hypothèse où le crime n’aurait été ni commis, ni
tenté18.
14
Crim. 19 mars 1986, Bull. crim. n°112 ; Crim. 5 octobre 1999, Bull. crim. n°208.
R. Merle, A. Vitu, Traité de droit criminel, Droit pénal général, éd. Cujas, 7ème éd., p. 700.
16
Crim. 6 mars 1989, Rev. Dr. pén. 1990, p. 117.
17
Crim. 4 novembre 1991, Bull. crim. n°391.
18
A cet égard, on rappellera que le législateur avait déjà créé le délit de provocation au suicide pour les personnes qui, incitant une autre à se
donner la mort, ne pouvaient être poursuivies sur le terrain de la complicité.
15
4
Section 5. Effets des circonstances aggravantes
Les circonstances aggravantes réelles, c’est-à-dire celles qui modifiant la nature et
la qualification de l’acte s’appliquent au complice, même s’il n’en a pas connaissance (ex.
usage d’une arme, bande organisée). En revanche, les circonstances personnelles à l’auteur
principal qui aggravent ou atténuent sa responsabilité, ne s’appliquent pas au complice
(ex. état de minorité, état de récidiviste).
Section 6. Exemples jurisprudentiels récents
L’expert-comptable qui établit les comptes annuels et les déclarations mensuelles du
chiffre d’affaires taxable dont la fictivité n’a pu lui échapper en sa qualité de professionnel de
la comptabilité et en attestant de leur conformité et de leur sincérité, a sciemment permis à
l’auteur principal de commettre et de réitérer chaque mois les escroqueries au préjudice du
Trésor public et doit alors être retenu dans les liens de la complicité19.
Caractérise la complicité par provocation du délit de violences aggravées l’arrêt qui
énonce que le passager d’un véhicule automobile a donné l’ordre au conducteur de forcer le
passage barré par un véhicule de gendarmerie20 .
Constitue un acte de complicité du délit de propagande ou publicité illicite en faveur
du tabac le fait de participer à la mise en œuvre d’actions de promotion de produits utilisant
des marques rappelant le tabac ou un produit du tabac21 .
Le commettant qui donne l’ordre à un préposé de passer une intersection en dépit d’un
feu rouge et en absence de visibilité est complice du délit de mise en danger d’autrui22.
Justifie la condamnation, en qualité de complices, des dirigeants d’un club de vacances
pour l’exercice d’une activité d’encadrement d’une activité sportive sans déclaration, l’arrêt
qui retient qu’ils ont eu sciemment recours à des jeunes gens dépourvus de diplôme pour
constituer l’équipe d’animateurs sportifs, en les rémunérant pour une activité réservée aux
seuls titulaires de récépissé d’une déclaration d’éducateur sportif23.
Se rend coupable de complicité de travail clandestin celui qui, en connaissance de
cause, participe à la gestion d’une société exerçant son activité sans qu’ait été accomplie l’une
quelconque des obligations prévues par l’article L 324-10 du Code du travail24.
CHAPITRE 8. LA PLURALITE D’INFRACTIONS : LE CONCOURS
D’INFRACTIONS
19
Crim.25 février 2004, Bull. crim. n°53 (voir annexes), en l’espèce les juges ont censuré les juges pour ne pas avoir rechercher si les actes
de complicité avaient été commis sciemment eu égard à la qualité de professionnel de l’expert comptable qui ne pouvait ignorer le défaut de
sincérité des comptes.
20
Crim. 18 mars 2003, Bull. crim. n°70.
21
Crim. 18 mars 2003, Bull. crim. n°69.
22
Crim. 6 juin 2000, Bull. crim. n°213.
23
Crim. 7 octobre 1998, Bull.crim. n°249.
24
Crim. 1er juillet 1997, Bull. crim. n°262.
5
Section 1. Textes applicables
Le concours d’infractions recouvre deux hypothèses : le concours idéal de
qualifications lorsque plusieurs qualifications sont applicables à un même fait délictueux et le
concours réel d’infractions lorsque l'agent a commis plusieurs actes matériels constitutifs de
plusieurs infractions. Le concours idéal de qualifications conduit à ne retenir qu’une
qualification et donc une peine unique, alors que le concours réel d’infractions conduit à
plusieurs déclarations de culpabilité mais au non-cumul des peines. Le Code pénal ne traite
pas du concours idéal de qualifications et précise seulement la définition et le régime
applicable au concours réel d’infractions.
Art. 132-2 du C.P. : “ Il y a concours d’infractions lorsqu’une infraction est commise par une
personne avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction ”.
Art. 132-3 du C.P. : “ Lorsque, à l’occasion d’une même procédure, la personne poursuivie
est reconnue coupable de plusieurs infractions en concours, chacune des peines encourues
peut être prononcée. Toutefois, lorsque plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne
peut être prononcé qu’une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus
élevé ”.
Art. 132-4 du C.P. : “ Lorsque, à l’occasion de procédures séparées, la personne poursuivie a
été reconnue coupable de plusieurs infractions en concours, les peines prononcées s’exécutent
cumulativement dans la limite du maximum légal le plus élevé. Toutefois, la confusion totale
ou partielle des peines de même nature peut être ordonnée, soit par la dernière juridiction
appelée à statuer, soit dans les conditions prévues par le Code de procédure pénale ”.
Section 2. Le concours idéal de qualifications et le concours réel
d’infractions – Distinctions
On se trouve en présence d’un concours (ou cumul) idéal de qualifications lorsqu’un
acte délictueux unique est susceptible de recevoir plusieurs qualifications. Le concours (ou
cumul) réel d’infractions résulte d’une pluralité d’actes délictueux distincts les uns des
autres, en pratique séparés dans le temps, qui peuvent également donner lieu à plusieurs
qualifications. C’est donc, d’un côté, l’unité de l’acte répréhensible et, de l’autre, la pluralité
d’actes, qui distingue les deux hypothèses de cumul. La distinction est souvent délicate entre
ces deux hypothèses lorsque, par un acte unique, l’agent a eu l’intention de commettre
plusieurs infractions ou lorsque les actes distincts se sont accomplis simultanément.
D’ailleurs, la jurisprudence utilise parfois l’expression de “ cumul idéal d’infractions ”,
tendant à la confusion entre le cumul idéal de qualifications et le cumul réel d’infractions. En
outre, en présence d’un cumul idéal de qualifications, les tribunaux ont tendance à appliquer
les règles du concours réel d’infractions.
En toute hypothèse, la confusion entre cumul idéal de qualifications et cumul réel
d’infractions n’a que peu d’importance pratique. Tout d’abord, le régime de ces cumuls
revient, in fine, à la même chose. Si le cumul idéal doit donner lieu à une seule déclaration de
culpabilité et, partant l’application du principe de l’unicité de la peine, le cumul réel impose
l’application du principe de non-cumul des peines. Dès lors, qu’il y ait cumul idéal ou cumul
réel, c’est la peine de la plus haute qualification applicable qui doit être envisagée. Ensuite et,
en conséquence, il ne saurait être reproché à une juridiction d’avoir retenu l’existence d’un
cumul réel (déclaration de culpabilité des mêmes faits sous des qualifications distinctes) au
lieu d’un cumul idéal dans la mesure où dans les deux cas, une seule peine étant prononcée, le
6
demandeur n’a pas d’intérêt à agir25. Néanmoins, nous verrons que les régimes divergent et
que le principe de l’unicité de la peine du cumul idéal n’est pas équivalent au principe du noncumul des peines du cumul réel.
Section 3. Le concours idéal de qualifications – Acte unique et unicité de
valeur protégée Il est possible qu’en présence d’un fait délictueux unique, plusieurs qualifications
puissent être envisagées. En premier lieu, il convient d’écarter les qualifications incompatibles
entre elles. À ce titre, on relèvera que les qualifications de vol et de recel sont incompatibles26.
Afin de déterminer si deux qualifications sont compatibles entre elles, il faut rechercher si les
incriminations sanctionnent la violation d’intérêts différents et comportent des éléments
constitutifs différents27. On relèvera que, même en présence d’un acte unique, la Cour de
cassation a décidé que cet acte portait atteinte à des valeurs protégées différentes et que des
intentions délictuelles distinctes animaient l’auteur28. Ainsi, un concours réel a-t-il pu être
retenu pour un acte délictuel unique. Lorsque les qualifications incompatibles sont écartées et
qu’il ne peut être retenu, pour un acte unique une atteinte à des valeurs protégées distinctes
pour lesquelles l’intention de l’auteur peut être caractérisée, s’il demeure plusieurs
qualifications applicables concurremment à l’acte délictueux, on est en présence d’un
concours idéal de qualifications29.
Le concours idéal de qualifications – Régime applicable :
Le concours idéal de qualifications doit, en principe, conduire à ne retenir qu’une
seule qualification et, en toute hypothèse, emporte le prononcé d’une seule peine.
Le concours idéal de qualifications, en application de la règle non bis in idem, interdit qu’un
même fait autrement qualifié puisse faire l’objet de qualifications distinctes30 et, partant,
emporter une double déclaration de culpabilité31. Les juges doivent retenir le fait délictueux
sous la plus haute expression pénale dont il est susceptible32 et si deux qualifications
équivalentes peuvent être retenues, les juges font prévaloir l’infraction dont la finalité a été
envisagée par le prévenu sur celle qui a été le moyen de l’autre.
En dépit de ce principe de l’unicité de qualification qui doit être retenu en cas de
concours idéal, lorsqu’un fait unique a causé des dommages de gravité variable à plusieurs
victimes, plusieurs qualifications sont retenues à l’encontre du prévenu. Ainsi, une
qualification délictuelle pourra être retenue pour les victimes qui ont subi une ITT supérieure
à 3 mois et une qualification contraventionnelle pour les victimes d’une ITT inférieure à 3
mois (ces hypothèses sont à préciser selon la qualité de la victime et des circonstances
accompagnant les actes).
25
Crim. 27 octobre 1997, Bull. crim. n°352.
Crim. 22 novembre 1994, Bull. crim. n°370.
27
Crim. 21 février 2001, Bull. crim. n°46, pour la compatibilité entre la complicité de prise illégale d’intérêts et d’usurpation de fonctions.
28
Crim. 3 mars 1960, Bull. crim. n°138, le fait de lancer une grenade contre un immeuble constitue deux infractions distinctes, l’assassinat et
la destruction par explosif, constitutives de deux valeurs protégées distinctes et caractérisées par deux intentions délictuelles différentes. Voir
également pour l’affaire du sang contaminé entre le délit de tromperie sur la qualité d’une marchandise et le crime d’empoisonnement (Crim.
22 juin 1994, Bull. crim. n°248 et Crim 18 juin 2003, BICC du 15 septembre 2003, p. 7. Plus récemment, la Cour de cassation a jugé que
sanctionnaient la violation d’intérêts distincts et comportaient des éléments constitutifs distincts, les violences commises par un dépositaire
de l’autorité publique et des actes attentatoires à la liberté individuelle (Crim. 21 avril 1998, Bull. crim. n°140).
29
Crim. 19 mars 1996, Bull. crim. n°117.
30
Crim. 4 février 1998, Dr. pén. 1998, chron. 15.
31
Crim. 22 novembre 1983, Bull. crim. n°308.
32
Crim. 3 mars 1966, Bull. crim. n°79.
26
7
En toute hypothèse que l’on soit en présence ou non d’une pluralité de victimes présentant des
dommages de gravité différente ou non, en matière de cumul idéal de qualifications, le régime
applicable est celui de l’unicité de la peine. Seules les peines résultant de la qualification
la plus forte peuvent être prononcées. Dès lors, le juge ne peut prévoir une peine
correspondant à la qualification possible mais non retenue (par ex. une peine complémentaire)
et qu’il ne peut y avoir de cumul entre les peines des différentes qualifications qui étaient
envisageables, seraient-ce des amendes contraventionnelles. Aussi bien, même si plusieurs
qualifications devaient être retenues en présence d’une pluralité de victimes ayant subi des
dommages de gravité différente, seule la peine la plus forte peut être prononcée et il ne peut y
avoir de cumul d’amendes contraventionnelles33.
Section 4. Le concours réel d’infractions
On se trouve en présence d’un concours d’infractions lorsqu’il y a pluralité
d’infractions distinctes. L’agent est poursuivi pour plusieurs infractions, soit en même
temps, soit au cours de procédures séparées et chaque infraction donne lieu à une
déclaration de culpabilité, à la différence du concours idéal de qualifications.
L’article 132-2 du Code pénal précise ainsi que l’infraction est commise par une
personne avant que celle-ci ait été définitivement condamnée pour une autre infraction. On
comprend ainsi que le cumul réel correspond à l’hypothèse où l’agent a commis des
infractions rapprochées dans le temps de sorte qu’une seule procédure est engagée à son
encontre, mais encore au cas où l’agent a commis une infraction alors même que des
poursuites avaient déjà été engagées pour une infraction précédente. Si une condamnation
définitive est déjà intervenue pour le délit antérieur, la question ne sera pas celle du cumul
réel d’infractions, mais celle de la récidive. Le régime du concours réel d’infractions doit être
exposé d’une part lorsque les infractions sont jugées en même temps (unité de procédure) et,
d’autre part, lorsqu’elles sont jugées séparément (procédures séparées).
A. Le concours réel d’infractions – Première hypothèse : l’unité de procédure
Lorsque les différentes infractions en concours sont jugées en même temps, l’article
132-3 du Code pénal instaure deux principes. Tout d’abord chacune des peines encourues
pour les différentes qualifications retenues peut être prononcée. Ainsi si les infractions sont
sanctionnées par de telles peines, le juge peut prononcer une peine d’emprisonnement, plus
une peine d’amende, plus une peine de suspension de permis de conduire …. Ensuite, le juge
ne peut cumuler les peines de même nature. L’article 132-5 précise que toutes les peines
privatives de liberté sont de même nature et que la peine privative de liberté est confondue
avec une peine perpétuelle. Dès lors, le juge ne peut prononcer qu’une peine
d’emprisonnement ou qu’une peine d’amende dans la limite du maximum légal. En définitive,
en cas de procédure unique, toutes les peines peuvent être prononcées mais ces peines ne se
cumulent pas de sorte que seule la peine la plus forte de chaque nature pourra être prononcée.
B. Le concours réel d’infractions – Seconde hypothèse : la pluralité de procédures
Lorsque les infractions sont jugées à l’occasion de procédures séparées, les principes
sont exposés aux articles 132-4 et suivants du Code pénal. Tout d’abord, il résulte de l’article
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Crim. 22 février 1995, Bull. crim. n°80 et 81.
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132-4 que les peines sont cumulées dans la limite du maximum légal, c’est-à-dire que les
peines qui sont prononcées et doivent être exécutées sont cumulées jusqu’à concurrence du
maximum prévu par la loi pour l’infraction la plus sévèrement punie.
Lorsque la réclusion criminelle à perpétuité est encourue et n’a pas été prononcée, le
maximum légal est fixé à trente ans de réclusion criminelle (art. 132-5).
Les peines de même nature peuvent faire l’objet d’une confusion. Mais cette
confusion est facultative. Par dérogation au principe du cumul des peines prévues lorsque les
poursuites sont séparées, la juridiction qui se prononce en dernier, peut ordonner la confusion
totale ou partielle des peines de même nature. La peine absorbée est réputée être exécutée en
même temps que la peine la plus forte absorbante.
Deux précisions doivent être apportées. En premier lieu, selon l’article 132-7, les
peines d’amende pour contravention se cumulent entre elles et avec celles prononcées ou
encourues pour les crimes et délits en concours. En second lieu, lorsqu’il y a révocation du
sursis, les peines prononcées assorties d’un sursis doivent s’exécuter cumulativement sans
pouvoir être confondues entre elles. La révocation du sursis est exposée aux articles 132-35 à
132-37.
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