Le prêtre sur le devant de la scène

Transcription

Le prêtre sur le devant de la scène
L’œil critique
Retour sur
l’événement
dans le journal
du 7 mai
Exclusif
10 films, 10 figures
de prêtres passés
à la loupe de
Pierre Faure,
critique cinéma
L’entretien avec
Frédéric Van Den
Driessche, comédien
nordiste, dans la peau
de Louis Page. p. 2 et 3
Un dossier spécial
Supplément gratuit au N°2154 - Du 16 au 22 avril 2010 - Ne peut être vendu
Le mot DE la rédaction
Le prêtre sur le
devant de la scène
Peu de premiers rôles, souvent caricaturés, mais des
personnages présents et discrets. Combien de leurs
paroles, de leurs écoutes, ont influé de manière décisive
leur entourage. Le 7e art nous entraîne à leur rencontre
et par le biais de sa lucarne, à nous laisser saisir par leur
humanité. Bravo donc au diocèse de Lille d’avoir imaginé
ce festival. Les Nordistes ont là une occasion originale de
découvrir des visages de prêtres, décrits par des
réalisateurs français, italiens, anglais ou américains,
d’hier et d’aujourd’hui. Cette semaine de festival va être
un élément supplémentaire au débat actuel sur la
prêtrise. Que n’a-t-on pas entendu ces derniers temps
autour du célibat incompris des prêtres, de leur solitude
et des dramatiques actes de pédophilie commis par
certains. Mais le prêtre reste une figure majeure de nos
sociétés. Leur place dans les scénarios de films en
témoigne. Ce festival leur rend hommage en cette
année où Benoît XVI les met en avant. Gageons qu’à
l’issue de ces rencontres et débats, nous saurons mieux
définir ce qu’est un prêtre, aujourd’hui en 2010, dans
une société laïque. Nous en rendrons compte dans notre
journal du 7 mai.
Tous invités,
petits et grands,
croyants
et non-croyants
« Le prêtre fait son cinéma » est un festival du film créé
dans le diocèse de Lille à l’occasion de l’année
sacerdotale. Un festival qui se veut ouvert au plus grand
nombre, petits et grands, croyants et non-croyants,
désireux de voir ou de revoir des films montrant
différents visages de prêtres. Des visages du passé, mais
aussi du présent, qui témoignent du rôle et de la vie du
prêtre dans le monde d’aujourd’hui. Ce festival se veut
aussi un lieu de rencontre et de débat autour des thèmes
liés au ministère du prêtre et plus largement de la foi.
Bon festival à tous !
P. Thierry Vandemoortele, vicaire épiscopal
sur métropolys
Sur RCF radio t.o
Pour suivre l’actualité du
festival, retrouvez chaque
matin, le flash du jour La
Bonne nouvelle, à 7 h 20
sur 97.6 FM
Émission L’image du prêtre
le 21 avril à 20 h (redif. le 22
à 11 h 30 et le 25 à 10 h 30) et
analyse des films, les 28, 29
et 2 mai, mêmes heures.
« Pour être parmi les hommes,
le prêtre n’en est pas moins
à une distance mystérieuse, due à
son caractère sacré. Certains films
impressionnent à cet égard parce
que leur sujet, pour une part, nous
échappe. »
Édouard Huber, chroniqueur cinéma
2I
I
I
Croix du Nord supplément gratuit au n°2154 16 au 22 avril 2010
I Le prêtre fait son cinéma
Une série télévisée
Louis Page :
sur les chem
Frédéric Van Den Driessche, attendu mardi à
L
E comédien Frédéric Van
Den Driessche participera,
le 27 avril à Lille,à ce festival.
Occasion pour celui qui a
grandi entre Tourcoing et Roubaix,
de rencontrer son public et de
retrouver le Nord… Actuellement
en tournage en région parisienne,
il nous a accordé quelques instants
pour plonger, en avant-première,
dans le vif du sujet : sa vision du
prêtre. Un regard nourri d’une
expérience de 10 ans de tournage
de la série Louis Page,où il incarnait
un prêtre itinérant sur le chemin de
Saint Jacques de Compostelle…
Quand on vous a proposé le rôle du
prêtre, avez-vous hésité ?
J’ai hésité pour une seule raison :
je sentais que ce prêtre avait commis quelque chose qui le rendait
coupable et je craignais que ce soit
un prêtre défroqué, ce que l’on
avait déjà vu 50 000 fois. J’ai
appelé la production qui m’a dit
que le prêtre a euthanasié sa mère.
L’euthanasie est interdite, mais
que ce soit un prêtre qui euthanasie, je trouvais cela intéressant et
le fait qu’il porte en lui cette faute,
original. C’était évident qu’il ne
pouvait pas se poser en juge mais
se plaçait comme accompagnateur. Et puis ce qui est très rare à la
télé, où il y a du bavardage et
encore du bavardage, c’est que j’ai
pu couper tout ce qui était redondant ou inutile pour laisser ce
prêtre apparaître à l’écoute des
personnes,et jouer sur la force des
regards.
Comment vous êtes-vous préparé
à jouer ce personnage ?
Je n’ai pas choisi d’aller dans un
séminaire pendant 6 mois,j’ai joué
avec ce que je ressentais. Comme
beaucoup, j’avais une image caricaturale. J’ai grandi dans des
congrégations. J’étais allé au collège de Marcq puis chez les frères
de l’école Saint Luc à Tournai. J’ai
aimé le personnage de Louis Page.
J’y suis allé avec un effet boomerang : je devais m’inscrire dans ce
que je disais, et je n’aurais pas pu
dire certaines choses. Il y a eu des
épisodes auxquels je tenais plus
qu’à d’autres.
Dans l’épisode qui sera projeté à
Lille, vous accompagnez un prêtre
qui doute.
J’aime cet épisode qui est bien joué
et bien écrit. Il y est question du
La série télé Louis Page
9 films
« Peut-on en tant qu’acteur faire passer ce à quoi on croit ? » s’interroge le comédien Frédéric Van Den Driessche. Il incarne Louis Page, prêtre catholique, héros d’une série télévisée diffusée sur France 2.
et une
série
présentés
lors de ce
festival
analyse. Pierre Faure, notre spécialiste
du cinéma, établit les « pitchs »
et décrypte en quelques lignes l’essentiel
de la problématique posée par les films
faisant partis de la sélection.
la messe est finie 1987
Ce sentiment terrible
que « tout fout l’camp »…
1
Venant de sa petite île paisible,
Don Giulio arrive dans la grande
ville, Rome, pour découvrir sa nouvelle paroisse. L’église est poussiéreuse et désertée par les fidèles. Elle est désertée aussi par Antonio, ancien prêtre qui a choisi
le mariage et la paternité. Il habite juste en
face du presbytère et se montre prêt à meubler la solitude de son successeur. Peu à peu,
Don Giulio découvre les habitants du quartier :
Réalisateur : Nanni
Gianni, l’intellectuel maniéré, Andrea le dur,
Moretti.
Saverio l’artiste, Cesare le pur.
Casting : Avec Nanni Il les écoute, tente de leur être utile et de leur
Moretti, Margarita
faire partager ce en quoi il croit, mais sa parole
Lozano, Ferruccio de
ne passe pas.
Ceresa...
Il va d’incompréhension en révolte, de colère
en détresse dans son petit monde qui semble
lui échapper totalement. Dans sa propre
famille, Don Giulio n’est pas épargné : sa sœur
enceinte veut rompre et avorter, son père part
avec une jeunette dont il veut un enfant, sa
mère accuse le traumatisme, qui la conduit au
suicide.
Le prêtre est sérieusement ébranlé. Il n’a plus
cette voix calme et assurée qui bénissait jadis les
jeunes époux, avant
son départ de l’île. Il
s’en va au-delà du
La problèmatique
cercle polaire où il
Les questions de la déchristianisation,
faut arrimer les habitations pour qu’elles
d’une société en perte de repères, de la
résistent à ce vent
place du prêtre et de la recherche d’un
qui, dit-on, rend fou…
nouveau langage sont posées ici.
Un prêtre catholique, héros d’une série télévisée diffusée sur France 2
est un fait rare. Tournée dès 1997 et diffusée jusqu’en 2008, elle met
en scène un prêtre qui effectue le chemin de St Jacques. S’arrêtant de
presbytère en presbytère, il rencontre des familles et prêtres affrontant de difficultés. Il leur vient en aide, les accompagne, sans régler
tous les problèmes,se laisse bousculer dans ses certitudes.
Gran Torino 2009
Ancien combattant de Corée
à l’heure de la rédemption
2
Clint Eastwood est à la fois le réalisateur et l’interprète principal de
« Gran Torino ».
Il incarne Walt Kowalski, un citoyen
américain moyen, ancien de la guerre de
Corée, retraité après avoir travaillé durant
quelques décennies dans les usines Ford.
Récemment veuf, il passe ses journées la
canette de bière à la main à se prélasser sur
son perron. Il a beaucoup de mal à supporter
Réalisateur : Clint
tous ces « chinetoques », ces « faces de citron »
Eastwood.
qui envahissent sa rue et son quartier. Ses
Casting : Avec Clint
sentiments deviennent haineux lorsqu’il surEastwood, Bee Vang,
prend l’un d’eux dans son garage, tentant de
Ahney Her...
lui voler sa voiture de collection, une « Gran
Torino ».
Un jour, parce qu’il a conservé de vieux réflexes
de justicier, Kowalski sauve l’un de ces jeunes
immigrés des griffes d’un gang. Un acte de bravoure qui fait de lui le héros du quartier, admiré
et respecté par tous ceux qu’il qualifiait de
« chinetoques ». Il est l’objet de nombreux
témoignages d’amitié, et cela change peu à peu
son regard sur l’humanité qui l’entoure. Une
sorte de conversion, sous le regard bienveillant
du père Janovitch
qui, par fidélité à une
promesse faite à la
La problèmatique
défunte
Mme
Un prêtre qui, après avoir tenté assez
Kowalski, avait promaladroitement de ramener au bercail la
mis de « ramener
« brebis égarée » va être le témoin d’une
son
époux
au
bercail »…
véritable rédemption…
Le prêtre fait son cinéma I
: un prêtre
mins de Saint Jacques
Lille, raconte comment il s’est pris d’intérêt pour le prêtre le plus célèbre du petit écran.
célibat des prêtres. Louis Page
accompagne un prêtre qui a une
relation avec une femme, ce qui
oblige Louis Page à avoir une
action dans l’église : il l’aide à
retrouver le chemin de la prêtrise
dans le célibat. Ce scénario est
intéressant alors qu’on aurait pu,
pour le moderniser, lui faire dire
n’importe quelle c…
Personnellement,que pensez-vous
du célibat des prêtres ?
J’ai des tentations d’idées, mais je
n’y réponds pas. C’est très délicat
et le débat m’intéresse. Pour
autant que j’ai joué le rôle d’un
prêtre, je n’ai pas les réponses. Je
sais qu’il y a de la souffrance. C’est
une question à traiter probablement au cas par cas. Dans cet
épisode (présenté le 27 avril à Lille,
Ndlr) Louis Page aide le prêtre à
retrouver sa solitude de prêtre, qui
est au cœur de son ministère. Un
jour de tournage, alors qu’on
déjeunait dans un presbytère, j’ai
rencontré un prêtre qui m’a dit :
« Je vis maritalement ». C’était un
homme heureux et épanoui.
Pourquoi lui retirer son ministère ?
Dernièrement, j’ai entendu à la
radio quelque chose que j’ignorais :
le célibat aurait été instauré au XIIe
pour que les biens de l’Église ne
soient pas dilapidés par les liens
du mariage.
Sur ce point notamment, on reproche au Pape sa fermeté.
Le pape est le gardien des préceptes de l’Église. Il est dans son rôle
de gardien du temple.Dans l’église
anglicane, j’ai appris que des prêtres sont mariés. Des échelles
d’analyses en profondeur existent
qui permettraient de s’apercevoir
que les prêtres mariés sont plus
heureux ou exercent mieux, utilisons-les. Le statisme de cette
situation me paraît un risque de
gangrène.Je regrette que certaines
personnes pensent que les prêtres
deviennent pédophiles parce qu’ils
ne peuvent pas se marier. C’est
Un souvenir plus précis ?
Mon premier baiser à Marcq, qui a
duré un après-midi, au manège à
chevaux de l’Hippodrome ! Nous
« Je regrette que certaines personnes
pensent que les prêtres deviennent
pédophiles parce qu’ils ne peuvent pas
se marier. C’est insultant pour eux. »
insultant : l’un est névrosé, l’autre
est un cœur qui parle. Cet amalgame est terrible.
Revenons à vous. Quelles sont vos
attaches avec le Nord ?
Je suis né à Tourcoing, et j’y ai
grandi. Quand mes parents ont
divorcé, j’ai fréquenté Roubaix.
Mon enfance s’est beaucoup
passée avec mes deux frères. Au
collège de Marcq, où je n’étais pas
vraiment bon élève, je n’ai pas été
très heureux,on m’a fait sentir que
je serai mieux ailleurs. Je suis parti
à Saint Luc à Tournai, une école de
photo. Là j’ai fait de l’art déco et du
dessin ; j’ai pu m’exprimer autrement,ça m’a rendu assidu en cours
Rome, ville ouverte 1945
Monsieur le curé revit
la Passion du Christ
3
et j’ai été heureux.Nous étions des
classes de 18 puis 15 élèves,on était
tous potes et aujourd’hui,à 50 ans,
mes meilleurs amis datent de
cette époque. Nous sommes tous
mariés et avec des enfants.Je viens
régulièrement les retrouver dans
le Nord et la Belgique.
Nous sommes à Rome, au cours de
l’hiver 1944. De violents affrontements ont lieu entre la Gestapo et
les réseaux de la Résistance. Giorgio
Manfredi, ingénieur communiste activement
recherché a trouvé refuge chez un ami typographe, Francesco, qui doit épouser prochainement
sa voisine, la veuve Pina (Anna Magnani). L’immeuble de la Via Casilina où habite Francesco
devient un nid de résistance où se retrouvent
Réalisateur : Roberto
notamment les enfants du patronage et le père
Rossellini.
Don Pietro qui, tous, participent à la lutte. Un
Casting : Avec Aldo
jour les S.S. cernent l’immeuble, embarquent les
Fabrizi, Marcello
hommes et abattent froidement la veuve Pina.
Pagliero, Francesco
La maîtresse de Manfredi (Judas ?) a dénoncé
Grandjaquet...
tout le monde aux Allemands. Le militant communiste mourra sous la torture sans avoir parlé.
Le prêtre sera fusillé au petit jour sur les hauteurs de Rome, tandis que les enfants sifflent
doucement leur air de ralliement avant de
redescendre vers la ville qui s’éveille…
Tourné avec de petits moyens dès 1945, juste
au lendemain de la Seconde guerre mondiale
et dans un pays exsangue, « Rome ville
ouverte » est l’exemple parfait de ce que l’on a
appelé le « néo-réalisme » dont Rossellini allait être le chef
La problèmatique
de file. Une façon
L’héroïsme, le don de sa vie… En des
d’exprimer avec une
totale humilité la
circonstances historiques particulières, le
souffrance
du
sacrifice exemplaire d’un prêtre, comme
monde.
une nouvelle Passion du Christ.
étions deux petits oiseaux amoureux, et quand sa mère nous a
retrouvés le soir, elle lui a donné
une claque ! J’ai vu dans les yeux
de mon amie qu’elle n’avait même
pas eu mal ! Le monde des adultes
m’a paru bien pauvre.Depuis,cette
fille m’appelle à chacun de mes
anniversaires !
En quoi les frères de Saint Luc vous
ont-ils marqué ?
Ils étaient extraordinaires ! Ils nous
ont épaulés. Quand j’en suis parti,
le frère directeur m’a envoyé un
courrier me disant « Les portes du
noviciat te seront toujours ouvertes ». Je n’avais pas compris à
l’époque et quelques années plus
tard, je lui ai rendu ce qu’il m’avait
proposé. C’est troublant. J’ai toujours voulu être acteur, et en 5e je
m’arrêtais prier dans les églises
pour que ce vœu se réalise.
Vous arrive-t-il encore de prier ?
Est-ce que je prie ? Un ami m’a écrit
ceci qui m’a touché : « Quand tu
joues, on voit que tu pries. » J’ai un
rapport à la spiritualité par
moments. J’ai été injuste avec ça,
mais je m’apaise depuis deux ans.
Autre fait troublant : dans mon
groupe de copains à Vincennes, il
y avait un prêtre. Quand je suis
rentré du Jura où je venais de
tourner le 1er épisode de Louis Page,
j’ai reçu un courrier où il me racontait son pèlerinage sur les chemins
de Saint Jacques. J’ignorais son
projet, il ignorait le mien. J’ai noté
des détails qu’il décrivait - sa façon
de marcher et de ne pas courir - qui
m’ont servi. « Quand tu es prêtre,
tu vas au-devant des gens, mais
sans précipitation. Ce sont des
choses déterminantes. »
Votre définition du prêtre ?
Un accompagnateur. Quelqu’un
qui prie. Avec beaucoup de souffrance. Pas mal de prêtres m’ont
dit l’importance de la prière pour
vivre leur solitude. Pour le dernier
épisode, j’aurais aimé que Louis
Page retourne chez les trappistes
et arrête d’être un serviteur social
pour retourner à la prière, dans un
endroit retiré. Le dernier épisode
n’a pas été tourné.
Recueilli par Véronique Durand
Ma nuit chez Maud 1969
Foi, amour et fidélité :
le long dialogue nocturne
4
Jean-Louis est un ingénieur célibataire, récemment rentré de l’étranger, qui vit à Clermont-Ferrand. A
quelques jours de Noël, il remarque à la messe une jeune femme blonde. Coup
de foudre : il lui voue aussitôt un amour exclusif et décide qu’elle sera sa femme sans rien
savoir d’elle. Vidal, ancien camarade de lycée
devenu professeur de philosophie et libre penseur, invite Jean-Louis à dîner le soir de Noël
Réalisateur : Eric
chez une amie, doctoresse divorcée, Maud.
Rohmer.
La soirée se passe en longues discussions sur
Casting : Avec Jeanle mariage, la morale, la religion, la philosophie
Louis Trintignant,
de Pascal. Discussions à trois, puis à deux. L’état
Françoise Fabian,
des routes oblige Jean-Louis à passer la nuit
Marie-Christine Barchez Maud.
rault, Antoine Vitez .
Tour à tour se manieront sincérité et séduction, mais jamais la barrière platonique ne sera
franchie, sinon un chaste baiser au petit matin.
Le lendemain, Jean-Louis retrouve Françoise, la
jeune femme blonde.
Un peu plus tard, il lui propose de l’épouser et
celle-ci après s’être rebiffée (elle sort d’une
liaison avec un homme marié) accepte. Cinq
années plus tard, le hasard veut que Françoise,
Maud et Jean-Louis
devenu père de
famille se croisent
La problèmatique
sur une plage. Ils
Opposition entre ascétisme et légèreté,
échangent des proquestions sur les exigences de la foi et
pos anodins, avant
que certaines vérités
considérations sur l’amour, la fidélité, et
n’apparaissent... réflexion sur le « pari de Pascal ».
I
I
Croix du Nord supplément gratuit au n°2154 16 au 22 avril 2010
I3
le froid de l’hiver,
6 Dans
cet appel qui retentit…
Hiver 54 1989
Il n’avait jamais fait aussi froid
en France depuis l’hiver de
1880 ! Nous sommes en 1954,
et un bébé vient de mourir de
froid chez les compagnons
d’Emmaüs. Une communauté
au sein de laquelle l’abbé
Pierre, ancien aumônier des
Résistants du Vercors et
député, accueille dans une
grande maison de Neuilly-Plaisance acquise avec ses indemnités parlementaires tous les
« cabossés de la vie ». Récupération et recyclage des déchets
sont les formes d’activité de
cette petite communauté. A la
suite de cette mort scandaleuse, l’abbé Pierre adresse
une lettre ouverte au Ministre
du Logement, le suppliant de
venir à l’enterrement découvrir la misère qu’il ne sait pas
soulager : le ministre viendra !
Quand un peu plus tard, une
femme expulsée de son loge-
ment meurt sur un trottoir de
la capitale, il lancera un appel
pathétique sur Radio-Luxembourg, secouant d’innombrables auditeurs. C’est ce qu’on
appellera « l’insurrection de la
bonté ».
Avec Lambert Wilson dans le
rôle de l’abbé Pierre, Denis
Amar fait revivre l’actualité de
l’hiver 54, à travers l’action
d’un prêtre passionné de justice et de vérité. Un film respectueux des faits et qui
résonne particulièrement par
rapport avec l’actualité, alors
que les morts de froid du
rigoureux hiver 2010 se comptent pas dizaines.
Révolté par l’indifférence
d’une société oublieuse de ses
exclus, c’est un prêtre qui
appelle à cette charité évangélique par laquelle le Christ préférait les « petits », les
« méprisés ».
UnE séance pour le caté
Pour faire découvrir à la nouvelle génération qui était l’Abbé
Pierre, prêtre engagé, mais aussi homme politique et
fondateur de la communauté Emmaüs, décédé en janvier
2007. Cette séance est réservée aux équipes de caté de CM 1
suivie d’un goûter et d’une rencontre avec des membres
d’Emmaüs. Séance gratuite à 14 h 30 au Fresnoy à Tourcoing.
Sous le soleil de Satan 1987
Ciels du Nord et lutte
entre le péché et la grâce
5
En portant à l’écran le premier
roman de Georges Bernanos,
publié en 1926, « Sous le soleil de
Satan », Maurice Pialat a reçu en
1987 la palme d‘Or du festival de Cannes. L’histoire de l’abbé Donissan, un homme qui doute
de sa vocation malgré le soutien de son confrère,
l’abbé Menou-Segrais. Lorsque la jeune Mouchette tue son amant, tout le monde croit que
celui-ci s’est suicidé. Mais elle se tourne vers lui,
Réalisateur : Maurice l’abbé, qui l’accable et la pousse au suicide. Un
Pialat.
soir, sur une route de campagne, il croise un
Casting : Avec Gérard maquignon dans lequel il reconnaît Satan.
Depardieu, Sandrine
Nommé curé de Lumbres, l’abbé Donissan est
Bonnaire, Alain
considéré comme un saint par ses paroissiens
Artur, Yann Dedet...
et en échange du salut de son âme, il accomplit
un miracle. Peu après, l’abbé Menou-Segrais le
retrouve mort dans son confessionnal.
Le film n’avait pas fait l’unanimité auprès du
public et de la presse, et la palme d’Or a été
remise à Maurice Pialat sous les huées de
l’assistance. C’est alors que le cinéaste avait
lancé le poing levé cette phrase restée célèbre : « Si vous ne m’aimez pas, je peux vous
dire que je ne vous aime pas non plus !». Le
propos du film n’a
visiblement pas été
compris par tous. Ce
La problèmatique
combat du péché et
« Un abbé éperdu et fruste, comme encombré
de la grâce n’était
de Dieu » : telle est l’image donnée par l’abbé
pas au cœur des
Donissan. Mais c’est dans l’obscurité, dans la
préoccupations des
festivaliers…
grisaille du monde, que peut éclore la grâce.
4I
I
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Croix du Nord supplément gratuit au n°2154 16 au 22 avril 2010
I Le prêtre fait son cinéma
Quelle image avez-vous du prêtre au cinéma ?
Soline, 30 ans, secrétaire de direction, Lille
« Un personnage caricatural,
en dehors de la réalité »
« Le premier film qui me vient à l’esprit, c’est Amen. L’ histoire
d’un homme d’église confronté à des choses horribles... Dans ce
film, le prêtre n’est ni caricatural, ni effacé, ni moqué, c’est rare
au cinéma ! En général, il est dépeint comme une personne en
dehors de la réalité, ou alors on en fait un personnage comique,
comme dans le cinéma italien. »
Claudine, 21 ans, hôtesse de caisse, Lille
« Loufoque et déjanté…
comme Rabbi Jacob ! »
« Ca peut sembler bizarre mais je pense tout de suite à Rabbi
Jacob. Ce n’est pas un prêtre, c’est un rabbin mais il a ce côté
loufoque et déjanté qu’on colle souvent aux prêtres au cinéma.
Dans Rabbi Jacob, le personnage vous donne plus envie de
danser que de prier ! »
Frédérique, 31 ans, professeur de Lettres,
Valenciennes
« Un acteur social »
« Je pense à L’ Exorciste, c’est une vision assez américaine du
prêtre. Un homme en crise qui retrouve la foi. Dans le film il a
plutôt une fonction sociale que religieuse. Il a un rôle important
dans la société, il travaille dans un centre de délinquants, c’est
vraiment un acteur social. Et petit à petit il va retrouver la foi. »
Annette, 65 ans, retraitée, Lille
« Un prêtre qui m’a marqué
au cinéma ? »
« J’ai du mal à me souvenir d’un personnage ou d’un film en
particulier mais dans l’ensemble, je pense que le cinéma donne
des prêtres une vision plutôt négative. Ce qui me vient à l’esprit,
c’est l’image du prêtre torturé, et non celle du prêtre serein. »
Doute 2008
Antoine, 26 ans, contrôleur des impôts, Lille
« Omniprésent »
« Au cinéma, le prêtre est
rarement un personnage
principal, pourtant,
quand on y pense, il y est
omniprésent. Les films
en donnent une image
très manichéenne, le
prêtre peut aussi bien
incarner le mal et être
un personnage très noir,
qu’être le cliché du bon
prêtre serviable. Je me rappelle du prêtre dans
Le Bon, la Brute, et le Truand, il est plus nuancé.
Il représente le bien, mais son frère est un
bandit. »
Louise, 21 ans, étudiante,
Arras
« Anachronique »
« Le prêtre qui m’a le
plus marquée, c’est celui
de Roméo et Juliette. Le
personnage est détourné
par rapport au livre.
Il est complètement
anachronique avec son
look décalé. Il se balade
torse nu avec une boucle
d’oreille, rien à voir
avec Shakespeare ! En
fait, il ne ressemble pas à un prêtre mais à un
illuminé. »
Recueilli par Noémie Delchambre
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Envoyez vos réactions et commentaires à Croix
du Nord, 33 rue Négrier - BP 29 - 59009 Lille cedex
ou par mail à [email protected]
Léon Morin, prêtre 1961
Un prêtre soupçonné,
de graves accusations
Telle est prise
qui croyait prendre
1964, dans une école catholique du
Bronx, St Nicholas. Le père Flynn,
un prêtre charismatique et entraîneur de basket qui tente de chambouler les rigoureuses coutumes de l’école, est
soupçonné d’avoir pratiqué des attouchements
sur un garçon noir de 12 ans. Sœur Aloysius
Beauvier (Meryl Streep), directrice de l’école au
gant de fer qui croit dans le pouvoir de la crainte
et de la discipline, a des doutes sérieux sur la
Réalisateur : John
moralité du prêtre mais ne parvient pas à étaPatrick Shanley.
blir les preuves nécessaires à son renvoi.
Casting : Avec Meryl
Quand sœur James, simple et naïve, vient lui
Streep, Philip Seyraconter un épisode impliquant le père Flynn et
mour Hoffman, Amy un garçon de l’école, sœur Aloysius estime que
Adams...
ses soupçons sont confirmés. Elle part donc en
guerre contre le prêtre, bien déterminée à le
démasquer. L’aumônier accusé va tenter de se
disculper, mais sœur Aloysius n’a pas dit son
dernier mot. Le doute s’installe. Quelles en
seront les conséquences ? Et si tout cela n’était
rien d’autre qu’un malentendu ?
Le « doute » dont il est question dans le titre
reste constamment présent : le cinéaste se
garde bien de trancher. Entre les certitudes de la
directrice et l’innocence proclamée du
prêtre, où est la
La problèmatique
vérité ? Fragilité du
Un film qui s’inscrit dans une actualité
témoignage humain,
danger des « convicbrûlante pour l’Église, et qui montre bien
tions intimes » sans
la fragilité du témoignage humain grâce à
la composition de deux grands interprètes. preuves…
À l’origine, « Léon Morin, prêtre »
est un roman de Beatrix Beck qui
a obtenu le prix Goncourt en
1952.
Pendant l’Occupation, Barny, une jeune
femme passionnée vit dans une petite ville de
province où s’est repliée l’entreprise de cours
par correspondance pour laquelle elle
travaille.
À la fois intelligente et frustrée, Barny élève
Réalisateur : Jeanseule sa petite fille France. Incroyante, elle
Pierre Melville.
décide un jour de braver un prêtre qu’elle choiCasting : Avec Jeansit au hasard. Et Barny se trouve prise au
Paul Belmondo,
piège… Léon Morin (Jean-Paul Belmondo) est
Emmanuelle Riva,
jeune, beau, fort et intelligent lui aussi. Il sait
Irene Tunc...
user de sa force morale pour indiquer à Barny
les chemins de la conversion.
Mais les deux personnages, qui n’évoluent pas
sur le même plan, ne se rencontreront pas.
Barny s’éprend violemment de Léon Morin.
Cependant celui-ci, au cours des rencontres
qui les opposent quotidiennement et tout en
estimant à sa juste valeur son interlocutrice,
sait lui résister.
Quand survient la Libération, les routes de Barny
et de Léon Morin se
séparent brusquement. La vie les éloiLa problèmatique
gne à jamais. Et le
« Par passion pour un prêtre, elle risque tous
prêtre a le dernier
mot : « On se reverra…
les tourments de l’enfer », proclamait l’affiche
Pas dans ce monde,
(datée !) du film. Confrontation amoureuse
dans l’autre ! »
et religieuse, entre Ciel et terre…
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Programme
Séance, débats et tarifs
La messe est finie de Nani Moretti.
Vendredi 23 avril, 19 h 30, au Fresnoy à Tourcoing. Lancement
officiel du festival, en présence de Mgr Ulrich, Mgr Coliche,
PThierry Vandemoortele et Philippe Rocher, de l’association
catholique mondiale pour la communication. Tarif plein :
5 €, tarif réduit : 4,50 €, tarif adhérent : 4€.
Gran Torino de Clint Eastwood.
Dimanche 25, 18 h, au cinéma Le Flandrio à Bailleul, suivi
d’un débat avec le frère Benoît Ente, dominicain. Tarif plein :
6,40 €, tarif réduit : 5,20 €.
Rome ville ouverte de Roberto Rossellini.
Dimanche 25, 20 h, cinéma L’Univers à Lille. Débat avec Philippe Rocher. Séance : 3 €.
Louis Page avec le comédien Frédéric Van Den Driessche.
Mardi 27 avril, 20 , à La Catho (60 bb Vauban) à Lille. Suivi
d’un débat avec le comédien, le père Bruno Cazin, vice-recteur de la Catho et le père Gonzague Cuvelier, de la Cité de
l’évangile. Gratuit ; participation aux frais.
Hiver 54 de Denis Amar.
Mercredi 28, 14 h 30, au Fresnoy à Tourcoing. Séance catéfamilles, entrée gratuite (Voir détails page 3).
Doute de John Patrick Stanley.
Mercredi 28, 20 , au cinéma Le Flandria à Bailleul. Suivi d’un
débat avec Catherine Ternynck, psychanaliste, le P. Dominique Foyer, théologien et le P. Frédéric Lefèvre, prêtre du
diocèse de Lille, responsable du service des vocations. Tarif
plein : 6,40 €, tarif réduit : 5,20 €.
Ma nuit chez Maud d’Éric Rohmer.
Mercredi 28, 20 h 30, au cinéma Gérard Philipe, à Roncq.
Suivi d’un débat avec Loïc Barché du service chrétien du
cinéma. Séance : 3 €.
Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat.
Jeudi 29, 20 h, cinéma Sportica à Gravelines. Suivi d’un débat avec Loïc Barché du service chrétien du cinéma. Séance :
3,50 €.
Léon Morin, prêtre de Jean-Pierre Melville.
Jeudi 29 avril, 20 h, cinéma Le Kino, à Villeneuve d’Ascq. Débat avec Mélisande Leventopoulos, doctorante en histoire,
thèse sur les enjeux religieux du cinéma.
Tarif plein : 5,50 €, Tarif réduit : 4,50 €, Tarif Pass’Culture : 4 €,
Tarif abonnés : 3,50 €, Tarif super réduit : 2,50 €.
Raining stones de Ken Loach.
Samedi 1er mai, 17 h, au Fresnoy à Tourcoing. Débat de clôture
en présence du P. Vandemoortele et Philippe Rocher.
Tarif plein : 5 €, Tarif réduit : 4,50 €, Tarif adhérent : 4 €.
Raining stones 1993
Rien n’est trop beau
pour une communion
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Le film de Ken Loach, prix du jury
lors du festival de Cannes 1993,
emprunte son titre en forme de
métaphore à un proverbe britannique : « Chez les ouvriers, il pleut des pierres
sept jours sur sept ». Cinéaste « social », Ken
Loach se fait cette fois encore le porte-parole
des déshérités.
Bob, le personnage principal, vit avec son
épouse Ann et sa fille Coleen dans une banRéalisateur : Ken
lieue misérable de Manchester. Lui et son ami
Loach.
Tommy se débrouillent pour vivre du mieux
Casting : Avec Bruce
qu’ils peuvent dans la Grande-Bretagne des
Jones, Julie Brown,
années Thatcher. Le film dépeint la précarité
Ricky Tomlinson...
de la société anglaise de l’époque en montrant
tous les emplois que Bob est obligé d’exercer :
de la revente de viande au marché noir jusqu’à
être vigile dans une discothèque. En dépit
d’une situation pour le moins précaire, Bob,
catholique, tient par-dessus tout à acheter
une robe de communion neuve pour sa fille,
afin de ne pas perdre la face devant le voisinage. Même si son épouse et le père Barry
tentent de le raisonner ! Dans ce combat pour
la dignité de sa famille, il va prendre de terribles risques à coups
de dettes et de petites arnaques, se
La problèmatique
heurter à la cupidité
« Un film sur ces humbles qui tentent de
et à la violence mais
aussi redécouvrir la
garder le respect d’eux-mêmes » dit Ken
solidarité et la
Loach. Et ne partagent pas forcément la
fraternité.
vision du curé de la paroisse…

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