La carte topographique

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La carte topographique
ELÉMENTS POUR LA RÉALISATION DU COMMENTAIRE DE CARTE TOPOGRAPhIqUE
Partie I
L'approche physique
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ELÉMENTS POUR LA RÉALISATION DU COMMENTAIRE DE CARTE TOPOGRAPhIqUE
Chapitre 1
Historiques et modalités de réalisation
d’une carte topographique
Petit historique de la cartographie
Le mot « carte » est apparu entre le xVe et le xVIe siècle et provient du
latin charta ; il s’est ensuite transformé en mappa puis a donné map en
anglais et mapa en espagnol.
Les premières esquisses cartographiques furent égyptiennes, puisque
des tablettes en argile représentant des fragments de plans ont été mises à
jour – à la fin du xIxe siècle – sur les bords du Nil ; ces travaux étaient particulièrement imprécis.
C’est en Grèce qu’apparurent les premières représentations fiables,
puisque entre 610 et 547 avant Jésus-Christ, Anaximandre représentait
déjà la terre de façon cylindrique ; quelques décennies plus tard, Pythagore
la représenta comme une sphère sans support1.
Au IIe siècle après Jésus-Christ, Ptolémée dirigea la réalisation d’une
cartographie de la Méditerranée qui, après avoir été découverte au xVIe
siècle, fut reproduite et servit de référence jusqu’au xVIIe siècle.
Si les Romains cartographièrent les principales régions de leur
empire, ils ne firent pas progresser la science cartographique. Au MoyenÂge, la cartographie sombra dans l’oubli et ce n’est qu’à la Renaissance –
et particulièrement au xVIIe siècle – qu’elle conquit ses lettres de noblesse
avec les portulans2.
Ce sont les besoins3 des États modernes, désireux de connaître leurs
ressources minières, foncières et fiscales, qui facilitèrent les progrès techniques et permirent la réalisation de cartes précises à l’image de celle de
Cassini.
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On est loin des représentations de Thalès (625-547 avant Jésus-Christ) qui comparait la terre à un navire flottant sur un immense océan.
Cartes marines dont le tracé des côtes est assez précis.
Besoins militaires en premier lieu.
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PASCAL SAffAChE & CÉDRIC AUDEBERT
Petit historique de la couverture cartographique française
La première couverture cartographique française fut lancée en 1747 et
achevée en 1759 (figure 1). Il s’agit d’une carte en couleur, véritable chefd’œuvre, constituée de 180 feuillets (1/86 400) gravés sur cuivre. Dénommée carte de Cassini du nom de son auteur, cette carte est la première
représentation réaliste de la topographie4 française.
Au xIxe siècle – pour des raisons militaires – Napoléon ordonna le
remplacement de la carte de Cassini par celle « d’état-major » (figure 2).
Commandée en 1817 et livrée en 1870 – bien que certaines planches parurent en 1880 – cette carte au 1/80 000 était constituée de 267 feuillets en
noir et blanc gravés sur cuivre. La topographie y apparaissait à l’aide d’un
système de hachures ; bien que peu précise, cette technique permettait
d’avoir une vision globale du paysage dès le premier coup d’œil. Cette
carte, réalisée au moyen de procédés très sophistiqués pour l’époque, fut
imitée par de nombreux États européens ; ainsi, naquirent les cartes suisse
(1/100 000), allemande (1/100 000) et britannique (1/63 360).
Au début du xxe siècle, les échelles cartographiques étaient fluctuantes puisqu’une carte topographique fut publiée en 1900 à l’échelle du
1/50 000, puis une seconde en 1922 à l’échelle du 1/20 000.
En 1940, lors de la création de l’Institut géographique national (IGN),
mais surtout à partir de 1962 toutes les cartes topographiques françaises
furent réalisées à la même échelle : 1/25 000 ; l’objectif était de se conformer aux standards internationaux (normes de l’Organisation du traité de
l’Atlantique nord).
hormis sa série bleue qui se compose de 2 000 cartes topographiques
à l’échelle du 1/25 000, l’IGN dispose actuellement de trois autres séries :
- une série orange (1100 cartes) au 1/50 000 ;
- une série verte (74 cartes) au 1/100 000 ;
- et une série rouge (16 cartes) au 1/250 000.
Les étapes de réalisation d’une carte topographique
Pour réaliser une carte topographique, sept étapes doivent impérativement être respectées :
1 Il faut disposer d’un réseau de points géodésiques, c’est-à-dire de
points dont on connaît les coordonnées latitudinales et longitudinales5 avec exactitude. En france, 100 000 points répartis uniformément sur l’ensemble du territoire constituent ce maillage
géodésique. A titre d’exemple, la croix du Panthéon à Paris est un
point géodésique.
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Description des lieux. En réalité, il s’agit d’une description de tous les lieux
remarquables et pas seulement du relief. La topographie traite donc du physique et
de l’humain.
Ces coordonnées sont appelées coordonnées géographiques.
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Il convient de disposer de références altitudinales ; en clair, il faut
connaître avec précision (au mètre près) les altitudes des principales unités de relief. En france, 400 000 points ont ainsi été
mesurés ; ces derniers sont frappés d’une pastille en cuivre ovale
portant les initiales NGf : Nivellement général de france. L’altitude de ces différents points est établie à partir du niveau de la
mer (niveau zéro) ; le marnage6 fluctuant en fonction des régions,
le niveau zéro est fourni par le marégraphe du port de Marseille.
3 Pour obtenir des informations topographiques précises, des campagnes de photographies aériennes sont réalisées. L’échelle des
photographies dépend de l’altitude à laquelle elles sont prises et
de la focale utilisée. Dans certains cas, les photographies
aériennes sont remplacées par des images satellitaires.
4 En croisant l’ensemble de ces données on établit, par couches
successives, une première ébauche cartographique. Les informations photographiques sont traitées en stéréoscopie – visualisation en relief de deux cartes du même secteur ; c’est ce que l’on
appelle la photogrammétrie.
5 Toutes les informations topographiques et anthropiques ne pouvant apparaître lors de l’analyse photogrammétrique, des campagnes de vérification ou de récolte d’informations
supplémentaires sur le terrain s’avèrent nécessaires. Ce travail est
particulièrement utile pour la toponymie.
6 Lorsque toutes les données (naturelles et anthropiques) ont été
collectées et vérifiées, ces informations sont gravées sur un film
plastique ; la précision de cette opération est du dix millièmes de
millimètre.
7 En définitive, le film plastique sert de matrice et permet la reproduction de la carte à plusieurs milliers ou dizaines de milliers
d’exemplaires.
La réalisation d’une carte topographique mobilise plusieurs centaines
de personnes, et entre le moment où on décide d’en réaliser une et sa parution, 3 à 5 ans s’écoulent généralement.
Les systèmes de projection
Le passage d’un état sphérique (forme globale de la terre) à une représentation cartographique plane, se fait par l’intermédiaire d’un système de
projection. Il s’agit d’une procédure mathématique faisant correspondre
les coordonnées géographiques à des coordonnées cartésiennes [x, y].
Il existe trois principaux types de projections : cylindrique, conique
et elliptique. Toutes présentent des avantages et des inconvénients : certaines déforment les angles, d’autres les surfaces ou les deux à la fois.
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Différence de hauteur entre les marées haute et basse.
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PASCAL SAffAChE & CÉDRIC AUDEBERT
La projection cylindrique
Appelée plus communément projection cylindrique de Mercator
(1569), cette technique se résume comme suit : le plan de projection est un
cylindre qui enveloppe la terre (figure 3) ; il en découle une déformation
des distances, proportionnelle à l’éloignement de l’équateur et une
absence de cartographie des zones polaires.
La projection conique
Le plan de projection est un cône qui enveloppe la sphère terrestre
(figure 4). Cette projection, appelée aussi projection conforme de Lambert
(1772), est utilisée par l’IGN pour les cartes topographiques au 1/25 000,
1/50 000 et 1/100 000.
La projection elliptique
Ce type de projection se fait sans aucun contact avec la sphère terrestre (figure 5). C’est comme si on ouvrait puis on déroulait le globe. Les
surfaces sont respectées, mais les régions périphériques sensiblement
déformées.
quel que soit le mode de projection employé, les cartes topographiques françaises présentent les mêmes normes de présentation.
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