maigres et musculeuses - Fondation images et société
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maigres et musculeuses - Fondation images et société
64 Société Le Matin Dimanche | 14juin 2015 Ces belles quinq maigres et musculeuses Image «Le printemps des quinquas», «La deuxième jeunesse des stars»… Les magazines ne cessent d’encenser la fraîcheur de ces icônes de la maturité, dont les corps sont pourtant un peu trop sveltes pour être honnêtes. Geneviève Comby genevieve.comby @lematindimanche.ch O n loue leur beauté. Les magazines féminins les portent aux nues. Elles sont pétillantes, pimpantes, toniques, rayonnantes. On se pâme devant ce «Printemps des quinquas», cette «Deuxième jeunesse des stars»… Difficile, en effet, face à Julianne Moore 54 ans une Julianne Moore ou une Madonna, d’imaginer qu’elles ont chacune leurs deux jambes fuselées bien ancrées dans la cinquantaine. En 2009 déjà, Sharon Stone semblait s’engouffrer dans une faille temporelle. L’actrice américaine s’affichait en une de Paris Match, avec un insolent «J’ai 50 ans, et alors!» Les lecteurs ébahis découvraient qu’à l’âge d’être grands-mères certaines femmes ont encore les seins qui pointent vers le ciel, une silhouette de liane, ferme et svelte comme une championne de gymnas- Sharon Stone 57 ans «C’est un corset esthétique impossible» Eva Saro, responsable de la Fondation Images et société Robin Wright 49 ans Photos: Anne-Christine Poujoulat/Jason Merritt/Daniel Mihailescu/Michael Tran/Valérie Macon/Antonio de Moraes Barros Filho/Loïc Venance/Getty Contrôle qualité tique et la peau impeccablement souple. Six ans plus tard, la star hollywoodienne semble trouver tout cela parfaitement normal. A lire ses interviews, une chose l’inquiète par-dessus tout, que ses lèvres s’affinent avec l’âge et que son rouge file désormais trop facilement. Bien sûr, la génétique a son mot à dire, certaines sont naturellement plus élancées que d’autres. Mais, dépourvus du moindre signe de flottement dans le haut des bras, d’un soupçon d’épaississement de la taille ou de relâchement des tissus, les corps secs et musculeux de nos icônes de beauté matures se trouvent auréolés d’un charme aussi fascinant que suspect. Voilà donc venu l’ère des femmes «rayons X», pour reprendre l’expression qu’utilisait, en 1987 déjà, l’impitoyable romancier américain Tom Wolfe dans son célèbre «Bûcher des vanités» lorsqu’il évoquait les mondaines new-yorkaises ultrasveltes, quasi-squelettiques à force de régime et de musculation. Emblématique de ce modèle de minceur inaltérable, la série télévisée «Desperate Housewives» – qui met en scène une poignée d’héroïnes, la quarantaine bien tapée, mais dissimulée derrière un physique d’adolescente. Devenu culte, le feuilleton est éga- lement entré dans le langage médical de certains psys anglo-saxons qui citent le Desperate Housewives Syndrome, en référence à la pression subie par les femmes mûres confrontées aux canons esthétiques véhiculés par les médias et les troubles alimentaires dont elles sont victimes, au même titre que les adolescentes et les jeunes femmes. Sans les imaginer forcément anorexiques, on voit bien nos stars quinquagénaires manger du blanc de poulet et suer sur un tapis de course. Avec son franc-parler, l’actrice Kim Catrall, rendue célèbre grâce à la série «Sex & the City» lâche volontiers, sur le ton de la boutade, qu’elle est «au régime depuis 1974». Et pourtant, la comédienne anglo-canadienne n’a jamais fait partie du carré VIP des créatures médiatiques les plus filiformes. A 59 ans, elle admet néanmoins suivre ses trois à quatre entraînement cardio toutes les semaines. «Un physique de jeune sportif» L’idéal de beauté mature qu’incarnent les stars émaciées représente un «corset esthétique impossible», pour Eva Saro, responsable de la fondation genevoise Images et société. L’organisation a pour but d’aider le grand public – et pas uniquement les jeunes – à décrypter les images que diffusent les médias. Elle a récemment monté l’exposition «Eve et Adam ont 60 ans», consacrée à la représentation des seniors dans la publicité. «Les modèles de beauté sont beaucoup Madonna 56 ans Société 14juin 2015 | Le Matin Dimanche quas Radar à toc Nos singeries Renata Libal Journaliste Elles assument leur âge Pas de muscles démesurément saillants, mais des hanches épanouies pour l’actrice italienne Valeria Golino, 49 ans, et sa consœur la Française Noémie Lvovsky, 50 ans, qui promenaient tranquillement leur silhouette de femmes mûres sur le tapis rouge à Cannes, en mai dernier, sans chercher désespérément à défier le temps qui passe. plus diversifiés pour les hommes que pour les femmes, qu’elles soient jeunes ou moins jeunes», constate Eva Saro. Vouloir conserver une silhouette conforme aux canons actuels relève, selon elle, d’une lutte incessante contre nature. «Certaines femmes en arrivent à un contrôle tel de leur corps que celui-ci finit parfois presque par ressembler à Demi Moore 52 ans un physique de jeune sportif. Auquel on ajoute des talons aiguilles afin de rassurer sur sa féminité!» On n’a rien sans rien. Régime, Botox, chirurgie esthétique constituent la sainte trinité des déesses modernes qui défient le temps pour conserver leur place en haut de l’affiche. Car l’âge ne joue pas plus en leur faveur qu’en celle des autres. En prenant de l’âge, l’être humain produit moins d’hormone de croissance, celle-là même qui intervient dans la fabrication de la masse musculaire. En d’autres termes, la masse maigre (le muscle) diminue tout au long d’un processus qui, si l’on n’y prend pas garde, conduit à une accumulation de graisse. La plupart des études montrent que, chez les femmes, le poids augmente de façon linéaire d’environ 10 kilos entre 20 et 56 ans. Autour de l’âge de 50 ans, périménopause et ménopause entraînent inévitablement une modification du métabolisme. «Au moment de la fin de l’ovulation, la femme ne produit plus de progestérone, mais elle est bourrée d’œstrogènes, rappelle le Dr Catherine Waeber Stephan, spécialiste en endocrinologie. C’est ce que j’appelle la fièvre hormonale, qui favorise l’accumulation de graisse et la rétention d’eau.» S’ensuit un fléchissement du niveau d’hormones mâles. «Les femmes aussi en produisent, explique la spécialiste. Elles les transforment en hormones femelles grâce à une enzyme, mais une petite partie passe tout de même dans le système sanguin. Leur disparition contribue donc aussi à réduire la masse musculaire, si l’on n’adapte pas son activité physique.» Affronter la cinquantaine ne se limite pas à des questions de poids, c’est toute la morphologie des femmes qui se transforme sous l’effet des variations hormonales. La graisse aura, en effet, plutôt tendance à se loger autour de la taille, redessinant au passage les courbes et les galbes. «J’ai 50 ans, et alors»? Manger moins, faire du sport ou encore recourir à des hormones de substitution peut contribuer à neutraliser ces effets physiologiques, mais jusqu’à un certain point. Le cliché de Sharon Stone en une de Paris Match, lourdement suspecté d’avoir été retouché, avait fait couler beaucoup d’encre à l’époque. On apprenait d’ailleurs, quelque temps plus tard, que plusieurs rédactions sollicitées avait purement et simplement refusé de le publier. Le commerce du rêve continue de plus belle à se faire dans une joyeuse hypocrisie. «J’ai 50 ans, et alors»? Il y a peu de chance que l’actrice Maggie Gyllenhaal reprenne la rengaine de Sharon Stone dans quelques années. Elle qui, à 37 ans, vient de se faire remballer d’un casting au prétexte qu’elle était trop vieille pour jouer la maîtresse d’un homme de 55 ans. U Contrôle qualité 65 P uisque les beaux jours se sont installés (ouiii!), j’ai tout de suite passé un aprèsmidi en piscine, avec mon amie Charlotte. Du bleu, du chaud, des potins entre copines: en été, je ne crains aucun cliché. J’en suis même à voir envie de cocktails roses avec des parasols plantés dedans. Nous étions donc là, dans l’eau jusqu’à mi-corps, à vaguement pédaler des pieds, accoudées au rebord de béton: clapotis des vaguelettes, clapotis des propos, toutes deux avec les mêmes lunettes solaires sur le bout du nez. Enfin, quand je dis «les mêmes», ça ne devait pas tout à fait être vrai. A travers les miennes, je voyais un azur de carte postale, avec à peine trois nuages mousseux pour faire déco. Je voyais l’abeille sur le buisson pas loin, mon livre ouvert au pied de la chaise longue et chabada – rien que du charmant, version béate. Mais Charlotte, elle, n’avait visiblement pas droit à la même projection du monde sur l’écran de ses verres noirs. Ce qu’elle percevait, elle? Elle me l’a chuchoté dès qu’elle a posé son joli orteil verni sur le fond en carrelage: «T’as vu ces seins? Complètement refaits!» Hein? Quoi? Où? Moi, j’ai beau me retourner dans tous les sens (avec ma grande discrétion de maladroite…), je ne vois que dalle. Tout juste une dame en maillot vert. Non que les comparaisons anatomiques entre naturel et remodelé ne m’intéressent pas, mais je ne capte rien. Charlotte, en revanche, a développé une sorte de radar à toc. Tout comme les chauves-souris disposent d’un sonar qui leur fait percevoir les obstacles, mon amie détecte d’emblée tout ce qui a été modifié dans un corps humain. Du coup, la piscine devient un réservoir infini d’étrangetés et de surprises, par elle commentées. Là, une liposuccion qui commence à dater. Ailleurs une fesse suspectement rebondie. Et tiens, une rhinoplastie qui passe en brasse coulée! Pour peu, Charlotte serait capable de reconnaître la signature de tel chirurgien lémanique dans chacune des œuvres corporelles qui défilent, vulnérables, exposées, sous le fin tissu estival. Et chaque vision lui fait mal, lui fait peur, comme un rappel constant du temps qui passe et des pesanteurs. Comme si les cicatrices s’inscrivaient sur son propre corps, autant de défaites programmées et désespérantes. J’ai essayé de fondre mon regard dans le sien, mais échec sur toute la ligne. Je ne vois même pas quand des mains fatiguées trahissent un visage bien lissé. La seule chose que j’ai réussi à faire, durant cette séance d’observation rapprochée de la faune aquatique, c’est de me rôtir le décolleté, tendance steak oublié sur la braise. S’il y avait un reluqueur qui nous regardait reluquer, il a dû ricaner. Je me suis frotté les yeux, j’ai essuyé mes lunettes de tous les résidus de chlore et de crème, mais finalement, la conclusion s’est imposée: mon aveuglement relève de l’instinct de paix. L’été est plus doux en flou. Style L’objet de la semaine Plaisir instantané Dans une poche, un smartphone. Dans l’autre, la mini-imprimante Polaroid. Sans fil, sans encre et totalement nomade, l’impression immédiate de vos photos devient un jeu d’enfant. Fabienne Rosset Le principe $Ce n’est pas parce qu’on est à l’ère du tout numérique qu’on doit se refuser des joies simples. Comme celle d’imprimer un cliché juste après l’avoir pris. Comme ça, pour le plaisir de (se) faire plaisir. On prend une photo, on partage. Mais au lieu de le faire sur les réseaux sociaux, on le fait en l’imprimant. Sans fil, depuis son smartphone via Bluetooth, et sans encre sur un papier photo – le Zink Instant Paper – composé de cristaux qui se colorent à la chaleur. Et puisque chaque centimètre carré de nos poches et/ou sacs à main est compté, l’imprimante mobile Polaroid ZIP se fait mini et légère, en dessous de la barre des 200 g. Et puisque notre temps est précieux, elle imprime en une poignée de secondes. Le souvenir est immortalisé, glissé dans un portefeuille ou collé sur un frigo. La petite histoire Le look $C’est lors de vacances en famille que l’Américain $Sans chichi niveau technologie, Edwin H. Land, fondateur de Polaroid, a inventé l’appareil photo instantané, lorsque sa fille de trois ans lui demande pourquoi elle ne peut pas voir la photo qu’il vient juste de prendre d’elle. Nous sommes en 1943, la marque a six ans. Depuis, le logo arc-en-ciel (qui symbolise un spectre de couleurs) est resté gravé sur la rétine des aficionados du «Pola». Et même si la photo numérique a fait mal au concept au début des années 2000, le groupe s’impose aujourd’hui en misant sur le partage immédiat version 2.0. avec un unique bouton marche/arrêt, l’objet y gagne en classe. Sa robe glossy et ses angles arrondis ont été imaginés par Ammunition, un collectif de designers basé à San Francisco, avec à sa tête Robert Brunner, un ancien de chez Apple. On lui doit les casques audio Beats by Dr. Dre, entre autres succès. De quoi booster l’image vintage de Polaroid. Le regret $Les nostalgiques du «Pola» regretteront le format d’impression 5,08 x 7,62 cm. Sans l’emblématique cadre blanc qui va avec, mais qui peut être ajouté lorsqu’on bidouille l’édition de sa photo via l’application gratuite éponyme accompagnant l’imprimante. Idem pour les accros à Instagram, qui verront une partie de leurs clichés carrés dévorée à l’impression. Le prix $Compter 129.99 euros sur www.amazon.fr, et 29.90 euros pour un pack de 50 feuilles de Zink Instant Paper. Photos: DR