SIX OCULAIRES À GRAND CHAMP DE 10 MM AU BANC D`ESSAI

Transcription

SIX OCULAIRES À GRAND CHAMP DE 10 MM AU BANC D`ESSAI
TEST
LIRE,
VOIR
Il y a du neuf du côté des oculaires. Televue, Takahashi et Celestron lancent chacun de nouvelles gammes. Et Nikon
a fait son apparition sur ce marché. Toutes ces gammes comportent un 10 mm, focale que nous avons choisie pour
ce test. Un tour d’horizon complété par des modèles bien installés : l’Ethos chez Televue et le XW chez Pentax.
Jean-Luc Dauvergne
© J-L. Dauvergne
SIX OCULAIRES À
GRAND CHAMP DE 10 MM
AU BANC D’ESSAI
UN 10 MM POUR QUEL USAGE ?
Les oculaires de 10 mm sont particulièrement
intéressants pour les télescopes de type
Schmidt-Cassegrain, dont le rapport focale/
diamètre est de 10. Ils offrent un grossissement
dit résolvant : les plus fins détails sont visibles
72
tout en gardant un contraste élevé. Sur les
télescopes plus ouverts comme les Newton, les
oculaires de 10 mm offrent un grossissement
intermédiaire, intéressant pour détailler
les objets du ciel profond les plus lumineux.
JUINJUILLET
2013 2011
TELEVUE DELOS 10 MM : UNE RÉFÉRENCE
Les oculaires Delos sont les derniersnés de Televue. L’objectif annoncé du
fabricant est d’offrir une qualité élevée
en optimisant le confort de vision. Pari
réussi puisque cet oculaire arrive en
tête de notre classement. Côté optique,
c’est un sans-faute. Les images sont très
agréables. Sur un télescope ouvert à f/3,5,
les effets de l’aberration de coma (inhérent à cette formule optique) en bord de
champ sont peu sensibles. Seul reproche :
son champ limité.
Le confort de vision est au rendez-vous.
Televue annonce : “Vous l’aimerez au premier coup d’œil.” Ce n’est pas tout à fait
exact. Dans un premier temps, le centrage de l’œil peut apparaître difficile.
Un œilleton en caoutchouc améliore les
choses, mais ce n’est pas suffisant. Une
bague sur le corps de l’oculaire, à laquelle
on ne prête pas attention tout de suite,
peut se desserrer et permettre à la bonnette de coulisser vers le haut afin d’ajuster la distance entre l’œilleton et le verre
d’œil de l’oculaire. Une fois la bonne distance trouvée, la bague est resserrée pour
conserver le réglage. Et là, on trouve bien
le confort de vision promis.
Poids : 410 g
Nombre de lentilles : n. c.
Nombre de groupes : n. c.
Relief d’œil : 20 mm
Note : 16/20
TELEVUE ETHOS 10 MM : LA VALEUR SÛRE
Lors de notre précédent test d’oculaires
(C&E n° 489, février 2011), l’Ethos 13 mm
nous avait fait très bonne impression. Il en
va de même pour ce 10 mm, qui talonne le
Delos de la même marque dans le classement. Avec un champ de 100°, l’impression
d’immersion est garantie. Seul bémol : le
relief d’œil de 15 mm (lire p. 75, en bas).
Le confort de vision reste acceptable, mais
à cette distance, les cils touchent parfois le
verre d’œil et le salissent.
Revers de la médaille du champ large :
avec un télescope de Newton lumineux,
le défaut optique de coma est bien visible
hors axe. Nous avons testé l’Ethos sur le
télescope de 60 cm du Pic du Midi, ouvert
à f/3,5. Le défaut apparaît à la moitié du
rayon du champ et devient fort au bord.
Pour y remédier, il faut ajouter un correcteur de champ Televue Paracorr. Or,
cet accessoire de plus de 500 € alourdit nettement l’addition ! Et l’ensemble
peut facilement déséquilibrer un télescope de type Dobson. En revanche, nous
conseillons l’Ethos sans réserve pour une
lunette ou un télescope de type SchmidtCassegrain et Maksutov.
Poids : 500 g
Nombre de lentilles : 9
Nombre de groupes : 5
Relief d’œil : 15 mm
Note : 15/20
LE PRINCIPE
D’UN OCULAIRE
Objectif de la lunette
Rayon lumineux d’une étoile
Barlow
Axe optique
Oculaire
Rayon lumineux d’une étoile
JUIN 2013
Un oculaire est ni plus ni moins
qu’une loupe plus évoluée (un système
convergent). Les rayons lumineux
convergent au foyer de la lunette
(ou du télescope) et forment une image.
L’oculaire permet de la grossir. Les
rayons lumineux d’une étoile ressortent
parallèles, comme si nous observions
un objet à l’infini. Tous les oculaires testés
ici sont dotés à l’entrée d’une Barlow
intégrée (un système divergent). Sans
celle-ci, leur focale réelle serait beaucoup
plus longue. Cette astuce permet de
gagner nettement en confort de vision.
73
TEST
PENTAX XW 10 : DES COULEURS NEUTRES
La gamme XW de la marque Pentax
bénéficie d’une solide réputation. Elle
est souvent citée comme une référence
par les astronomes amateurs. Lors de
notre précédent test avec des oculaires
de 13 mm (voir lien web p. 77), Pentax
occupait la première marche du podium.
Ici, il n’arrive qu’en troisième place.
Ces oculaires sont notamment réputés
pour la neutralité des couleurs qu’ils
Poids : 390 g
Nombre de lentilles : 7
Nombre de groupes : 6
Relief d’œil : 20 mm
Note : 12/20
délivrent. Sur ce plan, le Pentax XW 10
ne déçoit pas. En fait, il est détrôné par
le Delos de Televue dont la philosophie
semble directement inspirée de la gamme
XW de Pentax : priorité à la performance
et au confort de vision en faisant une
concession sur le champ apparent limité
à 70°. Le Pentax perd des points sur ses
petits résidus de chromatisme. Celui-ci
est vraiment faible, mais la différence
constatée avec le Delos montre qu’il est
possible de faire mieux.
La mécanique sans jeu de l’œilleton
donne l’impression d’avoir entre les
mains une pièce d’un seul tenant. En
fait, la partie du haut se dévisse pour
ajuster sa position à l’observateur.
TAKAHASHI TAK10-UW : TROP CHER
Takahashi s’est lancé dans une gamme
d’oculaires avec un champ annoncé de
90°. Il se rapproche donc dans l’ambition
de l’Ethos de Televue. Quelques défauts
ne lui permettent pas de se hisser parmi
les premiers. Le plus problématique est
son faible relief d’œil. Il est difficile de
voir les bords du champ et les cils de l’œil
tendent à toucher le verre. Lorsque l’on
regarde dans l’oculaire, on a l’impression
de bien avoir un champ de 90°. Pourtant,
le champ réel couvert sur le ciel est plutôt proche de 80°. Nous avons constaté
une forte distorsion de l’image en bord
de champ (les détails sont étirés). Cette
aberration explique sans doute à elle seule
que le champ réel est plus petit que celui
annoncé. Autre petit défaut : la bonnette
vissante n’a pas de butée. Si on la dévisse
trop, elle s’enlève totalement, comme sur
le Nikon. Le problème est qu’ensuite elle
est très difficile à revisser.
Au bout du compte, le Televue Ethos à
peine plus cher est préférable pour qui
cherche avant tout un champ très large.
Poids : 450 g
Nombre de lentilles : 10
Nombre de groupes : 6
Relief d’œil : 12 mm
Note : 10,5/20
CHOISIR LA BONNE FOCALE
Pour choisir vos oculaires, vous devez
calculer le grossissement qu’il délivre,
valeur déterminante pour son usage
futur. Ce chiffre s’obtient en divisant la
focale du télescope par celle de l’oculaire.
Exemple : sur un télescope de 2 000 mm
de focale, un oculaire de 10 mm offre un
grossissement de 200 ×.
Vous devez disposer au minimum de trois
grossissements différents :
Le grossissement équipupillaire, égal au
74
diamètre du télescope divisé par 6
(ex. : 33 × pour un télescope de 200 mm),
permet à votre œil de capter le maximum
de lumière. Il est utilisé pour les
nébuleuses étendues et les galaxies.
Le grossissement applicable, égal au
diamètre du télescope, offre le meilleur
compromis en termes de luminosité,
de confort et de contraste (ex. : 200 ×
dans le cas d’un télescope de 200 mm).
Son usage est polyvalent.
Le grossissement maximal offre plus
de confort pour observer les planètes.
La “lecture” des détails est facilitée. Sa
valeur équivaut à 2,4 fois le diamètre du
télescope (ex. : 480 × pour un 200 mm).
Un ciel très stable est indispensable.
Enfin, les observateurs apprécient
souvent d’avoir un quatrième oculaire.
Utile pour les objets du ciel profond
lumineux, il a un grossissement compris
entre les deux premiers cités.
JUIN 2013
NIKON NAV10-SW : BON POUR LES DOBSON
En tant que fabricant d’oculaires, Nikon
est une nouvelle marque sur le marché
français. De prime abord, on note une
petite astuce appréciable : les bouchons
avant et arrière sont reliés par deux cordons en caoutchouc et restent ainsi parfaitement maintenus. Tous ceux qui ont déjà
retrouvé l’un de leurs oculaires avec un
bouchon en vadrouille dans leur fourretout astro apprécieront. L’ergonomie est
plutôt bonne. On regrette simplement
qu’il y ait un peu de jeu au niveau de la
bonnette vissante et l’absence de butée en
bout de course. Si vous dévissez trop, elle
s’enlève. Des six oculaires testés, c’est le
plus trapu, mais aussi le plus léger. Il peut
donc séduire les utilisateurs de Dobson.
Sur ce type d’instruments, les étoiles
restent assez nettes jusqu’en bord de
champ sans avoir besoin de recourir à un
correcteur. Son seul petit point faible est
son champ limité. Cela peut être une gêne
sur les instruments non motorisés. Pour
le reste, comparé aux autres oculaires, il
se retrouve dans le peloton du milieu avec
une note honorable.
Poids : 294 g
Nombre de lentilles : 6
Nombre de groupes : 8
Relief d’œil : 18,5 mm
Note : 11/20
CELESTRON LUMINOS : UNE NOTE À NUANCER
Nouveau chez Celestron, le Luminos est
un oculaire à grand champ léger. Son
ergonomie a été particulièrement soignée, avec un œilleton que l’on sort ou
rentre grâce à une bague hélicoïdale sur
le fût de l’oculaire. C’est le système mécanique le plus original dans les oculaires de
ce test. Son champ apparent est important pour un poids et un encombrement
raisonnables. Il est donc tentant de l’utiliser avec un Dobson. Malheureusement,
ses performances optiques sont mauvaises sur un télescope ouvert. La marque
américaine spécialisée dans les SchmidtCassegrain ouverts à 10 l’a manifestement
optimisé pour ceux-ci. Dans ce domaine,
il reste en retrait par rapport aux autres,
mais son niveau de performance est tout
de même honorable. Eu égard à son prix
attrayant, il peut donc être préconisé
pour ce type d’instruments sans arrièrepensée. À ce titre, sa faible note ne lui
rend pas totalement justice… mais c’est le
jeu du comparatif.
Poids : 340 g
Nombre de lentilles : 7
Nombre de groupes : n. c.
Relief d’œil : 12 mm
Note : 8/20
© C. Birnbaum/C&E Photos
LE RELIEF D’ŒIL, UNE QUESTION DE CONFORT
Le relief d’œil est la distance qui sépare votre œil du verre
de l’oculaire. Plus cette valeur est importante, meilleur est le
confort d’observation. C’est en particulier vrai pour
les astigmates porteurs de lunettes car ce défaut optique
(contrairement aux autres) ne peut pas se corriger en ajustant
simplement la mise au point.
JUIN 2013
75
TEST
Televue Delos
Chromatisme au centre
6/6
Non détecté
Chromatisme en bord de champ
6/6
Qualité optique au centre du champ à
f/3,5 dans le vert
2/6
4/6
5/6
Nikon NAV10-SW
2/6
Faible
Très faible
Lambda/41
Pentax XW
6/6
Non détecté
Non détecté
Faible
1/6
4/6
Sensible
4/6
Très faible
6/6
3/6
Lambda/44
Lambda/38
Lambda/29
Qualité optique au centre du champ
à f/3,5 dans le rouge
Lambda/41
5/6
Lambda/59
6/6
Lambda/21
2/6
Lambda/41
5/6
Qualité optique au centre du champ
à f/7 dans le vert
Lambda/133
6/6
Lambda/76
3/6
Lambda/89
4/6
Lambda/48
1/6
Qualité optique au centre du champ
à f/7 dans le rouge
Lambda/109
5/6
Lambda/131
4/6
Lambda/53
1/6
Lambda/82
3/6
Qualité optique hors axe à f/3,5
dans le vert
4/6
Lambda/24
6/6
3/6
5/6
Lambda/19
Lambda/40
Lambda/25
Qualité optique hors axe à f/3.5
dans le rouge
Lambda/30
4/6
Lambda/41
6/6
Lambda/20
2/6
Lambda/34
5/6
Qualité optique hors axe à f/7
dans le vert
Lambda/66
5/6
Lambda/133
6/6
Lambda/59
3/6
Lambda/59
3/6
Qualité optique hors axe à f/7
dans le rouge
Lambda/65
2/6
Lambda/94
5/6
Lambda/70
3/6
Lambda/81
4/6
Dominante de couleur
6/6
Neutre
Champ apparent par rapport à l’Ethos
4/6
Très faible jaune
3/6
71 %
6/6
100 %
4/6
Très faible jaune
Neutre
6/6
6/6
Transmission de lumière
3/6
1/6
70 %
71 %
6/6
6/6
2/6
Confort de vision
Très bon
6/6
Placement de l’œil
délicat
3/6
Très bon
6/6
Bon
4/6
Ergonomie
Œilleton avec vis
de serrage
5/6
Œilleton simple
en caoutchouc
1/6
Œilleton vissant
sans jeu
5/6
Œilleton vissant
sans butée
3/6
Prix
Note globale
76
Televue Ethos
345 €
16/20
4/6
585 €
15/20
1/6
339 €
5/6
490 €
12/20
11/20
JUIN 2013
3/6
Takahashi
Tak10-UW
Celestron
Luminos
4/6
Très faible
NOS CONCLUSIONS
4/6
Très faible
1/6
Sensible
6/6
Négligeable
2/6
Lambda/22
1/6
Lambda/11
Lambda/26
3/6
Lambda/15
1/6
Lambda/106
5/6
Lambda/66
2/6
Lambda/106
4/6
Lambda/73
2/6
Comme lors de notre test précédent, le Televue Ethos se
retrouve dans le duo de tête. C’est sans hésiter le meilleur
choix pour qui cherche un champ large. Mais attention,
il se paye le prix fort. Plus étonnant, le nouveau Delos de
la même marque arrive en tête alors que son champ est
plutôt limité. Il détrône même la référence du genre : le
Pentax XW. Si vous cherchez la performance avant tout,
c’est le bon choix. Retenons également le Nikon NAV10-SW,
dont le poids et l’encombrement raisonnables font une
solution intéressante pour les télescopes sensibles au
déséquilibre comme les Dobson.
Les deux perdants du test sont le Takahashi TAK10-UW
décevant au regard de son prix et le Celestron Luminos.
Celui-ci occupe la dernière marche. Une défaite à nuancer
toutefois : ses performances sont bonnes sur les télescopes
ouverts à f/7 et plus, et son prix reste attractif. Il est donc
une solution à considérer pour les télescopes Cassegrain.
LES PARAMÈTRES EXAMINÉS
2/6
Lambda/18
CHAMP APPARENT La largeur du champ observé n’est pas
toujours en accord avec les données
constructeur. Nous avons donc évalué
visuellement sa largeur sur une mire,
et comparé le résultat à celui couvrant
le champ le plus large : l’Ethos 10 mm
de Televue.
1/6
QUALITÉ OPTIQUE AU CENTRE
DU CHAMP ET HORS AXE
Nous avons déterminé les écarts
“typiques” (RMS) sur le front d’onde dans
le laboratoire de la société Imagine Optic.
Les mesures ont été faites dans le rouge
et le vert, au centre du champ et hors axe.
Nous avons fait une mesure pour
un télescope très lumineux à f/3,5 et une
autre pour un instrument plus fermé à f/7.
À f/3,5, les disparités sont fortes, mais
tous deviennent très bons à f/7.
Les résultats sont exprimés en fraction
de la longueur d’onde : lambda/50
par exemple. La longueur d’onde est
de 532 nanomètres dans le vert et de
655 nanomètres dans le rouge.
5/6
CHROMATISME
Il a été évalué sur mire à partir de photos
prises à l’arrière des oculaires, au centre
du champ et au bord du champ.
Tous les oculaires testés font preuve
d’une bonne tenue sur ce plan.
RENDU DES COULEURS
Toujours à partir de photos faites sur une
mire de référence à travers les oculaires,
nous avons mesuré le rendu des couleurs.
Des différences faibles, mais notables ont
pu être constatées.
1/6
Lambda/8
Lambda/23
3/6
Lambda/12
1/6
Lambda/66
5/6
Lambda/27
1/6
Lambda/131
6/6
Lambda/55
1/6
3/6
Faible orange
Rose
4/6
81 %
82 %
3/6
1/6
Difficile de voir
le bord du champ
2/6
Relief de l’œil faible
1/6
Œilleton vissant
sans butée de fin
2/6
La mécanique de
l’œilleton est soignée
6/6
2/6
189 €
6/6
576 €
TRANSMISSION DE LA LUMIÈRE En projetant l’image d’une étoile
artificielle sur la cellule d’un photomètre,
nous avons pu mesurer les variations de
transmission entre les différents
oculaires. Les résultats obtenus sont
plutôt bons, avec de très faibles écarts
constatés, au plus 0,08 magnitude.
10,5/20
8/20
JUIN 2013
Découvrez nos précédents tests de matériel sur :
www.cieletespace.fr/instruments
Nous remercions pour leur participation à ce test Optique Unterlinden et Cosmodiff. Ainsi que
Guillaume Dovillaire et Nicolas Lefaudeux de la société Imagine Optic.
77

Documents pareils