Myelome multiple du sujet jeune : à propos d`un cas

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Myelome multiple du sujet jeune : à propos d`un cas
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CAS CLINIQUE
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Myelome multiple du sujet jeune : à propos d’un cas
Multiple myeloma in a young patient : about one case
Jihane Sekkat, Wafae Rachidi, Saadia Janani, Ouafa Mkinsi
Service de rhumatologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca - Maroc.
Rev Mar Rhum 2012; 22: 68-70
Résumé
Abstract
Le myélome multiple ou maladie de Kahler
est une prolifération maligne d’un clone
plasmocytaire produisant de manière inadaptée
et exagérée une immunoglobuline ou l’un de ses
fragments. Il représente 10% des hémopathies
malignes et survient généralement à un âge
moyen de 65 ans, les cas chez les sujets plus
jeunes sont trés rares.
Multiple myeloma (MM) or Kahler’s disease
is a malignant disorder of the plasma cells
that accounts for about 10% of hematological
malignancies. MM has a strong correlation
with age and the risk increases with age,
peaking at about 65 years, Cases among
younger patients are rare. We report the case
of a patient aged 36, who has two months from
the lumbosciatica left poorly systematized
mixed with intermittent
Nous rapportons le cas d’un patient âgé de 36
ans, qui présente depuis 2 mois des lombosciatalgies gauches mal systématisées mixtes
avec claudication médullaire intermittente, dans
un contexte d’amaigrissement chiffré à 11kg en
2 mois. L’examen retrouve une raideur lombaire,
une douleur à la pression de L4-L5, un Lasègue
à 45° à gauche et une douleur à la palpation d’un
arc costal droit. La radiographie standard du rachis
dorso-lombaire complétée par une IRM a montré
des fractures vertébrales dorso-lombaires étagées
de D7 à L2 et une déminéralisation diffuse. Le bilan
biologique a montré un syndrome inflammatoire
important, une hypergammaglobulinémie à
33,9g/l avec pic monoclonal et l’immunofixation
des protéines a retrouvé une immunoglobuline
monoclonale type IgG kappa. Le myélogramme a
montré une moelle riche avec 80% de plasmocytes
dystrophiques et présence de plasmoblastes. Le
patient a reçu sa chimiothérapie avec une bonne
évolution avec 2 ans de recul.
Mots clés :
myélome multiple, sujet jeune
Le myélome est une hémopathie lymphoïde maligne de
la lignée B, de cause inconnue, définie par l’association
d’une prolifération de plasmocytes tumoraux, et de
la sécrétion d’une immunoglobuline monoclonale.
La maladie peut être responsable de complications
osseuses
lytiques,
d’hypercalcémie,
d’anémie,
Correspondance à adresser à : Dr. J. Sekkat
Email : [email protected]
claudication spinal cord, in the context of
weight loss of 11kg in 2 months. The review
found a lumbar stiffness, pain on pressure of
L4-L5, an SLR to 45 ° left and a tenderness
of a rib to right. Plain radiography of the
dorsolumbar spine completed by MRI showed
vertebral dorsolumbar tiered D7 to L2 and
diffuse demineralization. Laboratory tests
showed an important inflammatory syndrome
with hypergammaglobulinemia at 33.9 g / l
(monoclonal) and serum protein immunofixation
found a monoclonal immunoglobulin IgG
kappa type. The myelogram showed a rich
marrow with 80% plasma cells and presence of
dystrophic plasmoblastes. The patient received
his chemotherapy with a good evolution with 2
years of decline..
Key words : Pigmented
synovitis;MRI;synovectomy.
villonodular
d’insuffisance rénale, d’infections répétées et reste de
mauvais pronostic. Il survient chez le sujet âgé entre 60
et 70 ans, avec une moyenne de survie de 3 à 4 ans.
Moins de 2% des patients atteints de myélome ont un
âge inférieur à 40 ans.
Revue Marocaine de Rhumatologie
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Myelome multiple du sujet jeune : a propos d’un cas
OBSERVATION
Il s’agit d’un patient âgé de 36 ans qui présente depuis
2 mois des lombosciatalgies gauches mal systématisées,
d’allure mixte, claudicantes, évoluant dans contexte
d’amaigrissement important chiffré à 11kg en 2 mois
avec à l’examen un syndrome rachidien lombaire, un
signe de Lasègue positif à 45° à gauche et des ostéalgies
provoquées des arcs costaux moyens droits. Sur le plan
neurologique, la force musculaire est diminuée aux
membres inférieurs. La radiographie du rachis dorsolombaire montre des fractures vertébrales étagées avec
une déminéralisation diffuse (fig. 1) et à la radiographie
du crâne des géodes à l’emporte pièce (fig 2). L’IRM du
rachis dorso- lombaire montre des fractures vertébrales
étagées de D7 à L2 avec une anomalie du signal des
corps vertébraux (fig. 3).
Figure 3 : IRM du rachis dorso- lombaire
Le bilan biologique révèle un syndrome inflammatoire
important avec une S à 120 mm 1ère heure et une anémie
normochrome normocytaire, un taux de calcémie normal,
une fonction rénale normale et à l’électrophorèse des
protéines une hypergammaglobulinémie à 33,9g/l avec
un pic monoclonal. L’immunofixation des protéines montre
une immunoglobuline monoclonale de type IgG kappa.
Le myélogramme révèle une moelle riche avec 80% de
plasmocytes dystrophiques et présence de plasmoblastes.
Le patient a reçu des cures de chimiothérapie avec une
bonne évolution 2 ans après le début du traitement.
Malheureusement, on ne dispose pas de l’évolution audelà de ce délai.
DISCUSSION
Figure 1 : Radiographie du rachis lombaire face et profil.
Figure 2 : Radiographie du crâne profil.
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Le myélome multiple (MM) représente environ 1 % de
toutes les néoplasies dans la population blanche, et 2
% dans la population noire. En Europe et aux États-Unis,
l’incidence annuelle du MM est d’environ 4 pour 100 000
habitants. Cette incidence semble légèrement plus élevée
chez l’homme que chez la femme.
Le MM a une forte corrélation avec l’âge. L’âge moyen
de survenue est au-delà de 60 ans. Aux États-Unis, l’âge
moyen de survenue est de 68 ans pour les hommes et
70 ans pour les femmes. Le cas rapporté est beaucoup
plus jeune, il a moins que 40 ans (36 ans).Le myélome
multiple chez cette tranche d’âge est rare, il représente
environ 2% de l’ensemble des myélomes, et il est encore
plus rare chez les patients âgés de moins de 30 ans. Une
étude de Bladé et al, menée sur 3278 patients (clinique
de Mayo aux USA), a montré que la fréquence du MM
chez les patients de moins de 40 et 30 ans est de 2,2%
et 0,3% respectivement [1]. L’étude menée par l’institut
national de cancer (NCI) a montré que sur 3815 patients
atteints de myélome, seulement 7 cas ont moins de 30
ans et donc une fréquence de 0,18%. D’autres études se
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J. Sekkat et al.
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sont intéressées au MM chez le sujet jeune comme celle
de Hewell et collaborateurs qui a trouvé une fréquence
de 1% chez les sujets âgés de moins de 30 ans et elle est
encore plus basse chez les moins de 20 ans.
est évident que la RT doit être utilisée avec prudence chez
les sujets très jeunes. Les jeunes patients atteints de MM
pourraient bénéficier d’une chimiothérapie intensive suivie
par la greffe de cellules souches.
Les caractéristiques cliniques et biologiques sont similaires
à ceux observés chez les patients de tout âge. Le MM
dans le cas rapporté a été révélé par des lombosciatalgies gauches mal systématisées mixtes avec
claudication médullaire intermittente associées à des
ostéalgies inflammatoies dans un contexte d’altération
de l’état général. C’est quasiment les mêmes symptômes
révélateurs du MM chez le sujet jeune rapportés dans la
littérature. Dans l’étude d’Usha et collaborateurs, sur 14
cas de MM de moins de 40 ans, 60% présentaient des
rachialgies, des lombosciatalgies, des douleurs pelviennes
inflammatoires et une asthénie.
La survie est plus longue que celle de patients plus
âgés, en particulier ceux qui ont des facteurs de bon
pronostic (une fonction rénale normale ou un taux de béta
2-microglobuline bas) et aussi chez les moins de 30 ans.
La durée moyenne de survie des patients atteints de MM
est en moyenne entre 2 et 3 ans. Dans l’étude de Bladé
et collaborateurs menée sur des sujets jeunes atteints de
MM, elle est plus prolongée, environ 87 mois (plus de 7
ans) [6]. Notre patient a reçu des cures de chimiothérapie
avec une bonne évolution pendant 2 ans après le début
du traitement puis il a été perdu de vue.
Dans la même étude l’immunoéléctrophorèse a trouvé une
IgG chez 10 cas sur 14. Certaines études ont montré une
proportion plus élevée de MM à chaîne légère, comme le
cas de notre patient, et à IgD [6].
Concernant la protéinurie de Bence Jones (PBJ), elle a
rarement été rapporté dans la littérature chez le sujet
jeune, sauf dans l’étude de Blade et al qui a trouvé une
BJP chez 5 patients sur 10 [1], elle était négative dans le
cas étudié.
L’étude menée dans la clinique de Mayo a révélé une
insuffisance rénale et une hypercalcémie chez 29% et
30% des 72 patients, respectivement. Contrairement à
d’autres études plus récentes qui n’ont trouvé aucun cas
d’insuffisance rénale, d’hypercalcémie ou de tout autre
déséquilibre électrolytique, ce qui rejoint le cas rappoté[8].
Sur le plan radiologique, notre patient présente des
fractures vertébrales étagées et des géodes multiples au
niveau du crâne, ce qui rejoint les données de la littérature
qui rapporte la fréquence des lésions osseuses lytiques
chez les patients très jeunes, en particulier ceux de moins
de 30 ans. L’étude de Usha et collaborateurs a montré une
lyse osseuse chez presque tous les cas avec des fractures
fémorales et vertébrales dans 28,5% [4], L’extension
extra-médullaire est aussi fréquente. L’étude de Blade et
al [1] a retrouvé une composante extra-médullaire chez
14 patients sur 17 (82%). Dans une autre série, chez trois
patients sur cinq (60%) [8] et n’a pas été observée dans
notre cas.
Le traitement des patients jeunes atteints de MM n’est pas
différent de celui des patients âgés. Dans la littérature, la
radiothérapie (RT) et la chimiothérapie ont été utilisées et il
Conclusion
L’âge moyen de survenue du MM est au-delà de 60 ans.
Rare avant 40 ans, il ne touche jamais l’enfant. L’aspect
clinique, les caractéristiques biologiques, radiologiques
ainsi que l’évolution de cette pathologie chez le sujet jeune
ne présentent pas de différence significative par rapport
au sujet âgé, quoique certaines revues de la littérature ont
rapporté une atteinte radiologique plus marquée.
Références
1. Blade J, Kyle RA, Greipp PR et al. Presenting features and
prognosis in 72 paitents with multiple myeloma who were
younger than 40 years. Br J Haematol, 1996 ; 93 : 345-51.
2. Young JL, Percy CL, Asire AJ et al. Survillance, epidemiology
and end result. US department of Health and Human services.
National Cancer Institute Monograph, 1981 ; 57.
3. Hewell GM, Alexanian R et al. Multiple myeloma in young
persons. Ann Intern Med, 1976; 84 : 441-3.
4. Usha, Agarwal N, Kumar P et al. Myeloma in young age. Indian
J Pathol Microbiol, 2005; 314-7.
5. Corso A et al. Multiple myeloma in younger patients. Spinger
Berlin, 1998 ; 76-2.
6. Blade J, Kyle RA, Greipp PR. Multiple myeloma in patients
younger than 30 years. Report of 10 cases and review of the
literature. Arch Intern Med, 1996; 156 (13): 1463-8.
7. Blade J, Kyle RA. Multiple myeloma in young patients: clinical
presentation and treatment approach. Leuk Lymphoma, 1998;
30(5-6):493-501.
8. Kapoor R, Bansal M, Sastri GJ, et al.Clinical Spectrum and
Prognosis of MM in Patients younger than 30 Years: Is it Different
from the Elderly?. JK SCIENCE, 2006;Vol. 8: No. 4.
Revue Marocaine de Rhumatologie

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