Décembre 2014 - Mutualité chrétienne
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Décembre 2014 - Mutualité chrétienne
MC-Informations Analyses et points de vue 258 Périodique trimestriel de l’Alliance nationale des Mutualités chrétiennes décembre 2014 Vieillissement et soins aux personnes âgées Evolution de la part des plus de 80 ans dans la population totale (2013-2060) 12,0% Bilan des connaissances des Belges en matière de santé 10,0% Dimensions de la « health literacy » 8,0% Accéder Capacité de rechercher des informations en matière de santé Comprendre Capacité de comprendre les informations disponibles en matière de santé Évaluer Capacité d’interpréter, de filtrer, de juger et d’évaluer les informations disponibles Appliquer Capacité d’utiliser ces informations afin de prendre une décision en matière de soins de santé, de prévention des maladies, de promotion de la santé de manière à maintenir ou améliorer la santé. 6,0% 4,0% 2,0% 0,0% 2013 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050 2055 2060 Belgique Région wallonne Bruxelles Région flamande e-Health La PAQS, un nouvel acteur L’échange électronique des données de santé, eHealth en abrégé, a également démarré dans notre pays. Les compétences émotionnelles, un facteur à prendre en compte L'interaction entre le niveau de formation et les CE sur le nombre de journées d’hospitalisation (hôpital général) 1,4 Nombre de journées dans les hôpitaux généraux (en base annuelle) 1,26 formation faible 1,2 formation élevée 1,0 0,8 Les Initiatives de Qualité qui avaient commencé comme quelques projets interhospitaliers, font maintenant partie d’un mouvement qui regroupe tous les acteurs significatifs du secteur et qui s’est récemment structuré au sein d’une asbl, dénommée Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité des patients. 0,84 0,65 0,62 0,6 0,4 MUTU ALITE CHRE TIENN E 0,2 0,0 CE faibles CE élevées La solidarité, c’est bon pour la santé. Éditorial Les soins de santé sont en pleine évolution et font l’objet de nombreux changements. Non seulement en raison des progrès technologiques, mais aussi grâce à de nouvelles approches des traitements et de la manière dont nous considérons la maladie, la santé et le vieillissement. Dans le présent numéro, nous abordons les différentes facettes de cette évolution. Pour qu’un prestataire de soins puisse offrir partout et tout le temps des soins de qualité, même à un patient qu’il voit pour la première fois, il est essentiel qu’il puisse disposer de toutes les informations médicales pertinentes à son sujet. Elles sont nécessaires pour pouvoir établir un diagnostic correct et démarrer un traitement adéquat, mais aussi pour éviter de répéter des examens qui ont déjà été effectués ailleurs. Les informations des collègues prestataires de soins sont importantes, mais également celles des travailleurs du secteur du bien-être, ainsi que celles fournies par le patient en personne. Chacun contribue ainsi au réseau qui se met en place autour du patient et avec ce dernier. Précédemment, nous nous heurtions à l’obstacle selon lequel cette information était fragmentée dans des dossiers que les prestataires de soins ne pouvaient pas s’échanger entre eux. Maintenant, il existe heureusement la plate-forme eHealth, qui offre des services de base pour pouvoir échanger cette information de manière sécurisée, sous forme électronique. De nombreux projets concrets s’y sont déjà rattachés, émanant tant des autorités fédérales que des communautés et des prestataires de soins. Le citoyen y sera de plus en plus souvent confronté et il conviendra de l’informer et de le former concernant la manière dont il pourra retrouver tout cela auprès d’un seul partenaire. Échanger et partager des données transparentes est également essentiel pour le suivi de la qualité et de la sécurité des soins. Plusieurs initiatives ont vu le jour en la matière. Pour la première fois, les mutualités ont publié conjointement des chiffres sur le nombre d’interventions par hôpital pour le cancer du pancréas et de l’œsophage, parce que le centre d’expertise (KCE) a clairement constaté qu’un nombre accru d’interventions mène à une meilleure qualité. En Flandre, le projet des indicateurs de qualité VIP² arrive à sa vitesse de croisière, où la qualité des hôpitaux pourra être comparée pour divers traitements. Nous discuterons aussi de la Plate-forme d’amélioration continue de la qualité (PACQS) récemment créée en Wallonie. Outre les prestataires de soins et les universités, les mutualités y jouent un rôle majeur. Une information sur l’accréditation des hôpitaux, la formation, la coordination et un plan d’action annuel, notamment, rendra tout cela concret. La plupart des 2 initiatives s’adressent actuellement aux hôpitaux, mais les soins de première ligne sont également de plus en plus attentifs au suivi de la qualité. Le vieillissement et les soins croissants aux personnes âgées qui en découlent constituent un défi pour tous les acteurs des soins de santé. La situation est mise en lumière par un article qui décrit les nouvelles compétences des communautés et les divers dispositifs de soins. Ici aussi, les évolutions technologiques apportent leur lot de changements. Le suivi et le monitoring à distance, via de nouveaux appareils d’assistance, permettra aux personnes âgées de rester plus longtemps dans leur environnement familier. L’engagement des aidants proches et des bénévoles, que l’on qualifie de socialisation des soins, restera un pilier fondamental. Au Danemark, par exemple, un citoyen ne peut recevoir des soins du système social que s’il a lui-même prodigué des soins à d’autres personnes. Voilà matière à réflexion… On sait déjà que notre santé peut s’améliorer grâce à un style de vie sain. Traditionnellement, nous pensons à une activité physique suffisante (10 000 pas /jour), une alimentation saine et à suffisamment de sommeil. Mais les facteurs psychologiques tels que le stress jouent également un rôle. Une étude de la MC a révélé que la manière dont nous gérons nos propres émotions et celles des autres, ainsi que la façon dont nous les comprenons, les identifions, les régulons et les utilisons a une influence sur la santé et peut constituer un déterminant de la consommation des soins de santé. Il s’agit de la première étude qui démontre cet effet. Fort heureusement, cette compétence émotionnelle s’apprend et peut être renforcée. Pour terminer, nous avons répertorié les « compétences en matière de santé » ou « health literacy » des Belges. Il en ressort que 4 Belges sur 10 ont des compétences insuffisantes en matière de santé que pour pouvoir mener une vie saine. La formation, le sexe, l’âge et la région jouent un rôle dans ce contexte. Nos résultats sont au même niveau que de nombreux autres pays, mais les Pays-Bas sont parvenus à améliorer ces compétences au sein de leur population. Les mutualités en Belgique veulent également s’engager pleinement à propos de cette thématique Dr. Michiel Callens Directeur R&D MC-Informations 258 • décembre 2014 eHealth en Belgique Dr Michiel Callens Directeur R&D, Alliance nationale des Mutualités chrétiennes ; membre du conseil d’administration et du comité de concertation eHealth ; membre du groupe de pilotage ICT Vitalink Synthèse L’échange électronique des données de santé, eHealth en abrégé, a également démarré dans notre pays. La plateforme eHealth propose gratuitement une série de services de base, qui offrent les garanties nécessaires en termes de sécurité des informations, de protection de la vie privée du patient et du praticien et de respect du secret médical. Cet organisme fédéral respecte, stimule, coordonne et soutient les initiatives locales et régionales, telles que les hubs et métahubs, Vitalink (Flandre) et le Réseau Santé Wallon/Inter-Med (Wallonie et Bruxelles). Les hôpitaux échangent d’ores et déjà des données électroniques entre eux et avec les médecins généralistes par le biais des hubs et métahubs. Depuis cette année, les médecins généralistes et pédiatres sont obligés d’enregistrer les vaccinations dans le système d’enregistrement électronique Vaccinnet. Le citoyen a déjà accès à l’enregistrement de ses vaccinations – et pourra prochainement consulter d’autres types de données enregistrées dans Vitalink – via le Patient Health Viewer. Pour partager ces données en première ligne et avec le patient, la Wallonie/Bruxelles auront recours à la plateforme « Inter-Med ». De nombreux autres projets, tels que le dossier pharmaceutique partagé, sont déjà d’actualité ou en chantier. Dans tous les cas, l’échange des données de santé est subordonné à l’accord du patient. Par ailleurs, seuls les praticiens qui traitent le patient ont accès aux informations dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur tâche. Tous les intervenants se sont accordés sur les objectifs à atteindre en 2018. Il en a résulté la roadmap eHealth, qui a été intégrée dans l’actuel accord de gouvernement. L’eHealth offre de nombreuses possibilités, compte tenu de l’accroissement du nombre de maladies chroniques, des éventuelles pénuries de prestataires de soins pour en assurer le suivi, du souhait de rester plus longtemps chez soi. La possibilité d’échanger des données de santé par voie électronique permettra également au patient/citoyen de se profiler comme un véritable partenaire dans l’approche de sa maladie et de sa santé. Mots-clés : échange électronique, données de santé, Vitalink, Réseau Santé Wallon, télémédecine. 1Introduction Après l’industrie, le secteur bancaire, la déclaration fiscale, tout est prêt aujourd’hui dans le domaine des soins de santé pour échanger des données électroniques en toute sécurité. L’échange électronique de données médicales entre prestataires de soins revêt une importance capitale. Chaque praticien traitant sera ainsi informé à tout moment des maladies pour lesquelles vous êtes traité(e), les examens que vous avez déjà subis, les médicaments que vous prenez ou les vaccins qui vous ont été administrés antérieurement. Cet échange est important notamment lors d’un contact avec le médecin généraliste de garde ou en cas d’admission dans un service d’urgence où les médecins ne disposent généralement d’aucune donnée médicale vous concernant. Il évite également les examens redondants et inutiles ou une surcharge administrative due à la multiplication des données identiques à compléter. Cet échange suppose évidemment un certain nombre d’exigences techniques et de s’accorder sur qui peut accéder à quoi concernant qui et à quelles conditions. C’est pourquoi MC-Informations 258 • décembre 2014 3 les plateformes nécessaires ont été mises en place, tant au niveau fédéral que régional, pour mener ce projet à bien. Sans se perdre dans les détails techniques, le présent article donne un aperçu des plateformes eHealth, Vitalink et Réseau Santé Wallon. 2 La plateforme eHealth 2.1 Un organisme public fédéral L’eHealth est un terme international qui fait référence à l’échange électronique de données de santé. Toutefois, lorsque l’on parle d’« eHealth » en Belgique, il est davantage question de la plateforme eHealth (www.ehealth.fgov.be). La première condition pour pouvoir échanger des données en toute sécurité dans le domaine des soins de santé est en effet l’existence d’une plateforme technique permettant cet échange. À cet effet, la plateforme eHealth a été instituée en Belgique par la Loi du 21 août 2008 relative à l’institution et à l’organisation de la plateforme eHealth et portant dispositions diverses (Moniteur belge du 13 octobre 2008)1. La plateforme eHealth, un organisme public fédéral, s’adresse à tous les acteurs des soins de santé : praticiens et établissements de soins, patients, mutualités, organismes publics, régions et communautés. Elle est gérée par un Comité de gestion, soutenu par un Comité de concertation auquel les partenaires susmentionnés participent. Cette plateforme propose gratuitement une série de services de base, qui offrent les garanties nécessaires en termes de sécurité des informations, de protection de la vie privée du patient et du prestataire de soins et de respect du secret médical. Lors de l’échange des données à caractère personnel, il est essentiel que l’expéditeur et le destinataire soient absolument certains qu’il s’agisse de la même personne. Dans le cas contraire, des décisions risquent d’être prises, ou des soins administrés sur la base de données concernant une autre personne, et qui sont même parfois susceptibles de mettre sa vie en danger. C’est pourquoi l’utilisation du numéro d’identification de la sécurité sociale (NISS) a été rendue obligatoire par la loi e-Health en cas d’échange de données à caractère personnel via la plateforme eHealth. Ce NISS permet en effet d’identifier de manière unique toutes les personnes résidant en Belgique. 2.2 Pas de « Big brother » Des mesures structurelles sont prévues pour éviter que les données puissent être couplées ou utilisées à mauvais escient. La plateforme eHealth ne constitue en aucun cas le « Big brother » de la santé. 1 4 Tout d’abord, la loi relative à la plateforme eHealth ne prévoit pas un enregistrement centralisé des données de santé à caractère personnel. Ces données ne sont pas enregistrées par eHealth, mais conservées de manière décentralisée et distribuées en premier lieu auprès des praticiens et des établissements de soins. Tout échange de données à caractère personnel relatives à la santé via la plateforme eHealth doit en outre être autorisé par la loi, par le Département Santé du Comité sectoriel au sein de la Commission de la protection de la vie privée (CPVP, mieux connue sous le nom de « privacy commission ») ou par le patient. Dans le cas contraire, cet échange n’est pas légal et peut être passible de sanctions sévères. Ce département se compose de six membres : 2 représentants de la CPVP et quatre médecins indépendants, désignés par la Chambre des Représentants. L’accès aux données à caractère personnel via la plateforme eHealth n’est possible que si le patient a donné son consentement à cet effet. Les données de santé à caractère personnel échangées entre l’expéditeur et le destinataire sont en outre cryptées, afin que personne d’autre, pas même la plateforme eHealth, ne puisse les lire. Enfin, l’accès à la plateforme eHealth repose sur un système sophistiqué de gestion des utilisateurs et des accès, qui requiert de l’utilisateur qu’il s’identifie à l’aide de sa carte d’identité électronique ou d’un moyen similaire. Des banques de données fiables (sources authentiques) vérifient s’il dispose des qualités et des habilitations appropriées (comme une relation thérapeutique). Enfin, l’échange des données de santé à caractère personnel (non pas les données à caractère personnel échangées en tant que telles !) est consigné (enregistré) dans un journal, afin que toute (tentative d’) utilisation abusive puisse être identifiée par la suite. Ces loggings pourront être consultés à terme par le patient pour vérifier qui a échangé des données à caractère personnel le concernant. 2.3 Normes techniques Dans le cadre d’un échange électronique, il est en outre important que chacun utilise les mêmes normes, que les systèmes puissent se parler (interopérabilité) et utilisent la même langue (nécessité d’une terminologie uniforme). eHealth fixe les normes, les règles, les spécifications fonctionnelles et techniques ainsi que l’architecture de base en matière de TIC. Il veille à l’enregistrement du logiciel de gestion des dossiers électroniques des patients. Modifiée par la Loi du 19 mars 2013 (Moniteur belge du 29 mars 2013) et par la Loi du 10 avril 2014 (Moniteur belge du 30 avril 2014). MC-Informations 258 • décembre 2014 La plateforme eHealth vise en outre à permettre aux initiatives de collaboration locales et régionales de se concentrer sur les aspects de contenu de la collaboration et propose à cet effet une série de services de base généralisés, interopérables et qui développent des normes en matière de TIC. Les praticiens, les établissements de soins et les patients pourront ainsi accéder aux données personnelles pertinentes qu’ils sont autorisés à consulter, quelle que soit l’initiative locale ou régionale. 2.4 Objectifs et services de la plateforme eHealth Le but n’est pas de modifier la répartition concrète des tâches entre les différents acteurs des soins de santé. La plateforme eHealth vise uniquement à améliorer la qualité des soins de santé et la sécurité du patient et à alléger la charge administrative des praticiens, des établissements de soins et des citoyens, tout en soutenant adéquatement la politique en matière de santé par la génération de statistiques et données de gestion anonymes ou codées sur demande. À l’heure actuelle, eHealth propose gratuitement les services de base suivants : • Coordination des processus partiels électroniques • Environnement portail (https://www.ehealth.fgov.be) • Gestion intégrée des utilisateurs et des accès • Gestion des loggings • Système de cryptage end-to-end • Boîte aux lettres électronique personnelle pour chaque prestataire de soins (eHealthBox) • Datation électronique (timestamping) • Codage et anonymisation • Consultation du Registre national et des registres de la Banque Carrefour de la sécurité sociale • Répertoire des références (= métahub) Outre les services de base développés, la plateforme eHealth est un partenaire dans le cadre des services à valeur ajoutée. En voici quelques exemples : • Encodage et consultation : - du Registre du cancer - du registre des prothèses de la hanche et du genou (Orthopride) - des registres relatifs aux prestations de soins en matière d’implants cardiaques (Qermid) - du dossier électronique partagé concernant l’arthrite, ainsi que des processus électroniques de remboursement des médicaments anti-TNF (Safe)2 • PROCARE RX qui permet aux radiologues de charger et d’envoyer des radiographies et les informations correspondantes à des experts en vue d’une révision ou d’un second avis 2 • Gestion des services de garde de médecins généralistes et de dentistes (Medega) • Rapport sur les interventions du SMUR • Communication électronique de rapports de garde par les médecins de garde au détenteur d’un DMG • Resident Assessment Instrument (BelRAI) • Consultation électronique de l’assurabilité dans l’assurance maladie et transmission électronique de factures tiers payant aux mutualités (MyCarenet) • Plateforme pour l’échange de données entre la Vlaams Agentschap voor Zorg en Gezondheid et les services reconnus par celle-ci (VESTA) • Soutien de la prescription électronique de soins interne dans les hôpitaux • Déclaration électronique des naissances - eBirth • Consultation des déclarations anticipées en matière d’euthanasie • Encodage et consultation électroniques de l’évaluation des personnes handicapées dans le système d’information du SPF Sécurité sociale (Medic-e) • Système d’enregistrement en ligne pour les établissements privés du secteur de l’aide spéciale à la jeunesse en Flandre • Projet Recip-e : prescription électronique de médicaments 2.5 Le consentement éclairé Seules les données médicales nécessaires pour votre santé ou vos traitements sont échangées via eHealth. Le comité de concertation des utilisateurs d’eHealth en assure la coordination. Le comité sectoriel de la santé au sein de la privacy commission doit également approuver les nouveaux échanges de données de santé. En outre, les données ne peuvent être échangées que si vous donnez votre consentement à cet effet. On parle de consentement éclairé, informed consent, eHealth consent. Le consentement peut être enregistré en ligne directement par le citoyen, par le biais d’une application accessible via https://www.ehealth.fgov.be. Vous trouverez facilement ce lien sur les sites Web des mutualités, des associations de patients, de Vitalink, de RSW, d’Abrumet, etc. Vous pouvez également donner votre consentement par le biais de votre carte d’identité électronique lors d’un contact avec le médecin, le pharmacien et le personnel administratif d’un hôpital ou d’une mutualité. Vous pouvez à tout moment retirer votre autorisation de la même manière. L’autorisation s’applique en revanche à toutes les données échangées via les plateformes et constitue un consentement unique. À l’heure actuelle, elle s’applique notamment au partage du dossier hospitalier établi durant une hospitalisation, au dossier pharmaceutique partagé, aux différentes données présentes dans Vitalink (voir infra), à la consultation des accords relatifs au chapitre IV-médicaments. Dans les mois/ années à venir, de nouvelles données s’ajouteront, comme un TNF provient de l'anglais : tumor necrosis factor. En français : facteur de nécrose tumorale MC-Informations 258 • décembre 2014 5 résumé de votre dossier chez le médecin généraliste (SUMEHR = summary electronic health record). Toutes ces informations permettent d’établir une collaboration entre le prestataire de soins et vous-même et d’optimiser les soins dispensés. Elles permettent également d’annuler des examens superflus, qui ont notamment déjà été effectués dans le cadre de l’imagerie médicale, afin d’éviter une exposition inutile aux radiations. Sachez que sans informations complètes et exactes, il est parfois difficile pour un prestataire de soins de vous traiter correctement. Vous pouvez toutefois demander à votre praticien de ne pas échanger certains documents. L’application de RSW permet au patient de bloquer des documents en ligne qu’il ne souhaite pas échanger. Vitalink et les autres hubs ne prévoient pas ces possibilités. Des dispositions légales spécifiques définissent évidemment les cas où l’échange de certaines données médicales ne requiert pas le consentement du patient. La loi eHealth ne modifie rien au contenu en la matière. La loi relative aux droits des patients et aux obligations déontologiques (entre autres, le secret professionnel) des praticiens reste intégralement d’application. 2.6 La relation thérapeutique Seuls les prestataires de soins qui entretiennent une relation thérapeutique (qui traitent le patient) ont accès aux informations dont ils ont besoin pour s’acquitter de leur tâche. Tous les praticiens n’ont donc pas accès à l’ensemble des informations. Le comité de concertation d’eHealth définit qui peut accéder à quoi. Une relation thérapeutique se crée du fait : • du médecin généraliste qui gère votre dossier médical global ; • des médecins qui vous traitent pendant une hospitalisation ; • des spécialistes et autres médecins que vous consultez : un prestataire de soins peut enregistrer une relation thérapeutique après avoir lu votre carte d’identité électronique ; • des pharmaciens qui vous délivrent des médicaments : enregistrement de la relation thérapeutique via eID. Un citoyen peut à tout moment enregistrer ou retirer une relation thérapeutique avec un praticien et consulter l’ensemble de ses relations thérapeutiques. Ainsi, la même application de consentement éclairé (voir lien ci-dessus) lui permet d’interdire à un certain nombre de praticiens spécifiques d’accéder à ses données de santé (pour les échanges de données qui nécessitent ce consentement) et ce, même s’il existait déjà une relation thérapeutique automatique (p. ex. avec le médecin généraliste qui gère votre dossier médical global). Cette fonctionnalité n’est accessible qu’au citoyen lui-même. L’exclusion s’effectue sur la base du numéro INAMI du prestataire de soins. L’application prévoit une fonction permettant de rechercher un praticien en spécifiant son nom et son prénom comme critères. Si le patient saisit son code PIN, le praticien peut en outre, à la demande du patient, enregistrer, 6 retirer ou consulter les relations thérapeutiques entre ce patient et les autres praticiens. 3 L’échange de données entre hôpitaux via « hubs et métahubs » Un « hub » est une association d’hôpitaux qui s’efforcent de donner à votre prestataire de soins le meilleur accès possible aux données médicales importantes dans le cadre de votre traitement. « Hub » signifie « moyeu » en anglais. Il s’agit du centre, de la « boîte de répartition » d’un réseau, qui régit les contacts et le transport de données entre les serveurs et les postes de travail. Les documents médicaux émis par les hôpitaux, les laboratoires et les établissements de soins restent conservés à l’endroit où ils ont été établis et sont mis à la disposition des médecins dans et hors des hôpitaux. Différents réseaux électroniques (hubs) ont été créés dans le passé pour permettre aux hôpitaux d’échanger ces informations avec les médecins de la région. Ces hubs sont au nombre de 5 : le Vlaams ziekenhuisnetwerk Leuven, la Cozo (Collaboratief zorgplatform regio Gent), le hub régional anversois, le Réseau Santé Wallon (RSW) en Wallonie et Abrumet à Bruxelles. Les dossiers restent dans les hôpitaux et il n’existe donc aucun dossier central physique. Par ailleurs, un « métahub » actualise les données disponibles concernant un patient donné dans les différents hubs. Le « métahub », parfois dénommé « Répertoire de références » ou index, permet d’identifier l’hôpital qui dispose d’informations concernant le patient, afin de pouvoir ensuite les consulter directement par la voie électronique dans l’hôpital en question. Concrètement, la procédure est la suivante : • Les documents établis dans un hôpital restent dans cet établissement et font partie du dossier médical local qu’il est tenu légalement de conserver. Cet hôpital enregistre dans l’index les documents qu’il tient à disposition. Il s’agit spécifiquement de documents qui seraient envoyés traditionnellement par la poste à un médecin externe. • Les prestataires de soins compétents peuvent consulter l’index pour identifier les documents disponibles concernant leur patient. • Ils peuvent donc également consulter les documents pertinents pour le traitement (immédiatement auprès de l’établissement qui gère ces documents). • Des accords généraux en matière de sécurité et de droit d’accès sont prévus. Le métahub ne contient donc aucune information médicale à caractère personnel. Les informations figurant dans l’index des hubs distincts sont considérées comme des informations médicales à caractère personnel sensibles (même si cet index ne contient que des données générales sur le document et non sur son contenu). Les établissements de soins tels que les hôpitaux ont donc l’obligation et les moyens d’assurer la confidentialité de ces informations. MC-Informations 258 • décembre 2014 4 L’échange de données en première ligne Les documents médicaux émis par les hôpitaux restent donc conservés à l’endroit où ils ont été établis. Néanmoins, les acteurs de la première ligne (par exemple, le médecin généraliste) ne disposent pas toujours d’un serveur afin de conserver les données. Le prestataire de soins externe, l’assistant social ou le patient ne peut donc pas accéder à ces données 24 h/24, 7 j/7, puisque les données sont enregistrées dans l’ordinateur local qui n’est pas toujours accessible. La conservation et le partage des données de la première ligne sont organisés par des plateformes régionales, telles que Vitalink (Flandre), Inter-Med qui fait partie du Réseau Santé Wallon (Wallonie) et Abrumet (Bruxelles). Pour faire face à tous ces défis, les autorités flamandes investissent dans une large mesure dans la « socialisation des soins » : une intégration de plus en plus grande des soins dans le réseau social familier des gens. L’usager de soins préfère habiter le plus longtemps possible de manière autonome et recevoir des soins et un accompagnement à domicile. Pour intégrer efficacement les soins dans le cadre de vie personnel, il faut toutefois disposer des instruments – et des informations – appropriés. Dans ce contexte, une bonne interaction entre le prestataire de soins professionnel, l’aidant proche et le patient (autogestion et autonomisation) est cruciale. Le rôle du citoyen/patient et du travailleur social en tant que partenaire actif est un aspect sur lequel Vitalink insiste largement. Vitalink a été spécialement conçu pour permettre la collaboration multidisciplinaire dans le cadre des soins du patient par le biais de l’échange électronique d’informations. 4.1Vitalink En plus d’être synonyme de soins qualitatifs via le partage de données, Vitalink (www.vitalink.be) se veut un modèle d’efficacité. L’échange électronique de données et l’accès aux bases de données des pouvoirs publics peuvent en effet aussi réduire la charge administrative des utilisateurs, des prestataires de soins et des établissements. Dans la mesure du possible, les flux de papier feront partie de l’histoire et les données générées par le soignant ou le praticien pourront être réutilisées dans un contexte administratif. En effet, l’utilisateur qui demande une aide et des soins, et qui dans ce cadre souhaite souvent faire valoir différents droits et exonérations, ne devra pas chaque fois passer par la machinerie administrative pour des questions déjà enregistrées dans différentes bases de données. Les prestataires de soins y trouveront également leur intérêt : l’échange et la réutilisation des données peuvent rendre les infrastructures et procédures superflues et donc améliorer leur qualité de travail. Vitalink est un pas important dans le secteur des soins de santé et du bien-être flamand et est ‑ à maints égards ‑ unique en Flandre, en Belgique et ailleurs. Contrairement aux autres systèmes, Vitalink ne se limite pas à un secteur particulier (comme les hôpitaux) ou à certains groupes professionnels (comme les médecins ou les pharmaciens). Vitalink est actuellement la seule plateforme qui se concentre sur l’ensemble des soins de santé de première ligne et qui vise à permettre la collaboration entre les prestataires de soins, les assistants sociaux et le patient. Egalement les prestataires de soins de 2de ligne peuvent consulter les données de Vitalink lorsqu'il y a une relation thérapeutique. Des voix s’élèvent pour remplacer le terme « patient », qui a une connotation « passive », par un mot plus actif/assertif, tel que « client ». Pour leur permettre d’accéder aux données de Vitalink, les mutualités ont développé le « patientviewer ». Il s’agit d’un logiciel téléchargeable gratuitement via les sites des mutualités, qui vous permet de consulter vos données personnelles dans Vitalink. Une carte d’identité électronique et le code PIN correspondant suffisent pour l’installer une fois pour toutes. Les médecins qui ne sont pas encore en mesure de se connecter via leur logiciel Vitalink peuvent provisoirement aussi utiliser le patientviewer. 4.1.2 Quelles données ? 4.1.1 Le patient au cœur des préoccupations a. Vaccinations Vitalink a été créé pour le patient, afin qu’il bénéficie des meilleurs soins possibles, où qu’il réside. Les données en matière de soins et de bien-être qui le concernent sont partagées entre ses prestataires de soins. Ce partage s’effectue de manière extrêmement sécurisée, dans le respect total de la vie privée, et uniquement s’il l’autorise. Grâce à Vitalink, le citoyen peut, pour la première fois, consulter ses données, afin qu’il puisse participer aux décisions relatives à ses soins. Ce rôle central du patient est un point auquel Vitalink accorde une très grande attention. Les patients deviennent de plus en plus critiques et assertifs et ont un avis bien tranché sur ce que de « bons soins » signifient. Ils se comportent également de plus en plus comme des consommateurs sur le « marché de la santé » et réclament volontiers une emprise plus grande sur leur dossier médical. On note une aspiration à des soins de santé qui accordent une place centrale au patient – non à la maladie. Depuis quelques années, les médecins peuvent consigner les vaccins qu’ils administrent à leurs patients dans le système d’enregistrement électronique Vaccinnet. Ce système contient les données suivantes : • vaccins administrés à partir de 1997 et enregistrés dans Vaccinnet ; • vaccins administrés à partir de septembre 2005 par les médecins du PMS (centre d’encadrement des élèves) ; • vaccins administrés à partir de 2006 durant les consultations de Kind & Gezin. Depuis cette année, les médecins généralistes et les pédiatres sont obligés d’enregistrer les vaccinations dans Vaccinnet. Vu que cet enregistrement n’était pas obligatoire avant 2014, il y a de fortes chances que Vitalink n’affiche pas toutes les vaccinations MC-Informations 258 • décembre 2014 7 via le patientviewer. Le médecin généraliste peut toutefois compléter les vaccinations antérieures dans Vaccinnet. Par vaccination, apparaissent : la date d’administration, le nom officiel du vaccin et la maladie traitée par le vaccin. Les données des enfants de plus de six ans peuvent être consultées en se connectant à l’aide de leur kids-ID ou eID. Les données de vaccination des enfants plus jeunes ne peuvent être consultées à l’heure actuelle. Vous devez vous adresser à cet effet à votre médecin généraliste ou à Kind & Gezin. Les avantages sont évidents : • Vous pouvez suivre facilement la date de votre dernière vaccination. Ceci peut s’avérer utile, par exemple, lorsqu’il est demandé de communiquer la date de la dernière vaccination contre le tétanos dans le cadre d’un camp de vacances. • Vous ne devez plus tenir à jour les carnets ou cartes de vaccination. Vous pouvez en effet imprimer une liste récapitulative. • Vos données de vaccination peuvent être consultées par les praticiens qui vous traitent. Ceci peut s’avérer utile notamment en cas d’examen dans un poste de garde ou un service d’urgence. Le praticien peut ainsi poser un meilleur diagnostic, éviter les doubles vaccinations et limiter le risque de réactions allergiques. b. Médicaments Il est probable que d’ici fin 2014 vous puissiez consulter votre schéma de médication via Vitalink, plus précisément les médicaments que vous devez prendre, pendant combien de temps, à quel moment et en quelle quantité. Ces données sont très utiles pour les personnes atteintes d’une maladie chronique, qui doivent prendre différents médicaments pendant une longue période. Vu que différents prestataires de soins peuvent prescrire des médicaments, cet instrument peut leur être utile pour avoir un aperçu les médicaments que vous prenez. Quelques exemples des compétences des différents intervenants : • Les médecins habilités à prescrire et les pharmaciens peuvent consulter et adapter le schéma de médication. • Les infirmiers peuvent consulter le schéma de médication et le modifier moyennant l’autorisation du prescripteur. • Les prestataires de soins et assistants sociaux travaillant dans des structures ont la possibilité de consulter le schéma de médication. • En tant que patient, vous pouvez consulter votre schéma de médication s’il est complété et partagé par le prestataire de soins. c. Dossier du médecin généraliste, examens préventifs… D’autres projets, comme l’échange d’un résumé de votre dossier chez le médecin généraliste (SUMEHR = summary electronic health record), des données relatives aux examens préventifs 8 en vue du dépistage du cancer (données relatives au dépistage du cancer de l’utérus, du sein et du côlon), certaines données utiles du dossier de Kind & Gezin, un journal susceptible de remplacer les cahiers de communication, etc. sont sur la table. 4.2 Inter-Med (Réseau Santé Wallon - RSW) Inter-Med est le pendant de Vitalink en Wallonie. Il est géré par le RSW (Wallonie) et Abrumet (Bruxelles). Le RSW et Abrumet font partie des hubs qui échangent des informations hospitalières mais ils ont créé la plateforme de première ligne appelée « Inter-Med », le pendant de Vitalink. Il est souvent fait référence au RSW (www.reseausantewallon.be) pour désigner en fait le service à valeur ajoutée Inter-Med, vu que le RSW gère Inter-Med. Le projet Inter-Med est dirigé par le FAG (Forum des Associations de Généralistes). Contrairement à Vitalink, le patient doit s’inscrire au RSW, une procédure certes gratuite. Inter-Med contient actuellement les documents suivants : • Le « SUMEHR », le résumé du dossier médical électronique, qui mentionne les médicaments, la liste actuelle des problèmes, les antécédents, les facteurs de risque et les vaccinations. Ces données sont échangées entre les prestataires de soins, qui peuvent décider d’en donner l’accès au patient. Pour le moment, c'est en phase pilote, de sorte que c'est le prestataire de soins qui décide si le patient y a également accès. • Les données relatives aux trajets de soins pour le diabète et l’insuffisance rénale. • Les notes que les patients établissent eux-mêmes dans le cadre de certaines maladies. Les documents du service intégré de soins à domicile (SISD) et des réseaux locaux multidisciplinaires (RLM) seront également ajoutés à l’avenir. À terme, le patient pourra lui-même consulter le RSW pour d’autres services, comme se référer au carnet de vaccination (Vaccinnet), obtenir une aide dans le cadre de la gestion des trajets de soins pour le diabète, etc. Si le patient est autorisé à accéder à certaines données, il pourra les consulter via son eID et son code PIN. L’installation d’un « patientviewer » ne sera pas nécessaire. À l’heure actuelle, le patient peut exécuter les actions suivantes via son compte privé : • enregistrer ou rompre la relation thérapeutique avec un médecin ; • interdire l’accès à son dossier médical à un ou plusieurs médecins ; • consulter la liste des documents médicaux enregistrés (sans pouvoir en consulter le contenu) ; • gérer le droit d’accès aux documents ; • consulter l’historique de l’accès à un dossier ou document. MC-Informations 258 • décembre 2014 5 Conditions préalables 5.2Patient/client 5.1 L’eHealth ouvre de nombreuses possibilités pour intéresser activement le patient à sa santé et à son processus de soins. Ceci nécessite naturellement des explications concernant le fonctionnement du système. D’abord et surtout sur la manière de donner un consentement et de gérer les relations thérapeutiques. Ensuite, sur ce que le patient peut voir et, plus tard, sur ce qu’il pourra actualiser et partager. Ceci devra être « enseigné » et faire partie des compétences de base en matière de santé (« health literacy ») de la population. Le vote électronique, l’utilisation du GSM et du GPS, la banque électronique, la fiche d’impôts en ligne ou la TV numérique ont eux aussi connu une courbe d’apprentissage avant d’être adoptés massivement. La communication ne devra pas s’effectuer ponctuellement, mais devra être permanente et s’organiser à chaque nouvelle application. Prestataires de soins On peut mettre sur pied un système d’échange électronique de données sécurisé et très performant, mais si les prestataires de soins n’y encodent/téléchargent aucune donnée, il n’y a rien à partager. Les hôpitaux disposent pratiquement toujours d’un dossier électronique contenant des données qu’ils peuvent partager. Il devrait en être de même pour les médecins généralistes. Ils perçoivent presque tous une prime informatique chaque année. Ils sont en outre rémunérés pour la mise à jour du dossier médical global. Il serait probablement plus efficace de lier ces rémunérations à l’encodage/l’échange électronique effectif de données. Par ailleurs, les patients peuvent contribuer à inciter le prestataire de soins à compléter les données car elles peuvent également leur être utiles. De plus, les patients peuvent toujours demander à leurs prestataires de soins d'ajouter des informations spécifiques à leur dossier de patient. Certains prestataires de soins craignent que la transparence, certainement à l’égard du patient, ne génère davantage de dossiers de responsabilité professionnelle en raison de la facilité d’accès à des données écrites par voie électronique. Mais le grand avantage de l’eHealth réside précisément dans l’écartement des erreurs médicales. Prenons l’exemple de Recip-e, les prescriptions électroniques. Les fautes d’orthographe ou de dosage seront nettement moins fréquentes, vu que le logiciel peut effectuer des vérifications. Le médecin peut aujourd’hui établir facilement des liens avec les connaissances scientifiques les plus récentes (p.ex. via EBMpracticeNet, htpps://www.ebmpracticenet.be). La loi sur les droits des patients prévoit par ailleurs que les notes personnelles, par exemple, ne doivent pas être échangées. Seules les données utiles pour les tiers doivent être échangées (p. ex. rapports d’examens, traitements/affections antérieurs en cours ou importants, médicaments, allergies, etc.). La charge de travail n’augmentera pas, vu que les données structurées partagées peuvent généralement être extraites automatiquement du dossier par de bons logiciels. Le comité de concertation des utilisateurs d’eHealth régit ce qui peut précisément être partagé avec le patient de manière structurée. Une des questions qui se pose est de savoir si p. ex. les rapports psychiatriques établis par le psychiatre doivent être partagés avec le patient. Il arrive parfois qu’une personne ne veuille pas directement voir les résultats des examens/rapports. D’autres pays ont résolu la question en prévoyant notamment un intervalle de 15 jours entre l’établissement du rapport ou des examens et son envoi. Les détracteurs disent qu’il en résultera un système à deux vitesses. Certes, tout le monde ne dispose pas de l’Internet, mais plus de 80 % des habitants en sont équipés en Belgique. Tout le monde connaît pratiquement quelqu’un qui dispose de l’Internet. Aux États-Unis (Kaiser Permanente), 70 % des assurés reçoivent des données médicales électroniques et les échangent avec les praticiens. Il sera veillé en particulier à la convivialité des applications. Quoi qu’il en soit, l’eHealth ne deviendra jamais le moyen exclusif d’échanger des informations médicales. Vous pouvez par exemple aussi imprimer le schéma de médication pour le patient. Il se peut également que la télévision numérique joue un rôle à l’avenir, etc. Il n’est pas indispensable de posséder un PC pour donner son consentement éclairé et pour gérer les relations thérapeutiques. L’enregistrement ou la gestion peut aussi s’effectuer directement (eID) chez le médecin, le pharmacien, lors d’une hospitalisation ou auprès de la mutualité. À l’heure actuelle, les praticiens disposent presque tous des logiciels nécessaires pour actualiser et échanger des données médicales de manière structurée. Le patient n’en dispose pas encore pour le moment. Nous pouvons y remédier en fournissant également au patient le logiciel nécessaire pour y parvenir. Au niveau international, on parle d’un « personal health record » ou PHR. Ce système est important surtout pour le suivi des maladies chroniques où l’autogestion du patient joue un rôle prépondérant. L’actualisation/échange électronique via des journaux de paramètres de données, par exemple, des données de mesure en cas de diabète, d’hypertension, de défaillances cardiaques chroniques, de BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive), de migraine, de troubles du sommeil, etc. en constituent quelques exemples. Par ailleurs, il pourrait être demandé au patient de compléter des questionnaires préalablement à une hospitalisation et à certaines consultations, ce qui permettrait de mieux les préparer et permettrait au médecin de gagner du temps. MC-Informations 258 • décembre 2014 9 6Télémédecine L’échange électronique de données va enregistrer une évolution considérable. Aux Pays-Bas, le médecin généraliste envoie d’ores et déjà au dermatologue des photos de lésions cutanées dont il ne peut définir avec certitude la cause. Celui-ci peut, dans la plupart des cas, poser un diagnostic à distance ou le mettre sur la voie. Le dermatologue peut facturer un montant à l’assurance maladie pour l’analyse de la photo. Les images médicales, coupes d’anatomie pathologique etc. peuvent aujourd’hui déjà être transmises par la voie numérique pour être évaluées à distance. Tout cela modifiera radicalement la façon de travailler et de rémunérer à terme. Cet aspect de l’eHealth est appelé la « télémédecine ». Le coaching « numérique » à distance (« disease management ») est appelé plutôt « télémonitoring », bien que les termes se chevauchent. Ce système permet, par exemple, de surveiller le patient à domicile et de transmettre les données aux prestataires de soins, qui peuvent alors adapter le traitement à distance, si nécessaire. Il permet aussi, par exemple, d’éviter les hospitalisations en cas de défaillance cardiaque, de suivre correctement un diabète, de garder une personne dans un centre de soins résidentiel sans devoir la transporter à l’hôpital pour certains examens, etc. Toutefois, vu les coûts élevés de ce suivi, il y aura lieu de convenir de critères clairs concernant les patients susceptibles d’être intégrés dans ces programmes de télémonitoring. 7Conclusion L’eHealth permettra d’améliorer la qualité et l’efficacité des soins de santé en Belgique grâce à l’échange électronique de données pertinentes entre les intervenants. En outre, l’échange de données de santé permettra également au patient/citoyen de se profiler comme un véritable partenaire dans l’approche de sa maladie et de sa santé. Il pourra assumer une partie des décisions dans le cadre de l’autogestion. Ceci s’inscrit également parfaitement dans le cadre de l’évolution vers une collaboration en réseau concernant le patient et avec celuici. L’eHealth offre de nombreuses possibilités, compte tenu de l’accroissement du nombre de maladies chroniques, des éventuelles pénuries de prestataires de soins pour en assurer le suivi, du souhait de rester plus longtemps chez soi. Si les partenaires se font confiance et acceptent que le partage et l’échange de données entre eux constituent la pierre angulaire de soins de santé qualitatifs, l’eHealth pourra faire la différence dans les années à venir. Pour veiller à ce que ce projet ne se limite pas à un beau rêve, l’ensemble des intervenants se sont accordés sur les objectifs à atteindre d’ici 2018. Il en a résulté la roadmap eHealth, dont les objectifs concrets ont été intégrés dans l’actuel accord de gouvernement (voir encadré). 10 Quel est l’objectif à atteindre d’ici 2018 ? •Chaque titulaire d’un Dossier Médical Global (DMG) gère un dossier relatif au patient concerné, actualise les données pertinentes dans un SUMEHR (résumé du dossier électronique) qu’il partage via Vitalink/InterMed. •Chaque hôpital dispose d’un dossier électronique structuré du patient. • Les documents hospitaliers sont partagés de manière généralisée via le système hub-métahub. • Les résultats de laboratoire intramuros et extramuros ainsi que les rapports d’imagerie médicale sont partagés via le système hub-métahub ou via Vitalink/ Inter-Med. • Les données relatives aux médicaments délivrés et au schéma de médication sont partagées par voie électronique. -Dossier pharmaceutique partagé comme source authentique des médicaments délivrés - Vitalink et Inter-Med comme sources authentiques pour le schéma de médication •La prescription électronique ambulatoire de médicaments est généralisée et étendue aux autres prescriptions (kinésithérapie, soins infirmiers, examens de laboratoire, imagerie médicale). • Le contenu minimal du dossier électronique d’un patient est fixé par profession de santé. •Utilisation généralisée de l’eHealthBox (boîte aux lettres électronique sécurisée entre praticiens). • Traçabilité des implants. • Développement d’une politique de terminologie nationale (nécessaire afin que chacun utilise une terminologie/des codes identiques pour les mêmes maladies/ traitements). •Extension du système de hub-métahub aux hôpitaux psychiatriques et maisons de repos. •Évolution de BelRAI comme instrument d’évaluation (échange électronique sur le degré de perte d'autonomie). •Débat social sur la modularité éventuelle des droits d’accès aux données des patients. • Organisation de l’accès du patient à ses données. • Modification de la réglementation et du financement pour inciter à l’utilisation des TIC. •Intégration de l’e-santé dans la formation des prestataires de soins. •Lancement des services MyCarenet (facturation électronique tiers payant, consultation électronique assurabilité, échange électronique entre hôpital et mutualité en cas d’hospitalisation…). MC-Informations 258 • décembre 2014 La PAQS, un nouvel acteur La Plateforme d’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité du patient : les fondations sont posées. Xavier de Béthune1 & Denis Herbaux 2 1. Introduction En quinze ans, le travail de Solimut et de l’ANMC dans le domaine de la qualité des soins et de la sécurité du patient a rencontré les attentes d’un nombre croissant d’acteurs du système hospitalier belge. Les Initiatives de Qualité qui avaient commencé comme quelques projets interhospitaliers, font maintenant partie d’un mouvement qui regroupe tous les acteurs significatifs du secteur et qui s’est récemment structuré au sein d’une asbl, dénommée Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité des patients. Avant de décrire la PAQS, nous retracerons l’historique de ces quinze dernières années et nous terminerons par les perspectives encourageantes qui se développent aujourd’hui. 2. Le Contexte Quand, en 2000, Solimut et l’ANMC ont lancé les Initiatives de Qualité (IdQ), ces organisations répondaient à une vague d’attention qui se développait aussi bien outre-Atlantique que chez nous. Dès 1997 en effet, la Communauté flamande avait publié son premier Kwaliteitsdecreet et au niveau fédéral, les Collèges de Médecins avaient été mis en place. Au niveau international, c’est surtout la publication du rapport de l’Institute of Medicine américain ‘To err is human’3 en 1999 qui a créé la lame de fond en faveur de la qualité des soins et de la sécurité du patient en milieu hospitalier. Les hôpitaux ont rapidement montré de l’intérêt pour les IdQ et en 2002, celles-ci mettaient en place un exercice exploratoire d’accréditation sur la gestion des risques4 , suivi en 2004 par le lancement de l’aile francophone du Netwerk Klinische Paden-Réseau Itinéraire Clinique5. L’année 2002 fut d’ailleurs une année innovatrice pour la qualité des soins en Belgique avec la mise en place du Kenniscentrum-Centre d’expertise des soins de santé6, l’Agence Intermutualiste7, le Conseil National pour la Promotion de la Qualité8 au sein de l’INAMI et le Centre for Evidence Based Medicine9 avec sa bibliothèque virtuelle10. Tout aussi significative du changement sociétal sous-jacent, la même année, la loi sur les droits des patients11 a été promulguée. En 2003, une première révision du Vlaams Kwaliteitsdecreet confirme la volonté de la communauté flamande de poursuivre l’investissement dans la qualité et la sécurité. L’année 2007 voit les autorités fédérales donner un grand coup d’accélérateur. C’est en effet cette année-là que le SPF Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et Environnement (SPF SP) invite pour la première fois les hôpitaux à participer aux contrats qualité-sécurité12. La réponse est importante et 1 Coordinateur des Initiatives de Qualité, Alliance Nationale des Mutualités Chrétiennes 2 Directeur de la PAQS 3 https://www.iom.edu/~/media/Files/Report%20Files/1999/To-Err-is-Human/To%20Err%20is%20Human%201999%20%20report%20brief.pdf 4 de Béthune X, Segouin C, Mertens R & Dusauchoit T (2007) Premiers pas de l’accréditation hospitalière en Belgique : l’évaluation d’un exercice exploratoire. Journal d’Economie Médicale, 25, 239-249. 5 http://www.uclouvain.be/ric.html et www.nkp.be 6 http://kce.fgov.be/ 7 www.aim-ima.be 8 http://www.riziv.be/care/fr/doctors/promotion-quality/cnpqnrkp/index.htm 9 www.cebam.be 10 www.cdlh.be 11 http://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/change_lg.pl?language=fr&la=F&table_name=loi&cn=2002082245 12 www.patient-safety.be MC-Informations 258 • décembre 2014 11 pendant cinq ans, la toute grande majorité des hôpitaux du pays va développer un système de gestion de la sécurité et améliorer un ensemble de processus, le tout soutenu par un financement toutefois très réduit par rapport à l’ampleur des activités développées. Les IdQ de la MC s’inscrivent dès le départ dans le soutien des hôpitaux à la réalisation des objectifs des contrats. Le Conseil Fédéral pour la Qualité de l’Activité Infirmière (CFQAI)13 du SPF SP va aussi entamer ses travaux cette année-là, en se focalisant sur la production et la comparaison d’indicateurs qui reflètent principalement les soins infirmiers. En Flandre, la déclaration de politique régionale de 200914 jette les bases pour une nouvelle collaboration entre les autorités et le secteur hospitalier. Trois piliers sont développés en collaboration étroite avec les fédérations hospitalières Icuro et Zorgnet : 1. Les hôpitaux sont encouragés – sans financement – à s’engager dans une démarche permanente d’accréditation. Celle-ci correspond à une évaluation de la gestion de la qualité par une agence externe, qui fait appel à des pairs plutôt qu’à des auditeurs professionnels. 2. La collaboration des stakeholders du système de santé au sein du ‘Vlaams Indicatorproject voor Professionals en Patiënten’ (VIPP ou VIP²)15 sera officiellement lancée en 2011. Ce projet élabore et produit des jeux d’indicateurs avec des représentants des spécialités médicales, pour permettre aux hôpitaux de se comparer entre eux, d’améliorer la qualité et finalement, de rendre publics leurs résultats. 3. L’inspection par les autorités évolue et se focalise sur des trajets de soins spécifiques, qui sont évalués dans tous les hôpitaux. L’inspection générale préexistante se limite dorénavant aux hôpitaux qui ne se sont pas inscrits dans une démarche d’accréditation. En 2010, se met en place le Partenariat Sécurité Qualité Solidaris-Santhea. Ce partenariat lance un nombre de projets collaboratifs entre les hôpitaux. Citons notamment la mesure de la satisfaction des patients, la gestion des événements indésirables ou encore l’organisation d’une structure qualité au sein de l’hôpital. L’accent porte dès 2012 sur l’évaluation externe de la qualité des soins, principalement à travers un projet conduit en collaboration avec la Solvay Brussels School of Economics and Management. Ce projet visait à évaluer, au sein de quatre institutions volontaires, la conformité des pratiques avec les exigences des agences d’accréditation à travers cinq critères. D’autres acteurs ne sont pas en reste. L’association de consommateurs Test-Achats obtient du Conseil d’Etat en 2011 l’accès aux résultats de la dernière campagne hospitalière d’hygiène des mains. Ce précédent important influencera certainement le déroulement de la nouvelle campagne qui est actuellement en cours dans les hôpitaux. Le Fonds des Accidents Médicaux16 se met également en place en 2012. Il est clairement trop tôt pour en évaluer l’impact. En 2012, le SPF SP lance un nouveau cycle quinquennal de contrats Qualité-Sécurité17. Un des objectifs prioritaires est de préparer les hôpitaux à l’accréditation. Ici aussi, la subsidiarité est construite dans les exigences : l’accréditation est prioritaire. Les hôpitaux en cours d’accréditation sont encouragés à mettre en évidence le travail réalisé dans ce cadre-là. La presque totalité des hôpitaux signe les contrats. Les priorités d’action concernent la sécurité au bloc opératoire, les médicaments à hauts risques, l’identification correcte des patients et des matériels et l’organisation des soins ‘transmuraux’, et donc, au minimum, l’admission et la sortie des patients. Pour soutenir ses plans pluriannuels, le SPF a initié des cycles de formations-action avec les départements académiques concernés et certains hôpitaux et a développé deux réseaux interhospitaliers, un pour les hôpitaux aigus et un pour les hôpitaux psychiatriques. En dehors des plans qualité-sécurité, le SPF SP propose aux hôpitaux des projets comme p. ex. l’hémovigilance, la sécurité au bloc opératoire, le care bundle de prévention des pneumonies sous ventilation assistée et organise des concertations comme le réseau des comités médico-pharmaceutiques. L’intégration de ces activités, ainsi que celles de la plateforme fédérale d’hygiène hospitalière18 est un sujet permanent de réflexion au sein du SPF SP. Autre acteur intéressant à mentionner, le Mouvement Wallon pour la Qualité19 organise tous les deux ans le Prix Wallon Qualité, dont plusieurs hôpitaux ont été lauréats, parfois à plusieurs reprises. Lors de la dernière édition, quatre hôpitaux ont participé au prix, dans le cadre d’une IdQ de la MC20. Un de ces hôpitaux, la Clinique Notre Dame de Gosselies, a remporté deux prix. C’est dans ce contexte très dense, dynamique et évolutif, que les acteurs francophones du pays lancent au début de 2013 une concertation pour aboutir à une plateforme de collaboration. La 13 http://health.belgium.be/eportal/Healthcare/healthcareprofessions/Nursingpractitioners/CouncilsandCommissions/FederalCouncilonthequalityofth/18080837_ FR?ie2Term=verpleegkunde?&fodnlang=fr 14 http://www.vlaanderen.be/sites/default/files/documents/21_wvg_2009_2014.pdf 15 https://www.zorg-en-gezondheid.be/kwaliteitsindicatorenziekenhuizen/ 16 http://www.fam.fgov.be/ 17 http://www.health.belgium.be/eportal/Healthcare/Healthcarefacilities/Patientsafety/Pluriannualprogramma2013-2017/index.htm 18 www.hicplatform.be 19 www.mwq.be 20 X. de Béthune et al. (2014) L’éveil à l’Excellence : Aussi pour les hôpitaux ? Congrès de l’ALASS, Grenade, 4-6/9/2014. (www.alass.org) 12 MC-Informations 258 • décembre 2014 Plateforme pour l’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité du patient (PAQS)21 est présentée officiellement le 11 décembre 2013 à 250 représentants du secteur et ses statuts sont déposés en juin 2014. Le gouvernement wallon a entretemps adopté le 29 août 2013 le plan wallon pour la qualité des soins hospitaliers. Ce plan reprend les axes désormais classiques de l’accréditation, des indicateurs et de l’évolution nécessaire des normes d’agrément et des structures d’inspection. Le plan propose aussi de réfléchir aux conditions optimales de publication d’indicateurs de performance et de qualité hospitaliers. La Belgique évolue donc à grands pas dans les domaines de la qualité des soins et de la sécurité des patients à l’hôpital. Elle ne le fait pas nécessairement comme pionnière, mais accompagne les changements internationaux de pays comme les Etats-Unis, l’Australie ou plus proches, la France, les Pays-Bas, les pays scandinaves et le Royaume Uni. La liste dans l’encadré 1 donne une idée non exhaustive de la multiplicité des modèles, outils et initiatives qui existent dans le domaine de la qualité. Certaines de ces approches sont génériques, comme le Lean Management ou la certification ISO ou EFQM. D’autres sont spécifiques, comme principalement l’accréditation, les itinéraires cliniques et le benchmarking d’indicateurs de la qualité des soins. Encadré 1 : Modèles, outils et initiatives de qualité •Modèles - Triade de Donabedian : Ressources – Processus – Résultats - Cycle de Deming : Plan – Do – study – Act - Model for Improvement de l’IHI • Gestion de processus et de projets - Lean management - Itinéraires de soins - Six sigma - Bundles of care -Checklists - PRINCE2, COSO,… • Evaluations externes -Accréditation - Benchmarking, registres et transparence - ISO, EFQM,… • Incitants financiers - Financement all-in - Pay 4 Performance - Preferred Provider Organisations - Diagnostic Based Costing Le contexte est donc riche et varié, fait d’un grand nombre d’activités nationales et internationales. Il sert de source d’inspiration pour la PAQS et ses membres. 21 www.paqs.be MC-Informations 258 • décembre 2014 13 2. La PAQS Commençons par l’extrait le plus significatif des statuts approuvés par le premier conseil d’administration en juin 2014 : « L’association a pour but, à l’exclusion de tout but de lucre, de promouvoir, de soutenir et d’organiser le développement et la mise en œuvre de démarches d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité dans les institutions de soins de santé en Wallonie et à Bruxelles. Afin de réaliser son but, l’association 1° développe et entretient un réseau rassemblant les acteurs actifs dans le domaine de la qualité et de la sécurité dans les soins de santé ; 2° est à l’écoute des besoins du secteur afin de proposer une offre de services globale, cohérente et efficiente visant à répondre à ces besoins ; 3° promeut l’articulation et la mise en cohérence des initiatives développées par les acteurs actifs dans le domaine de la qualité et de la sécurité dans les soins de santé ; 4° se positionne comme un interlocuteur privilégié des instances privées et des autorités ou organismes publics régionaux, communautaires, fédéraux et internationaux pour toutes les matières concernant le domaine de la qualité et de la sécurité dans les soins de santé. » Pour atteindre ces buts, la PAQS a cherché à réunir l’ensemble des acteurs pertinents autour de la table. Dès le début, les organismes assureurs et les fédérations hospitalières wallonnes et bruxelloises se sont toutes positionnées en faveur d’une collaboration. Comme garants scientifiques, les facultés et services académiques concernés par la gestion hospitalière et la qualité des soins ont rapidement rejoint les discussions. Ces trois partenaires représentaient d’emblée les piliers de la plateforme. S’y sont ajoutés progressivement des représentants des autorités et de certaines catégories de professionnels. A ce jour, la PAQS est constituée de 9 membres fondateurs : toutes les fédérations d’institutions de soins actives en Wallonie et à Bruxelles, les sociétés mutualistes ou les organismes assureurs (MC-Assure, l’Union Nationale des Mutualités Socialistes, l’Union Nationale des Mutualités Libres), et l’association francophone des médecins chefs. Par ailleurs, la faculté de santé publique de l’UCL et l’école de santé publique de l’ULB ont déjà été admises comme membres effectifs. Plusieurs demandes d’adhésion ont été reçues et seront examinées par le prochain conseil d’administration. 14 2.1.Structure En dehors des groupes de travail thématiques existants ou à créer, la structure comprend classiquement un conseil d’administration et une assemblée générale. Par ailleurs, un Conseil Qualité-Sécurité comprend des représentants des membres fondateurs, effectifs et adhérents et fait office de comité scientifique de l’organisation. Il a en charge le développement et le suivi des activités proposées aux établissements de soins. Enfin, la gestion journalière repose sur une direction qui s’entourera prochainement d’une équipe afin de rendre les différents projets opérationnels. 2.2. Développement progressif Retournons quelques mois en arrière. Le développement de la PAQS a donné lieu à de nombreuses discussions et activités qui se sont concentrées autour de trois axes : 1. La structuration en ASBL : • La structure de la plateforme a surtout été définie lors des discussions pour l’élaboration de ses statuts. Ceux-ci contiennent d’abord la mission et les objectifs de la PAQS, dont nous avons déjà parlé. Ils parlent évidemment aussi des membres et des organes de décision. Ils précisent surtout les mécanismes de décision au sein des organes. • Les relations avec les autorités sont un des points d’attention continue. La plateforme se situe en effet à cheval sur les deux régions de la fédération Wallonie-Bruxelles. La région de Bruxelles-Capitale est par ailleurs bi-communautaire, avec ses spécificités. Il est primordial de construire une relation forte et durable avec les différentes autorités pour assurer la légitimité de la Plateforme vis-à-vis de tous les acteurs. • Le financement de la PAQS est le dernier aspect structurel. Une diversité de sources de financement doit être approchée, tandis qu’un éventail correspondant de bénéficiaires doit être déployé. A ce stade-ci, les principaux bailleurs de la PAQS sont les autorités et les organismes assureurs. Les activités ont été exécutées principalement par les fédérations hospitalières et les institutions académiques. MC-Informations 258 • décembre 2014 2. Rendre la PAQS visible En dehors de ses activités propres, la visibilité de la PAQS a reposé principalement sur la journée de lancement qui a eu lieu à Namur le 11/12/2013, sur la mise en place de son site web, sur la diffusion de trois newsletters et sur la consolidation d’une mailing list rassemblant plus de 600 adresses. L’objectif est de s’assurer qu’un maximum de professionnels soit touché par les informations que la PAQS diffuse. 3. Activités de préparation Dès 2014, la PAQS a tenu à répondre aux besoins des hôpitaux en réalisant une série d’activités d’information, de formation et de coordination. • Information Trente personnes ont assisté à trois séminaires de deux jours organisés avec les agences d’accréditation intéressées par le ‘marché’ belge. Il s’agit, dans l’ordre alphabétique, d’Accréditation Canada International22 , de la Haute Autorité en Santé française23 et de la Joint Commission International américaine24. Ce groupe de trente personnes s’est engagé à répondre aux questions que les hôpitaux pourraient se poser à propos de l’accréditation. Plusieurs demandes ont ensuite été reçues et des réunions sont organisées dans les hôpitaux pour le moment. •Formations Trois cycles de formation sont organisés en 2014 : - Des journées d’éveil à l’accréditation ont été organisées en mars/avril. Cette phase de sensibilisation visait les différentes directions des hôpitaux. Dans le cadre d’une étude réalisée pour la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’école de santé publique de l’ULB et Santhea ont développé une grille d’« accréditabilité » qui doit permettre aux hôpitaux d’identifier les priorités à réaliser avant de s’engager dans une démarche complète d’accréditation25. Cette grille a été présentée aux différentes directions des hôpitaux lors de ces journées. Une dernière journée Opera 5S+ regroupera en novembre les différentes directions de chaque hôpital pour aboutir à une évaluation multidisciplinaire du degré de préparation de chaque institution. - Cinq modules, organisés par la faculté de santé publique de l’UCL, ont permis de former 25 personnes comme référents ‘Accréditation’ de leurs hôpitaux. - Une formation à la gestion documentaire organisée par l’UMons, complètera le volet des formations pendant le dernier trimestre de 2014. La gestion correcte de la communication passe comme un fil rouge à travers les autres formations. Il est fait appel à l’équipe du CHU du Sart-Tilman pour animer cette partie de chaque formation. • Coordination : Groupe de travail des Initiatives de Qualité Les différents réseaux et projets d’amélioration de la qualité des soins (IdQ des MC et Partenariat Mutualités socialistes-Santhea, Réseau des hôpitaux aigus et Réseau Qualpsy, Projet Navigator du Réseau Santé Louvain) se réunissent régulièrement pour partager leurs activités et calendriers et prévenir les redondances et les conflits d’agendas. A terme, la plupart de ces activités pourrait s’offrir à travers la PAQS. • Plan d’action 2015 Le plan d’action 2015 est en cours d’élaboration. Il devrait être approuvé avant la fin de l’année. Les éléments suivants sont étudiés comme pistes potentielles : - L’information et l’accompagnement des hôpitaux sur la route vers l’accréditation, en favorisant l’échange d’expériences, le travail collaboratif sur des pratiques prioritaires et la mesure répétée des évolutions - Un focus sur les médicaments à hauts risques26 - La mise à disposition de ressources documentaires pour les hôpitaux afin de soutenir les démarches entreprises - Une réflexion sur les indicateurs dans le cadre des démarches d’amélioration continue. 22 www.internationalaccreditation.ca 23 www.has-sante.fr 24 http ://www.jointcommissioninternational.org/ 25 L’outil et son mode d’emploi sont disponibles sur : http://www.paqs.be/activites/formations 26 A. Staines (2014) Breakthrough collaboratives et Actions d’amélioration pour la gestion des médicaments : l’expérience suisse. Priorités et résultats. Workshop sur la gestion des médicaments à hauts risques. Bruxelles, 13/6/2014. MC-Informations 258 • décembre 2014 15 3. Conclusion : Une vision ancrée dans le futur La PAQS se voit surtout comme une opportunité et un soutien pour répondre aux besoins des hôpitaux. Ceux-ci et les patients qui s’y soignent, représentent les acteurs centraux de la plateforme. Sur cette base, la PAQS peut renforcer les liens des hôpitaux entre eux, avec les autorités et avec des partenaires innovants nationaux et internationaux. Elle s’inscrit dans la dynamique préexistante du pays. Les études récentes du KCE sur l’accréditation hospitalière27 ou sur le financement des hôpitaux28 montrent, tout comme l’étude HPI.be29 sur la place des indicateurs de qualité ou l’étude annuelle MAHA30 sur le financement, que cette dynamique est ancrée tant dans l’évidence scientifique que dans les données du terrain. Ces études identifient aussi la complexité de la matière à traiter pour améliorer de façon durable la qualité des soins et la sécurité du patient. Par ailleurs, l’avance prise par les pays limitrophes de la Belgique, et même par la Flandre, démontrent la faisabilité des options retenues par la PAQS. La multiplication et l’internationalisation des agences d’accréditation est un autre facteur qui démontre aux yeux de la PAQS, l’intérêt croissant porté à la qualité des soins et la sécurité du patient. Enfin, l’émergence plus récente de plusieurs instituts ou agences nationaux de la qualité - dont la Haute Autorité en Santé31 et l’Agence Nationale d’Amélioration de la Performance32 en France, l’Institute for Healthcare Improvement (IHI)33 aux USA, NHSIQ34 ou Healthcare Improvement Scotland35 au Royaume Uni et CBO36 aux Pays-Bas ne sont que quelques exemples - identifie un potentiel de développement de la plateforme, à adapter au contexte de notre pays. De la même façon que le VIP² et le développement récent de nombreuses équipes académiques en Flandre représentent une source d’inspiration pour répondre aux mêmes défis. Enfin, la question d’étendre la PAQS au secteur des personnes âgées a déjà été posée. La collaboration avec le secteur ambulatoire (médecine générale, pharmacie d’officine, soins à domicile, autres professions de santé et la gestion des échanges électroniques de données) sera à terme une plusvalue importante. Et il faut évidemment s’attendre à ce que le rôle du patient dans les projets et même au sein de la plateforme aille en s’accroissant. Le système de santé et les hôpitaux de demain ne ressembleront pas à ceux que nous connaissons aujourd’hui. Disposer d’une plateforme comme la PAQS pour impulser la qualité tout en tenant compte des évolutions envisagées par le secteur lui-même et ses partenaires prioritaires représente un atout important pour que les évolutions se fassent au profit de tous et surtout des patients. 27 de Walcque, C, Seuntjens, B, Vermeyen, K, Peeters, G. & Vinck, I. (2008) Etude comparative des programmes d’accréditation hospitalière en Europe. Health Services Research (HSR). Bruxelles: Centre fédéral d’expertise du soins de santé (KCE). KCE reports 70B, D/2008/10.273/02 https://kce.fgov.be/fr/publication/ report/etude-comparative-des-programmes-d%E2%80%99accr%C3%A9ditation-hospitali%C3%A8re-en-europe 28 Van De Sande S, De Ryck D, De Gauquier K, Hilderson R, Neyt M, Peeters G, Swartenbroekx N, Tambeur W, Vanden Boer G, Van de Voorde C. (2010) Étude de faisabilité de l’introduction en Belgique d’un système de financement « all-in » par pathologie. Health Services Research (HSR). Bruxelles: Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE).. KCE Reports 121B. D/2010/10.273/02 https://kce.fgov.be/fr/publication/report/%C3%A9tude-de-faisabilit%C3%A9-del%E2%80%99introduction-en-belgique-d%E2%80%99un-syst%C3%A8me-de-financement-ho 29 Lucet C. et al. (2011) HPI.be Hospital Performance Indicators. Indicateurs de performance hospitalière en Belgique. SPF Santé Publique, Bruxelles. http://orbi. ulg.ac.be/handle/2268/109524 30 Dessoy A & Van Laer J (2014) Analyse sectorielle des hôpitaux généraux sur base du modèle Maha. Belfius, 2/10/2014. https://www.belfius.com/FR/Media/ MAHA2014SlidesFR_tcm_78-81917.pdf 31 www.has-sante.fr 32 www.anap.fr 33 www.ihi.org 34 http://www.nhsiq.nhs.uk/ 35 http://www.healthcareimprovementscotland.org/ 36 www.cbo.nl 16 MC-Informations 258 • décembre 2014 Vieillissement et soins aux personnes âgées État des lieux – 1re partie Naïma Regueras et Rebekka Verniest, Département Recherche et Développement Synthèse La population belge vieillit, ce n’est pas nouveau. Entre 2013 et 2030, le pourcentage des personnes de plus de 65 ans dans la population totale augmentera de quelque 18 % à plus de 22 %. La part de personnes très âgées croît de manière encore plus sensible, avec un nombre de personnes de 80 ans et plus qui passera de 5,3 % à 6,3 % de la population. La Flandre affiche une accélération du vieillissement plus marquée que la moyenne nationale, tandis que Bruxelles, après un rajeunissement les premières années, n’enregistrera un vieillissement qu’à partir de 2020. Le vieillissement augmentera le nombre de personnes atteintes de maladies de longue durée et les problèmes de dépendance, ce qui fera à son tour progresser la demande de soins et d’aide. Un phénomène qui soulève d’emblée la question de l’accessibilité financière des soins dans le futur. À moins d’un changement de stratégie, le total des dépenses publiques pour les soins de santé passera en effet de 8,2 % en 2013 à plus de 10 % à partir de 2030. Il est évident que des choix politiques s’imposent, certainement si l’on veut maintenir une bonne protection sociale. A cela s’ajoute le défi de la sixième réforme de l’État, qui a étendu sensiblement les compétences des autorités régionales, notamment au niveau des soins aux personnes âgées. Les réformes antérieures leur avaient déjà confié la charge desdites matières personnalisables et une partie des compétences relatives aux maisons de repos. Ces compétences sont dorénavant étendues notamment au financement des structures d’accueil et à l’organisation de la première ligne. Le centre de gravité est donc définitivement déplacé vers les autorités régionales, certainement en ce qui concerne l’aide et les soins aux personnes âgées. En principe, les compétences ont été transférées aux Communautés, mais par le truchement d’accords mutuels, elle revient en Wallonie à la Région wallonne. Bruxelles, quant à elle, sera soumise à un système particulier, qui tient compte du régime linguistique de l’établissement pour définir le siège de compétences. En fonction de la situation, il s’agira de la Communauté flamande, de la Commission de la Communauté française (COCOF) ou de la Commission communautaire commune (CCC). Une plus grande homogénéité des compétences devrait, en principe, aboutir à une politique plus cohérente au niveau régional. Néanmoins, l’autorité fédérale conserve encore une série de compétences, de sorte que la concertation et la collaboration resteront nécessaires à l’avenir. L’offre d’aide et de soins est aujourd’hui extrêmement diversifiée, non seulement sous l’effet des réformes successives de l’État, mais aussi de par le souci de répondre toujours au mieux aux souhaits et aux besoins spécifiques des bénéficiaires. Les seniors peuvent faire appel à un large éventail de dispositifs et de services, tant dans le cadre des soins à domicile qu’au niveau des soins (semi-)résidentiels. Des soins médicaux, paramédicaux et des services d’aide sont prévus dans différents domaines comme les soins aux personnes, l’aide-ménagère, ou l’assistance générale. Une offre spécifique est également proposée à certains groupes cibles, comme les personnes atteintes de démence ou de problèmes psychiques ou les patients palliatifs. Ce morcellement important étant susceptible de nuire à la cohérence des soins et à la continuité, des structures ont été développées afin d’assurer une meilleure coordination de l’offre, la concertation et la collaboration. Au niveau des différentes autorités également, des structures ont été prévues pour la concertation commune. Enfin, le secteur des soins aux personnes âgées a montré un grand dynamisme ces dernières années et a enregistré de nombreuses initiatives innovantes. Mots-clés : vieillissement, soins aux personnes âgées, soins à domicile, maisons de repos, réforme de l’État MC-Informations 258 • décembre 2014 17 1.Introduction 2. Le vieillissement en Belgique : état des lieux La population vieillit, et notre société fait face aujourd’hui à des défis majeurs tant au niveau de l’organisation des soins de santé et de l’aide qu’au niveau financier. Cependant, le vieillissement n’impacte pas seulement le secteur de la santé, de très nombreux autres domaines stratégiques, tels que le logement, l’éducation et l’emploi, subissent également l’impact d’une population vieillissante. Dans cette première contribution descriptive, nous illustrerons le phénomène du vieillissement à l’aide de quelques chiffres. Nous nous pencherons sur l’évolution démographique, l’évolution du niveau de dépendance et l’impact sur le total des dépenses en matière de soins de santé. Une population vieillissante entraîne indubitablement une hausse de la demande de soins et d’aide de longue durée. C’est pourquoi, la troisième partie de cet article se concentrera sur l’étendue de l’offre de soins et d’aide auxquels les seniors peuvent faire appel. L’accent reposera sur la diversité, sans avoir l’ambition d’être exhaustif. Et vu que cette image est fortement influencée par le partage des compétences en matière de soins aux personnes âgées, nous reviendrons au préalable sur les autorités qui y jouent un rôle. Dans une seconde contribution, qui sera publiée dans un prochain numéro de MC-Information, nous reviendrons plus en détail sur quelques défis et enjeux importants que le domaine des soins et de l’aide aux personnes âgées devra relever dans les années à venir pour répondre aux besoins d’une population vieillissante . 2.1. Perspectives démographiques En 2013, 17,7 % de la population belge était âgée de plus de 65 ans et 5,3 % de plus de 80 ans. D’ici 2030, ces proportions devraient s’élever à 22,6 % et 6,3 % respectivement. Aujourd’hui donc, près de 2 millions de belges sont âgés de 65 ans ou plus. Ce sera le cas pour près de 2,7 millions en 2030 et 3,2 millions en 2060. Si ce seul constat a déjà de quoi affoler les responsables de notre système de pensions et de soins de santé (qui ont d’ailleurs déjà décidé de repousser l’âge légal de la retraite à 67 ans), un autre phénomène se produit également sur notre territoire, celui du vieillissement dans le vieillissement. En effet, non seulement le nombre de personnes âgées va augmenter mais celui du nombre de personnes « très âgées » va progresser proportionnellement plus rapidement. Si aujourd’hui plus de 580.000 belges sont âgés de plus de 80 ans, ce nombre passera à 770.000 en 2030 et 1,2 millions en 2060. Cependant, la population âgée ne progresse pas de la même façon sur l’ensemble du pays. En effet, des trois régions c’est la Flandre qui sera la plus touchée par le vieillissement de sa population, juste au-dessus de la Wallonie. A Bruxelles, la proportion de personnes âgées de plus de 65 ans devrait, au contraire, diminuer entre aujourd’hui et 2020 avant de croître progressivement (voir figure 1). Il ressort de ce même graphique que le phénomène de vieillissement sera particulièrement soutenu jusqu’en 2040 avant de se stabiliser entre 2040 et 2060. Conséquence directe de la progression de l’espérance de vie (78 ans pour les hommes et 81,3 ans pour les femmes en 2013) et du baby-boom d’après-guerre, la part de la population de plus de 80 ans augmentera très rapidement à partir de 2025. Figure 1 : Evolution de la part des plus de 65 ans dans la population totale (2013-2060) 30,0% 25,0% 20,0% Belgique Bruxelles Région wallonne Région flamande 15,0% 10,0% 5,0% 0,0% 2013 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050 2055 2060 Source : DGSIE – Bureau du Plan 18 MC-Informations 258 • décembre 2014 Figure 2 : Evolution de la part des plus de 80 ans dans la population totale (2013-2060) 12,0% 10,0% 8,0% Belgique Bruxelles Région wallonne Région flamande 6,0% 4,0% 2,0% 0,0% 2013 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050 2055 2060 Source : DGSIE – Bureau du Plan C’est à nouveau en Flandre que la proportion devrait croître le plus rapidement en passant de 5,5 % en 2013 à plus de 8 % en 2035 et 11,3 % en 2060. La Wallonie suit la même trajectoire même si la proportion de plus de 80 ans reste inférieure à celle de la Flandre sur toute la période. A Bruxelles, la proportion de plus de 80 ans devrait diminuer entre aujourd’hui et 2025. Cette décroissance ne reflète pas une diminution du nombre de plus de 80 ans, lequel augmente, mais une croissance proportionnellement plus rapide des tranches de la population plus jeunes. 2.2. La dépendance S'il est généralement admis que dans nos pays, l’augmentation de l’espérance de vie s’est accompagné d’une hausse de l’espérance de vie en bonne santé1, l’augmentation du nombre de personnes âgées entrainera sans aucun doute une hausse du nombre de personnes dépendantes, si pas en proportion du moins en valeur absolue. Cependant, aujourd’hui encore, il est difficile d’évaluer de manière précise le nombre de personnes en perte d’autonomie et nécessitant de l’aide ou des soins et ce pour diverses raisons. Tout d’abord parce que les formes d’aides et de soins existantes sont multiples (infirmières à domicile, aide familiale, aide-ménagère, garde malade,…) et que les informations relatives à ces différentes formes de prises en charge (par exemple le nombre de bénéficiaires) ne sont pas rassemblées dans une même et seule base de données. Pour pouvoir les comptabiliser il faudrait donc pouvoir croiser différentes sources d’informations. Deuxièmement, parce que toutes les personnes en perte d’autonomie ne font pas appel à ce type de services pour différentes raisons (manque de moyen, d’information, elles sont prises en charge par les proches,…). Cependant, quelques chiffres peuvent nous éclairer sur l’ampleur de l’utilisation de certains services de soins en particulier : les soins infirmiers à domicile et les maisons de repos. Au 31 juin 2011, plus de 122.000 personnes étaient résidentes dans une maison de repos dont près de 66.000 en Flandre, plus 42.000 en Wallonie et 13.000 à Bruxelles2. De manière générale, les femmes sont plus nombreuses en maison de repos que les hommes, en moyenne trois fois plus. La plupart des résidentes sont âgées de 85 ans ou plus (62,2% à Bruxelles, 57,8% en Wallonie et 62,7% en Flandre). Au contraire les hommes institutionnalisés sont souvent plus jeunes (46,5% d’hommes âgés de plus de 85 ans en Flandre, 47,6% à Bruxelles et 37,4% en Wallonie). En ce qui concerne les soins infirmiers à domicile, près de 118.000 personnes de plus de 65 ans en ont bénéficié en Flandre au 31 juin 2011, plus de 43.000 en Wallonie et plus de 6.000 à Bruxelles, soit un total de plus de 169.000 bénéficiaires3. De manière générale, les bénéficiaires de soins infirmiers sont plus jeunes que les résidents de maison de repos (environ 75% 1 Définie comme le nombre d’années vécues en l’absence de limitations d’activités dans les actes de la vie quotidienne et l’absence d’incapacités 2 Etude AIM : «Prise en charge des personnes dépendantes à Bruxelles et en Wallonie: état des lieux et évolution sur la période 2004-2011» 3 Etude AIM : “Transitie naar meer residentiële ouderenvoorziening in het Vlaamse Gewest”. MC-Informations 258 • décembre 2014 19 des hommes et plus de 60% des femmes sont âgés de moins de 85 ans). En ce qui concerne les services d’aides (aide familiale, aideménagère, garde malade), il n’existe pas de base de données unique reprenant tous les bénéficiaires de ce type de services. En effet, ces compétences sont actuellement gérées et subsidiées par les Communautés et Régions et ne font pas partie des prestations reconnues par l’INAMI. Cependant, dans son rapport d’activité, la Fédération d’aide et de soins à domicile (FASD) estime avoir fourni des services d’aides à plus de 26.000 bénéficiaires en Wallonie et à Bruxelles en 2013. La même année, l’ASBL Familiehulp a proposé ces services d’aides à plus de 80.000 personnes en Flandre et à Bruxelles. D’après l’enquête de santé de 2008, 34 % des belges de plus de 75 ans ont déclaré avoir eu recours à des services d’aides à domicile au cours des 12 mois précédent l’enquête4. Ce pourcentage varie d’une région à l’autre, il est plus élevé en Flandre (près de 40 % pour les hommes et plus de 45% pour les femmes) et similaires à Bruxelles et en Wallonie (environ 15 % des hommes de plus de 75 ans et un peu moins de 25 % des femmes). Dans de nombreux cas, les personnes en perte d’autonomie ne font appel à aucun ou a peu de ces services et sont pris en charge par leur entourage. L’aide informelle est un des maillons essentiel de la prise en charge de la dépendance. En effet, au-delà de 80 ans plus de 40 % des hommes et des femmes reçoivent l’aide d’au moins un proche à Bruxelles et en Wallonie5. On considère qu’un dixième de la population est aidant proche, ce qui représente 660.000 personnes en Région flamande et 440.000 en Fédération Bruxelles-Wallonie6. Sans les aidants proches de nombreuses personnes en perte d’autonomie devraient recourir d’avantage aux services professionnels ou à l’institutionnalisation, aggravant ainsi des problèmes tels que le manque de main d’œuvre, de moyens ou d’infrastructures que connaissent déjà les professionnels du secteur. Reconnaissant les difficultés auxquelles ces aides informelles peuvent faire face, certaines associations ainsi que les mutualités ont développé une offre d’aide et de soutien (information, répit, garde malades…) destinées aux aidants proches (voir infra). Figure 3 : Répartition du budget de la Sécurité Sociale entre les différentes branches 50,0% 45,0% 40,0% 35,0% 30,0% 25,0% 20,0% 15,0% 10,0% 5,0% 0,0% 2000 2006 2012 Soins de santé et idemnités Chômage Pensions Allocations familiales Accidents du travail et maladies professionelles INASTI (Pensions, Allocations fam., Assurance faillite) Source : Vade-mecum de la Sécurité Sociale 2014 20 4 L’enquête de santé a été remise à jour en 2013, malheureusement les résultats relatives aux soins à domicile ne seront publié qu’en mars 2015. 5 Source : enquête SHARE 2011 6 Source : Mémorandum ASBL Aidants proches MC-Informations 258 • décembre 2014 2.3. Impact du vieillissement sur les dépenses de soins de santé Ce n’est plus un secret, le vieillissement de la population aura un impact important sur notre société en général et sur le financement de notre système de protection sociale en particulier. Dans ce domaine, les soins de santé représentent, avec les pensions, le domaine de la sécurité sociale qui sera le plus touché. Ces dernières années déjà, les dépenses de santé ont augmenté rapidement, et représentent aujourd’hui la part du budget la plus importante de la sécurité sociale (figure 3). Mais, si jusqu’à aujourd’hui, une part très importante de la croissance des dépenses a pu s’expliquer par une série de facteurs non-démographiques (évolution des prix, augmentation des prestations reconnues par l’INAMI, innovations technologiques dans le domaine médical, changements de comportement,…) le « poids » du vieillissement sur les dépenses de santé devrait s’accroître dans les décennies à venir. La raison principale est le lien entre le niveau de dépenses et l’âge des bénéficiaires (figure 4). En effet, les dépenses de santé ont tendance à augmenter avec l’âge (plus de soins chroniques, plus d’hospitalisations, de médicaments, …). Si le nombre de personnes âgées augmente, il est donc logique, qu’à politique inchangée, les dépenses de santé augmentent. Les soins de santé représentent actuellement près de 11 % de notre PIB dont 8,2 % à charge des pouvoirs publics. Selon les estimations du Bureau du Plan7, cette dernière proportion devrait passer de 8,2 % en 2013 à 10,1 % en 2030, 10,9 % en 2040 et retomber à 10,3 % en 2060. De nombreuses questions se posent dès lors. La première étant de savoir comment, à l’avenir, les pouvoirs publics pourront continuer à financer des soins de santé de qualité accessibles pour tous. En particulier, comment assurer la prise en charge d’un nombre toujours plus important de personnes dépendantes ? Concernant la question du financement, il relèvera d’une véritable volonté politique de trouver les moyens pour continuer à financer les soins de santé sans tomber dans le piège de la privatisation. Premièrement, des transferts de moyens au sein même du budget des soins de santé seront nécessaires pour mettre en place une politique de santé qui répondent aux nouveaux besoins de la population (essentiellement des soins de longue durée et en dehors de l’hôpital le plus longtemps possible). En effet, notre système de santé repose Figure 4 : Dépenses de l’assurance maladie-invalidité en fonction de l’âge, membres MC 2013 Dépenses AMI totales et moyennes pour les membres MC en 2013, selon l'âge et le sexe F Dépenses totales F Dépenses moyennes 18.000 16.000 140.000.000 14.000 120.000.000 12.000 100.000.000 10.000 80.000.000 8.000 60.000.000 6.000 40.000.000 4.000 20.000.000 2.000 1 3 5 7 9 11 13 15 17 19 21 23 25 27 29 31 33 35 37 39 41 43 45 47 49 51 53 55 57 59 61 63 65 67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 101 Dépenses totales (euro) 160.000.000 H Dépenses totales H Dépenses moyennes Dépenses moyennes (euro) 180.000.000 0 Age 7 Comité d’étude sur le vieillissement : rapport juillet 2014. MC-Informations 258 • décembre 2014 21 encore trop largement sur l’offre de soins aigus et coûteux et les formes alternatives de prise en charge sont encore trop peu développées (centre de revalidation, de convalescence, centres d’accueil, court séjour,…). Deuxièmement, au-delà d’une meilleure allocation des moyens dont nous disposons, les Mutualités chrétiennes plaident depuis longtemps pour un élargissement des sources de financement de la Sécurité Sociale dans son ensemble, à travers, par exemple, la mise en place du Cotisation Sociale Généralisée prélevée sur l’ensemble des revenus des contribuables, et pas seulement sur les revenus du travail. A ce défi de taille s’ajoutent ceux apportés par la 6e réforme d’Etat et le transfert de compétences aux Communautés et Régions. A partir du 1er janvier 20158, une série de compétences financées jusqu’à présent par l’Etat fédéral et touchant directement à la politique de santé des ainés seront transférées aux Communautés et Régions. Dans ce paquet de compétences transférées on retrouve notamment le secteur des maisons de repos et de soins, une partie des conventions de revalidation, des compétences relatives à l’organisation de la première ligne, de la santé mentale ou encore de la prévention. A l’avenir, ces compétences ne pourront plus compter sur un financement fédéral issu d’un modèle basé sur la solidarité entre tous les belges. Face à ces enjeux, une solution souvent avancée pour contrôler la croissance des dépenses est de favoriser le maintien à domicile des personnes peu dépendantes. Mais cela est-il aussi simple ? Et cela coûte-t-il réellement moins cher ? Les données nécessaires à cette évaluation manquent cruellement. Mais à défaut de se demander si cela coûte moins cher, nous pouvons affirmer qu’il relève de la volonté de la plupart des aînés de pouvoir rester le plus longtemps possible chez soi dans de bonnes conditions. Dès lors, il est nécessaire de revoir l’organisation de notre système de santé en l’orientant d’avantage vers le secteur des soins et de l’aide en ambulatoire. Mais cela est-il possible ? Quels sont les obstacles que rencontrent déjà aujourd’hui ces secteurs ? La réponse à cette question fera l’objet de la seconde partie de cet article qui sera publiée dans le prochain numéro du MCInformations. En attendant, petit tour d’horizon des différentes formes de prises en charge, à domicile et en (semi-)résidentiel, qui existent dans notre pays. 8 22 3. Partage des compétences en matière d’aide et de soins aux personnes âgées Les prestataires d’aide et de soins tiennent de plus en plus compte des souhaits et des besoins spécifiques des personnes dépendantes. Ceci explique en partie l’apparition d’un éventail particulièrement large de services d’aide et de soins auxquels les seniors peuvent faire appel, qu’il s’agisse de soins et d’aide formels ou informels, de soins résidentiels, semi-résidentiels et de soins et d’aide à domicile, de soins médicaux et paramédicaux ou diverses autres formes d’aide. Chaque structure ou service tente, à son niveau, d’apporter une réponse à un ou plusieurs besoins. Une partie de l’offre s’adresse spécifiquement aux seniors, d’autres structures et services sont accessibles à l’ensemble de la population, mais sont très souvent plébiscités par des personnes âgées. Une offre spécifique s’adresse également à certains groupes cibles, comme les patients palliatifs et les personnes atteintes de démence. Plus loin dans cet article, nous ferons un tour d’horizon des ces différentes formes de prise en charge. En l’occurrence, il y a lieu de remarquer que les différences régionales en termes d’offre sont nombreuses en la matière. Ces divergences résultent des réformes successives de l’État, qui ont transféré une partie des compétences du niveau fédéral vers les Régions et les Communautés. Chaque autorité régionale peut ainsi fixer ses propres priorités dans le cadre de la politique des soins aux personnes âgées. C’est pourquoi, nous tenons, dans un premier temps, à faire le point sur le partage des compétences en matière de soins et d’aide aux seniors. Après une première réforme de l’État timide en 1970, c’est surtout la seconde réforme de 1980 qui a modifié radicalement le partage des compétences entre les autorités. Les Communautés deviennent alors compétentes notamment pour les « matières personnalisables » et une partie des soins de santé et l’aide aux personnes tombent sous le giron des entités fédérées. En principe, ce sont donc les Communautés qui sont en charge des matières personnalisables : la Communauté flamande, la Communauté française et la Communauté germanophone. La région bilingue de Bruxelles-Capitale est soumise à un régime particulier. Les Communautés flamande et française ne sont compétentes que pour lesdits « établissements unicommunautaires » ou les établissements dans la zone bilingue de Bruxelles-Capitale qui, en raison de leur organisation, doivent être considérés comme appartenant exclusivement à l’une ou à l’autre Communauté. Pour les établissements bicommunautaires, la compétence revient depuis 1989 à la Commission communautaire commune (CCC ou COCOM). Il importe encore d’ajouter que depuis les Accords de la Saint- En réalité, les Régions et Communautés sont compétentes dans les domaines transférés depuis le 1er juillet 2014 tandis que les budgets y afférant seront, quant à eux, transférés à partir du 1er janvier 2015. MC-Informations 258 • décembre 2014 Michel en 1992, une partie des compétences de la Communauté française a été transférée en 1994 à la Région wallonne et à la Commission de la communauté française à Bruxelles (COCOF). Il s’agit notamment de domaines clés de la politique de santé et du bien-être. Dans le cadre des Accords de la Sainte-Émilie, les quatre grands partis wallons ont convenu d’appliquer cette même organisation aux nouvelles compétences transférées. Après de nouvelles réformes en 1988, 1993 et 2001, c’est essentiellement la sixième et dernière réforme de l’État de 2011-2012, entrée en vigueur le 1er juillet 2014, qui remanie pour la seconde fois en profondeur les compétences dans le domaine des soins de santé. Avec ledit Accord papillon, le centre de gravité est définitivement déplacé vers les Communautés, notamment pour les soins aux personnes âgées. Avant la sixième réforme de l’État, les Communautés étaient déjà chargées de la politique relative au maintien à domicile (politique d’aide aux familles). Elles étaient libres d’aménager des services, de fixer les normes et procédures d’agrément, de définir la programmation, de régler le subventionnement. Chaque autorité régionale compétente a donc développé sa propre réglementation en matière de services d’aide aux familles. En ce qui concerne les soins résidentiels et semi-résidentiels, notamment dans les maisons de repos, les Communautés étaient déjà compétentes pour les normes d’agrément des maisons de repos pour les personnes âgées (MRPA) ainsi que pour l’agrément en tant que tel, la fermeture et le subventionnement des investissements des MRPA et MRS (maisons de repos et de soins). La récente réforme transfère également le financement des soins dans les MRPA et MRS, les courts séjours et les soins de jour aux Communautés. Elles sont dorénavant aussi en charge des normes d’agrément des MRS. Il s’agit en l’occurrence d’un budget de 2,425 milliards EUR. La récente réforme de l’État prévoit encore différents transferts de compétences dans le domaine des soins et de l’aide aux personnes âgées. Les Communautés acquièrent en effet aussi des compétences en matière d’allocation d’aide aux personnes âgées (APA), d’aide à la mobilité des personnes âgées, de reconnaissance des professions de la santé et d’organisation de la première ligne (e.a. SISD, RML9 et les réseaux palliatifs). Le secteur des titres-services, qui prévoit des services d’aide à domicile, passe également du niveau fédéral aux Régions. Cette sixième réforme de l’État répond à la demande − qui ne date pas d’hier − d’une plus grande homogénéité des compétences. La coexistence des normes de personnel fédérales et 9 régionales, les chevauchements de l’offre, le fractionnement des compétences relatives aux normes d’agrément, d’une part, et les agréments d’autre part, sont autant d’aspects qui empêchaient de mener une politique cohérente dans le passé. On part aujourd’hui du principe que, grâce au large transfert de compétences de l’Accord papillon, les autorités régionales pourront mener une politique plus intégrée concernant les personnes âgées et pourront mieux harmoniser les différentes structures et services, compte tenu des caractéristiques spécifiques de chaque communauté ou région. Le principal défi pour les autorités régionales consiste donc à intégrer les compétences nouvellement acquises dans les compétences existantes. Elles sont effectivement compétentes depuis le 1er juillet 2014, mais une période transitoire est prévue jusque 2017 au plus tard. Jusqu’à cette date, la continuité de l’exercice des compétences est assurée. Tant qu’une communauté ou une région ne développe pas sa nouvelle réglementation, la réglementation existante reste d’application et l’exercice se poursuit tel que prévu avant le 1er juillet. Les mutualités poursuivront donc leur mission dans le cadre de l’exécution de la réglementation des soins aux personnes âgées jusqu’à nouvel ordre. Il convient de remarquer que, malgré la nouvelle homogénéisation des compétences en matière de soins aux personnes âgées, la concertation restera nécessaire entre les différentes autorités. L’autorité fédérale reste en effet toujours compétente pour une partie des soins aux personnes âgées. Tel est le cas notamment de la réglementation relative aux professions médicales et paramédicales (AR 78), du financement des soins à domicile, des prestations des médecins généralistes et spécialistes, des prestations de kinésithérapie dans les MRPA, de la politique en matière de médicaments et de financement des frais de soins et de traitement dans les hôpitaux. Par conséquent, la concertation et la coordination entre les différentes autorités compétentes resteront nécessaires à l’avenir. 4. Offre d’aide et de soins aux seniors 4.1. Offre d’aide et de soins extramuros ou ambulatoires pour les seniors 4.1.1. Soins informels ou non professionnels (soins de proximité ou bénévolat) Influencée, d’une part, par la tendance générale à la socialisation des soins et, d’autre part, par la volonté des seniors de rester le plus longtemps possible chez eux, même en cas de dépendance, la politique a mis l’accent sur les soins et l’aide Les réseaux multidisciplinaires locaux, créés par les cercles de médecins généralistes, soutiennent les prestataires de soins lors de l'établissement des trajets de soins. MC-Informations 258 • décembre 2014 23 à domicile au cours de la dernière décennie. Les prestataires de soins informels ont à ce jour joué un rôle prépondérant dans le maintien à domicile, qu’il s’agisse de membres du ménage et de la famille ou de bénévoles, d’amis et de voisins. Chaque jour, ces personnes assument de nombreuses tâches dans le cadre des soins et de l’aide aux personnes dépendantes, tant pour les aspects pratiques qu’administratifs… Il ressort de certaines études que leur intervention correspond à celle de nombreux ETP. Des études ont également démontré à maintes reprises la vulnérabilité de ces aidants, notamment lorsqu’il s’agit de membres de la famille proches. En effet, un niveau de dépendance accru entraîne une intensification des soins de proximité, augmentant ainsi la pression sur ces derniers. Pour répondre à ce problème, les différentes autorités ont pris des mesures afin de soutenir les aidants proches, notamment par le biais de régimes de congé (congés pour soins palliatifs) et de formes de répit et de soutien. De nombreuses associations et organisations proposent une offre concrète pour soutenir les aidants proches et les bénévoles notamment en organisant des soirées d’informations thématiques, de sessions de formation, en donnant des conseils concrets, en organisant des groupes de soutien et de parole ou en proposant une offre de répit... Cependant, ces dispositifs sont encore très limités et trop peu connus que ce soit par les aidants proches ou les professionnels. L’autorité flamande reconnaît et subventionne certaines associations d’aidants proches et d’usagers. Ces associations ont pour mission d’informer et de conseiller en matière d’aide et de soins à domicile d’une manière générale. On attend également d’elles qu’elles dressent un inventaire des problèmes et en réfèrent aux autorités compétentes. Ziekenzorg CM et Okra sont également agréés à cet effet. Certaines organisations francophones, telles qu’Enéo et Altéo, assument des missions similaires, sans qu’un agrément spécifique y soit lié. En Wallonie, l’ASBL « Aidants proches » a pour mission de représenter, de soutenir et d’informer les aidants proches. Au niveau fédéral, les premières démarches ont été entreprises récemment pour la mise en place du statut d’aidant proche. Si le texte du projet de loi portant sur « la reconnaissance de l’aidant proche, aidant une personne en situation de grande dépendance » a été adopté par la Chambre des représentants le 25/03/2014, aucun arrêté royal d’application n’a encore été publié. 4.1.2. Soins de première ligne Dans le cadre du maintien à domicile de longue durée ou dans le cadre de situations complexes, le médecin généraliste joue un rôle central au niveau de l’aide médicale et du suivi général des soins. De par sa formation en médicine générale et le lien qu’il entretient avec les patients, il est souvent le premier interlocuteur en cas de problèmes de santé et peut, en fonction de certains signaux, agir préventivement. Différents professionnels de la santé, comme l’infirmier/ infirmière à domicile, le kinésithérapeute, l’ergothérapeute, 24 le logopède, viennent également souvent à domicile… Tous contribuent, à leur niveau, à améliorer l’autonomie d’une personne âgée et lui permettent de rester plus longtemps chez elle dans les meilleures conditions possibles. 4.1.3. Assistance générale De nombreuses organisations, dont les mutualités et les CPAS, proposent des services d’assistance générale et d’accompagnement. Outre leur mission dans le cadre de l’assurance maladie obligatoire, les mutualités interviennent également dans l’aide aux personnes atteintes de maladies graves et de longue durée, aux personnes dépendantes et à leur entourage. Cette aide se traduit par l’information, l’organisation des soins à domicile, la médiation, l’ouverture de droits, l’assistance générale… Cette mission est assurée par les services sociaux des mutualités ou des CPAS. En Flandre, les services sociaux des mutualités sont reconnus par le « Woonzorgdecreet ». En Wallonie et à Bruxelles, ces derniers tentent de collaborer avec les centres de coordination d’aide et des soins à domicile (voir infra). Les mutualités proposent également un certain nombre de services et d’avantages complémentaires, notamment aux personnes dépendantes. Chaque mutualité décide de cette offre en toute autonomie. Dans la pratique, il existe donc parfois de grandes divergences en termes de nature et de variété de l’offre. Les MC proposent notamment une offre étendue d’aide et de soins à domicile, qu’elles organisent en partie elles-mêmes et en partie en partenariat. L’offre des mutualités se caractérise par une large répartition géographique et sa facilité d’accès, ce qui la rend très accessible. Le législateur a confié une mission sociale très large au centre public d’aide sociale (CPAS), qui doit veiller à ce que chaque citoyen puisse bénéficier d’un minimum de bien-être et de dignité. Le CPAS est chargé notamment de traiter les demandes de garantie des ressources aux personnes âgées et autres aides financières. Par ailleurs, chaque habitant de la commune peut s’adresser au CPAS pour obtenir des informations et des conseils concernant des questions financières et psychosociales. De nombreux CPAS proposent par ailleurs un éventail d’initiatives de services, comme l’aide ménagère, la distribution de repas chauds à domicile, des services de menus travaux, des services de garde et des structures d’aide et de soins, telles que les maisons de repos et les centres de soins de jour ou les centres de services locaux en Flandre (lokale dienstencentra). Toujours en Flandre, les « Centres autonomes pour le Travail Social » (de autonome Centra Algemeen Welzijnswerk (CAW)) fournissent également de l’aide et des réponses gratuitement aux personnes rencontrant des problèmes d’ordre sociaux. Ces centres fournissent de l’informations et des conseils mais fournissent également de l’aide pratique et peuvent intervenir en situation de crise. MC-Informations 258 • décembre 2014 Il existe aussi de nombreuses autres ASBL, notamment des initiatives religieuses qui proposent une assistance générale, parfois complétée par un service d’aide concret comme des repas et des vêtements. Spécifiquement à Bruxelles, il existe le système des concierges de quartier, qui aident les précarisés en apportant des modifications mineures mais radicales à leur habitation : électricité et sanitaire, élimination des obstacles, entretien technique, informations. Enfin, il existe des fournisseurs du marché privé pour la livraison de repas à domicile par exemple. 4.1.4. Aide à domicile La perte d’autonomie contraint souvent les personnes âgées à faire appel à des tiers pour de nombreuses activités de la vie quotidienne. Il peut s’agir de soignants informels, mais dans de nombreux cas, ces personnes font appel (parfois en supplément) à des services professionnels. De nombreuses personnes âgées dépendantes ont alors recours aux services qui proposent de l’aide aux personnes ou qui proposent de s’occuper des tâches d'aide à la vie journalière. Elles reçoivent dans ce cas de l’aide pour se laver et s’habiller, cuisiner, repasser… Parallèlement, ces services proposent une aide et un accompagnement psychosocial et pédagogique général. Par ailleurs, les personnes dépendantes peuvent également faire appel à un service d’aide ménagère pour entretenir le logement, à un service qui apporte les repas à domicile ou qui se charge de divers petits travaux de réparation dans l’habitation. Les personnes âgées sont souvent limitées en termes de mobilité, ce qui peut favoriser l’isolement et constitue un obstacle à l’obtention d’une aide et d’un soutien. Pour répondre à ce besoin, une offre de services de transport a été mise en place, à laquelle les personnes âgées peuvent faire appel, par exemple, lorsqu'elles veulent faire des courses, doivent se rendre à l’hôpital ou souhaitent participer à des activités. Il existe notamment les Centrales des Moins Mobiles des MC et des initiatives dans le cadre de l’économie sociale. Pour ces formes d’aide, il existe une offre étendue agréée et subventionnée par les autorités régionales. La Flandre propose notamment des services d’aide familiale (aide aux personnes et aide-ménagère) ainsi que des services d’aide logistique (service de nettoyage et ouvriers pour petites réparations). Ces services sont également proposés aux Bruxellois. La Wallonie et Bruxelles proposent des services d’aide aux familles et aux aînés qui se déclinent en différents métiers : aide familiale, aide-ménagère, garde malade, ouvriers polyvalents... L’aide est attribuée sur demande, en fonction d’une enquête de l’assistant social. Il est tenu compte notamment du degré de dépendance ainsi que de la situation familiale et sociale. En outre, il existe également le système de titres-services, accessible à tout le monde, pour différentes formes d’aide ménagère (nettoyage du logement, courses, lessive et repassage…). Ces services sont souvent prestés par des travailleurs embauchés par des entreprises et des organisations spécifiquement agréées dans le cadre du système des titres-services (principalement des agences d’intérim, des entreprises de nettoyage, des services d’aide familiale et des agences locales pour l’emploi (ALE)). Depuis juillet 2014, le système des titres-services relève de la compétence des régions. La perte d’autonomie peut être compensée en partie par l’utilisation de matériel d’aide, tels que des lits spéciaux, des fauteuils roulants, des ustensiles pour préparer les repas ou pour manger… Ce matériel d’aide est proposé notamment par les mutualités via leurs boutiques de soins à domicile (Solival, Thuiszorgwinkels). Il peut également être obtenu dans les hôpitaux, les pharmacies… En l’occurrence, nous tenons à mentionner séparément le système d’alarme personnel, qui permet à l’utilisateur d’appeler son (ses) aidant(s) proche(s) ou des professionnels à l’aide en cas de problèmes graves. Ce dispositif permet d’intervenir rapidement et d’éviter une aggravation de la situation. La réglementation relative au système d’alarme personnelle (AP) relève également de la compétence des autorités régionales, qui peuvent décider en toute autonomie de son organisation, de sa programmation et de son subventionnement. En Flandre, les systèmes d’alarme personnelle sont prêtés par les centres de services régionaux et locaux (voir infra) qui collaborent avec la centrale d’alarme de Mutas et les services de la Croix Jaune et Blanche. En Wallonie et à Bruxelles, ils sont proposés par les mutualités et les CPAS. Les MC proposent ce service en collaboration avec Vitatel, via l’ASBL Permanence Soins à Domicile. Les fonctions du système AP peuvent aussi être combinées par exemple à un détecteur de fumées, un détecteur de CO, un détecteur de chute ou de mouvement. Prendre en charge une personne très dépendante constitue une charge complémentaire parfois lourde pour les aidants proches. C’est pourquoi, il est bon qu’ils puissent souffler de temps en temps et prendre du temps pour eux. Lorsque la personne dépendante ne peut rester seule, l’aidant peut faire appel à un service de garde qui tiendra compagnie au malade et assurera quelques tâches simples. Ce service peut également être presté la nuit. Les services de garde sont généralement assurés par des bénévoles. En Flandre, les services de garde sont souvent assurés par des bénévoles formés à ce métier. En Wallonie et à Bruxelles, il n’existe pas encore de reconnaissance de cette fonction assurée par des professionnels formés et encadrés. Les mutualités, les services infirmiers, les services d’aide aux familles et les CPAS notamment ont développé une offre en la matière. En Flandre, ces prestataires sont reconnus en tant que Services de garde chargés de coordonner les demandes de garde et l’offre des bénévoles. MC-Informations 258 • décembre 2014 25 4.2. Structures de soins résidentiels transmuros pour les seniors Au fil des années, un certain nombre de formes intermédiaires entre les soins à domicile et les maisons de repos sont apparues. Il s’agit de structures dans lesquelles une personne âgée peut séjourner jour et nuit, la journée ou la nuit uniquement. Elles sont complémentaires aux services d’aides et de soins à domicile et ont pour but d’éviter l’admission dans une maison de repos ou du moins la reporter le plus longtemps possible. 4.2.1. Résidence-services/logement avec assistance Une résidence-services ou un logement avec assistance est une unité de logement individuelle adaptée dans laquelle une personne âgée peut habiter en toute autonomie. Chaque habitation se compose au moins d’un salon, d’une kitchenette, d’une chambre à coucher et de sanitaires. Elle se caractérise par la présence de services communs auxquels les habitants peuvent faire appel de manière facultative (p. ex. les repas, l’entretien du logement, le service de blanchisserie). Un système d’appel est également prévu. Il existe aussi parfois des espaces communs dans lesquels les habitants peuvent se rencontrer. À cet égard, ces résidences-services ou logements avec assistance constituent une forme intermédiaire entre la situation familiale classique et le séjour dans un centre de soins résidentiel. jour, mieux connus sous le nom de Centres flamands d’accueil de jour autonomes collectifs (CADO ou Collectieve Autonome Dagopvang), pour lesquels les services d’aide et de soins à domicile peuvent obtenir un agrément. Ces centres s’adressent exclusivement aux personnes qui font également appel à un service agréé d’aide et de soins à domicile. Ils diffèrent du CSJ par le fait que l’aide et les soins et l’assistance psychosociale y sont assurés par le personnel des services d’aides et de soins à domicile et non par le personnel d’une maison de repos. Par ailleurs, il existe également des centres de soins de jour réservés exclusivement aux usagers atteints d’une maladie chronique spécifique (p. ex. MS, maladie de Korsakov, maladie de Parkinson). En Wallonie et à Bruxelles, il existe une distinction entre les centres d’accueil de jour et les centres de soins de jour. Le centre d’accueil de jour s’adresse surtout aux personnes âgées en relativement bonne santé et vise essentiellement à briser l’isolement social. Les centres de soins de jour s’adressent plutôt aux personnes âgées dépendantes et proposent également des soins en plus des activités. 4.3. Structures de soins résidentiels intramuros pour les seniors 4.3.1. Soins hospitaliers Chaque hôpital disposant d’un service G agréé doit proposer un programme de soins gériatriques. Il s’agit d’un programme multidisciplinaire qui vise à améliorer le plus possible l’autonomie et la qualité de vie d’une personne âgée. Il prévoit les services suivants : 4.2.2. Court séjour et accueil de nuit Le centre de court séjour, généralement organisé dans une maison de repos, prévoit pour les personnes âgées la possibilité d’être accueillies la nuit ou pendant une courte période le jour et la nuit. En Flandre, les centres de convalescence offrent également cette possibilité. Le service est grosso modo identique à celui proposé dans les maisons de repos ou les centres de convalescence (soins infirmiers et hygiéniques, aide familiale et aide-ménagère, activation, activités de détente et contacts sociaux). Le financement dans le cadre de l’assurance maladie obligatoire est transféré aux communautés depuis le 1er juillet 2014. Certaines maisons de repos proposent également l’accueil de nuit. 4.2.3. Centre de soins de jour (CSJ) Le centre de soins de jour propose d’accueillir durant la journée les personnes âgées qui résident normalement chez elles et y bénéficient de soins à domicile. Ces centres proposent des soins, une réactivation et un accompagnement dans le cadre des activités. Il existe différentes sortes de centres de soins de jour. Outre les centres qui relevaient jusqu’il y a peu de l’autorité fédérale, il existait également des initiatives développées par les régions. La Flandre dispose en effet de centres de soins de 26 •Services infirmiers gériatriques (index G), destinés aux personnes âgées atteintes d’une pathologie multiple dans une situation de maladie (sub)aiguë. Une équipe multidisciplinaire de médecins, d’infirmiers et d’auxiliaires paramédicaux est chargée de la pose des diagnostics médicaux gériatriques, des traitements et de la revalidation. • L’hôpital de jour gériatrique proposant une triple offre : -Un programme diagnostique ambulatoire lié à des problématiques spécifiques (clinique de la mémoire, problèmes de chute et difficultés à marcher, problèmes d’incontinence, problèmes alimentaires, ostéoporose). -Un programme thérapeutique pour les interventions qui peuvent être réalisées en journée (p. ex. administration intraveineuse de médicaments, transfusions de sang, suivi du diabète, soins de plaies complexes). - Un programme de revalidation, éventuellement à la suite d’une hospitalisation, pour les patients qui résident à domicile. • La consultation ambulatoire chez un gériatre. • Une fonction de liaison interne est assurée par une équipe multidisciplinaire mobile interne compétente en gériatrie. L’équipe dispense des conseils concernant l’approche et le traitement des plus de 75 ans dans d’autres services que la gériatrie. Ceci vise à attirer l’attention sur d’éventuels problèmes chez ces patients (cognitif et mémoire, mobilité, alimentation, déglutition, sentiments…). MC-Informations 258 • décembre 2014 •Une fonction de liaison externe permet d’établir des contacts avec les médecins généralistes, les services de soins à domicile, les maisons de repos et autres prestataires de soins en vue d’assurer la continuité des soins et de favoriser le développement des compétences. Ceci doit permettre de raccourcir la durée des hospitalisations et si possible les éviter. Les hôpitaux qui ne disposent pas d’un service G agréé, sauf quelques exceptions, doivent conclure un accord de collaboration avec l’hôpital le plus proche qui propose un tel programme. Les services de gériatrie isolés ont le choix entre un programme de soins propre ou un accord de collaboration fonctionnel. Un certain nombre d’hôpitaux disposent d’un service psychogériatrique (index Sp), destiné aux personnes âgées qui requièrent un diagnostic et/ou un traitement psychiatrique et somatique, ainsi qu’un accueil multidisciplinaire en vue d’obtenir le meilleur rétablissement possible des capacités physiques, psychiques et sociales. Dans un hôpital psychiatrique, ce service accueille dans la pratique surtout les personnes atteintes de démence, mais admet également les patients psychotiques. Une partie des lits G et Sp sont disponibles dans l’un des établissements exclusivement gériatriques de notre pays. Depuis la sixième réforme de l’État, ces établissements relèvent de la compétence des autorités régionales. d’une aide-ménagère, d’une revalidation, d’une activation, d’activités de détente et de contacts sociaux. 4.3.3. Centres de revalidation et de convalescence Une personne qui, après un séjour à l’hôpital, un accident ou une maladie n’est pas suffisamment autonome pour rester chez elle, peut séjourner temporairement dans un centre de convalescence. Ces centres proposent des soins, une revalidation et une assistance dans le cadre des activités de la vie quotidienne. Quelques centres sont déjà reconnus dans le cadre du décret flamand relatif aux soins des personnes âgées (Woonzorgdecreet). Les MC disposent de plusieurs centres de revalidation : Ter Duinen, Hooidonk et Spa Nivezé. 4.4. Services spécifiques Outre l’offre qui s’adresse aux personnes dépendantes en général, il existe également une offre destinée à certains groupes cibles, comme les personnes présentant des problèmes psychiques, les malades en phase terminale et les personnes atteintes de démence. 4.4.1. Soins de santé mentale. 4.3.2. Maisons de repos pour personnes âgées (MRPA) et maisons de repos et de soins (MRS) Bien que la plupart des personnes âgées préfèrent rester chez elles le plus longtemps possible, l’admission dans une institution est parfois inévitable. C’est dans la plupart des cas la nette aggravation de la dépendance qui fait pencher la balance en ce sens. Comme nous l’avons dit, la compétence en la matière incombe intégralement aux Communautés depuis juillet 2014, mais les règles et procédures fédérales restent en vigueur tant que celles-ci n’élaborent pas une règlementation propre. Par conséquent, il est donc toujours fait une distinction sur papier entre, d’une part, les maisons de repos pour les personnes âgées (MRPA) et, d’autre part, les maisons de repos et de soins (MRS). La principale différence réside dans la possibilité pour une MRPA d’accueillir également des personnes présentant une assez faible dépendance. La MRS est exclusivement destinée à l’accueil des personnes âgées fortement dépendantes. Dans les deux cas, il y a lieu de satisfaire à certains critères de dépendance physique et/ou psychique, mesurée sur la base de l’échelle de KATZ. Il convient toutefois de relativiser fortement la différence entre une MRPA et une MRS. Au fil des années, le profil de la population des MRPA a considérablement évolué et de nombreuses personnes âgées fortement dépendantes y sont également accueillies. La question est donc de savoir si cette différence sera maintenue par les autorités régionales dorénavant compétentes. Les personnes qui résident dans une maison de repos bénéficient chaque jour de soins infirmiers et hygiéniques, d’une aide aux activités de la vie journalières, Les centres de soins de santé mentale (CSM) peuvent accueillir les patients souffrant de différents problèmes de nature psychique, relationnelle et psychosomatique, soit de leur propre initiative soit sur référence. Ces centres sont chargés de la prévention, du premier accueil des personnes souffrant de problèmes psychiques, de la pose du diagnostic et du traitement. Le CSM se caractérise par l’approche multidisciplinaire d’une équipe de psychiatres, de psychologues, d’assistants sociaux, d’ergothérapeutes, d’infirmiers qui se concertent régulièrement concernant le patient. Si nécessaire, cette concertation est étendue par exemple au médecin généraliste. Différents centres présentent un fonctionnement distinct pour le groupecible des personnes âgées. Les CSM relèvent également de la compétence des autorités régionales. Les personnes atteintes de problèmes psychiatriques chroniques mais stabilisés, qui ne peuvent habiter seules, peuvent se tourner vers une maison de soins psychiatriques (MSP) ou une initiative d’habitat protégé (IHP). La maison de soins psychiatriques s’adresse aux personnes atteintes de problèmes psychiques dont l’état est stabilisé et qui ne nécessitent plus une hospitalisation et de soins dans un hôpital (psychiatrique). Une MSP leur propose un accompagnement et des soins et organise des activités de jour et de détente adaptées. Dans une initiative d’habitat protégé, l’accent repose davantage sur l’autonomie personnelle et la réinsertion, mais un accompagnement est prévu dans le cadre du logement et de l’acquisition d’aptitudes sociales. Des activités de jour MC-Informations 258 • décembre 2014 27 adaptées sont également proposées. Traditionnellement, il s’agit d’un habitat collectif, mais depuis quelques années des logements individuels sont également reconnus comme habitat protégé. Les deux structures ne s’adressent pas spécifiquement aux personnes âgées, même si une partie non négligeable des habitants a plus de 60 ans. Les deux établissements relèvent aujourd’hui intégralement de la compétence des communautés. 4.4.2. Points de contact pour la maltraitance des personnes âgées. De par leur dépendance vis-à-vis de tiers, les personnes âgées sont exposées aux risques d’abus, tant de la part des prestataires de soins et d’aide que des personnes de leur entourage immédiat et ce tant au niveau matériel ou financier qu’au niveau émotionnel. Ces dernières années, la problématique de la maltraitance des personnes âgées a fait l’objet d’une attention accrue et quelques initiatives spécifiques ont été prises en la matière. En Wallonie, il existe l’ASBL Respect Seniors, créée en 2009 et accessible par un numéro d’appel gratuit, une offre d’initiatives de formation pour les professionnels et des actions concrètes d’information et de sensibilisation. La Flandre propose une offre comparable avec le Vlaams Ondersteuningscentrum Ouderenmis(be)handeling (VLOCO). À Bruxelles, l’ASBL Infor-Homes Bruxelles a été reconnue et subsidiée par la COCOF et la COCOM comme dispositif de lutte contre la maltraitance des personnes âgées vivant à Bruxelles, aussi bien au domicile qu’en institution. Le service d’écoute aux personnes âgées maltraitées (SEPAM) a été créé à Bruxelles. Il est agréé et subventionné par la Commission communautaire française, soutenu par la Commission communautaire commune. Tout comme Respect senior en Région wallonne, le SEPAM permet à toute personne confrontée à un problème de maltraitance vécu à domicile ou au sein d’une institution de pouvoir faire appel à des professionnels. 4.4.3. Soins palliatifs L’objectif des soins palliatifs est de proposer au malade et à son entourage la meilleure qualité de vie possible durant la dernière phase de vie. L’autorité fédérale a établi des réseaux palliatifs, qui ont pour mission de coordonner les soins palliatifs, de favoriser le développement des compétences et de dispenser des conseils. Une aide concrète est proposée au niveau des soins à domicile par le biais d’une équipe d’accompagnement multidisciplinaire. Il peut également être fait appel à cette équipe lorsque le malade réside, par exemple, dans un centre de soins résidentiels, une MSP ou un habitat protégé. Les autorités régionales ont également aménagé des structures au niveau des soins palliatifs. Depuis la sixième réforme de l’État, la compétence relative à ces réseaux a été transférée vers les communautés. De nombreux hôpitaux disposent d’une unité palliative pour les malades incurables. Ces unités sont aménagées de manière 28 plus familiale et accordent la priorité au confort du malade et de sa famille. L’équipe multidisciplinaire met l’accent sur le contrôle des symptômes, l’accompagnement psychologique, la préparation et l’accompagnement du deuil. Chaque hôpital dispose également d’une équipe de soutien palliatif chargée d’accompagner les malades incurables et leur famille et de soutenir les autres soignants dans l’hôpital. Certaines dispositions prévoient également quelques obligations en matière de politique palliative pour les maisons de repos. Il existe des centres de jour qui peuvent accueillir les malades en phase terminale en Flandre, à Bruxelles et en Wallonie. 4.4.4. Initiatives en matière de démence La forte augmentation du nombre de personnes atteintes de démence est une conséquence épidémiologique importante du vieillissement. Il s’agit en effet d’une maladie dont la prévalence augmente de manière exponentielle avec l’âge. La maladie implique une perte importante tant pour la personne atteinte de démence que pour le partenaire, les enfants, l’entourage immédiat. Ces personnes ont un besoin important d’informations, de soutien, d’accompagnement et de possibilités d’accueil. Dans la plupart des maisons de repos, une grande partie de la population est atteinte de démence (40 % ou plus). Pour répondre à ce phénomène, la réglementation fédérale prévoit un encadrement et un financement appropriés. Il en va de même pour les centres de soins de jour. Les maisons de repos peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d’un financement pour une personne de référence spécialisée en démence, qui prend des initiatives en la matière afin de soutenir les personnes âgées, leur famille et les autres prestataires de soins. D’autres organisations, comme les services d’aide et de soins à domicile, ont également une personne de référence spécialisée en démence dans le cadre de leur fonctionnement. La Flandre reconnaît différents centres d’expertise en démence (CED) qui ont pour mission de renforcer l’environnement de la personne atteinte de démence, par des informations, des conseils d’experts, une formation, un soutien et une réorientation. Ils sont également chargés d’améliorer les compétences des organisations existantes et des prestataires de soins, notamment par des modules de formation des personnes de référence pour la démence. C’est dans ce cadre que les travailleurs sociaux des mutualités flamandes reçoivent une formation pour la prise en charge de base de personnes souffrant de démence. De nombreuses initiatives sont également prises par les communes, les mutualités et autres organisations pour informer et aider la personne atteinte de démence et leur entourage. En témoignent les cafés-débat, les soirées d’information et de formation, les brochures… autant d’initiatives qui visent de à contribuer à une meilleure prise en charge des personnes atteintes de démence dans la société. MC-Informations 258 • décembre 2014 Le Conseil national pour la promotion de la qualité (CNPQ), dans le giron de l’INAMI, veille à la prestation de soins de qualité. L’e-learning est une piste importante à développer. Dans ce cadre, un module « Démence » a été élaboré à l’intention des médecins en collaboration avec Domus Medica et la Société Scientifique de Médecine Générale (SSMG), en exécution du plan « Priorité aux maladies chroniques » de l’ex-ministre Onkelinx. Un module identique a été développé en collaboration avec le secteur infirmier à l’intention des infirmiers. Ces modules offrent une formation en matière de pose de diagnostic et de traitement de la démence, ainsi que pour l’accueil des patients atteints de démence. de la politique ainsi qu’à la transparence et à l’accessibilité de l’offre. Au niveau du patient, il s’agit aussi souvent de situations de soins très complexes, qui nécessitent une aide médicale et paramédicale ainsi qu’une assistance dans le cadre des activités de la vie journalière. Par conséquent, il est souvent fait appel à plusieurs prestataires de soins et d’aide, à la fois de la première et de la deuxième ligne, ce qui entraîne un risque de fragmentation de la prise en charge. Ceci a incité les autorités compétentes à prendre des initiatives pour harmoniser la politique globale en matière de soins aux personnes âgées et mieux intégrer et coordonner l’aide aux seniors. L’organisation Baluchon est un service de soins à domicile destiné aux familles touchées par la maladie d’Alzheimer. Un professionnel remplace les aidants proches pendant 1 ou 2 semaines à domicile. Il évalue également les capacités cognitives et l’autonomie fonctionnelle du malade et tient un journal d’accompagnement dans lequel il note le déroulement des journées pendant la période de garde. 4.5.1. Harmonisation de la politique entre les autorités 4.4.5.Information Dans la société civile, de nombreuses organisations, dont par exemple Okra et Enéo, fournissent des informations aux personnes âgées concernant différents thèmes qui les intéressent directement par le biais de brochures, de magazines et d’activités. Des cours pratiques sont parfois aussi proposés (p. ex. : à l’utilisation d’un PC, de l’Internet ou du GSM). Des associations d’aidants proches agréées en Flandre et l’ASBL Aidants proches proposent également une offre d’informations étendue, qui s’adressent en premier lieu aux aidants proches (voir supra). Il existe également différents sites Web, qui s’adressent spécifiquement aux personnes âgées, et proposent des informations à la fois sur les prestations d’aide et de soins et sur les questions financières ou les possibilités de détente. www.seniorennet.be et www.seniornetvlaanderen.be en constituent quelques exemples. D’autres sites Web traitent de thèmes spécifiques comme les maisons de repos. Des questions concernant les maisons de repos (offre, prix, droits et obligations…) peuvent être adressées à la Woonzorglijn10, à l’ASBL Senoah11 et à l’ASBL Inforhomes12 . 4.5. Intégration et coordination de l’offre de soins et de l’aide L’offre de prestations d’aide et de soins est très étendue et parfois très morcelée, cela s’explique en partie par la volonté de répondre aux différents besoins de soins mais aussi en raison du partage des compétences, ce qui peut nuire à la cohérence La Conférence interministérielle « Santé publique » réunit l’Autorité fédérale, les Communautés et les Régions en vue de développer une politique cohérente en matière de soins aux personnes âgées en ce qui concerne les services de garde, d’accompagnement et de prestation des soins. C’est dans le cadre de cette concertation qu’est né également le groupe de travail inter-cabinet « Politique de santé à mener à l’égard des personnes âgées » qui réunit l’Autorité fédérale, les Communautés et les Régions mais aussi l’INAMI. La concertation au sein de cet organe a déjà donné lieu à différents protocoles d’accords et avenants à ces protocoles. Ces protocoles d’accord décrivent les lignes de force communes, mais permettent à chaque entité de développer des plans d’action de manière autonome afin de réaliser les objectifs fixés. La reconversion des lits MRPA en lits MRS notamment, le développement de centres de soins de jour et les projets de développement d’alternatives en matière de soins aux personnes âgées trouvent leur origine dans ces protocoles d’accords (Protocol 3). D’une manière générale, dans le sillage de la sixième réforme de l’État, il est prévu de créer un institut qui deviendra le lieu de rencontre interfédéral permanent pour la concertation entre les ministres compétents et qui devra formuler une réponse concertée à un grand nombre de défis, dont le problème budgétaire consécutif au vieillissement et aux métiers en pénurie. Vu que, après la sixième réforme de l’État, différentes autorités restent encore en partie compétentes pour la politique relative aux personnes âgées, la concertation et la coordination resteront indispensables à l’avenir. Des accords devront notamment intervenir concernant le développement de structures de soutien pour les soins à domicile et la possibilité de prestations paramédicales dans ces structures. On prévoit d’emblée tout un nombre de domaines pour lesquels des accords de collaboration devront être conclus. 10 http://www.woonzorglijn.be/ 11 http://www.senoah.be 12 http://www.inforhomes-asbl.be/ MC-Informations 258 • décembre 2014 29 4.5.2. Une offre de soins intégrés et une concertation relative aux prestations de soins et de services En Flandre, un certain nombre de services de soutien au maintien à domicile ont été « groupés » dans ces centres de services : les centres de services locaux (CSL ou lokale dienstencentra) et centres de services régionaux (CSR ou regionale dienstencentra). Le CSL a pour mission de proposer aux habitants de la localité diverses activités générales de nature informative, récréative et formative afin de renforcer le réseau social. Par ailleurs, il doit être en mesure d’apporter de l’aide sur place dans le cadre des activités de la vie quotidienne ou la mettre à la portée des usagers. Il doit prévoir au moins 4 des activités suivantes : proposer des repas chauds (sur place ou à domicile), un service de courses, un service de menus travaux, une aide de proximité, des initiatives visant à améliorer la mobilité, le prêt d’appareils AP (alarme personnelle), l’organisation d’une centrale d’alarme personnelle et des activités pour un groupe cible. Un CSL peut être agréé par 15 000 habitants. 222 CSL sont agréés actuellement. Le CSR a également une mission d’information et de formation via des activités de groupe, qui s’adressent à la fois aux personnes âgées, aux aidants proches ou aux bénévoles. Pour ce dernier groupe cible, il est également chargé de réunir l’offre et la demande. Par ailleurs, il propose une offre d’information et de conseils concernant les dispositifs (ergothérapie, adaptation du logement…) et doit mettre cette aide à la portée des utilisateurs. Enfin, ce sont également les CSR qui organisent dans une large mesure la concertation entre les différents prestataires de soins autour du patient. Dans ce contexte, le responsable du centre assume généralement le rôle de coordinateur de la concertation. Les centres de soins résidentiels des mutualités sont notamment agréés comme centre de service régional. Un CSR peut être agréé par 100.000 habitants. 60 CSR sont agréés actuellement. En Flandre, il existe également 15 initiatives de collaboration agréées pour l’aide et les soins de santé de première ligne (samenwerkingsinitiatieven eerstelijnsgezondheidszorg (SEL)) qui assurent la collaboration entre les différents prestataires de soins et d’aide dans une région donnée (médecins généralistes, soins infirmiers à domicile, aide familiale…). Elles ont pour objectif d’améliorer le plus possible les prestations de services et de soins autour du patient grâce à la coordination mutuelle. Le décret flamand sur les soins aux personnes âgées (Woonzorgdecreet) prévoit par ailleurs le développement de réseaux de soins à domicile, composés d’un médecin généraliste ou d’un cercle de médecins généralistes, d’un service de soins à domicile, d’un centre de court séjour, d’un groupe de logements avec assistance, d’un service d’aide familiale ou d’une autre structure de soins résidentiels qui fournit des soins à domicile. Les différents partenaires doivent être en mesure de garantir la continuité des soins pour l’usager grâce à la collaboration et à la concertation. Pour l’heure, il ne reste plus qu’à attendre les décrets d’exécution. Les Centres de coordination de soins et de services à domicile sont agréés en Wallonie, dans la Communauté germanophone et à Bruxelles. Il s’agit de 30 centres pour la Wallonie et de 5 centres pour Bruxelles. Ils ont pour mission de soutenir les personnes dépendantes afin que les soins et l’aide à domicile puissent être dispensés le plus longtemps possible. Ils fournissent des informations, évaluent la demande en aide et en soins et orientent vers les services adaptés et coordonnent l’aide. Ces centres présentent une offre intégrée et coordonnée proposant au minimum des soins infirmiers à domicile, une aide familiale et des services sociaux. Par ailleurs, ils doivent prévoir quatre activités complémentaires à choisir entre la kinésithérapie, le système d’alarme personnelle, le prêt de matériel d’aide, les soins dentaires, l’adaptation du logement, l’ergothérapie, la logopédie, la pédicure ou la distribution de repas à domicile. Enfin, le médecin généraliste doit être impliqué dans la coordination. Une fiche de coordination est établie pour chaque client. Le 1er avril 2003, l’autorité fédérale a aménagé des Services intégrés de soins à domicile (SISD) pour l’ensemble du pays). Dans le cadre de ces structures de concertation, la rémunération d’un certain nombre d’acteurs a été prévue pour leur participation aux moments de concertation multidisciplinaire pour la grande dépendance de longue durée. Depuis juillet 2014, la compétence en la matière est transférée aux Communautés qui l’intégreront dans les autres structures existantes. En Flandre, les SISD et les SEL ont fusionné depuis un certain temps. En Wallonie et à Bruxelles, ce n’est pas le cas des SISD et des centres de coordination. D’autres initiatives, telles que le plan stratégique malades chroniques, le Comité consultatif en matière des Maladies chroniques et le Conseil scientifique des maladies chroniques, les réseaux multidisciplinaires locaux… veulent d’une manière ou d’une autre contribuer à une meilleure intégration et coordination des soins. 4.6. Innovation dans les formes de logement et de soins13 4.6.1. Formes alternatives d’habitat Les soins et l’aide aux personnes âgées sont un secteur dynamique en quête constante d’amélioration et d’innovation. Ces dernières années, de nombreuses structures « alternatives » sont apparues pour les personnes âgées. Ces initiatives présentent, dans la plupart des cas les caractéristiques suivantes : elles proposent un habitat à échelle réduite, elles mettent un point d’honneur à assurer la plus grande continuité possible avec la vie antérieure et ont 13 Pour plus de détails, voir A. Franssen, O. Gillis et R. Verniest, Formes alternatives et innovations en matière de logement, de services et de soins pour les aînés. Dans MC-Informations 237, septembre 2009. 30 MC-Informations 258 • décembre 2014 pour objectif de lutter contre l’isolement social en réunissant des personnes qui se soutiennent mutuellement.. Sans être exhaustifs, vous trouverez ci-dessous quelques exemples concrets présentés dans les grandes lignes. Il est vrai que ces formes d’habitat s’adressent surtout aux personnes présentant un certain niveau d’autonomie. En cas de dépendance, on essaie de pallier dans un premier temps à la situation grâce à l’aide informelle, si nécessaire complétée par des soins professionnels à domicile. Lorsque la dépendance devient trop importante, il se peut qu’une admission en centre de soins résidentiels s’impose. Habiter chez soi plus longtemps, de manière qualitative, nécessite, entre autres, un logement adapté qui tienne compte des limitations et des besoins de la personne âgée. Ceci peut se faire en apportant au logement les adaptations nécessaires au maintien à domicile comme un monte-escaliers, des mains courantes, etc… L’idéal est une habitation conforme aux principes de l’habitat à vie, qui permet d’adapter le logement à chaque fois que les conditions de vie et les besoins des habitants évoluent. Il existe différents projets d’habitat à vie en Belgique, comme ceux que la Vlaamse Huisvestingsmaatschappij propose notamment à Anvers, à Ninove et à Bruges. Un certain nombre de projets vont encore plus loin et proposent, outre un logement adaptable, une offre de soins. Tel est le cas notamment des projets du « Zorgmakelaar » dont l’initiative revient aux MC. Ces projets d’habitat sont liés à un « courtier en soins », qui aide les habitants et les accompagne grâce à un large éventail de prestations de soins et de services (soins infirmiers, aide familiale, courses, repas, transport, coiffeur, activités…) et fait ainsi office de trait d’union entre les habitants et les dispensateurs de soins et de services. En fonction des souhaits et des besoins, les habitants peuvent y faire appel, souvent à des conditions très avantageuses. Il existe déjà des projets notamment à Bassevelde14 et à Courtrai15. Quelques-uns de ces projets ont demandé un agrément au titre de groupe de logements avec assistance (voir supra). Le courtier en soins est dans ce cas l’assistant au logement. L’habitat groupé pour personnes âgées (intragénérationnel) est un autre type de structure alternative. Un habitat groupé dispose généralement d’un nombre d’espaces communs et prévoit une certaine répartition des tâches entre les habitants. La solidarité mutuelle veut que l’on s’entraide le plus longtemps possible. La taille de la communauté et le degré de vie communautaire varient, mais tous ont l’ambition de créer une ambiance plus familiale, d’améliorer le sentiment de sécurité et de partager les responsabilités dans l’habitation. Les habitats Abbeyfield à Etterbeek (Entre-Voisins) et à Namur (Le Tour de Table)16 ainsi que l’Antenne Andromède à Woluwé-SaintLambert17 en constituent quelques exemples. Il existe également des exemples d’habitats intergénérationnels. La plus petite formule, mieux connue sous le nom de logement kangourou ou duplex, permet à 2 familles de générations différentes d’habiter séparément mais au sein d’un même habitat. Un logement supplémentaire est alors créé dans un logement existant − par exemple au premier étage − ou par la construction d’une annexe. Ainsi, le jeune ménage et les personnes âgées peuvent s’entraider tout en préservant suffisamment leur vie privée. Il s’agit souvent de 2 générations d’une même famille, mais ce n’est pas obligatoire. Il n’existe pas de registre des logements kangourou existants, mais dans la pratique ils ne sont pas rares. Il en existe des exemples à Gentbrugge18 et à Ranst19. Il existe également quelques projets de logements intergénérationnels à grande échelle comme Les trois Pommiers à Etterbeek20, qui associent une maison de repos, un foyer pour des mères célibataires et une maison pour les personnes psychiquement fragiles. Le but est de créer des liens intergénérationnels entre ces différents groupes de population. Le bâtiment est subdivisé en studios avec kitchenette et salle de bain et des espaces communs. D’autres exemples sont le Jardin du Béguinage à Etterbeek21, qui s’adresse à trois groupes de population socialement vulnérables (jeunes mamans et leurs enfants, personnes atteintes du SIDA et personnes âgées) et Le Balloir22 à Liège, qui se compose d’une crèche pour enfants, d’un lieu d’apprentissage et de travail pour les mères à problèmes et des logements pour les personnes âgées. Ces différentes structures sont reliées entre elles, ce qui facilite les contacts intergénérationnels. Dans ces exemples, il convient de noter que le logement intergénérationnel a également comme objectif de réunir des groupes à risques qui peuvent se soutenir et se renforcer. 14 http://www.zilvertorens.be/project-bassevelde-2/#tab-id-1 15 http://www.zilvertorens.be/ons-aanbod/west-vlaanderen/project-kortrijk/#tab-id-1 16 http://www.abbeyfield.be/fr/les-maisons?PHPSESSID=b0af8ab357a0bfccc92549534eae8245 17 http://www.cpas1200.be/main.php?sid=2&mid=3&txt=m&lng=nl&set=1 18 http://www.ybh.be/nl/referenties/detail/halfopen-bebouwingen/kangoeroewoning-gentbrugge 19 http://www.ybh.be/nl/referenties/detail/afgewerkt/kangoeroewoning-emblem/info/ 20 http://www.lestroispommiers.be/ 21 http://archives.lesoir.be/-titre-dossier-seniors-maison-2-le-jardin-du-beguinage-_t-20111115-01NNKY.html 22 http://www.intergeneration.be/orga.php?id_asso=20 MC-Informations 258 • décembre 2014 31 4.6.2. Formes alternatives d’accueil semi-résidentiel En analogie au système des familles d’accueil pour les jeunes enfants, il existe également une offre d’accueil de jour pour les personnes âgées, qui leur permet de séjourner dans une famille le jour, la nuit ou durant une courte période. Pour certains seniors, cette forme d’accueil alternatif offre un plus grand sentiment de continuité dans les soins, d’intimité et de chaleur. Elle offre aussi davantage de possibilités pour répondre de manière flexible aux demandes, aux besoins et aux intérêts de la personne âgée. Cette forme d’accueil est déjà proposée en Belgique, notamment à Anvers et dans la région gantoise. La ferme thérapeutique en est une forme spécifique d’accueil. Celle-ci s’adresse généralement aux personnes atteintes de démence qui ont besoin d’un environnement familial agréable. Le décret flamand relatif aux soins à domicile prévoit la possibilité de reconnaître les services d’accueil. Ces services coordonnent l’offre et la demande. Trois services sont agréés actuellement. Il existe également une série de services qui organisent l’accueil des personnes âgées en Wallonie, notamment auprès des CPAS de Waremme et de Charleroi. famille qu’elle contribue activement à stimuler les habitants, avec l’aide du personnel, afin d’exploiter au maximum les possibilités présentes. La maison de repos de Mariemont23 a fait office de pionnière en la matière. 4.6.4. Innovation dans le maintien à domicile La zone d’habitat adpatée (woonzorgzone) est un concept relativement neuf qui organise l’offre de soins. Il s’agit d’un quartier, d’une commune ou d’une sous-commune, qui améliore le bien-être des habitants, afin que chacun − même les personnes âgées et dépendantes − puisse rester à la maison le plus longtemps possible. Cette zone dispose d’un « zorgknooppunt » (centre de soins), accessible à tous, auquel les habitants peuvent adresser leurs demandes de soins et où ils peuvent recevoir les soins et l’aide dont ils ont besoin. Elle comprend des rues et des places sans obstacles et un nombre suffisant d’habitations et de structures accessibles à tous. La commune de Wervik en Flandre occidentale a été la première en Belgique à développer une zone d’habitat adaptée24. À l’heure actuelle, d’autres communes, surtout en Flandre, mais aussi à Bruxelles, ont déjà pris des initiatives dans ce sens. 4.6.3. Innovation dans les maisons de repos Des initiatives innovantes sont également prises au sein des maisons de repos classiques. Au niveau architectural, nous voyons ainsi souvent des maisons de repos opter pour un concept qui crée des entités plus petites et plus familiales dans un ensemble plus grand. Le centre de gravité de la vie quotidienne est déplacé, dans la mesure du possible, vers un espace de vie commun où se déroulent les activités collectives et où l’on peut se rencontrer. Les activités reflètent le désir de ces structures de s’ouvrir vers l’environnement. En l’occurrence, elles entretiennent souvent une collaboration avec les écoles (p. ex. activités sportives avec les maternelles), les associations de seniors (après-midi de jeux de cartes organisées au sein de la maison de repos), les associations culturelles (présentation de spectacle dans le centre de soins résidentiels). D’autres projets tels que les initiatives d’habitat normalisé à échelle réduite sont essentiellement destinées aux personnes atteintes de démence et existent déjà depuis un certain temps. Huize Perrekens à Geel et de Wingerd à Louvain sont quelques exemples connus en Flandre. Le concept Cantou, essentiellement présent en Wallonie, suit également ce principe. Ce concept prévoit un environnement d’habitat communautaire à échelle réduite, qui insiste sur l’autonomie collective dans un cadre protégé. On attend également de la Ces dernières années, l’assurance maladie a incité le renouvellement des projets et des initiatives ayant pour objectif de favoriser le maintien à domicile des personnes âgées vulnérables25 et le développement de formes alternatives de prise en charge via le projet Protocol 3 (voir supra). Dans le deuxième appel en particulier, l’accent repose sur une offre de soins intégrés et sur une harmonisation par et entre les différents prestataires de soins. 4.6.5. Recours aux nouvelles technologies Le recours aux nouvelles technologies peut également améliorer l’autonomie des personnes âgées. Il en existe de nombreuses applications concrètes. Le centre de soins résidentiels de Floordam à Melsbroek, par exemple, a intégré un système de détection d’errance pour les habitants (atteints de démence), ce qui a fortement augmenté leur liberté de mouvement. Les habitants sont équipés d’un médaillon pourvu de capteurs dans lequel un profil personnel de mouvement est défini. Les MC sont partenaires du projet de démonstration Care4Safety dans le cadre de Flanders’ Care. L’ajout de capteurs au système AP (alarme personnelle) existant permet de prévoir des alarmes préventives intelligentes pour un certain nombre de risques liés à la sécurité personnelle et au cadre de vie comme la chute, l’errance, l’épilepsie, l’incendie, l’intrusion et les fuites. 23 http://www.mariemontvillage.be/Cantous.html 24 http://www.ocmw-wervik.be/dienst.aspx?id=1402 25 http://www.riziv.fgov.be/care/nl/residential-care/alternative_forms/ 32 MC-Informations 258 • décembre 2014 Les MC ont lancé récemment Z’app, une application pour tablette et PC qui aide les personnes âgées, les personnes qui bénéficient de soins à domicile et les aidants proches dans leur vie quotidienne26. L’application permet d’effectuer des appels vidéo (p. ex. avec les MC pour une demande de soins), d’envoyer des messages, de gérer un agenda, de donner des informations concernant les interventions de l’assurance maladie obligatoire et complémentaire, la santé et les soins. La Z’app permet ainsi aux seniors et aux personnes qui bénéficient de soins à domicile d’entretenir des contacts sociaux et de briser l’isolement social. Les aidants proches peuvent suivre les soins de près, même s’ils ne se trouvent pas à proximité. En Wallonie, Vitatel, qui propose également des systèmes d’alarme personnelle, a développé un projet intégrant, un distributeur de médicaments intelligent, afin d’aider le patient à prendre correctement les médicaments et à respecter la posologie. Le distributeur est programmé chaque semaine par l’infirmier du service de soins à domicile. Au moment prescrit, le médicament est libéré et l’utilisateur en est averti. Si le médicament n’est pas pris, la centrale de Vitatel en est avertie et contacte l’utilisateur. évoluer vers un modèle moins centré sur l’offre de soins aigus et qui favorise le maintien à domicile tout en rencontrant les enjeux du financement. Mais cela est-il possible ? Quels sont les obstacles que rencontrent déjà aujourd’hui ces secteurs ? La réponse à cette question fera l’objet de la seconde partie de cet article qui sera publiée dans le prochain numéro du MCInformations. 5.Conclusion Il ne passe presque plus un jour sans que nous entendions parler des défis liés au vieillissement de la population. Depuis de nombreuses années déjà, une multitude de services d’aides et de soins se sont développés sur notre territoire pour répondre aux besoins d’une population vieillissante, allant des services d’aide et de soins à domicile au soins résidentiels en passant par l’ensemble des initiatives intermédiaires (centre de jour, centres d’accueil, courts séjours…). L’objectif de cet article était de faire un état des lieux sur la réalité du vieillissement et de la dépendance dans notre pays et de présenter une vue d’ensemble sur la palette de services proposé aux personnes en perte d’autonomie. L’exercice ne s’est pas toujours avéré facile. En effet, la politique de santé des aînés est une compétence partiellement régionalisée et les entités fédérées disposent donc d’une autonomie d’organisation de l’offre. Par conséquent, et c’est bien l’objectif d’une régionalisation, ces services ne se sont pas toujours développé de la même façon en Flandre, à Bruxelles ou en Wallonie. La 6e réforme de l’Etat prévoit le transfert de pans importants de la politique de santé des aînés vers les Communautés et Régions, munissant ainsi les entités fédérées d’importants leviers pour dessiner leur propre politique des aînés. Quoi qu’il en soit, les défis auxquels les entités fédérées devront répondre ne seront pas bien différents au Nord et au Sud du pays. Notre système de santé devra 26 http://www.cm.be/applicatie/mobiel/zapp/midden-vlaanderen/index.jsp MC-Informations 258 • décembre 2014 33 Les compétences émotionnelles, un facteur à prendre en compte Une étude conjointe des MC, de l’UCL et de la KUL Sigrid Vancorenland, Hervé Avalosse, Rebekka Verniest, Michiel Callens, Département Recherche et Développement (ANMC) Moïra Mikolajczak, Université Catholique de Louvain (UCL) Nady Vanbroeck, Katholieke Universiteit Leuven (KU Leuven) Griet Rummens (Promotion de la Santé), Florence Kapala (Infor Santé) Synthèse Certains éléments dans la littérature indiquent que les compétences émotionnelles influencent la santé. Cette relation n’a cependant encore jamais été étudiée de manière globale. Dans le cadre de la prévention de la santé, il est important de réunir le plus de connaissances possibles sur les facteurs qui influencent la santé. Plus ces connaissances seront étendues, plus les actions sanitaires préventives seront ciblées. C’est pourquoi, la MC, l’UCL et la KU Leuven ont collaboré ensemble à une étude scientifique visant à vérifier l’impact des compétences émotionnelles sur la santé. L’étude comportait deux volets. Dans un premier temps, 1.310 membres des Mutualités chrétiennes ont été questionnés par le biais d’une enquête écrite sur leurs compétences émotionnelles. Ces données ont été mises en relation avec les informations figurant dans les bases de données de la Mutualité chrétienne (recours aux soins de santé). Une deuxième étude a été mise en place afin de vérifier si les résultats de la première étude étaient reproductibles sur un échantillon plus important. Dans cette étude, 9.616 membres des MC ont été questionnés sur leurs compétences émotionnelles via une enquête en ligne. Ces données ont également été mises en relation avec les bases de données des MC. Les résultats de la recherche montrent non seulement que les compétences émotionnelles exercent une influence sur la santé, mais également que celles-ci constituent l’un des principaux facteurs prédictifs de l’utilisation des soins de santé (avec l’âge). Par ailleurs, des compétences émotionnelles élevées réduisent l’utilisation des soins de santé en présence de certains facteurs de risques, tels qu’un âge avancé, un BMI élevé, un faible niveau d’éducation ou une activité physique réduite. Les résultats de l’étude confirment que la santé est influencée par de multiples facteurs et que la prévention doit s’organiser à différents niveaux. Les compétences émotionnelles se profilent comme un facteur qui influence la santé de manière incontestable. Des études ont montré que les compétences émotionnelles pouvaient s’acquérir et s’améliorer, ce qui en fait un facteur important à prendre absolument en compte dans le cadre de l’action sanitaire préventive. Ceci confirme et renforce l’action préventive de la MC, qui s’articule depuis déjà plusieurs années autour de l’alimentation, de l’activité physique, du bien-être et de la santé mentale. Mots clés : compétences émotionnelles, utilisation de médicaments, contact avec un médecin, hospitalisation, BMI, formation, âge, activité physique 34 MC-Informations 258 • décembre 2014 1.Introduction 1.1. La santé est multifactorielle 1.2. Que sont les compétences émotionnelles (CE) ? La santé est influencée par d’innombrables facteurs. De nombreuses années de recherche ont permis d’en identifier les principaux. Le tabagisme, la consommation excessive d’alcool, la sédentarité, une alimentation malsaine, le surpoids, l’exposition sans protection au soleil, des rapports sexuels non protégés, l’environnement (intérieur et extérieur) malsain ne représentent que quelques-uns des facteurs étudiés susceptibles de porter préjudice à notre santé. Ces facteurs sont liés au mode de vie et, par conséquent, modifiables dans une certaine mesure. En agissant sur le mode de vie, il est donc possible de prévenir une maladie ou une affection spécifique. La santé est par ailleurs conditionnée par des facteurs tels que le sexe, l’âge et le niveau de formation, qui sont également susceptibles d’avoir un impact, mais ne sont pas (ou difficilement) modifiables. Mieux les facteurs influençant la santé seront connus, plus les actions préventives entreprises seront nombreuses et ciblées. C’est pourquoi, il reste important d’étendre les connaissances dans ce domaine. Certains éléments dans la littérature témoignent également de l’influence des compétences émotionnelles sur la santé. Les compétences émotionnelles (ou intelligence émotionnelle) renvoient à la manière dont nous identifions, exprimons, comprenons, régulons et utilisons nos émotions ainsi que celles des autres. Nous éprouvons tous des sentiments, des émotions, agréables ou désagréables, et la façon dont nous y faisons face est fort différente d’une personne à l’autre, selon son caractère, son tempérament, son éducation… Depuis les années 90, le concept de compétence émotionnelle (ou d’intelligence émotionnelle) a été développé pour en rendre compte. Les compétences émotionnelles recouvrent diverses dimensions (voir Tableau 1) relatives à la façon dont nous traitons nos émotions et celles des autres. Des questionnaires validés existent qui permettent de ‘mesurer’ la compétence émotionnelle. L’encadré 1 reprend quelques exemples concrets de ces différentes dimensions dans la vie quotidienne. Tableau 1 : Dimensions des compétences émotionnelles (CE) Dimensions Soi Autrui Identification Identifier (reconnaître) mes émotions Identifier (reconnaître) les émotions d’autrui Compréhension Comprendre mes émotions Comprendre les émotions d’autrui Utilisation Utiliser mes émotions Utiliser les émotions d’autrui Expression Exprimer mes émotions Être à l’écoute des émotions d’autrui Régulation Réguler mes émotions Réguler les émotions d’autrui Score des CE intrapersonnelles Score des CE interpersonnelles Score des CE globales Source : Petrides & Furnham, 2003 MC-Informations 258 • décembre 2014 35 Encadré 1 : Dimensions des compétences émotionnelles : quelques exemples de la vie quotidienne • Identification des émotions. Lorsqu’elle se sent mal, une personne qui a de bonnes CE arrive à identifier s’il s’agit d’agacement, de tristesse, de frustration, de stress. Une personne qui a des difficultés en matière d’identification des émotions sait si elle se sent bien ou mal (et à quel point), mais a des difficultés à identifier quelle émotion elle ressent précisément. • Compréhension des émotions. Une personne qui comprend bien ses émotions est capable de faire la différence entre le déclencheur d’une émotion et sa cause. Je rentre du travail et je me mets à préparer le repas du soir. Mon conjoint me fait une remarque sur ma manière de faire. Cela me met vraiment en colère. Clairement, la remarque est le déclencheur. Mais est-ce la cause de mon émotion? Il se peut que la cause profonde soit que je suis simplement au bout du rouleau et qu’un rien me met de mauvaise humeur. Ou bien que je ne me sens pas reconnu(e) à mon travail et à la maison et que cette remarque me touche parce qu’elle est le reflet d’un malaise plus profond. Une personne qui comprend bien ses émotions sait faire la différence entre le déclencheur et la cause. Une personne qui ne comprend pas bien ses émotions en restera toujours au déclencheur. • Utilisation des émotions. Reprenons l’exemple ci-dessus. Si j’utilise bien mes émotions, je vais essayer de comprendre ce que cette émotion me dit: peut-être suis-je à bout et ai-je besoin de prendre des vacances? Peut-être que je souffre d’un manque de reconnaissance et que je dois en parler à mon conjoint? La personne qui utilise bien ses émotions va essayer de voir quels changements elle doit apporter à sa vie (p. ex. prendre des vacances). La personne qui n’utilise pas ses émotions ne se demande pas ce que ses émotions veulent dire et elle perd une occasion de modifier des choses importantes dans sa vie. • Expression des émotions. Une personne qui exprime bien ses émotions est capable d’expliquer calmement à son conjoint (par exemple), au moment opportun, pourquoi cette situation la met en colère et ce que l’autre peut faire pour l’apaiser. Une personne qui n’est pas compétente dans l’expression des émotions choisira mal son moment, s’exprimera en criant ou au contraire «râlera» ou «boudera» sans rien dire. • Régulation des émotions. Une personne qui gère bien ses émotions est capable de ne pas perdre ses moyens en situation de stress, de colère ou de jalousie. Elle est capable de continuer ses activités en cours sans se laisser submerger par l’émotion. Une personne qui gère mal ses émotions aura beaucoup de difficultés à poursuivre la tâche en cours en situation de stress, aura beaucoup de mal de se retenir de crier, d’insulter, voire de frapper en situation de colère, aura beaucoup de mal à se retenir de «piquer une crise» en situation de jalousie. 1.3. Existe-t-il un lien entre les CE et la santé ? Certains éléments dans la littérature indiquent que les compétences émotionnelles influent également sur la santé. Toutefois, ce lien n’a jamais été étudié de manière complète et rigoureuse. En revanche, il existe des recherches qui démontrent en suffisance la relation entre les compétences émotionnelles (CE) et les domaines psychologique, social et du travail. • Au niveau psychologique, des CE élevées entraînent un plus grand bien-être et moins de troubles psychiques ; • Au niveau social, des CE élevées entraînent une plus grande satisfaction dans le cadre des relations sociales et conjugales ; • Au niveau du travail, des CE élevées entraînent de meilleures performances professionnelles. 36 L’influence des compétences émotionnelles sur la santé n’a jamais été étudiée de manière approfondie. Certes, des études ont déjà été consacrées à l’influence des compétences émotionnelles sur la santé subjective, mais les indicateurs objectifs de santé (approchées par l’utilisation des soins de santé) ont fait l’objet de recherches insuffisantes. C’est pourquoi, la MC, l’UCL et la KU Leuven ont décidé de s’unir pour analyser le lien entre les compétences émotionnelles et la santé par le biais d’une étude scientifique réalisée auprès des membres des MC. MC-Informations 258 • décembre 2014 2.Méthodologie La recherche comportait deux études : • Une enquête écrite auprès de 1.310 répondants • Une enquête en ligne auprès de 9.616 répondants Chaque étude comportait deux phases : • Une enquête via un questionnaire validé afin de réunir des informations sur les compétences émotionnelles des gens. De plus, un certain nombre de questions complémentaires ont été posées, permettant de se faire une meilleure idée des caractéristiques socio-économiques des répondants (niveau d’études, situation familiale, réseau social…), de leur BMI1, de leur style de vie (tabagisme, alimentation, pratique sportive…), de leur recours à certains médicaments ou traitements ou services non remboursés (p. ex. : médecines alternatives…) par l’assurance maladie obligatoire… • L’enrichissement des données du questionnaire avec les données provenant des bases de données de la MC afin d’établir un lien entre les compétences émotionnelles (questionnaire) et l’utilisation des soins de santé (bases de données de la MC). La deuxième étude a été réalisée afin de vérifier si les résultats de la première étude étaient reproductibles sur un échantillon plus important. Étude 1 : enquête écrite En septembre 2011, un questionnaire papier a été envoyé à un échantillon de membres de la MC âgés de plus de 18 ans. L’échantillon d’environ 10.000 personnes a été composé de manière aléatoire, mais de telle sorte qu’il soit représentatif de la population belge en termes d’âge, de sexe et de province. Chaque questionnaire comportait un numéro d’identification unique permettant d’établir le lien a posteriori avec les bases de données de la MC. L’autorisation de relier les résultats du questionnaire aux données figurant dans les bases de données de la MC a été demandée à chaque répondant à la fin du questionnaire. Dans cette question, l’objectif de l’étude, les implications de la mise en relation et le mode de traitement des données après la mise en relation ont été expliqués au répondant. La mise en relation n’a été effectuée que pour les répondants qui l’ont explicitement autorisée. Suite à cet envoi, 1.646 répondants (16 %) ont complété la totalité du questionnaire et autorisé explicitement la mise en relation avec les bases de données de la MC. Pour l’analyse, seuls les répondants qui étaient membres de la MC de 2000 à 2011 ont été retenus. L’échantillon final pour l’analyse se composait de 1.310 personnes. Étude 2 : enquête en ligne En janvier 2013, un courriel a été envoyé à un échantillon de 200.000 membres de la MC âgés de plus de 18 ans. Ce courriel les invitait à participer à une enquête en ligne, accessible par le biais d’un hyperlien. Du côté néerlandophone, un échantillon des adresses électroniques disponibles des membres, qui était représentatif en matière d’âge, de sexe et de province, a été extrait (165.000). Vu le nombre limité d’adresses électroniques de ses membres dont dispose la MC du côté francophone, toutes les adresses électroniques ont été reprises (35.000). Ici aussi, l’autorisation de relier les résultats du questionnaire aux informations détenues dans les bases de données de la MC a été demandée à chaque répondant à la fin du questionnaire. Suite au courriel, 16.999 répondants (8,5 %) ont complété la totalité du questionnaire et autorisé explicitement la mise en relation avec les bases de données de la MC. Pour l’analyse, seuls les répondants qui étaient membres de la MC de 2001 à 2012 ont été retenus. L’échantillon final se composait de 9.616 personnes. Cet échantillon important a permis de recueillir un nombre suffisant d’observations pour chaque groupe de répondants pour obtenir des résultats solides. Le tableau 2 présente la méthodologie des deux études. 3.Résultats 3.1. Les compétences émotionnelles sont liées de manière significative à la santé La première question de recherche de l’étude consistait à vérifier si les compétences émotionnelles constituaient un facteur déterminant de la santé. Pour répondre à cette question, des corrélations ont été établies entre les compétences émotionnelles et les différentes formes d’utilisation des soins de santé (utilisation des médicaments, nombre de consultations chez un médecin, nombre d’hospitalisations…). Ces corrélations étaient significatives et démontrent que les compétences émotionnelles constituent un facteur déterminant de la santé. Des compétences émotionnelles plus élevées sont associées à une consommation réduite de médicaments, une baisse du nombre de consultations chez les médecins généralistes et les spécialistes et un nombre inférieur de jours d’hospitalisation. Cette constatation est une primeur mondiale ! Pour les autres caractéristiques des personnes interrogées, des corrélations ont été établies avec l’utilisation des soins de santé. L’âge, le sexe, le niveau de formation, le BMI, les émotions positives et négatives2, le soutien social, les habitudes 1 Body Mass Index : indice de masse corporelle, soit le rapport entre le poids (exprimé en kg) et le carré de la taille (exprimée en m). 2 Il y a une différence importante entre les facteurs ‘émotions positives et négatives’ et la compétence émotionnelle. Avec les facteurs ‘émotion positives’ et ‘négatives’, on pointe le fait d’avoir ces émotions. Dans la littérature, il a déjà été montré que le fait d’avoir des émotions négatives ou positives influence notre santé. Avec la compétence émotionnelle, on va un pas plus loin en examinant la façon dont ces émotions positives ou négatives sont identifiées, exprimées, comprises, régulées et utilisées. La compétence émotionnelle a également une influence sur la santé, ce que montre la présente étude pour la première fois. MC-Informations 258 • décembre 2014 37 Tableau 2:deux études N contacté (échantillon stratifié par sexe, âge, province) N13 N24 = échantillon final Informations extraites des bases de données de la MC Questionnaire 38 Étude 1 2011 Étude 2 2013 10.000 (par courrier) 200.000 (par courriel) 1.646 (± 16 %) 16.999 (± 8,5 %) 1.310 (± 13%) 9.616 (± 4,8 %) (âge moyen = 51,2 ans, 58 % de femmes) (âge moyen = 56,53 ans, 59 % de femmes) Au cours des 12 dernières années • Nombre de consultations chez un médecin (+ dépenses) • Nombre de jours d’hospitalisation (+ dépenses) • Nombre de médicaments (exprimé en DDD ou Defined Daily Dose) (+ dépenses) • Caractéristiques du répondant (sexe, âge, niveau de formation, langue, province, situation familiale…) • BMI (Body Mass Index) • Compétences émotionnelles (TEIQue-SF ; Petrides et al.) • Émotions positives et négatives (extended PANAS) • Soutien social (2 items : soutien concret et émotionnel) • Comportement en matière de santé (alimentation, activité physique, habitude en matière de tabagisme et de consommation d’alcool) • Médicaments non remboursés (analgésiques, vitamines, somnifères…) • Caractéristiques du répondant (sexe, âge, niveau de formation, langue, province) • BMI (Body Mass Index) • Compétences émotionnelles (PEC ; Brasseur et al.)5 • Émotions positives et négatives (extended PANAS) • Soutien social (2 items : soutien concret et émotionnel) • Comportement en matière de santé (alimentation, activité physique, habitude en matière de tabagisme et de consommation d’alcool) • Médicaments non remboursés (analgésiques, vitamines, somnifères…) • Services de santé non remboursés (acuponcture, psychologue, ostéopathie…) • la littératie en santé6 3 N1 = répondants qui ont complété la totalité du questionnaire et autorisé explicitement le couplage avec les bases de données de la MC. 4 N2 = N1 membres des MC durant la période étudiée 5 La version en ligne du questionnaire n’était pas identique à celle envoyée par la poste. Pour les questions relatives aux émotions, un nouveau questionnaire étayé scientifiquement a été développé dans l'intervalle et il a été décidé d'utiliser cette nouvelle version. 6 Les résultats liés à la littératie en santé sont décrits dans un autre article de ce CM-Info: ‘Bilan des connaissances des Belges en matière de santé’. MC-Informations 258 • décembre 2014 alimentaires et les habitudes en matière d’activité physique ont également montré un lien significatif avec la consommation de médicaments et l’utilisation des soins de santé. La corrélation entre ces variables et la santé avait déjà été démontrée dans d’autres études. 3.2. Les compétences émotionnelles et l’âge sont les deux principaux facteurs prédictifs de la santé Les résultats de l’étude montrent que de nombreux facteurs exercent une influence sur l’utilisation des soins de santé. En outre, bon nombre de ces facteurs sont corrélés entre eux. La seconde question de recherche de l’étude consistait à définir les principaux facteurs prédictifs de chaque utilisation de soins de santé7. Une analyse statistique a été effectuée à cet effet (analyse de régression pas à pas). Le résultat de cette analyse est représenté sous la forme d’un tableau (voir les Tableaux 3 et 4) qui énumère les variables prédictives pour chaque utilisation de soins de santé, par ordre d’importance. La variable mentionnée en premier lieu représente le principal facteur prédictif de cette utilisation de soins de santé. Les variables suivantes ajoutent chacune une valeur prédictive supplémentaire. L’étude 1 démontre que les compétences émotionnelles (CE) et l’âge constituent les deux principaux facteurs prédictifs de l’utilisation des soins de santé (Tableau 3). Ces deux facteurs apparaissent six fois à la première place, ce qui signifie qu’ils constituent les principaux facteurs prédictifs pour cette utilisation des soins de santé (p. ex. : les CE sont le principal facteur prédictif du nombre de visites chez le psychiatre, suivies par la formation et le sexe). Les CE apparaissent le plus souvent dans le tableau (13 fois), suivies par l’âge (9 fois), le sexe et l’activité physique (7 fois chacun), la formation et le soutien social (5 fois chacun). Cela signifie que ce sont les compétences émotionnelles qui sont citées le plus fréquemment comme une variable prédictive de l’utilisation des soins de santé. Dans l’étude 2, il a été vérifié si l’utilisation des soins de santé était définie essentiellement par les compétences émotionnelles intrapersonnelles (relatives à ses propres émotions) ou plutôt par les compétences émotionnelles interpersonnelles (relatives aux émotions des autres). Les résultats montrent que les compétences émotionnelles intrapersonnelles (CE intra) présentent la valeur prédictive la plus élevée en ce qui concerne l’utilisation des soins de santé. Les CE intrapersonnelles apparaissent le plus souvent à la première place, soit cinq fois (Tableau 4). Cela signifie que les CE intrapersonnelles constituent le plus souvent le principal facteur prédictif de l’utilisation des soins de santé. Ce sont les compétences intrapersonnelles qui apparaissent le plus souvent dans le tableau (13 fois), suivies par l’âge (12 fois), la formation (11 fois), le soutien social (10 fois), le sexe (9 fois), l’activité physique (sport) et le BMI (8 fois chacun) et les CE interpersonnelles (7 fois). De tous les facteurs corrélés avec la santé, les compétences émotionnelles (surtout intrapersonnelles) et l’âge présentent les valeurs prédictives les plus élevées. 3.3. Des compétences émotionnelles élevées réduisent l’effet des facteurs de risque connus sur la santé La troisième question de l’étude visait à vérifier si les compétences émotionnelles pouvaient réduire l’impact négatif de certains facteurs de risque sur la santé. À cet effet, l’utilisation moyenne des soins de santé a été calculée par sous-groupe. L’échantillon a chaque fois été subdivisé en deux sous-groupes : les personnes présentant des compétences émotionnelles élevées et faibles (supérieures ou inférieures au score moyen de CE8). Chaque sous-groupe a fait l’objet d’une subdivision supplémentaire : les personnes présentant un certain risque pour la santé (p. ex. : personne âgée) par rapport aux personnes qui ne présentaient pas ce risque (p. ex. : personne jeune). Les personnes présentant un certain facteur de risque pour la santé (personnes âgés, BMI élevé, niveau de formation faible, sédentarité) et des CE faibles ont davantage recours aux soins de santé que les personnes qui présentent le même facteur de risque mais des CE élevées. Elles consomment plus de médicaments, consultent plus souvent le médecin généraliste ou spécialiste et ont plus de journées d'hospitalisation. Des CE élevées peuvent donc réduire l’impact négatif d’un facteur de risque donné. Ainsi, les figures 1 à 6 montrent par exemple que des CE élevées sont susceptibles de réduire l’effet négatif de l’âge avancé, d’un BMI élevé, d’un faible niveau de formation ou de la sédentarité sur l’utilisation des soins de santé. 7 Les variables suivantes ont été prises en compte dans le modèle : compétences émotionnelles (CE), âge, sexe, formation, BMI, soutien social (Sout. soc.), habitudes alimentaires (alimentation), activité physique, consommation d’alcool et tabagisme (alc. et tabac). 8 Pour l’ensemble des répondants, le score moyen de compétences émotionnelles a été calculé. Les répondants pour lesquels le score se situe au-dessus de cette moyenne sont versés dans le groupe ‘CE élevées’. Les répondants ayant un score inférieur à la moyenne sont repris dans le groupe ‘CE faibles’. MC-Informations 258 • décembre 2014 39 40 MC-Informations 258 • décembre 2014 Sexe CE Âge Sout. soc. Activité physique Âge Activité physique Sexe CE Âge CE BMI Activité physique Formation Sexe Sout. soc Utilisation de médicaments remboursés exprimée en DDD10 Âge CE Dépenses en médicaments remboursés Âge Sexe BMI CE Sout. soc. Formation Nombre de consultations chez le médecin (généraliste et spécialiste) Âge Sexe CE BMI Formation Sout. soc. Dépenses en consultations chez le médecin (généraliste et spécialiste) Formation Alimentation Sexe CE Dépenses en consultations chez le psychiatre Formation CE Nombre de consultations chez le psychiatre Sexe sique Activité phy- Âge CE Nombre de jours d’hospitalisation (tous types) Âge Activité physique CE Dépenses hospitalisation (tous types) physique Activité Alc. et tabac BMI CE Nombre de jours en hôpital général Âge Activité physique CE Dépenses hôpital général Activité physique Âge Sexe Formation BMI CE_intra Dépenses en médicaments remboursés Âge Activité physique Formation Sexe CE_intra Sout. Soc. CE_inter Alc. et tabac BMI Alimentation Nombre de consultations chez le médecin (généraliste et spécialiste) Formation Âge Activité physique Sout. soc. Sexe CE_intra BMI CE_inter Alc. et tabac Alimentation Dépenses en consultations chez le médecin (généraliste et spécialiste) CE_intra Formation Sexe Sout. Soc. CE_inter Âge BMI Nombre de consultations chez le psychiatre CE_intra Formation Sexe Sout. soc. Âge CE_inter Dépenses en consultations chez le psychiatre CE_intra Activité physique Sout. soc. Alc. et tabac BMI Âge Formation Nombre de jours d’hospitalisation (tous types) Activité physique Âge Formation CE_intra Sexe Dépenses hospitalisation (tous types) Activité physique CE_intra Sout. Soc. Âge Formation Nombre de jours en hôpital général Activité physique Âge Sexe Formation CE_intra Sout. Soc Dépenses hôpital général CE_intra Âge Alc. et tabac BMI Sout. soc. CE_inter Nombre de jours en hôpital psych. Alc. et tabac CE Nombre de jours en hôpital psych. CE_intra BMI Dépenses hôpital psych. Sout. soc. Dépenses hôpital psych. 10 DDD = Defined Daily Dose = « dose journalière moyenne » Services de santé non remboursables : consultation du psychologue, centres de santé mentale, hammam, sauna ou station thermale, acuponcteur, ostéopathe, chiropracteur, masseur, aromathérapeute, soigneur, kinésiologue ou un autre énergiethérapeute. Âge BMI Activité physique CE_intra Alimentation Sout. soc. Formation CE_inter Sexe Sexe CE_intra Sout. soc. Formation CE_inter Alimentation Âge 9 Utilisation de médicaments remboursés exprimée en DDD10 Fréquence d’utilisation des médicaments non remboursés 9 Tableau 4 : Résultats des régressions pas à pas afin de déterminer les facteurs prédictifs significatifs (classés par ordre d’importance) de chaque type d'utilisation des soins de santé lorsque tous les facteurs prédictifs sont repris dans le modèle (étude 2) Fréquence d’utilisation des médicaments non remboursés Fréquence d’utilisation des services de santé non remboursés 9 Tableau 3 : Résultats des régressions pas à pas (stepwise) afin de déterminer les facteurs prédictifs significatifs (classés par ordre d’importance) de chaque type d'utilisation des soins de santé lorsque tous les facteurs prédictifs sont repris dans le modèle (étude 1) Figure 1 : L’interaction entre l’âge et les CE en ce qui concerne les médicaments remboursés Volume de médicaments remboursés en DDD (en base annuelle) 900 Âge élevé 800 776 Âge jeune 700 600 594 500 400 353 300 272 200 100 0 CE faibles CE élevées Figure 2 : L’interaction entre le BMI et les CE en ce qui concerne les médicaments remboursés 800 700 BMI élevé 720 Volume de médicaments remboursés en DDD (en base annuelle) BMI faible 600 561 500 400 403 311 300 200 100 0 CE faibles CE élevées MC-Informations 258 • décembre 2014 41 Figure 3 : L’interaction entre le BMI et les CE en ce qui concerne les contacts avec un médecin (généraliste et spécialiste) Volume de contacts chez un médecin (en base annuelle) 10 9 BMI élevé 9,2 BMI faible 8 7,9 7,7 7 6,9 6 5 4 3 2 1 0 CE faibles CE élevées La Figure 1 montre que les personnes âgées11 consomment plus de médicaments que les personnes plus jeunes. La consommation des médicaments est également influencée par les CE : plus les CE sont élevées, plus la consommation de médicaments est faible. Des CE élevées réduisent la consommation accrue de médicaments chez les personnes âgées. Sur une base annuelle12, une personne âgée présentant des CE faibles consomme 182 unités de médicaments remboursés en plus qu’une personne âgée présentant des CE élevées. Chez les jeunes adultes, la différence de consommation entre les personnes à CE élevées et faibles s’élève à 81 unités sur une base annuelle. La Figure 2 montre que les personnes présentant un BMI13 élevé consomment plus de médicaments que les personnes présentant un BMI faible. Mais les CE jouent également un rôle majeur : plus des CE sont élevées, plus la consommation de médicaments est faible. Des CE élevées réduisent la consommation accrue de médicaments chez les personnes présentant un BMI élevé. Sur une base annuelle, une personne présentant un BMI élevé et des CE faibles consommera 159 unités de médicaments en plus qu’une personne présentant également un BMI élevé mais des CE élevées. Pour les personnes présentant un BMI faible, la différence de consommation entre les personnes à CE élevées et faibles s’élève à 92 unités (sur une base annuelle). La Figure 3 montre que les personnes présentant un BMI élevé ont plus de contacts (consultations et/ou visites) avec un médecin que les personnes présentant un BMI faible. Mais les CE jouent également un rôle majeur : plus les CE sont élevées, plus le nombre de contacts est faible. Des CE élevées réduisent la fréquence de contacts pour les personnes présentant un BMI élevé. Sur une base annuelle, une personne présentant un BMI élevé et des CE faibles a 1,3 contacts de plus (soit 15 contacts de plus sur une période de 12 ans) avec un médecin qu’une personne présentant également un BMI élevé mais des CE élevées. Pour les personnes présentant un BMI faible, la différence entre les personnes à CE élevées et faibles s’élève à 0,8 contact (en base annuelle). 11 La moyenne d’âge de tous les répondants est de 56 ans. Les personnes qui sont plus âgées que cette moyenne forment le groupe ‘âge élevé’ et les personnes plus jeunes que cette moyenne sont reprises dans le groupe ‘âge jeune’. 12 On considère l’ensemble de la consommation cumulée sur la période 2001 à 2012. Mais nous l’exprimons en base annuelle, en divisant ce volume par 12. 13 Le score BMI moyen pour l’ensemble des répondants est de 26. Les personnes qui ont un BMI supérieur à cette moyenne forment le groupe ‘BMI élevé’, les personnes ayant un BMI inférieur à cette même moyenne forment le groupe ‘BMI faible’. Vu qu’un score BMI supérieur à 25 est une indication de surpoids, on peut considérer le groupe ‘BMI élevé’ comme étant celui des personnes en surpoids, le groupe ‘BMI faible’ étant alors celui des personnes qui ne sont pas en surpoids. 42 MC-Informations 258 • décembre 2014 Figure 4 : L’interaction entre le niveau de formation et les CE en ce qui concerne les contacts chez un médecin (généraliste et spécialiste) Volume de contacts chez un médecin (en base annuelle) 10 9 9,2 8,1 8 7 7,4 6,9 6 5 4 3 2 formation faible 1 formation élevée 0 CE faibles CE élevées Figure 5 : L'interaction entre le niveau de formation et les CE sur le nombre de journées d’hospitalisation (hôpital général) 1,4 1,26 formation faible Nombre de journées dans les hôpitaux généraux (en base annuelle) 1,2 formation élevée 1,0 0,8 0,84 0,65 0,62 0,6 0,4 0,2 0,0 CE faibles CE élevées MC-Informations 258 • décembre 2014 43 Figure 6 : L'interaction entre l’activité physique et les CE en ce qui concerne le nombre de journées d’hospitalisation (hôpital général et psychiatrique) 3,5 Nombre de journées dans les hôpitaux généraux et psychiatriques (en base annuelle) 3,0 peu d'activité physique 2,98 beaucoup d'activité physique 2,5 2,0 1,5 1,0 1,16 1,08 0,98 0,5 0,0 CE faibles CE élevées La Figure 4 montre que les personnes présentant un niveau de formation faible ont plus de contacts avec un médecin que les personnes présentant un niveau de formation élevé14. Mais les CE jouent également un rôle majeur : plus les CE sont élevées, plus le nombre de contacts est faible. Des CE élevées réduisent la fréquence de contacts pour les personnes présentant un niveau de formation faible. Sur une base annuelle, une personne présentant un niveau de formation faible et des CE faibles ont 1,2 contacts de plus avec un médecin qu’une personne présentant également un faible niveau de formation mais des CE élevées (soit 14 fois de plus sur une période de 12 ans). Pour les personne présentant un haut niveau de formation, la différence entre les personnes à CE élevées et faibles s’élève à 0,5 contact (en base annuelle). La Figure 5 montre, en base annuelle, qu’une personne ayant un faible niveau de formation et une compétence émotionnelle faible passe 0,6 jour de plus à l’hôpital par rapport à une personne ayant un faible niveau de formation mais une compétence émotionnelle élevée (soit 7 jours de plus, sur une période de 12 années). Pour les personnes qui ont un niveau élevé de formation, cette même différence est réduite à 0,2 jour entre ceux qui ont une compétence émotionnelle faible et ceux qui ont une compétence émotionnelle élevée. On voit également l’effet compensatoire de la compétence émotionnelle visà-vis d’un faible niveau de formation : avec une compétence émotionnelle élevée, le nombre de jours passés à l’hôpital est quasi identique, que le niveau de formation soit faible ou élevé. Cet effet de compensation se retrouve également vis-à-vis de l’indice d’activité physique. La Figure 6 montre que les personnes ayant peu d’activité physique15 présentant des CE faibles séjournent 1,8 jours en plus à l’hôpital (sur une base annuelle) que ces mêmes personnes sédentaires mais présentant des CE élevées (soit 22 jours en plus sur une période de 12 ans). Pour les personnes physiquement très actives, la différence entre les personnes à CE élevées et faibles ne s’élève qu’à 0,1 jour (soit 1,2 jours sur une période de 12 ans). Pour les personnes présentant des compétences émotionnelles élevées, la différence entre les personnes avec une activité physique faible et élevée ne s’élève qu’à 0,19 jour sur une base annuelle (soit 2,2 jours sur une période de 12 ans). 14 Les personnes faisant partie du groupe ‘formation faible’ ont un diplôme de l’enseignement secondaire (inférieur ou supérieur) ou primaire. Les personnes afférentes au groupe ‘formation élevée’ ont un diplôme de l’enseignement supérieur (type court, type long), ou un diplôme universitaire. 15 Dans le questionnaire, trois questions évaluent dans quelle mesure les répondants pratiquent des activités physiques et sportives. Le groupe ‘peu d’activité physique’ rassemble les répondants qui ont sélectionné les items ‘presque jamais’ à ‘parfois’ aux questions portant sur la pratique d’activités physiques et sportives. Les personnes faisant partie du groupe ‘beaucoup d’activité physique’ sont celles qui pratiquent ‘parfois’ à ‘presque toujours’ ces activités sportives et physiques. 44 MC-Informations 258 • décembre 2014 4. Offre de la MC en matière de compétences émotionnelles Un programme destiné spécifiquement à améliorer la compétence émotionnelle n’existe pas encore actuellement. Suite aux résultats de l’étude, présentés ci-dessus, il s’agit d’y travailler dans le futur. Malgré cette lacune, l’offre actuelle de la MC couvre partiellement cette problématique. Dans différents programmes et cours, il y a déjà des éléments qui vont dans cette direction. Certaines études16 ont montré que les compétences émotionnelles pouvaient s’acquérir et s’améliorer. Il s’agit donc d’un facteur sur lequel on peut agir en vue d’influencer la santé. Depuis déjà quelques années, l’action préventive de la MC s’articule autour de trois thèmes : l’alimentation, l’activité physique et le bien-être/la santé mentale17. L’étude conjointe de la MC, de l’UCL et de la KU Leuven confirme qu’elle est donc sur la bonne voie. L’étude montre clairement que la santé est influencée par différents facteurs et que l’action préventive doit donc également s’organiser à plusieurs niveaux. Si nous voulons améliorer notre santé, il est important d’agir sur le plus grand nombre possible de domaines. Les nouvelles connaissances en matière de compétences émotionnelles ne remplaceront pas les recommandations précédentes en matière d’alimentation saine et d’activité physique suffisante. Au contraire, il s’agit d’un facteur complémentaire à prendre en compte à l’avenir, en plus des facteurs déjà connus. La preuve scientifique de l’influence des compétences émotionnelles également sur la santé confirme et conforte la MC dans son offre préventive en matière de bien-être et de santé mentale. Ci-dessous, vous trouverez un aperçu de l’offre spécifique de la MC en matière de compétences émotionnelles ou de santé psychique au sens large. 4.1. Offre du côté néerlandophone Promouvoir les compétences émotionnelles et la pensée positive Le 'plan du bonheur' (Figure 7) Pluk je geluk (Cueillez votre bonheur) Tel est précisément l’objectif visé par la campagne de prévention de la MC « Pluk je geluk ». On entend ainsi encourager la Flandre à promouvoir activement la résistance mentale. Améliorer sa Figure 7: Le 'plan du bonheur' Leef je passie uit 7 5 ln aa lem elf ut -o rk ige to itt np e’ Do Haast je niet Lach luidop Relativeer Ma ak je nie www.plukjegeluk.be wo nn ni od et Pieker minder ig sl dr eu Schrijf je dromen neer uk ks Do e‘ vo o ns rj he ez Durf fouten maken Maak je doelen concreet Pla Het CM-geluksplan zet je op het spoor van een gelukkiger leven. Kies elke dag een halte op één van de zeven gelukslijnen. Ontdek zo hoe je zelf werk kan maken van meer geluk. LEEF GEZOND EN BEWEEG 6 LEEF HIER EN NU 4 3 Zeg vaker ‘goedemorgen’ s 2 1 HEB GRIP OP JE LEVEN HEB AANDACHT VOOR JEZELF DENK POSITIEF iet INVESTEER IN RELATIES LEEF NAAR JE DOELEN 1 an da c ht Noteer je sterke punten sm et vo lle a Leer of doe iets nieuws Do ea lle Bel wie je al lang wilde bellen Drink voldoende 3 Doe zomaar iets leuks voor iemand ra ge n Pak problemen aan Schrap in je agenda Vervang ‘moeten’ door ‘willen’ Toon familie/vrienden dat ze speciaal zijn G kle enie ine t v din an ge n Geef jezelf een compliment pli me n om ee nc Luister meer, praat minder Ge ef Proef en ruik bewust Neem tijd voor een ontbijt t Adem bewust in en uit Leer ‘nee’ zeggen Doe ‘ns iets geks Slaap extra Maak tijd voor jezelf Doe belangrijke zaken eerst 4 Zet je tv uit en beweeg 6 5 7 7 principes van geluk: © Trimbos-instituut – geluksplan: © CM 2 V.U.: Bert Peirsegaele, Haachtsesteenweg 579 postbus 40, 1031 Brussel – augustus 2010 Du rf hu lp v Ze Wees tevreden met jezelf te e na n ee ar rs wa te t j sta ew p En il vr gag ijw ee illi r j ge e rs do we e rk Eet fruit Wat was vandaag oké? 16 Kotsou et al., 2011 ; Nelis et al., 2011 17 L’action préventive de la MC va également s’orienter, à partir de janvier 2015, vers les problèmes liés au sommeil. MC-Informations 258 • décembre 2014 45 résistance mentale permet en effet de mieux maîtriser des situations difficiles. « Pluk je geluk » repose sur la psychologie positive et l’amélioration de la résilience et des compétences émotionnelles. Le « CM-geluksplan » (le plan du bonheur de la MC) avec ses sept lignes scientifiques du bonheur, basé sur les principes du bonheur de l’institut néerlandais Trimbos, montre la voie à suivre pour l’ensemble des initiatives. Le plan du bonheur est conçu comme un plan de métro comportant sept lignes de bonheur. « La pensée positive » (ruminez moins, relativisez, quels étaient les points positifs de la journée ?), « Soyez l’acteur de votre vie » (résolvez vos problèmes, ne vous inquiétez pas inutilement...), « Soyez attentif à vous » (notez vos points forts...) sont trois lignes du bonheur qui renforcent les compétences émotionnelles. Vlieg erin! pour les 10 –12 ans Cette formule éducative pour les élèves de 5e et 6e année primaire vise à renforcer le bien-être des élèves. Veiller au bien-être à l’école est étroitement associé à la santé mentale et rentre dans un contexte plus large de prévention. Se sentir bien à l’école dépend tant des facteurs individuels des élèves que de l’environnement d’apprentissage. Vlieg erin! offre des activités d’apprentissage et des conseils concrets pour améliorer le développement socio-émotionnel des élèves d’une part et encourager un climat positif en classe d’autre part. Plus d’informations : www.cm.be/vliegerin Le ‘coach du bonheur’ Chacun peut également agir sur sa santé mentale en ligne via le « CM-gelukscoach » (coach du bonheur) sur www.plukjegeluk.be. Le coach aide les utilisateurs à améliorer leur santé mentale sur la base des sept lignes du bonheur par le biais d’exercices, de témoignages, de conseils et d’informations. À l’heure actuelle, 15.500 personnes sont déjà inscrites. Offre de formation régionale Les Mutualités chrétiennes proposent également des sessions d’information et des cours intensifs dans toute la Flandre. Gérer son stress, ses inquiétudes, mindfulness, techniques de relaxation… en constituent quelques exemples. Plus d’informations : www.plukjegeluk.be/kalender Infos santé Des informations sur la santé mentale sont proposées sur le site web MC, sur le site Plukjegeluk et dans sa newsletter électronique mensuelle, et dans des publications telles que « Doeboek Pluk je geluk » et la brochure « Stress de baas ». Les ‘chercheurs de bonheur’ pour les 14-16 ans Avec cette formule éducative destinée au 2e degré de l’enseignement secondaire, la MC mise pleinement sur la santé mentale des jeunes. « De gelukzoekers » (chercheurs de bonheur) se base sur le plan du bonheur et encourage les écoles à développer une politique en matière de santé mentale. Par le biais d’un jeu informatif et d’une série de leçons correspondantes, les enseignants reçoivent les méthodologies et les conseils nécessaires pour apprendre aux jeunes comment améliorer leur résistance mentale. En effet, une meilleure santé mentale et des compétences émotionnelles plus élevées peuvent les aider à mieux appréhender la vie et leur santé, aujourd’hui comme demain. Plus d’informations : www.cm.be/degelukzoekers 4.2. Offre du côté francophone Infor Santé, le service promotion de la santé de la MC, a investi la thématique de la santé mentale avec comme premier axe de travail le stress. Les enquêtes de terrain auprès des professionnels du réseau interne et externe de la MC ont permis de dégager des pistes concrètes de travail. La première d'entre elles est relative à l’accès à l’information sur la santé mentale, par la réalisation de deux brochures d’information et de sensibilisation : sur le stress (« Balancez votre stress ! ») et sur les différents types de thérapeutes et de thérapies (« Et psy j’allais consulter ? Des conseils pour bien choisir »). Plus d'informations : www.mc.be/inforsante Parallèlement, les mutualités régionales ont organisé des initiatives de terrain pour renforcer l’action locale. En voici quelques exemples : • ateliers d’initiation à différentes techniques corporelles (yoga, taïchi, sophrologie, auto-massage, méditation…) ; • modules d’ateliers sur l’estime de soi, la gestion du stress… ; • cycles de conférence sur le stress, les émotions, le lâcherprise, le bonheur, le sommeil… ; • (…). 46 MC-Informations 258 • décembre 2014 La seconde piste de travail consiste à favoriser le développement des ressources individuelles en termes de connaissance de soi, de ses besoins et de ses émotions ; l’objectif global étant de rendre les gens acteurs de leur bien-être. préventive. Au sein de la MC, l’alimentation, l’activité physique et la santé mentale constituent depuis déjà plusieurs années un volet de l’action préventive. La présente étude confirme qu’il s’agit de la bonne voie. Certaines régions ont d’ailleurs organisé des modules d’ateliers en plusieurs séances autour des compétences émotionnelles. Ces ateliers consistaient, entre autres, à comprendre le processus émotionnel (Comment ça marche ? A quoi ça sert ?), à identifier les sensations liées aux émotions, à expérimenter des techniques pour apprendre à mieux vivre avec ses émotions… La connaissance des facteurs qui influencent notre santé s’est encore améliorée. Elle permet dès lors de développer de nouvelles actions préventives étayées scientifiquement. Les MC poursuivront leurs efforts en vue de participer aux études qui permettent de développer davantage la prévention. Infor Santé travaille actuellement à l’élaboration d’une campagne de prévention autour du bien-être, dont la sortie est prévue en 2015. Un portail web (www.jepenseamoi.be) reprenant des articles de fond, un agenda des activités autour du bien-être, la mise en évidence de services d’aide variés… accompagnera cette campagne. Des conférences seront également organisées dans l’ensemble des mutualités régionales. Bibliographie Brasseur S, Grégoire J, Bourdu R & Mikolajczak M. 2013. The Profile of Emotional Competence (PEC): Development and Validation of a Self-Reported Measure that Fits Dimensions of Emotional Competence Theory. PLoS ONE 8(5), e62635. doi: 10.1371/journal.pone.0062635 Kotsou, L., Nelis, D., Gregoire, J., & Mikolajczak, M. (2011). Emotional plasticity: conditions and effects of improving emotional competence in adulthood. Journal of Applied Psychology, 96(4), 827-839. 5.Conclusions Ces dernières années, de multiples études ont permis d’améliorer les connaissances concernant les facteurs qui influencent notre santé. Plus ces connaissances seront étendues, plus les actions préventives entreprises pourront être nombreuses et ciblées. Certains éléments dans la littérature indiquent que les compétences émotionnelles influencent également notre santé. La MC, l’UCL et la KU Leuven ont contribué à une recherche scientifique commune afin d’examiner cette corrélation à la lumière d’indicateurs objectifs de santé. Cette étude est une primeur, vu que cette relation n’avait jamais été étudiée auparavant ! Les résultats de l’étude montrent que les compétences émotionnelles exercent une influence sur notre santé. Les compétences émotionnelles sont non seulement significativement corrélées à l’utilisation des soins de santé, mais elles constituent même le principal indicateur prédictif des soins de santé (avec l’âge). Par ailleurs, les CE peuvent réduire les effets négatifs des facteurs de risque pour la santé (tels que l’âge, un BMI élevé, un faible niveau de formation, une faible activité physique). L’étude montre que la santé est influencée par différents facteurs et que la prévention doit également cibler différents domaines. Mikolajczak M, Quoidbach J, Kotsou I & Nelis D. 2009. Les compétences émotionnelles. Paris : Dunod Mikolajczak M, Desseiller M. 2013. Vivre mieux avec ses émotions. Paris : Odile Jacob. Nelis, D., Kotsou, I., Quoidbach, J., Hansenne, M., Weytens, F., Dupuis, P., et al. (2011). Increasing Emotional Competence Improves Psychological and Physical Well-Being, Social Relationships, and Employability. Emotion, 11(2), 354-366. Petrides KV, Furnham A. 2003. Trait emotional intelligence: behavioural validation in two studies of emotion recognition and reactivity to mood induction. European Journal of Personality : 17, 39-57. Petrides KV, Sangareau Y, Furnham A & Frederickson N. 2006. Trait Emotional Intelligence and Children’s Peer Relations at School. Social Development : 15, 537-547 L’étude commune de la MC, de l’UCL et de la KU Leuven identifie les compétences émotionnelles comme un nouveau facteur influençant la santé. La bonne nouvelle, c’est que les recherches ont déjà montré que les compétences émotionnelles pouvaient s’acquérir et s’améliorer. Les compétences émotionnelles sont donc un facteur à prendre en compte dans le cadre de l’action MC-Informations 258 • décembre 2014 47 Bilan des connaissances des Belges en matière de santé Sigrid Vancorenland, Hervé Avalosse, Rebekka Verniest, Michiel Callens, Recherche et Développement Stephan Van den Broucke, Audrey Renwart, Université Catholique de Louvain (UCL) Griet Rummens (Promotion de la santé), France Gerard (Infor Santé) Synthèse Trouvez-vous les informations sur la santé dont vous avez besoin ? Les comprenez-vous et pouvez-vous les mettre en pratique ? Telles étaient les questions de l’enquête réalisée auprès de 10.000 membres des Mutualités chrétiennes afin de mesurer leurs compétences en matière de santé (en anglais : « health literacy »). Il ressort des résultats que six Belges sur dix ont une connaissance suffisante des matières touchant la santé, mais qu’elle est limitée pour trois Belges sur dix, voire même insuffisante pour un sur dix. Au total, quatre Belges sur dix en savent trop peu en matière de santé pour mener une vie saine. La Belgique affiche donc un résultat comparable à celui de la plupart des pays européens (European Health Literacy Survey 2011), mais elle est loin derrière la performance des Pays-Bas, par exemple. Plus le niveau d’éducation est faible, moins bonnes sont les connaissances en matière de santé. Parmi les personnes uniquement diplômées de l’enseignement primaire, 34 % ont des connaissances limitées et 19 % ont des connaissances insuffisantes en matière de santé. Plus de la moitié des personnes peu scolarisées éprouvent donc des difficultés à effectuer les bons choix et à faire les démarches appropriées en cas de maladie. À titre de comparaison, parmi les personnes diplômées de l’enseignement supérieur, seules 22 % disposent de connaissances limitées et 4 % ont des connaissances en matière de santé jugées insuffisantes. Les chercheurs ont également voulu savoir si de bonnes connaissances en matière de santé pouvaient compenser l’effet défavorable d’un faible niveau d’études et aider à faire les bons choix concernant un certain nombre d’habitudes de vie saines. Ils ont constaté un effet de la « health literacy » sur l’alimentation, l’activité physique et la consommation de médicaments, ce qui démontre l'utilité de l'éducation et d'une information claire en matière de santé. Les données de cette étude confirment ce qui ressort d’enquêtes antérieures réalisées à l’échelle européenne : le manque de connaissances en matière de santé ne concerne pas une petite minorité, mais touche une grande partie de la population. Investir dans la promotion des connaissances de santé et améliorer l’accessibilité aux informations pour ceux qui en ont le plus besoin doit faire partie des priorités. La MC poursuivra ses initiatives afin de promouvoir la santé, l’autogestion et le coaching. En tant que mutualité, elle met tout en œuvre pour améliorer les connaissances de santé de ses membres et les encourager à mener un mode de vie sain. Pour de nombreux thèmes tels que l’alimentation, l’activité physique, les problèmes de santé, la santé mentale, la MC propose des informations accessibles et objectives tout en accompagnant si possible les personnes individuellement. Mots-clés : connaissances en matière de santé, health literacy , niveau de scolarisation, infos santé, comportement en matière de santé 48 MC-Informations 258 • décembre 2014 1.Introduction Chaque individu est confronté, à un moment donné, à des questions et des décisions en matière de santé. Vais-je faire vacciner mon enfant ? À quel médecin vais-je m’adresser ? Comment puis-je manger plus sainement ? Quel traitement est-il préférable de suivre ? De plus en plus de patients prennent part activement aux décisions liées à leur santé et deviennent des « patients éclairés ». Pour assumer ce rôle actif, différentes compétences sont nécessaires. Ces compétences sont l’essence même du concept « health literacy » ou connaissances en matière de santé. Ce concept est défini comme « la connaissance, la motivation et les compétences des individus à accéder, comprendre, évaluer et utiliser l’information de santé en vue de porter des jugements et prendre des décisions dans la vie de tous les jours en ce qui concerne la santé, la prévention des maladies et la promotion de la santé, de manière à maintenir ou améliorer la qualité de vie. » (SØRENSEN K. et al., 2012). Le concept présente 4 dimensions : Dimensions de la « health literacy » Accéder Capacité de rechercher des informations en matière de santé Comprendre Capacité de comprendre les informations disponibles en matière de santé Évaluer Capacité d’interpréter, de filtrer, de juger et d’évaluer les informations disponibles Appliquer Capacité d’utiliser ces informations afin de prendre une décision en matière de soins de santé, de prévention des maladies, de promotion de la santé de manière à maintenir ou améliorer la santé. Source : SØRENSEN K et al, 2012 Ce concept s’applique à différents domaines d’information. Domaines d’information de la « health literacy » Type d’informations Exemples de compétences Soins de santé et gestion de la maladie Formulaires concernant les antécédents médicaux, notices explicatives, brochures informatives. Reconnaître les symptômes, Suivre les prescriptions, les notices, calculer le dosage de médicament prescrit Fonctionnement dans le système de soins Informations concernant le système de soins Formulaires d’assurance, descriptions des droits et des responsabilités Choix d’un médecin ou d’un spécialiste, prendre un rendez-vous, poser des questions aux prestataires de soins, compléter des formulaires pour la mutualité, souscrire une assurance complémentaire (p. ex. une assurance hospitalisation) Prévention des maladies et protection de la santé Informations concernant les risques pour la santé Actualité (TV, radio, journaux), avis concernant le dépistage et la santé, lettres concernant les résultats de tests, chiffres et graphiques, avertissements en matière de sécurité Évaluer son propre risque, choisir de participer à un dépistage, des tests diagnostiques ou des vaccinations, choisir entre des produits, utilisation de produits. Promotion de la santé Informations sur les déterminants de la santé Articles dans les journaux et revues, fascicules, brochures, Internet, étiquettes sur les denrées alimentaires et produits Acheter et préparer des aliments sains, prévoir une activité physique suffisante, suivre un programme anti-tabac, prendre des mesures de protection contre les accidents Source : SØRENSEN K et al, 2012 MC-Informations 258 • décembre 2014 49 Pour une personne qui veut manger plus sainement, il est important de savoir, par exemple, où trouver des informations sur l’alimentation saine, comme sur le site des MC, dans un article de journal ou d’une revue, un livre sur l’alimentation saine, ou les conseils du médecin généraliste. économique défavorisée et l’appartenance à une minorité ethnique. Par ailleurs, on note également une forte association à l’âge et au sexe. À cet égard, les compétences en matière de santé peuvent être considérées comme un facteur qui contribue aux inégalités en matière de santé. Lorsqu’elle a trouvé des informations sur l’alimentation saine, la personne doit ensuite être en mesure de les comprendre. Comprend-elle ce qui est écrit sur un site Web, dans un article ou dans un livre sur l’alimentation saine ? Comprend-elle les conseils d’un médecin ? Une étude européenne, l’European Health Literacy Survey (HLS-EU), s’est penchée sur la question en 2011. Cette étude a mesuré le niveau de health literacy dans 8 pays européens (l’Autriche, la Bulgarie, l’Allemagne, la Grèce, l’Irlande, les Pays-Bas, la Pologne et l’Espagne). Les résultats ont montré qu’environ 12 % des répondants disposaient de compétences insuffisantes en matière de santé et que 35 % présentaient des compétences limitées. Seuls 53 % disposaient d’un niveau de health literacy suffisant. Elle doit ensuite être capable d’interpréter ces informations et d’en évaluer la valeur. Les informations sur l’alimentation saine peuvent en effet être contradictoires. Une étude démontrera par exemple que boire du vin peut être bon pour la santé, tandis qu’une autre affirmera précisément le contraire. Ce que dit un grand-parent peut diverger des conclusions d’une étude récente. Il faut donc être en mesure d’identifier les sources fiables et les études dignes de confiance. Enfin, lorsque les informations ont été évaluées, la personne doit également être capable de les mettre en pratique. Parvientelle à mettre les conseils sur l’alimentation saine en pratique dans sa vie quotidienne afin de créer de saines habitudes alimentaires, et par exemple, manger chaque jour des fruits et des légumes, limiter l’apport en graisses et prendre un petitdéjeuner ? L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) reconnaît la « health literacy » comme un facteur déterminant important de la santé (OMS, 2008). En effet, développer de bonnes compétences en matière de santé présente des avantages non négligeables : ces compétences conduisent à des choix plus éclairés, à une plus grande confiance en ses propres choix, à des attitudes plus positives en matière de santé et des habitudes de vie plus saines, à une prévention accrue, à une meilleure santé et à une baisse des coûts des soins de santé. Par conséquent, l’amélioration des compétences en matière de santé profite à la santé publique. Inversement, de faibles compétences en matière de santé sont associées à une grande variété d’effets néfastes, comme des habitudes de vie malsaines (tabagisme, consommation d’alcool, mode de vie sédentaire), une mauvaise santé perçue, une utilisation accrue des soins de santé, moins de recours aux services préventifs, des frais d’hospitalisation plus élevés, des coûts plus élevés pour les maladies chroniques et une hausse de la mortalité. Différents facteurs expliquent une faible health literacy, notamment un faible niveau d’éducation, une situation socio- 50 2.Méthode Jusqu’il y a peu la Belgique ne disposait encore d’aucune information sur les compétences en matière de santé. Pour remédier à cette lacune, l’étude réalisée conjointement par les MC, l’UCL et la KUL sur les compétences émotionnelles (voir article dans ce numéro de MC-Info) a repris des questions liées aux compétences en matière de santé. L’étude avait pour but : • de dresser un bilan du niveau de compétences en matière de santé de la population belge. • de vérifier si ces compétences jouent un rôle médiateur dans la relation entre le niveau de formation et le comportement de santé. Le questionnaire en ligne de l’étude de la compétence émotionnelle reprenait 16 questions destinées à mesurer la health literacy . À cet effet, nous avons utilisé la version courte du questionnaire qui a servi à l’étude européenne HLS-EU1. Le questionnaire sondait également le niveau de formation et les différents comportements liés à la santé, comme le tabagisme, la consommation d’alcool, l’alimentation saine, l’activité physique, la consommation de médicaments non-remboursés et des traitements alternatifs. Le questionnaire en ligne a été envoyé à 200.000 membres adultes des MC. 16.999 personnes ont répondu à l’ensemble du questionnaire et ont donné leur consentement pour coupler les résultats du questionnaire aux informations extraites des bases de données des MC, comme l’utilisation de soins de santé remboursés. L’échantillon final se composait de 9.616 personnes, toutes membres des MC durant la période 200120122. 1 Un score de 1 ou 0 a été attribué à la réponse aux différentes questions. Un score de 1 a été attribué aux catégories de réponses « très facile » et « assez facile », et un score de 0 aux catégories « très difficile » et « assez difficile ». Le score final représentait la somme des 16 questions, à savoir un score de 0 à 16. Sur la base de ce score total, 3 groupes de « health literacy » ont été constitués : « insuffisant » pour un score de 0 à 8, « limité » pour un score de 9 à 12 et « suffisant » pour un score de 12 et plus. 2 Sur les 16.999 répondants, 9.616 ont été retenus, car il était important (pour l’étude sur les compétences émotionnelles) que tous les répondants soient membres des MC durant la période étudiée. MC-Informations 258 • décembre 2014 3.Résultats Le sexe et l’âge influent également sur les compétences en matière de santé. Le pourcentage de literacy suffisante est nettement plus élevé chez les femmes (60,9 %) que chez les hommes (56,2 %). Le pourcentage de health literacy suffisante dans les groupes d’âge de 25 à 74 ans oscille autour de 60 % (de 57 à 61 %). Ce pourcentage est nettement inférieur pour le groupe d’âge le plus jeune (18-24 ans) avec 45,5 % et le groupe d’âge le plus élevé (75 +) avec 49,2 %. 3.1. Quatre Belges sur dix en savent trop peu en matière de santé Six Belges sur dix (58,7 %) disposent d’un niveau de compétence suffisant en matière de santé. La health literacy est limitée pour trois Belges sur dix (29,7 %) et elle est même insuffisante pour un sur dix (11,6 %). Au total, quatre Belges sur dix en savent trop peu en matière de santé pour mener une vie saine. La Belgique affiche ainsi des scores comparables à ceux de la majorité des autres pays européens, mais se trouve loin en-dessous de la performance des Pays-Bas, par exemple. Les différences de health literacy sont les plus marquées suivant le niveau de formation (figure 2). Le pourcentage de health literacy suffisante est de 46 % chez les personnes diplômées de l’enseignement primaire, contre 75 % chez les personnes qui ont une formation post-universitaire. Chaque niveau de formation supérieur correspond à une hausse de la health literacy. Les compétences en matière de santé diffèrent considérablement en fonction des régions (voir figure 1). La Flandre a le plus haut pourcentage de health literacy suffisante (61,9 %), suivie de Bruxelles (52,5 %) et de la Wallonie (48,7 %). Figure 1 : Niveau de health literacy en fonction des régions 16% Wallonie 35% 49% 12% Bruxelles 35% 53% insuffisant limité suffisant 10% Flandre 28% 62% 12% Belgique 30% 59% 0,00% 10,00% 20,00% 30,00% 40,00% 50,00% MC-Informations 258 • décembre 2014 60,00% 70,00% 51 Figure 2 : Niveau de health literacy en fonction du niveau d’études enseignement post-universitaire enseignement supérieur de type long enseignement supérieur 4% 22% 8% 27% 9% 19% enseignement primaire 64% 32% 17% enseignement secondaire inférieur 65% 27% 13% enseignement secondaire supérieur 75% 55% 32% 34% insuffisant limité suffisant 52% 46% 0,00% 10,00% 20,00% 30,00% 40,00% 50,00% 60,00% 70,00% 80,00% 3.2. La health literacy atténue l’effet négatif du niveau d’études sur le comportement en matière de santé La littérature décrit à maintes reprises la corrélation entre un faible niveau d’études et un mode de vie malsain, comme de mauvaises habitudes alimentaires ou le tabagisme. Mais comme mentionné ci-dessus, la health literacy exerce un effet positif sur la santé. La question se pose dès lors de savoir si une literacy suffisante peut atténuer l’effet négatif du niveau d’études sur le comportement en matière de santé. Pour répondre à cette question, des « analyses de médiation » ont été effectuées. Une analyse de médiation se compose d’une série d’analyses de régression successives, qui vérifient si une variable exerce un impact sur une autre variable (par exemple : le niveau d’études influence-t-il le comportement alimentaire ?) Des analyses de régression ont été effectuées entre : • le niveau d’études et un comportement de santé • le niveau d’études et la health literacy • la health literacy et un comportement de santé • le niveau d’études, la health literacy et un comportement de santé Si on constate un impact du niveau d’études sur le comportement de santé (p. ex. : alimentation saine) ainsi qu’un impact du niveau d’études sur la health literacy et de la health literacy sur le comportement de santé (p. ex. : alimentation), les 3 52 conditions sont remplies pour effectuer une méta-analyse permettant de comparer les relations entre elles. Si l’effet des études sur le comportement de santé diminue par l’intervention de l’effet de la health literacy sur le comportement de santé, il est question de médiation partielle de la relation entre le niveau d’études et le comportement de santé par la health literacy. Si l’effet des études sur le comportement de santé disparaît, il y a une médiation complète. L’étude a fait apparaître un impact significatif du niveau d’études sur le tabagisme, une alimentation saine, l’activité physique, les traitements alternatifs et la consommation de médicaments (analgésiques et somnifères). Aucune influence du niveau d’études n’a été constatée sur la consommation d’alcool. Pour cette variable, cela n’avait donc aucun sens d’analyser l’effet médiateur de la health literacy. En ce qui concerne l’alimentation saine, l’activité physique et la consommation de médicaments, un effet médiateur considérable de la health literacy a été constaté. Autrement dit, une bonne health literacy peut atténuer l’effet négatif d’un faible niveau d’études en matière d’alimentation saine, d’activité MC-Informations 258 • décembre 2014 physique et de consommation des médicaments. L’utilité d’une bonne éducation et d'informations claires en matière de santé est ainsi démontrée. Les MC occupent une place importante dans ce domaine. 4. Promotion de la santé MC La présente étude sur la health literacy confirme l’importance du travail effectué par les MC dans le domaine de la promotion de la santé : proposer aux gens des informations compréhensibles en matière de santé et les accompagner vers un mode de vie sain. Mais les résultats montrent également que nous n’y parvenons pas toujours. En effet, quatre Belges sur dix présentent toujours des compétences insuffisantes en matière de santé pour pouvoir effectuer les bons choix. Il reste donc encore des efforts à faire pour continuer d’améliorer notre travail. Les MC proposent des informations accessibles et objectives sur un grand nombre de thèmes comme l’alimentation, l’activité physique, les problèmes de santé et la santé mentale et accompagnent même individuellement les personnes si nécessaire. Vous trouverez ci-après un bref résumé de l’offre actuelle. 4.1. Du côté néerlandophone Généralités Informations sur la santé (programme anti-tabac, hygiène, prévention des chutes, sommeil, prévention du cancer de la peau…), douleurs et maladies (diabète, médicaments, vaccination) et autogestion via : • site Web des MC : rubriques « Gezond leven »3 et « Klachten en ziekten »4 • magazines pour les membres5 (Visie, En Marche), notamment la rubrique « De Huisdokter » • e-newsletters – CM-zine • brochures et publications6 • sessions d’information régionales, workshops et cours7 Thèmes spécifiques dans le cadre de la promotion de la santé Informations, compétences et coaching en matière d’alimentation saine, d’activité physique et de poids sain : • coaching en ligne sur mesure via le « kilootje minder-coach » sur www.kilootjeminder.be • newsletter électronique mensuelle Kilootje minder • publications comme « Evenwichtig eetplezier » et « Stap je fit » Informations, compétences et coaching en matière de santé mentale : • coaching en ligne sur mesure via le « Gelukscoach » sur www.plukjegeluk.be •autogestion avec des exercices via le « Pluk je gelukdoeboek » • newsletter électronique mensuelle « Pluk je geluk » • publications telles que « Depressieve gevoelens », « Stress de baas » • sessions d’information régionales, workshops et cours Informations et compétences en matière de grossesse et de santé des enfants • informations et newsletter électronique mensuelle via www. skoebidoe.be •publications telle que « Borstvoeding. De beste start », «Hoofdluizen. Vervelende kriebelbeestjes », « Lekker en gezond eten met kinderen » et «Laat je tanden zien ». • sessions d’information régionales et workshops Projets scolaires et projets destinés à améliorer les compétences de santé chez les enfants •Aan tafel! Concernant l’alimentation saine et l’activité physique de la 1re à la 4e année primaire.8 • Ben de Bever. Concernant l’hygiène dentaire pour la 3e année primaire.9 •De Gelukzoekers. Concernant la santé mentale pour le 2e degré de l’enseignement secondaire.10 • Vlieg erin ! Concernant la santé mentale pour le 3e degré de l’enseignement primaire.11 3 http://www.cm.be/gezond-leven/ 4 http://www.cm.be/ziekte-en-behandeling/klachten-en-ziekten/index.jsp 5 http://issuu.com/cm-ledenbladen 6 http://www.cm.be/diensten-en-voordelen/advies-en-informatie/publicaties/folders-brochures.jsp 7 http://www.cm.be/applicatie/agenda.jsp 8 http://www.cm.be/b2b/scholen/basisonderwijs/aan-tafel/index.jsp 9 http://www.cm.be/b2b/scholen/basisonderwijs/ben-de-bever/index.jsp 10 http://www.cm.be/b2b/scholen/secundair-onderwijs/de-gelukzoekers/index.jsp 11 http://www.cm.be/b2b/scholen/basisonderwijs/vlieg-erin/index.jsp MC-Informations 258 • décembre 2014 53 4.2. Du côté francophone • Le site web mc.be regorge d’informations relatives à la santé, tant dans les rubriques « Maladies et traitements » (http://www.mc.be/maladies-traitements/), que dans celle « Votre santé » (http://www.mc.be/votre-sante/), consacrée à la prévention. Ces informations sont validées par des experts et régulièrement actualisées. • Toutes les deux semaines, le journal En Marche fait le point sur des thématiques santé et fournit une information complète, critique et neutre sur les sujets abordés. http:// www.enmarche.be/. • Dans les centres mutualistes de santé (CMS), des sessions d’information/formation sont régulièrement organisées sur des thème de santé (diabète, santé mentale…). • Au sein des agences de la MC, des brochures couvrant une large variété de thèmes santé (alimentation, activité physique, stress, allergies…) sont disponibles. • Enfin, Infor Santé, le service de promotion de la santé de la MC (www.mc.be/inforsante) met à disposition du public différentes publications et informations. Le service est également à disposition de tous les professionnels de l’éducation et de la promotion de la santé. Il met à leur disposition des outils d’animation spécifique, de la documentation et édite à leur attention le mensuel Education Santé (http://www.educationsante.be). Enfin, il organise régulièrement des campagnes de sensibilisation du grand public. La dernière en date s’intéressait à la santé dentaire des enfants. La prochaine se penchera sur les défis de la santé mentale. 5.Conclusions Le niveau de health literacy des Belges a été étudié pour la première fois. Ce bilan a été obtenu par une enquête réalisée auprès de quelque 10.000 membres des MC. Les résultats ont montré que six Belges sur dix disposaient d’un niveau de compétences suffisant en matière de santé, mais que pour trois Belges sur dix, la health literacy était limitée, voire même insuffisante pour un Belge sur dix. Au total, quatre Belges sur dix en savent trop peu en matière de santé pour mener une vie saine. Avec ces proportions, la Belgique affiche un score comparable à celui de la plupart des autres pays européens. Le niveau d’éducation influence considérablement les compétences en santé : plus le niveau d’études est élevé, meilleur sera le niveau de literacy. Parmi les personnes diplômées de l’enseignement primaire, 46 % disposent de compétences suffisantes en matière de santé. Ce pourcentage 54 passe à 75 % chez les personnes qui ont suivi une formation post-universitaire. Le sexe, l’âge et la région jouent également un rôle. Le niveau d’études influence non seulement les compétences en matière de santé, mais également la plupart des comportements liés à la santé, comme l’alimentation saine, le tabagisme et l’activité physique. Les résultats de l’étude montrent que les compétences en matière de santé ont un effet médiateur entre la formation et le comportement de santé pour un certain nombre de comportements, notamment l’alimentation, l’activité physique et la consommation de médicaments non-remboursés. Elles peuvent donc atténuer l’effet négatif du niveau de scolarisation sur le comportement de santé. Ces résultats confirment l’utilité d’informations claires et de l’éducation en matière de santé. Les MC s’investissent depuis de nombreuses années dans des initiatives relatives à la promotion de la santé, l’autogestion et le coaching et poursuivront ces efforts. La mutualité a pour mission importante d’améliorer les connaissances de ses membres en matière de santé et de les inciter à adopter un mode de vie sain. Toutefois, les résultats de l’étude montrent également qu’il y a encore moyen d’améliorer et d’innover. Il reste encore un groupe considérable de personnes dont les compétences en matière de santé peuvent être améliorées. Il reste du pain sur la planche. Bibliografie SØRENSEN K., VAN DEN BROUCKE S., FULLAM J., DOYLE G., PELIKAN J., SLONSKA Z., BRAND H., FOR (HLS-EU) CONSORTIUM HEALTH LITERACY PROJECT EUROPEAN. Health literacy and public health: A systematic review and integration of definitions and models. BMC Public Health 2012; 12:80. COMMISSION ON SOCIAL DETERMINANTS OF HEALTH. Closing the gap in one generation: health equity through action on the social determinants of health. Final report of the Commission on Social Determinants of Health. Genève: World Health Organization, 2008. SUN X., SHI Y., ZENG Q., WANG Y., DU W., WEI N., XIE R., CHUN CHANG C. Determinants of health literacy and health behavior regarding infectious respiratory diseases: a pathway model. BMC Public Health 2013; 13:261. MITIC W., ROOTMAN I. Une approche intersectorielle pour améliorer la littératie en santé des canadiens et canadiennes. Public Health Association of BC, 2012. CONSEIL CANADIEN SUR L’APPRENTISSAGE. Littératie en santé au Canada : Résultats initiaux de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes. Ottawa : Conseil Canadien sur l’apprentissage, 2007. MC-Informations 258 • décembre 2014 BERKMAN N.D., SHERIDAN S.L., DONAHUE K.E., HALPERN D.J., CROTTY K. Low Health Literacy and Health Outcomes: An Updated Systematic Review. Annals of Internal Medicine 2011; 155:97-107. LEE S.-Y. D., TSAI T.-I, TSAI Y.-W., KUO K. N. Health literacy, health status, and healthcare utilization of Taiwanese adults: results from a national survey. BMC Public Health 2010; 10:614. SØRENSEN K, PELIKAN JM, RÖTHLIN F, GANAHL K, SLONSKA Z, DOYLE G, FULLAM J, KONDILIS B, AGRAFIOTIS D, UITERS E, FALCON M, MENSING M, TCHAMOV K, VAN DEN BROUCKE S, BRAND H. Health literacy in Europe: comparative results of the European health literacy survey (HLS-EU). Eur J Public Health. in press. MC-Informations 258 • décembre 2014 55 Table des matières MC-Informations Éditorial2 eHealth en Belgique 3 La PAQS, un nouvel acteur11 La Plateforme d’Amélioration continue de la Qualité des soins et de la Sécurité du patient : les fondations sont posées. paraît quatre fois par an (mars, juin, septembre, décembre) en français et en néerlandais, et est consultable gratuitement sur : http://www.mc.be/MCInformations. A cette adresse, vous pouvez vous inscrire sur un « mail-alert » et serez ainsi averti lors de la parution d’un nouveau numéro. Vieillissement et soins aux personnes âgées17 État des lieux – 1re partie Les compétences émotionnelles, un facteur à prendre en compte 34 Une étude conjointe des MC, de l’UCL et de la KUL Bilan des connaissances des Belges en matière de santé48 Colophon Editeur responsable Marc Justaert, Dorpstraat 403, 3061 Leefdaal Rédacteur en chef Michiel Callens Secrétariat de rédaction Valérie Guillaume et Pauline van Cutsem Traduction Service traduction ANMC Layout Service comma ANMC Impression Claes-printing (imprimé sur papier recyclé) Adresse de retour Gerda Van Hecke, ANMC – Logistique/WP, chaussée de Haecht 579, BP 40, 1031 Brussel, [email protected], 02 246 41 08