TOURCOING

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LA VOIX DU NORD
LUNDI 9 SEPTEMBRE 2013
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AUJOURD’HUI
Hommage ៑ Il y a 35 ans jour
pour jour, Jacques Brel disparaissait. Une exposition lui est
consacrée à l’espace culturel
de Bondues, grâce à un collectionneur privé. ■
BONJOUR ៑ Pensions recherchées
Le temps où les structures d’accueil pour personnes âgées dépendantes ressemblaient plus à
des mouroirs qu’à des résidences
est bien révolu, fort heureusement.
Pourtant, il reste souvent difficile
de se résigner à confier un de ses
parents à des soignants surtout
qu’avec l’allongement de l’espérance de vie, il devient indispensable de le faire. Phénomène nouveau, lié à la crise, il n’est pas rare
PENSEZ-Y !
que des enfants décident de venir
rechercher leur aîné pour qu’il
vive avec eux à la maison et bénéficient de la pension de la personne âgée.
Un peu inquiétant…■ CH.V.
Patrimoine ៑ Les journées du
Patrimoine auront lieu ce
week-end. Retrouver le programme des visites à faire
près de chez vous, dans notre
édition de demain. ■
ON EN PARLE
À Mahaut de Guisnes la dépendance
n’est pas synonyme d’exclusion
C’est une rencontre avec des
résidants et des personnels de
la maison d’accueil Mahaut de
Guisnes gérée par les CH Dron
qui nous a permis de nous
rendre compte de l’étendue du
travail mené auprès des personnes âgées dépendantes et
de l’utilité d’un PASA, pôle
d’activité et de soins adaptés.
PAR CHRISTIAN VINCENT
[email protected]
PHOTO LA VOIX
« La résidence, c’est d’abord un lieu
de vie et après un lieu de soins. » Le
docteur Karim Gallouj, qui dirige
le service de gériatrie du CH
Dron, aimerait pouvoir développer les activités à destination des
personnes âgées dépendantes à
leur domicile. Dans les différentes
structures médicalisées, interviennent aussi des art-thérapeutes, des musiciens. Le but est
d’utiliser des stratégies de stimulation comme chez les enfants
mais ne jamais infantiliser les
personnes âgées, leur proposer
des activités sensorielles, artistiques, de jardinage, de cuisine.
« La cuisine, c’est comme quand on
était enfant, l’odeur rappelle la tarte
d’une grand-mère, ça fait saliver. La
musique aussi peut éveiller des souvenirs douloureux mais aussi
joyeux. (…) Le fondement de notre
travail est dans cette idée-là » « Aujourd’hui, on vient en gériatrie par
choix. À une époque, c’était pris
comme une punition. » À Mahaut
de Guisnes existe un PASA, un
lieu de vie sécurisé installé au
cœur de la résidence pour une
douzaine de résidants qui
viennent participer à de nombreuses activités. On est très loin
de l’époque de l’hospice (devenue
maison folie !) où les résidants
participaient aux ateliers cuisine
et recevaient en échange un petit
pécule ! « On les appelait les utilisés », terme affreux, se souvient
une cadre du CH Dron. Il aura fallu une loi pour l’interdire !
Tout ce qui est mis en place n’a
qu’un but : les stimuler et les aider à vivre le plus normalement
possible. Il est vrai que le public
accueilli à Mahaut de Guisnes est
celui qui présente les profils les
plus lourds. La pratique de l’artthérapie permet d’avoir une ap1222.
La résidence est d’abord un lieu de vie avant d’être un lieu de soins.
proche non médicamenteuse des
soins.
Beaucoup d’émotion
Au PASA, tous les résidents
connaissent Catherine. Rien qu’à
voir leurs yeux briller à l’évocation de ce prénom, on comprend
tout de suite que l’animatrice a
pris une part importante dans
leur vie. Activités de gymnastique, jeux de balles, travail sur la
motricité, etc. Elle anime les ateliers culinaires. Va faire les
courses avec les résidants. « Ils
parlent de la qualité des légumes, des
prix qu’ils aiment comparer. Cela
permet de continuer à faire ce qu‘ils
faisaient avant. Et tout le monde
s’amuse. Quand on prépare une salade de fruits, beaucoup sont mangés
avant… » Et les éclats de rires sont
nombreux… Catherine se souvient d’une résidente d’origine
italienne qui ne démordait pas
sur sa recette de pizza contre celle
d’une autre résidente. « Ça crée
une émulation, une mise en
confiance et une valorisation. »
Mais le PASA c’est aussi l’organisation de sorties, de vacances.
« Une dame de 87 ans n’avait jamais
vu la mer. On a organisé une visite
au Crotoy. (…) Un résidant est aussi allé voir le concert de Johnny Hal-
« La cuisine, c’est comme
quand on était enfant,
l’odeur rappelle la tarte
d’une grand-mère. »
lyday en compagnie de soignants ! »
Catherine aime les choses simples
du quotidien. Les résidants participent aussi à l’élaboration des
menus. « Manger un œuf à la
coque, vous n’imaginez pas quel plaisir ils avaient. ! »
Bien sûr, il y a aussi des ateliers
mémoire, des chansons à réapprendre, Dalida est encore à la
mode au PASA. « C’est un boulot
qui se fait dans l’émotion. il est parfois difficile de prendre du recul. » Et
l’animatrice d’évoquer une dame
qui, voyant le piano, a pleuré
beaucoup en se souvenant que
son mari l’avait vendu. « Ça pleure
aussi beaucoup… (…) On est souvent dans l’émotionnel. Il y a beaucoup de partage et nous, les soignants, on reçoit beaucoup. »
Deux art-thérapeutes, formées en
fac de médecine avec des pré-requis de pratique artistique, interviennent au PASA et aux Maisonnées (la structure de 120 lits Alzheimer) : Marylène Morel et
Océane Rodriguez. Ce ne sont pas
des ateliers de groupe pour Maryline Morel qui intervient par la
musique. « Ça diminue l’anxiété et
améliore l’humeur. » Océane travaille sur des jeux instrumentaux
en petits groupes. Il y a aussi des
plasticiens, un travail sur les collages, l’argile, la calligraphie.
Il y a aussi la prise de photographies lors des visites, des animations. « On fait plein de photos pour
les familles, ça leur permet de voir ce
qui se fait au quotidien. Ça les aide
aussi à déculpabiliser. » À terme, il
sera aussi possible d’imaginer des
liaisons vidéo type Skype dans les
chambres des résidents. « Un bon
moyen de communiquer avec la pe-
tite fille partie vivre dans le sudouest ou dans les îles. » Toutes ces
animations donnent envie de
vivre et l’art-thérapie donne envie d’avoir envie…
Le PASA est aussi équipé d’une
salle snoezelen avec lumières
d’ambiance, sons, matières, le
tout pour stimuler les sens. « Plus
on apporte une petite lumière dans
leurs yeux, moins la maladie s’installe », insiste Catherine.
Dans la salle du PASA, c’est
l’heure de déguster les gâteaux
préparés un peu plus tôt. « Ici on
est bien. On fait un peu de tout. » Et
dans un grand éclat de rire communicatif : « on fait travailler le cerveau ! » « C’est très gentil d’être venus, je vais vous chanter une chanson. » Et nous voici partis en musique sur J’attendrai chanté
parfaitement juste. L’atmosphère
est pacifiante avec diffusion
d’huiles essentielles. Sur les 120
résidents de Mahaut de Guisnes,
35 viennent chaque semaine au
PASA.
Une belle respiration qui leur rappelle que la vie peut être belle. ■