promesse de bail

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promesse de bail
LE POINT SUR …
LES PROMESSES DE BAIL, ENGAGEMENTS DE LOCATION OU
CONTRATS DE RESERVATION, SONT ILS ENCORE LICITES
APRES LA LOI INSTITUANT LE DROIT AU LOGEMENT OPPOSABLE ?
Avril 2007
I - LA LOI INSTITUANT LE DROIT AU
LOGEMENT OPPOSABLE (DALO) DU 5
MARS 2007 (JO du 6 MARS 2007)
Adoptée le 22 février 2007
d’urgence, la loi instituant le
opposable, d’ores et déjà
contient diverses mesures
cohésion sociale.
après déclaration
droit au logement
baptisée DALO,
en faveur de la
En dehors du DALO, qui constitue la pièce
maîtresse de la loi, le texte comporte plusieurs
mesures concernant les rapports locatifs et
notamment les pièces justificatives qui ne
peuvent être demandées au locataire pour
1
l’accès au logement.
La loi de modernisation sociale du 17 janvier
2002 avait déjà apporté des limites quant aux
pièces qui pouvaient être réclamées au
candidat locataire. (art. 22-2 loi du 6/07/89).
La loi DALO est venue allonger cette liste et
prévoit notamment dans son article 35 :
L’impossibilité de demander au locataire un
chèque de réservation du logement.
Cette loi semble mettre un terme sur les
interrogations concernant la possibilité de
demander une somme à titre d’acompte ou
une indemnité de réservation au candidat
locataire.
Il demeure toutefois des interrogations non
résolues compte tenu du champ d’application
restreint de cette nouvelle prohibition :
-
-
Qu’en est-il si le locataire est amené à
régler l’indemnité par carte bancaire
ou en liquide, dans la mesure où la loi
ne fait référence qu’au seul chèque ?
Qu’en est-il pour les locations
meublées, dans la mesure où cette loi
ne vise que les locations vides ?
-
Qu’en est-il pour les sommes qui ont
déjà été versées par les locataires et
qui souhaitent les récupérer ?
Pour répondre à ces interrogations, il apparaît
indispensable de déterminer quelle est la
nature de l’engagement du locataire et celle de
l’indemnité qu’il a versée au propriétaire.
II - LA PROMESSE DE BAIL RESTE LICITE
Comme la vente, le bail peut-être précédé de
contrats préparatoires.
Il convient toutefois de préciser, tout d’abord,
que le contrat se distingue profondément du
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projet de contrat qui n’engage pas les parties.
Le local d’habitation peut donc faire l’objet
d’une promesse, soit de prendre en location,
soit de donner en location, qui peut être, soit
unilatérale soit synallagmatique (qui constate
l’accord des parties sur les éléments essentiels
de l’engagement, notamment sur le montant
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du loyer) ; les effets de la promesse seront
alors différents suivant le cas.
Ce principe n’est pas remis en cause par la loi
du 6 juillet 1989, qui ne réglemente ni n’interdit
cette pratique.
Cependant, désormais, lors de la conclusion
de cette promesse, le bailleur ou son
représentant ne peut plus exiger la remise d’un
chèque, du moins s’il s’agit d’un logement
soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet
1989 (locations vides).
Cette légalité de principe ne doit pas pour
autant, faire oublier les conditions de validité
nécessaire à ce type de contrat.
Pour être valable, la promesse de bail doit en
effet contenir les éléments essentiels du
2
1
DALO article 35 ajouté par l’AN en
6/07/89 :art.22-2)
1re
lecture (loi du
Cass.com 30/11/1971 D.1972,209
Cass.3éme civ30/06/1999,n°97-20.402, SCI Silbeau/Sté
DIHP.
3
Adil de l’Hérault 4 Bis Rue Rondelet 34000 Montpellier - 04.67.555.555 - www.adil34.org
contrat : le consentement des parties, la
détermination de la chose louée, le prix du
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loyer, la durée du bail .
A/ LA NATURE DES ENGAGEMENTS
Les juristes de l'Adil sont fréquemment
confrontés à des difficultés d'interprétation
quant aux documents qui sont utilisés par les
agences immobilières ou les propriétaires euxmêmes, concernant ces réservations, et quant
à la nature contractuelle de l'indemnité
d'immobilisation versée par le locataire.
Chaque situation est un cas particulier, et
nécessite
une
analyse
précise
des
engagements et de la volonté réelle des
parties.
Il appartient au juge seul, dans le cadre de son
pouvoir d'appréciation, de définir la nature de
l'engagement entre les parties ainsi que la
qualification de la somme versée par le
locataire.
Exemple Ces documents sont intitulés: fiche
de réservation, contrat de réservation,
réservation…
Exemple L'indemnité versée par le locataire
est intitulée : frais d'agence ou acompte…
Ainsi, la force obligatoire des engagements
souscrits par les parties dépend de leur nature.
Il en existe de trois sortes :
1/ Les pourparlers
Ce sont des discussions antérieures à tout
accord contractuel même partiel ou de
principe. Les parties ne sont pas engagées.
Il importe peu, en principe, qu’un projet de
contrat ait été établi : on est toujours dans la
période des pourparlers dès lors que le projet
n’a pas ou pas encore recueilli l’accord de
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toutes les parties .
2/ La promesse unilatérale
La promesse unilatérale est un avant contrat
qui ne contient qu’un seul des deux
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consentements .
La promesse unilatérale suppose que soient
déterminés les éléments objectifs essentiels,
qui sont aussi ceux du contrat définitif (identité
des parties, durée, prix, consentement …).
Dans le cadre de ce contrat unilatéral, le
promettant s’engage à donner ou prendre à
bail un bien, tandis que le bénéficiaire
conserve la liberté de lever ou non l’option
consentie dans un délai déterminé.
La détermination du délai permet de limiter la
promesse qui devient caduque à l’expiration de
celui-ci.
En principe, la promesse unilatérale ne crée
pas d’obligation à la charge du bénéficiaire,
mais peut comporter le versement d’une
indemnité d’immobilisation par ce dernier, au
profit du propriétaire qui perd la liberté de louer
l’immeuble à un tiers pendant la durée de
l’offre.
Cette indemnité n’a pas le caractère d’une
clause pénale, mais constitue la contrepartie
de l’indisponibilité temporaire du bien entre les
mains du propriétaire.
Toutefois,
en
pratique,
les
agences
immobilières ou les propriétaires eux mêmes
ne s’engagent pas, dans leurs documents, à
ne pas louer le bien à un autre candidat ni
même à donner leur réponse dans un délai
déterminé.
Parfois même, l’agence ou le propriétaire ne
sont même pas identifiés sur le document ou
alors leurs signatures n’apparaissent pas.
Dans ce contexte, il est donc très difficile de
faire la différence entre le simple projet et la
véritable promesse engageant les parties.
3/ La promesse synallagmatique
Ces pourparlers peuvent se concrétiser ou
pas, par une offre, laquelle peut être en
principe retirée, tant qu’elle n’a pas été
acceptée par l’autre partie.
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Cass.3e civ.27/06/1973 :Bull.civ.III,n°446
Cass.com,30/11/1971:D.1972p.209
Elle est constituée de l’engagement fait par
une partie à l’autre qui l’accepte de lui donner
à bail, tel bien à compter de telle date et
moyennant tel prix.
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J..Carbonnier,op.cit.p.77
Adil de l’Hérault 4 Bis Rue Rondelet 34000 Montpellier - 04.67.555.555 - www.adil34.org
En raison de l’acceptation, elle engage les
deux parties et crée des obligations
réciproques.
Dans ce cas, le document précontractuel
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prend la forme d’un véritable contrat par
lequel le preneur s’engage à prendre à bail et
le bailleur s’oblige à louer.
Cette promesse vaut bail, dès lors que les
éléments nécessaires, notamment la durée du
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contrat et le prix de location sont déterminées .
a°) La nature des engagements
La justification de la non restitution de
l’indemnité
On trouve fréquemment dans les avants
contrats des stipulations du propriétaire qui ne
pourra refuser la candidature de l’éventuel
preneur que pendant un certain délai et ne
restituera pas l’indemnité d’immobilisation si :
-
B/ LES CONSEQUENCES FINANCIERES
1/ Dans le cas des pourparlers
La rupture des pourparlers peut en principe
intervenir à tout moment, sur décision
unilatérale d’une partie.
Dans ce cas, lorsque le document
précontractuel constitue une simple offre de
prendre à bail sans acceptation de la part du
propriétaire, le réservataire peut se dégager
sans indemnité.
Peu importe qu’un chèque dit « de
réservation » ait
accompagné
cette
sollicitation, celui-ci doit être restitué. La
situation est celle d’une simple rupture de
pourparlers et non d’un contrat.
Cette liberté imposée par l’autonomie de la
volonté, ne doit pas cependant autoriser la
légèreté ou la mauvaise foi.
Il est, en effet, admis que l’auteur de la rupture
engage sa responsabilité civile, s’il abuse de
cette faculté. L’abus de droit de rompre est
donc sanctionné par une responsabilité de
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nature délictuelle , appréciée par le juge,
aucun contrat n’ayant été conclu entre les
parties.
2/ Dans le cas des promesses de bail
Il est nécessaire d'analyser au cas par cas, la
nature des engagements pris par les parties et
la nature de l'indemnité d'immobilisation
versée par le locataire, pour se prononcer.
-
Les pièces demandées ne sont
pas fournies dans un certain délai
par le seul fait du candidat,
Les renseignements fournis par le
locataire sont faux,
Le locataire refuse de signer le bail
ou de prendre les locaux sans
aucun motif,
Le locataire ou la caution se
désiste sans aucun motif.
La réciprocité des obligations entraîne les
parties au-delà du domaine des simples
pourparlers pour les faire entrer pleinement
dans le champ contractuel.
En conséquence, lorsque le précontrat de
location s’analyse en un contrat qui engage
réciproquement les
deux
parties, les
conventions stipulées doivent être exécutées.
Le bailleur doit la jouissance du logement et de
son coté, le preneur perd l’indemnité stipulée
s’il refuse de signer le bail.
C’est ce que confirme un arrêt de la Cour
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de Cassation :
Le propriétaire d’un appartement s’était
engagé à louer moyennant le versement par le
locataire de la somme de 1296€ et son
engagement de fournir des justificatifs
garantissant la solvabilité.
Le preneur avait ensuite refusé sans motif, de
signer le bail, puis assigné le bailleur en
remboursement de la somme de 1296 €.
Le premier juge avait fait droit à la demande du
locataire, mais la décision a été censurée par
la cour de cassation.
L’engagement de réservation, tel qu’il était
rédigé en l’espèce, présentait une nature
contractuelle synallagmatique et relevait de
l’application de l’article 1134 du code civil,
selon lequel les conventions légalement
Cass. 3me civ.20/05/1992 :juris-data n°1992-001825
Cass.3e civ.29/10/1970 :JCP G 1970 IV,297.
9 Cass.1re civ.20/06/1961:D.1962,jurisp.p.3
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Cass.civ.3e 28/10/2003 n°1092 F-D
Adil de l’Hérault 4 Bis Rue Rondelet 34000 Montpellier - 04.67.555.555 - www.adil34.org
formées tiennent de loi à ceux qui les ont
faites.
En conséquence, lorsque la réciprocité des
obligations est établie, il s’agit d’une promesse
de bail qui s’analyse en un contrat et engage
les signataires.
L’absence de justification
restitution de l’indemnité
de
la
non
Le
propriétaire,
ne
pourra
conserver
l’indemnité d’immobilisation versée par le
locataire dans le cas suivant :
-
Le propriétaire ne peut conserver
les sommes versées par le
candidat dès lors qu’il décide de
ne pas donner suite à son
engagement de louer au motif que
les garanties présentées sont
insuffisantes.
En effet, cette clause serait illicite, car la
décision de donner suite à la candidature est
soumise au seul bon vouloir du propriétaire. Il
existe ici un déséquilibre manifeste entre les
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obligations réciproques. Or, les obligations
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des parties doivent être équilibrées.
–
–
somme versée sera restitué au
locataire. Le locataire, quant à lui, peut
se désister, mais au risque de perdre
les arrhes qu’il a versées.
Il peut s'agir d'une clause pénale dont
le montant pourra être modifié par le
juge.
Cette somme peut être qualifiée
d'acompte sur le prix. Dans ce cas,
cela suppose qu'il y ait un début
d'exécution du contrat de location,
donc promesse synallagmatique.
La distinction entre dédit, arrhes, clause
pénale, acompte est, en pratique, délicate :
seul le juge, quels que soient les termes
employés, peut rechercher la volonté des
parties pour qualifier les sommes versées et
définir les obligations qui en découlent en cas
de non respect de la promesse.
REMARQUE
Il n’y a pas de droit à la rémunération de
l’agent immobilier, avant la conclusion de
bail.
En pratique, jusqu’a l’entrée en vigueur de la
loi DALO, il est fréquemment stipulé dans une
promesse de bail, le versement d’une somme
par le locataire.
En effet, la loi n° 70-9 du 2/01/70, considère
dans son article 6, alinéa 6, qu’aucun bien,
effet, valeur, somme d'argent, représentatif de
commissions, de frais de recherche, de
démarche, de publicité ou d'entremise n’est du
à l’agent immobilier, avant que l’opération
qui lui a été confiée ait été effectivement
conclue. Cette disposition est pénalement
sanctionnée, par les termes de l’article 16 de
ladite loi.
La qualification juridique de celle-ci est
essentielle. Mais très souvent, dans les
documents utilisés par les agences ou les
propriétaires, aucune définition juridique n'est
précisée.
Cette rigueur exclut que l’intermédiaire
professionnel
se
fasse
remettre
personnellement un versement en vue de
préserver sa rémunération dans le cas où le
preneur renonce à louer.
Il appartient donc aux juristes et à défaut
d’accord au juge, d’analyser au cas par cas les
éléments permettant de définir la qualification.
Pourtant, il est de pratique habituelle que
l’agent immobilier fasse souscrire un document
préalable à la location (contrat de réservation),
selon lequel le preneur demande à louer le
logement ou obtienne même que le bailleur le
lui réserve et verse une somme d’argent en
garantie de son engagement. En outre, depuis
l’entrée en vigueur de la loi DALO (5/03/07), il
ne peut plus exiger la remise d’un chèque.
b°) La qualification de la somme versée par
le locataire
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–
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Il peut s'agir d'un dédit qui est dans ce
cas, une indemnité versée en
contrepartie d'un droit de rétractation
(la faculté de dédit doit être cantonnée
dans un certain délai)
Cela peut-être des arrhes ; dans ce
cas si le propriétaire n'accepte pas
l'offre qui lui est faite, le double de la
CA de Grenoble 2e ch.civ. 19/10/2004
Article 1 loi du 6/07/1989
Cette pratique est illégale, dès lors que l’agent
immobilier décide de conserver l'indemnité
d’immobilisation à son profit, alors que le
contrat de bail n'est pas signé.
Réponse donnée sous réserve de
l’appréciation souveraine des tribunaux
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