"Guy Brunet se fait son cinéma", 24Heures, 3 juin 2015
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"Guy Brunet se fait son cinéma", 24Heures, 3 juin 2015
Mercredi 3 juin 2015 | 24 heures 24 heures | Mercredi 3 juin 2015 Culture&Société Culture Société Gastro Ciné Conso Sortir Les gens Madeleines trempées de pop heureuse, les Innocents reviennent les mains pleines Exposition Autodidacte Guy Brunet a réalisé ce décor pour la façade de sa maison à Viviez dans l’Aveyron, maison qui abrite ses activités de réalisateur. PATRICK MARTIN Mais encore… 800 Disque C’est – environ – le nombre de figurines à l’effigie des stars du cinéma réalisées par Guy Brunet depuis 1994: ce sont ses acteurs et presque tous mesurent 1,38 mètre, la taille idéale pour ses films. L’exposition lausannoise en présente 150, des doubles que le créateur a réalisés pour les musées qui les lui demandent. Il conserve les silhouettes en carton originales chez lui afin de continuer son œuvre de réalisateur. Les prochaines? Guy Brunet les a déjà en tête: ce sera Emile Couzinet, producteur et réalisateur girondin, et Marcel Pagnol. «Mon petit monde à moi, eh bien! c’est toute ma famille, j’ai grandi avec eux sans qu’ils s’en rendent compte eux-mêmes. Ils m’ont suivi dans l’ombre de ma personne et je les ai fait renaître à ma façon» En dates Guy Brunet se fait son cinéma Exposé pour la première fois à l’Art brut à Lausanne, le créateur écrit, réalise et anime ses propres films qui finissent toujours bien U ne dévotion sans limites, une immersion passionnée dans le monde du cinéma: la trajectoire de Guy Brunet ressemble à celle de Totò dans Cinema Paradiso sauf qu’elle n’a rien d’une fiction… Le souvenir de l’odeur de la pellicule comme du ronronnement des machines dans la cabine du projectionniste est toujours vif chez le créateur invité à la Collection de l’art brut. Et l’émotion à fleur de peau. Le cinéma qu’il habite en docte connaisseur, ce monde qui obnubile ses pensées et prolonge ses rêves, Guy Brunet l’a découvert dans l’ombre de son père, projectionniste et propriétaire d’une salle obscure dans l’Aveyron. «Le week-end, il y avait jusqu’à trois séances pour un même film, se souvient-il. A la première, je me laissais porter par l’intrigue, à la deuxième je regardais le jeu des vedettes et après, le travail du réalisateur.» Avant de se faire son cinéma exclusivement à partir de matériaux recyclés, en créant les affiches, en dirigeant le casting puisé dans un réservoir de 800 silhouettes de carton à l’effi- gie de ses vedettes préférées, en réalisant les décors et en signant la mise en scène, Guy Brunet s’est donc fait sa propre école du cinéma. «J’avais 7 ans quand je me suis dit: pourquoi tu ne ferais pas réalisateur? Ça ne s’est jamais fait, je ne sais pas, glisse-t-il, est-ce que je suis né sous une mauvaise étoile?» Ça ne s’est jamais fait… c’est lui qui le dit: à 70 ans, sa filmographie compte 14 longs-métrages – «les deux suivants sont en préparation» – et, dans la boîte à idées qu’il alimente depuis ses 16 ans, il y aurait plus de 350 scénarios. Tous finissent bien! «Petit, j’imaginais déjà changer la fin des films trop tristes. Le cinéma, c’est comme une fusée, on monte dedans et on regarde la Terre d’en haut.» Cette nécessaire distance avec un monde extérieur manquant de gaieté, Guy Brunet la cultive chez lui, au siège de sa maison de production Paravision (contraction de paradis et vision). Stakhanoviste la journée, il élabore silhouettes de carton, décors et affiches. Le soir, il tourne sévère avec lui-même et ne s’autorise que quatre heures de sommeil par nuit. Fasciné par le septième art, le créateur-réalisateur ne lui pardonne pas tout pour autant: il ne jure que par l’âge d’or hollywoodien qu’il Caramba, ce soir Caribana sort le bazooka impie Festival Le rendez-vous de Cransprès-Céligny a pioché la carte Marilyn Manson pour démarrer sa 25e édition. Bien vu: soirée complète C’est connu, le public aime les méchants autant que les gentils. La preuve? Caribana débute aujourd’hui sur deux soirées complètes: celle offerte, dans quelques heures, au très méchant Marilyn Manson et celle dédiée dimanche en clôture au très gentil Mika. On peut en tirer un sujet de réflexion utile pour les longues minutes de bouchon que devrait occasionner, dans la périphérie VC3 Contrôle qualité nyonnaise, la tenue du 25e «petit Paléo» de Crans-près-Céligny. Méchant, Manson? Conscient que l’Amérique puritaine ne demandait qu’à frissonner pour un nouvel Alice Cooper, le natif de Floride a mis le paquet, au mitan des années 1990, pour s’imposer en «Antichrist Superstar». Les bigots ont tremblé, de l’Arkansas jusqu’à Avenches, où une pétition réclama l’interdiction de son concert, en 2005 dans les arènes romaines. Veni, vidi et presque vici: Manson et son groupe avaient démontré que le soufre de leur réputation était plus nocif que leur prestation moyenne. Qu’importe: le supervilain est toujours là, avec un bon disque sorti en début d’année. Résultat: soirée complète. Le cas Mika se présente différemment: dimanche, Caribana teste un menu musical solide pour rehausser ses traditionnels après-midi familiaux. Le gai chanteur, qui aime monter sur scène avec des peluches géantes et des ballons multicolores, paraît le parrain idéal pour animer une fin de week-end a priori ensoleillée. D’ici là, le festival reçoit notamment Metronomy et Bastille (jeudi), Ben l’Oncle Soul et Gentleman (vendredi), Selah Sue et The Cardigans (samedi). Toutes les nuances de la pop, et une roborative mise en bouche pour entamer le marathon des festivités estivales. F.B. Crans-près-Celigny Jusqu’à dimanche 6 juin Prélocations sur le site: www.caribana.ch réinvente à l’infini, mais tourne le dos au cinéma contemporain: «Il y a trop de sang qui coule, trop de réalité, ils ont démoli le cinéma de mon enfance.» Sans étiquette Ce cinéma de lumière, de toutes les lumières, Guy Brunet l’a infiltré en passionné compulsif. Passé des pages coloriées sur ses cahiers d’écolier aux formats mondiaux auxquels il offre une deuxième vie d’affiche cinématographique, des objets décorés aux boîtes de carton transformées en théâtre d’images, le créateur s’est affirmé dans son rôle. De plus en plus Repéré pour vous Une Kolly d’Alba «fin de siècle» sophistiqué. De plus en plus impliqué. Mais, par-dessus tout, il est de la race des réalisateurs qui aiment les acteurs, qui cherchent et savent capter la vie dans le regard. De ceux qui aiment les gens. Sans étiquette – art brut, modeste ou singulier – mais portée par une joie continue «d’offrir du rêve aux personnes, moi je ne peux pas être heureux dans ma vie», sa déclaration d’amour saute aux yeux tout au long de l’accrochage à la Collection de l’art brut. «Il y a là un grand théâtre d’ombres, reconnaît le commissaire Charles Soubevan. Généreux, bon, Guy Brunet n’est pas que cinéaste, il veut apporter du bonheur aux autres.» Ce bonheur au goût de fête permanente, ce bonheur au goût de l’enfance, que, solitaire, il rejoue en mettant en images un monde meilleur. Lausanne, Collection de l’art brut Du ve 5 juin au di 4 oct. Ma-di (11 h-18 h) Rens.: 021 315 25 70 www.artbrut.ch Découvrez notre galerie photos et la vidéo sur brunet.24heures.ch Concerts La violoniste Rachel Kolly d’Alba et le pianiste Christian Chamorel jouent en duo depuis leur enfance, mais ils n’avaient jusqu’ici jamais passé par l’étape du disque. L’album Fin de siècle (Aparté) réunit le meilleur des deux artistes vaudois. Leur interprétation de la Sonate de César Franck s’impose crânement comme une des plus solides et matures entendues au disque récemment. La violoniste y déploie un chant d’une intensité folle, d’une plasticité infinie, idéa- lement soutenu par le clavier charpenté du pianiste. Accompagné par le Spektral Quartet de Chicago, le duo tient la barre du Concert d’Ernest Chausson, entre extases et tourments. Ils jouent Richard Strauss, Schubert et Ysaÿe en récital vendredi aux Concerts de Montbenon. Matthieu Chenal Lausanne, salle Paderewski Ve 5 juin (20 h) Loc.: 021 647 92 81 www.pharts.ch Au béret rouge qui lui couvrait le chef dans ses clips, JP Nataf préfère désormais une épaisse barbe noire. Le visage des Innocents a pris de la bouteille. JeanChristophe Urbain, son alter ego aux commandes de l’atypique vaisseau de pop française, porte lui aussi la tranquille patine des années écoulées. Paisible et apaisé, le duo revient après quinze ans d’absence avec un nouvel album, Mandarine, et une volonté intacte de rappeler ce que furent les Innocents. Et il y a du boulot… Etonnant, en effet, de remonter le fil du temps avec ce nom à la fois familier et peu connu. «Notre histoire, elle raconte aussi un truc sur l’industrie du disque.» De fait, une demi-heure d’entretien sera à peine suffisante pour cerner les hauts et les bas d’une carrière hors normes. Le plus grand des petits groupes de chanson pop «à la française» est une hydre à plusieurs bérets, sans qu’aucun ne prenne le dessus. «On n’a jamais vraiment su quel un paysage musical désolé, fragmenté, aux antipodes de la domination binaire des majors. «Ce qui nous arrive n’est plus courant, reconnaît JP Nataf. Une belle sortie de disque sur un gros label avec des moyens. Les responsables actuels sont ceux qui écoutaient de la musique dans les années 1990: les Innocents c’est un nom qui leur parle. On a un côté madeleine.» Mandarine ou madeleine… Quoi qu’il en soit, la table est mise. François Barras «Notre histoire, elle raconte aussi un truc sur l’industrie du disque» JP Nataf, un Innocent est notre public, résume Jean-Christophe Urbain. C’était souvent déstabilisant. Mais aussi, à chaque fois, cela nous a permis de repartir à zéro sur nos disques, stylistiquement parlant.» Mandarine est le cinquième album d’une discographie entamée en 1987, interrompue en 1999 avec le divorce plein d’acrimonie entre «JP» et «JC». Pas facile de maintenir à flot ce groupe apprécié mais si difficilement classable. Variétés? Les Innocents viennent au monde avec Jodie, un single qui gravit le top 50 naissant. «Mais nous étions tout sauf des minets de hit-parades, se rappelle JP Nataf. Au contraire, j’étais un jeune snob qui lisait le New Musical Express, écoutait les premiers R.E.M. et considérait The Smiths comme trop grand public.» Pour autant, le groupe n’est pas lié à la scène alternative, alors en ébullition sous les Doc Martens de Bérurier Noir et de la Mano Negra. Il joue le jeu des majors du disque, toutes-puissantes en ces années du CD roi. «On a tout bien fait comme dans les clichés du show-business: le tube, puis le gros gadin, l’album qui se plante, sourit JP Nataf. Ce n’est qu’avec Amis de toujours quand ils ne sont pas fâchés, JP Nataf (à g.) et JC Urbain ont animé les Innocents depuis 1987 et cinq albums. SONY MUSIC/LDD L’album Une mandarine sans pépin Rien ne remplace la bouteille. Celle des Innocents fait «pop» quand on la décapsule, façon champagne. Plus d’un quart de siècle d’expérience s’entend sur ce disque des retrouvailles, qui délie sa recette dès Les philharmonies martiennes: voix en harmonies, mélodies sauvages que ne domptent pas des grilles d’accords surprenantes, intrusions de sons inattendus… Le mille-feuilles est gonflé mais jamais indigeste. Love qui peut poursuit cette union heureuse entre la fraîcheur des productions californiennes (on pense à Crosby, Stills & Nash, ou The Mamas & the Papas) et la chanson française à texte. Harry Nilsson raconte joliment une virée parisienne en décembre; Petite voix, offerte à celle, haute, de JC Urbain, flotte au contraire sur une nappe printanière. Le tempo logiquement plus leste de J’ai couru prépare une balade en terres anglaises sur Errtegia, où les harmonies du duo, étonnamment, paraissent moins rondes en bouche lorsque mâchonnées dans la langue de Lennon. Oublier Waterloo rend hommage à la brillance poppy de la britpop eighties, le dada de ces Innocents coupables d’un excellent disque. Arthur Besson remet le masque du rock avec Geri et Freki L’habitué de la ComédieFrançaise se souvient de son groupe Karl Specht et remet les décibels sur scène au 2.21, à Lausanne Armé de sa guitare, de sa clarinette et même de sa voix – «trente ans que je ne chante pas» –, Arthur Besson est de retour en ville. Au 2.21 de Lausanne, plus précisément. «De nombreux fans m’attendent… ironise le musicien. Je n’ai pas eu l’impression que je manquais.» Les plus jeunes ne se souviennent probablement pas de Karl Specht. Le groupe de rock tétanisant l’avait propulsé sur ses VC3 Contrôle qualité JP FONJALLAZ/ATELIER POUSSIÈRE Florence Millioud Henriques 1945 Naît à Viviez, commune d’un bassin minier de l’Aveyron. Ses parents y exploitent un cinéma, le Caméo. 1958 Seconde son père comme projectionniste jusqu’à ce que l’arrivée de la télévision dans tous les foyers solde l’activité familiale. 1973 Entame une série de jobs comme ouvrier dans les usines du bassin minier jusqu’en 1986 où il se retrouve au chômage. 1994 Retourne à Viviez et commence son œuvre cinématographique. 2002 Vernit sa première exposition dans un musée, au Musée international des arts de Sète. Inclassable duo de la chanson française, la paire formée de JP Nataf et Jean-Christophe Urbain s’offre un nouveau plaisir coupable – l’album «Mandarine» –, quinze ans après sa séparation. Rencontre l’arrivée de JC que le groupe a trouvé son identité et connu une décennie harmonieuse.» Deux albums, Fous à lier (1992) et Post Partum (1995), s’écoulent entre 200 000 et 500 000 exemplaires. Le duo écrit et compose toutes les chansons, qu’il chante à tour de rôle. En 1999, c’est le clash. L’amitié vole en éclats, le groupe aussi. Il faudra une dizaine d’années pour que le couple s’apprivoise à nouveau. JP le prolixe et JC le taiseux sont réunis pour un galop dans Arthur Besson au milieu de son gang rock et masqué. DR premiers tréteaux de théâtre en 1990, appelé par un Matthias Langhoff pour sa Duchesse de Malfi et L’otage de Brendan Behan. Un metteur en scène qu’il a retrouvé récemment sur Cinéma Apollo. Un temps complice du chanteur Stéphane Blok, le musicien de 46 ans a depuis surtout fait prospérer sa bohème mélodique pour les planches, au service de scènes prestigieuses comme, à Paris, la Comédie-Française. «Depuis que la directrice Muriel Mayette a été débarquée, c’est un peu Dallas làbas, je ne pense pas qu’il y ait encore du travail pour moi.» Le metteur en scène Christophe Rauck l’a aussi souvent employé, mais Arthur Besson cherche aujourd’hui un nouveau souffle. «Après cinq spectacles d’affilée pour la Comédie, j’ai senti un vide, la scène me manquait. Marre aussi d’avoir toujours deux techniciens pour me demander si je voulais un sucre dans mon café.» Même si on peut encore le voir, «avec une perruque blonde», dans le Farniente de Sandra Gaudin, le rocker se réveille et déboule masqué sous un nouvel emblème, Geri et Freki (le nom des loups d’Odin). Ces trois quarts de la formation de Karl Specht rallument la fête décibélique, mais sur des textes classieux puisque empruntant à Baudelaire, Hugo, Goethe, Pavese, Aragon. «Pour Goethe et son Erlkönig, cela change des versions de Schubert! Pour les autres, le français pose beaucoup de problèmes rythmiques, mais j’évite le texte mis en musique. C’est plutôt du texte ramené à la musique, même si parfois c’est proche de la scansion chantée.» Du rock, il aime l’énergie, même s’il n’en a jamais écouté. «Même il y a trente ans. Mais on envoyait bien et je crois que cela envoie toujours.» Au 2.21, Arthur Besson explore aussi un répertoire plus acoustique et éclectique avec Le Zapoï, autre exercice collectif auquel il prête sa patte. Boris Senff Lausanne, Théâtre 2.21 Geri et Freki, je 4 et ve 5 juin (21 h) Le Zapoï, sa 6 (21 h) et di 7 juin (17 h) Rens.: 021 311 65 40 www.theatre221.ch Mandarine Les Innocents Sony Music En concert à Lausanne, Docks, sa 10 octobre En diagonale Appel à témoignages Théâtre Le metteur en scène suisse Stefan Kaegi cherche des témoignages pour sa prochaine création au Théâtre de Vidy, Nachlass («Héritage»). Le membre du collectif Rimini Protokoll, récemment distingué par l’Anneau Hans Reinhart, interroge les phénomènes liés à la fin de vie et aux différentes mesures que les gens prennent à l’approche de leur mort, notamment pour organiser ce qu’ils laisseront derrière eux. Pour aborder ces questions dans une perspective documentaire et sans idées préconçues, Stefan Kaegi cherche à accompagner des personnes en fin de vie dans leur processus afin de recueillir leurs expériences et leurs réflexions. Rens.: [email protected] et 021 619 45 11. B.S.