L`auditoire N 205
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L`auditoire N 205
L’auditoire JOURNAL DES ÉTUDIANT-E-S DE LAUSANNE DOSSIER Média de référence depuis 1982 Les too big to bug Mort de Steve Jobs oblige, L’auditoire décortique ces géants de l’informatique Ex Cathedra page 4 Les minarets sont à Strasbourg L’initiative UDC pause un casse-tête à la Cour européenne Pol / Soc page 3 Obama, le messie qui déçoit A quelques mois du début de la campagne présidentielle, bilan d’une story hollywoodienne FAE page 13 Journée égalité L’association faîtière décortique les pubs et ses vices CULTURE page 15 Grange de Dorigny Pour les 20 ans du lieu culturel, le théâtre explose sa programmation page 22 L’auditoire No 205 // NOVEMBRE 2011 Retours L’auditoire – FAE // Internef – Bureau 149 // 1015 Lausanne édité par la ÉDITO NOVEMBRE 2011 2 Ô joie et bonheur, lors des élections du 23 octobre 2011, l’UDC perd 7 sièges au Conseil national. Tout le monde saute de joie, l’adversaire régresse, la politique suisse est sauvée. A côté de cela, des phénomènes passent inaperçus, dont la disparition de l’unique siège de l’extrême gauche au Conseil national. Et cela illustre bien un processus que personne ne semble remettre en question. Le glissement vers la droite de toute la société suisse. Depuis que l’UDC a investi le paysage politique suisse, il est l’ennemi à abattre. Il incarne le démon, et tout le monde en parle. A côté de cela, les partis de droite plus modérés apparaissent comme des enfants de chœur, et surtout, comme le nouveau centre. S’ensuit un phénomène inquiétant: l’extrême gauche disparaît peu à peu de l’échiquier politique, il ne reste donc plus que le Parti socialiste et les Verts, plus modérés, pour faire pencher la balance légèrement vers la gauche. Apparaissent même des partis de droite reprenant des arguments à leur sauce. Preuve en est avec ces fameux Vert’libéraux qui ont tant gagné lors des élections. La notion de vert est très à la mode et satisfait alors beaucoup d’idéaux refoulés de la population. A ceux qui avaient peur de se revendiquer de droite, voilà une belle alternative. Le mot «vert» devant permet de se Sommaire PARUTION 6 FOIS L ’AN IMPRIMERIE IMPRIMERIE SAINT PAUL PHOTO CELINE BRICHET CULTURE SÉVERINE CHAVE CORRECTION AURÉLIE JAQUET N° 20 BUREAU 149, BÂTIMENT INTERNEF 1015 LAUSANNE T 021 692 25 90 – F 021 692 25 92 ÉDITEUR FAE E [email protected] WWW.AUDITOIRE.CH SECRÉTAIRE ADMINISTRATIVE ET COMPTABLE PIERRE-ALAIN BLANC FAE JULIEN BOCQUET MAQUETTE MARC AUGIEY POLITIQUE - SOCIÉTÉ BRIAN FAVRE CAMPUS EMILIE MARTINI, ERWAN LE BEC DOSSIER ISMAEL TALL RÉDACTION EN CHEF EMILIE MARTINI, ERWAN LE BEC COMITÉ DE REDACTION ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO ISMAEL TALL, DIANE ZINSEL, ALICE CHAU, BRIAN FAVRE, SEVERINE CHAVE, CELINE BRICHET, MELANIE GLAYRE, CRISTINA EBERHARD, EMILIE MARTINI, ERWAN LE BEC, SARAH IMSAND, STEPHANIE MONAY, CAMILLE GOY, JULIEN BOCQUET, MARLYSE DEBERGH, STEFANO TORRES, ALICIA GAUDARD, CEZANNE TRUMMER, ORIANE MAKOWKA, CLAIRE VAN DEN BROREK, MATHILDE ZBAEREN, CHLOE BRECHBUEHL, LOIC GEBHARD, SAMUEL ESTIER, JOEL REGLI L ’ AUDITOIRE REMERCIEMENTS LA CAFEINE, LE MAC PRO QUI A TENU LE COUP UNE DERNIERE FOIS, IGOR PARATT, NOS PROFS POUR LES DELAIS SUPPLEMENTAIRE. Tout va très bien, Madame la Marquise. dédouaner de toute pensée droitiste. Résultat: toutes les voix se trouvent au centre, mais attention, le nouveau centre, le centre-droit. Et ce glissement ne semble pas épargner le milieu universitaire, puisqu’aux dernières élections de l’Assemblée des délégué-e-s de la FAE, le Centre-Droit Universitaire a gagné presque 4 points. Si tout cela semble bien lointain, c’est tout un mode de vie qui est redirigé vers les valeurs de la droite. Dans notre cher campus, voilà que le maître mot est la professionnalisation des études. Le débat est-il mort? Ah, la valeur travail, n’oserons-nous jamais la remettre en question? Travailler, correspondre aux besoins économiques, voilà le nouveau leitmotiv. Je vais paraître bien nostalgique, mais il fût un temps où l’université était le lieu où l’on remettait en question la société. Un centre névralgique de réflexions et, de par cela, bien souvent de résistances. Aujourd’hui, le nom des entreprises sponsors recouvrent nos murs. Et le citoyen lambda d’accepter ce glissement, au mieux avons-nous quelques réfractaires allant s’asseoir sur certaines places connues, en attendant que cela se passe. La réaction est passée bien inaperçue. Constat très effrayant: il semblerait que le débat soit mort. Nous pouvons remettre en question bien des choses (un euro vaut-il 1 fr. 20?), mais apparemment pas la plus essentielle: est-ce donc ce modèle de société qui convient à tout le monde? A côté de cela nous applaudissons les révolutions arabes et les soulèvements en Grèce et en Espagne, mais d’une façon bien paternaliste, limite néocolonialiste. Oui, ces sociétés n’allaient pas bien, elles devaient changer… et nous, alors? Il semblerait que la forme qu’a prise notre société soit considérée par beaucoup comme l’aboutissement de tout processus de ce qui est appelé «développement», ou «processus de civilisation». Acceptons quelques réformes par-ci, par-là, mais quand même il ne faut pas exagérer. Et le débat ne va pas aller en s’améliorant, au vu des résultats des dernières élections. Nous voici en présence d’un gros centre (droit) constitué de différents partis mais pas vraiment avec des idées différentes. • Emilie Martini Ex Cathedra page 03 Dossier page 04 Politique // Société page 10 FAE page 14 Campus page 17 Culture page 21 Chien méchant page 24 EX CATHEDRA NOVEMBRE 2011 3 Hors de Suisse, les minarets poussent à Strasbourg La levée de boucliers déclenchée par l’adoption de l’initiative anti-minarets en novembre 2009 s’est concrétisée par une demi-douzaine de recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg. Seuls trois sont encore en lice. Deux ans après, l’initiative continue de faire des remous. Pas de victimes Le motif? «En l’espèce, la cour relève dans sa décision, le requérant se plaint essentiellement que la disposition constitutionnelle litigieuse heurte ses convictions religieuses. Il ne met dès lors en avant aucun commencement d’application de celle-ci et n’allègue, par ailleurs, pas que celle-ci ait déposées n’avaient pas épuisé tous les recours et voies juridiques légales helvétiques avant de passer aux droits de l’homme. Et enfin, aucun d’entre eux n’a soutenu «qu’ils pourraient envisager dans un avenir proche la construction d’une mosquée pourvue d’un minaret», concluent les juges. déployé un quelconque effet concret à son égard. De l’avis de la cour, le requérant n’est donc pas directement victime de la violation alléguée de la Convention. En l’absence d’allégation quant aux effets de la modification constitutionnelle litigieuse sur ses proches, il ne saurait non plus être considéré comme une victime indirecte.» C’est un coup dur pour les associations suisses, ainsi que pour Hafid Ouardiri, coprésident de la Fondation de l’entre-connaissance, qui représentaient le recours jugé le plus crédible jusqu’alors. Ils se heurtent à une jurisprudence néanmoins attendue: Strasbourg tend toujours à accorder plus de crédibilité aux victimes directes et non aux représentant-e-s. Mais c’est surtout l’argument des autorités suisses qui a été retenu, à savoir que les plaintes En attente du recours La pilule est difficile à avaler. Seule une phrase lancée par Strasbourg dans son jugement redonne espoir aux ligues musulmanes. La cour rappelle que le Tribunal fédéral est compétent pour juger la compatibilité des éventuels recours avec la Constitution suisse. Autrement dit, tout dépendra du prochain recours. Surtout si un tribunal interdit formellement la construction Langenthal, le minaret qui pourrait déboucher sur la première interdiction Une seule affaire actuellement en cours en Suisse risque de déboucher sur la première application de l’initiative anti-minarets. La construction de celui de Langenthal (BE) avait été autorisée par la commune, puis par la direction des travaux, car demandée avant le vote de décembre 2009. Une décision assez ironique: c’est justement ce minaret qui avait déclenché les premières signatures. Ce n’est visiblement pas l’avis des opposant-e-s, regroupés dans le comité «Stop Minaret», qui ont fait recours en octobre 2010. L’affaire stagne actuellement devant le Tribunal administratif cantonal, et les anti-minarets bernois se disent prêts à aller «très loin». Jusqu’à Strasbourg ? Dr. Le 29 novembre 2009, la Suisse découvrait avec stupeur que 57,5% des bulletins de vote approuvaient l’interdiction des minarets par la Constitution fédérale. Le résultat de l’initiative a surpris jusque dans les rangs de l’UDC, qui ne s’attendait pas à un succès électoral aussi net. Les médias et politiques suisses ont réagi dans la foulée, sans comprendre l’écart entre la réalité des votes et celle anticipée par les sondages. Parmi les premières réactions, une manifestation importante dans les rues de Lausanne scandait des slogans aussi variés que «Mort au fascisme» et «Ce n’est pas ma Suisse». Du côté de l’organisateur, hagard dans le froid hivernal sur le parvis de la cathédrale vaudoise, il promettait d’aller «jusqu’au tribunal des droits de l’homme s’il fallait». Aujourd’hui, deux ans après, Strasbourg vient de rejeter deux recours. Au total, six recours sont parvenus au seuil du Tribunal de Strasbourg à ce jour. La plupart sont issus d’associations, comme la Ligue des musulmans de Suisse, la Communauté musulmane de Genève ou l’Association culturelle des musulmans de Neuchâtel. Mais coup de tonnerre dans le monde juridique qui s’attendait à une condamnation de l’initiative, la Cour européenne a finalement suivi l’avis transmis en 2010 par l’Office fédéral de justice et police: deux des recours les plus crédibles ont simplement été jugés non recevables le 8 juillet dernier. d’un minaret, ce qui n’a pas encore été le cas. Pour l’ancien porte-parole de la mosquée de Genève, Hafid Ouardiri, ce n’est toutefois que le «déclenchement d’un processus. Nous nous doutions de cette irrecevabilité, mais cette démarche était nécessaire.» Actuellement, seules trois démarches sont encore pendantes à Strasbourg, «à un stade initial» du processus. Un sixième recours a déjà été déclaré irrecevable. Malgré un avis positif du Parlement européen, la suite du parcours semble toutefois semé d’embûches: Berne s’est formellement opposée à un transfert des dossiers de la petite Cour à la grande Cour des droits de l’homme en février dernier, arguant que le suivi des affaires devait rester «normal». Plus que trois recours en lice C’est apparemment l’opinion opposée que défend Strasbourg, qui demande rarement de transférer une affaire à la Grande Cour de la CEDH. «Un tel transfert de chambres ne s’opère légalement que dans deux cas», résumait le porte-parole de la cour, Frédéric Dolt, notamment «quand l’affaire pendante soulève une question grave relative à l’interprétation de la Convention». Mais l’opposition de Berne suffit pour bloquer le processus de dessaisissement et a porté un sérieux coup de frein aux recours. Comme quoi, les opposant-e-s à l’initiative anti-minarets ne sont pas les seuls à se lancer dans une bataille judiciaire. Un long chemin de procédures dans laquelle la seule règle semble plutôt être celle de la «patate chaude». • Erwan Le Bec DOSSIER NOVEMBRE 2011 4 Dossier Les nouveaux visages des géants informatiques Facebook, iPhone, Android, Google, Apple, Microsoft, etc. Que de noms qui sont totalement intégrés à notre vie quotidienne. Trop, peut-être? L’auditoire s’intéresse à ces géants de la technologie de l’information qui influencent, voire définissent, nos vies. «Poussé à l’extrême, l’usage de la télématique pourrait être la suprême aliénation. L’Homme (avec un grand H) serait conduit à devenir un consommateur d’images et de signes, placé devant un écran universel, capable de solliciter tous les savoirs, toutes les mémoires et tous les services.» Ces mots prononcés par l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing en 1979 lors d’un discours portant sur l’informatique semblaient prophétiques. Nous vivons actuellement dans un monde où les outils informatiques et internet jouent un rôle majeur, jusqu’à dicter notre mode de vie. Cette emprise de plus en plus acérée et intrusive engendre une dépendance à la fois matérielle (téléphones portables, ordinateurs, smartphones)et virtuelle (internet, réseaux sociaux). Bref, nous sommes tou-te-s cyberdépendant-e-s. Pour commencer, impossible de ne pas évoquer LE géant qui monopolise la sphère internet: le tentaculaire Google. A l’origine, simple moteur de recherche à caractère presque anticonformiste créé en 1998, Google est devenu un monstre touchant à tous les aspects de notre consommation: moteur de recherche, navigation, système d’exploitation sur téléphones portables, messagerie, cartographie, réseau social, voire même système d’exploitation. Cette infiltration massive dans la vie quotidienne fait émerger des questions quant à la gestion des données et la protection de la vie privée. L’analyse du phénomène Google est à découvrir en page 6. Par ailleurs, quand il est question de vie privée, Facebook surgit dans tous les esprits. On le sait: le réseau social se caractérise par une gestion des données privées extrêmement douteuse. A présent, il doit faire face à la concurrence d’un nouveau venu nommé Google +. Preuve supplémentaire que Google cherche à toucher à tous les aspects de notre vie virtuelle, le réseau social fait pour l’instant des débuts timides. Mais y a-t-il finalement une différence entre cet outil et Facebook? A voir dans la colonne en page 7. étudiant-e-s sont aussi emballés par les portables de la fameuse pomme pourtant plus chers et pour des utilisations limitées (internet, bureautique principalement). «Think different», qu’ils disaient… Vraiment? Ces relations entre Apple et le monde universitaire sont à comprendre en page 8. La permanente interconnexion des individus interroge notre rapport au virtuel. Par exemple, plus de 700 millions d’individus possèdent un profil Facebook, comme un avatar dans une forme de matrice. Le réel, rongé par un manque de repères, tend même à être surpassé par le virtuel, plus simple, plus accessible, plus aseptisé. La tension entre virtualité et réalité et la propension à la dématérialisation sont autant de questions naissant parallèlement à l’utilisation sans limite d’outils informatiques (à lire en page 7). Enfin, et parce qu’il faut un peu d’espoir dans ce monde de brutes, L’auditoire s’intéresse en page 8 au monde du logiciel libre, ainsi que sa philosophie sous-jacente, militant entre autres en faveur de valeurs telles que la liberté, la transparence, l’éthique et la coopération. En marge de notre société et face à la puissance des géants, le logiciel libre nous plonge au cœur de ce que devrait être l’informatique. Dans un domaine différent, un autre géant fait beaucoup parler de lui: le fameux Apple. Récemment, la mort de Steve Jobs a déclendhé des passions jamais vues pour un directeur d’entreprise. Le déferlement médiatique sur la mort de cet homme suscite bien des questions quant aux valeurs défendues dans notre société. D’ailleurs, qu’a-t-il réellement révolutionné, si ce n’est un marketing diablement efficace provoquant l’engouement pour la fameuse marque? L’auditoire revient sur cette mort hyper-médiatisée en page 5. L’occasion également de revenir sur la disparition de Dennis Ritchie, développeur d’Unix et du langage C. Son décès une semaine après Steve Jobs est passé quant à lui complètement inaperçu. Dans une perspective plus locale, il paraît également opportun d’analyser l’emprise d’Apple à l’Unil. Alors que les locaux de l’université n’arborent que des Macintosh, les Les problématiques liées à la toutepuissance de ces géants numériques sont nombreuses et diverses. Mais du fichage électronique à la dépendance technologique, le risque est le même: ne plus réussir à se «débrancher». Aujourd’hui, le réel est marqué par une déliquescence des rapports sociaux (ce qui semble paradoxal dans un monde doté de moyens de communication instantanés). Cela rappelle la nécessité d’une bonne connaissance des outils utilisés et d’une permanente distance critique, au risque d’être littéralement happée-s par ceux-ci Malgré toutes ces paroles, finalement, n’hésitez pas à aimer notre page «L’auditoire» sur Facebook. Comment, vous avez dit contradiction? • Ismaël Tall NOVEMBRE 2011 5 A en croire le tapage médiatique suivant la mort de Steve Jobs, ce dernier aurait changé la face du monde. Radios, télévisions, presse écrite s’empressent de relayer l’événement et font hommage à l’homme. Actuellement, selon l’agence Reuters, le mot «Steve Jobs» se trouve en première place des expressions les plus utilisées dans les médias et réseaux sociaux, devançant même la mort d’Oussama Ben Laden. La biographie de Jobs, sortie récemment, se vend comme des petits pains. Steve Jobs Le 5 octobre dernier, Apple annonçait le décès de son célèbre patron, Steve Jobs, des suites de son cancer. figure dans le top de la liste des canS’ensuit une extraordinaire vague de lamentations comme seules les grandes vedettes savent provoquer. Mais didat-e-s au titre de «personnalité de d’où vient la fascination et l’admiration pour cet homme d’un monde aussi obscur que l’informatique? l’année» du magazine Time. combler un vide, en somme. Le indispensables à notre quotidien. Un d’une souris. Le produit se vend triomphe du paraître et le matériacomme capable de casser la domina- vif succès visuel qui n’a pas manqué Génie de la communication lisme exalté sans complexe. Benoît d’attirer l’œil des médias. tion façon d’IBM à l’époque, dépeint Steve Jobs a été avant tout un formiXVI même, dans un discours du 10 dable vendeur. Déjà en 1984, le lance- selon Apple comme un Big Brother octobre. «Les plus jeunes sont nés Léthargie du XXIe siècle de l’informatique. Le marketing est ment du premier Macintosh 128K se dans cette condition, semblent vouloir Au-delà du performant marketing de féroce chez Apple: la firme présente présente comme accessible et facile remplir de musique et d’images ses produits comme des biens acces- Jobs, la fascination pour l’homme et d’utilisation, notamment par la préchaque moment vide, presque par ses produits interpelle. A-t-on déjà vu sibles à tou-te-s et simples sence d’une interface graphique et pareil engouement pour un chef d’en- peur.» Sommes-nous donc atteints de technophilie soudaine? Sûrement pas, treprise? En plus de l’enthousiasme au vu de la volonté d’Apple de tenir des médias s’ajoutent les innompar la main ses utilisateurs-trices: la brables commentaires qui ont envahi compagnie, en misant sur l’accessibiles réseaux sociaux, les différents lité et le design, cherche à faire utiliser recueillements de consommateurs devant les Apple Stores, jusqu’au pro- une technologie sans la comprendre. D’ailleurs, les détracteurs-trices de la fond désespoir de certains fans en pomme signalent les diverses restricpleurs devant les caméras. Des tions imposées par les systèmes jeunes interrogés pour l’occasion le d’exploitation. A l’instar de Richard confirment: «C’était un génie, un Stallman, militant du logiciel libre, qui, magnat de l’informatique», peut-on sur un ton provocateur déclarait: entendre à plusieurs reprises. «Steve Jobs, pionnier de l’ordinateur A la lecture de la presse, on conclura conçu comme une prison cool, mise que chaque génération a ses propres au point pour supprimer leur liberté icônes. Les réactions larmoyantes aux idiots, est mort.» • face à la mort de ce «gourou» qu’est Jobs signalent quelque chose de fort: la société de consommation poussée Alice Chau à son paroxysme. Consommer pour Dr. Steve Jobs, ou comment un simple homme devient une icône mondiale C’est notamment les démonstration charismatique de celui que certains appellent le «gourou» qui ont fait sa notoriété. 24 février 1955: Naissance de Steve Jobs. 1976: Création de l’entreprise Apple par Steve Jobs et Steve Wozniak. 1984: Présentation du premier Macintosh. 1985: Steve Jobs quitte Apple et fonde NeXT. Apple lui intente un procès. 1997: Retour de Steve Jobs en tant que CEO intérimaire. 2001: Lancement du premier iPod. Il s’en écoulera plus de 300 millions en dix ans. 2007: Lancement de l’iPhone. 2010: Lancement de l’iPad. d’utilisation, mais elle se montre aussi comme une alternative à la toutepuissance des PC, comme l’indique le slogan «Think different» introduit en 1997 lors du retour de Jobs chez Apple. Plus récemment, on voit apparaître les fameuses keynotes d’Apple, ces conférences dans lesquelles Jobs présentait, avec un charisme indéniable, les nouveaux produits de la firme. En découle une mise en scène, mettant en évidence les nouveautés comme des révolutions, forcément La mort de Steve Jobs a peut-être éclipsé celle d’un autre homme, Dennis Ritchie. Ce dernier a été retrouvé inerte chez lui le 12 octobre 2011 dans l’indifférence presque totale des médias. Pourtant, son apport à l’informatique est tout aussi, si ce n’est plus, important. Deux hommes pour deux styles de travail. Dennis Ritchie est le père du langage de programmation C et codéveloppeur, avec Ken Thompson, du système d’exploitation UNIX. Un héritage dont on sous-estime l’ampleur: la plupart des programmes utilisés actuellement sont écrit en C ou en un des langages inspirés (dont le C++ et Java), parmi lesquels Windows et toute l’infrastructure permettant au web de fonctionner. Et surtout, le système d’exploitation phare d’Apple, MacOS, se base sur le noyau d’UNIX. Un travail important mais discret, à l’image de Ritchie: il était avant tout un développeur de l’ombre. Malgré les prestigieuses récompenses qu’il a reçues, il ne s’est jamais mis en avant, au contraire d’un Steve Jobs, qui convoquait tout le gotha de la presse pour le lancement d’un nouveau produit. Et lorsque ce dernier insistait sur la protection de sa vie privée, Ritchie se contentait de ne pas évoquer le sujet. Ainsi Ritchie a développé les bases obscures de l’informatique, tandis que Jobs a su rendre l’informatique attractive et, surtout, la vendre à un prix fort. DOSSIER NOVEMBRE 2011 6 « Don’t ask, just Google it ! » Né il y a treize ans, le moteur de recherche Google a vite grandi. Aujourd’hui, rien n’échappe à ce géant et aux ambitions de ses deux créateurs, Larry Page et Sergey Brin. Qu’est-ce qui a permis cette incroyable ascension et quelles sont les conséquences pour notre sphère privée? Google, un nom pas vraiment choisi au hasard, puisqu’il avait pour objectif de traduire l’envie d’indexer un gigantesque nombre de données sur la Toile afin, selon ses créateurs, «d’organiser à l’échelle mondiale les informations, dans le but de les rendre accessibles et utiles à tous». Quoi de mieux, donc, que de reprendre l’idée de «Googol», mot anglais qui désigne le chiffre 1 suivi par 100 zéros? Le nom trouvé, les statuts de la société sont déposés le 4 septembre 1998. Puis, tout s’enchaîne très vite, recrutement du premier employé, excellent papier dans PC Magazine, qui le désigne comme meilleur moteur de recherche, et deux déménagements qui se succèdent et les rapprochent toujours plus de la Silicon Valley. Mais c’est réellement à partir des années 2000 que Google se développe en se déclinant dans de nombreuses langues et fonctionnalités pour devenir ce que nous connaissons maintenant: un projet tentaculaire composé de plus de 180 services, qui finit par éclipser la concurrence. A force de voir Google gagner du terrain, il n’est pas étonnant d’entendre des voix s’élever contre la société, l’accusant de monopole. «Google est une boîte qui se développe, non pas parce que c’est un ogre mais par le biais des compétences qu’elle met à disposition des gens», précise Stéphane Koch, conseiller en stratégie de l’information et de la réputation en ligne. Et à mesure que le bénéfice augmente, Google multiplie ses fonctionnalités qui le rend si populaire auprès de ses utilisateurs. Rappelons d’ailleurs que le groupe aurait, selon sa publication du mois d’octobre, touché un bénéfice net de 2,73 milliards de dollars, soit une hausse de 26% sur un an. Ainsi Larry Page a déclaré se préparer à «continuer à faire d’importantes dépenses d’investissement». Un service gratuit? La réussite de la société provient de la publicité, qui compose les 95% de son chiffre d’affaires. C’est à partir de son concept de publicité ciblée que Google tire son impressionnant bénéfice. Son fonctionnement? Le site va recueillir des informations privées grâce aux cookies en lien avec l’adresse IP du/de la particulier/ère afin de cibler le/la futur client-e et de cette façon pouvoir envoyer la facture aux annonceurs. C’est exactement la raison pour laquelle Google est aussi vivement critiqué par tous les organismes intéressés à la protection des données personnelles. Dès lors plusieurs questions se posent: comment Google parvient malgré tout à conserver la pleine confiance des foules? Et peut-on véritablement parler de services gratuits dès lors que les internautes cèdent des données privées à Google, qui en tirera profit par l’intermédiaire de la publicité, en échange d’informations? Ne pas négliger la responsabilité de l’instruction civique C’est justement ce que beaucoup de personnes oublient, comme le souligne Stéphane Koch, «Google collecte des informations personnelles, c’est le deal, un système de troc. Est-ce que les gens accepteraient de payer pour ces services en échange du fait que Google n’accède pas à Dr. En moins d’une quinzaine d’années, la petite société Google s’est transformée en véritable empire. Moteur de recherche, messagerie, réseau social, etc. A-t-on raison de penser que la protection de nos données privées est menacée? Ou pouvons-nous en réalité contrôler ce flux d’informations personnelles? Difficile d’imaginer à quoi ressembleraient nos recherches sans Google! leurs données personnelles?» D’autant plus qu’il existe des outils, tels que Google Dashboard, qui permettent de régler ces paramètres de sécurité. Ainsi, on peut blâmer le géant, mais «il ne faut pas négliger la responsabilité de l’instruction civique qui ne forme toujours pas assez l’utilisateur-trice sur les dynamiques de sphères privées», conclut l’expert. Google, champion de la démocratie culturelle? Concernant de nouveaux défis, Stéphane Koch pense que Google devrait avoir sa pierre à amener à l’édifice du «droit à l’oubli numérique». Ce droit consiste en la possibilité d’effacer toute trace de ses données sur un site. En effet, internet est un média de stock, et la moindre information peut facilement y être trouvée. «Ce que pourrait éventuellement offrir Google, c’est interdire de trouver des informations lorsque l’utilisateur cherche un nom ou un prénom, ce qui est techniquement faisable!» L’information serait ainsi disponible sur le site internet d’origine, mais la page serait cachée au moteur de recherche. Encore une fois, ce genre d’affaire n’est pas l’unique responsabilité de Google, et les médias traditionnels devraient également être plus vigilants dans leur manière de travailler. «Pour un journal, l’information est quotidienne, mais pour les gens concernés, cela peut avoir un impact sur le long terme», explique Stéphane Koch. Ainsi, même si Google a ses torts, il ne faut pas tomber dans la facilité de l’incriminer pour tous les maux. Les torts sont partagés entre médias traditionnels, instructions publiques, notamment. Si cette société exerce bien un énorme contrôle sur nos vies, il nous est toujours possible d’utiliser les moyens en notre possession pour restreindre ce pouvoir ainsi que réduire la dépendance que l’on s’est créée avec cet outil et les différents types de connaissances qu’il offre. Après tout, ne nous acharnons pas trop sur celui qui détient presque l’entier de notre vie numérique. • Cézanne Trummer NOVEMBRE 2011 Facebook contre google+ Welcome in the desert of the cyberspace Les interfaces que nous offre le web nous permettent bien souvent de nous «réaliser» en tant qu’individu, de nous construire. Devons-nous comprendre que le réel ne serait plus le même sans sa matrice? A l’appui de ce questionnement, les ouvrages du prolixe Slavoj Žižek, philosophe, psychanalyste et essayiste. L’ironique et désormais célèbre salutation de Morpheus à Néo est ici détournée. La phrase ne décrit plus un réel apocalyptique dénué de son embellissement matriciel, mais son envers: le désert matriciel lui-même. Car là où le film pèche par manque d’imagination en ne supputant pas un univers auto-référencé, la réalité dépasse la fiction puisque l’on considère aujourd’hui que le monde «corporel» a tout à apprendre du cyberespace. Dr. Dr. Cela revient à dire à Néo: «Regarde comme le monde est bien réglé et René Magritte, La lunette d’approche heureux dans sa réalité chimérique, pourquoi n’apportes-tu pas la bonne nouvelle à tes congénères qui végètent en cuves placintiques?» Il est déjà dépassé de parler de Google, Facebook ou Twitter comme de simples entreprises hyper-modernes, images-type du capitalisme made in Silicon Valley. Car ce faisant, on occulte le véritable enjeu lié à ces entités indéfinissables qui, sur la Toile, fondent le réel, le modulent et le créent. N’attribuons-nous pas en grande partie la réussite des révolutions arabes au formidable atout que représentent les réseaux sociaux? Internet n’est-il pas souvent considéré comme un havre de paix et de liberté qu’il s’agirait de protéger des élans législatifs de quelques Etats tatillons et réactionnaires? Pour finir, la citoyenneté du net est en passe, dans l’esprit de quelques-un-e-s, de remplacer l’appartenance réelle à une communauté. Cet universalisme cybernétique vise à réaliser ce que l’engagement civique ordinaire n’aurait pas réussi à entreprendre: rendre égaux les individus-avatars. Et si ce n’était qu’un leurre? «Du cyberespace, on attendait pour tous la possibilité de vivre dans un village global; cependant, il faut bien reconnaître que ce qui est arrivé, c’est que nous ne cessons d’être bombardé-e-s d’une multitude de messages appartenant à des univers inconsistants et incompatibles: à la place du village global, à la place du grand autre, nous avons obtenu une multitude de «petits autres», nous offrant un choix multiple d’identifications à des particularismes tribaux.» Dans ses ouvrages, Slavoj Žižek, tente de débusquer le réel sous ses faux-semblants. Ainsi dans Bienvenue dans le désert du réel est décortiquée cette propension à la virtualisation et à la dématérialisation de notre environnement. Nous faisons ainsi face à un réel privé de sa substance: «On trouve aujourd’hui sur le marché de nombreux produits dont ont été éliminées les propriétés malignes: café sans caféine, crème sans matière grasse, bière sans alcool… Et la liste continue: pourquoi 7 pas une partie de jambes en l’air virtuelle, une guerre sans guerre, comme Colin Powell l’a proposé dans sa doctrine de la guerre sans victimes (de notre côté, bien sûr)?» N’en va-t-il pas de même dans notre propension à ne vivre non plus à l’aide des interfaces que nous offre internet mais grâce à elles? A la recherche du sens Dans un bus, j’entends un jeune couple qui se dispute. Ceux-ci ne s’invectivaient non pas pour avoir manqué une occasion de se dire «je t’aime» (car le garçon s’est, croyezmoi, rattrapé dans le réel), mais pour ne pas l’avoir marqué instantanément sur Facebook à l’aide de son iPhone. N’est-ce pas la preuve qu’il n’est pas si éloigné le temps où les liens qui nous unissent socialement ne seront plus transmis par la Toile mais pour celle-ci, en tant qu’entité régulatrice de nos vies? Un réel privé de sa substance Pour beaucoup, l’image du «programmateur informatique indien qui pendant la journée excelle dans l’expertise numérique et qui le soir, en rentrant chez lui, fait brûler un cierge à la divinité hindoue» représente l’achèvement transculturel par excellence. Cette image ne trahit-elle pas aussi le vide symbolique de nos vies? Et si la fuite en avant vers les réseaux sociaux et la vie virtualisée n’était peut-être qu’une tentative – bien réelle – de redonner un ordre symbolique à un monde que nous ressentons comme insensé? Est-ce que finalement nous ne rechercherions pas une matrice? • Brian Favre Le nouveau service Google + s’est-il donné les moyens de détrôner Facebook? Depuis des années déjà, Google s’acharne à créer son réseau social. Après Wave et Buzz, la société revient avec Google +. En effet, Facebook est l’endroit où il faut être, ne pas avoir de profil est socialement aussi mal perçu que d’appartenir à une secte, être végétalien-ne ou ne pas regarder la Coupe du monde de football. Le réseau social ou la mort. Fort de ce constat, la société Google s’efforce de reproduire les mêmes concepts que son rival. Ainsi, Google a repris à sa façon le «j’aime», aussi populaire que le site en lui-même, savamment renommé «+1 ». Cependant, ce qui est primordial dans la réussite d’un réseau social c’est la quantité d’utilisateurs-trices. Comment Google peut-il prétendre à la migration de 800 millions d’individus, sans une réelle idée par laquelle se distinguer? Ce nouveau système part de la faille de son rival, qui postule que vous tenez absolument à partager la même chose avec votre meilleur-e ami-e, votre grand-mère, votre patron et le dogue allemand de votre voisine qui possède également sa page. Chez Google, pas d’amis, mais des contacts que vous pourrez classer par cercles. Ces cercles permettent de sélectionner quelles informations vous désirez partager avec quels groupes de manière très simple et ce sans que personne ne sache à quel cercle il appartient. La vie privée est-elle mieux respectée? Il paraît plutôt que peu importe la façon dont vous gérez vos cercles, votre meilleur ami restera toujours Google, ce grand frère à qui vous direz tout, que vous le vouliez ou non. • Cézanne Trummer DOSSIER NOVEMBRE 2011 8 Logiciels libres: le software de l’avenir? Dans cette période de grands changements, la question d’échange libre est de plus en plus soulevée. Du côté de la technologie, le logiciel libre défie le copyright et ses adeptes. Avec les améliorations quotidiennes en technologies et programmation, un conflit majeur a vu le jour. D’un côté se trouvent ceux/celles ne jurant que par le copyright, affirmant qu’ils/ elles méritent d’être rémunéré-e-s pour chaque utilisation de leur code pour cause de propriété intellectuelle. De l’autre, les militant-e-s d’un partage complet, soutenant l’idée que tout soit facilement atteignable pour les masses, que nous ayons tous la possibilité d’en avoir la meilleure utilisation possible. En informatique, la solution de partage intégral est le logiciel libre. Un logiciel est considéré comme tel s’il offre les fameuses quatre libertés définies par la licence GPL (ou GNU General Public License). Soit celles d’exécuter le programme, d’étudier son fonctionnement et l’adapter à ses besoins, de redistribuer le programme, et de l’améliorer et le redistribuer ainsi modifié au public afin que tous en profitent. A partir du moment où il est protégé par cette licence, le logiciel ainsi que toute contribution apportée sont de ce fait protégés en tant que «bien commun», souligne Anne Possoz, responsable de l’espace Logiciel Libre à l’école. Ce principe inclut donc les libertés qu’offrent l’open source (code librement atteignable) et les logiciels gratuits (ne garantissant que la gratuité du logiciel lui-même) avec lesquels il est souvent confondu, sans en imposer les restrictions. Malheureusement encore peu adoptés par les étudiant-e-s, de tels logiciels sont faciles à obtenir et s’appliquent à tous les domaines, affirme Jean-Daniel Bonjour, responsable du service informatique de l’ENAC à l’EPFL. Quelques exemples des plus connus incluent la plateforme Linux, le navigateur web Firefox, et GIMP pour l’édition d’images. Ils représentent aujourd’hui le soutien et la collaboration entre utilisateurs-trices averti-e-s de la liberté totale. Chacun-e est encouragé-e à y apporter du sien selon ses compétences, même si ce n’est qu’effectuer un rapport de bug. Les forums offrent un soutien particulier, chacun-e pouvant y trouver des réponses (ou en donner), tout en créant un effet communautaire avec des liens humains. Cette collaboration ouverte présente désormais un aspect véritablement constructif dans notre société de consommation et de «chacun pour soi». Dans quel sens désirons-nous aller? Voulons-nous démontrer notre individualité dans l’extrême de l’individualisme où le partage disparaît, ou cherchons-nous plutôt à soutenir une société où nous nous entraidons tous afin de tirer le meilleur de tout? Ne serait-il pas plus utile de se servir des infinies possibilités de développement que nous avons dans un but solidaire, plutôt que pour un public restreint et exclusif? • Claire Van Den Broek Omniprésence d’Apple à l’Unil: machination ou hasard? La pomme paraît désormais implantée sur le campus. Enquête sur la raison de son ubiquité dans nos couloirs, derrière leurs portes et au sein des auditoires. Une grappe de bornes internet portant le logo Apple sont érigées dans nos couloirs. Des centaines de pommes stylisées surgissent dans les auditoires au début des cours. Les Macintosh semblent avoir colonisé l’Unil une bonne fois pour toutes, autant du côté logistique que de celui des étudiant-e-s. Ces derniers/ères vont même jusqu’à parler de mode, d’invasion ou encore de «secte des Mac», faisant référence à l’omniprésence des produits Apple. Cependant, si ce soudain attrait pour la pomme interpelle, peut-on vraiment parler d’un quasi-monopole du côté de l’Unil, jusqu’à soupçonner des accords avec la firme? Une série de discussions avec plusieurs responsables du Centre informatique (Ci) permettent de prendre conscience de la différence entre ce que l’on voit dans les couloirs et ce qu’il en est vraiment. Sur 6000 machines à l’inventaire des facultés et instituts, 55% seulement viennent de chez Apple; rien à voir avec l’ampleur imaginée de l’invasion! Beauté et simplicité comme priorités Dans ce cas, pourquoi tant de Mac «en vitrine» dans les couloirs? Tout simplement pour leur design esthétique et leur facilité d’emploi et d’entretien. Ils sont en effet «plus rentables à long terme, leur hardware étant robuste et leur software nécessitant moins d’entretien», affirme Patrice Fumasoli, responsable du support au Ci. Ces caractéristiques sont pour le moins suffisantes pour des travaux de bureautique, comme c’est le cas pour de nombreux collaborateurs/rices de l’université, mais laissent à désirer pour qui souhaite réaliser des opérations plus complexes, telles que la programmation. Ainsi l’Unil laisse-t-elle la liberté à chaque faculté de choisir ses supports informatiques. Des accords existent effectivement pour l’acquisition de divers produits, mais, loin d’être exclusifs, ils concernent toutes les plates-forme et toute une série de marques. Du côté des étudiant-e-s, Apple signifie fiabilité, esthétique, fun et praticité, malgré diverses incompatibilités, ainsi que des possibilités de personnalisation malheureusement réduites. Le tout à condition d’être prêt-e-s à sortir le portefeuille. Aussi optent-ils/elles souvent pour un MacBook, portable, léger et peu susceptible «d’attraper» un virus tout en déplorant intérieurement l’aspect conformiste et le prix. Pour leurs achats, le Ci ne vend pas d’outils informatiques mais propose diverses offres d’entreprises leur accordant des rabais alléchants, allant de 10 à 20% pour les produits Apple et souvent davantage pour les autres marques. Bref, si la pomme paraît incontournable, c’est que la majorité du public décide d’opter pour ce qui leur paraît le plus agréable. Les critères se rapportant plutôt à l’interface et au design qu’aux détails technologiques. Ainsi, le marketing et l’attention aux petits détails plaisants de l’interface furent ce qui sauva Apple et rendit la marque omniprésente dans notre vie quotidienne. • Oriane Makowka, Claire Van Den Broek NOVEMBRE 2011 9 Abonnement de soutien, L’auditoire a besoin de vous! L’auditoire est un journal d’étudiant-e-s, qui ne bénéficie que d’une marge de maneuvre limitée. Nous nous employons à le faire vivre toute l’année, nous le chérissons, mais ce n’est pas suffisant. Nous avons besoin, comme toute association, de soutien financier. Voici donc l’occasion d’apporter votre contribution à la presse estudiantine de l’Université de Lausanne. Je désire m’abonner à L’auditoire pour 1 an (4 numéros restant) Abonnement étudiant-e fauché-e, CHF 20.- (vous êtes fauché-e-s mais vous nous aimez bien quand même Abonnement «j’ai coché la case du milieu», CHF 40.- (et il reste que 4 numéros, faut pas exagérer) Abonnement «riche comme Crésus», CHF 60.- (et là c’est nous qui vous aimons) Nom: Prénom: Rue: NPA: Localité: A retourner à: L’auditoire, Bureau 149, Unil— Dorigny, Bâtiment Internef, 1015 Lausanne. Remise du Prix de la Sorge 2011 L’auditoire, ce n’est pas seulement un journal d’étudiant-e-s, c’est également un soutien aux jeunes talents et aux événements culturels. Comme chaque année, votre canard préféré organise, conjointement avec la revue littéraire Archipel, le très célèbre Prix de la Sorge. Ce concours littéraire est destiné à tou-te-s les étudiant-e-s immatriculé-e-s à l’Université de Lausanne et à l’EPFL et récompense les plus belles oeuvres écrites. Cette année, c’est plus de quarante futures plumes qui ont envoyés leur prose, allant du roman policier à la poésie libre. Les délibérations ont eu lieu, les jurés ont tranché... Le verdict sera rendu lors de la soirée de remise des prix. Elle aura lieu le 29 novembre 2011 au théâtre du Lapin vert, repère des Belles-Lettres, dès 19h. Nous aurons la chance d’avoir avec nous le jury au grand complet: Michel Layaz (écrivain), Jean Kaempfer (professeur en français moderne à l’Unil) et Michel Bory (écrivain et journaliste), David André (Archipel) et Erwan Le Bec (L’auditoire). La soirée sera parsemée de lectures et d’animations. En plus des agappes. Venez nombreux-ses! • pub POLITIQUE | SOCIÉTÉ NOVEMBRE 2011 10 Communication: l’élection du présidentiable socialiste n’a rien eu de primaire Avec le dépôt des candidatures entre juin et juillet et l’annonce définitive des résultats en octobre dernier, la primaire socialiste française a tenu en haleine tout le paysage médiatique pendant deux saisons. Une omniprésence qui rappelle la stratégie habituelle du parti majoritaire de droite, qui, lui, joue la discrétion. Participation Impressionner l’adversaire ou étudier le potentiel de mobilisation des troupes était de loin un des objectifs principaux des éléphants du PS. On a vu un Montebourg annoncer fièrement 4 millions de voix à la veille du premier tour, alors que les plus modestes avançaient 1 million et demi de bulletins de vote aux primaires. Un nombre qui doit dans tous les cas marquer les mémoires quand les partis sont justement en train de comparer leur force électorale de base. L’UMP accusant cette année une baisse de ses membres à 155’000. Au final, les bureaux de vote ont comptabilisé pas moins de 2’650’000 voix au premier tour, contre 2’800’000 au deuxième tour. Une évolution rassurante pour le scrutin présidentiel, qui se joue traditionnellement sur deux tours. Dr. Il y avait comme un air de campagne dans la presse française des vacances et dans celle de la rentrée. Pour peu, la sélection de l’éléphant socialiste à la présidentielle de 2012 a failli voler la vedette aux opérations en Lybie et aux reportages sur les bienfaits de la crème solaire sur les plages de Charente-Maritime. A la clôture des votes le 16 octobre dernier, les analystes étaient unanimes à constater une primaire calme, sans accroche majeure. Le seul suspens a d’ailleurs été constitué par la ligne directrice des candidat-e-s, dont on apprenait jour après jour qu’ils appartenaient à une ligne dure ou molle. Mais pour les socialistes, l’enjeu principal, qui était celui de la communication, semble bel et bien gagné: face à un Sarkozy gonflé à bloc par ses apparitions liées au printemps arabe ou à la crise de l’euro, le parti de la rose s’est taillé la part du lion. Au moins pendant quelques mois. Alors qu’en 2006, les primaires avaient été un simple match gagné d’avance par Ségolène Royal face à Fabius et DSK, le millésime 2011 a largement donné une autre image. Pour le parti, les primaires devaient François Hollande a commencé sa campagne bien avant Sarkozy. anticiper le débat présidentiel final et mettre en jeu les candidats. «Acceptons le débat, ou alors ce n’est pas la peine de faire des primaires, déclarait Martine Aubry en août. Pour s’attaquer à Nicolas Sarkozy, il va falloir avoir des nerfs. Si on s’inquiète des mises en cause des différences, c’est inquiétant pour la suite.» Il en a découlé une aile «dure» et une aile «molle» du parti. Aile radicale dont l’icône s’est soudainement retrouvé au cœur du débat économique. C’est même visiblement à regret que le député de Corrèze a rejoint certaines positions de Montebourg à la veille du deuxième tour, comme le contrôle des banques. «Je considère que ce sont les responsables de la crise actuelle, c’est-à-dire les banques et le système financier, qui doivent en assumer les conséquences et non les contribuables», déclarait François Hollande. Alors que la députée de Lille proposait plutôt une recapitalisation de la part de l’Etat français, ce sont les solutions invasives qui ont séduit. Malgré la «gauche forte face à une droite dure» d’Aubry, les socialistes ont finalement voté en masse pour celui des deux qui avait à leurs yeux le plus de chances en 2012. Reste que les socialistes ont réussi le pari de maintenir sur eux l’attention du public, tout en proposant un candidat qui incarne tous les ingrédients mis en avant par Sarkozy cinq ans plus tôt. • Erwan Le Bec Assurances, prévoyance et… surveillance La surveillance évoque – dans la psyché collective – l’image d’Epinal d’un agent de la société, renseigné sur nos vies et menaçant notre liberté. Mais est-ce toujours d’actualité? La vision populaire du «Big Brother» se trouve dépassée dans nos sociétés contemporaines, rompues aux mécanismes de surveillance invisibles. D’ailleurs, peu de citoyen-ne-s sont réfractaires à la surveillance «utile», de celle qui permet de limiter les abus et combattre l’incivilité. Le Tribunal fédéral a, dans plusieurs arrêts, confirmé par exemple le recours à un détective privé par des assurances (tant sociales que privées), lorsqu’il s’agit de prouver le comportement abusif d’un-e assuré-e. Cette atteinte à la vie privée se justifie néanmoins, selon le TF, par l’intérêt public à ne pas verser des prestations indues afin de protéger la communauté des assuré-e-s Pesée des intérêts Le raisonnement justifiant le recours à des méthodes de surveillance se fonde sur des considérations objectivables qui ne souffrent pas de discussion. L’aporie qui en résulte est une incapacité, pour quiconque aurait un sentiment de malaise à l’idée d’une surveillance de soi, d’objectiver à son tour son propos afin d’opposer plus qu’un ressenti au discours légalrationnel. Mais comme le rappelle le professeur et avocat Philippe Meier, spécialiste de la protection des données, «la pesée d’intérêts effectuée par les juges se veut la plus objective possible. En pratique, on n’échappe cependant pas à un jugement de valeur» qui n’est, lui, plus si objectif... Les conditions légales à la surveillance par les assurances sont posées. Mais plus généralement, la difficulté d’opérer un débat sur la question semble relever d’un verrouillage implicite. Car après tout, estce normal d’être suivi via nos portables, est-ce normal que Google et Facebook vendent des données à des annonceurs pour «taper juste», est-ce normal de devoir planter une haie pour échapper aux regards d’un détective? Se résigner à ne considérer le débat que sous l’angle normatif est réducteur, reste les valeurs à interroger. • Brian Favre NOVEMBRE 2011 11 «Un lieu pour les utopies» Désirs d’éternité dans un monde en crise: le transhumanisme de Kurzweil Ce titre aux accents d’oxymore marque le début d’un cycle ayant pour objet d’offrir un lieu, un topos d’expression aux utopies de demain. Ce pari immodeste se veut le porteur de voix nécessaire à tous ceux qui se sentent inspirés et qui ont un projet pour ce demain qui nous effraie. On a dit que le malheur des utopies d’hier est qu’elles se sont réalisées. L’avenir apparaît ainsi souvent comme un horizon indépassable où ce qui est véritablement nouveau se perd au profit de petites innovations. B.F. Au contraire, ce scientifique influent aurait même déjà tout prévu pour les années à venir: d’ici 2029, l’intelligence artificielle aura, selon lui, égalé les capacités psychiwques humaines et une machine pourra être dotée d’une conscience. Loin de produire un scénario dystopique où les machines se soulèvent pour prendre le dessus sur un homo sapiens archaïque, les progrès de la technologie devraient permettre à l’homme de transcender ses limites et de fonder une nouvelle espèce: l’humanité 2.0. Trouver sa place entre technophobie et technophilie Ainsi, c’est une fusion entre l’Homme et la machine qui devrait s’opérer de manière à ce que chacun puisse améliorer ses capacités cérébrales, qu’il s’agisse de ses dispositions à aimer, de son humour ou de sa moralité. Mais il en va surtout de notre espérance de vie. Traumatisé par la mort de son père, Kurzweil souhaite endiguer le processus de vieillissement qu’il considère comme une maladie. Ouvrant ainsi la porte - à la manière d’un messie hypermoderne - à une éternité promise, le transhumanisme apparaît comme un remède à notre condition simplement humaine, désespérément imparfaite. Alors que le transhumanisme nous Dr. Depuis quelques années déjà s’avance sur la scène publique un personnage haut en couleur et en surprises: Ray Kurzweil, figure de proue du transhumanisme et futurologue à ses heures. Si le futur est encore cachottier pour beaucoup d’entre nous, sachez que l’avenir de notre planète n’est en rien un mystère pour cet informaticien diplômé du MIT. Alors que la vague transhumaniste nous promet l’immortalité et le Salut par la technologie, l’écologie et les partisans de la décroissance tirent la sonnette d’alarme et annoncent une apocalypse climatique. Quand deux visions de l’avenir s’opposent. Analyse. A quand une altérité purement technologique? promet monts et merveilles dans un univers d’individualisme radical, l’écologie tente d’ébranler les croyances sur lesquelles nos sociétés occidentales sont fondées. Le progrès et la croissance doivent être relégués au rang de mythes; il n’est plus question de consommation, mais de réformes globales afin d’éviter le pire. Face à de telles prévisions alarmantes, certains adeptes de la politique de l’autruche nient les preuves qui leur sont apportées. L’individu hypermoderne, perdu entre désir de confort et pression morale reste paralysé devant des injonctions opposées; l’avenir de la planète dépend de son comportement dans le présent, mais il est incapable de délaisser volontairement le «bien-être» qu’il a payé de sa propre poche. Le partisan du transhumanisme, lui, se tourne vers le futur le sourire aux lèvres, confiant. La technologie comme Salut Selon Kurzweil et ses amis, l’humanité se rejoint dans un rêve: celui de devenir immortel et de toucher à la perfection. En partant de ce postulat, les transhumanistes affirment que toute tentative de leur faire échec est moralement condamnable, car il en va du bien de l’humanité. Plus précisément, Nick Bostrom, président de l’Association mondiale transhumaniste, établit une distinction entre «Reconfigurer l’humain» à l’Unil? Au centre de notre Unil, un groupe de chercheurs-euses se questionne également sur ce thème. Ethos, la plateforme interdisciplinaire d’éthique de l’Unil, mise en place en 2010, capte les tendances de notre société hypermoderne et élabore une réflexion éthique (www. unil.ch/ethos). Comme l’affirme Alain Kaufmann, directeur de l’Interface Sciences-Société, qui abrite Ethos, il s’agit de penser simultanément la question de la finitude écologique et celle des promesses transhumanistes, car celles-ci sont «diamétralement opposées et coexistent dans notre société». Selon lui, «les technologies doivent être remise à leur juste place: celle d’une contribution importante à la résolution des défis qui nous attendent», mais ne doivent pas être considérée comme «la» solution. Car le développement de risques «supportables», comme l’utilisation de substances probablement cancérigènes ou l’explosion d’un réacteur nucléaire, et risques «existentiels», à savoir tout ce qui peut «provoquer l’extinction de la vie intelligente». Ainsi, certains risques qui pourraient avoir un impact catastrophique sur la biosphère ou sur la santé et la vie des individus sont rejetés au second plan, parce qu’ «ils ne détruiraient pas l’avenir à long terme de l’humanité toute entière». Dès lors, le transhumanisme ne concerne qu’une élite tandis que la majorité restée sur le carreau devra payer les frais de cette idéologie du progrès. • Mathilde Zbaeren nouvelles technologies poussé à l’excès est véritablement «porteur de nouvelles inégalités». Au final, «le mouvement tranhumaniste se manifeste à un moment de l’histoire où l’humanité prend collectivement conscience des limites physiques de son développement» et apparaît comme le témoin majeur de la démesure qui caractérise nos sociétés. Ainsi, comme le propose A. Kaufmann, seule la mise en œuvre d’une «transition écologique» semble constituer une réponse raisonnable à ce déni des limites. Dès lors, le transhumanisme apparaît comme un moyen supplémentaire de nous voiler la face quant à nos peurs existentielles les plus enfouies. Il s’agit donc pour nous de trouver notre place entre technophobie et technophilie afin d’envisager le futur d’une manière nouvelle et raisonnable. • POLITIQUE | SOCIÉTÉ NOVEMBRE 2011 L’UDC se paie le ciné Le nouveau spot de l’UDC fait scandale dans les salles obscures. Cette alliance entre politique et culture interpelle: le cinéma deviendrait-il un nouveau terrain de jeu pour les partis? Il affirme également que «notre jeune génération n’a pas de complexes quant à la nudité» et ne devrait donc pas s’offusquer de ces maillots de bains. En somme, c’est «une publicité urbaine et jeune», dont il vante l’originalité. Avis à tous! La jeunesse d’aujourd’hui est sexiste et nudiste! avant les films pour enfants. Cependant, Pathé défend sa neutralité en diffusant également une publicité du parti socialiste, muette quant à elle. L’UDC prend la parole Kevin Grangier, responsable de la communication au sein du parti, a accepté de répondre à nos questions. Pourquoi le cinéma? Premièrement, la loi suisse interdisant de diffuser des publicités politiques à la télévision, le grand écran est donc une alternative alléchante pour le parti. Deuxièmement, c’est, selon Kevin Grangier, un «moyen efficace de toucher beaucoup de monde», ce qui Stefano Torres Entre 200’000 et 300’000 francs par semaine: c’est le coût de la diffusion d’une publicité dans les cinémas suisses. Ce n’est pas du tout un problème pour l’UDC, qui diffuse son spot sur les écrans pendant plusieurs semaines, et ça dans presque tous les cinémas suisses, à part certains réfractaires, comme le Capitole à Lausanne. Après les affichages agressifs lors des campagnes ou les toutménages, ce nouveau média s’ajoute à l’arsenal déjà bien fourni du parti démocrate du centre. Ressortant la question de l’adhésion à l’Europe, le parti des «valeurs» de la Suisse frappe fort sur le ton habituel de la provocation. Des femmes bavant Les Suissesses votent UDC. Ou pas. devant un corps d’Apollon, les clichés en somme, sont au rendez-vous. Mails, téléphones, visite sur place: tous ces moyens n’ont pas suffi à obtenir une entrevue avec un des responsables Pathé, lesquels ne semblent pas très disposés à répondre à nos questions. Un silence peut-être dû au mécontentement des spectateurs-trices qui se plaignent par mail ou directement aux caisses: «C’est scandaleux de diffuser une pub aussi dégradante pour la femme dans un cinéma», s’est-on confié à nos reporters. Pathé réagit à ces plaintes en retirant la projection de cette publicité assouvit le désir de visibilité de l’UDC. Il affirme que cette publicité «vise un autre public», soit l’électorat féminin. Le responsable de la communication explique que «l’UDC compte une majorité de voix masculines» et voudrait également «fidéliser un électorat jeune». Notons que l’on peut raisonnablement douter du succès de l’entreprise, toute femme n’appréciant certainement pas d’être, par un tel biais, rattachée à l’UDC. Cependant Kevin Grangier affirme, «cette publicité n’est pas dégradante pour la femme puisque c’est l’homme sur lequel on fait un gros plan». Une réponse à l’UDC Célia Burnand, étudiante à l’UNIL, a lancé le projet original d’une contrepub: «Spot Pas UDC». L’idée de la parodie lui est venue après avoir vu le spot et les réactions dans la salle, elle ajoute que celui-ci est «totalement déplacé dans une salle de cinéma, outre les raisons politiques». Elle monte alors la publicité avec des amie-s sans aucun soutien financier: «On a dû dépenser 30 francs», rit-elle. Les raisons de cette initiative sont claires, Célia Burnand veut exprimer son mécontentement quant à la place que prend ce parti politique dans le domaine public, qui est «exagérément grande». Elle veut également souligner l’utilisation de la femme pour laquelle «ce parti n’est en rien favorable». Elle donne les exemples de l’égalité homme-femme non respectée par l’UDC et rapelle «qu’en 1971, ils ne voulaient pas que la femme puisse voter». En général, la publicité a été encouragée (environ 80% aiment la vidéo, contre 20%), on compte 54’247 vues sur YouTube, à ce jour. Le fait que le parti cherche à accaparer les votes féminins représente un paradoxe avec sa politique sexiste. Si les membres du parti semblent se réjouir de ce spot, ce n’est pas le cas du public vaudois. On constate que l’UDC a perdu sept sièges à ce stade des élections. Auraient-ils poussé la provocation trop loin? • 12 Serviette débilesproof La serviette européenne de l’UDC a été commercialisée. Dans quel but? Face à la publicité de l’UDC «Les Suissesses votent UDC», on a pu assister à de nombreuses réactions, dont une qui ne manque pas de sarcasme et d’humour. En effet, M. Patrick Tharin a décidé de commercialiser la serviette de l’Union européenne. Selon lui, ce serait un moyen de «faire fuir les idiotes à la plage». On peut aussi voir sur son site internet une série d’e-mails adressée à l’UDC, dans lesquels il demandait d’abord où trouver la fameuse serviette avant de la commercialiser lui-même. On y trouve notamment un courriel adressé à Tony Brunner, où il écrit: «Malgré toutes mes démarches je n’arrive pas à obtenir la fameuse serviette antidébiles.» Plus loin, «je vous demande expressément de répondre à ma requête de sorte que je puisse entamer les démarches au plus vite et ainsi me joindre à vos futurs meetings muni de la précieuse serviette». «Faire fuir les idiotes à la plage» Est-ce une simple stratégie commerciale de sa part ou un outil de provocation face à l’UDC? Nous trouvons une explication en visitant son site internet, où l’on rencontre une association nommée «ASING», acronyme d’«Association pour une Suisse Interculturelle, Noble et Généreuse». Cette association prône une Suisse ouverte aux autres cultures, respectueuse des droits humains et prenant en compte la précarité des plus démunis. Pensez-y à la plage! (http://www.asing.ch/) • Marlyse Debergh Chloé Brechbuehl, Sarah Imsand NOVEMBRE 2011 13 Obama: héroïsé puis déchu Trois ans après l’arrivée en Messie d’Obama à la présidence des Etats-Unis, le bilan est bien plus que mitigé. Retour sur des espérances déçues par l’ampleur de la mission. Tous les espoirs de voir naître une nouvelle Amérique reposaient sur ses épaules. Un défi colossal, voire surhumain. Au programme de Barack Obama: réconcilier les Etats-Unis avec le monde arabo-musulman, œuvrer pour la paix et les droits de l’homme, valoriser les minorités, réformer le système de santé et promouvoir l’écologie, le tout dans le but de redresser le fiasco des années Bush. Bref, un rêve de révolution auquel le monde entier a voulu croire, l’espoir véhiculé par l’obamania envoûtant suffisamment pour masquer des obstacles indéniables. Les promesses d’agir, relayées par un charismatique «Yes we can!», n’ont fait que renforcer la déception. Aux trois quarts de son mandat, le bilan n’est pas rose. Le président semble bien avoir cédé à la real politic, dont il a fait passer les intérêts avant ses convictions personnelles évoquées en campagne électorale. L’ère Bush a laissé des traces De ce fait, Obama déçoit le monde musulman, certes séduit par le IGOR PARATT Un Messie qui déçoit Le principal retournement de veste du démocrate concerne le conflit israélo-palestinien. Le 23 septembre 2010, après plusieurs injonctions propalestiniennes, il envisageait, à l’ONU, la création d’un Etat palestinien pour l’année suivante. Belles paroles: aujourd’hui, c’est nettement la cause sioniste qu’il soutient, en prévoyant notamment d’opposer son droit de veto à la demande d’indépendance palestinienne. Le vote de la diaspora juive est ainsi plus assuré que la paix au Proche-Orient; l’ère Bush a laissé des traces. Obama réussit sa politque de santé, mais pour 2014... Il est par contre un engagement tenu qu’il convient d’évoquer: la réforme du système de santé. Malgré l’opposition dans un premier temps de plusieurs instances gouvernantes, le Président a obtenu, le 8 septembre dernier, l’acceptation de son plan de réforme visant à universaliser l’accès aux assurances de santé même pour les citoyen-ne-s les plus démunis. Ce projet de loi avait tout d’abord été jugé contraire à la Constitution, notamment par la cour d’appel fédérale de Géorgie. Ce n’est donc pas avant 2014 que la couverture de santé sera à la portée de tout Américain-e, et encore, si l’on écoute les scénarios optimistes. La raison à cela est que de nombreux conservateurs-trices estiment que l’assurance-maladie n’est pas un dû mais une prestation à acquérir par le travail, c’est-à-dire grâce à un capital économique conséquent. • A.G. fameux discours de tolérance du Caire, mais qui voit, dans les faits, la continuation de l’occupation en Afghanistan. En Amérique comme à l’étranger, l’islam se sent négligé, ce qui n’était pas annoncé dans les éloquents speechs.La question des droits de l’homme n’est également pas réglée. Leur reconnaissance complète est encore devancée par les intérêts de la Nation. La fermeture du centre de détention de Guantánamo ne semble plus si impérative qu’elle ne l’était en tant que promesse électorale. Idem pour le retrait des troupes d’Afghanistan, alors que celles d’Irak devraient finalement sortir du bourbier fin 2011. Dans la très critiquée armée américaine, rien n’a changé (ou presque) depuis Bush. De même, la course au profit est toujours la norme, et l’écologie reste une option. Mais Obama n’est «que» le président d’une démocratie où les pouvoirs, bien séparés, se régulent et s’opposent pour le meilleur et pour le pire. Et le Messie, quant à lui, ne souffrait pas d’oppositions de ses apôtres. • Alicia Gaudard pub NOLWENN Parlons peu, parlons clair. Tél. 0901 777 177 (Fr. 3.15/min depuis une ligne fixe) Consultation voyance FAE NOVEMBRE 2011 14 Elections à l’Assemblée des délégué-e-s La disparition de la liste Alternative étudiante n’a pas empêché la gauche, représentée par la liste Gauche étudiante, de maintenir sa majorité malgré une progression du Centre-Droit Universitaire. A l’heure des élections fédérales, votre faîtière a aussi renouvelé son législatif: l’assemblée des déléguée-s (AD). Une moitié de celle-ci est composée de représentant-e-s des associations d’étudiant-e-s de faculté, élu-e-s à l’intérieur de ces associations, et l’autre moitié d’étudiant-e-s affilié-e-s à des listes électorales, élu-e-s par le corps électoral, c’est-à-dire tou-te-s les étudiant-e-s du campus. Cette manière de faire permet à des étudiant-e-s non affiliée-s à des associations d’avoir un rôle central dans le fonctionnement de la FAE. Chaque association a droit à 1 siège plus 1 autre siège par tranche de 1000 étudiant-e-s inscrit-e-s dans la faculté concernée. Il y a donc 23 sièges pour les associations et le même nombre de sièges est réservé aux listes politisées. Résultats de cette année A la suite de la disparition de l’Alternative étudiante, qui constituait la formation la plus à gauche de l’échiquier, deux listes politisées se sont affrontées: le Centre-Droit Universitaire (CDU) et la Gauche Etudiante (GE), déjà présentes les années précédentes. La GE obtient une victoire relativement large avec 15 sièges: 63.96% des suffrages cette année, contre 45,04% lors des dernières élections. Même si elle a su capter une part importante des voix de l’Alternative étudiante – qui avait obtenu 22,52% en 2010 –, on observe un recul de la gauche en général. Le CDU obtient 8 sièges, comme l’année passée. Mentionnons que si le nombre de sièges du CDU ne change pas, leur score est cette année de 36.04% contre 32,4% l’année passée, soit une progression de presque 4 points. Une encourageante augmentation de la participation A première vue, un taux de participation de 8,79% peut sembler ridiculement bas. Toutefois, l’augmentation de la participation d’un peu plus de deux points par rapport à l’année passée (6,67% pour 2010-2011) est réjouissante. Par ailleurs, à partir de cette année et suite au changement du règlement des élections, les listes politisées vont avoir la possibilité de se faire connaître des étudiant-e- s tout au long de l’année académique. Pour mémoire, la période que les listes avaient à disposition pour se faire connaître était limitée à deux semaines les précédentes années. Gageons que ce changement, qui devrait être accompagné d’autres mesures, permettra de sensibiliser la communauté étudiante au travail politique de la FAE et, partant, d’augmenter la participation à l’élection des délégué-e-s ! La FAE tient à remercier tou-te-s les candidat-e-s. La nouvelle Assemblée des délégué-e-s s’est réunie pour la première le 9 novembre 2011. • Julien Bocquet Les confessions d’un ancien de la FAE Désormais officiellement candidat au Conseil fédéral, Pierre-Yves Maillard a commencé sa carrière il y a environ vingt-cinq ans en tant que secrétaire général à la FAE. Lors de sa présentation, il est revenu sur son engagement, sur le fonctionnement de l’université à la fin des années 80 et sur les combats menés par la faîtière. Si l’université a changé, il est frappant de constater à quel point les combats restent d’actualité. Un huis clos dirigé par les profs Le portrait de l’université dressé par le conseiller d’Etat est celui d’une institution gérée par les professeure-s, sans représentation du corps intermédiaire ni des étudiant-e-s mis à part dans des commissions tripartites dont le rôle était purement consultatif. Cette situation a changé en 1993, lorsque le Grand Conseil a accepté la participation étudiante aux conseils de faculté. Avant cela, les étudiant-e-s devaient se faire entendre autrement, notamment au sujet des nominations de professeure-s. D’autres pratiques, qui semblent évidentes maintenant, étaient tout simplement impensables il y a quelques années. Il était par exemple impossible d’organiser des débats politiques à Dorigny. L’implication importante des étudiant-e-s dans la vie institutionnelle du campus a certainement joué un rôle important dans l’avènement de ces changements. Les années passent, les combats restent La démocratisation touche d’autres domaines également. Travailler en vue d’octrois plus aisés de bourses d’études, pour le logement étudiant ainsi que pour une diminution des taxes d’études fait partie de ce processus et, de toute évidence, ces combats ne datent pas d’hier. En effet, lorsque M. Maillard énumère les principaux dossiers sur lesquels il a dû travailler, ce sont ces sujets qui sont cités et ils sont toujours au centre des activités de la FAE. Ces derniers temps, votre faîtière a par exemple largement contribué au lancement d’une initiative pour une harmonisation des bourses d’études et créé la Fondation solidarité logement étudiant. Des résultats concrets qui prouvent l’importance de l’engagement étudiant. Que peut-on tirer de cette expérience pour l’engagement actuel? Si de nombreux et importants progrès ont eu lieu dans certains domaines, il serait plus que dommage de Peter Mosimann Dans le cadre des élections à l’Assemblée des délégué-e-s, la FAE a invité Pierre-Yves Maillard, qui a parlé de son expérience de secrétaire général de la FAE. s’arrêter en si bon chemin. L’ouverture de l’alma mater sur le reste de la société doit aller au-delà de la simple perméabilité aux débats politiques: elle doit également prendre forme à travers un accès aux études qui ne soit plus déterminé du tout par les origines sociales des personnes. • Julien Bocquet NOVEMBRE 2011 15 C’est encore loin, l’égalité? La FAE décortique la pub Du 2 au 9 novembre, la communauté universitaire avait la possibilité de visiter l’exposition de la Journée égalité. Celle-ci avait pour but d’expliquer et de dénoncer les mécanismes du sexisme dans la publicité. Le porno chic ou comment une pub peut imposer un canon de beauté et une torture Le ridicule et le choc Les hommes qui ont posé pour ces photos sont ridicules, soit. Mais alors, pourquoi une femme réduite au rôle d’étagère-présentoir à dents blanches ne serait pas ridicule, elle? En toute logique, les réactions devraient être les mêmes pour les deux sexes lorsqu’ils sont montrés de la sorte. Pourtant, ce n’est pas le cas, et ces publicités continuent de tourner en boucle depuis des années. Peut-être cela a-t-il quelque chose à voir avec la perception du ridicule: n’est ridicule que ce qui sort du cadre, des normes, des habitudes. Faut-il comprendre, dans ce cas, qu’une image de femmepotiche-lessiveuse est normale, habituelle, et que cette même image devient ridicule – donc, d’une certaine manière, choquante – lorsqu’un homme y occupe la place centrale? Dans ce cas, certain-e-s de nos amie-s publicitaires, qui présentent pourtant leur travail comme quelque chose de créatif, voire d’artistique, ne seraient que des vulgaires propagandistes, participant activement à la reproduction des stéréotypes. Ou peut-être ne font-ils qu’obéir aux instructions de leurs partenaires commerciaux et employeurs. Mais là n’est pas la question. Une curieuse contradiction pointe à présent à l’horizon. D’un côté, choquer en montrant des personnes qui ne correspondent pas aux normes fait fuir. D’un autre, les publicités doivent être suffisamment choquantes pour attirer l’attention. En regardant les photos exposées dans le cadre de la Journée égalité, une réponse se dessine: il faut toujours caresser dans le sens du poil, le choc n’étant que l’augmentation de la pression exercée par la main. Pour le dire plus clairement, si, dans une société, les femmes sont réduites à leur seule chair, il n’est pas choquant de montrer leur corps, quel que soit le but, puisque ce n’est de toute façon qu’un support. Le choc est provoqué par une utilisation un peu plus ou beaucoup plus appuyée que d’habitude de leur physique. Petit à petit, les corps se dénudent, les formes explosent (de manière ciblée) ou disparaissent et, lorsque cela ne suffit plus, c’est par un travail plus Dr Dans un article publié dans M-Magazine (No 9, septembre 2010), Mme Nina Scheu relate les péripéties vécues par Mme Nora Cista, une étudiante en art et design de la Haute Ecole de Lucerne. Cette dernière a fait une chose pourtant simple – encore fallait-il y penser – en demandant à des amis (hommes) de remplacer le mannequin (femme…) dans une pub pour des produits lessives. Les hommes qui se sont prêtés au jeu ont dû adopter les pauses ridicules auxquelles les grandes marques de produits lessives, entre autres, essaient de nous habituer depuis plusieurs décennies. Les réactions des camarades d’études de Nora Cista sont saisissantes: ils/elles lui ont reproché d’avoir humilié les hommes… «recherché» de l’expression, de la position, des références et du contexte que l’on parvient à créer ce choc, cette surprise. Cerise sur le gâteau de la contradiction, les extrêmes d’hier devenant la norme d’aujourd’hui, le résultat obtenu est souvent l’apathie, l’indifférence. Le matraquage fonctionne et annihile la capacité de se révolter, de s’émanciper, persuadant les un-e-s de la fatalité de la situation et renforçant la domination des autres. Cela fonctionne tellement bien que des marques célèbres peuvent se permettre de montrer des scènes d’une extrême violence, comme des viols collectifs, sans pour autant être massivement boycottées. Les mots tuent «On utilise le corps de la femme parce qu’il est beau et que les gens aiment regarder cela», se justifie le directeur d’une agence de pub dans un article du 20minutes (3.11.11), au sujet de l’utilisation des femmes dans la publicité. Cette phrase, d’apparence banale, est en fait d’une violence inouïe. «LE corps de LA femme est beau»… Ainsi, la norme est posée: il y a un éternel féminin et cet éternel n’a qu’un seul corps. Que faut-il en déduire? Que tout ce qui ne ressemble pas à cet idéal n’est pas femme? Que la beauté n’est qu’image et n’a qu’une forme? En quelques mots, l’individu est vidé de tout ce qu’elle a d’intime, de tout ce qui fait son unicité. Il est nié et, par sa négation, contribue à l’effacement des autres individualités, forcées de se comparer à un modèle, dont le processus d’invention est masqué. La fin de la citation est également saisissante: «les gens aiment regarder cela». Sommet du populisme, celui/ celle qui impose aux autres sa vision du monde prétend savoir ce que le monde veut. La méthode est connue, elle n’en est pas moins dévastatrice. Là aussi, l’Autre n’existe pas. Il n’est qu’une partie négligeable d’un groupe indistinct aux désirs évidents, uniformes et généralement vulgaires. L’égalité par le nivellement Si ce sont, le plus souvent, des corps de femmes qui sont exploités à des fins publicitaires – les plus sceptiques n’ont qu’à regarder les affiches des soirées placardées sur les murs de notre alma mater –, les hommes, depuis quelques années, ont également la chance de jouer les rôles passionnants de fantasmes, paquets de muscles ou objets sexuels, entre autres. Cela montre bien l’immense difficulté de la lutte pour l’égalité des sexes. Celle-ci a pour buts l’émancipation, la liberté et la dignité de toutes et tous. Au lieu de cela, elle semble se faire par le bas: nous n’assistons pas à la disparition de l’utilisation commerciales des corps féminin mais à une généralisation de cette pratique aux deux sexes. Peut-être parce que l’égalité ne peut pas être morcelée: elle est entière ou elle n’est rien. • Julien Bocquet FAE NOVEMBRE 2011 16 Le CHUV change Dans le cadre de la réforme MEDUNIL, le Conseil d’Etat a demandé à plusieurs parties prenantes, dont la FAE, leur avis sur les changements proposés. Le Rapport à l’attention du Conseil d’Etat au sujet de la réforme MEDUNIL rappelle les buts de cette dernière: l’amélioration et la simplification de l’organisation et du processus de décision ainsi que le maintien du contrôle politique, entre autres. Ce projet se fixe également pour objectif de réunir sous une même gouvernance prestations de soins et de services, la formation et la recherche, les sciences fondamentales et les sciences cliniques. Précisons que cette future institution serait divisée en deux entités dépendantes: MEDUNIL-UNIL et MEDUNIL-CHUV. Pour répondre le mieux possible aux questions de la consultation, le Bureau de la FAE a collaboré avec les deux associations les plus concernées par le sujet – l’Association des étudiant-e-s en biologie et l’Association des étudiant-e-s en médecine – mais aussi avec des associations d’assistant-e-s. Si tout le monde n’était pas forcément d’accord sur la forme, un terrain d’entente a été assez facilement trouvé pour ce qui est des principaux reproches que l’on peut adresser à MEDUNIL. Qui décidera? Le projet, en l’état actuel, propose que la nouvelle institution soit dirigée par un-e président-e, désigné-e par le Conseil d’Etat, et deux vice-président-e-s proposé-e-s par ce/cette président-e. Si la FAE comprend cette proposition, nous estimons qu’une élection, qui laisserait aux autres parties prenantes la possibilité d’exprimer leurs préférences, serait plus pertinente. D’ailleurs, il nous semble que ce problème est assez général et que la structure proposée par MEDUNIL n’offre pas toutes les garanties qui permettraient un contrôle partagé des décisions. Du côté de MEDUNILUNIL, un rôle consultatif pour le Conseil académique proposé est insuffisant, et la FAE souhaiterait que tous les corps y soient représentés. L’équivalent d’un Conseil académique avec rôle décisionnel devrait exister également dans la «demi-structure» MEDUNIL-CHUV. En outre, nous proposons que ces deux instances se réunissent, à la manière de l’Assemblée fédérale, au moment du vote du budget et lorsque certaines décisions stratégiques touchent l’ensemble de la structure. En plus de ces questions organisationnelles, la FAE craint que la recherche fondamentale et que la diversité des enseignements pâtissent de la réforme. Le risque existe en effet que les domaines «rentables» prennent petit à petit le dessus sur les autres, ce qui aurait un effet délétère sur la formation offerte par l’Université de Lausanne. • Julien Bocquet Mais que fait la FAE? 155e AD de l’UNES à Bâle Le week-end du 18 au 20 novembre 2011, la 155e Assemblée des délégué-e-s de l’Union des étudiant-e-s de Suisse (UNES) aura lieu à Bâle. Cette assemblée, qui constitue l’organe législatif de l’UNES, réunira les représentant-e-s étudiant-e-s de toute la Suisse. La délégation de la FAE, soit 6 étudiant-e-s de l’UNIL, devra se prononcer sur de nombreux sujets. Un papier sur la marchandisation des études sera notamment discuté et voté. Il s’agira également, pour toutes les sections de Suisse, de se mettre d’accord sur le budget de leur faîtière. De plus, cette assemblée sera l’occasion de discuter du cadre général que l’UNES adoptera dans les prochaines années, afin d’agir sur des dossiers importants, tels que l’accès aux études, les taxes universitaires et le numerus clausus. • C.G. Récoltes pour l’initiative: c’est terminé Du changement à la FAE Après plus d’un an passé à récolter des signatures pour l’initiative sur l’harmonisation des bourses d’études, cette phase est terminée pour la FAE et l’UNES! La suite du projet consiste maintenant à procéder à l’homologation de ces signatures. Il s’agira ensuite d’amener le projet sur la scène politique et de commencer la campagne afin de le défendre. Cette initiative fédérale, si elle est acceptée par le peuple, permettra d’harmoniser le système des bourses d’études en Suisse, et de le rendre ainsi équitable pour tou-te-s les étudiant-e-s. Parce que la formation doit être un droit, et non un privilège des plus aisé-e-s, la Fédération des associations d’étudiant-e-s de l’UNIL est très fière d’avoir mené à bien ce projet et remercie toutes les personnes qui l’ont aidée. • Il y a quelques semaines, la FAE a mis au concours le poste de secrétaire administratif et comptable, suite au départ de Funda Seker. La FAE a reçu beaucoup de dossiers de candidatures, et après des heures d’entretiens et de réflexion, c’est finalement Pierre-Alain Blanc qui a été retenu. Il a fait son entrée au secrétariat de la FAE le 17 octobre. Bienvenue ! Ce n’est pas sans tristesse que le Bureau a laissé filer Funda vers l’horizon studieux de la fin du master. Funda, dont les compétences professionnelles et humaines ne sont plus à démontrer, a été bien plus qu’une secrétaire administrative et comptable ; très vite, elle est devenue un pilier central du Bureau, une amie. Le Bureau lui souhaite un avenir radieux et la remercie pour son excellent travail pour la FAE. • C.G. M.G. Don du sang La FAE et Ma Vie Ton Sang! organisent, les 6, 7 et 8 décembre prochain, le don du sang à l’Anthropole à l’Amphipôle. Il est de notoriété publique que les réserves de sang en Suisse sont très basses et, en période hivernale, ces réserves tendent à s’amenuiser encore. Les patient-e-s de nos hôpitaux souffrent de ce manque, et nombre de décès pourraient être évités si plus de personnes donnaient leur sang. Savezvous qu’un-e polytraumatisé-e de la route (du type accident de la circulation) peut avoir besoin de 80 poches de sang pour être maintenu-e en vie? Dès lors, la FAE ne peut qu’encourager les membres de la communauté universitaire à donner un peu de leur sang lors de ces 3 jours. Une magnifique collation sera gracieusement offerte aux donneurs/euses par la FAE. • M.G. NOVEMBRE 2011 17 Elle court, elle court la rumeur au sein de l’AGEPoly Agenda Sur le terrain polytechnique, une petite bulle médiatique a éclaté autour de son association faîtière. Compte rendu. - 30.11.11: Hell’s Kitchen (CH, Blues trash) + Chapel Hill (FR, Blues/ americana) - 05.12.11: Jam session - 15-16-17.12.11: Café-théâtre - 21.12.11: The National Fanfare of Kadebostany pour le Comité de direction de l’AGEPoly, qui ne souhaite plus «communiquer sur le document», selon son PV du 30 octobre. Finalement, tout cela n’est peut-être qu’une tempête dans un verre d’eau. D’après les PV du Comité de direction, il y a effectivement eu en ce début de semestre des divergences de plus en plus marquées entre l’auteur et les autres membres, probablement amplifiées dans le document. Mais dans la gestion de cette crise, l’AGEPoly s’est aussi beaucoup souciée de son image, en envisageant d’abord de porter plainte pour diffamation contre la radio universitaire avant de se raviser et d’aller s’expliquer directement avec elle, qui s’est par ailleurs excusée d’avoir publié ce document sans en avoir vérifié les sources. Une solution plus avisée, car sa crédibilité passe avant tout par ses actions pour les étudiants et non son image. • Alice Chau Le mouton du mois La photo du mois Alicia Gaudard Plus d’infos sur: http://sat.epfl.ch/ Emilie Martini Le 20 octobre 2011, Fréquence Banane publie la lettre ouverte du responsable Informatique et Logistique de l’AGEPoly démissionaire, qui dénonce notamment des manipulations comptables et falsifications et disparitions de PV. La presse régionale accourt et l’association se retrouve au milieu d’accusations plus ou moins graves. Suite à une facture de mobilier contestée, l’AGEPoly demande une nouvelle vérification de ses comptes par une fiduciaire lors de son assemblée générale du 25 octobre. Sur la base de ce document officiel, elle dément toute manipulation. Quant aux autres accusations, il s’agirait d’attaques personnelles et de règlements de comptes à l’interne. La question est close Sat Amnesty a construit le 12 novembre dernier une baraque de bidonville devant la bibliothèque universitaire. Une façon de sensibiliser les étudiants aux destructions des quartiers pauvres du Nigeria. Les militant-e-s estiment que l’obtention d’un toit, même précaire est un droit fondamental des êtres humains. La section d’Amnesty des Hautes écoles lausannoises se lance pour la première fois dans une démonstration aussi forte. On continue notre aventure moutonnesque avec Aphrodite. Voici l’histoire vraie d’une rescapée... Bottens, il y a 11 ou 12 ans, notre cher berger s’occupe de son troupeau, lorsqu’il voit une voiture avec une bétaillère s’arrêter. Un vendeur à l’accent fribourgeois en sort. Il cherche apparemment à se débarrasser d’une brebis et ses deux petits. La mère parait bien maigre, mais selon le vendeur «C’est parce qu’elle a beaucoup de lait, donc». Mais la vérité est plus triste, la pauvre brebis est infestée de vers, elle mourra dans les semaines suivantes. Aphrodite survit, elle, et gambade maintenant, à presque 12 ans, dans les prés de Dorigny. E.M. Zelig Ciné-Club Nanarenkilt, le 09.12.11 La flamme lausannoise du nanar brûle dans toute sa splendeur. Viens voir des ninjas en qualité VHS, écouter des doubleurs mous du genou, entrer dans l’esprit torturé d’un réalisateur et tout cela en profitant de pauses bien arrosées. Au programme, dès 19h : 2 x 45 minutes d’extraits et 1h30 de film dans une superbe salle, avec vue sur la route cantonale. Entrée 10.- Frequence Banane - Banane Rose le mardi de 22h30 à minuit - Iron Banane pour les fans de métal en alternance avec Pop Corn (émissions 100% cinéma), un lundi sur deux de 20h à 22h - Métronome le vendredi de 21h à minuit - Micropolis lu à ve de 18h à 19h - Les émissions genevoises Macropolis lu à ve de 19h à 20h - Café Kawa lu à ve de 7h à 8h Programme complet sur www.frequencebanane.ch Horoscope SSP: Mercure est dans sa deuxième maison, et vous, vous êtes en train de mourir sous la charge de travail que vous envoie Mars. Et les profs. Lettres: Tout va bien, les astres sont avec toi. EPFL: Jupiter, planète des contrats vous envoie un 2e rolex learning center. Attention toutefois aux gémeaux qui cherchent aussi à jouer en LAN. HEC: Saturne vous réserve une place pour le prochain cours si vous êtes gentils. On ne le paie pas, lui. - 24.11.11: Finger Tanzen + Demon-D (Electro-balkanique + Dubsteb/ Drum’n’Bass) - 01.12.11: Hannibal Slim + Captain Boogie +Rocket Wheels (Rock’n’Roll, Blues, Country) - 08.12.11: Djangologie (Jazz Manouche) - 15.12.11: DJ Ismash et DJ Kama (Dub, Dubstep, RaggaJungie, Reggae) - 21.12.11: Soirée de L’auditoire - 22.12.11: VIDAGE DE FUTS Programme complet sur www.zelig.ch CAMPUS NOVEMBRE 2011 18 Imprimantes à l’Unil: quel coût écologique? Depuis la rentrée, le service PrintUNIL a subi de grands bouleversements. Exit les vieilles imprimantes instables et place à du neuf. Leur nombre est passé de 8 à 20 et elles proposent de nouvelles fonctions telles que l’impression depuis un ordinateur portable ou encore la numérisation des documents. Aujourd’hui, le nouveau service «PrintUNIL 4» semble être un succès auprès des étudiant-e-s. Mais en favorisant toujours plus l’impression, n’y a-t-il pas trop de papier utilisé? L’efficacité avant tout Entre le 20 septembre et le 31 octobre de cette année, on peut noter plus de 1,7 millions d’impressions et copies. «Parmi le total, 88,5% des feuilles ont été utilisées en recto verso», se réjouit Vincent Demaurex, responsable du service aux étudiant-e-s au Ci. L’informatique, très présente dans les études actuellement, engendre de nouveaux défis: «Nous avons observé un glissement de l’utilisation traditionnelle du tableau noir à celle des documents sur des plates-formes comme MyUnil. Le rôle du Ci et de PrintUNIL est avant tout d’accompagner le changement et proposer un service aux étudiants adéquat», affirme Vincent Demaurex. Une adaptation à la demande croissante, en somme. Il rappelle également que l’Unil et l’EPFL sont les universités de Suisse romande les plus généreuses quant à l’octroi de crédits d’impression. Quid de la qualité du papier, recyclé ou pas? Il existe deux types de papier recyclé pouvant être utilisé pour les imprimantes, explique Vincent Demaurex, mais tous deux posent problème et ne sont par conséquent pas employés. Le premier papier, de couleur grise, tend à produire de la poussière, en raison des fibres brisées qui le composent, et provoque des bourrages d’imprimantes. Son utilisation créerait à nouveau des problèmes de pannes et de files d’attente déjà souvent décriés. Le deuxième type est le papier recyclé blanc qui, lui, a subi de Ismaël Tall Alors que l’écologie est au centre de bien des préoccupations, L’auditoire s’interroge sur le nombre et la qualité des feuilles utilisées par les imprimantes publiques de l’Unil. Mais au-delà des considérations environnementales, le Centre informatique (Ci) cherche avant tout à servir au mieux les étudiant-e-s. En un mois, toutes les imprimantes de l’Unil ont généré un million et demi de copies numérisation. Sachant que 80% des étudiant-e-s ont un ordinateur portable, l’avenir semble se diriger vers le tout-numérique. Ce qui peut soulever d’autres problématiques écologiques, comme l’utilisation excessive Vers la dématérialisation d’électricité notamment. Le débat Lutter pour une moins importante utilisation de papier chez les étudiant- est ouvert. • e-s doit passer par un changement de comportement; le Ci, en sa quaIsmaël Tall lité de prestataire, n’a pas de réel pouvoir en la matière. Un premier geste serait d’employer au mieux la Pour plus d’infos: http://www.unil.ch/ci/page32140.html nombreux traitements. Est-il alors vraiment plus écologique? Pour ces raisons, des feuilles de première production ont été préférées. Cindy N’da L’Unil a ses cheerleaders La team de cheerleaders de Dorigny est en pleine expansion. Et elles comptent bien venir à bout des clichés. «Essayez de rester concentrée, à un mètre du sol en équilibre, tous muscles tendus, le tout en souriant. Vous verrez si c’est facile.» Dans une salle de gymnastique lausannoise, la trentaine de cheerleaders, en tenue complète et en plein entraînement, se prépare pour le championnat suisse de «cheerdance» avec, à la clé, un séjour à Orlando. «On n’a pas le niveau des Américaines, mais on y travaille. C’est bien plus qu’un cliché. On pratique une combinaison de sports, et ça peut tourner mal. Imaginez une chute d’un mètre sur un parterre de filles.» Inès Stettler, étudiante en HEC et membre fondatrice des cheerleaders, n’en démord pas. Le cheerleading semble effectivement à la mode en Suisse. Rien qu’en Suisse romande, les filles de Dorigny voient apparaître deux nouvelles équipes concurrentes chaque année. La jeune équipe accuse cette année une soudaine évolution de leurs effectifs. Leurs arguments ? Les paillettes, l’ambiance des matchs, la compétition… et le lien avec l’équipe de football américain de l’université. «Mais on lutte tous les jours contre le cliché de la fille stupide qui agite des pompons au bord du terrain», conclut la coach, Gallia Vullo.» Les ordres sont en anglais, et la discipline est de fer. Une application toute helvétique du rêve américain. «C’est clair que le rêve américain entre en ligne de compte et attire une partie des cheerleaders, selon Inès Stettler. Mais ce qu’on fait ici ne ressemble pas aux films. Là-bas, le cheerleading fait partie du cursus et est obligatoire. Nous, on fait ça volontairement, en plus des cours.» • Erwan Le Bec NOVEMBRE 2011 19 Le cool dans tous ses états Dans les chaleureux locaux de l’Extranef s’est tenu, ces 1er et 2 novembre, le premier «Cooloque» de l’hisoire: un colloque expérimental se proposant d’interroger la notion du «cool», non pas comme instrument langagié exprimant son contentement, mais bien comme une propriété sociale et esthétique. Autre particularité de cet événement, outre un sujet novateur et peu étudié dans le champ académique, le fait que l’impulsion et l’organisation découlent d’étudiant-e-s exclusivement, avec bien entendu le soutien des universités concernées de près ou de loin, ainsi que quelques associations estudiantines motivées à soutenir une telle ambition. C’est ainsi qu’une bande d’amis a mené son projet à bien, proposant pas moins de neuf interventions mobilisant des perspectives aussi bien philosophiques que de sciences sociales afin de tenter d’explorer cette notion a priori insaisissable qu’est le «cool». L’interdisciplinarité comme mot d’ordre Pas sérieux-euses s’abstenir, il ne s’agissait pas là de délirer dans le vide, mais bien de proposer autant des approches générales que des études de cas plus précis, mobilisant des auteur-e-s pour une analyse réfléchie. Ainsi avons-nous exploré la force contraignante du cool comme facteur de distinction, voire même comme outil de pouvoir à travers des terrains aussi variés que la figure du dandy du XIXe siècle ou que son rôle économique dans le système capitaliste. Cinq questions cool aux organisateurs Comment est né le projet? Constant Bonard: A travers mes voyages et mes rencontres, j’ai perçu la possibilité de donner un certain universalisme à la notion de «cool». Ensuite, avec Benjamin Neeser, nous avons écrit un article publié dans iPhilo, un journal édité par les étudiant-e-s en philosophie de l’Univesité de Genève faisant une ébauche d’une théorie du cool. J’ai ensuite envoyé le papier à quelques amis, le texte appelant à intervenir sur cette question. Ils ont répondu à l’appel et voilà comment est née l’idée d’un «cooloque» mobilisant plusieurs perspectives. Etes-vous satisfaits du soutien apporté par les universités et autres associations pour le projet? Colin Pahlisch: Beaucoup. Ils ont vraiment joué le jeu, tant l’AEL, l’AESSP et la FAE que les instances universitaires en nous aidant financièrement. Après, il est peut-être dommage que peu de personnes de ces associations ou du corps professoral n’aient participé à l’exercice. Toutefois, on peut compter sur leur soutien, ils savent reconnaître quand il y a du sérieux dans l’organisation. Si l’on peut regretter le peu d’écho qu’a eu ce colloque auprès du corps professoral, celui-ci a eu cependant l’avantage de proposer aux étudiante-s lambdas un cadre décontracté facilitant la prise de parole, exercice pas toujours facile lors de conférences où la dominance professorale fait poindre la timidité. De plus, avec des objets d’étude comme le «hipster» ou le cool dans les films post-apocalyptiques, chacun-e pouvait trouver un terrain de détente favorisant la discussion. Bref, une ambiance cool loin des débats austères, où la discussion se résume plutôt à la foire d’empoigne. Un bel exercice qui sera sans nul doute renouvelé, et qui donnera lieu à une publication léchée. Le vernissage est pour bientôt, êtes-vous assez cool pour cela? • Dr Début novembre, vous avez peut-être remarqué un alien dans l’agenda de l’Unil, colloque étrange tant par son sujet que par sa forme: un «cooloque» organisé entièrement par des étudiants1. Notre curiosité a été piquée... !"#!$%&'$#('%$!)*+!%,-#$'+#(*.,+!$*!/0$01'2'*!3#+!).!4#$-#-*! 03'25$*!3%.,!4#!+'&34*!,#'+%$!6.7'4!+7#-'(!*824.+'9*&*$(!)7:%&&*+ Stépanie Monay Un colloque organisé par des étudiants seuls, c’est une première ? Antoine Tille: A ma connaissance, oui, surtout qu’aucun d’entre nous ne fait vraiment partie d’une association d’étudiant-e-s et que l’on axait nos interventions sur la discussion surtout. Avec Colin Pahlisch, on fait partie des RATS, une association veveysanne qui organise des événements culturels, donc on avait tout de même l’expérience pour monter un projet et ça s’est révélé même plus simple que de monter une exposition. Le prochain défi, c’est de faire venir des gens de l’extérieur, ce qui impliquera de nouvelles difficultés. Mais voilà, on apprend tous à le faire. Quel est votre bilan? Pierre Raboud: Je tire un excellent bilan de ces deux journées qui ont démontré qu’on pouvait, avec de la motivation et de l’auto-organisation, produire des discussions vivantes et intéressantes, à l’opposé de l’académisme parfois froid et ennuyeux qui caractérise les conférences universitaires habituelles. On avait également un bon niveau intellectuel, avec une bonne cohérence et des pistes de réflexion. En tout, on a eu une bonne centaine d’étudiant-e-s de l’Unil, UniGe et des écoles d’art, et même de Milan! Et surtout, les personnes présentes ont contribué à la discussion, et ce même en dehors des conférences. Et pour la suite? Julien Gremaud: On va essayer de donner une plus-value quant à la trace qu’on va laisser. On a trouvé intéressant d’avoir une réflexivité de par les moyens de communication qui sont d’abord «cool» mais qui reprennent des schémas peu coûteux adaptés à notre condition. Le problème est que le colloque se tenait en semaine, ce qui exclut beaucoup de participant-e-s. On souhaite donc élargir la réflexion en produisant un bel objet, à travers la publication des actes du «cooloque» avec des illustrations originales. • S.M. CAMPUS NOVEMBRE 2011 20 Le marathon de Lausanne, cette grande aventure… Cette année, les organisateurs du marathon de Lausanne peuvent à nouveau se targuer d’avoir battu le record du nombre de participants. Le 30 octobre dernier, ce sont quelque 11’806 mordus du bitume qui ont pris le départ de la course. Maxime Beney, qui fait actuellement son master à l’Université de Lausanne, en sciences du sport, est un des 4787 coureurs à avoir choisi de s’aligner sur le semi-marathon. En terminant sa course en 1h12’23’’, synonyme de 27e rang, il réalise une performance de choix. Suite à son effort, il analyse essoufflé sa performance. «Je n’ai pas de temps référence car c’est le premier semi que je fais. Au début c’était dur parce que je suis parti un peu trop fort en suivant les favoris africains sur 2-3 kilomètres. J’ai dû ensuite réajuster mon rythme.» Son temps canon surprend même un de ses amis à l’arrivée. «Alors t’as fait combien? Quoi? 1h12’? Nom de bleu…» Quand on sait qu’un athlète moyen boucle son semi-marathon en 1h40’, cela a effectivement de quoi impressionner. Un habitué des pelotons La performance, voilà un mot qui n’est pas inconnu du vocabulaire de Maxime. L’athlète veveysan de 27 ans est en effet un habitué du monde de la compétition. Il a fait toutes ses classes de sportif d’endurance dans l’univers de la petite reine, avec comme point d’orgue un titre de champion suisse M23 en 2006. Depuis, passablement d’eau a coulé sous les ponts, et le champion de vélo a décidé de changer de direction. «La course à pied est le sport le plus naturel, il est simple. Tu prends une paire de baskets et tu peux le pratiquer.» Dernièrement, il a usé ses chaussures de course à MoratFribourg, au Tour du pays de Vaud ainsi que sur le Tour du Chablais, récoltant au passage de nombreuses places d’honneur. Mais la course à pied n’est pas son but final. A l’avenir, Maxime pense effectivement consacrer plus de temps au triathlon. En attendant, il s’entraîne sur les courses de la région. Bien que le tracé de la course soit quelques fois monotone, avec ses allures d’autoroute pour fourmis, le pub spectacle est lui au rendez-vous. «Il y a tout le temps des orchestres près des villages. Ces groupes te motivent à courir et ça met la bonne ambiance. Les gens qui prennent l’apéro au bord de la route c’est aussi motivant.» La ferveur des spectateurs participe ainsi certainement au succès du marathon lausannois, tout comme le fait de courir en groupe en rajoute au phénomène. «Finalement on peut dire qu’on court avec les autres coureurs et pas forcément contre. On est dans la même galère, on souffre ensemble.» Pourquoi tant d’efforts? Dans l’aire d’arrivée du semi-marathon, jugée sur le quai d’Ouchy juste devant le Musée olympique, il est surprenant de voir le nombre d’ambulanciers, de brancards et chaises de secours qui sont prévues. A croire que les organisateurs auraient distribué aux coureurs quelques grenades ou munitions avant le départ afin de pimenter la course. Et pourtant, rien de cela. La douleur est cependant perceptible sur chaque visage. Mais pourquoi tant de souffrances? «Sans cette souffrance, tu progresses moins, explique Maxime, tout dépend des jours, il y en a où ça va très bien et d’autres où tu te demandes quand même qu’est-ce que tu fous là». C’est d’ailleurs certainement ce qu’a dû se demander un athlète italien, engagé lui sur le marathon. Durant la course, ce malheureux a semblé vouloir réinterpréter l’histoire du petit poucet, laissant derrière lui des mouchoirs en papier sur une bonne partie du tracé. Le verdict à l’arrivée? «Dysenteria». Une sale histoire… • Joël Regli NOVEMBRE 2011 21 Entre filature et flânerie, Jean Rolin poursuit son oeuvre Sous couvert d’un livre-gag, l’écrivain français Jean Rolin bouleverse les codes avec son dernier roman, habilement pensé et très accompli. Dans son précédent livre, Un chien mort après lui, Jean Rolin nous confiait son attirance pour Britney Spears. En toute logique, il publie cette rentrée un roman autour de la star (Le ravissement de Britney Spears, P.O.L, 2011). Car c’est bien de cercles dont il est question, autant dans la trajectoire effective que dans le dédale des informations. Il suffit pour s’en rendre compte de regarder les transitions entre les chapitres. Pas de continuité simple. A chaque fois, le narrateur-héros pose des problèmes nouveaux, en rejoue des anciens, et il convient au/à la lecteur-trice de s’abstraire pour donner un sens, une direction, à tout ce matériau romanesque. L’alternance entre les scènes rapportées du Los Angeles people et la situation du héros en exil au Tadjikistan donne une profondeur au dispositif, la figure du/de la lecteurtrice étant dédoublée par le personnage de Shotemur, avec des effets d’écarts et de mise en abîme. La narration est d’une grande originalité. Rolin disperse les données essentielles du récit et les perd dans le magma du texte, comme pour mieux restituer cette expérience tout à fait singulière et propre à l’écrivain, entre la filature et la flânerie. De quelle Britney Spears s’agit-il? De Britney Spears en réalité, Rolin n’obtiendra que des aperçus fugitifs («une masse informe de cheveux blonds», son visage fatigué dans l’ouverture d’une portière), et les pages web qu’il consultera ne pourront que plus amèrement lui faire sentir, par le contraste entre leur aberrante profusion et leur désespérante pauvreté, l’évanescence profonde de la star. Le charme s’estompe au profit de Lindsay Lohan, puis se rompt à l’arrivée de Wendy, sosie de Britney mais égérie bien réelle. Comment en ressort Jean Rolin? La phrase de Rolin s’allonge, se complexifie. Digressive par nature, elle tend à un vertige du langage, à ces instants d’équilibre absolu où l’inessentiel le dispute au piquant. Thibaudet parlait de l’irréalisme engendré par le style proustien. La notion acquiert une pertinence nouvelle à notre époque, et Rolin en use très efficacement. Après s’être efforcé de constituer un personnage romanesque à partir d’un personnage historique (le maréchal Ney dans La clôture), Rolin poursuit son œuvre en nous prouvant que rien, pas même l’éphémère, ne résiste à la fiction. Ainsi le biographique apparaît comme un succédané du fictionnel, entreprise à laquelle s’attèlent d’autres écrivains en ce moment. Mais il faudrait pour traiter cela un autre article. • Samuel Estier Dans le froid, personne ne vous entend crier !"#$"%&#'%&(!)'%*"%+*&'',-."%/"%012#%3&!("#$"!4% !"#$%&'"/56&!-."%7%#1.8"&.%/&#'%*"'%'&**"'%16'+.!"'%'1.'%*&%/,!"+$,1#%/"%9&$$2,:'%8&#%;",:#,#<"#%0!=% >"$1.!%'.!%*"'%1!,<,#"'%/.%?@$2"%"$%&.$1(',"%/"%*&%6A$"= Si cela fait plus d’un demi-siècle qu’un extraterrestre plutôt belliqueux terrorise l’arctique (ou l’antarctique selon les adaptations) au cinéma, il naît en réalité en 1938, sous la plume de John W. Campbell. L’écrivain publie alors la nouvelle Who Goes There?, narrant les péripéties d’un groupe de scientifiques isolé aux prises avec une monstrueuse créature polymorphe dotée d’un sérieux don pour l’imitation. Grosso modo, cette trame narrative sera reprise par toutes les adaptations cinématographiques, le film de Carpenter étant, pour sa part, le plus fidèle au matériau d’origine. Il faut attendre 1951 pour voir la nouvelle transposée pour la première fois à l’écran, avec The Thing From Another World. Réalisé par Christian Nyby, mais officieusement attribué au grand Howard Hawks, le film est un classique de la science-fiction américaine. S’il n’est pas question ici de transformations organiques peu ragoûtantes, l’extraterrestre n’en est que plus dangereux car implicitement communiste (comme tout personnage ne possédant pas de green card à cette époque). Un film dantesque En 1982, voulant rendre hommage aux films de son enfance, Big John réalise le remake de The Thing From Another World, tout en suivant à la ligne la nouvelle de Campbell. Considéré comme la pièce maîtresse de la carrière du réalisateur, The Thing est un monument d’angoisse, un huis clos paranoïaque et désespéré exécuté de main de maître. Véritable apocalypse du genre humain, annonçant la désillusion et l’individualisme forcené des 80’s, le film est de plus soutenu par les stupéfiants effets spéciaux à l’ancienne de Rob Bottin, donnant aux apparitions de la Chose une puissance évocatrice et malsaine à toute épreuve. Ajoutez à cela la prestation mythique de Kurt Russell et une B.O signée Ennio Morricone, et vous comprendrez aisément la place de chef-d’oeuvre inégalé que prend The Thing dans le cœur de tout cinéphile. Inégalé, vraiment? Et la nouvelle version, alors? Circulez, y’a rien à voir «Si nous n’avez rien à améliorer à l’original, inutile de faire un remake», annonçaient les producteurs. Nous voilà donc en présence d’un prequel (très à la mode, ça) du film de 1982, s’intéressant à la fameuse équipe norvégienne à l’origine de la découverte de l’extraterrestre. Autant le dire tout de suite, en lieu et place de prequel, le terme plagiat serait ici plus approprié. On assiste donc à une série B paresseuse pompant ouvertement les meilleurs scènes de l’original, et qui justifie sporadiquement sa nature de prequel en y insérant des éléments de raccord grossiers (en cela, la fin est un cas d’école). Les apparitions de la Chose? Une bouillie numérique qui, au mieux, rappelle l’adaptation vidéoludique de The Thing sortie en 2002. Et pour l’analyse thématique, inutile de dire qu’on repassera. Bref, une seule chose à faire: revoir l’original! • Loïc Gebhard CULTURE NOVEMBRE 2011 22 La Grange a 20 ans: donnons chair à nos savoirs! Pour sa 20e programmation, le théâtre universitaire ouvre ses portes à de nouvelles collaborations et nous propose une saison réjouissante et riche en échanges. Conçue comme une vitrine culturelle de l’université sur la ville, la Grange de Dorigny parvient aujourd’hui à réaliser une pleine collaboration avec un grand nombre de facultés, de chercheurs-euses et de spécialistes. Grâce à son emplacement et au bon vouloir de ses directrices, ce théâtre fonctionne comme une plate-forme d’échanges entre projets artistiques et projets de recherche. Une soirée débat est organisée sur la base d’une mise en scène de Valentin Rossier, une exposition de photos d’Olivier Roller proposée dans le cadre d’un colloque sur le visage trouve son prolongement au foyer de la Grange, une réflexion entre chercheurs-euses et artistes autour du thème de la guerre permet l’élaboration d’une œuvre originale et accomplie. Tout cela offre donc à divers univers la possibilité de s’enrichir mutuellement en se communiquant de nouvelles idées et de nouveaux moyens. Une salle à part au cœur de la Romandie Dans le paysage culturel romand, la Grange de Dorigny fait figure d’exception. Alors que les temps sont durs pour toute création scénique (la faute notamment à la révision de la loi sur l’assurance chômage passée en 2010), il est rassurant de savoir que notre théâtre reste soutenu par l’université. Cela dit, si la Grange ellemême n’est pas concernée par ces révisions, les troupes qu’elle accueille le sont. En outre, toute production doit obtenir son propre budget afin de subvenir aux besoins des comédien-ne-s, technicien-ne-s du spectacle et metteurs-euses en scène. Le théâtre a donc besoin de ses spectateurs-trices. Mais il n’est pas mort pour autant et il a encore beaucoup de choses à nous apprendre, comme l’affirme Marika Buffat, codirectrice de la Grange avec Dominique Hauser. «Les spectateurs et nous-mêmes restons fascinés par un art unique, vivant, qui se passe sous nos yeux.» Ainsi, même dans un monde qui tend à se virtualiser, le concret que nous trouvons dans une salle de spectacle continue à nous parler, à nous charmer et à nous en apprendre sur nous-mêmes. Une 20e saison étoffée Comme le précise Dominique Hauser, la deuxième partie de la saison est marquée par les 20 ans du théâtre, qui, pour l’occasion, ouvre ses portes à huit spectacles dont six se verront portés sur la scène de «la Tour Vagabonde» (théâtre élisabéthain). Nous verrons également le projet de Jean-Michel Potiron (Qu’est-ce que la guerre?) atteindre son aboutissement dans une pièce qu’il nous présentera au mois de mars. Le tout dans la bonne humeur et accompagné d’ateliers, de discussions et d’une exposition pour que le plaisir dure plus longtemps. • Mathilde Zbaeren Infos: www.grangededorigny.ch Cabanon: et vous, préférez-vous Jimi Hendrix ou les pyramides? Les amateurs-trices de skate auront sûrement remarqué la mise en place d’une rampe au rez-de-chaussée de l’Anthropole. Transformation de l’Unil en lieu de glisse? Meeting sportif? Eh non, il s’agit d’une installation de Thomas Koenig, artiste de la région, qui expose jusqu’au 23 décembre une série d’œuvres exclusivement prévues pour l’espace d’art contemporain du Cabanon. Sous le titre intrigant Qu’est-ce qui est mieux: Jimi Hendrix ou les pyramides?, l’artiste propose de mêler deux cultures rarement en contact: le street art et le monde académique. C’est chose faite en introduisant dans l’université des objets appartenant au monde de la rue. Des objets détournés Si la technique du dessin numérisé est à plusieurs reprises utilisée par Céline Brichet Avec sa nouvelle exposition, Thomas Koenig s’approprie le Cabanon; l’occasion de découvrir le monde décalé de ce jeune artiste veveysan pour qui tout peut se transformer en art. Thomas Koenig devant la rampe-panneau d’affichage Thomas Koenig dans son exposition, il aime aussi toucher à d’autres sortes de matériaux: le linoléum, par exemple, qui plaît à l’artiste, car il évoque chez chacun des interprétations et des souvenirs personnels, ce que souligne Koenig: «Il y a toujours quelqu’un pour me dire qu’il apprécie ces œuvres parce que le lino lui rappelle celui qui est dans le carnotzet de son oncle.» Thomas Koenig détourne aussi des objets du quotidien, la fameuse rampe de skate en est un bon exemple; rendue impraticable de par sa position verticale, transformée ainsi en bibliothèque et en mur d’affichage pour les associations, elle se fond dans le décor de l’Anthropole. Thomas Koenig souligne encore la complexité d’exposer dans un endroit comme l’Anthropole. En effet, pour réaliser son exposition, il a dû tenir compte de la grandeur du lieu et de la présence d’objets qui lui sont propres. Il note d’ailleurs que «cet espace est spécifique dans sa nature de hall et de passage. On doit le prendre comme il est avec les habitudes de ses usagers.» Pari réussi, puisqu’en visitant l’exposition on ne sait plus vraiment si l’on se trouve encore à l’Unil ou dans l’atelier de l’artiste. Quand le son rencontre l’impression A trois reprises, durant le temps de l’exposition, Thomas Koenig réalise une série d’impressions sur linoléum pendant que Constance Jaermann et Julien Mégroz interprètent un programme musical composé par ce dernier. L’ultime de ces performances ouvertes à toutes et à tous aura lieu le lundi 5 décembre à 18h45. A noter également que le travail de master de Julien Mégroz, Impressions et Sons, réalisé en collaboration avec Thomas Koenig, est diffusé en permanence dans le Cabanon. • Cristina Eberhard Retrouvez l’article complet sur www.auditoire.ch NOVEMBRE 2011 23 Chroniques Deluxe Les Aventures de Tintin: Le secret de la licorne Steven Spielberg Paramount Pictures Là où le verbal atteint ses limites, où il ne sert à plus rien de parler au risque de ne plus rien dire, c’est le corps et sa grammaire qui s’expriment. Mais ce qu’il a à dire est parfois difficile à entendre. Le 29 octobre au BFM de Genève, Pour les enfants d’hier, d’aujourd’hui et de demain, de Pina Bausch, a enthousiasmé son public jusqu’à l’ovation. Sur scène, se sont entrecroisés de multiples tableaux pendant trois heures d’une puissance époustouflante. Le voyage de Pina au pays de l’enfance est ontologique. Il nous ramène aux sources d’un réel débarrassé de ses scories, dans ce qu’il a de plus vrai: le fantasme. Dans un décor dépouillé, d’une Quand la troupe genevoise Helvetic Shakespeare Company, dirigée par Valentin Rossier, adapte la pièce Qui a peur de Virginia Woolf, il y a de l’animation à la Grange de Dorigny! Cette pièce d’Edward Albee présentée pour la première fois à Broadway en 1962 a depuis lors été adaptée à maintes reprises, et pourtant on ne s’en lasse pas. On assiste, impuissant, aux violences d’un couple de quinquagénaires unis par la haine, qui se livre à des jeux malsains et qui met ses jeunes invités très mal à l’aise. Martha est une femme de caractère, mangeuse d’hommes sans merci. Elle est mariée à un professeur d’histoire du nom de George, qui cache sous ses airs soumis une intelligence meurtrière. Leurs invités sont un jeune couple fraîchement marié: l’homme s’appelle Nick, c’est un biologiste aux cheveux gominés et au caractère opportuniste. Sa femme Honey est niaise, voire carrément sotte. Le temps d’une nuit, toutes leurs certitudes et tous leurs rêves sont balayés par cette scène de ménage délirante. Spielberg a réalisé le rêve de nombreux fans de la célèbre bande dessinée: une réelle adaptation cinématographique des péripéties de Tintin. Original par son histoire issue du mélange de plusieurs volumes, le film se démarque surtout pour son visuel saisissant Dès les premières GUIDE VIGOUSSE No1, L’UDC EN 7 LEÇONS, Petit manuel à l’usage des citoyens, David Laufer (dir.) Bon, O.K., l’UDC, on en a marre. Leurs affiches sont partout, ils lancent des initiatives à tout-va, provoquent des scandales, prennent de la place dans les journaux, bref, le paysage politique suisse ne semble dominer que par leurs actions. Alors pourquoi se ruer sur ce nouvel ouvrage? Premièrement car c’est un guide Vigousse, LE journal satirique romand. Celui qui nous offre une bouffée d’air dans un monde médiatique un peu trop normalisé. Concrètement, on rit toutes les deux pages sur des thèmes pour lesquels il faudrait peut-être pleurer, et ça fait du bien. Deuxièmement, parce que la recette est presque parfaite. Des textes pertinents, clairs, des interventions de journalistes, chercheursblancheur immatérielle, duo, solo ou euses et professeur-e-s, tout cela ensemble se déploient. Ce parsemé de jeux et exercices hilafoisonnement perpétuel explore rants qui pourraient mettre en diverses pistes qui se croisent, se déroute n’importe lequel des grands répondent et se répètent. C’est ténors de la communication de certainement une erreur que de l’UDC. Petit bémol pourtant, chercher la clarté narrative, il faut Vigousse nous a habitués à des dess’abandonner. C’est alors qu’apparaît sins plus cinglants. la précision magistralement tenue Bref, à l’issue de cette lecture, l’endes corps. C’est de cette tension vie d’insulter les membres de ce entre maîtrise et abondance de sens parti disparaît totalement (enfin, que naît la magie du questionnement presque, faut pas exagérer), remplaperpétuel de Pina Bausch. cée par la contemplation d’un groupe Le final, douloureux dans son d’individus plus pathétiques les uns exécution et envoûtant de puissance, que les autres. On dit que le ridicule déchaîne les dernières forces. Puis ne tue pas, je l’espère (ou pas) pour ces artistes rompus, saluent et tous les membres du parti «d’opposiploient ces corps qui ont portés si tion» cités dans les articles. • haut la tâche de tant dire. • E.M. B.F. Dr. Qui a peur de Virginia Woolf Helvetic Shakespeare Company Grange de Dorigny Dr. Pina Bausch Pour les enfants d’hier, d’aujourd’hui et de demain secondes, la qualité des animations et la technique irréprochable font mouche. Chaque cheveu de la houpette de Tintin semble avoir reçu une attention particulière. Très expressifs grâce au motion capture, les personnages intègrent un monde vivant et aux couleurs chatoyantes. Mais si la fluidité de l’action est un régal pour les yeux, elle accompagne en revanche un récit d’événements frénétique et épuisant. Fusillades, explosions à foison, crash d’hydravion, combat enflammé entre deux bateaux pirates, courses-poursuites à n’en plus finir… Véritable superhéros, Tintin se mue en Quand l’absurde rencontre la Indiana Jones hyperactif et ne s’offre cruauté, le public est captivé. Sans aucun répit. Cette débauche d’action compter que le tout est couronné d’un humour cynique. Le résultat: un devient alors vite lassante, à l’image du combat final entre deux giganspectacle monstrueusement tesques grues (!), insipide et francheagréable. ment dispensable. En outre, le titre reste un mystère, Le film est un bon divertissement, ce qui n’ôte rien au charme diabomais sa revisite à la sauce américaine lique de la pièce. • lui fait perdre la saveur de la bande dessinée. Plaisant, mais décidément I.T. C.B. too much. • Dr. Dr. Musique, cinéma, littérature, bande dessinée, sites internet... L’auditoire vous propose à chaque numéro de découvrir quelques perles rares. De la culture à consommer sans modération. Chien Méchant Méchant Sondage: Quel président êtes-vous? A l’heure où le G20 se termine, L’auditoire vous propose un petit quiz politique. Quel profil de puissant de la planète vous correspond le plus? Quelle est votre formule secrète pour soigner votre image? *) Ma femme s’en charge. #) Un peu de Botox et le tour est joué. @) Euh... rien. $) Je lance «Yes we can!» Que pensez-vous des Chinois? *) Ils sont en quelque sorte à ma hauteur... $) C’est l’avenir de mon économie! #) Je les aime beaucoup, mais je m’intéresse surtout aux Chinoises. @) Enfin des vrais travailleurs! Pour vous, la famille, c’est: $) Benyamin Netanyahou. *) Des femmes, les meilleurs enfants de la nation et les amis du Fouquet’s. @) C’est pas ma carrière. #) La famiglia, c’est important, mais je préfère la compagnie de jeunes filles (mineures si possible). Quel est votre livre de chevet? *) Napoléon, l’histoire d’un chef. #) L’intégrale de Playboy, disons les images où y’a pas trop de légendes. @) La génétique des particules mononucléaires chez les hétérozygotes atypiquement solides dans les années 20 en Saxe orientale. $) La Bible, le Coran et la Torah, vu que selon certaines sources très renseignées, je suis multi-monothéiste. Quel est votre jeu vidéo préféré? @) Das Legend von Bratwurst. *) Les Sims 3, pour faire dans le virtuel ce que je rate dans ma vie. #) J’hésite entre Mafia 2 et GTA 4. $) Call Of Duty: Modern Warfare. Quel personnage vous inspire? *) Moi-même. @) Immanuel Kant, dont j’admire l’impératif catégorique. #) Benito Mussolini. $) Superman, le grand sauveur universel. Lorsque je me trouve au petit coin: #) A votre avis? *) Je travaille ma gestuelle. $) Je réfléchis à la prochaine pique à l’attention de mon pote Sarko. @) J’ai des dossiers à lire affichés sur la porte de mes toilettes. Je ne sors jamais sans: *) Mes talonnettes et ma femme. @) Mes dossiers pour le prochain G20. $) Ma classe à l’américaine. #) Mes capotes. Si je pouvais faire des études... @) Une éducation prussienne. Ou spartiate. *) Un semestre de droit à Neuilly. #) Relire tout Casanova $) West Point, ou Top Gun. Les vacances idéales, c’est: *) Un petit week-end en amoureux. Avec un jacht de luxe, et la presse. #) Pour moi c’est touours les vacances. @) Pas question de quitter le travail. $) Un petit saut en Afganistan avec les anciens du Viet-Nâm. Vous avez un maximum de *: vous appliquez à merveille la devise du politicien de droite: mes copains d’abord, le peuple ensuite. Ah oui, votre femme est Italienne et fait de la musique insipide. Vous êtes Nicolas «Roi Soleil» Sarkozy. Vous avez un maximum de #: fêtard à outrance, appréciant les petits et grands plaisirs de la vie façon «Bunga Bunga», votre carrière s’est bâtie sur du vent à la sauce napolitaine et vous engagez en fonction du déhanché: sei Berlusconi! Vous avez un maximum de @: vous vous êtes lancé-e dans la politique après de brillantes études polytechniques et continuez à appliquer la rigueur scientifique dans votre quotidien. Car vos dossiers sont vos bébés d’amour! Sie sind Bundeskanzlerin Angela Merkel! Vous avez un maximum de $: annoncé comme le Messie ou Jésus junior, vous avez été élu-e dans l’euphorie populaire. Mais les espoirs que vous soulevez sont bien trop lourds à assumer pour vos petites épaules et votre sourire Colgate. You are Barack Obama, the master of Universe. Vous ne vous reconnaissez pas dans ce test, et en plus votre porte-monnaie est troué? Ne cherchez plus, on a la solution à votre crise d’identité (pas à vos déboires financiers, évidemment): vous menacez de faire tomber l’Europe et amorcez le début de la chute d’économie mondiale, vous êtes la rockstar George Papandréou. Alice Chau, Cristina Eberhard, Alicia Gaudard, Erwan Le Bec, Emilie Martini, Ismaël Tall, Mathilde Zbaeren, Marc Augiey.