Consulter les poésies
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Consulter les poésies
1 -Patins à roulettes Conquérants de l’asphalte Que la vitesse exalte, Nos clefs en bandoulière, Bardés de genouillères, Bruyants météorites Dont les passants s’irritent, Espiègles funambules, Des trottoirs de bitume, Chevaliers de la glisse Qui fait notre délice, Quelquefois il arrive (Malheur à nos gencives) Qu’on ramasse une pelle En trente-six chandelles, Qu’on prenne une bûche Sans avoir vu l’embûche, Qu’on morde la poussière En casquette à visière. Ah ! seconde fatale Où soudain, on s’étale ! Bernard Lorraine 2 2 -La chanson de l’ogre Les p’tits garçons et les p’tit’s filles Faudrait qu’ ça pousse comme des myrtilles Faudrait qu ’ça pousse sur les buissons Les p’tit’s filles et les p’tits garçons A l’automne, on f’rait la cueillette Plus besoin d’ se casser la tête Pas même besoin d’êtr’ jardinier Suffirait d’ remplir son panier Les p’tits, les grands, les grand’s les p’tites j’verserais tout ça dans une marmite j’ les mettrais tous, même les moyens c’ que ça s’rait bien ! c’que ça s’rait bien ! Un peu d’ vanille, un peu d ’cannelle Un p’tit nuag’ de citronnelle Du thym, d’ la menthe, du roudoudou Vous laissez cuire à feu très doux L’hiver paré comme pour un siège J’verrai sans peur tomber la neige Mes bocaux s’raient bien rangés Bien rangés dans mon gard’ manger Mes p’tits copains, mes p’tit’s copines, J’vous étalerais sur mes tartines J’dirais : merci, merci, mon Dieu Les p’tits enfants, j’connais rien de mieux Auteur inconnu 3 La prisonnière Plaignez la pauvre prisonnière Au fond de son cachot maudit ! Sans feu, sans coussin, sans lumière…. Ah ! Maman me l’avait bien dit ! Il fallait aller chez grand-mère Sans m’amuser au bois joli, Sans parler comme une commère Avec l’inconnu trop poli. Ma promenade buissonnière Ne m’a pas réussi du tout : Maintenant je suis prisonnière Dans le grand ventre noir du loup. Je suis seule, sans allumette, Chaperon rouge bien puni Je n’ai plus qu’un bout de galette, Et mon petit de beurre est fini ! Jacques Charpentreau 4 Le rêve de la lune Si la lune brille Quand tu dors, C’est pour planter Des milliers de soleils pour demain. Si tout devient silence Quand tu dors, C’est pour préparer Le chant des milliers d’oiseaux Et dorer les ailes des libellules. Si la lune tombe dans tes bras Quand tu dors, C’est pour rêver avec toi Des milliers d’étoiles Marie BOTTURI 5 Pétronille Je suis une petite fille Mais je mets des pantalons. J’ai beau m’appeler Pétronille J’aime mieux être un garçon Quand la crémière M’interpelle « bonjour ma petite Demoiselle » Exprès je lui réponds : « bonjour, M’sieur Potiron. » Quand le boucher s’écrie : « Qu’est-ce que veut aujourd’hui Ma petite escalope ? » Je fronce les sourcils Et je lui dis : « Du persil, Mademoiselle Pénélope. » Ça crée la confusion. J’ai beaucoup de caractère, Beaucoup de formation Et sous mes petits airs Se cache un grand garçon. Je n’aime pas les filles Aux réflexes sanguins Moites sous les charmilles Et pâles dans les trains. Quand on est un garçon On siffle dans ses doigts On est Ali baba On grimpe sur les toits. On s’en va sur les mers Où y’a plein de moutons On vole dans les airs Avec les électrons. Et devant ces exploits Tout l’monde reste baba. « Non maman, pas ma robe, Je veux mon pantalon Ma ceinture de cuir, Mon colt, mes munitions : Je vais faire un hold-up A Plessis Robinson. René de Obaldia 6 Conseils donnés par une sorcière Retenez-vous de rire dans le petit matin ! N'écoutez pas les arbres qui gardent le chemin ! Ne dites votre nom à la terre endormie qu'après minuit sonné ! A la neige, à la pluie ne tendez pas la main ! N'ouvrez votre fenêtre qu'aux petites planètes que vous connaissez bien ! Confidence pour confidence : vous qui venez me consulter, méfiance, méfiance ! On ne sait pas ce qui peut arriver. 5 Jean Tardieu 7 LA CIGALE ET LA FOURMI La cigale ayant chanté Tout l’été, Se trouva fort dépourvue Quand la bise fut venue. Pas un seul petit morceau De mouche ou de vermisseau. Elle alla crier famine Chez la fourmi sa voisine, La priant de lui prêter Quelque grain pour subsister Jusqu’à la saison nouvelle. « je vous paierai, lui dit-elle, Avant l’août, foi d’animal, Intérêt et principal » La fourmi n’est pas prêteuse ; C’est là son moindre défaut. « Que faisiez-vous au temps chaud ? Dit-elle à son emprunteuse. -nuit et jour à tout venant je chantais, ne vous en déplaise. -Vous chantiez ?j’en suis fort aise Eh bien ! Dansez maintenant. » Jean de la Fontaine 8 Ma famille est formidable Ma famille est formidable : Quand maman quitte la table Elle s’envole dans les airs Pour faire la course aux éclairs ! Ma famille est formidable : Papa a l’air d’un comptable, Mais c’est un super héros Avec des chaussures turbo ! Ma famille est formidable : Mon grand frère est imbattable Il arrive rien qu’en sifflant A renverser quinze éléphants ! Ma famille est formidable : Mon grand-père a des érables Qu’il soulève d’un orteil Pour se curer les oreilles Ma famille est formidable : Et si vous m’appelez « minable » Prenez bien garde à vos dents Si ma famille vous entend ! Claire Poutiers 9 Demain, dès l’aube…. Demain dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. J’irai par la forêt, j’irai par la montagne, Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées, Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit, Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour moi sera comme ma nuit. Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe, Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. Victor Hugo 10 Automne Odeur des pluies de mon enfance Derniers soleils de la saison ! A sept ans comme il faisait bon Après d’interminables vacances, Se retrouver dans sa maison ! La vieille classe de mon père, Pleine de guêpes écrasées, Sentait l’encre, le bois, la craie Et ces merveilleuses poussières Amassées par tout un été. O temps charmant des brumes douces Des gibiers, des longs vols d’oiseaux, Le vent souffle sous le préau Mais je tiens entre paume et pouce Une rouge pomme à couteau. René-Guy Cadou 11 Chanson d’automne Les sanglots longs Des violons De l’automne Blessent mon cœur D’une langueur Monotone Tout suffocant Et blême, quand Sonne l’heure, Je me souviens Des jours anciens Et je pleure ; Et je m’en vais Au vent mauvais Qui m’emporte Deçà, delà, Pareil à la Feuille morte. Paul Verlaine 12 Matin d’octobre C’est l’heure exquise et matinale Que rougit un soleil soudain. A travers la brume automnale Tombent les feuilles du jardin. Leur chute est lente. On peut les suivre Du regard en reconnaissant Le chêne à sa feuille de cuivre L’érable à sa feuille de sang. Les dernières, les plus rouillées, Tombent des branches épouillées ; Mais ce n’est pas l’hiver encor Une blonde lumière arrose La nature, et, dans l’air rose, On croirait qu’il neige de l’or. François Coppée 13 Il était une feuille Il était une feuille avec ses lignes Ligne de vie Ligne de chance Ligne de cœur Il était une branche au bout de la feuille Ligne fourchue signe de vie Signe de chance Signe de cœur Il était un arbre Au bout de la branche Un arbre digne de vie Digne de chance Digne de cœur Cœur gravé, percé, transpercé, Un cœur que nul jamais ne vit. Il était des racines au bout de l‘arbre Racines vignes de vie Vignes de chance Vignes de cœur Au bout des racines il était la terre La terre tout court La terre toute ronde La terre toute seule au travers du ciel La terre. Robert Desnos 14 Le centenaire C’était un arbre centenaire Qui ne comptait plus les années. Il disait : « A quoi bon s’en faire, Je suis mûr pour la cheminée ! Des feuilles, j’en ai bien trop lu, Que pourrais-je savoir de plus, Si je passe un printemps encore Auprès des autres sycomores ? » Alors il a laissé le froid Engourdir lentement ses veines Et mettre à vif toutes ses peines Et clouer ses branches en croix ; Heureux d’aimer, mais las de vivre, Pour la dernière fois Il a fleuri dans le grand bois Des milliers de perles de givre Louis Delorme 15 Le bouleau Chaque nuit, le bouleau Du fond de mon jardin Devient un long bateau Qui descend ou l’Escaut Ou la Meuse ou le Rhin. Il court à l’océan Qu’il traverse en jouant Avec les albatros, Salue Valparaiso, Crie bonjour à Tokyo Et sourit à Formose. Puis, dans le matin rose, Ayant longé le Pôle, Des rades et des môles, Lentement redevient Bouleau de mon jardin. Maurice Carême 16 L’homme de paille Il avait tellement longtemps Semé le grain, coupé la paille, Lié les gerbes de froment, Gelé au froid nu des semailles, Brûlé au soleil saoul de l’août Il avait tellement longtemps Battu le blé, couru la route Entre les greniers et les champs, Il avait tellement longtemps Reçu la pluie, reçu la grêle, Subi la neige et le grand vent, Germé de chaud, séché de gel, Qu’il était devenu de paille : Belles moustaches de blé lisse, Menton de chaume qui piquaille, Sourcils de mil, barbe en maïs. Claude Roy 17 Je voudrais pas crever… ….. Je voudrais pas mourir Sans qu’on ait inventé Les roses éternelles La journée de deux heures La mer à la montagne La montagne à la mer La fin de la douleur Les journaux en couleur Tous les enfants contents Et tant de trucs encore Qui dorment dans les crânes Des géniaux ingénieurs Des jardiniers joviaux Des soucieux socialistes Des urbains urbanistes Et des pensifs penseurs Tant de choses à voir A voir et à entendre Tant de temps à attendre A chercher dans le noir…. ……. Boris Vian 18 L’avion L’avion a atterri Cet après-midi Sur une page blanche De mon livre ouvert. Il a dessiné de ses huit roues Comme une mèche de cheveux Au beau milieu de la feuille ; Puis lentement s’est rangé, En bas A gauche Près du numéro 36 36 passagers sont descendus ils m’ont parlé en 36 langues, De 36 millions d’enfants Que je ne connaissais pas. Et mon livre traduisait Et mon livre jubilait. Alain Serres 19 L’ordinateur et l’éléphant Parce qu’il perdait la mémoire Un ordinateur alla voir Un éléphant de ses amis. « C’est sûr, je vais perdre ma place, Lui dit-il, viens donc avec moi Puisque jamais ceux de ta race N’oublient rien, tu me souffleras Pour la paie, on s’arrangera. » Ainsi firent les deux compères Mais l’éléphant était vantard Voilà qu’il raconte ses guerres, Le passage du St Bernard Hannibal et Jules César…. Les ingénieurs en font un drame ; Ça n’était pas dans le programme Et l’éléphant et l’ordinateur Tous les deux les voilà chômeurs De morale je ne vois guère A cette histoire, je l’avoue Si vous en trouvez une, vous Portez-la chez le commissaire Au bout d’un an elle est à vous Si personne ne la réclame. Jean Rousselot 20 Je suis un imbécile Dernièrement, J’ai rencontré un monsieur Qui se vantait d’être un imbécile. Il disait : - je suis un imbécile ! - je suis un imbécile ! Je lui ai dit : - Monsieur, c’est vite dit ! Tout le monde peut dire : « Je suis un imbécile ! » Il faut le prouver ! Il m’a dit : - je peux ! Il m’a apporté les preuves de son imbécillité avec tellement d’intelligence et de subtilité que je me demande s’il ne m’a pas pris pour un imbécile ! Raymond Devos 21 Le bonimenteur Bim-boum ! bim-boum ! Venez les enfants, Voir notre spectacle Ebouriffant ! Bim-boum ! bim-boum ! Venez les petits Voir les sapajous Les ouistitis ! Bim-boum ! bim-boum ! Vous applaudirez Les rois du trapèze ! Entrez, entrez ! Bim-boum ! N’hésitez plus : sous notre chapiteau, Vous verrez les jongleurs, les lanceurs de couteaux, Vous verrez l’ours Albert qui fait le grand salto Et le chien Pépito dans sa petite auto ! Bim-boum ! bim-boum ! Venez les pitchouns, Pleurer mais de rire Avec les clowns ! Bim-boum ! bim-boum ! Allons, avancez : Notre grand spectacle Va commencer ! Jean Luc Moreau 22 L’école est fermée L’école est fermée ; Le tableau s’ennuie ; Et les araignées Dit-on, étudient La géométrie Pour améliorer L’étoile des toiles : Toiles d’araignées, Bien évidemment. L’école est fermée ; Les souris s’instruisent, Les papillons lisent, Les pupitres luisent, Ainsi que les bancs. L’école est fermée Mais si l’on écoute Au fond du silence, Les enfants sont là Qui parlent tout bas Et dans la lumière, Des grains de poussière, Ils revivent toute L’année qui passa, Et qui s’en alla…. Georges Jean 23 PONCTUATION -Ce n’est pas pour me vanter, Disait la virgule, Mais, sans mon jeu de pendule, Les mots, tels des somnambules, Ne feraient que se heurter. -C’est possible, dit le point. Mais je règne, moi, Et les grandes majuscules Se moquent toutes de toi Et de ta queue minuscule. -Ne soyez pas ridicules, Dit le point virgule, On vous voit moins que la trace De fourmis sur une glace. Cessez vos conciliabules Ou, tous deux, je vous remplace ! Maurice Carême. 24 FêTeS Pour la fête à Vercingétorix Nous irons à l’Obélisque Pour la fête d’Attila Nous irons Porte des Lilas Pour y manger du chocolat Pour la fête à Clovis Nous pêcherons des écrevisses Pour la Saint Charlemagne Nous irons à la campagne Pour y boire du champagne Pour la fête à Dagobert Nous mettrons des chapeaux verts Pour la fête à Mazarin Nous irons dans les grands magasins Pour la fête à Pasteur Nous remettrons notre pendule à l’heure Pour la fête à Victor Hugo Nous irons au Trocadéro Nous sucerons des berlingots. Bernard Jourdan. 25 HEUREUX QUI COMME ULYSSE… Heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage, Ou comme celui-là, qui conquit la toison, Et puis est retourné, plein d’usage et raison, Vivre entre ses parents le reste de son âge ! Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village Fumer la cheminée, et en quelle saison Reverrai-je le clos, de ma pauvre maison, Qui m’est une province, et beaucoup davantage ? Plus me plait le séjour qu’ont bâti mes aïeux, Que des palais romains le front audacieux, Plus que le marbre dur me plait l’ardoise fine : Plus mon Loire gaulois que le Tibre latin, Plus mon petit Liré, que le mont Palatin Et plus que l’air marin la douceur angevine. Joachim Du Bellay. 26 LE VIEIL HOMME ET LE CHIEN Transparent au regard des passants trop pressés, Un vieil homme est assis, transi et affamé, Sous un porche à l’abri des frimas de janvier. Il implore un sourire, une pièce de monnaie. Passe un chien dans la rue, un chien de pedigree, Une voiture suit, heurte le canidé. Aussitôt extirpés de leurs logis douillets Accourent de partout des bourgeois empressés « Ne le laissez pas là, amenez-le chez moi J’ai une couverture afin qu’il n’ait pas froid ! » Quelques instants après, l’animal est pansé, Dorloté, réchauffé, maintes fois caressé. Au dehors dans la rue le silence est tombé Tout le monde est rentré, a fermé les volets. Sous son porche à l’abri des frimas de janvier Le vieil homme soudain s’est mis à aboyer. Daniel Boy 27 Le loup vexé Un loup sous la pluie Sous la pluie qui mouille Loup sans parapluie Pauvre loup gribouille. Est-ce qu’un loup nage ? Entre chien et loup Sous l’averse en rage Un hurluberloup ? Le loup est vexé Parce qu’on prétend Que par mauvais temps Un loup sous la pluie Sent le chien mouillé. Claude Roy 28 Bien placés, bien choisis….. Bien placés, bien choisis Quelques mots font une poésie Les mots, il suffit qu’on les aime Pour écrire un poème On ne sait pas toujours ce qu’on dit Lorsque naît la poésie Faut ensuite rechercher le thème Pour intituler le poème Mais d’autres fois on pleure on rit En écrivant la poésie Ça a toujours kekchose d’extrême Un poème Raymond Queneau 29 E c o ut e . . . Ecoute les bruits de la nuit Derrière les fenêtres closes. On dirait que c’est peu de choses, Un pas s’en vient, un pas s’enfuit. Le dernier autobus qui passe, Quelqu’un qui chante quelque part Un avion au fond de l’espace, Un voisin qui rentre bien tard. Un chien aboie. Un chat miaule, On entend glisser un vélo. La nuit est pleine de paroles Qui viennent de l’air et de l’eau. Pierre Gamarra 30 MAMAN EST FOLLE Maman est folle On n’y peut rien Mais c’qui nous console C’est qu’elle nous aime bien Quand elle s’envole On lui tient la main Comme un ballon qui vole Au gré du vent qui vient Tais-toi Léopold Surtout ne dis rien Les gens dans leurs cache-cols N’y comprendraient rien Quand maman rigole On oublie qu’on a faim Que c’est l’heure de l’école Qu’on a peur des voisins Elle est notre idole On en a le cœur plein Faut pas qu’on nous la vole Ou qu’on l’emmène au loin Maman est folle On n’y peut rien Mais j’veux pas qu’on la vole Ou qu’on l’emmène au loin William SHELLER 31 C’est quand qu’on va où ? Je me suis chopé 500 lignes « je ne dois pas parler en classe » Ras l’bol de la discipline Y’en a marre, c’est digoulasse ! C’est même pas moi qui parlais Moi, j’répondais à Arthur Qui m’demandait en anglais Comment s’écrit NO FUTURE Si on est puni pour ça Alors je dis « halte à tout » Explique-moi papa C’est quand qu’on va où ? …… L’essentiel à nous apprendre C’est l’amour des livres qui fait Que tu peux voyager dans ta chambre Autour de l’humanité C’est l’amour de son prochain Même si c’est un beau salaud La haine, ça n’apporte rien Et puis elle viendra bien assez tôt Si on nous apprend pas ça Alors je dis « halte à tout » Explique-moi, papa C’est quand qu’on va où ? Renaud SECHAN…… 32 Extrait du livre d’Antoine de Saint Exupéry Le petit prince ….la fleur n’en finissait pas de se préparer à être belle, à l’abri de sa chambre verte. Elle choisissait avec soin ses couleurs. Elle s’habillait lentement, elle ajustait un à un ses pétales. Elle ne voulait pas sortir toute fripée comme les coquelicots. Elle ne voulait apparaître que dans le plein rayonnement de sa beauté. Eh ! Oui. Elle était très coquette ! Sa toilette mystérieuse avait donc duré des jours et des jours. Et puis voici qu’un matin, justement à l’heure du lever du soleil, elle s’était montrée. Et elle qui avait travaillé avec tant de précision, dit en bâillant : « Ah ! je me réveille à peine….Je vous demande pardon….Je suis encore toute décoiffée… » 33 La chanson du roi d’Angleterre C’est le roi d’Angleterre Qui n’avait pas d’amis, Fit le tour de la terre Pour en trouver ici. Fut amoureux de grand-mère Lui donna du souci. Grand-mère a préféré grand-père. « Roi d’Angleterre allez-vous-en d’ici » Mais avant de partir lui dit : « Mon bon roi, Là-bas en Angleterre En souvenir de moi Ne faites plus la guerre. » Et depuis ce temps-là Il n’y a plus de guerre, Depuis ce temps grand-père Est plus heureux qu’un roi. Maurice Fombeure 34 - Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes ! Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux, Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux, Tourbillonner, danser une danse sonore, Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore ! On s'éveillait matin, on se levait joyeux, La lèvre affriandée, en se frottant les yeux... On allait, les cheveux emmêlés sur la tête, Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête, Et les petits pieds nus effleurant le plancher, Aux portes des parents tout doucement toucher... On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise, Les baisers répétés, et la gaieté permise ! - Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes ! Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux, Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux, Tourbillonner, danser une danse sonore, Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore ! On s'éveillait matin, on se levait joyeux, La lèvre affriandée, en se frottant les yeux... On allait, les cheveux emmêlés sur la tête, Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête, Et les petits pieds nus effleurant le plancher, Aux portes des parents tout doucement toucher... On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise, Les baisers répétés, et la gaieté permise ! 35 La pendule Je suis la pendule, tic! Je suis la pendule, tac! On dirait que je mastique Du mastic et des moustiques Quand je sonne et quand je craque Je suis la pendule, tic! Je suis la pendule, tac! J’avance ou bien je recule Tic-tac, je suis la pendule, Je brille quand on m’astique, Je ne suis pas fantastique Mais je connais l’arithmétique, J’ai plus d’un tour dans mon sac, Je suis la pendule, tac! Je suis la pendule, tac! Pierre Gamarra 36 Le Corbeau et le Renard Maître Corbeau, sur un arbre perché, Tenait en son bec un fromage. Maître Renard, par l'odeur alléché, Lui tint à peu près ce langage : "Hé ! Bonjour, Monsieur du Corbeau. Que vous êtes joli ! Que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte à votre plumage, Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois." A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie ; Et pour montrer sa belle voix, Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie. Le renard s'en saisit, et dit : "Mon bon 37 Monsieur, Apprenez que tout flatteur Vit aux dépens de celui qui l'écoute : Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. " Le Corbeau, honteux et confus, Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. Jean de La Fontaine 38 La biche La biche brame au clair de lune Et pleure à se fondre les yeux : Son petit faon délicieux A disparu dans la nuit brune. Pour raconter son infortune A la forêt de ses aïeux, La biche brame au clair de lune Et pleure à se fondre les yeux. Mais aucune réponse, aucune, A ses longs appels anxieux ! Et, le cou tendu vers les cieux, Folle d'amour et de rancune, La biche brame au clair de lune. Maurice Rollinat 39 La rentrée Un oiseau chantonne Un air de Mozart Que le vent d'automne Emporte au hasard. Bernard et Nicole, La main dans la main, Ont pris de l'école Le joli chemin. On voit sous les pommes Crouler les pommiers. Les crayons, les gommes Sortent des plumiers. Le ciel est morose : Il verse des pleurs... Mais Rosa-la-rose Est toujours en fleurs. Jean-Luc Moreau 40 Mon cartable Mon cartable a mille odeurs, mon cartable sent la pomme, le livre, l'encre, la gomme et les crayons de couleurs. Mon cartable sent l'orange, le bison et le nougat, il sent tout ce que l'on mange et ce qu'on ne mange pas. La figue, la mandarine, le papier d'argent ou d'or, et la coquille marine, les bateaux sortants du port. Les cow-boys et les noisettes, la craie et le caramel, les confettis de la fête, les billes remplies de ciel. Les longs cheveux de ma mère et les joues de mon papa, les matins dans la lumière, la rose et le chocolat. Pierre Gamarra 41 A l’école des sorcières… On apprend les mauvaises manières D'abord ne jamais dire pardon Être méchant et polisson S'amuser de la peur des gens Puis détester tous les enfants À l'école des sorcières On joue dehors dans les cimetières D'abord à saute-crapaud Ou bien au jeu des gros mots Puis on s'habille de noir Et l'on ne sort que le soir À l'école des sorcières On retient des formules entières D'abord des mots très rigolos Comme "chilbernique" et "carlingot" Puis de vraies formules magiques Et là il faut que l'on s'applique. Jacqueline Moreau 42 J’ai trempé mon doigt dans la confiture J’ai trempé mon doigt dans la confiture Turelure Ca sentait les abeilles Ca sentait les groseilles Ca sentait le soleil J’ai trempé mon doigt dans la confiture Puis je l’ai sucé Comme on suce les joues de bonne maman Qui n’a plus mal aux dents Et qui parle aux fées Puis je l’ai sucé Sucé Tellement sucé Que je l’ai avalé ! René de Obaldia 43