Consulter les poésies

Transcription

Consulter les poésies
1
-Patins à roulettes
Conquérants de l’asphalte
Que la vitesse exalte,
Nos clefs en bandoulière,
Bardés de genouillères,
Bruyants météorites
Dont les passants s’irritent,
Espiègles funambules,
Des trottoirs de bitume,
Chevaliers de la glisse
Qui fait notre délice,
Quelquefois il arrive
(Malheur à nos gencives)
Qu’on ramasse une pelle
En trente-six chandelles,
Qu’on prenne une bûche
Sans avoir vu l’embûche,
Qu’on morde la poussière
En casquette à visière.
Ah ! seconde fatale
Où soudain, on s’étale !
Bernard Lorraine
2
2 -La chanson de l’ogre
Les p’tits garçons et les p’tit’s filles
Faudrait qu’ ça pousse comme des myrtilles
Faudrait qu ’ça pousse sur les buissons
Les p’tit’s filles et les p’tits garçons
A l’automne, on f’rait la cueillette
Plus besoin d’ se casser la tête
Pas même besoin d’êtr’ jardinier
Suffirait d’ remplir son panier
Les p’tits, les grands, les grand’s les p’tites
j’verserais tout ça dans une marmite
j’ les mettrais tous, même les moyens
c’ que ça s’rait bien ! c’que ça s’rait bien !
Un peu d’ vanille, un peu d ’cannelle
Un p’tit nuag’ de citronnelle
Du thym, d’ la menthe, du roudoudou
Vous laissez cuire à feu très doux
L’hiver paré comme pour un siège
J’verrai sans peur tomber la neige
Mes bocaux s’raient bien rangés
Bien rangés dans mon gard’ manger
Mes p’tits copains, mes p’tit’s copines,
J’vous étalerais sur mes tartines
J’dirais : merci, merci, mon Dieu
Les p’tits enfants, j’connais rien de mieux
Auteur inconnu
3
La prisonnière
Plaignez la pauvre prisonnière
Au fond de son cachot maudit !
Sans feu, sans coussin, sans lumière….
Ah ! Maman me l’avait bien dit !
Il fallait aller chez grand-mère
Sans m’amuser au bois joli,
Sans parler comme une commère
Avec l’inconnu trop poli.
Ma promenade buissonnière
Ne m’a pas réussi du tout :
Maintenant je suis prisonnière
Dans le grand ventre noir du loup.
Je suis seule, sans allumette,
Chaperon rouge bien puni
Je n’ai plus qu’un bout de galette,
Et mon petit de beurre est fini !
Jacques Charpentreau
4
Le rêve de la lune
Si la lune brille
Quand tu dors,
C’est pour planter
Des milliers de soleils pour demain.
Si tout devient silence
Quand tu dors,
C’est pour préparer
Le chant des milliers d’oiseaux
Et dorer les ailes des libellules.
Si la lune tombe dans tes bras
Quand tu dors,
C’est pour rêver avec toi
Des milliers d’étoiles
Marie BOTTURI
5
Pétronille
Je suis une petite fille
Mais je mets des pantalons.
J’ai beau m’appeler Pétronille
J’aime mieux être un garçon
Quand la crémière
M’interpelle
« bonjour ma petite
Demoiselle »
Exprès je lui réponds :
« bonjour, M’sieur Potiron. »
Quand le boucher s’écrie :
« Qu’est-ce que veut aujourd’hui
Ma petite escalope ? »
Je fronce les sourcils
Et je lui dis : « Du persil,
Mademoiselle Pénélope. »
Ça crée la confusion.
J’ai beaucoup de caractère,
Beaucoup de formation
Et sous mes petits airs
Se cache un grand garçon.
Je n’aime pas les filles
Aux réflexes sanguins
Moites sous les charmilles
Et pâles dans les trains.
Quand on est un
garçon
On siffle dans ses
doigts
On est Ali baba
On grimpe sur les toits.
On s’en va sur les mers
Où y’a plein de
moutons
On vole dans les airs
Avec les électrons.
Et devant ces exploits
Tout l’monde reste
baba.
« Non maman, pas ma
robe,
Je veux mon pantalon
Ma ceinture de cuir,
Mon colt, mes
munitions :
Je vais faire un hold-up
A Plessis Robinson.
René de Obaldia
6
Conseils donnés par une sorcière
Retenez-vous de rire
dans le petit matin !
N'écoutez pas les arbres
qui gardent le chemin !
Ne dites votre nom
à la terre endormie
qu'après minuit sonné !
A la neige, à la pluie
ne tendez pas la main !
N'ouvrez votre fenêtre
qu'aux petites planètes
que vous connaissez bien !
Confidence pour confidence :
vous qui venez me consulter,
méfiance, méfiance !
On ne sait pas ce qui peut arriver.
5
Jean Tardieu
7
LA CIGALE ET LA FOURMI
La cigale ayant chanté
Tout l’été,
Se trouva fort dépourvue
Quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau
De mouche ou de vermisseau.
Elle alla crier famine
Chez la fourmi sa voisine,
La priant de lui prêter
Quelque grain pour subsister
Jusqu’à la saison nouvelle.
« je vous paierai, lui dit-elle,
Avant l’août, foi d’animal,
Intérêt et principal »
La fourmi n’est pas prêteuse ;
C’est là son moindre défaut.
« Que faisiez-vous au temps chaud ?
Dit-elle à son emprunteuse.
-nuit et jour à tout venant
je chantais, ne vous en déplaise.
-Vous chantiez ?j’en suis fort aise
Eh bien ! Dansez maintenant. »
Jean de la Fontaine
8
Ma famille est formidable
Ma famille est formidable :
Quand maman quitte la table
Elle s’envole dans les airs
Pour faire la course aux éclairs !
Ma famille est formidable :
Papa a l’air d’un comptable,
Mais c’est un super héros
Avec des chaussures turbo !
Ma famille est formidable :
Mon grand frère est imbattable
Il arrive rien qu’en sifflant
A renverser quinze éléphants !
Ma famille est formidable :
Mon grand-père a des érables
Qu’il soulève d’un orteil
Pour se curer les oreilles
Ma famille est formidable :
Et si vous m’appelez « minable »
Prenez bien garde à vos dents
Si ma famille vous entend !
Claire Poutiers
9
Demain, dès l’aube….
Demain dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne,
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme ma nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
Victor Hugo
10
Automne
Odeur des pluies de mon enfance
Derniers soleils de la saison !
A sept ans comme il faisait bon
Après d’interminables vacances,
Se retrouver dans sa maison !
La vieille classe de mon père,
Pleine de guêpes écrasées,
Sentait l’encre, le bois, la craie
Et ces merveilleuses poussières
Amassées par tout un été.
O temps charmant des brumes douces
Des gibiers, des longs vols d’oiseaux,
Le vent souffle sous le préau
Mais je tiens entre paume et pouce
Une rouge pomme à couteau.
René-Guy Cadou
11
Chanson d’automne
Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure ;
Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Paul Verlaine
12
Matin d’octobre
C’est l’heure exquise et matinale
Que rougit un soleil soudain.
A travers la brume automnale
Tombent les feuilles du jardin.
Leur chute est lente. On peut les suivre
Du regard en reconnaissant
Le chêne à sa feuille de cuivre
L’érable à sa feuille de sang.
Les dernières, les plus rouillées,
Tombent des branches épouillées ;
Mais ce n’est pas l’hiver encor
Une blonde lumière arrose
La nature, et, dans l’air rose,
On croirait qu’il neige de l’or.
François Coppée
13
Il était une feuille
Il était une feuille avec ses lignes
Ligne de vie
Ligne de chance
Ligne de cœur
Il était une branche au bout de la feuille
Ligne fourchue signe de vie
Signe de chance
Signe de cœur
Il était un arbre
Au bout de la branche
Un arbre digne de vie
Digne de chance
Digne de cœur
Cœur gravé, percé, transpercé,
Un cœur que nul jamais ne vit.
Il était des racines au bout de l‘arbre
Racines vignes de vie
Vignes de chance
Vignes de cœur
Au bout des racines il était la terre
La terre tout court
La terre toute ronde
La terre toute seule au travers du ciel
La terre.
Robert Desnos
14
Le centenaire
C’était un arbre centenaire
Qui ne comptait plus les années.
Il disait : « A quoi bon s’en faire,
Je suis mûr pour la cheminée !
Des feuilles, j’en ai bien trop lu,
Que pourrais-je savoir de plus,
Si je passe un printemps encore
Auprès des autres sycomores ? »
Alors il a laissé le froid
Engourdir lentement ses veines
Et mettre à vif toutes ses peines
Et clouer ses branches en croix ;
Heureux d’aimer, mais las de
vivre,
Pour la dernière fois
Il a fleuri dans le grand bois
Des milliers de perles de givre
Louis Delorme
15
Le bouleau
Chaque nuit, le bouleau
Du fond de mon jardin
Devient un long bateau
Qui descend ou l’Escaut
Ou la Meuse ou le Rhin.
Il court à l’océan
Qu’il traverse en jouant
Avec les albatros,
Salue Valparaiso,
Crie bonjour à Tokyo
Et sourit à Formose.
Puis, dans le matin rose,
Ayant longé le Pôle,
Des rades et des môles,
Lentement redevient
Bouleau de mon jardin.
Maurice Carême
16
L’homme de paille
Il avait tellement longtemps
Semé le grain, coupé la paille,
Lié les gerbes de froment,
Gelé au froid nu des semailles,
Brûlé au soleil saoul de l’août
Il avait tellement longtemps
Battu le blé, couru la route
Entre les greniers et les champs,
Il avait tellement longtemps
Reçu la pluie, reçu la grêle,
Subi la neige et le grand vent,
Germé de chaud, séché de gel,
Qu’il était devenu de paille :
Belles moustaches de blé lisse,
Menton de chaume qui piquaille,
Sourcils de mil, barbe en maïs.
Claude Roy
17
Je voudrais pas crever…
…..
Je voudrais pas mourir
Sans qu’on ait inventé
Les roses éternelles
La journée de deux heures
La mer à la montagne
La montagne à la mer
La fin de la douleur
Les journaux en couleur
Tous les enfants contents
Et tant de trucs encore
Qui dorment dans les crânes
Des géniaux ingénieurs
Des jardiniers joviaux
Des soucieux socialistes
Des urbains urbanistes
Et des pensifs penseurs
Tant de choses à voir
A voir et à entendre
Tant de temps à attendre
A chercher dans le noir….
…….
Boris Vian
18
L’avion
L’avion a atterri
Cet après-midi
Sur une page blanche
De mon livre ouvert.
Il a dessiné de ses huit roues
Comme une mèche de cheveux
Au beau milieu de la feuille ;
Puis lentement s’est rangé,
En bas
A gauche
Près du numéro 36
36 passagers sont descendus
ils m’ont parlé en 36 langues,
De 36 millions d’enfants
Que je ne connaissais pas.
Et mon livre traduisait
Et mon livre jubilait.
Alain Serres
19
L’ordinateur et l’éléphant
Parce qu’il perdait la mémoire
Un ordinateur alla voir
Un éléphant de ses amis.
« C’est sûr, je vais perdre ma place,
Lui dit-il, viens donc avec moi
Puisque jamais ceux de ta race
N’oublient rien, tu me souffleras
Pour la paie, on s’arrangera. »
Ainsi firent les deux compères
Mais l’éléphant était vantard
Voilà qu’il raconte ses guerres,
Le passage du St Bernard
Hannibal et Jules César….
Les ingénieurs en font un drame ;
Ça n’était pas dans le programme
Et l’éléphant et l’ordinateur
Tous les deux les voilà chômeurs
De morale je ne vois guère
A cette histoire, je l’avoue
Si vous en trouvez une, vous
Portez-la chez le commissaire
Au bout d’un an elle est à vous
Si personne ne la réclame.
Jean Rousselot
20
Je suis un imbécile
Dernièrement,
J’ai rencontré un monsieur
Qui se vantait d’être un imbécile.
Il disait :
- je suis un imbécile !
- je suis un imbécile !
Je lui ai dit :
- Monsieur, c’est vite dit !
Tout le monde peut dire :
« Je suis un imbécile ! »
Il faut le prouver !
Il m’a dit :
- je peux !
Il m’a apporté les preuves
de son imbécillité
avec tellement d’intelligence et de
subtilité
que je me demande
s’il ne m’a pas pris
pour un imbécile !
Raymond Devos
21
Le bonimenteur
Bim-boum ! bim-boum !
Venez les enfants,
Voir notre spectacle
Ebouriffant !
Bim-boum ! bim-boum !
Venez les petits
Voir les sapajous
Les ouistitis !
Bim-boum ! bim-boum !
Vous applaudirez
Les rois du trapèze !
Entrez, entrez !
Bim-boum ! N’hésitez plus : sous notre chapiteau,
Vous verrez les jongleurs, les lanceurs de couteaux,
Vous verrez l’ours Albert qui fait le grand salto
Et le chien Pépito dans sa petite auto !
Bim-boum ! bim-boum !
Venez les pitchouns,
Pleurer mais de rire
Avec les clowns !
Bim-boum ! bim-boum !
Allons, avancez :
Notre grand spectacle
Va commencer !
Jean Luc Moreau
22
L’école est fermée
L’école est fermée ;
Le tableau s’ennuie ;
Et les araignées
Dit-on, étudient
La géométrie
Pour améliorer
L’étoile des toiles :
Toiles d’araignées,
Bien évidemment.
L’école est fermée ;
Les souris s’instruisent,
Les papillons lisent,
Les pupitres luisent,
Ainsi que les bancs.
L’école est fermée
Mais si l’on écoute
Au fond du silence,
Les enfants sont là
Qui parlent tout bas
Et dans la lumière,
Des grains de poussière,
Ils revivent toute
L’année qui passa,
Et qui s’en alla….
Georges Jean
23
PONCTUATION
-Ce n’est pas pour me vanter,
Disait la virgule,
Mais, sans mon jeu de pendule,
Les mots, tels des somnambules,
Ne feraient que se heurter.
-C’est possible, dit le point.
Mais je règne, moi,
Et les grandes majuscules
Se moquent toutes de toi
Et de ta queue minuscule.
-Ne soyez pas ridicules,
Dit le point virgule,
On vous voit moins que la trace
De fourmis sur une glace.
Cessez vos conciliabules
Ou, tous deux, je vous remplace !
Maurice Carême.
24
FêTeS
Pour la fête à Vercingétorix
Nous irons à l’Obélisque
Pour la fête d’Attila
Nous irons Porte des Lilas
Pour y manger du chocolat
Pour la fête à Clovis
Nous pêcherons des écrevisses
Pour la Saint Charlemagne
Nous irons à la campagne
Pour y boire du champagne
Pour la fête à Dagobert
Nous mettrons des chapeaux verts
Pour la fête à Mazarin
Nous irons dans les grands magasins
Pour la fête à Pasteur
Nous remettrons notre pendule à l’heure
Pour la fête à Victor Hugo
Nous irons au Trocadéro
Nous sucerons des berlingots.
Bernard Jourdan.
25
HEUREUX QUI COMME ULYSSE…
Heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme celui-là, qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos, de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup davantage ?
Plus me plait le séjour qu’ont bâti mes aïeux,
Que des palais romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plait l’ardoise fine :
Plus mon Loire gaulois que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin
Et plus que l’air marin la douceur angevine.
Joachim Du Bellay.
26
LE VIEIL HOMME ET LE CHIEN
Transparent au regard des passants trop pressés,
Un vieil homme est assis, transi et affamé,
Sous un porche à l’abri des frimas de janvier.
Il implore un sourire, une pièce de monnaie.
Passe un chien dans la rue, un chien de pedigree,
Une voiture suit, heurte le canidé.
Aussitôt extirpés de leurs logis douillets
Accourent de partout des bourgeois empressés
« Ne le laissez pas là, amenez-le chez moi
J’ai une couverture afin qu’il n’ait pas froid ! »
Quelques instants après, l’animal est pansé,
Dorloté, réchauffé, maintes fois caressé.
Au dehors dans la rue le silence est tombé
Tout le monde est rentré, a fermé les volets.
Sous son porche à l’abri des frimas de janvier
Le vieil homme soudain s’est mis à aboyer.
Daniel Boy
27
Le loup vexé
Un loup sous la pluie
Sous la pluie qui mouille
Loup sans parapluie
Pauvre loup gribouille.
Est-ce qu’un loup nage ?
Entre chien et loup
Sous l’averse en rage
Un hurluberloup ?
Le loup est vexé
Parce qu’on prétend
Que par mauvais temps
Un loup sous la pluie
Sent le chien mouillé.
Claude Roy
28
Bien placés, bien choisis…..
Bien placés, bien choisis
Quelques mots font une poésie
Les mots, il suffit qu’on les aime
Pour écrire un poème
On ne sait pas toujours ce qu’on dit
Lorsque naît la poésie
Faut ensuite rechercher le thème
Pour intituler le poème
Mais d’autres fois on pleure on rit
En écrivant la poésie
Ça a toujours kekchose d’extrême
Un poème
Raymond Queneau
29
E c o ut e . . .
Ecoute les bruits de la nuit
Derrière les fenêtres closes.
On dirait que c’est peu de choses,
Un pas s’en vient, un pas s’enfuit.
Le dernier autobus qui passe,
Quelqu’un qui chante quelque part
Un avion au fond de l’espace,
Un voisin qui rentre bien tard.
Un chien aboie. Un chat miaule,
On entend glisser un vélo.
La nuit est pleine de paroles
Qui viennent de l’air et de l’eau.
Pierre Gamarra
30
MAMAN EST FOLLE
Maman est folle
On n’y peut rien
Mais c’qui nous console
C’est qu’elle nous aime bien
Quand elle s’envole
On lui tient la main
Comme un ballon qui vole
Au gré du vent qui vient
Tais-toi Léopold
Surtout ne dis rien
Les gens dans leurs cache-cols
N’y comprendraient rien
Quand maman rigole
On oublie qu’on a faim
Que c’est l’heure de l’école
Qu’on a peur des voisins
Elle est notre idole
On en a le cœur plein
Faut pas qu’on nous la vole
Ou qu’on l’emmène au loin
Maman est folle
On n’y peut rien
Mais j’veux pas qu’on la vole
Ou qu’on l’emmène au loin
William SHELLER
31
C’est quand qu’on va où ?
Je me suis chopé 500 lignes
« je ne dois pas parler en classe »
Ras l’bol de la discipline
Y’en a marre, c’est digoulasse !
C’est même pas moi qui parlais
Moi, j’répondais à Arthur
Qui m’demandait en anglais
Comment s’écrit NO FUTURE
Si on est puni pour ça
Alors je dis « halte à tout »
Explique-moi papa
C’est quand qu’on va où ?
……
L’essentiel à nous apprendre
C’est l’amour des livres qui fait
Que tu peux voyager dans ta chambre
Autour de l’humanité
C’est l’amour de son prochain
Même si c’est un beau salaud
La haine, ça n’apporte rien
Et puis elle viendra bien assez tôt
Si on nous apprend pas ça
Alors je dis « halte à tout »
Explique-moi, papa
C’est quand qu’on va où ?
Renaud SECHAN……
32
Extrait du livre d’Antoine de Saint Exupéry
Le petit prince
….la fleur n’en finissait pas de se préparer à être belle,
à l’abri de sa chambre verte. Elle choisissait avec soin
ses couleurs. Elle s’habillait lentement, elle ajustait un
à un ses pétales. Elle ne voulait pas sortir toute fripée
comme les coquelicots. Elle ne voulait apparaître que
dans le plein rayonnement de sa beauté. Eh ! Oui. Elle
était très coquette ! Sa toilette mystérieuse avait donc
duré des jours et des jours. Et puis voici qu’un matin,
justement à l’heure du lever du soleil, elle s’était
montrée.
Et elle qui avait travaillé avec tant de précision, dit en
bâillant : « Ah ! je me réveille à peine….Je vous
demande pardon….Je suis encore toute décoiffée… »
33
La chanson du roi d’Angleterre
C’est le roi d’Angleterre
Qui n’avait pas d’amis,
Fit le tour de la terre
Pour en trouver ici.
Fut amoureux de grand-mère
Lui donna du souci.
Grand-mère a préféré grand-père.
« Roi d’Angleterre allez-vous-en d’ici »
Mais avant de partir lui dit : « Mon bon roi,
Là-bas en Angleterre
En souvenir de moi
Ne faites plus la guerre. »
Et depuis ce temps-là
Il n’y a plus de guerre,
Depuis ce temps grand-père
Est plus heureux qu’un roi.
Maurice Fombeure
34
- Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaieté permise !
- Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaieté permise !
35
La pendule
Je suis la pendule, tic!
Je suis la pendule, tac!
On dirait que je mastique
Du mastic et des moustiques
Quand je sonne et quand je craque
Je suis la pendule, tic!
Je suis la pendule, tac!
J’avance ou bien je recule
Tic-tac, je suis la pendule,
Je brille quand on m’astique,
Je ne suis pas fantastique
Mais je connais l’arithmétique,
J’ai plus d’un tour dans mon sac,
Je suis la pendule, tac!
Je suis la pendule, tac!
Pierre Gamarra
36
Le Corbeau et le Renard
Maître Corbeau, sur un arbre perché,
Tenait en son bec un fromage.
Maître Renard, par l'odeur alléché,
Lui tint à peu près ce langage :
"Hé ! Bonjour, Monsieur du Corbeau.
Que vous êtes joli ! Que vous me semblez beau !
Sans mentir, si votre ramage
Se rapporte à votre plumage,
Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois."
A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie ;
Et pour montrer sa belle voix,
Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie.
Le renard s'en saisit, et dit : "Mon bon
37
Monsieur,
Apprenez que tout flatteur
Vit aux dépens de celui qui l'écoute :
Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. "
Le Corbeau, honteux et confus,
Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait
plus.
Jean de La Fontaine
38
La biche
La biche brame au clair de lune
Et pleure à se fondre les yeux :
Son petit faon délicieux
A disparu dans la nuit brune.
Pour raconter son infortune
A la forêt de ses aïeux,
La biche brame au clair de lune
Et pleure à se fondre les yeux.
Mais aucune réponse, aucune,
A ses longs appels anxieux !
Et, le cou tendu vers les cieux,
Folle d'amour et de rancune,
La biche brame au clair de lune.
Maurice Rollinat
39
La rentrée
Un oiseau chantonne
Un air de Mozart
Que le vent d'automne
Emporte au hasard.
Bernard et Nicole,
La main dans la main,
Ont pris de l'école
Le joli chemin.
On voit sous les pommes
Crouler les pommiers.
Les crayons, les gommes
Sortent des plumiers.
Le ciel est morose :
Il verse des pleurs...
Mais Rosa-la-rose
Est toujours en fleurs.
Jean-Luc Moreau
40
Mon cartable
Mon cartable a mille odeurs,
mon cartable sent la pomme,
le livre, l'encre, la gomme
et les crayons de couleurs.
Mon cartable sent l'orange,
le bison et le nougat,
il sent tout ce que l'on mange
et ce qu'on ne mange pas.
La figue, la mandarine,
le papier d'argent ou d'or,
et la coquille marine,
les bateaux sortants du port.
Les cow-boys et les noisettes,
la craie et le caramel,
les confettis de la fête,
les billes remplies de ciel.
Les longs cheveux de ma mère
et les joues de mon papa,
les matins dans la lumière,
la rose et le chocolat.
Pierre Gamarra
41
A l’école des sorcières…
On apprend les mauvaises manières
D'abord ne jamais dire pardon
Être méchant et polisson
S'amuser de la peur des gens
Puis détester tous les enfants
À l'école des sorcières
On joue dehors dans les cimetières
D'abord à saute-crapaud
Ou bien au jeu des gros mots
Puis on s'habille de noir
Et l'on ne sort que le soir
À l'école des sorcières
On retient des formules entières
D'abord des mots très rigolos
Comme "chilbernique" et "carlingot"
Puis de vraies formules magiques
Et là il faut que l'on s'applique.
Jacqueline Moreau
42
J’ai trempé mon doigt dans la confiture
J’ai trempé mon doigt dans la confiture
Turelure
Ca sentait les abeilles
Ca sentait les groseilles
Ca sentait le soleil
J’ai trempé mon doigt dans la confiture
Puis je l’ai sucé
Comme on suce les joues de bonne maman
Qui n’a plus mal aux dents
Et qui parle aux fées
Puis je l’ai sucé
Sucé
Tellement sucé
Que je l’ai avalé !
René de Obaldia
43