Adrien Vescovi - Une certaine romance

Transcription

Adrien Vescovi - Une certaine romance
Adrien Vescovi - Une certaine romance
Le premier travail d’Adrien que j’ai vu était une petite vidéo intitulée Jour
de fête. Un plan de quelques secondes. Un vélo sans cycliste traverse l’écran,
roulant seul sur une route de montagne. Point barre.
J’ai été séduit. L’allusion à Jacques Tati et son facteur est évidente, renforcée
par le titre.
D’habitude je n’aime pas trop les hommages ou les références aux maîtres de
la littérature, du cinéma, de la peinture.
Elles servent à masquer une certaine vacuité en se parant du prestige de
l’oeuvre citée ; rien de tel avec le Jour de fête d’Adrien. On pense à Tati mais
on l’oublie aussitôt. Pas de surenchère, de prétention, de longueur, d’ennui. Un
micro événement. Drôle, absurde.
La vidéo dure 28 secondes et ce n’est pas une seconde de trop !
Savoir s’arrêter à temps est une qualité rare chez un jeune artiste.
Je retrouve la même sobriété dans une photographie intitulée Résidu. Un
tableau noir, fraîchement effacé. Par terre, le résidu crayeux à peine visible,
d’un tableau tricolore.
Un peu de poussière rouge, blanche et bleue.
Une Très belle nature morte qui, nous parle de nationalisme de manière légère.
La légèreté comme antidote à la pesanteur de l’époque ? Personnellement, je
suis pour !
Pour terminer, il y a cette série inspirée de l’origine du monde de G. Courbet.
Voilà bien une oeuvre dont on a abusé en la sur-citant à toutes les sauces.
Pauvre origine du monde ! Combien d’artistes t’ont-ils utilisée pour masquer
leur manque d’inspiration ?
Et bien, Adrien parvient à faire oublier l’original ce qui n’est pas loin de l’exploit.
Il fait de ce tableau mythique une série de cartes de reliefs, comme dans un
atlas géographique.
Des paysages abstraits dominés par le mont de Vénus.
Faire passer l’origine du monde du genre de nu à celui du paysage, il fallait le
faire !
Adrien Vescovi parvient à travers ses oeuvres à articuler légéreté et gravité,
sérieux et humour, virtuosité et bricolage.
Il se frotte avec succès à la nature paradoxale de notre curieuse espèce et il a
su titiller mon regard trop souvent blasé et lassé.
Je lui en suis très reconnaissant.
Pascal Bernier,
couverture :
Carroussel des halles
2008
Photographie, tirage numérique couverture :
Bruxelles, janvier 2007
1
7
8
6
11
Une certaine romance
4
2
10
9
3
13
5
14
12
J’ai choisi de vous présenter ma candidature
sous la forme d’une exposition fictive se
déployant dans l’espace en deux dimensions du
dossier de 15 pages qui m’était demandé. Une
certaine romance vous permettra de découvrir
une sélection de mes œuvres agencée de
manière à produire un récit, ce qui est un des
traits marquants de ma démarche. Le titre de
l’exposition fait référence à la chanson A certain
romance, d’un groupe pop que je n’aime pas :
Arctic monkeys.
Dans une première salle, la vidéo  Le Train
fantôme (1) rythme l’ambiance sonore de la
pièce dans laquelle on retrouve aussi deux
photographies et une série de sculptures
traitant de notre histoire avec un grand H. Cette
vidéo évoque le dernier train de déportés qui a
traversé la France à la fin de la seconde guerre
mondiale. Nacht und nebel (2) est une image
détournée sur photoshop, elle fait référence
à un décret du IIIè Reich. Image minée (3) est
une reproduction dans le réel d’une plage de
Normandie et les Czech hedgehog (4) rappellent
les barricades anti-char que l’on trouve sur les
plages lors des débarquements.
Dans une seconde salle, la bande son de la
vidéo Bang bang (5) nous plongent dans une
Plan de l’exposition
ambiance tout aussi pesante, celle d’une
salle de tir. J’y présente une série de missiles
réalisés en Lego. Ces Joysticks (6) sont en
réalités des godemichés. Ils pourraient être
les projectiles qui ont laissé leurs traces sur la
photographie Tirs croisés (7). À moins que ces
trajectoires n’aient été faites par les pistolets
retrouvés dans les trois dessins : H, B & HB (8).
Dans cette salle des armes, on trouve encore
une grenade, en Lego elle aussi : Sans titre (9),
qu’un enfant aurait pu construire à l’aide de
la notice qui l’accompagne. Toutes ces armes
sont réunies sous l’égide de Résidu (10), une
version personnelle du drapeau français.
Dans cet espace, il y a aussi Elever des
barricades (11), un diptyque d’une photographie
d’archive reconstruite. C’est l’essence de
la manifestation qui est ici évoquée par la
barricade et le nuage de fumée. C’est la
même fumée qui est utilisée dans Stupid white
men (12). Elle fait de la promenade d’un vélo
quelque chose d’insolite et d’étrange. Les 12
photographies qui constituent cette série sont
prises dans le centre de Genève dans un site à
l’abandon, Artamis. A côté, se trouve le dessin
d’une vue par Google earth de ce quartier de
Genève.
L’exposition se clôture par deux vidéos Face à
face (13) et La dernière séance (14). Ces vidéos
nécessitent l’isolement de la salle de projection,
pour une meilleure mise en espace. Les autres
vidéos sont des compléments aux pièces, je
veux dire par là qu’elles ne nécessitent pas une
mise à l’écart et au contraire qu’elles créent
une ambiance par leurs bandes son.
Face à l’univers de « jeux de guerre », que
je propose par le détournement de formes
et d’images, le spectateur ne sait sur quel
pied danser : est-on dans l’univers du jeu,
de l’enfance ou dans un discours politique
sur la guerre ? Un peu tout cela à la fois,
probablement.
1
Une image fixe : un paysage arrêté. Les arbres commencent à bouger,
ils s’impatientent… Le paysage s’accélère de plus en plus jusqu’au passage du train.
Puis il se fige à nouveau, une fois le train passé.
La vidéo est diffusée en boucle et le train passe à des durées aléatoires.
Train fantôme
2008
Installation vidéo : vidéo projecteur, écran, enceintes et ordinateur.
Durée variable
2
(détail)
Nacht und nebel
2007
Photographie, tirage numérique contrecollée sur dibon.
120 x 80 cm
3
Cette photographie en noir et blanc rappelle des images de plage de Normandie
avant le débarquement. Mais, ici, les mines anti-personnelles sont des pâtés de sable
disposés stratégiquement sur la plage.
Un jeu d’enfant pour rappeler une image de guerre.
Image minée
2006
Photographie, tirage numérique contrecoller sur dibon.
150 x 90 cm
4
Des structures en bois, formées de 3 chevrons et de 2 serres joints. Fruit d’un
assemblage en équilibre, ces bricolages rappellent les Hérissons Tchèque, ces barricades
anti-chars que l’on trouve sur les plages de Normandie.
Elles ne retiendront pas le char et seront démontées pour être transportées !
Czech hedgehog
2008
Chevrons et serres-joints.
5
Cette vidéo est l’histoire d’un simple jeu : en passant devant une barrière, un enfant fait taper son bâton sur les barreaux.
La caméra le filme de profile et le suit en travelling sur quelques mètres. Un ralenti est
effectué sur la séquence, il est ajusté par le son produit par le bâton qui tape, pour se
confondre avec celui d’une arme à feu.
Ce son amplifié fait glisser la séquence du jeu à la guerre.
Bang bang
2008
Vidéo
Durée : 6 min.
6
Joysticks
2007
Pièces de Lego, extrait d’une série de 11.
Affiches (détail) : 100 exemplaires - tirage numérique.
7
Dessin préparatoire à Tirs croisés
2008
Extrait d’une série de 5 dessins sur papier millimétré.
21 x 29,7 cm
Tirs croisés
2008
Photographie N&B, tirage numérique.
8
Une série de dessins, qui reprend un procédé que l’on voit au cinéma : passer un
crayon sur une feuille blanche pour retrouver ce qui est marqué dessous.
Ici, j’ai retrouvé l’arme du crime !
H, B & HB
2008
Crayons papier.
50 x 65 cm
9
Le montage d’un Lego requiert une attention particulière. Après manipulation, on
arrive à un résultat éphémère. L’assemblage de ces petites pièces peut en effet être déconstruit et re-construit pour devenir autre chose...
Comme le terroriste qui recherche les pièces dont il a besoin pour fabriquer sa
bombe, pour fabriquer cette grenade il faudra rechercher dans différentes boîtes pour
trouver les pièces nécessaires. Ainsi la construction entre dans un parasitage du Lego, un
détournement qui s’inscrit dans une méthode de fabrication alternative.
Mais cette pièce reste un jouet, un objet-type, éducatif, conforme à des normes de fabrication dont les enfants se servent pour s’amuser. Par l’utilisation de la charte graphique
Lego, ce jeu devient une “arme de destruction”. Créer une notice spécifique pour ce jouet
permet de se projeter dans la réalité, de se poser la question de ce qu’il peut devenir.
Sans titre
2006
Pièces de Lego.
Notice éditée à 1000 ex., tirage offset.
10
(détail)
Résidu
2006
Photographie, tirage numérique contrecollé sur dibon.
150 x 100 cm
11
Ces photographies sont le résultat d’une performance, un geste éphémère pour
construire une image de manifestation, des copains qui font péter des pétards.
Elever des barricades
2008
Photographies diptyque, tirage numérique .
100 x 70 cm
12
Stupid white men est une vidéo dans laquelle un vélo se promène dans un site en
friche, avec derrière lui un nuage de fumée. Le site s’étale sur une dizaine de bâtiments, il
est situé en plein centre de la ville de Genève et a été vidé de ces occupants, puis barricadé juste avant le tournage. Un ghetto de la taille d’un quartier en plein centre ville.
Stupid white men
2008
Dessin, 100 x 80 cm
Extrait d’une série de 12 photographies.
Vidéo, durée : 6 min.
13
On entre dans une salle noire éclairée, avec sur le mur, un rectangle blanc.
Un écran qui annonce la projection d’un film, la lumière s’éteint et la vidéo commence.
Le cadrage est séré, construit par l’espace filmé : un appartement. La caméra est situé
dans l’immeuble d’en face et enregistre... Le personnage entre dans l’appartement,
s’arrète pour nous regarder et repars sur ces pas, elle est devenu un agent de la fiction à
son insu.
Deux minutes de séance, deux minutes de voyeurisme.
Face à face
2007
Installation vidéo : vidéo projécteur, écran de 240 x 80 cm, enceintes, minuterie et lampe.
Durée : 6 min.
14
écran noir, le bruit seul commence la séquence : des cris d’enfants. L’image apparaît. La caméra, placée dans un immeuble, filme en plongée une cour d’école. Un groupe
d’enfants entre dans la cour. Une série de ralentis décompose l’événement. L’action se
passe en trois temps, l’enfant ouvre ses bras, impact. Puis il reprend son rythme. L’image
est une seconde fois ralentie, l’enfant s’accroupit et s’allonge, il est figé en plein jeu. Les
enfants autour de lui jouent leur rôle. Après avoir fait quelques pas et une fois que le protagoniste est à terre, ils se retournent et s’approchent de lui.
Le film se termine sur cette image, ou plutôt ne se termine jamais mais reste immobile sur
cet intervalle où l’enfant est allongé entouré par trois autres qui le regardent.
L’action est courte, mais le film peut durer des heures.
La dernière séance
2006
Installation vidéo : vidéo projécteur, écran, 2 enceintes et trois bancs.
Durée indéterminée
Adrien Vescovi
Né en 1981, France
Vit et travaille à Paris
Cursus
DNSEP, Ecole d’Art de la Communauté díAgglomération díAnnecy, 2006
DNAP, Ecole d’Art de la Communauté díAgglomération díAnnecy, 2004
Expositions personnelles
Qui n’a guère de réalité, Galerie Van der Stegen, Paris, 2008
Tous nos jeux étaient les mêmes, La générale en manufacture, Sèvres, 2008
Expositions de groupe
Opération tonnerre, une proposition de United Artists et Isabelle Lenormand,
Mains d’oeuvres, Saint-Ouen, 2009
Ligne à ligne, une proposition de Michel Nuridsany, Galerie Nationale d’Indonésie,
Jakarta, 2009
Portraits de famille, une proposition de L’Utile-Ignorance, Strasbourg, 2009
Playtime, une proposition de Mélanie Bouteloup, Béton Salon, Paris, 2008
Mulhouse 008, La création contemporaine issue des écoles d’art européennes, 2008
Vidéoíappart, une proposition de Indira Tatiana Cruz, Paris, 2008
Gaude mihi, galerie Pascal van Hoecke, Paris, 2007
Première vue, une proposition de Michel Nuridsany, Passage de Retz, Paris, 2007
777, une proposition de Patrick Amine, Galerie Evi Gougenheim, Paris, 2007
Jeux de guerre, une proposition de Pascal Bernier, Galerie Evi Gougenheim, 2007
Warm up, Paris, 2006
Launching Code #3, Galerie Code, Bruxelles, 2006
Résidences
Le Triangle, Marseille, 2009
La Générale en Manufacture, Sèvres, 2008
13, rue du fbg. Poissonnière
75009 PARIS
[email protected]
http://adrienvescovi.blogspot.com