Fiche pédagogique

Transcription

Fiche pédagogique
Sin sangre
THEATRE
d’après Alessandro Baricco
Un écran occupe tout le plateau. Un film y est projeté. Derrière
l’écran, il y a des éléments de décor – la façade d’une maison, une
table, des chaises… – et les quatre comédiens. Ils se fondent tellement dans les images qu’ils semblent en faire partie. Les images
rappellent à la fois les anciens films colorés et l’univers d’Edward
Hopper ou William Kentridge.
L’histoire avance comme un roman policier. Inspirée du roman de
l’Italien Alessandro Baricco, Sin Sangre nous replonge dans les
années noires de la dictature de Pinochet, de 1973 à 1988. Trois
hommes cherchent la maison isolée où s’est retiré le docteur
Roca, dit La Hyène à cause des meurtres perpétrés dans l’hôpital qu’il dirigeait sous la dictature. Ils viennent rendre justice, tuent
Roca et son fils. Seule survit Nina, la fille, une enfant.
Sin sangre suit l’histoire de cette enfant, des années plus tard. Sa
quête pour sortir de l’enfer de son passé. L’impossible oubli de ceux
qui ont tué. La dictature est morte quand commence le roman, mais
elle n’a pas quitté les têtes de ceux qui l’ont vécue. Elle imprègne
le roman de Baricco comme une obsession, qui emmène les
spectateurs de Sin Sangre dans les zones troubles et troublées
de la vengeance et de la culpabilité.
(Brigitte Salino, Le Monde, 17 décembre 2009)
La compagnie : Teatrocinema
Créée en 1987, la compagnie La Troppa (littéralement « La Troupe »
de ceux qui marchent d’un pas solide à l’heure de la dictature) laisse
pour de nombreux spectateurs du monde entier de magnifiques
souvenirs : univers magiques, machineries ingénieuses, une poésie tendre habitant des créations uniques.
Dix-neuf ans plus tard, en 2006, suite au départ de quelques-uns
et à l’arrivée de plusieurs autres, La Troppa devient Teatrocinema :
un vaste groupe d’artistes appartenant à plusieurs disciplines et
unis par l’intérêt commun de la recherche de la beauté et de la poésie, de la narration, de l’image et de la musicalité.
A mi-chemin entre théâtre et cinéma, la troupe se dote également
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d’une nouvelle ligne de conduite : fondre (con-fondre) les langages
et les techniques des deux arts, pour qu’ils deviennent inséparables et uniques, pour créer l’illusion de voyager dans l’espace et
le temps à travers diverses histoires, de récits vertigineux qui
s’envolent au-delà des quatre murs de la salle de spectacle.
« Dans la compagnie Teatrocinema, nous cherchons de nouveaux langages dramatiques et de nouvelles formes pour mettre
en scène des œuvres où les personnages – héroïques ou anonymes – sont des « phares », des points de référence. Chaque
spectateur, à travers sa lecture et son expérience particulières, se
questionne et analyse son propre chemin d’évolution, son propre
univers intime.
La compagnie développe un éventail très large de possibilités techniques et créatives grâce à l’intégration de professionnels du
théâtre et du cinéma à la fois. Naissent alors de nouvelles potentialités d’approfondir l’impact des mises en scène.
Le langage de Teatrocinema génère la fusion des techniques et
des formes narratives du théâtre et du cinéma. La force dramatique déployée en scène, le jeu des comédiens ainsi que les technologies appliquées permettent de voyager dans le temps et dans
l’espace avec des outils tels que le flashback et le flashforward,
l’ellipse, le panoramique, la coupe franche, la plongée et la contreplongée, les changements instantanés de l’axe de la caméra
(donc du point de vue du spectateur), pour ainsi narrer en 90 minutes une histoire, même si elle se déroule sur plusieurs siècles
et dans différents lieux. (…)
Les variantes offertes par le dispositif scénique conçu par notre
compagnie sont illimitées. Elles nous permettent un voyage infini
sur des horizons très larges et une implication plus grande et
plus certaine des spectateurs. »
La Compagnie Teatrocinema
(Extrait du dossier de presse)
© Rodrigo Gomez Rovira
Extraits
« écoute-moi bien, on est entrés dans cet hôpital avant que l’armée arrive, on voulait y entrer nous, pour vous tuer, tous, mais on ne vous a pas
trouvés, vous vous étiez tirés, hein, vous aviez senti ça dans l’air, vous
avez ôté vos blouses blanches de tortionnaires et vous vous êtes sauvés, en laissant tout là, tel quel, des lits partout, même dans les couloirs,
des malades partout mais je me souviens très bien moi, on n’entendait
pas une plainte, pas un bruit, rien, ça je ne l’oublierai jamais, il y avait un
silence total, toutes les nuits de ma vie je continuerai à entendre ça, un
silence total, c’était nos copains, là, dans les lits, et nous on venait les libérer, on venait les sauver, mais quand on est arrivés ils nous ont accueillis en silence, et c’était parce qu’ils n’avaient même pas la force de se
plaindre, et pour tout dire ils n’avaient plus envie d’être vivants, ils ne voulaient pas être sauvés, c’est ça la vérité, vous les aviez mis dans un tel
état qu’ils voulaient seulement mourir, le plus vite possible, ils ne voulaient
pas qu’on les sauve, ils voulaient qu’on les tue. »
«- Il y avait des tas de choses que nous devions détruire pour pouvoir
construire ce que nous voulions, c’était la seule manière, nous devions
être capables de souffrir et de faire souffrir, celui qui supporterait le mieux
la douleur gagnerait, on ne peut pas rêver d’un monde meilleur et penser qu’on va vous le donner juste parce que vous le demandez, les autres n’auraient jamais cédé, il fallait combattre, et une fois qu’on avait compris ça, ça ne faisait plus de différence que ce soient des vieux ou des
Alessandro Baricco, l’auteur du texte original
Ecrivain et musicologue, diplômé en philosophie, Alessandro
Baricco est né à Turin en 1958. Dès 1995, il a été distingué par
le prix Médicis étranger pour son premier roman, Château de la
colère. Avec Soie, il s’est imposé comme l’un des grands écrivains
de la nouvelle génération. Il collabore au quotidien La Repubblica
et enseigne à la Scuola Holden, une école sur les techniques de
la narration, qu’il a fondée en 1994 avec des amis.
(In Sans sang, Alessandro Baricco, traduit de l’italien par Françoise
Brun, Folio/Gallimard, 2007)
Chronologie de la dictature chilienne
-11 septembre 1973 : coup d'Etat du général Pinochet contre le président Salvador Allende, après trois ans d'expérience socialiste.
Allende se suicide.
- 14 sept 1973 : dissolution du parlement. Suspension des partis.
Dans les semaines qui suivent, exécution de centaines d'opposants,
emprisonnement des dirigeants de gauche, disparitions. Des milliers de Chiliens partent en exil.
- 11 sept 1974 : Pinochet devient par décret "Chef suprême de la
nation".
- 19 avril 1978 : loi d'amnistie couvrant tous les crimes commis depuis septembre 1973.
Par la Compagnie Teatrocinema (Chili)
En coproduction avec le Festival Santiago a Mil
(Chili) et le Centre Dramatique Le Manège. Mons
(Belgique)
Mise en scène : Juan Carlos Zagal
Avec : Laura Pizarro, Juan Carlos Zagal, Diego
Fontecilla, Ernesto Anacona et Etienne Bobenrieth
Spectacle en espagnol, surtitré en français
enfants, tes amis ou tes ennemis, on était en train d’ouvrir la terre, il n’y
avait rien à faire, il n’y avait pas de moyen de faire ça sans que ce soit
douloureux. Et quand tout nous semblait trop affreux, nous avions notre
rêve qui nous protégeait, nous savions que, si élevé qu’en soit le prix, immense serait la récompense, parce que nous ne nous battions pas pour
un peu d’argent, ou pour un champ à cultiver, ou pour un drapeau, nous
nous battions pour un monde meilleur, vous comprenez ce que ça veut
dire ? nous étions en train de redonner à des millions d’hommes une vie
décente, et la possibilité d’être heureux, de vivre et de mourir dans la dignité, sans être piétinés ou ridiculisés, nous n’étions rien, mais eux, ils
étaient tout, des millions d’hommes, nous on était là pour eux, que voulez-vous, que ce soit un enfant qui meurt contre un mur, ou dix enfants,
ou cent, il fallait ouvrir la terre et nous l’avons fait, des millions d’autres
enfants attendaient que nous le fassions et nous l’avons fait, peut-être
que vous devriez…
- Vous y croyez vraiment ?
- Bien sûr que j’y crois.
- Après toutes ces années vous y croyez encore ?
- Pourquoi est-ce que je ne devrais pas ?
- La guerre, vous l’avez gagnée. Ce monde vous paraît meilleur ?
-J e ne me le suis jamais demandé.
- Ce n’est pas vrai. Vous vous l’êtes demandé mille fois, mais vous avez
peur de répondre. (…) »
(Alessandro Baricco, Sans sang, traduit de l’italien par Françoise Brun,
Folio/Gallimard, 2007)
- 11 sept 1980 : une nouvelle Constitution prévoit l'extension du
mandat de Pinochet jusqu'en 1989.
- 1983-1984 : manifestations de l'opposition contre le régime, multiplication des attentats des groupes armés d'extrême gauche.
Rétablissement de l'état de siège.
- 5 octobre 1988 : les Chiliens refusent, par référendum, de prolonger le mandat de Pinochet jusqu'en 1997.
- 14 décembre 1989 : le démocrate-chrétien Patricio Aylwin est élu
président de la République. Pinochet restera commandant en
chef de l'armée jusqu'en mars 1998. Après avoir été arrêté à
Londres et assigné à résidence d'octobre 1998 à mars 2000, il est
poursuivi et inculpé au Chili pour plusieurs affaires graves, mais
aucune n'a donné lieu à un procès. Pinochet est décédé le 10 décembre 2006, des suites d’une attaque cardiaque.
(D’après nouvelobs.com)
Propositions pédagogiques / Partenariat
- Formation sur le langage cinématographique, avec
Céline Hupé (formatrice projet Ciné-Jeunes), en collaboration avec La Médiathèque et le ciné Le Parc, le
mercredi 20 octobre de 14h à 17h à La Médiathèque
(niveau -1 du PBA) - Inscriptions: 071 31 12 12
En collaboration avec La Médiathèque et le Ciné Le Parc
- Référence bibliographique : Sans sang, Folio/Gallimard,
2007
ECURIES
27 et 28 octobre 2010 à 20h30
Tarif : 15 € - Abonnement : 10 €
Groupes : 11 €
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