Concertation territoriale Musiques Actuelles

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Concertation territoriale Musiques Actuelles
Concertation territoriale Musiques Actuelles - Ville de Toulouse 2013
« Les Médias »
Thème 11
27 novembre 2013
Toulouse Métropole
Toulouse
Dossier Documentaire
Sommaire
- Programme de la journée………………………………………………………………………………………………………… p.2
- Liste des participants……………………………………………………………………………………………………………… p.4
- Médias, Nouveaux modèles économiques et questions de déontologie………………………………… p.5
- L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires……………………………………………… p.20
- Les médias à l’ère numérique………………………………………………………………………………………………… p.41
- Comment les médias digèrent le numérique…………………………………………………………………………… p.48
- Les médias et le numérique……………………………………………………………………………………………………… p.50
- Spectacle dans la presse : la peau de chagrin ?……………………………………………………………………… p.56
- Blogs : courant alternatif………………………………………………………………………………………………………… p.58
- Le spectacle, sous la contrainte……………………………………………………………………………………………… p.59
- Spectacle et réseaux sociaux…………………………………………………………………………………………………… p.60
- Musique et service public, le divorce ?…………………………………………………………………………………… p.70
- Sérieux coup de mue pour la presse musicale?…………………………………………………………………………p.73
- Avec «Gonzaï», la contre-culture fait souscrire?…………………………………………………………………
p.75
- Le papier bien roulé de Gonzaï, financé via Ulule?………………………………………………………………… p.76
- A quoi ressemblera la radio musicale de demain ?………………………………………………………………… p.78
- Musique dans les médias : « France télévision doit revoir sa copie »…………………………………… p.84
- Tous pour la musique salue la mise en place d’une mission sur l’exposition de la musique dans les
médias………………………………………………………………………………………………………………………………………… p.86
- Accord entre radio France et les sociétés d’auteurs pour renforcer le développement des
nouveaux médias………………………………………………………………………………………………………………………… p.87
- Les investissements publicitaires en baisse dans la musique………………………………………………… p.89
- Bibliographie indicative…………………………………………………………………………………………………………… p.90
Association Avant-Mardi - 17 rue Valentin 31400 Toulouse - Tel : 05 34 31 26 50 - Fax : 05 34 31 26 55
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MAIRIE DE TOULOUSE
SCENE DES MUSIQUES ACTUELLES BORDEROUGE
Groupe de travail n°11 « Les Médias » – Concertation territoriale Ville de Toulouse 2013
Ce groupe de travail entre dans le cadre de la concertation territoriale de la ville de Toulouse en cohérence avec le « Projet culturel pour
Toulouse 2009-2014 » et la création d’une Scène de Musiques Actuelles à Borderouge « Le Metronum », dans une démarche participative
avec les acteurs du secteur musical et de la société civile. La coordination a été confiée au pôle structurant Avant-Mardi qui gérera pour la
Mairie de Toulouse 4 ateliers de travail (mars, juin, septembre et novembre) pour une synthèse publique qui sera rendue en Janvier 2014.
Préambule
Le terme média désigne précisément tout moyen de communication naturel ou technique, qui permet la transmission d'un message.
Un média, est un support de diffusion de l'information. Dans la culture, et notamment dans la musique, le média est aussi et surtout
un moyen de promotion et de communication nécessaire pour le spectacle vivant et la musique enregistré. Depuis presque un
siècle, la radio, la télévision, puis aujourd'hui Internet sont venus s'ajouter au grand média historique, la presse écrite.
Contexte
Internet a eu une influence profonde et variée sur les médias ces dix dernières années. Les médias traditionnels et notamment la
presse écrite ont subi de plein fouet, la mutation technologique et le développement d’internet, transformant les usages et pratiques
des publics se traduisant par une désaffection envers les médias traditionnels au détriment de nouveaux acteurs du net (réseaux
sociaux, blogs, sites communautaires, Wiki…). Les conséquences économiques, juridiques et financières de cette révolution
numérique sont considérables. Elles accompagnent et renforcent la tendance de la société moderne vers une double évolution : à la
fois une plus grande place donnée au local et à tous les citoyens « consommateurs » (qui échangent entre eux les informations à
travers des réseaux informels et qui sont émetteurs et producteur de leurs propres messages), en même temps qu’une accélération
de la mondialisation des échanges commerciaux.
L’industrie musicale a longtemps permis d’une part d’alimenter en contenu un certain nombre de médias généralistes et spécialisés
mais aussi d’alimenter en ressources les médias par la promotion des artistes. Aujourd’hui, le modèle s’est effondré notamment
pour la presse musicale et dans une moindre mesure pour les radios dont la musique reste le vecteur essentiel.
« Médias et Musiques Actuelles » - réunion du groupe de travail, mercredi 27 novembre 2013 » - 09h30-13h00
Lieu : Toulouse Métropole – salle 804 A - 6 rue René Leduc - 31000 Toulouse – Contact : 05 81 91 72 00
Merci de vous munir d'une pièce d'identité à présenter à l'accueil de Toulouse Métropole pour un badge d'accès (consignes de sécurité
obligatoire).

Le contexte, dossier documentaire
Établissement d’un dossier documentaire par le centre de ressource d’Avant-Mardi et envoi aux participants.

le contenu de la réunion (4H)
- 09h30 - Accueil et introduction par Hervé BORDIER - Directeur du Pôle des Musiques Actuelles - Mairie de Toulouse et Williams
BLOCH - Directeur d’Avant-Mardi réseau régional Musiques Actuelles. (10 m).
- 09h40 - Présentation des participants (5 m).
- Présentation, par les invités professionnels extérieurs des mutations et nouveaux modèles économiques des médias musicaux
(1h10).
- Questions, débats (20 m).
- Pause (15 m).
- Réponse et tour de table des participants (1h20).
- 12h40 - Construction collective d’une synthèse (10 m).
- 13H-14H30 - Repas commun, échanges informels
Les participants pressentis :
Modérateurs : Williams BLOCH, Cyril DELLA-VIA (Avant-Mardi)
Invités professionnels extérieurs :
Thomas DUCRES (Responsable de Gonzaï, e-magazine musical)
Franck VERGEADE (rédacteur en chef du magazine Magic)
Secrétaire de séance : Michel MATHE, Animateur culturel - Mairie de Toulouse
Participants invités :
Perrine CRUBILE (attachée de presse, Petite Cuisine Communication)
Greg LAMAZERES (Journaliste Culture TLT)
Thomas DELAFOSSE (programmateur Radio Campus)
Stéphane HENRIQUES (journaliste musique Flash mensuel)
Baptiste OSTRE (rédacteur en chef Clutch Mag)
Mathieu BAUDORRE (Journaliste Culture et musique, Toulouse Blog)
Philippe PITET (Coordinateur Radio FMR)
Représentants Mairie de Toulouse :
Vincentella DE COMARMOND, Mairie adjointe à la Culture
Erwane MONTHUBERT, Conseillère Municipale déléguée aux Technologies de l’Information, et de la Communication
Eric FOURREAU, Conseiller culture - Cabinet du maire de Toulouse – Toulouse Métropole/Ville de Toulouse
Jean Louis SAUTREAU, Directeur Général-Adjoint à la Culture – Mairie de Toulouse/Toulouse Métropole
Hervé BORDIER, Directeur du Pôle des Musiques Actuelles - Mairie de Toulouse
Danielle SOULE, Direction du développement Culturel – Mairie de Toulouse
Marie WAROQUIER, Responsable de la cellule communication de la DGA culture
Franck MENIGOU, Responsable Digital, Pôle médias numériques, Direction Communication - Ville de Toulouse/ Métropole
Marie-Agnès STEUNOU, responsable Partenariat/Communication/Média Festival Rio Loco-Pôle des Musiques Actuelles
Audrey BREGOU, Journaliste Culture, Mairie de Toulouse
Autres invités professionnels :
Nicolas MECKEL, Consultant (Via Culture)
Représentants Conseil Régional :
Georges MIRA, Chargé de Mission Musiques Actuelles, DCAV Conseil Régional Midi-Pyrénées
Problématiques et enjeux posés
La ville de Toulouse a de tout temps connu une presse musicale foisonnante, dynamique et singulière avec un certain nombre de
magazines culturels historiques comme Flash, Intramuros, Clutch (anciennement Letmotiv’s) ainsi que de nombreuses radios
associatives (FMR, Canal Sud, Campus, Mon Pais…) sans parler de notre télé locale TLT dont la musique a toujours été très
présente sur l’Antenne.
Mais, pour combien de temps pourront-ils tenir encore face à la baisse des annonceurs ?
Aujourd’hui n’est-il pas nécessaire que la solidarité puisse exister entre les différents médias (peu importe le support) afin de mieux
se repositionner face au numérique et ses nouveaux usages et pratiques, peut-on envisager la mutualisation et la coopération entre
les différents médias (projet de plateforme numérique).
Quel est le rôle de la collectivité et quel est son soutien potentiel au maintien de la diversité culturelle et du rayonnement culturel de
la ville ? Peut-on parler d’un véritable service public d’information qui pourrait constituer une solution à la crise ? Mais comment
alors garantir l’affranchissement des journalistes au pouvoir politique ; d'autant plus que la Ville développe ses propres médias
numériques comme culture.toulouse.fr, Grandtoulouse.org ?
L’ouverture prochaine du Metronum avec notamment des espaces où il sera possible de faire de la captation d’images et de
l’enregistrement live, pourrait permettre de générer de nouveaux contenus musicaux propres à la scène et donc intéresser les
médias dans des nouveaux partenariats innovants.
Le lieu se veut être une enseigne autour de l’accompagnement artistique des jeunes talents, un outil dans l’aide au développement
et au rayonnement des artistes, dont les médias peuvent être les relais complémentaires.
MAIRIE DE TOULOUSE
SCENE DES MUSIQUES ACTUELLES
BORDEROUGE
Concertation territoriale Ville de Toulouse 2013
Groupe de travail n°11 "Médias" – Mercredi 27 novembre 2013 - Liste des participants
Nom
Prénom
Structure
Fonction
Email
BAUDORRE
Mathieu
Toulouse Blog
Journaliste Culture et musique
[email protected]
BLOCH
Williams
Avant-Mardi
Directeur
[email protected]
BORDIER
Hervé
Mairie de Toulouse
Directeur du Pôle des Musiques Actuelles
[email protected]
BREGOU
Audrey
Mairie de Toulouse
Journaliste Culture
[email protected]
CRUBILE
Perrine
Petite Cuisine Communication
Directrice
[email protected]
DE COMARMOND
Vincentella
Mairie de Toulouse
Maire Adjointe à la Culture
[email protected]
DELAFOSSE
Thomas
Radio Campus
programmateur Radio Campus
[email protected]
DELLA-VIA
Cyril
Avant-Mardi
Médiateur Culturel
[email protected]
DUCRES
Thomas
Gonzaï, e-magazine musical
Responsable
[email protected]
FOURREAU
Eric
Mairie de Toulouse
Conseiller Culture - Cabinet du Maire de Toulouse
[email protected]
HENRIQUES
Stéphane
Flash Hebdo
journaliste musique
[email protected]
LAMAZERES
Greg
TLT
Journaliste Culture TLT
[email protected],
MATHE
Michel
Mairie de Toulouse
Animateur culturel
[email protected]
MECKEL
Nicolas
Via Culture
Consultant
[email protected]
MENIGOU
Franck
Mairie de Toulouse
Responsable Digital, Pôle médias numériques, Direction Communication
[email protected]
OSTRE
Baptiste
Clutch Mag
rédacteur en chef Clutch Mag
[email protected]
PITET
Philippe
FMR
Coordinateur Radio FMR
[email protected]
SAUTREAU
Jean Louis
Mairie de Toulouse
Directeur Général Adjoint des Services Culturels
[email protected]
STEUNOU
Marie-Agnès
Mairie de Toulouse
responsable Partenariat/Communication/Média Festival Rio Loco
[email protected]
SOULE
Danielle
Mairie de Toulouse
Direction du développement Culturel
[email protected], WAROQUIER
Marie
Mairie de Toulouse
Responsable de la cellule communication de la DGA culture
[email protected],
VERGEADE
Franck
Magazine Magic
Rédacteur en chef
[email protected]
[email protected]
[email protected]
MONTHUBERT
Erwane
Mairie de Toulouse
Conseillère municipale déléguée aux Technologies de l’Information et de la
Communication
MIRA
Georges
Conseil Régional Midi-Pyrénées
Chargé de Mission Musiques Actuelles, DCAV
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Une histoire longue de près de deux siècles est en train de prendre fin. Le modèle
économique de la presse écrite – telle que nous la connaissions – est né dans les années
1830 sur la côte Est des États-Unis. Il est rare que l’on puisse dater aussi précisément
l’apparition d’un phénomène de ce genre. S’il faut retenir une date, ce sera celle du 6 mai
1835, à New York, lorsque James Gordon Bennett lance le New York Herald.
Dans ces années-là, la penny press (la presse à un cent) casse les prix alors que les autres
journaux sont vendus six fois plus cher. Cette presse pour tous invente un nouveau mode
de distribution à l’unité alors que ses prédécesseurs sont vendus seulement par abonnement. Gordon Bennett crée également un nouveau genre éditorial : le reportage.
Bennett n’était pas un parangon de rigueur aux yeux des éditeurs de Wall Street qui
produisaient les médias traditionnels de l’époque. C’est pourtant de ce moule (celui du
New York Herald et de ses cousins de la penny press) que sortira une profession nouvelle : le
journalisme. Et ce sont des préoccupations commerciales autant que philosophiques qui
feront naître les normes de la profession dont, en premier lieu, le paradigme de l’objectivité. Il s’agit de rassembler le plus grand nombre de lecteurs et pour cela il est nécessaire
de ne repousser personne en raison d’un biais politique, confessionnel ou autre.
L’apparition de la presse écrite traditionnelle est donc le fruit d’une série de mutations
rapides :
t révolution technologique qui voit la rotative, le chemin de fer et le télégraphe
apparaître en l’espace de quelques années ;
t mutation sociologique avec la généralisation de l’accès à l’école et le début de
l’industrialisation avec son corollaire : la naissance de l’ouvrier ;
t évolution économique qui pousse la presse à forger empiriquement son modèle
d’affaires en conservant les abonnements inventés précédemment et en y ajoutant
la vente au numéro, les petites annonces et la publicité.
Au fil des décennies, les recettes se sont affinées. Les cocktails de revenus ont connu
des compositions différentes selon les titres. Puis la radio et la télé sont venues prendre
leur place dans le paysage. Mais au final, ce modèle d’affaires, qui a connu son apogée à
la charnière du e et du e siècle, est arrivé jusqu’à nous.
Depuis le milieu des années 19, il est attaqué de toutes parts. Le pilier des petites
annonces est tombé le premier. L’apparition soudaine de Craigslist aux États-Unis et,
dans son sillage, d’une myriade de sites de petites annonces, qui n’avaient pas d’entreprise
de presse à financer, a été le premier signe de la vague qui commençait à mettre en pièce
le modèle économique vieux de près de deux siècles.
La publicité, ensuite s’est effondrée. Elle a plongé récemment pour des raisons conjoncturelles liées aux conséquences de la crise financière, née du scandale des subprimes, mais
plus profondément elle s’érode pour des raisons structurelles :
t l’éventail des possibilités pour afficher de la publicité n’a jamais été aussi vaste avec
la multiplication des pages web de toute sorte ;
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t l’apparition de nouveaux acteurs déterritorialisés comme Google qui rendent
facultatif le passage par un média ou par un intermédiaire local pour atteindre un
consommateur.
Autant d’éléments qui, pour les médias, ont défait le lien entre revenus publicitaires
et production rédactionnelle.
Ces ruptures sur le plan économique se sont accompagnées d’une remise en question de la position des journalistes. Pour reprendre le slogan choisi par Google pour son
encyclopédie en ligne Knol, on pourrait dire : « Gutenberg a permis aux hommes de lire et
internet leur a permis d’écrire ! » Les journalistes ne sont plus les seuls à pouvoir publier de
l’information et ils ne disposent plus véritablement de privilège pour la diffuser.
Derrière cette désacralisation « technologique », se profile également la remise en question de la légitimité des journalistes. Leur position de médiateurs est interrogée et ils font
face à une critique qui n’épargne pas non plus les autres corps intermédiaires.
En outre, au-delà des effets de modes du « journalisme citoyen » ou du « crowdsourcing » se profile la fin du monopole des journalistes sur la collecte de l’information.
ONG, lobbys et think tanks produisent de plus en plus d’enquêtes dont les journalistes
diffusent les communiqués de presse, inversant ainsi les rôles dans le processus de production de l’information.
8
Les pages suivantes montreront qu’ils expérimentent, qu’ils procèdent par essai-erreur
et que beaucoup tiennent pour acquis que le modèle économique des médias que nous
connaissions est définitivement cassé. Vous verrez également que des pistes semblent
s’esquisser pour tracer les contours, non pas d’un, mais de plusieurs modèles économiques
pour l’ère nouvelle.
Leurs expériences et leurs expérimentations les conduisent parfois loin des schémas
auxquels nous étions accoutumés. La plupart d’entre eux ont fait preuve d’une très grande
ouverture et d’une grande transparence face à nos questions souvent assez indiscrètes.
Qu’ils en soient ici très chaleureusement remerciés.
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Pour tenter de dresser la carte des médias étudiés, nous nous sommes appuyés sur
les trois critères d’analyse proposés par Frédéric Filloux en examinant l’importance que
chacun accorde au flux d’actualité, à la dimension participative et à l’élaboration d’une
offre éditoriale propre et très différenciée. Cette représentation n’est fournie qu’à titre
indicatif.
Les journalistes sont confrontés à une profonde crise de confiance de leur lectorat.
Alors que leur ténacité leur avait octroyé le statut (imprécis mais valorisant) de « 4ème
pouvoir », leurs connivences avec l’establishment contribuent à décrédibiliser leur travail.
C’est arrivé notamment aux États-Unis lors de la préparation de la guerre en Irak, où les
plus prestigieux journaux américains ont relayé les justifications douteuses du gouvernement sans émettre le moindre doute ou critique. Dans ce contexte, ceux qui tentent
d’inventer ou de réinventer les médias d’aujourd’hui et de demain doivent affronter de
multiples questionnements :
t sur les choix technologiques dans un univers en mouvement perpétuel ;
t sur le modèle économique ;
t sur la politique éditoriale (journalisme de l’offre ou média de la demande ?) ;
t sur la relation avec « ceux que l’on appelait autrefois l’audience » (pour reprendre la
terminologie de Jay Rosen) ;
t sur les moyens d’établir (ou de rétablir) la légitimité et la crédibilité de leur travail
aux yeux de leur public ;
t sur leur manière d’envisager les questions déontologiques.
Nous sommes allés à la rencontre de 23 d’entre eux. En France, aux États-Unis,
au Congo, en Suède, au Royaume-Uni, en Ukraine, nous les avons interrogés sur ces
questions. Certains ne vivent que de l’information, d’autres ont développé des sources
de revenu additionnelles. Certains sont subventionnés, d’autres pas. Certains viennent
des médias traditionnels, d’autres sont nés professionnellement sur internet. Avec eux
nous avons essayé de comprendre s’il existait l’esquisse d’un ou de différents modèles
de substitution. Le processus de destruction-créatrice de Schumpeter fait-il jaillir de
nouvelles solutions ?
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La crise économique que traversent les médias trouve sa source dans la faillite du
modèle biface qui prévalait jusque-là. Quels que soient les pays et les supports, les contenus journalistiques étaient – et sont encore – financés par un mélange de paiement par le
consommateur et par les annonceurs publicitaires. Les magazines, les quotidiens, gratuits
ou non, les télévisions, les chaînes câblées... pour chacun de ces médias traditionnels,
seul change l’équilibre entre la part payée par le consommateur final et celle payée par
l’annonceur. Dans la plupart des cas, la publicité représente entre 50% et 70% des recettes totales, laissant une marge aux entreprises média pour ajuster leur modèle d’affaires.
Sur internet, la structure du marché est telle que le modèle dominant pousse le prix
de vente des contenus vers zéro. Face à ce constat, les sites d’actualité poursuivent plusieurs stratégies :
t financer principalement via la publicité
t expérimenter vers le payant
t diversifier l’activité
t agréger des contenus
t chercher des subventions.
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La presse traditionnelle est arrivée très tôt sur internet. De nombreux journaux, forts
de leurs expériences dans la télématique ou le télétexte, ont ouvert leurs sites web dès
1995/96, soit environ 3 ans avant la naissance de Google, 6 ans avant Wikipédia et 9 ans
avant Facebook !
Pourtant, l’immense majorité de ces expériences ont calé au bout de quelques tours
de roue, continuant à présenter aux internautes des pages similaires à celles des éditions
papier, alors que le web exige de répondre à des besoins différents et à une nouvelle expérience de consommation.
Cette logique de transfert des méthodes issues du papier sur internet s’est ressentie également sur les modèles d’affaires. Toutefois sur un marché en pleine croissance (avec l’équipement d’un nombre croissant de foyers, puis l’augmentation de la bande passante disponible) la priorité a été donnée à la conquête de parts de marché. Les médias découvraient
avec incrédulité qu’ils pouvaient être « vus » (sinon lus), même très loin de leur zone de
chalandise habituelle. Conséquence sur le modèle économique de cette course à l’audience :
les médias se sont rabattus sur la publicité renonçant à faire payer leurs internautes.
Ce choix s’explique. D’un strict point de vue économique, les coûts marginaux de distribution sur le web sont nuls. Il ne coûte pas plus cher à un média d’être visité par 100 000
que par 200 000 visiteurs, alors que, sur papier, chaque exemplaire imprimé conserve un
coût de fabrication. Même s’il faut augmenter le nombre de serveurs informatiques, ces
derniers peuvent apparaître comme des coûts fixes tant les volumes sont importants (un
serveur ajouté permet de servir des dizaines de milliers de pages vues en plus).
Cette structure de coûts marginaux nuls rapproche le web de la radio ou de la télévision, où, pourtant, les modèles économiques étaient pérennes. La différence, sur le web,
tient à l’absence de barrières à l’entrée. Alors que le lancement d’une chaîne de télévision
:
coûte plusieurs millions d’euros et nécessite des autorisations administratives ; la création
d’un site web ne coûte rien et s’effectue sans formalité. Certaines plateformes de blog
permettent même de le faire à un coût réellement nul, si l’on ne prend pas en compte
les coûts d’acquisition de l’ordinateur personnel et de la formation à la publication sur
le web.
En conséquence, si tout un chacun peut publier dans les volumes qu’il souhaite, alors
la concurrence est fluide et le prix de vente de chaque unité de contenu reflète son prix
marginal : zéro euro. C’est pour cette raison que les sites d’information ont quasiment
tous opté pour la gratuité des contenus d’actualité immédiate.
Dans ce genre de modèle économique, les médias ont intérêt à capter un trafic maximal afin de pouvoir le revendre à des annonceurs. Cette course à l’audience a dominé les
années 1990 et 2000, lorsque chaque marque a tenté de s’emparer de la plus importante
part de marché possible. Les coûts marginaux nuls et les coûts de changement quasiment
nuls (l’utilisateur peut essayer un autre site web sans perdre le bénéfice d’usage du premier) favorisent l’apparition de positions dominantes. Hors-ligne, essayer un nouveau
produit d’information coûte soit de l’argent (achat d’un autre journal), soit fait perdre le
bénéfice du premier (impossible de regarder deux «JT» en même temps). La possibilité
de tester autant de marques que possible sur le web permet aux utilisateurs de se tourner
vers celle qui lui offre le meilleur bénéfice d’usage.
Au Royaume-Uni par exemple, le site web de la BBC rencontre un succès largement
supérieur à celui des chaînes du groupe sur le marché de la télé ou de la radio. De même,
The Guardian a su devenir l’un des principaux médias du monde anglophone sur le
Net alors que le territoire de son édition papier ne s’étend guère au-delà des frontières
britanniques.
En 2010, cette course à l’audience, renforcée par les bulles internet de la fin des années
1990 et du milieu des années 2000, n’est plus à l’ordre du jour. Les positions de chacun
sont désormais entérinées et vouloir prendre la place du leader nécessite des investissements colossaux. Malgré tout, la plupart des sites issus de médias traditionnels continuent à chercher la recette d’un financement par la publicité basé sur un trafic le plus élevé
possible. Parmi les titres étudiés pour cette enquête, The Guardian, The Independent ou
le Christian Science Monitor suivent ce modèle et considèrent la publicité comme leur
principale source de revenus.
Pourtant, ce modèle de financement par la publicité déclenche une fuite en avant vers
toujours plus de trafic et toujours plus de contenus mis en ligne, afin de pouvoir vendre
le plus d’espaces publicitaires possibles. A Boston, le patron de l’ex-quotidien papier
Christian Science Monitor, John Yemma, nous a avoué qu’il cherche à « mettre de la pub
partout où [il] trouve de la place » sur le site web qui a pris le relais du journal, depuis que
la décision a été prise d’arrêter les rotatives. Au final, cela provoque une croissance des
inventaires publicitaires sans commune mesure avec celle des besoins des annonceurs,
bien plus faibles, et les tarifs de la publicité baissent.
En outre, si l’on considère que les sites de médias ne représentent qu’une fraction de
la totalité des sites web tentant d’appliquer cette stratégie, on comprend que le système
ne peut pas trouver de point d’équilibre. Ce modèle présente donc une faiblesse dans sa
partie « recettes ».
La partie « coûts » peut également être questionnée. La difficulté provient des méthodes de production des contenus. L’usage veut que des journalistes professionnels créent
la totalité des contenus. Avec des recettes publicitaires décroissantes, ces coûts sont
21
22
quasiment impossibles à supporter. Conséquence : le rédacteur en chef du site web de
The Independent à Londres cherche à exploiter au mieux le temps de travail de chacun
de ses journalistes. Ses articles de « une » sont souvent de simples dépêches d’agence.
L’équation économique s’avère chaque jour de plus en plus difficile à résoudre dans les
modèles financés par la publicité.
Prenons par exemple une journaliste pour laquelle une entreprise débourse 3000 € par
mois (soit un salaire net aux alentours de 2000 €). Si cette journaliste produit deux articles par jour au cours de ses 20 journées de travail mensuelles, chaque article coûte 75 €
à produire [ 3000 / ( 20 x 2 ) = 75 ]. Si la publicité rapporte 5 € par millier de pages vues
(ce qui est à peu près le cas sur des sites d’informations généralistes), chaque article doit
alors générer au moins 15 000 pages vues pour ne pas faire perdre d’argent à l’entreprise.
Si l’on rajoute les charges non salariales, les personnels non-journalistes, etc., les niveaux
de trafic à atteindre deviennent vite hors de portée de la quasi-totalité des sites.
frappant des journalistes pour leur faire accepter un modèle d’affaire leur étant bien
moins favorable.
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Une des réponses au problème du modèle économique a été le changement des modes
de production des contenus. Plutôt que de tout faire produire par des journalistes professionnels, certains ont tenté d’ajouter, parfois avec succès, les compétences d’amateurs aux
processus de production. Ce mélange, connu sous le mot-valise de pro-am (professionnel
-amateur), est expérimenté en France notamment par Rue89 depuis 2007. Un noyau
de journalistes y anime une communauté d’experts et d’internautes qui participent à la
production éditoriale par leurs articles, leurs commentaires ou leur travail de veille.
Le problème peut également être renversé dans des systèmes de production de contenus où les journalistes professionnels ne sont plus au centre, mais à la périphérie du
processus. C’est le cas, par exemple, sur le site canadien hyperlocal OpenFile, où les
internautes peuvent déposer une demande d’enquête, apporter des éléments de réponse
à la question qu’ils évoquent et recevoir l’aide d’un journaliste pigiste pour compléter
l’enquête, le cas échéant. Une fois le travail du journaliste terminé, l’enquête (file) reste
ouverte et continue d’être alimentée par les internautes.
Un troisième cas de figure permet de se passer complètement de journalistes professionnels. Le site ukrainien h.ua (qui se prononce HighWay), par exemple, produit des
contenus journalistiques – y compris des enquêtes et des reportages – sans employer de
journaliste à plein temps. Deux éditeurs veillent au bon fonctionnement du site, mais
la sélection et la publication des contenus est laissée à la discrétion de la communauté,
qui peut s’auto-organiser grâce à des systèmes sophistiqués et réfléchis de notation des
contenus et des auteurs.
Face à ces modèles communautaires, certaines organisations cherchent à diminuer
le coût de production des contenus non pas en captant le travail de bénévoles, mais en
créant des réseaux de pigistes payés à la performance. Le média centralisateur des contenus peut ainsi éviter le risque d’un article non-rentable, faisant peser tout le risque sur les
épaules du contributeur.
Des sites comme Suite101, Demand Media ou encore Patch reposent tous sur ce
principe. En ôtant la masse salariale du modèle d’affaire, l’exploitation de telles structures
peut devenir rentable puisque les seuls coûts à couvrir sont les charges fixes des quelques
responsables éditoriaux et techniques faisant fonctionner « l’écosystème ». C’est ce qui
explique la course aux auteurs de ces sites, qui profitent des vagues de licenciements
NPEêMF!GSFFNJVN
De plus en plus de titres cherchent à recréer un modèle mixte, comme sur le papier,
où les revenus tirés des annonceurs sont complétés par des abonnements payés par les
utilisateurs finaux. Cette approche nécessite de recréer de la rareté afin de convaincre les
internautes de payer l’accès au contenu. Une partie du site est ainsi laissée en libre accès,
afin de capter le gros du trafic et d’attirer les prospects, tandis qu’une autre partie, plus
prestigieuse, est installée derrière un « mur payant » (paywall). Cette alliance du gratuit
(free) et du payant (premium) a donné naissance à l’appellation freemium popularisée par
Chris Anderson, rédacteur en chef du magazine Wired, dans son livre « Free ».
Des titres comme Le Monde, qui a adopté ce modèle depuis l’an 2000 et l’a renforcé
en 2010, ou, plus récemment, Le Figaro, ont développé des formules donnant accès,
moyennant un abonnement mensuel de 6 à 15 € par mois, à des contenus exclusifs :
archives, dossiers, fiches... Toutefois, ces deux groupes ne communiquent que de manière
parcimonieuse sur leur nombre d’abonnés. Le Figaro ne donne pas de détails, tandis
que Le Monde explique que sur les 100 000 abonnés « numériques » qu’il comptabilisait
en février 2010, 60 % sont également des abonnés de son édition papier et 40 % des
abonnés uniquement « numériques ».
À l’étranger, quelques exemples montrent que la stratégie peut être efficace, à condition de proposer aux internautes des contenus pour lesquels ils sont réellement prêts à
payer. En Suède, Aftonbladet.se propose un service Plus, contenant des articles exclusifs
sur des thèmes magazines (voyage, cuisine, etc.). Le service connaissant le plus fort succès
sur le site du premier quotidien suédois reste les Clubs, où des experts et des journalistes
rédigent sur un thème donné des conseils aux internautes, pour une cinquantaine d’euros
par an. Pour l’instant, les clients du site peuvent apprendre comment obtenir un corps
de rêve dans le club virtuel « perte de poids » ou comment mieux dormir dans le club
virtuel « insomnie ».
L’expérience suédoise, citée en exemple par le propriétaire du titre, le norvégien et très
technophile Schibsted, montre que les contenus proposés à la vente ou à l’abonnement
doivent offrir une réelle valeur d’usage au client. L’actualité brute, à moins de se démarquer
totalement de la concurrence, ne semble pas en mesure de déclencher un acte d’achat.
Le « mur payant » permet également de « qualifier » ses visiteurs (comme disent les
professionnels du marketing) et, partant, de mieux valoriser l’audience auprès des annonceurs. C’est ce que fait, par exemple, le Wall Street Journal, qui conserve de la publicité
dans les espaces abonnés. Cet inventaire peut être négocié à des tarifs largement supérieurs à ceux du marché.
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Face à ces modèles utilisant les contenus comme des éélments parmi d’autres dans
une stratégie économique globale, aux côtés d’activités de publicité ou de petites annonces, certains considèrent que les articles et les enquêtes peuvent être vendus en l’état car
ils possèdent une valeur intrinsèque suffisante pour rentabiliser les coûts investis dans
leur production.
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Le magnat australo-américain de la presse, Rupert Murdoch, est devenu la figure
emblématique de ce modèle d’affaire. Depuis la fin 2009, il multiplie les déclarations
martiales expliquant que les sites de médias doivent devenir invisibles sur Google, qui
pompe indument leur valeur, et n’être accessibles qu’à ceux qui accepteront de payer.
Cette stratégie a été mise en place par The Times à Londres au début du mois de juillet.
Les premières indications de fréquentation indiquent que le trafic s’est logiquement
effondré mais aucune donnée précise n’a encore été communiquée par le groupe pour
permettre d’évaluer la pertinence économique de cette décision.
Toutefois, les stratégies payantes peuvent recouvrir une mosaïque de cas où les péages
font parfois suite à des décisions idéologiques, pragmatiques ou, plus simplement, à une
absence de décision.
En France, Médiapart est le site emblématique de ce modèle et l’un des plus importants
en termes de chiffre d’affaires. Son fondateur, Edwy Plenel, affirme qu’il faut « réintroduire de la valeur » dans les médias. Dans son expression la plus directe, la valeur se
définit en espèces sonnantes et trébuchantes, si bien que la grande majorité des contenus
produits par les journalistes se retrouvent derrière une porte que l’on ouvre moyennant
un abonnement à 9 € par mois.
Cette décision n’a pas manqué d’attirer les foudres des partisans du gratuit. En effet,
internet est né de l’hyperlien, qui permet de naviguer de page en page de manière fluide et
de « butiner » ainsi de site en site. Dès lors qu’un acteur du web décide de se réfugier derrière un mur payant et de bloquer la diffusion de ses contenus, il s’exclut des mécanismes
inhérents à l’écosystème du web. Pourtant, cette décision, bien que s’inscrivant à contrecourant des usages des internautes et des pratiques des sites d’actualité, semble porter ses
fruits. Selon Médiapart, le taux de réabonnement avoisine les 80% et la croissance des
abonnés reste stable – même si elle dépend en grande partie des scoops mis en ligne qui
provoquent à chaque fois des pics d’abonnement. Le seuil de rentabilité, situé selon Edwy
Plenel autour de 55 000 abonnements, devrait pouvoir être atteint en 2013.
En France, Arrêt sur images (@si) a été parmi les premiers à passer d’un format gratuit
en télévision à une offre payante en ligne. Après avoir vu son émission de critique des médias
supprimée de la grille de la chaîne France 5, Daniel Schneidermann s’est lancé sur le web,
demandant aux internautes de s’abonner pour couvrir les coûts fixes du programme. Après
une période initiale de quelques mois où l’ensemble des contenus étaient accessibles gratuitement, l’équipe a mis en place son mur payant dans lequel des brèches sont régulièrement
percées. Les brèves (rubrique « Vite dit ») sont accessibles à tous ainsi que des contenus plus
étoffés que les abonnés peuvent rendre gratuits dès lors qu’ils les qualifient « d’utilité publique ». Au-delà de ces dispositifs, si l’équipe parvient à faire payer ses abonnés a priori, c’est
parce qu’elle avait déjà démontré sa crédibilité par ses années de télévision.
Les études de cas de Médiapart et d’Arrêt sur images, présentées en annexe, conduisent à remarquer que dans les deux cas, les modèles payants se sont développés autour
de personnalités fortes. D’un côté, un ancien directeur de la rédaction du Monde, qui
a su capitaliser sur son seul nom et convaincre à la fois les journalistes et les premiers
abonnés de la pertinence de son modèle. De l’autre, le cas d’Arrêt sur images, où Daniel
Schneidermann a tiré avantage de son exposition télévisée et a su convertir le parfum
de scandale suite à la déprogrammation de son émission, pour s’ériger en victime d’un
système médiatique malade.
Au final, les personnalités des fondateurs et leurs images respectives ont joué un rôle
fondamental dans la construction des marques des deux médias, si bien que l’on peut se
demander si les abonnements qu’ils collectent ne reflètent pas un soutien au combat qu’ils
incarnent plutôt qu’une validation d’un modèle de financement de contenus journalistiques. Pour formuler la question autrement : doit-on considérer dans leurs cas que les
utilisateurs payent pour des contenus ou qu’ils décident de soutenir une personnalité et
la cause qu’elle incarne ? Sans doute un peu des deux.
Les murs payants sur le web peuvent également procéder d’une volonté de ne pas cannibaliser les ventes sur un autre canal, plus rentable. C’est par exemple le cas de titres comme
Alternatives Economiques ou Le Canard Enchaîné qui n’ont pas d’urgence à réinventer un
modèle économique. Au-delà de compétences techniques à acquérir, l’innovation en ligne
reste, pour ces deux titres, un domaine où le besoin d’investissements n’est pas pressant, ce
qui explique qu’ils utilisent le web comme un moyen de réduire le coût d’acquisition des
abonnés papier (Alternatives Economiques) ou même pas dans ce but (Canard Enchaîné).
Enfin, certains médias voient dans les nouveaux canaux de distribution digitaux, des
moyens de monétiser un contenu offert par ailleurs ; la valeur ajoutée provenant d’une
facilité d’utilisation sur de nouveaux supports. Nunzio Michael Lupo, responsable des
produits digitaux au Journal-Constitution d’Atlanta, fonde beaucoup d’espoirs sur l’application iPad de son quotidien. Elle sera commercialisée avec un abonnement de 9,99 dollars par mois et offrira aux abonnés les contenus du site mis en forme pour la tablette
à succès d’Apple. Le quotidien n’est pas le seul à voir dans l’iPad et dans ses ventes en
croissance exponentielle, une porte salvatrice pour des modèles économiques chancelants.Que ce soit l’appstore d’Apple ou le marketplace de Google (ou Ovi de Nokia, ou
d’autres systèmes centralisés de vente d’interfaces), ces écosystèmes fermés ont pu rassurer
les décideurs média et leur donner un sentiment de reprise de contrôle sur un marché qui
les dépassait depuis plus de 10 ans. Pourtant, les mécanismes à l’œuvre sont fondamentalement les mêmes sur l’appstore que sur le web. La concurrence par les prix fait rage et
quiconque peut y proposer une application gratuite réutilisant l’information-commodité
que l’on trouve gratuitement partout. Dès lors, une application payante doit se distinguer
par une valeur ajoutée suffisante, en termes de contenus ou d’usages. Mais l’arrivée de
nouveaux canaux de distribution ne change pas les équilibres du web.
Hors du web, le payant permet encore de faire vivre de nombreuses rédactions, qui
disposent parfois d’une présence en ligne minimale. Difficile, là encore, de faire la part
des choses dans la démarche des lecteurs entre l’achat de contenus et l’achat de l’objetmagazine, les deux restants intrinsèquement mêlés. La revue XXI, par exemple, s’est
lancée sur papier uniquement et ne dispose en ligne que d’un blog. Pourtant, le résultat
après près de 3 années d’activité est singulièrement positif.
Cette importance accordée au support peut conduire au reverse-publishing, où un
média publie sur papier des contenus nés sur internet. Rue89 s’essaye ainsi au payant
sous forme de magazine mensuel depuis juin 2010. Le modèle fonctionne, le site parisien
ayant maintenu sa diffusion au-delà de l’effet de curiosité qui pouvait expliquer le succès
du premier numéro.
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La forme la plus évidente de diversification sur internet, aux côtés des activités éditoriales, demeure le monde des petites annonces. Les groupes de presse peuvent alors imiter
les modèles d’affaires des quotidiens papiers, où les pages d’annonces subventionnent les
activités de la rédaction.
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C’est la stratégie menée avec succès en France par le groupe Le Figaro, qui a réussi
le tour de force de reprendre position sur un secteur des petites annonces qui lui avait
échappé à l’arrivée du web. En multipliant les acquisitions, le groupe a créé un ensemble
de sites de petites annonces dégageant un chiffre d’affaires de plus de 60 millions d’euros
annuels. AdenClassified, l’entité regroupant ces sites, possède désormais des marques
dans tous les secteurs, de la météo aux annonces d’emploi en passant par les loisirs. Au
Royaume-Uni, le groupe Daily Mail and General Trust, qui possède le Daily Mail, entre
autres, suit la même stratégie au sein de sa joint-venture Associated Northcliffe Digital.
Un ensemble de sites largement rentables rachetés à des start-ups, permet au groupe de
dégager des marges qui sont ensuite réinjectées dans l’ensemble du groupe, y compris
dans les activités éditoriales.
Pourtant, si cette stratégie reste proche du modèle ancien, c’est aussi celle qui utilise le moins les synergies possibles avec la rédaction. Les deux activités – éditoriales et
commerciales – sont totalement séparées, au point que même les marques ne se soutiennent pas entre elles. Explorimmo fait ainsi peu de cas de son appartenance au même
groupe que Le Figaro.
Sur papier, les petites annonces ont besoin de l’éditorial pour donner une raison aux
lecteurs d’acheter le journal, même si les équipes commerciales ne peuvent déterminer
avec certitude quelle était la réelle motivation de chaque achat. Sur le web, la dématérialisation des contenus fait que les deux activités se séparent entièrement, celui ou celle
voulant lire l’actualité se rend sur le site du média, tandis que celui ou celle recherchant
un emploi ou une voiture peut se rendre directement sur le site approprié. En d’autres
termes, l’activité rentable n’a plus besoin de trainer un boulet perdant de l’argent.
En Turquie, le groupe Doğan Media, éditeur, entre autres, du quotidien Hürriyet, l’a bien
compris. Dans son désir d’étendre son activité en Europe centrale et orientale, il a racheté
le groupe de petites annonces Trader Media East, présent dans une vingtaine de pays sur
les créneaux classiques de l’annonce automobile ou immobilière. Même si le groupe a été
relocalisé de Londres à Istanbul et que des partages de compétences sont en cours entre les
activités turques et est-européennes, les stambouliotes excluent totalement d’investir dans
une activité éditoriale en dehors de la Turquie ou dans une autre langue que le turc.
Cet exemple montre bien comment la rentabilité de la branche d’un groupe, bien que
totalement intégré au modèle d’affaire des versions papier, n’annonce absolument pas le
sauvetage de rédactions déficitaires. Au contraire, elle pourrait amener certains groupes
de presse à se repenser en tant que groupes de publicité et de petites annonces et à se
séparer de l’éditorial, ou à l’externaliser.
des hors-séries financés par des partenaires. Par ailleurs, les interventions de son PDG lors
de conférences, ne se facturent pas en espèces mais en achat d’exemplaires du magazine.
La formation s’immisce également dans les activités de plusieurs start-ups. Rue89 et
OWNI, par exemple, tirent une partie non-négligeable de leurs revenus de ces formations, largement consacrées au journalisme et à la communication sur le web. Dans ces
deux entreprises, entre 10% et 30% du chiffre d’affaires provient de telles activités, réalisées le plus souvent par les journalistes eux-mêmes. Chez Terra Eco, l’organisation de
conférences est également une source de revenus annexes. Mais, comme chez OWNI et
Rue89, elle reste minoritaire.
En définitive, les activités sur lesquelles les journalistes pourraient sans doute être techniquement les plus pertinents - conseil, analyse stratégique, aide à la décision, lobbying –
ne sont pas du tout développées par les groupes de médias. Les risques de conflit d’intérêt
seraient alors à leur maximum et sans commune mesure avec ceux auxquels doit faire
face la presse traditionnelle. Les frontières entre lobbying et journalisme sont déjà de
plus en plus poreuses. En effet, une tendance de fond pousse les organisations nongouvernementales et les groupes de pression à effectuer un travail d’ordre journalistique
pour réaliser des enquêtes ou des reportages qui viennent appuyer leurs combats.
Dans son enquête « En route pour une électronique verte », par exemple, Greenpeace
fournit un travail d’investigation sur 37 appareils électroniques, classés selon des critères liés au développement durable. La méthodologie, clairement énoncée, évite que le
dossier ne se résume à un article à charge contre les fabricants d’électronique et prend la
forme d’une étude classique. Les multiples reprises des résultats de cette enquête dans les
journaux ou sur le web, où l’on retrouve souvent des éléments de langage copiés directement des communiqués de presse, montrent que les contenus proposés par les médias et
consommés par les utilisateurs finaux sont en réalité intégralement financés par l’ONG.
De telles études sont désormais monnaie courante. Greenpeace n’est, par ailleurs, pas le
seul à poursuivre une stratégie médiatique agressive, cherchant à introduire dans les médias
des contenus similaires à ceux typiquement produits par les journalistes mais financés par
des tiers. La multiplication des think tanks, des lobbys et des agences de communication
augmente considérablement la masse de contenus dont la production n’a pas été financée
par les médias eux-mêmes. Le guide de l’électronique verte de Greenpeace, par exemple,
est régulièrement cité par Nokia (qui arrive en tête du classement). L’ONG est ainsi capable de produire un travail journalistique, d’influencer le débat public et les actions des
fabricants, en utilisant les médias comme une simple plateforme de diffusion.
De manière révélatrice, Greenpeace diffuse désormais des annonces pour embaucher
directement des journalistes. Dans un écosystème marqué par des vagues de licenciements
et des salaires en berne, l’appel de rémunérations plus élevés permet à ces organisations
para-journalistiques de capter une large part du talent disponible. La diversification des
sources de revenus ne se fait ainsi pas uniquement à partir des groupes de médias vers des
activités plus rentables, mais aussi au sein même de groupes disposant déjà d’un cœur de
métier et cherchant à étendre leur territoire en utilisant les outils, techniques et méthodes
des journalistes.
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Face à cette dissociation complète des activités rentables et non-rentables, certains
groupes de média tentent de mettre à profit les synergies qui peuvent avoir lieu afin de
donner un rôle à la rédaction dans des activités plus rémunératrices. Ne serait-ce qu’en
termes d’image, par exemple, Kaplan, la succursale du groupe Washington Post proposant des formations d’éducation supérieure et des livres scolaires, utilise la marque du
titre de presse pour améliorer l’image de ses prestations. A titre de comparaison, sur les
propriétés du groupe AdenClassified, il n’est jamais fait mention des liens d’appartenance
entre le site et le groupe possédant Le Figaro.
En France, certains titres mettent à contribution leurs propres journalistes afin de
diversifier leurs offres. C’est le cas, par exemple, d’Alternatives Economiques, qui rédige
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Prenant à contrepied cette démarche associant journalistes et activités annexes non journalistiques (formations, conférences, etc.), certaines rédactions font le pari de synergies
entre la vente de produits totalement étrangers à l’univers rédactionnel et la production
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d’articles. Sans rentrer dans une forme d’advertorial, qui mélange allègrement publicité et
rédactionnel, et sans avoir recours aux articles payés et commandés par certaines marques
ou personnalités, plusieurs titres diversifient leurs sources de revenus en se rendant utiles
auprès du lecteur dans sa vie de tous les jours. La consommation de contenus n’est alors
qu’une étape dans une chaîne de propositions où la marque média accompagne l’utilisateur depuis l’information sur un produit jusqu’à sa livraison éventuelle.
Chez Aftonbladet, premier quotidien de Suède, les articles sur des thèmes magazines,
comme la cuisine, l’art ou les voyages sont associés à une boutique en ligne. Pour prendre
l’exemple d’une critique musicale, le site propose à l’utilisateur d’acheter directement le
CD de l’artiste sans quitter le site. Aux États-Unis, Sean Gallagher, du Los Angeles Times,
explique vouloir suivre le même chemin et proposer aux internautes non plus des contenus mais du « confort » (« sell convenience »). Ainsi, pour une recette de cuisine, Sean
Gallagher veut mettre en place des partenariats avec des chaînes de supermarché californiennes qui prépareraient des paniers composés des ingrédients de l’article. L’utilisateur,
après son achat en ligne n’aurait plus qu’à passer le récupérer. De la même manière, il
veut pouvoir proposer des voyages organisés sur les traces des récits des journalistes de la
rubrique ‘voyage’.
Ces mécanismes ont longtemps été utilisés par certains blogueurs, qui s’appuient
sur les solutions de sites comme Amazon et leurs programmes d’affiliation. Différence
de taille : en gérant directement leur espace de vente, les médias sont capables de se
passer d’un intermédiaire vorace à la commission dépassant souvent le tiers du prix de
vente. En termes de stocks, la vision des journalistes et des éditeurs peut permettre de
disposer au moment adéquat de la marchandise souhaitée par les clients. Aftonbladet
a par exemple pu vendre des vuvuzélas, ces accessoires bruyants typiques de l’Afrique
du Sud, pendant la Coupe du monde de football 2010, quand des sites marchands
auraient eu plus de mal à détecter l’engouement de la population pour cet instrument
symbolique.
Par ailleurs, cette stratégie se distingue des ventes de produits tels que les DVD, CD ou
encyclopédies, fréquemment offerts avec les quotidiens papier. Là où le média proposait
un produit brut et froid, comme un livre-DVD sur la Seconde Guerre mondiale – pour
prendre l’exemple d’une action menée par Le Figaro – Aftonbladet et le LA Times sont
capables d’accompagner l’utilisateur tout au long de son expérience de consommation,
reprenant leurs rôles de prescripteurs.
de presse agrégative, utilisant son pouvoir de recommandation pour devenir un filtre
puissant entre producteurs de contenus et acheteurs.
Suivant le même modèle de ré-agrégation, des sites incontournables, comme Orange,
créent des portails. Ils profitent de leur position de point d’entrée sur le web, que ce soit
grâce à la nature de leur page d’accueil par défaut (free.fr, orange.fr, etc.) ou de boîte mail
(MSN, Yahoo!) pour attirer l’audience et vendre des pages vues aux annonceurs. A cette
fin, ils payent les créateurs de contenus pour pouvoir re-publier leurs articles. Sans avoir
besoin de monter de toutes pièces une rédaction multimédia, ces portails peuvent présenter à leur audience des contenus d’actualité.
Le financement de l’information sur ces portails est assuré par la vente d’espaces publicitaires et d’offres d’affiliation. « J’achète du contenu à des marques médias et je le propose
ensuite gratuitement aux visiteurs », explique David Lacombled d’Orange. Ces contenus
qu’Orange commande à environ 300 fournisseurs d’information – ce qui en fait l’un des
principaux acheteurs d’information sur internet en France – l’entreprise les finance par
la publicité et des partenariats commerciaux. A l’image de la grande distribution, David
Lacombled, directeur de l’antenne et des programmes d’Orange explique : « Je vends du
linéaire à des grandes marques comme Meetic ou eBay dans mes rayons thématiques (actualité,
sport, finances...) ».
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Dès lors que l’on passe en ligne, le rapport au contenu change du tout au tout. Un
média traditionnel se définit par sa forme physique : un nombre de pages dans la presse
écrite, une durée diffusée à la radio ou la télévision. Sur le web, tous ces éléments peuvent
être divisés en une infinité de pièces les constituant, que ce soient les articles, les clips
vidéo ou les photos. Cette spécificité du format digital permet une désagrégation et une
ré-agrégation des contenus.
Cela a donné naissance à de nouveaux modèles d’affaires, que l’on pourrait rapprocher, dans les médias traditionnels, des anciens modèles de syndication des contenus. Un
site comme AllAfrica, par exemple, anime une équipe d’éditeurs qui ajoutent de la valeur
aux articles de la presse africaine en sélectionnant les meilleures sources du continent et
en en extrayant des flux qui sont ensuite revendus à des spécialistes de l’Afrique, tels des
ONG ou des institutions internationales. Le site se place ainsi dans une position d’agence
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À contrepied des modèles d’affaires traditionnels, qui postulent qu’un média ne peut
être indépendant que s’il assure lui-même sa propre autonomie financière, plusieurs
acteurs sont financés intégralement ou en grande partie par des subventions publiques,
parfois en provenance directe des gouvernements.
La BBC reste l’un des meilleurs exemples de média subventionné par des fonds publics.
La contrepartie tient dans la mission de service public qu’elle doit remplir. Si ce schéma
était assez clair à l’ère de la télévision ; sur internet, les cartes sont brouillées. Si quiconque peut accéder au site de la BBC, les contribuables britanniques payent donc pour
l’information fournie à des utilisateurs étrangers. Ces problèmes de fond sont largement
discutés au sein de la vénérable institution londonienne et la version internationale du
site comporte désormais de la publicité, depuis 2006.
Des modèles similaires de médias considérés comme services publics existent dans la
plupart des pays européens, mais leur nature varie fortement. En Allemagne par exemple,
un collectif de groupes de médias publics contrôle l’organe de collecte de la redevance
(la GEZ ou Gebühreneinzugszentrale) et a obtenu en 2007 d’être considéré comme une
institution indépendante après une bataille devant la cour constitutionnelle de Karlsruhe.
Le contrôle de l’exécutif sur les médias de service public se renforce avec l’apparition de
nouveaux groupes, à visée notamment extérieure. BBC World News, par exemple, qui n’a
guère en commun avec la BBC que la marque, est financé directement par le Foreign
Office britannique. Entre 2008 et 2010, son budget est passé de 241 millions à 272 millions de livres, soit une hausse de 13% en pleine crise des médias (la diminution de près
de 20% du budget du ministère dans le cadre du plan d’austérité de David Cameron
risque d’impacter négativement les budgets du World News Service).
Cette tendance au financement direct par les ministères se vérifie dans plusieurs pays.
En France, l’État accorde 300 millions d’euros à la société Audiovisuel Extérieur de
la France pour animer les marques de France24, RFI et – en partie – TV5 Monde. En
29
2:
revanche, Al Jazeera, au Qatar, peut compter sur la générosité de son premier mécène,
l’émir lui-même, pour renflouer ses caisses lorsque ses revenus propres ne lui permettent
pas de faire face à ses charges. Le total des dons ou des prêts bonifiés de l’émir dépasserait les 200 millions de dollars. De la même manière, Radio Free Europe/Radio Liberty
est financée à hauteur de 75 millions de dollars par le Sénat américain ; les attentats du
11-Septembre ayant enrayé la diminution de ses budgets, amorcée à la fin de la Guerre
froide. La liste pourrait s’allonger, chaque État semblant désireux de promouvoir sa vision
du monde en inondant le paysage médiatique de contenus.
Parallèlement à ces médias nés de la volonté même de l’exécutif, de nombreuses autres
entreprises sont financées totalement ou en partie par les mêmes moyens. La différence
tient alors à la largesse des mécènes, qui ne sont plus dans une dynamique de communication mais de soutien à la pluralité des expressions médiatiques. Parmi les médias étudiés dans ce rapport, Café Babel et Congo Blog Ba Leki tirent tous deux la majorité (voire
la totalité) de leurs revenus de subventions extérieures. La faiblesse des sommes en jeu (respectivement 600 000€ par an et 180 000€ au total) permet à des entités plus décentralisées
de l’appareil administratif, de financer des initiatives locales. Les ambassades, norvégiennes notamment, fournissent une part importante des revenus de sites tentants de mener
des enquêtes de qualité en Géorgie (www.civil.ge) et en Arménie (www.hetq.am).
Par ailleurs, le financement public peut prendre des formes dérivées. La publicité des
institutions publiques fournit parfois une part vitale des ressources d’un titre. Lorsque la
mairie de Lyon a voulu réagir à une ligne éditoriale jugée trop hostile dans Lyon Capitale,
Gérard Collomb, maire de cette ville, a par exemple décidé de suspendre les publicités
municipales dans le magazine. De la même manière, la plupart des médias kosovars vivent
des petites annonces publiées par la KFOR, la force de l’OTAN chargée de la sécurité du
pays, et par EULEX, la task-force de l’Union européenne chargée de l’implémentation de
l’état de droit. Si cette forme de subvention est moins directe que des dons ou des prêts
en espèces, les éditeurs et les analystes du pays ne sont pas dupes de leur importance dans
l’écosystème médiatique local.
de journalisme en ligne. De la même manière, mais depuis plus longtemps, l’Église de la
science chrétienne subventionne le Christian Science Monitor afin qu’il offre un journalisme de qualité, originellement opposé à l’émergence de la presse de boulevard, au début
du XXème siècle.
De telles initiatives sont plus rares en Europe, où la tradition de mécénat est loin d’être
aussi développée qu’aux États-Unis. A l’inverse, le patronage se pratique plus de ce côté-ci
de l’Atlantique. Le modèle patron-client représente le cas de figure où le mécène n’est pas
désintéressé, mais cherche une contrepartie pour son investissement. De nombreux industriels, en France, en Russie ou encore au Royaume-Uni ont racheté ou investi dans des titres
de la presse traditionnelle, à la recherche de prestige ou d’influence. Leurs investissements
ne se limitent pas au rachat de marques établies, où le risque commercial est faible.
En Bulgarie par exemple, le site d’investigation Frognews.bg remercie publiquement son
parrain et patron, Mladen Mutafchiyski, sur sa page « à propos » (à titre de comparaison,
il est bien difficile de trouver une mention du groupe LVMH sur le site des Échos, malgré
le rachat du titre par le groupe de luxe en 2007). Pourtant, M. Mutafchiyski traine derrière lui une réputation sulfureuse, ses actifs comprenant notamment l’usine d’armement
Teraton. En Russie, le site d’actualités économiques BFM.ru, lancé en 2008 au début de
la crise financière, a pour but explicite de donner un point de vue différent de celui du
Kremlin qui pourtant cette année-là, répétait à tous les journalistes que la crise épargnerait
le pays. Cette ligne éditoriale fortement indépendante était financée par Arcadi Gaydamak,
riche oligarque israélo-russe, ayant lui aussi des intérêts dans le commerce d’armes et utilisant clairement les médias à des seules fins d’influence. Il a en effet déclaré, en rachetant
l’hebdomadaire Moskovskiye Novosti en 2004, qu’il aurait pu investir dans un club de sport
ou une marque prestigieuse, son seul but étant d’acquérir un nouveau statut.
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De la même manière que des institutions publiques financent des médias pour atteindre des objectifs précis (à but diplomatique ou pour se doter d’un paysage médiatique à
« l’occidentale »), des institutions ou des personnes privées utilisent également des sites
d’actualité à des fins précises.
Les motivations des mécènes tiennent parfois de la bonne action, dans la tradition
des charities américaines. Un site comme ProPublica, par exemple, récent vainqueur
d’un prix Pulitzer et fort d’une rédaction de près de 30 journalistes, vit en grande partie
d’un don des époux Sandler, un couple richissime ayant fait fortune dans les assurances.
D’autres mécènes financent la presse en ligne, surtout aux États-Unis. De tels patrons
font des dons directement à des projets ou confient des sommes colossales à des fondations chargées de les redistribuer. Le capital-risqueur John Thorton, a ainsi investi un
million de dollars de sa fortune personnelle pour permettre la création du Texas Tribune,
un site dédié à la couverture de la politique au Texas. A Minneapolis, quatre familles de
la ville ont réuni 850 000 dollars pour lancer MinnPost.com, un autre site local à vocation de service public. Du côté des entreprises, le legs de 5 millions de dollars de la part
de Google pour « développer de nouvelles approches dans le journalisme à l’ère digitale »,
montre l’implication des différents acteurs du non-profit pour financer les expériences
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D’autres formes de mécénat privé se développent, faisant intervenir les micro-payements
de sponsors ou de particuliers. Ainsi, Spot.us, une jeune compagnie américaine ayant
reçu sur son compte un don d’un montant de 340 000 dollars de la fondation Knight
pour l’avancement du journalisme, propose aux utilisateurs de financer les enquêtes de
manière collaborative. Chacun peut proposer un sujet d’enquête, libre ensuite aux internautes de contribuer à son financement. Si le modèle a peiné à démarrer, avec seulement
une cinquantaine d’articles produits en 18 mois, la plupart n’étant pas financés à 100%
par les internautes ou les médias partenaires (le site utilise alors ses propres réserves pour
compléter), une nouvelle dynamique est à l’œuvre. En effet, David Cohn, le fondateur du
site, intègre désormais les annonceurs au processus de financement. Chaque internaute
peut répondre à un questionnaire de marketing pour un annonceur, qui reverse ensuite
une somme donnée (quelques dollars) à un projet d’enquête. Quelques mois après son
lancement, cette fonctionnalité semble promise à prendre de l’ampleur.
Enfin, le financement par des tiers privés peut prendre la forme d’une « pollinisation croisée » entre entités à but lucratif et d’autres sans vocation commerciale immédiate. À Paris, le site OWNI, édité par la société 22mars, fonctionne de la sorte. Le média
pousse les portes de l’innovation, de manière à développer de nouvelles interfaces et de
nouvelles manières de mener le récit ; cette expertise étant ensuite proposée aux clients
de 22 mars qui développe et vend des plateformes de publication sociales et des interfaces
de visualisation.
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À la recherche de modèles économiques si possibles stables et pérennes, les médias
présentés ici, tentent, pour nombre d’entre eux, d’élargir le périmètre économique de
leurs activités. Cette extension de leur spectre d’action peut faire surgir des conflits
d’intérêt.
Aujourd’hui, ces médias ont adopté différentes solutions pour tenter de répondre aux
enjeux éthiques en combinant des chartes déontologiques et un souci plus ou moins
affirmé de transparence et de contrôle donné au public.
Qu’ils soient anciens ou de création plus récente, ces médias n’ont plus une audience –
comme l’a fait remarquer Jay Rosen dès 2006 dans « The People Formerly Known as The
Audience » (« ceux que l’on appelait auparavant l’audience ») -, mais « des lecteurs-quiécrivent, des auditeurs-qui-parlent et des spectateurs-qui-photographient-ou-filment » sans
avoir besoin des médias pour diffuser leur production.
Autre changement intervenu ces dernières années : chacun dans le public a aussi la
capacité de ne plus être seul et isolé face au média. Créer ou rejoindre une communauté
composée d’autres individus comme soi est devenu chose simple.
Conséquence de ces bouleversements liés à la numérisation des outils de production
et à la mise en réseau généralisée, la communication n’est plus aussi asymétrique avec un
émetteur et un récepteur aux rôles assignés une fois pour toutes.
L’émergence de cette « audience active » – pour reprendre la formule de Mark Thomson,
directeur général de la BBC – vient changer la donne et modifier l’équilibre (ou le déséquilibre, c’est selon) des échanges. L’« audience active » aspire à prendre part aux débats, à
créer, à communiquer, à partager. Autant d’évolutions qui bouleversent l’activité de ceux
que Jay Rosen appelle en 2010 « The Journalists Formerly Known as The Media » (« les
journalistes que l’ont appelait auparavant les médias »).
La plupart des médias rencontrés au cours de nos travaux (et notamment ceux qui se
sont développés sur de nouveaux supports), se sont posés la question du lien de confiance
et de la relation qu’il convenait de tisser avec leurs publics. Ce lien, de nombreuses études
montrent qu’il s’est amoindri au fil des années, qu’il s’est usé, aux yeux du public, par un
soupçon de connivence, voire de manque d’indépendance vis-à-vis des pouvoirs politiques ou économiques.
Il apparaît évident que la confiance dont les médias seront désormais crédités dépendra in fine de la manière dont ils traiteront ces questions.
Dans ce contexte, les dispositifs mis en place par les médias de notre panel peuvent se classer en différentes catégories (certains choisissent des combinaison de plusieurs dispositifs) :
t ceux qui gèrent les questions de déontologie sans s’appuyer sur des textes ;
t ceux qui développent des chartes internes qui ne sont pas communiquées à
l’extérieur de l’entreprise ;
t ceux qui développent des chartes publiques ;
t ceux qui se réfèrent à des chartes générales comme la charte de Munich ;
t ceux qui organisent le cloisonnement de leurs activités ;
t ceux qui privilégient la transparence financière ;
t ceux qui favorisent et organisent le dialogue avec leur public ;
t ceux qui donnent (en partie au moins) le contrôle au public.
32
Mb!qsbujrvf!of!tÖbqqvjf!qbt!upvkpvst!tvs!eft!ufyuft
Au fil de nos rencontres, nous avons pu constater que certains médias ne considèrent
pas devoir consacrer temps et énergie à rédiger des cadres déontologiques précis. Cela
ne signifie pas nécessairement un désintérêt de leur part mais plutôt le choix de modes
moins formalisés pour gérer les questions déontologiques.
SFWVF!YYJ!;!MF!È!CPO!TFOT!É!FU!MÖFYQ„SJFODF
C’est le cas de la revue XXI. Si de l’avis général de la profession, le trimestriel propose
des articles de grande qualité et d’une probité intellectuelle sans reproche, le directeur
éditorial, Patrick de Saint-Exupéry assure ne se référer à aucun texte particulier et s’en
remettre au bon sens lorsque des dilemmes éditoriaux peuvent surgir.
La limpidité du modèle économique (XXI ne tire ses recettes que des ventes en kiosque
et des abonnements) rend plus facile la gestion des questions de déontologie. Ici, pas de
charte écrite, mais pas vraiment de dilemmes cornéliens : « on applique les règles évidentes
et logiques issues de notre expérience », explique Patrick de Saint-Exupéry. « Notre principale
règle, c’est l’honnêteté », ajoute le directeur éditorial de XXI.
Il garde le souvenir de cette enquête publiée en 2009 sur la mort de Philippe de
Dieuleveult au Congo. L’auteur de l’enquête journalistique a été mise en cause pour avoir
acheté certains documents publiés dont l’un s’est révélé faux. Patrick de Saint-Exupéry
a décidé lui-même de transmettre les documents à la police scientifique, ce qui a permis
d’établir qu’effectivement l’un des documents avait été falsifié. « Cela n’invalide pas l’ensemble de l’enquête pour autant », ajoute-t-il. Dans un numéro ultérieur de la revue, les
lecteurs ont pu lire un article détaillant ces nouveaux éléments.
TVJUF!212!;!PO!OF!TÖBUUBSEF!QBT!TVS!MFT!RVFTUJPOT!EF!E„POUPMPHJF
Situé à l’exact opposé de la revue XXI en terme de modèle éditorial et économique, le
site Suite101 ne s’attarde pas sur les questions de déontologie. Ici les auteurs écrivent sur
les sujets de leur choix pour des pages qui afficheront des publicités délivrées par Google.
Peu de risque de collusion et peu d’effort non plus pour s’assurer de la crédibilité des
articles qui ne sont relus qu’à posteriori. La sélection initiale des contributeurs et une
relecture après publication tiennent lieu de rempart.
BMUFSOBUJWFT!„DPOPNJRVFT!;!PQJOJPOT!BGGJSN„FT!FU!È!FYJHFODF!JOUFMMFDUVFMMF!É
Le mensuel Alternatives économiques, qui se présente comme un « journal d’opinion », préfère se référer à une « déontologie de l’exigence intellectuelle » à laquelle
aspireraient ses lecteurs, plutôt qu’à des chartes déontologiques classiques. La liberté d’expression, Philippe Frémeaux, le PDG de la société coopérative qui édite le journal, estime
qu’elle existe à l’échelle de la presse française et que son journal ne doit pas être seul à la
mettre en oeuvre.
L’indépendance de ton revendiquée par le patron de ce mensuel, dont la solidité économique serait le garant, ne va pas sans quelques ambiguïtés, notamment lorsqu’il s’agit de
réaliser des numéros hors série commandés par des partenaires qui s’engagent à en acheter
quelques milliers d’exemplaires. Une situation qui n’est pas des plus confortables de l’aveu
du patron qui explique : « on ne va pas attaquer nos partenaires, c’est sûr, mais on ne va pas
en dire du bien pour autant; l’auto-censure fonctionne dans les deux sens ».
33
UIF!JOEFQFOEFOU!;!VO!DPEF!NPSBM!OPO!„DSJU
Le quotidien londonien The Independent ne dispose pas de charte éditoriale écrite.
Martin King, le rédacteur en chef du site web, assure que l’ensemble des journalistes
obéissent à une sorte de « code moral » implicite, issu de l’expérience accumulée par
les journalistes de la rédaction. Comme les autres titres de la presse britannique, The
Independent est néanmoins sous le regard de la Press Complaints Commission (Conseil de
presse), vers laquelle les lecteurs peuvent se retourner s’ils estiment la déontologie journalistique bafouée. La commission fonde ses avis sur la base d’un Editor’s code of practice,
régulièrement mis à jour.
Mb!epoupmphjf!gpoef!tvs!eft!dibsuft!joufsoft
Plusieurs médias interrogés nous ont expliqué aborder les questions de déontologie en
s’appuyant sur des chartes internes, élaborées progressivement et qui s’enrichissent des
fruits de l’expérience.
PSBOHF!;!MFT!DIBSUFT!EF!MÖPQ„SBUFVS!U„M„QIPOJRVF
Le portail de l’opérateur téléphonique Orange est l’un des premiers sites d’information en France par le volume du trafic qu’il génère ainsi que par le montant de ses
achats de contenus auprès des médias. En terme de déontologie, l’équipe – qui ne compte
aucun journaliste dans ses rangs – se réfère à la charte de déontologie très générale et aux
différentes chartes (sur la protection des données personnelle, de l’enfance, etc.) élaborées
par le groupe pour couvrir l’ensemble de ses activités.
BMMBGSJDB/DPN!;!VO!XJLJ!QPVS!MFT!„EJUFVST
AllAfrica.com agrège des articles venus de toute la presse africaine en échange d’un
partage des revenus publicitaires générés sur son site. L’entreprise a développé également une clientèle de grands comptes, notamment parmi les institutions internationales
comme les Nations-Unies ou la Banque mondiale. Sur les questions éthiques, AllAfrica.
com est très sensible aux priorités de ses clients. Les articles des médias partenaires qui
pourraient relever du sexisme, de l’incitation à la haine raciale ou religieuse, ne sont tout
simplement pas diffusés sur AllAfrica.com. Il n’existe pas de charte à proprement parler
mais les éditeurs partagent leurs interrogations sur un wiki qui garde en mémoire la gestion des questions épineuses au fil des années.
DBG„!CBCFM!;!VOF!DIBSUF!NBJTPO
Site multilingue alimenté par un réseau de bénévoles encadrés par une poignée de
journalistes, Café Babel dispose d’une charte éditoriale élaborée en 2003 et remise à jour
tous les deux ans depuis cette date.
D’un point de vue déontologique, les risques de conflits d’intérêt liés à la publicité
apparaissent assez limités dans la mesure où les articles sont d’abord proposés par les membres de la communauté n’ayant aucun lien avec les annonceurs ou financeurs éventuels.
L’importance des subventions en provenance des institutions européennes peut néanmoins provoquer quelques frictions, mais les journalistes professionnels de la rédaction
centrale à Paris veillent au grain. « Nous sommes assez intégristes sur ces questions », explique
Alexandre Heully, délégué général de Café Babel.
34
DPOHP!CMPH!CB!MFLJ!;!EFT!QSJODJQFT!EF!T„DVSJU„
Média-école mis sur pied pour enseigner les techniques du journalisme en ligne à de
jeunes Congolais – et financé par la coopération franco-britannique -, Congo Blog Ba
Leki a développé son propre code de déontologie basé sur l’expérience acquise par son
fondateur, Cédric Kalonji. « On ne cite pas le nom des personnes que l’on met en cause lorsque que l’on évoque des sujets comme la corruption, car cela peut-être dangereux », explique
le journaliste qui n’oublie pas que plusieurs de ses confrères ont été assassinés au Congo
ces dernières années.
« L’idée de cette charte, que nous avons élaborée en commun au cours de l’une des sessions
de formation que j’ai animée à Kinshasa, c’est d’être le plus factuel possible dans nos articles »,
précise Cédric Kalonji. La charte (qui n’est pas disponible en ligne) bannit également les
publi-reportages qui font l’ordinaire de tant de titres de la presse congolaise.
Mft!dibsuft!ef!epoupmphjf!qvcmjrvft
Les chartes de déontologie les plus élaborées sont l’apanage des médias traditionnels
les plus anciens et les plus soucieux de respectabilité. Toutefois, les textes doivent évoluer
régulièrement et être mis à jour sous peine d’apparaître en décalage important avec les
pratiques professionnelles d’aujourd’hui.
XBTIJOHUPO!QPTU!;!MB!DIBSUF!B!CFTPJO!EÖVOF!NJTF!Ì!KPVS
Andy Alexander, médiateur du Washington Post, reconnaissait en 2009 que la charte
du journal, datant de 1999, « a sérieusement besoin d’être mise à jour car elle n’évoque pas le
cas des journalistes qui participent à des «événements» comme les diners, les séminaires ou les
conférences organisées par le Washington Post ; pas plus qu’elle ne traite les questions soulevées
par le journalisme en ligne ». Il précise : « une courte liste de principes en vigueur sur le web
existe mais c’est très vague et très peu connu des journalistes ».
Parmi les questions de déontologie soulevées par les pratiques du web, le médiateur souligne celle relative à la présence de liens sponsorisés dans les articles (exemple : liens vers une
librairie en ligne pour acheter un ouvrage dont les journalistes ont fait la promotion).
Dans un autre article, Andy Alexander expose les termes du clivage qui traverse la rédaction du Washington Post divisée entre journalistes « du papier » et journalistes « du web » :
« De nombreux journalistes très orientés web, sont plus enclins à publier un article sur
des faits qui ne sont pas complètement vérifiés, simplement parce-que c’est le buzz web du
moment et parce que cela va drainer des visiteurs. Les plus anciens, ancrés dans la culture
du papier, s’inquiètent du fait que la concentration d’information sur des célébrités people,
génératrices de trafic en ligne, puisse déconsidérer le Post, affaiblir sa marque et restreindre
son engagement pour un journalisme de service public (public service journalism). Si la
fréquentation du site finit par décider de la couverture de l’actualité, ils se demandent si
le Washington Post finira par décider de ne pas couvrir certains événements importants
parce qu’ils sont considérés comme ennuyeux ? »
Au sein de la rédaction, Milton Coleman, senior editor, est responsable des questions
d’éthique au Washington Post. Pour lui, l’éthique du vénérable journal se résume à « maintenir la crédibilité du titre, son intégrité, et à séparer clairement les faits des opinions ». Pour ce
faire, le journal cherche à éliminer les conflits d’intérêts à la racine. Au niveau politique,
« 99,9% des journalistes n’ont aucune relation avec un parti », ce qui est censé garantir leur
35
neutralité. Le centième restant, dont le conjoint a peut-être partie liée avec un homme
politique, discute en général avec son chef de service avant d’accepter un sujet sur lequel
on pourrait sentir poindre un soupçon de conflit d’intérêt.
On est loin des pratiques constatées sur le web, où la transparence règne en maître. Même chez Slate.com (propriété du Washington Post Group), les auteurs préviennent
leurs lecteurs lorsqu’un conflit d’intérêt peut être suspecté, en suivant le principe de full
disclosure (complète transparence).
La question de la déontologie renvoie donc aujourd’hui explicitement à la manière
dont la rédaction (voire les rédactions) aborde la question du journalisme en ligne. Si,
à l’heure du web, l’une des premières indications donnée aux jeunes étudiants en journalisme est de bien comprendre qu’ils ne peuvent plus prendre la parole juchés sur le
piédestal dont abusaient leurs aînés, alors les premières lignes de la charte du Washington
Post sonnent comme l’écho d’une époque révolue :
« Nous reconnaissons pleinement que le pouvoir dont nous avons hérité en tant que quotidien matinal dominant dans la capitale du monde libre s’accompagne de responsabilités
spéciales comme : écouter les sans voix, éviter toute forme d’arrogance, répondre au public avec
politesse et franchise. »
Dernière preuve, si besoin était, du chemin qui reste à parcourir. Il est impossible à
un lecteur/internaute normalement constitué de trouver la charte actuelle sur le site du
Washington Post.
UIF!HVBSEJBO!;!E„POUPMPHJF!FU!E„WFMPQQFNFOU!EVSBCMF
Ce nécessaire travail de mise à jour des principes qui organisent la vie éditoriale de la
rédaction, The Guardian l’a effectué à la faveur de sa remise à plat de son organisation.
A rédaction intégrée mêlant le papier et le web, charte unique posant des jalons pour
tous. Le groupe n’a pas voulu toutefois viser l’exhaustivité et a préféré se reposer sur des
principes simples.
Dans sa dernière version en date d’avril 2007, accessible en ligne, The Guardian’s
Editorial code postule que la crédibilité du Guardian repose sur la confiance qui existe
entre lui et ses lecteurs et/ou internautes. Les règles édictées dans ce court texte de 6 pages
s’appliquent aussi bien aux membres permanents de l’équipe qu’aux pigistes.
Il est demandé aux journalistes de faire état auprès de leur hiérarchie des potentiels
conflits d’intérêt auxquels ils peuvent être confrontés au cours de leur travail. De plus,
des dispositions particulières s’appliquent en terme d’informations financières. Le texte
prévoit qu’un registre mis à jour régulièrement fait mention de toutes les entreprises dans
lesquelles des journalistes ont des actions.
Les journalistes sont également invités à prendre connaissance des ramifications du
groupe auquel appartient The Guardian, de manière à pouvoir en faire état dans leurs
articles lorsqu’ils peuvent concerner une société avec laquelle leur groupe a partie liée.
The Guardian vient également de mettre à jour son code de conduite sur les médias
sociaux à destination de ses journalistes qui tiennent des blogs et interviennent dans les
commentaires d’autres blogs ou sur les réseaux sociaux. Le texte est court et contient 8
principes:
t Prenez part aux conversations à propos de nos contenus et assumez la responsabilité des
conversations que vous initiez.
t Mettez l’accent sur les contributions les plus constructives en reconnaissant leur valeur
et en récompensant leurs auteurs.
36
t Ne récompensez pas les comportements perturbateurs en leur accordant de l’attention,
mais signalez-les.
t Etablissez des hyperliens vers les sources que vous citez et encouragez les autres à faire
de même.
t Signalez vos éventuels conflits d’intérêt et soyez transparents quant à vos relations, projets ou précédents articles concernant un sujet ou une personne en particulier.
t Ne modifiez pas les faits et les opinions et soyez attentifs à ce que vos propos ne puissent
pas être mal interprétés.
t Encouragez les internautes à contribuer de façon à mettre en perspective, à compléter
et enrichir votre travail. Reconnaissez ces apports.
t Donnez l’exemple en respectant notre charte des commentaires dans vos articles et dans
vos contributions.
The Guardian ne s’est pas doté d’un médiateur mais il relève comme tous les titres de
la presse britannique d’une instance d’autorégulation, la Press Complaints Commission,
vers laquelle les lecteurs peuvent se tourner s’ils estiment la déontologie journalistique
bafouée.
Par ailleurs, au-delà des codes et directives qui encadrent sa pratique éditoriale,
The Guardian envisage la question de la responsabilité sociale et environnementale de
l’entreprise de manière plus globale. Le journal réalise en interne et fait contrôler par des
experts indépendants un bilan annuel dans ce domaine (Sustainability report), accessible
sur son site.
CCD!;!MB!DIBSUF!JOUêHSF!MFT!EFSOJêSFT!QSBUJRVFT!MJ„FT!
Ì!MB!OVN„SJTBUJPO!FU!BVY!S„TFBVY
La BBC est sans doute le média au monde qui porte la plus grande attention à sa
charte éditoriale (on parle ici de « directives éditoriales »), et pour cause : ces directives
sont opposables par tout citoyen britannique à l’entreprise publique s’il estime qu’elle n’a
pas respecté ses engagements, notamment déontologiques.
Quand la BBC actualise ses directives éditoriales tous les 4 ou 5 ans, elle doit aussi
affronter un défi logistique qui donne une idée de l’importance de la chose. Pour la
nouvelle version, entrée en vigueur le 18 octobre 2010, elle a dû en imprimer 16 500
exemplaires et les adresser aux équipes productrices de contenus au sein de l’entreprise
publique ainsi qu’aux pigistes réguliers, en Grande-Bretagne comme dans le reste du
monde.L’ampleur de la tâche témoigne de l’importance accordée à la question par la
BBC. Comme l’explique David Jordan, l’un des rédacteurs de la nouvelle version, les
directives éditoriales sont le fruit « de la distillation d’années d’expérience de la part des producteurs, de bon sens et de discernement sur la manière dont la BBC peut atteindre le niveau
d’exigence souhaité par ses audiences ».
Principale nouveauté de cette édition 2010, l’intégration des directives spécifiques qui
concernaient les activités en ligne de la BBC, au sein des directives générales. L’entreprise
assure d’ailleurs avoir mis en place des garde-fous après des dérapages constatés dans des
programmes faisant largement appel à l’interactivité.
La BBC a également intégré tout un chapitre concernant la ré-utilisation et ré-édition
des contenus, devenue très facile à l’heure des outils numériques. Un accent particulier
est mis sur l’emploi des archives qui doivent, elles aussi, respecter les directives éditoriales
en vigueur aujourd’hui en cas de réutilisation.
37
38
L’accent est mis également sur la lutte contre les conflits d’intérêt. Les directives
éditoriales stipulent que ces conflits peuvent survenir lorsque « les activités externes de
quiconque est impliqué dans la production de contenu affectent la réputation d’intégrité, d’indépendance et d’exigence de la BBC ou peuvent raisonnablement être perçues comme telles ».
Le texte précise que « les audiences doivent être en mesure de faire confiance à la BBC
et être convaincues que les décisions éditoriales se sont pas influencées par des intérêts autres :
politiques, commerciaux ou personnels quelle que soit leur nature ». En conséquence, « tous
les salariés de la BBC sont tenus de déclarer les conflits d’intérêt qui pourraient avoir un
impact sur leur travail au sein de la BBC. Les pigistes sont également tenus de déclarer leurs
conflits d’intérêt potentiels ».
Un sous-site, BBC Editorial guidelines, est spécifiquement dédié aux différents problèmes déontologiques que peuvent rencontrer les collaborateurs de la BBC dans leur
travail. Traitements de l’actualité au Proche-Orient, ou plus généralement des religions,
interviews de victimes, couverture de sujets judiciaires, d’enquêtes en cours, il est difficile
de ne pas trouver un sujet sur lequel le département « Editorial Policy » n’ait pas son mot
à dire.
Le cinquième point de la charte met au jour la dialectique qui est à l’oeuvre sur
nombre de sites internet entre refus des conflits d’intérêt et transparence.
« Les membres de l’équipe éditoriale s’interdisent d’accepter tout avantage en nature et
s’engagent à refuser tout type de “publi-reportage” ou “billet sponsorisé”.
Au cas où ils devraient être amenés à s’éloigner de ces principes, les contributeurs s’obligent
à en faire état par le biais d’une mention disclosure. »
La notion de disclosure (divulgation) prévoit qu’un auteur ou un média signale explicitement, à l’attention de son public dans une courte déclaration d’intérêt en début ou en fin
d’article, les conflits d’intérêt potentiels auxquels il a pu être confronté dans son travail.
QSPQVCMJDB!;!VOF!DIBSUF!SBUJGJ„F!UPVT!MFT!BOT!QBS!MFT!KPVSOBMJTUFT
Les journalistes du site Propublica spécialisé dans le journalisme d’investigation –
et principalement financé par des mécènes – sont tenus de signer une charte déontologique de 7 pages lors de leur embauche, et de la re-signer chaque année. La charte,
inspirée de celle du Wall Street Journal et du Washington Post, n’a pas peur des détails.
Elle prévoit dans quelles circonstances les journalistes ont le droit d’échanger des produits dérivés sur les marchés, d’accepter des cadeaux et de participer à des activités en
dehors de ProPublica. « Pas besoin de police de l’éthique pour les appliquer », explique le
directeur de la communication, « le niveau de confiance est tel qu’aucun conflit lié à la
charte n’est encore apparu ».
Dans la même veine, le site exige que les articles soient les plus neutres (fair) possible,
poursuivant le culte de l’objectivité à l’heure où d’autres rédactions ont décidé d’assumer
leurs biais idéologiques. Quant à la conversation avec les utilisateurs, les journalistes
d’investigation laissent le soin aux 4 membres de l’équipe web de s’en charger et de modérer les commentaires.
PXOJ!;!VOF!DIBSUF!OPVWFMMF!NBOJêSF
OWNI fait figure d’exception dans l’ensemble des médias étudiés lors de cette enquête.
Le site a pris le temps de se doter d’une charte éditoriale qui ne reprend pas la structure
habituelle des textes examinés jusqu’ici.
Par exemple, le deuxième point de la charte concerne « l’originalité et la paternité des
oeuvres » et instaure un principe de subsidiarité calqué sur son homonyme au sein de
l’Union européenne. Ce principe suppose que la rédaction n’écrira un article que si, et
seulement si, le sujet n’a pas été couvert par le réseau des 900 contributeurs d’Owni. Une
manière de ne pas « polluer » le web.
Toujours dans ce chapitre, il est prévu que l’ensemble des contenus (sauf exception)
soient diffusés sous une licence Creative Commons (liberté de reproduction ou modification à condition d’en citer la paternité et de respecter le type de licence C.C. utilisé
hors usage commercial).
Mb!dibsuf!ef!Nvojdi
La charte des droits et devoir des journalistes, signée en novembre 1971 à Munich,
dresse la liste de 5 droits et 10 devoirs fondamentaux des journalistes. Elle a été adoptée
par la Fédération internationale des journalistes (FIJ), l’Organisation internationale des
journalistes (OIJ) et la plupart des syndicats de journalistes d’Europe.
En France, cette charte a été inscrite dans les statuts du Spiil (Syndicat de la presse
indépendante d’information en ligne) par ses fondateurs parmi lesquels figurent notamment Rue89, Arrêt sur images, Terra éco et Mediapart.
Citizenside qui collecte photos et vidéos d’actualité auprès des internautes se réfère
également à la charte de Munich tout en sachant que les questions déontologiques les
plus fréquentes auxquelles le site est confronté, concernent le respect de la vie privée.
Dans ce domaine, l’équipe opère une évaluation au coup par coup des images qui peuvent être mises en ligne et de celles qu’elle ne publiera pas.
De son côté, bien qu’il ne travaille qu’avec des amateurs encadrés par des journalistes,
le site h.ua explique que ses contributeurs se conforment à la charte des journalistes
ukrainiens.
Mf!dmpjtpoofnfou!eft!ejggsfouft!bdujwjut!ef!mÖfousfqsjtf
Derniers nés des médias d’information, les pure players (sites non adossés à un média
traditionnel) sont nombreux à multiplier les activités marchandes pour asseoir la rentabilité de leurs entreprises. Au sein de ces petites entités, rares sont encore celles qui ont
ressenti le besoin de cloisonner leurs différentes activités.
UFSSB!„DP
Terra éco fait partie de ces pionniers. Le bimédia – qui édite un mensuel papier
et un quotidien en ligne – spécialisé sur les problématiques liées au développement
durable, développe également des activités annexes (organisation de conférences et de
formations notamment).
À l’attention de ses annonceurs et des clients des activités annexes, l’entreprise a élaboré une courte charte éthique qui prévoit en substance que le fait d’être client ne donne
aucun droit sur le contenu éditorial du magazine ou du site web et demande aux annonceurs d’être « sincères » dans leur démarche de développement durable. Un dispositif
équivalent a été mis en place avec la filiale de l’entreprise qui propose des missions de
conseil dans le secteur du développement durable.
Mb!usbotqbsfodf!ßobodjsf
Plusieurs des médias étudiés dans le cadre de cette enquête, font moins reposer leurs
pratiques sur le respect de codes déontologiques savamment élaborés et rédigés que sur
39
3:
des règles implicites et sur la transparence qu’ils mettent en place – à des degrés divers –
sur l’ensemble de leurs activités éditoriales et économiques.
À ce titre, Arrêt sur images est un cas particulier puisque l’entreprise va jusqu’à
publier le détail de ses comptes annuels. Rares sont les entreprises qui vont aussi loin dans
la transparence. Toutefois, nous avons pu constater aussi que la plupart des pure players
interrogés n’hésitent pas à ouvrir leurs livres de comptes. Il faut dire qu’ils sont rodés à
l’exercice tant le nombre de sollicitations qu’ils reçoivent pour parler de leur «modèle
économique» est important.
De sa propre initiative, Rue89 informe régulièrement ses internautes sur la réalité de
l’entreprise, notamment à l’occasion des augmentations de capital. Il est ainsi possible de
connaître le nom des différents actionnaires. Même démarche chez Mediapart qui fait
le point régulièrement sur son actionnariat et les données-clefs (non financières) de son
activité. On retrouve également cette forme de transparence chez OWNI à l’occasion des
augmentations de capital. Il convient de signaler que ces entreprises ne sont pas tenues
de rendre ces informations publiques, mais dans leur logique de start-up elles tiennent
également à montrer que des investisseurs leur font confiance.
Les médias de notre échantillon qui bénéficient de subventions publiques jouent
également la transparence financière. Café Babel et Congo Blog Ba Leki, dont le budget provient principalement ou en totalité de financements publics, ouvrent volontiers
l’intégralité de leurs comptes.
À une autre échelle, il en va de même pour la BBC qui publie un rapport annuel
très détaillé.
Alternatives économiques met en ligne son rapport social et environnemental dans
lequel quelques passages ont été masqués.
Propublica communique également son rapport annuel qui contient même la rémunération du patron, Paul Steiger : 571 000 dollars par an.
Pour David Cohn, le créateur de Spot.us, plateforme sur laquelle les internautes peuvent financer des reportages de journalistes freelance, la transparence est indispensable.
Il applique cette devise à son modèle d’affaire, puisque l’on peut consulter la liste des
donateurs qui ont financé chacun des articles du site.
Le site n’a pas de charte de déontologie à proprement parler. Il dispose de conditions
d’utilisation pour les reporters. Elles ne couvrent pas tous les aspects éthiques que l’on
peut retrouver dans un texte traditionnel. Les problèmes sont résolus au cas par cas par
David Cohn. Il prend l’exemple d’un conseiller municipal ayant donné 20 dollars pour
une enquête sur les activités de sa mairie qui a été obligé de reprendre sa contribution.
David en a profité pour ériger cette règle : une partie prenante à un article ne peut pas
le financer.
« La seule chose que l’on puisse faire c’est d’être le plus transparent possible. Spot.us élève
la transparence à un autre niveau », affirme David Cohn, qui explique que si quelqu’un
venait à se plaindre, il pourrait se justifier en disant qu’il ne cache rien.
La vie de ces communautés et la gestion quotidienne des commentaires ont conduit
la plupart des médias que nous avons étudiés, à se doter de chartes des commentaires qui
définissent le type de relations (au-delà des simples contraintes légales) que les équipes
rédactionnelles entendent nouer avec les internautes. L’importance et les limites données
à ce dialogue dessinent également une partie de l’environnement déontologique dans
lequel s’inscrivent ces médias.
Dans ce domaine, Rue89 qui se définit comme un média participatif, a élaboré au
fil des années une charte des commentaires dont les mises à jour sont visibles. Élément
marquant de cette charte, la participation des journalistes au dialogue qui s’instaure à
propos de leurs articles.
« Les auteurs de Rue89 considèrent que leur travail ne s’arrête pas avec la publication de
leurs articles et participent, dans la mesure de leur disponibilité, aux discussions qui les prolongent. Ils assurent eux-même la modération des commentaires, parfois avec l’aide de modérateurs issus de la communauté. Ils assurent également une sélection des commentaires qui leur
semblent les plus pertinents, lesquels sont mis en valeur sous les articles. »
Dans la plupart des autres chartes des commentaires, sur d’autres sites, le rôle des
journalistes dans les discussions n’est tout simplement pas évoqué.
En terme de modération (sélection et censure éventuelle des commentaires), le Figaro
fournit une grille détaillée qui précise pour chaque type de propos s’il est susceptible
d’être approuvé ou refusé par les équipes responsables.
Jotubvsfs!mf!ejbmphvf!bwfd!tpo!qvcmjd
Les médias en ligne permettent le dialogue en temps réel et c’est l’une de leurs différences majeures avec les médias traditionnels. Cette capacité de dialogue s’incarne principalement dans les commentaires qui sont souvent ouverts sous les articles mais aussi,
plus largement, dans la notion de « communauté » que les médias cherchent à créer
autour de leurs productions.
Epoofs!mf!dpousšmf!bvy!joufsobvuft
A sa manière, le site Spot.us est celui qui a décidé d’aller le plus loin dans la transparence. Non seulement il donne une visibilité importante sur ses coulisses mais il permet
aux internautes d’intervenir dans les choix rédactionnels (apanage exclusif des membres
de l’encadrement des rédactions dans les médias traditionnels). Certes, le site se définit
comme une plateforme et non comme un média, mais un basculement du pouvoir de
sélection des sujets se produit.
Dans la pratique, Spot.us permet aux journalistes indépendants qui le souhaitent
de proposer un article qu’ils veulent réaliser. Ils listent leurs besoins sur le site et
demandent au public de bien vouloir les financer. La réalisation la plus impressionnante reste une enquête sur l’archipel de déchets du Pacifique-Nord parue en 2009
au terme d’une collecte de 6 000 dollars auprès des internautes. Les collectes les plus
importantes ont permis de réunir plus de 10 000 dollars pour des projets d’enquête
s’étalant sur plusieurs mois.
Sur Spot.us, les internautes choisissent de financer tel ou tel reportage en déboursant
quelques dollars. La plateforme leur donne également le contrôle sur l’utilisation des
budgets publicitaires qu’elle perçoit. Depuis juillet 2010, les annonceurs peuvent proposer des sondages aux utilisateurs à des fins de marketing. À l’issue du sondage (qui ne doit
pas durer plus de 5 minutes), l’internaute reçoit un crédit de 5 dollars à dépenser pour
financer la production d’un article. Le premier mois, ce dispositif a permis de distribuer
3 000 dollars aux journalistes.
41
DPODMVTJPO
Depuis son irruption, il y a 15 ans, dans l’univers du grand public et des médias, le
web a bouleversé les usages, démantelé le modèle économique de la presse qui semblait
immuable depuis plus d’un siècle et, plus profondément encore, modifié le rapport à la
liberté d’expression mettant les outils autrefois réservés aux journalistes à la disposition
de tous.
Dans ce contexte, la plupart des entreprises du secteur des médias ont été contraintes
de réviser leurs modèles économiques. Révisions parfois déchirantes quand il a fallu se
rendre à l’évidence : à l’heure de la circulation instantanée de l’information numérique,
l’information généraliste est devenue un bien banal pour lequel peu d’internautes acceptent de payer.
Le mirage initial de la publicité comme ressource unique des médias s’est dissipé sous les
effets structurels de l’extension sans fin de l’inventaire publicitaire mis à la disposition des
annonceurs et sous les effets conjoncturels de la récente crise financière puis économique.
Les éditeurs qui fondent leur modèle sur la publicité ont l’impression que l’horizon
de la rentabilité s’éloigne aussitôt qu’ils avancent. Porté au terme de sa logique, le modèle
d’information généraliste financé par la publicité débouche sur une impasse qui porte un
nom : content farms. Ces « usines à contenus » cherchent comment tromper les moteurs
de recherche (et capter l’attention des internautes) avec des contenus produits au moindre
coût et financés par des bannières qui, dans le meilleur des cas, rapportent à peine plus.
Pour échapper à cette logique, les médias à vocation généraliste cherchent à diversifier leurs recettes. Plusieurs pistes s’offrent à eux : tenter de faire payer certains de leurs
lecteurs en leur offrant des services supplémentaires (modèle freemium) ; développer des
services commerciaux pour vendre des biens et services (culturels le plus souvent) pour
leur compte ou celui de tiers ; reprendre pied dans le secteur des petites annonces dont
ils se sont fait chasser par les pure players depuis une quinzaine d’années ; développer de
nouvelles activités comme la formation ou la prestation de services informatiques.
Ceux qui refusent la diversification (ce sont également ceux qui refusent le plus
souvent la publicité) voient trois pistes s’ouvrir devant eux : l’abonnement qui semble
nécessiter l’adhésion à une personnalité et/ou à une cause que le média incarne ; le
financement public qu’il soit direct ou indirect à travers différentes formes de subventions ; et enfin le mécénat dont l’une des variantes consiste à transformer des internautes
en mécènes d’un journaliste.
Les business models qui se mettent en place sont multiples et, naturellement, le choix
d’un modèle d’affaires n’est pas sans conséquence sur l’activité éditoriale et les conditions
dans lesquelles elle s’exerce. Force est pourtant de constater que l’encadrement déontologique des nouvelles pratiques et/ou activités n’a pas fait l’objet d’une attention aussi
soutenue que celle portée au modèle économique.
Ce décalage est sans doute explicable. Il est nécessaire que des difficultés déontologiques surgissent et soient identifiées comme telles avant qu’une réflexion structurée sur
la question ne s’élabore, notamment dans des entreprises de petite taille où la prégnance
des enjeux économiques est forte et perçue par tous les salariés permanents ainsi que par
les pigistes.
L’étude que nous avons menée a permis de constater également que le champ des
questions déontologiques se trouve singulièrement élargi par les bouleversement induits par
internet. Difficile en effet de considérer que la question de la relation avec les internautes
42
(qui fait souvent l’objet de chartes spécifiques à dimension essentiellement juridique) ne
relève pas de la déontologie du média. Par ailleurs, à l’heure où les murs des rédactions
deviennent poreux pour accueillir de plus en plus de contributions externes, il en va de
même pour le statut juridique (droit d’auteur) des contributions des internautes.
Face à un univers d’usages en évolution constante et de pratiques professionnelles liées
à des outils et services en perpétuelle mutation, certains médias comme la BBC tentent
de faire évoluer régulièrement leur « directives éditoriales » pour coller au plus près de
cette réalité mouvante.
Avec pragmatisme – et sans doute aussi parce que l’esprit des pionniers du web a initié
une tradition de transparence – nombre de jeunes médias ont opté pour un partage en
temps réel de leurs réflexions sur les nouveaux enjeux déontologiques avec leurs internautes. De ce dialogue surgissent progressivement les limites à poser pour encadrer les
nouvelles pratiques.
Cette piste semble devoir être creusée. Les journalistes évoluent désormais dans un
univers d’information où ils ne sont plus les seuls producteurs et la qualité de l’information qu’ils délivrent ne dépend plus de leur seule action dans bien des cas. En conséquence, l’élaboration de nouvelles règles de déontologie doit être envisagée avec « ceux
que l’on appelait auparavant l’audience » pour reprendre l’expression de Jay Rosen.
Si un intérêt commun parvient à rassembler les journalistes et ceux avec lesquels ils
échangent, c’est peut-être que l’idée d’une information reconnue comme « bien public »
est pertinente, ainsi que le soutient Edwy Plenel de Médiapart en France. L’information
cesserait alors d’être un bien ordinaire et pourrait échapper à des logiques purement commerciales assignant à ses producteurs des droits et des devoirs spécifiques.
Toutefois, si cette réflexion sur un statut dérogatoire au droit commun paraît intéressante, elle ne doit pas conduire à figer les règles d’exercice du métier d’informer mais au
contraire les inscrire dans une dynamique d’évolution, sous peine d’amplifier le décalage
déjà visible entre les textes généralement considérés comme des références (la charte de
Munich, par exemple) et les pratiques réelles constatées sur le terrain.
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
Nathalie SONNAC
Professeur des universités
Carism et Lei
IFP - Université Paris 2 (France)
[email protected]
22
L
a révolution numérique actuelle
est comparable à celle du début du
20e siècle. Nous serions confrontés
selon Missika (2007) à une « technologie
disruptive » qui bouleverse les règles du
jeu, les positions de force des principaux
acteurs et où la dimension socioculturelle
du processus serait particulièrement
importante. Ici, la révolution technique
servirait de révélateur à la révolution
comportementale : blogs, forums, chats,
réseaux sociaux ou wiki en tout genre
permettent à chaque citoyen de passer du
statut de simple récepteur à celui d’émetteurrécepteur (user generated contents). Cette
révolution apparaît sous différentes formes.
Cependant il est intéressant de relever que
la dématérialisation des contenus conduit
à faire renaître des comportements qui ne
sont plus fondés uniquement sur l’échange
marchand comme, par exemple, les échanges
de fichiers (peer to peer) ou le don, avec le
système de l’open source (les informaticiens
mettent en commun leurs programmes).
Wikipedia symbolise cette culture libre où
s’observent de nouveaux comportements,
et dont le principe s’appuie sur trois
éléments fondamentaux : l’interactivité, le
partage et la gratuité. C’est dans ce nouvel
environnement que les médias traditionnels
doivent s’inscrire.
En effet, l’organisation économique
et sociale des industries de la culture et
des médias est en pleine mutation. Des
bouleversements d’ordre technologique,
économique et social mettent en évidence la
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
transformation de ces secteurs et nous amènent à nous interroger à la fois
sur la nouvelle organisation qui se dessine, mais aussi sur les nouveaux
défis qui l’accompagnent et auxquels les industries médiatiques, dans
leur ensemble, doivent faire face. Cette mutation, issue principalement
de la numérisation de l’information (Shapiro & Varian, 1999), balaie
dans une certaine mesure la sectorisation traditionnelle de ces industries
et l’organisation de leur marché. Dans le même temps, elle donne
naissance à de nouvelles pratiques médiatiques et offre de nouveaux
modes d’accès aux médias.
Cette nouvelle ère s’est traduite dans le monde des médias d’abord
par une multiplication de l’offre de contenus, plus singulièrement
l’offre audiovisuelle (hausse du nombre de chaînes et de programmes,
hausse du volume horaire global) ; ensuite, l’accès à des programmes
sous de nouveaux formats (délinéarisation, video on demand, etc.). D’un
point de vue économique, ce changement de paradigme a notamment
pour conséquence une remise en cause de l’ancien modèle des médias.
En effet, les médias de masse traditionnels, et notamment le secteur
de la presse écrite, s’appuient sur un double financement dont les
ressources sont issues à la fois des lecteurs (abonnement, vente en
kiosque) et des annonceurs1. Même si depuis près de 20 ans, on observe
un lent déplacement des dépenses des annonceurs des médias vers le
« hors médias », pour atteindre en 2008 un rapport de 1/3 contre 2/3,
l’arrivée de l’Internet semble d’ores et déjà transformer les pratiques
des annonceurs et celles des consommateurs. Du côté des recettes
publicitaires, l’Internet est le média le plus dynamique : il s’impose
comme le quatrième média publicitaire (2,8 milliards d’euros investis
en 2007 en France, TNS Media Intelligence 2008) devant l’affichage,
même s’il demeure encore derrière la presse, la télévision et la radio.
Du côté des recettes des consommateurs, ceux-ci semblent être de
moins en moins prêts à payer pour consommer des offres culturelles et
médiatiques. Ce double déséquilibre remet en cause fondamentalement
la viabilité du modèle économique de la presse écrite.
S’interroger sur l’économie d’un secteur consiste à comprendre,
d’une part, les mécanismes qui sous-tendent la production, les
échanges, la distribution du bien ; comprendre d’autre part, les modes
d’appropriation de la valeur et analyser, notamment, les conséquences
du financement sur la structure du secteur (concentration) ou encore
sur la nature des contenus.
Le modèle d’affaires de la presse écrite est particulièrement
intéressant à étudier dans la mesure où il constitue un véritable nœud
d’imperfections au sens de la théorie économique (nous préciserons ce
23
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
point au cours de notre développement), nœud qui l’empêche d’être
appréhendée avec les outils classiques de l’économie traditionnelle. Le
point départ de notre analyse s’attache à la présentation des principales
caractéristiques économiques du bien informationnel, c’est l’objet de
notre première section. Le double financement de la presse écrite
– vente aux lecteurs et aux annonceurs – constitue un élément central de
l’analyse économique de ce média. D’autres médias, comme le cinéma
ou la télévision à péage, ont à leur tour fait appel à la publicité comme
source de financement, allant même jusqu’à un financement total pour
certains, comme la radio ou la télévision privée dite commerciale.
Dès lors, le financement par la publicité, qu’il soit partiel ou total,
place l’analyse économique des médias dans le cadre plus global de
l’économie des plateformes, avec au cœur du mécanisme, les effets
de réseaux. Cet élément-clé de l’étude de l’économie des médias est
l’objet de notre deuxième section. Notre troisième section consiste à
comprendre et à analyser les conséquences économiques dérivées des
caractéristiques économiques et du mécanisme des effets de réseaux
qui sous-tend l’économie du secteur. Notre dernière section interroge
le possible nouveau modèle d’affaires, à la lumière des mutations des
comportements qui placent la gratuité au cœur de la réflexion.
Les caractéristiques économiques du bien informationnel
L’information : un bien non rival et sous tutelle
Pour justifier l’intervention de l’État dans la consommation, la
production ou la mise à disposition des biens aux consommateurs,
l’économiste Paul Samuelson établit en 1964 une classification entre les
biens, distinguant biens privés et biens publics. La rivalité et l’exclusion
sont les deux principes sur lesquels s’appuie cette taxinomie : la
rivalité est un principe en vertu duquel la consommation d’un bien par
agent diminue la quantité disponible de ce même bien par un autre
agent ; l’exclusion conduit à écarter de la consommation d’un bien un
individu, qui ne pourrait pas ou ne voudrait pas payer, pour jouir de la
consommation de ce bien. Un bien privé répond à ces deux principes,
à l’inverse du bien public pur. En effet, le caractère non rival de
l’information – caractère partagé par l’ensemble des produits de contenu
(musique, édition, télévision, etc.) – signifie qu’elle peut être consommée
simultanément par un nombre arbitraire de consommateurs : la lecture
24
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
par un individu des informations comprises dans un journal ne peut
pas priver les autres individus de la possibilité de les lire à leur tour. De
plus, dans le cas d’un accès gratuit (comme pour la radio ou la presse
gratuite d’information), l’information se définit comme un bien public
pur. Cependant, lorsque le contenu – l’information – s’inscrit sur un
support payant, où le consommateur est dans l’obligation d’acquitter
un prix pour accéder à l’information, cette dernière est transformée en
marchandise. Dès lors, le média écrit – contenu médiatique et support
physique – s’est transformé en un bien public avec exclusion, appelé
bien semi public. La presse gratuite est donc un bien public pur, tandis
que la presse payante un bien public avec exclusion. Mais toutes deux
partagent le caractère de non-rivalité2.
Ainsi, et comme nous venons de le souligner, c’est sur la base
de ce caractère non rival d’un bien que se justifie économiquement
l’intervention de l’État, cette intervention prenant des formes diverses
selon les catégories éditoriales dans l’organisation générale des
entreprises de presse. Cet argument se trouve renforcé par le caractère
tutélaire du produit de presse (merit goods). Instruments potentiels du
développement culturel, politique, informatif, de divertissement, etc.,
la nature et la diversité des contenus médiatiques sont susceptibles
d’exercer une influence non négligeable sur la formation du système
des valeurs de la communauté. Ce rôle de véhicule de l’information
et de la culture dans les sociétés modernes européennes dérive de la
nécessité d’atteindre des objectifs de cohésion sociale, de démocratie,
de liberté d’expression ou encore de diversité culturelle.
Ainsi, dans la volonté de préserver cet espace public, l’État encadre,
participe au financement, alloue des aides – directes ou indirectes ¬
aux entreprises de presse. L’État joue, en d’autres termes, un rôle
de garant de l’accessibilité pour tous à une information diverse et
plurielle. Soulignons ici que cette considération de l’État comme garant
de la liberté n’est pas un modèle universel. En effet, pour la presse
anglosaxonne par exemple, la presse s’est posée elle-même comme un
« pouvoir » quasi institutionnel de l’opinion publique d’où découlent
les fondements de sa liberté et la garantie de son indépendance,
notamment à l’égard de l’État. Son indépendance, rappellent Le Floch
et Sonnac (2005, p. 8-9) « n’est pas octroyée par l’État : elle lui préexiste
[…] La garantie de l’indépendance n’est pas accordée, mais conquise par la
liberté d’entreprendre, garantissant elle-même la liberté d’expression. » (voir
notamment Gabszewicz & Sonnac, 2006 et Toussaint-Desmoulins,
2008).
25
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
L’information : un bien expérientiel
Une autre caractéristique, qui n’est pas sans conséquences sur le
modèle d’affaires de la presse écrite, réside dans le caractère expérientiel
de l’information. C’est ainsi que la qualifie Richard Caves dans son
ouvrage Creatives Industries (2002). Dans la mesure où la valeur des
contenus ne peut être évaluée comme les autres produits avant l’acte
d’achat, ils requièrent d’être testés : ainsi, on ne connaît la valeur de
l’information qu’après l’avoir consommée car il réside une incertitude
sur sa qualité intrinsèque jusqu’à sa consommation effective (Nobody
knows). Cette caractéristique impose aux entreprises médiatiques des
procédures de sélection et de signalisation capables de susciter le
désir d’expérience. Ces procédures sont intenses dans le cas de biens
informationnels et s’appuient sur l’identification de composantes
connues : titre de presse, nom des journalistes, marque du groupe, etc.
La capacité d’expérience des individus étant limitée, une concurrence
sur la signalisation va s’exercer entre les biens : les mieux signalés
seront consommés les premiers (Bomsel, 2007). Ce phénomène a pour
incidence majeure pour les entreprises de presse d’engager de fortes
dépenses en marketing, en promotion des produits, et contraint les
producteurs à s’appuyer sur une marque ou sur une réputation, nous y
reviendrons dans notre deuxième point.
L’information : un produit éphémère aux coûts fixes élevés
L’information est par essence éphémère, et ce caractère périssable
oblige l’éditeur de la chaîne de valeur à mettre en place une infrastructure
de production coûteuse. C’est notamment le cas des quotidiens dont
la périodicité est courte, comparativement à celle des magazines.
Ceci se traduit notamment par l’embauche d’un nombre suffisant de
journalistes pour collecter l’information, la traiter. L’imprimer puis la
diffuser rapidement suppose l’installation de rotatives pour assumer
la reproduction du titre en un nombre d’exemplaires qui permettra de
couvrir la demande (Le Floch & Sonnac, 2005). Il en résulte que le coût
du premier exemplaire, coût du titre produit chaque jour, considéré
comme le prototype, apparaît comme un coût fixe. Il est extrêmement
élevé et doit être consenti, quel que soit le nombre d’exemplaires
produits. En revanche, le coût unitaire de production, très élevé quand
le nombre d’exemplaires produits est faible, diminue considérablement
quand celui-ci augmente : les charges qui correspondent à la production
du prototype sont de mieux en mieux réparties. C’est le phénomène
d’économies d’échelle. Dès lors, le rapprochement entre entreprises de
presse va permettre la non- duplication de ces coûts fixes si élevés, et
26
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
les entreprises de grande taille seront ainsi favorisées au nom d’une
plus grande efficacité économique.
Cette structure de coûts atypique, notamment dans le différentiel
qui oppose coûts fixes élevés et coûts de reproduction faibles,
privilégie, nous venons de le voir, les entreprises des grande taille ou
les rapprochements entre les entreprises qui souhaitent bénéficier de
ces avantages. La concentration du secteur constitue donc un argument
d’efficacité économique, mais qui n’est évidemment pas sans poser des
problèmes en termes de pouvoir de marché ou de risques engendrés
par une information placée entre les mains de quelques-uns.
Ce sont toutes ces caractéristiques économiques qui spécifient
et distinguent l’activité de presse des autres activités ou services, et
traduisent le particularisme de son modèle d’affaires.
Le principe économique du marché réside dans l’appropriation
d’une partie de la valeur économique créée par son producteur.
Dans un modèle d’économie traditionnelle, aucun producteur ne se
présenterait sur le marché s’il n’était pas certain qu’en y cédant son
bien ou son droit à utilisation de son service, il pourrait récupérer une
valeur monétaire. La manière dont on s’approprie cette valeur constitue
un modèle d’affaires. Dans le cas des industries de presse, mais aussi
pour l’ensemble des autres industries médiatiques, compte tenu des
caractéristiques économiques soulevées, le modèle d’affaires diffère du
modèle traditionnel. C’est l’objet de notre deuxième point.
La presse écrite : une économie de plateforme
Après avoir évoqué les caractéristiques économiques du bien
informationnel, il convient à présent d’en comprendre les conséquences :
bien non rival, expérientiel, éphémère aux coûts fixes élevés, chaque
trait de l’information en estampille la singularité économique, d’où le
concept de « nœud d’imperfections ».
Non-rivalité, agrégation des préférences et incitation à la production
La non-rivalité de l’information, qui rappelons-le, implique que la
consommation d’un bien par un agent ne diminue pas la consommation
de ce même bien par un autre agent, se traduit économiquement
par la considération d’une consommation uniforme du bien par
tous les agents. Dans le cas d’un bien privé (rival et avec exclusion),
l’acquittement d’un prix pour un produit par un consommateur définit
sa préférence. Dans le cas d’un bien distribué gratuitement, il n’existe
27
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
plus d’indicateur de préférences, le bien n’est plus véritablement choisi,
au sens de l’économie traditionnelle. Dès lors, comment connaître les
préférences des consommateurs ? Comment ajuster la quantité offerte
à celle demandée, dans la mesure où la demande n’est pas affichée ?
Le principe de non-rivalité implique de trouver un « indicateur de
préférences sociales » qui comprend les préférences des agents, n’écarte
pas les goûts des minorités et prend aussi en considération la diversité
des préférences. Cette question a été posée et approfondie par Kenneth
Arrow en 1951, co-titulaire avec John Hicks du prix Nobel d’économie.
L’auteur démontre que les règles pour établir un choix collectif ne
peuvent répondre à quelques critères issus d’un système d’axiomes
« raisonnables ». Il montre qu’il est impossible de définir l’intérêt
général à partir des choix individuels, et qu’en dehors de la règle de
choix dictatorial, il n’existe aucun indicateur satisfaisant de préférence
sociale (théorème du choix social).
De plus, la non-rivalité de l’information pose aussi des difficultés
en termes d’incitation à la production : sans prix payé par les
consommateurs, les producteurs ne peuvent plus dégager des
ressources, et ne sont donc plus incités à produire. Des règles doivent
être mises en place si l’on souhaite favoriser l’incitation à la production
(exclusivité, droit d’auteur, etc.) (voir Bomsel, 2007).
Signalisation des biens et dépenses de marketing
Nous l’avons vu, la presse écrite est un bien d’expérience, ce qui
impose à son producteur d’engager de fortes dépenses en termes
de procédures de sélection, de signalétique, d’image de marque, de
dépenses en marketing ou encore de promotion des produits. Ces
dépenses le contraignent à s’organiser pour faire connaître son produit
auprès des consommateurs le plus tôt possible et à mobiliser très
rapidement les ressources de l’appropriation, pour éviter notamment
que l’incertitude liée à la nature du bien ne se retourne contre lui. Enfin,
il lui faudra déclencher des processus d’agglomération autour de son
produit, processus souvent rendus possibles par le fait que la satisfaction
d’un utilisateur de contenu dépend du nombre d’utilisateurs du même
contenu : abonnements, promotions à bas prix pour le lancement de
nouveaux biens ou services, etc. Ici aussi, les entreprises de grande
taille sont privilégiées, notamment les groupes qui disposent de
moyens financiers importants pour investir dans des campagnes
promotionnelles.
28
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
Double financement, plateformes d’échanges et effets de réseaux
La structure de coûts atypique conduit les firmes de grande taille
à bénéficier des économies d’échelle et de gamme. Ces dernières
se définissent ainsi : il est moins coûteux économiquement qu’une
seule entreprise fabrique deux produits, plutôt que deux entreprises
fabriquent chacune un seul produit. En diversifiant son activité, par
la production de différents biens par exemple, l’entreprise éditoriale
bénéficie des synergies de coûts (effet de taille, économie de gamme)
et des synergies de revenu, où le développement d’une activité sert au
développement d’une autre : la valeur de plusieurs activités combinées
est supérieure à la valeur de ces activités prises séparément.
À cette structure de coûts se greffe le caractère non rival de
l’information qui conduit à ce que le coût entraîné pour servir un
consommateur supplémentaire (coût marginal) soit quasiment nul. Cet
argument vaut d’autant plus que le nombre d’exemplaires fabriqués
est grand. Or, la tarification au coût marginal est celle qui garantit
l’allocation optimale des ressources, dans le cas de biens rivaux. Dans
l’économie des médias, servir les lecteurs au coût marginal signifie les
servir à un prix nul, avec l’assurance alors pour l’éditeur d’un déficit
budgétaire ! En effet, en situation concurrentielle, on considère que le
prix mesure l’utilité du dernier consommateur qui achète le produit à ce
prix. Dès lors, l’égalité du coût marginal à ce prix garantit la valeur des
ressources détournées pour satisfaire la demande de ce consommateur
et est exactement égale à l’utilité retirée de la satisfaction de cette
demande.
Reprenons l’exemple donné par Gabszewicz et Sonnac (2006,
p. 97) : « Si le coût marginal était strictement inférieur au prix, il y aurait
socialement avantage à accroître la production d’au moins une unité : le gain
de satisfaction ainsi obtenu en servant un consommateur supplémentaire
ferait plus que compenser la valeur des ressources nécessaires à produire cette
unité (le coût marginal). L’allocation des ressources ne serait alors pas efficace.
L’égalité du prix de vente et du coût marginal, condition réalisée spontanément
par le marché concurrentiel, conduit à une affectation efficace des ressources
entre les entreprises et les consommateurs ».
L’éditeur, en tarifant son prix de vente au coût marginal (donc à zéro),
se voit contraint de se tourner vers d’autres sources de financement, tels
la subvention publique, le sponsoring ou le financement publicitaire.
C’est la genèse du double financement de la presse.
Faire appel aux consommateurs et aux annonceurs inscrit le modèle
d’affaires de la presse écrite dans un schéma plus général de celui de
29
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
l’économie des plateformes, appelé marché à deux versants (Two-sided
markets). Une plateforme est un intermédiaire qui rend possible et facilite
les interactions de deux groupes d’agents qui ont des gains à interagir.
Ainsi, les bénéfices d’un agent appartenant à un groupe dépendentils du nombre d’agents de l’autre groupe. Ce phénomène correspond
à un « effet de réseau simple ». Cet effet apparaît en particulier dans
les industries ouvrant des possibilités nouvelles en matière d’échange
d’informations entre les individus. L’exemple le plus connu est celui du
réseau de téléphone où plus le nombre de consommateurs connectés au
réseau est élevé, plus l’intérêt pour un consommateur d’y être abonné
s’accroît, lui donnant la possibilité de communiquer avec un plus grand
nombre d’individus. S’agissant de la presse écrite, ce sont des effets
de réseaux croisés qui coexistent : la satisfaction d’un consommateur
pour un bien vendu sur un marché dépend de la taille de la demande
pour un autre bien sur un marché différent, et vice versa. Ici, l’éditeur
constitue la plateforme d’informations, qui facilite l’interaction entre
deux groupes d’agents, les annonceurs et les lecteurs.
Figure n°1 : la plateforme d’informations
Plateforme
Groupe 1
Audience
Groupe 2
Médias
(presse écrite, TV, Internet)
Annonceurs
Les premiers achètent d’autant plus d’espaces publicitaires que
la taille du lectorat est grande, l’impact du message publicitaire croît
avec la taille de l’audience ! Les seconds, de leur côté, se déplacent
sur la plateforme pour le contenu intrinsèque des médias, mais aussi
prennent en considération la présence de la publicité dans le média
consommé. Cette appréciation de la publicité se traduit en termes
économiques par deux types d’externalités3 possibles : des externalités
positives si les lecteurs sont publiphiles, ils seront d’autant plus
satisfaits de la consommation de leur titre si la quantité de publicité y
est importante (la publicité est considérée alors comme informative) ou
encore, l’externalité sera considérée comme positive, si le prix d’accès à
l’information est nul. Le désagrément causé par la présence de publicité
30
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
dans le titre est compensé par la gratuité d’accès. Les externalités peuvent
être aussi négatives dans le cas de lecteurs publiphobes, la publicité est
considérée alors comme persuasive et constitue une véritable nuisance.
Chacune des deux relations (annonceurs - médias et médias - lecteurs)
engendrent des effets de réseaux croisés.
Interaction des marchés et pluralisme
Le modèle économique de la presse écrite repose donc sur une
économie de plateforme et d’interactions stratégiques entre le marché des
médias et celui de la publicité.
Trois questions relatives à cette interaction se posent. La première
concerne d’abord la structure de prix adoptée par l’éditeur de presse : quelle
sera la combinaison du mode de financement qu’il choisira ? Ensuite,
quel niveau des prix sera évalué, prix de vente et tarif publicitaire ? Enfin,
quel ratio « volume de publicité / contenu médiatique » sera préféré. En
d’autres termes la question est relative au choix de l’espace « physique »
du journal ou du périodique (nombre de pages) consacré à la publicité ?
En effet, un éditeur peut décider de n’inclure aucune publicité au sein de
son titre et facturer l’intégralité de son coût de production aux lecteurs.
Ceux-ci doivent alors être en mesure de payer un prix à l’exemplaire
obligatoirement élevé (en tout cas, plus élevé que celui qu’ils devraient
acquitter s’ils n’étaient pas seuls à payer). Au contraire, l’éditeur peut
décider de laisser une large place à la publicité dans son journal et pratiquer
un prix de vente facial aux lecteurs très faible, voire nul. C’est le cas de la
presse gratuite d’information, où les annonceurs sont les seuls à assurer
la couverture intégrale des coûts. La situation intermédiaire est celle qui
est adoptée par la majorité des titres de presse, à savoir que l’éditeur
affiche une structure tarifaire qui repose sur le double financement. Ici,
la structure des prix et le niveau des prix sont étroitement liés : selon la
structure choisie, le niveau des prix sera déterminé. De même, dans la
mesure où les préférences des consommateurs sont corrélées en partie au
volume publicitaire du média (les lecteurs peuvent être publiphiles ou
publiphobes), le ratio volume publicitaire/contenu médiatique dépend
lui-même du niveau des prix pratiqués sur les deux marchés. Dans la
détermination de ces prix, le choix de la meilleure stratégie par l’entreprise
médiatique dépend en partie de la sensibilité du lectorat au prix (élasticitéprix de la demande pour le journal) et du ratio publicité/contenu. Enfin,
elle dépend aussi de la sensibilité de la demande des annonceurs au tarif
publicitaire : combien sont-ils prêts à payer pour une large diffusion ou
une diffusion ciblée ?
31
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
La structure de marché a évidemment de fortes incidences sur
l’économie du secteur. D’abord, dans un marché à deux versants tel que
nous l’avons défini, le contenu médiatique peut être influencé par le
désir de propriétaires des médias d’offrir un vecteur qui touche le plus
grand nombre possible d’annonceurs et de consommateurs ; il existe
alors un biais potentiel dans la sélection d’informations. Ensuite, dans
les marchés traditionnels, les consommateurs ont une disponibilité
à payer affichée pour les produits qu’ils souhaitent consommer. Et
ils sont seuls à le faire. Dans le secteur de la presse écrite, le pouvoir
des consommateurs est en partie transféré aux annonceurs qui ont
la possibilité, en tant que principal financeur, d’imposer un certain
« type » d’informations que les éditeurs se doivent d’offrir aux lecteurs.
Le rôle de la publicité peut aussi dépasser celui de la seule influence
possiblement exercée sur le contenu. C’est ce que nous allons à présent
traiter.
Effets de réseaux et pluralisme
Une première question concerne l’incidence du financement
publicitaire sur la nature de la concurrence que se livrent les entreprises
qui opèrent dans l’industrie. Les entreprises de presse sont confrontées
à une concurrence sur deux marchés distincts : le marché de
l’information (news, culture, divertissement) et le marché publicitaire.
Or, les demandes qui en émanent diffèrent : les lecteurs désirent un
certain type de contenu informationnel, et les annonceurs souhaitent
atteindre soit des titres qui bénéficient d’une diffusion importante
(grand nombre de lecteurs), soit une audience spécifique, c’est-à-dire
une certaine composition de lectorat en termes d’âge, de sexe ou de
catégorie socioprofessionnelle. Cependant, et nous l’avons déjà souligné,
les lecteurs ne sont pas systématiquement neutres face à la présence de
la publicité dans leurs journaux ou périodiques. Dans tous les cas, leur
réaction exercera une influence sur la concurrence qui s’exerce entre
les firmes, puisque celles-ci se disputent le lectorat. Ainsi, les effets de
réseaux croisés issus de l’interaction entre ces deux marchés affecte-t-il
la répartition en volume des ratios contenu médiatique/publicité et la
formation des prix sur chacun des marchés.
Une deuxième question concerne l’incidence du financement
publicitaire sur le contenu intrinsèque du média, voire sur sa diversité.
Si un média est financé exclusivement par la publicité, il conviendra
d’offrir aux annonceurs un produit « attractif », où la taille de l’audience
est l’indicateur principal de sa mesure. Or, cette taille dépend ellemême de son contenu. Dès lors, la dépendance financière des éditeurs à
32
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
l’égard des annonceurs peut les conduire à biaiser les contenus offerts.
Une orientation systématique des contenus médiatiques à « haute
teneur d’audience » spolie en partie des consommateurs, minoritaires
en nombre, de la diffusion de certains contenus. De même, les titres de
la presse écrite en concurrence, notamment ceux de la presse magazine,
peuvent être conduits à privilégier une réplication de leurs contenus
plutôt qu’à leur diversification. Ceci est particulièrement fort sur
certains segments de marché comme celui, par exemple, de la presse
de télévision, qui comprend plus d’une vingtaine de titres pour in fine
avoir pour seule vocation d’informer les lecteurs des programmes de
télévision. Cette tendance à l’uniformisation du contenu médiatique
s’accentue lorsque l’accès au média est gratuit : la première raison pour
laquelle les entreprises sont incitées à se différencier est de vouloir
atténuer la concurrence en prix, par définition inexistante dans le cas
de médias gratuits !
Une troisième question résulte du caractère « public » du produit
médiatique (au sens économique du terme), et pose la question de sa
production et de son financement. D’abord, les réglementations qui
visent à réaliser des objectifs d’efficacité économique peuvent entrer
en conflit avec la poursuite d’objectifs collectifs, tels le maintien de la
pluralité d’opinions, la diversité des titres ou encore le respect de la
démocratie. Plusieurs questions sous-jacentes en dérivent. D’abord, le
choix du mode de financement à adopter : les entreprises doivent-elles
faire appel de façon systématique à la subvention publique ou encore
au double financement, sachant qu’un prix nul pose le problème
d’agrégation des préférences (voir le premier point de la section). La
deuxième question concerne le biais potentiel des contenus médiatiques
suite aux modalités de financement. L’interrogation porte alors sur les
conséquences possibles de ce biais, d’abord, des conséquences sur le
bien-être des consommateurs ensuite, sur le fait que certaines catégories
de lecteurs soient écartées du fait du peu d’attrait qu’elles représentent
aux yeux des annonceurs. De même, des questions relatives aux
conséquences du financement publicitaire sur la « qualité » des produits
offerts se posent (voir notamment Clément, 2002).
Ces interrogations rejoignent la question précédente relative à la
structure de marché des entreprises de presse. La concentration des
médias est perçue de façon négative par les pouvoirs publics et les
consommateurs qui redoutent la réduction du nombre de titres et, par
voie de conséquence, une réduction de la diversité et du pluralisme
des opinions. La propriété de plusieurs titres, chaînes de télévision ou
stations de radio entre les mains d’un seul et même groupe font craindre
33
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
une trop grande influence du pouvoir du propriétaire, ou encore, de
voir se répandre une forme de « pensée unique ». Certains travaux
remettent en cause cette systémique, notamment ceux de Steiner (1952).
En effet, dans le cas où deux bouquets de chaînes de télévision sont en
concurrence sur le marché publicitaire, Steiner met en évidence qu’une
structure monopolistique offre plus de diversité qu’une structure
concurrentielle. L’auteur compare deux situations : celle d’un bouquet
de chaînes détenu par un propriétaire unique (monopoleur) avec des
chaînes en concurrence détenues par des propriétaires distincts. Quelle
que soit la structure, les chaînes sont financées par la publicité, avec pour
objectif la maximisation de l’audience. Le monopoleur est en situation
de recueillir la totalité de l’audience puisqu’il détient toutes les chaînes
de son bouquet, sans qu’il ait besoin de s’inquiéter de la ventilation
des téléspectateurs (et donc des programmes diffusés) ; en revanche,
les propriétaires de chacune des chaînes, en appliquant le critère de
maximisation de l’audience, proposent un éventail de programmes
moins diversifié, se partageant l’audience du programme le plus
fédérateur. Steiner vise ainsi à mettre en évidence l’incidence possible
du financement publicitaire sur la diversité des programmes offerts, en
montrant la duplication possible du contenu. De même, la concentration
des activités au sein d’une même entreprise s’accompagne souvent
d’une politique de « niches multiproduits », en partie motivée par la
recherche de cibles publicitaires spécialisées sur certaines catégories
spécifiques de consommateurs. Le marché de la presse magazine est
particulièrement significatif à cet égard : le nombre d’acteurs n’a jamais
été si réduit, pour autant, la quantité des titres n’a jamais été aussi
importante.
L’organisation du marché de la presse écrite et ses modalités
économiques de fonctionnement s’appuient sur les interactions
stratégiques entre le marché médiatique et celui de la publicité, avec
un financement de part et d’autre de la plateforme. Aujourd’hui, cet
équilibre est bouleversé par la révolution numérique, qui se traduit
notamment par une mutation des comportements. La gratuité d’accès
d’un grand nombre de produits culturels tend à privilégier une
tarification totalement asymétrique, où seuls les annonceurs assurent
la couverture des coûts au profit d’un accès gratuit des lecteurs à
l’information. Dès lors, les éditeurs se trouvent face à un nouveau
modèle à inventer, avec la question centrale de la monétisation des
audiences. C’est l’objet de notre dernière section.
34
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
Vers un nouveau modèle d’affaires ?
L’Internet – et tout particulièrement le Web – est devenu l’outil
de référence de l’ère numérique : « 83 % des internautes européens ont
déclaré ne pas pouvoir vivre sans au moins une activité en ligne ; 32 % d’entre
eux affirment ne pas pouvoir se passer de la messagerie électronique et 96 %
admettent moins pratiquer une autre activité à cause de l’Internet4. » Ces
chiffres à la hausse sont particulièrement éloquents pour la population
d’âge comprise entre 16 et 24 ans, où l’on observe pour la première fois
que les jeunes passent 10 % de temps supplémentaire à naviguer sur
l’Internet plutôt qu’à regarder la télévision5. Cette possible substitution
entre un média émergent et les médias traditionnels est un phénomène
totalement nouveau : « 71 % des internautes français pensent délaisser les
autres médias pour l’Internet, 51 % admettent regarder moins la télévision,
39 % moins lire la presse écrite et 30 % écouter la radio moins fréquemment6. »
Dans cette déferlante numérique, se greffe la situation particulière de
la presse écrite. Selon une étude InfoCom (2008), plusieurs tendances
méritent d’être soulignées en Europe de l’Ouest : d’abord, il existe une
corrélation négative entre le taux de pénétration des titres de presse et
les usages de l’Internet ; ensuite, la diffusion des quotidiens payants
décroît entre 2002 et 2006 : moins 12,5% au Royaume-Uni, moins 11,1%
au Danemark, moins 5,7% en France, moins 4,5% en Italie, etc. ; enfin,
cette diminution des ventes coïncide avec une baisse des revenus
publicitaires qui s’est poursuivie en 2007 en Europe : moins 2,8%. En
France, la situation semble être encore plus marquée. Entre 2000 et
2007, la presse quotidienne régionale payante a chuté de 8,5 %, tandis
que la presse quotidienne nationale de 11,3 % (étude Xerfi, 2008). Pour
autant, la presse gratuite d’information (Métro, 20Minutes) bénéficie,
quant à elle, d’une diffusion de 560 millions d’exemplaires en 2007,
alors qu’elle n’est présente sur le territoire hexagonal que depuis 2002.
Prenant conscience de l’impact de l’Internet, de l’érosion de leurs
ventes, et de l’attrait privilégié que représente le Web aux yeux des
annonceurs et des consommateurs, les éditeurs ont choisi de décliner
leur offre en ligne. Avant de mettre en évidence les différents modèles
d’affaires et le nouvel environnement concurrentiel des éditeurs, il
convient d’abord de présenter les différentes plateformes que l’on peut
trouver sur l’Internet. Evans, Hagiu et Schmalensee (2005) en distinguent
trois : 1. les plateformes d’échanges qui renvoient aux places de marché
électroniques (tels Amazon.fr ; ebay.fr, etc.), aux sites de référencement,
aux comparateurs de prix ou encore aux sites de rencontres. Leur
objectif est la mise en relation des différents agents pour procéder à
35
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
des transactions directement ou non ; 2. les plateformes d’exploitation,
comme Linux ou Windows, ont pour objet de fournir à des utilisateurs
finaux l’accès à plusieurs applications ; 3. les plateformes d’audience
comprennent les moteurs de recherche (Google), les portails (Yahoo,
MSN) et les sites en ligne des médias traditionnels (radios, TV, sites de
journaux – lefigaro.fr, lemonde.fr, etc.). Ces plateformes permettent la
mise à disposition d’audiences quantitatives et qualitatives auprès des
annonceurs (voir Greffe & Sonnac, 2008). Les auteurs soulignent qu’à
chaque plateforme correspond un modèle d’affaires et une dynamique
propre, son succès tenant en sa capacité à structurer ses utilisateurs en
communautés et à leur proposer des services et des outils qui faciliteront
leurs interactions sociales virtuelles.
Les éditeurs de presse en ligne ont commencé par transcrire leur
modèle d’affaires papier sur le Net en faisant payer aux lecteurs un
abonnement mensuel ou annuel, ou encore, en mettant en place un
système de paiement à l’acte d’archives ou d’articles à l’unité (New York
Times, El Païs, etc.). Pour la plupart d’entre eux, ces pratiques se sont
soldées par des échecs, c’est le cas d’Irish Times, qui a vu une chute de
95 % de son audience en ligne suite au passage à un modèle payant en
2003 (Idate, 2008). Rapidement, les éditeurs ont donc dû adapter leur
modèle traditionnel de presse aux nouvelles exigences de l’internaute,
qui marque nettement sa préférence pour un accès et une consommation
gratuites de l’information.
Vers un nouveau défi : la gratuité comme modèle dominant
L’accès gratuit à de nombreux contenus, souhaité par les entreprises
médiatiques (presse gratuite d’information, télévision généraliste, radio)
ou imposé (comme le piratage dans l’industrie du disque, par exemple)
conduit l’ensemble des acteurs du monde des médias à reconsidérer
leur modèle d’affaires, qui s’appuie sur le mécanisme de la plateforme
d’échanges. La gratuité constitue une dimension essentielle dans l’ère du
numérique, même si elle ne représente pas un phénomène nouveau pour
les médias de masse. En effet, les biens informationnels n’ont pas toujours
été payés par leurs utilisateurs directs : mis sous tutelle pour des raisons
politiques et sociales, prescripteurs publics, mécènes privés, parrains,
publicitaires, etc., sont toujours intervenus dans leurs financements.
D’ailleurs, le financement des médias par la publicité n’est pas récent,
puisque le secteur de la presse écrite s’est tourné vers le marché des
petites annonces au 17e siècle et vers celui de la publicité au 19e. Cette
dernière s’est rapidement développée avec l’essor de l’économie et a
joué un rôle non négligeable dans le rapprochement de la presse avec
36
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
les circuits marchands. Il revient à Émile de Girardin d’avoir théorisé le
rôle de la publicité en lançant La Presse en 1836, énonçant de fait pour la
première fois l’existence d’un double marché, avec l’idée selon laquelle
si le journal est vendu deux fois, alors il pourra être moins cher pour
les lecteurs, et voir ainsi sa diffusion augmenter plus rapidement. La
publicité comme seconde source de financement crée le bénéfice du
journal.
Pour autant, ce modèle connaît deux évolutions majeures récentes :
dans un premier temps, l’appel aux recettes publicitaires en complément
d’un premier financement – généralement celui des consommateurs –
s’est répandu à l’ensemble des médias de masse ; ensuite, le modèle
économique des médias s’est concentré sur une source unique de
financement, le versant publicitaire : l’ère du « tout gratuit » a sonné
comme une véritable révolution culturelle et sociologique, offrant la
possibilité aux usagers de biens informationnels de ne plus payer pour les
consommer : journaux en ligne, musique, films, vidéos, etc. Soulignons
que si la gratuité ne signifie pas l’absence de valorisation économique,
pour autant élargie à l’ensemble des biens informationnels, elle implique
des mécanismes de révélation et de mobilisation des valeurs économiques
différents et plus complexes. C’est ce que nous allons tenter de mettre en
évidence.
Dans ce nouvel environnement, les éditeurs ont compris qu’ils
ne pouvaient plus se considérer comme de « simples » entrepreneurs
aux produits spécifiques, mais comme de véritables intermédiaires
d’échanges. Nous venons de le montrer, les médias sont des marchés
à deux versants depuis leur origine, qui jouent le rôle d’interface entre
deux groupes d’agents distincts : les annonceurs et les lecteurs. Ces deux
groupes constituaient, jusqu’à présent, deux sources de revenus potentiels
pour eux, liés par des effets de réseaux indirects positifs ou négatifs, selon
les réactions des lecteurs vis-à-vis de la publicité. Dans cette analyse, et
ce point a fait l’objet de notre deuxième section, on a mis en évidence
que, d’une part, l’éditeur prend en considération les comportements
des lecteurs et l’inclut dans sa structure tarifaire ; d’autre part, que
cette structure tarifaire a des incidences sur les contenus médiatiques
et sur la diversité des produits offerts, par voie de conséquence, sur la
concentration du secteur. Le fait que la nouvelle structure tarifaire soit
totalement asymétrique – un seul versant du marché paie – accentue
l’ensemble des effets précédemment identifiés. Deux conséquences
apparaissent comme essentielles : la question de la monétisation de
l’audience et les conséquences des effets « boule de neige » qui placent
les éditeurs dans un nouvel environnement concurrentiel.
37
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
La première conséquence est celle de la place de l’audience et de
sa monétisation dans les nouveaux modèles d’affaires. Ici, le lectorat
(et les publics), ainsi que l’ensemble des instruments et outils de sa
mesure, deviennent centraux. En effet, progressivement, l’audience
est devenue l’indicateur qui permet de fixer la valeur des espaces
publicitaires mis en vente, formatée dans ce dessein dès son origine. En
tant qu’opérateurs essentiels de la viabilité économique, les résultats
d’audience, notamment quantitatifs, deviennent les données légitimes.
Dès lors, la mesure d’audience s’impose comme un puissant système
de consultation du public7. Dans l’ère du numérique, la publicité est la
seule source de financement, et donc la seule à contribuer aux ressources
d’un site lorsque celui-ci bénéficie d’une audience importante ou
qualifiée. L’incidence possible du financement sur le contenu se trouve
amplifiée.
Par ailleurs, et il est important de le spécifier, la tarification de
l’audience en ligne est beaucoup moindre que pour la presse papier.
L’étude de l’Idate (2008) souligne que « même si les comparaisons des
tarifs restent difficiles en raison de la différence des formats papier et Internet,
des remises concédées, etc. […] Le coût de contact pour mille personnes (CPM)
est de 5 à 10 fois moins élevée sur un site Internet par rapport au journal
papier. » De nouveaux outils dits de « capture d’attention » doivent être
alors déployés pour parvenir à attirer le plus de consommateurs afin de
drainer du trafic et compenser, au moins en partie, la perte générée par
la baisse des revenus du papier et les moindres revenus publicitaires
engrangés sur le Net. L’économie de l’information tend alors vers une
économie dite de l’attention. Cela conduit les éditeurs-fournisseurs de
contenus numériques à capter l’attention du consommateur potentiel
et à la mobiliser au profit de la publicité commerciale, et en outre à
reconnaître les comportements des consommateurs (Chantepie, 2008).
La seconde conséquence est liée au modèle du numérique qui se
fonde sur la logique selon laquelle « plus c’est utilisé, plus c’est utile ».
C’est en quelque sorte l’effet boule de neige. Les réseaux de communication
– téléphone, fax, mail, messagerie instantanée, etc. – représentent
des exemples classiques d’effets de réseaux directs déjà évoqués, où
plus le nombre de consommateurs connectés est grand, plus l’utilité
d’appartenir au réseau croît, le consommateur ayant ainsi la possibilité
de communiquer avec un plus grand nombre de personnes. D’un point
de vue économique, cela signifie que le prix que les consommateurs
sont prêts à payer demain sera d’autant plus élevé que le nombre
de consommateurs présents aura augmenté. L’élargissement de la
base d’abonnés rend le réseau plus attractif. Une entreprise qui met
38
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
à disposition un « bien réseau », tel le téléphone ou l’Internet, pourra
pratiquer dans un premier temps une politique tarifaire de bas prix
afin d’élargir, de façon conséquente, sa base installée d’abonnés qu’elle
sera en mesure de mieux valoriser après. Contrairement aux médias
traditionnels, les fournisseurs d’accès à l’Internet (FAI) et les opérateurs
de télécommunications sont ici beaucoup plus puissants pour créer
et bénéficier de tels effets de réseaux : les services de téléphonie leur
permettent de générer des effets de réseaux simples, les services liés à
l’Internet leur permettent de générer des effets de réseaux croisés, dont
le mode de financement principal est la publicité. Cette seconde source
d’effets de réseaux se combine à la première, et l’amplifie. Dès lors, ces
effets couplés sont générateurs d’effets structurels importants une fois
les masses critiques atteintes. Le volume global de l’activité dépend donc
de la participation des deux groupes d’agents et de l’usage que feront
ces groupes de la plateforme. C’est dans ce nouvel environnement que
les éditeurs de presse se trouvent, c’est-à-dire en concurrence directe
avec non plus de simples éditeurs comme eux, mais avec des agences
de presse, des portails, voire des moteurs de recherche qui génèrent
des trafics d’audience nettement supérieurs aux leurs. Dans le modèle
d’affaires du tout-gratuit, la stratégie des médias et des principaux
acteurs du Web repose donc sur leur capacité à générer de l’audience et
à la monétiser auprès d’annonceurs.
Ainsi, avec Google qui génère 40 % du trafic d’un site de presse en
moyenne, les journaux ne sont désormais plus en position de force pour
revendre des contenus aux grands moteurs de recherche (Idate, 2008).
Dans la course à l’audience, le référencement apporté par les moteurs
de recherche joue un rôle très important, presque aussi important que
la notoriété d’un titre.
Conclusion
Nous l’avons vu, la publicité est le moyen prioritaire pour monétiser
la numérisation des contenus de presse, les revenus générés étant
directement liés à la fréquentation des sites. Dans ce nouveau modèle
d’affaires, plusieurs questions – voire difficultés – se posent aux sites
de presse en ligne.
D’abord, dans l’univers du papier, le marché de la presse a
longtemps obéi à une segmentation claire établie en fonction de la
thématique et de la périodicité. La multiplication du nombre de sites
d’information et l’abolition de la périodicité brouillent les frontières
de la segmentation papier (les contraintes de bouclage sont devenues
39
Les Cahiers du journalisme n o 20 – Automne 2009
inexistantes, l’information est délivrée en temps réel, etc.).
Ensuite, la concurrence sur Internet est totalement éclatée. Nous
l’avons vu, les sites d’information proviennent de contenus des
professionnels, des « pure players », des moteurs de recherche, voire
des internautes eux-mêmes. En ligne, seule compte la valeur de
l’information, c’est-à-dire son degré de non-substituabilité, impliquant
une modification de la chaîne de valeur qui fragilise encore la position
des journaux.
Par ailleurs, dans ce nouvel environnement, la publicité devient
partie intégrante des plans médias et contribue significativement aux
ressources d’un site de presse lorsqu’il peut justifier d’une audience
importante ou de qualité. L’accès payant aux contenus ne devient
possible que pour des informations à forte valeur ajoutée, susceptibles
d’intéresser des entreprises. Dès lors, la fragmentation, l’émiettement
de l’audience en publics, est le premier indicateur qu’un site Internet
va faire valoir auprès des annonceurs.
Enfin, la dernière difficulté concerne la viabilité économique de ce
nouveau modèle d’affaires, où la tarification publicitaire en ligne est
bien inférieure à celle du papier. La monétisation de l’attention des
internautes ne semble pas encore suffire pour garantir la viabilité du
modèle ■
Notes
1. Il convient de préciser, qu’à l’exception de deux ou trois titres de journaux (comme
le Canard Enchaîné par exemple), le double financement (publicité et lecteurs) est le
modèle d’affaires le plus répandu dans le secteur de la presse écrite en France, même
si la ventilation des recettes diffère d’un titre à l’autre (les recettes publicitaires des
magazines sont supérieures à celle des titres de presse quotidienne). En ce qui concerne
la télévision, plusieurs modèles d’affaires coexistent : la télévision publique (financée
pour partie par la publicité et par le téléspectateur, via la redevance), la télévision à
péage (financée pour partie par la publicité et principalement par l’abonnement des
téléspectateurs) et la télévision commerciale (essentiellement financée par la publicité,
même si de plus en plus la participation des téléspectateurs – envois de SMS dans
les émissions de télé-réalité par exemple – constitue une recette non négligeable). De
même, pour le modèle de la radio, il convient de distinguer la radio publique de la
radio commerciale. Quant au cinéma, il bénéficie lui aussi de ce même double financement (spectateurs et publicité), mais dans des proportions moindres. Par ailleurs, il
est important de préciser que les médias bénéficient de l’intervention de l’État, qui
prend des formes différentes selon le média concerné (aides directes et indirectes,
redevance, etc.). Le double financement constitue le point de départ de la réflexion
sur l’économie des plateformes, même si pour certains supports, le consommateur ne
paie plus ou pas pour consommer.
2. Il convient de préciser que cette classification a été reprise par un très grand nombre
40
L’économie de la presse : vers un nouveau modèle d’affaires
d’économistes. Néanmoins, elle a fait l’objet de discussions, opposant notamment
Samuelson à Ronald Coase, de l’école du Public Choice [Coase R. (1974), « The Lighthouse in Economics », Journal of Law and Economics, October, p. 357-376]. Ce dernier
a en effet critiqué cette classification en prenant l’exemple du phare, considéré à la
différence de Samuelson, comme un bien public rival et avec exclusion, et non comme
un bien public.
3. Rappelons qu’une externalité désigne une situation économique dans laquelle l’acte de
production ou de consommation influe positivement ou négativement sur la situation
d’un autre agent non impliqué dans l’action sans que ce dernier ne soit récompensé
ou dédommagé.
4. Étude réalisée pour le compte de l’EIAA (European Interactive Advertising Association) et menée selon la technique des entretiens téléphoniques aléatoires dans les 10
pays les plus riches d’Europe. Selon l’étude Médiascope Europe publiée en décembre
2007, 57 % des Européens accèdent régulièrement au Web, soit un total de 169 millions de personnes.
5. De façon générale, les internautes français déclarent passer en moyenne 12,7 heures
par semaine sur Internet, situant ainsi la France à la troisième place du temps passé
en ligne, derrière l’Italie (13,6 heures/semaine) et la Suède (13 heures/semaine). La
moyenne européenne est à 11,9 heures/semaine.
6. Phénomène confirmé par une étude réalisée par l’APPM (Association pour la promotion de la presse magazine) soulignant le phénomène de transfert, voire de compensation entre les dépenses publicitaires du « print vers le Web », Les clés de la presse, n°5,
novembre-décembre 2008.
7. Les mesures d’audience sur l’Internet recouvrent deux méthodologies distinctes :
les mesures site centric chiffrent la fréquentation des sites, et les mesures user centric
portent sur le comportement des internautes. On note aussi le nombre de pages vues
sur l’Internet, visiteurs uniques, taux de clics, etc.
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42
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
Les médias à l’ère numérique
Jean-Marie CHARON
Sociologue
Ingénieur CNRS
[email protected]
14
L
e numérique est l’un des facteurs
puissant de la transformation
actuelle des médias. Mais
qu’entendre par numérique lorsqu’il
concerne l’information journalistique et
les médias ? La formule la plus classique
consiste à présenter celui-ci comme le fruit
de la rencontre entre l’informatique et les télécommunications, intervenue dès la fin des
années 1960. Concernant les médias, il s’agit
d’abord de l’augmentation continue de la
puissance des ordinateurs alors que leur
taille et leur prix diminue régulièrement.
Les « mini-ordinateurs » vont entrer dans
les entreprises de presse dès les années
1970. Ils permettent la numérisation des
textes, sont associés à la photocomposeuse,
en même temps qu’ils gèrent des réseaux de
terminaux au sein de la rédaction, comme de
l’atelier. Les années 1980 voient apparaître
les « micro-ordinateurs », utilisables dans
des langages accessibles au plus grand
nombre, sur le lieu de travail comme à
domicile. Le développement du numérique
s’appuie également sur les différentes
générations de satellites de communication,
en même temps qu’il va bénéficier de
la miniaturisation de nombreux outils,
à commencer par la caméra, l’appareil
photonumérique ou le téléphone mobile
multifonctions.
Le numérique permet une rupture dans
les modes de traitement de l’information.
Celle-ci intervient sur quatre plans
complémentaires : 1. le process de fabrication,
avec l’abandon de la composition à partir
du plomb (typographique) remplacée par
le couple photocomposition-informatique
Les médias à l’ère numérique
(Lepigeon et Wolton 1979). Plus tard la rotative est pilotée par ordinateur
et les expéditions robotisées ; 2. la digitalisation de l’information,
d’abord les textes, puis les images et les sons. Dans les années 1970
apparaissent les premières banques de données d’information grand
public ou spécialisées ; 3. les outils de collecte de l’information,
d’enrichissement, de traitement et de présentation de l’information ; 4.
le transport de l’information, que ce soit vers et au sein des rédactions,
avec les « systèmes rédactionnels » (Charon, 1991) ou en direction du
public lui-même avec la téléinformatique domestique ou télématique,
puis l’Internet proprement dit.
Engagée il y a quatre décennies, la numérisation s’opère à des
moments et des degrés différents selon les médias. La plus grande facilité
à digitaliser les textes et le moindre volume de données à transporter
permet des transformations plus rapides dans la presse écrite, alors que
les nouveaux médias furent d’abord des médias de texte, au point qu’il
fut possible de parler d’un axe de diversification « texte-informatique »
(Charon, 1991). Les années 1990 verront le même processus s’engager
dans les radios et télévisions, avec l’abandon progressif de l’analogique,
alors même que les médias en ligne s’enrichissaient de vidéos et fichiers
audio, avec le développement de l’ADSL à partir de 1999 (Dagnaud,
2000).
Entreprendre un panorama du bouleversement des médias à
l’ère numérique exige de revenir sur quelques repères historiques
de ce processus de mutation. Les principales évolutions des médias
traditionnels seront examinées avant d’aborder les nouveaux médias.
Plusieurs traits dominants dans le traitement de l’information sont
alors à relever, avant de s’interroger sur la relation entre les médias et
leurs publics, qui voit émerger la notion « d’infomédiaires » (Rebillard
& Smyrnaios, 2010).
On l’aura compris, l’ambition de cet article est moins d’apporter des
informations et des connaissances tout à fait nouvelles que de procéder
à un tour d’horizon aussi large que possible de façon à identifier les
transformations liées au numérique qui affectent actuellement le
journalisme et sur lesquelles on s’accorde généralement, ou, du moins,
sur lesquelles on devrait sans doute pouvoir s’accorder.
Une mutation longtemps annoncée
Rarement mutation aura été annoncée avec un tel luxe de discours
prophétiques que cette « révolution numérique ». Tout le corps social
en serait profondément transformé, à commencer par les moyens de
15
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
s’informer et d’informer. Pour la France il faut rappeler l’impact du
rapport « Nora- Minc » sur « l’informatisation de la société » (Nora et
Minc, 1978) et toute la solennité que l’ancien président de la République,
Valéry Giscard d’Estaing, avait voulu donner à l’événement, lors de
rencontres « Informatique et société » organisées au Palais des congrès
de la Porte Maillot en septembre 1979 (Actes, 1980).
Pour la presse écrite, les premières réalisations remontent au
début des années 1970, qu’il s’agisse du lancement des premières
banques de données grand public par le New York Times (NYTIS) en
1972, professionnelles par le Wall Street Journal (Dow Jones) en 1978 ;
ou encore du premier « système rédactionnel » (saisie directe et accès
des journalistes au système informatique documentaire et éditorial)
installé à Newsday dans la banlieue de New York, également en 1972,
rapidement rejoint par le groupe Gannett qui participe à la mise au
point du système pionnier Atex (Burbage, 1981 ; Charon, 1991).
La numérisation de l’information est engagée depuis quatre
décennies, mais elle parut tout un temps avoir peu d’effets sur la place
et l’équilibre entre les médias, si ce n’est la question de l’apparition
d’un nouveau média ou de nouveaux médias s’appuyant sur Internet.
Depuis le milieu des années 2000, tout semble se précipiter. Les
équilibres économiques des médias traditionnels, à commencer par
la presse quotidienne, sont substantiellement ébranlés. Au premier
trimestre 2011, selon la Newspaper Association of America, les
quotidiens américains ont vu leurs ressources publicitaires reculer
de 9,5 % (par rapport au 1er trimestre 2010). Il s’agissait du vingtième
trimestre de recul de leurs recettes publicitaires.
Le repli de la publicité accompagne en fait celui de la diffusion
puisque les deux semestres 2008 et le premier semestre 2009 ont été
marqués par des reculs – 6,4 %, – 7,09 % et – 10,6 % pour ces mêmes
quotidiens des États-Unis. Les pratiques du public se transforment :
29 % de Français lisent un quotidien « tous les jours ou presque » (contre
55 % en 1973), mais seulement 10 % parmi les 15-24 ans (Donnat, 2009).
De nouveaux intervenants ont pris une place cruciale dans le système
d’information (agrégateurs, moteurs de recherche, fournisseurs
d’accès, réseaux sociaux, industriels de l’informatique et des télécommunications, etc.), s’intercalant entre les fournisseurs de contenus et
leurs publics. Une profonde incertitude domine désormais le paysage
des médias. Elle est le produit d’une mutation qui va se poursuivre sur
une longue période.
16
Les médias à l’ère numérique
Transformation des médias traditionnels et des manières de travailler des rédactions
La numérisation de l’information a substantiellement transformé
les médias traditionnels en favorisant l’accélération du traitement
de l’actualité. Radios et télévisions traitent des événements éloignés
instantanément et dans leur continuité (live). Ce qui n’était qu’une
promesse s’est concrétisé dès 1989 lors de la révolution roumaine1,
suivi dès 1991 des illusions de la « guerre en direct » du Golfe (Toscer,
1991), prenant surtout un caractère très spectaculaire en 2001, avec
les attentats au World Trade Center. Plus globalement s’instaure la
pratique par les radios et les télévisions d’éditions spéciales traitant
les événements exceptionnels ou particulièrement forts dans leur
continuité, des heures, voire des jours durant. À une échelle plus
modeste, celle du quotidien régional, l’information locale peut être
disponible dès le lendemain.
La numérisation a également permis dans chacun des médias
d’alléger les structures techniques, mais aussi rédactionnelles, en
même temps que remontaient vers les journalistes d’anciennes tâches
techniques (mise en page, montage, prise de son, etc.). Il s’en est suivi une
démultiplication des médias, avec des structures beaucoup restreintes.
En radio et télévision sont apparues des chaînes d’information en
continu. Dans la presse magazine se sont créés des titres toujours plus
spécialisés et segmentés, à un rythme qui pouvait atteindre plusieurs
centaines, en France, au début des années 2 000. La presse quotidienne
lance des gratuits d’information n’employant que quelques dizaines de
journalistes. Sur un plan plus anecdotique et plus « local », l’existence
d’un éditeur tel que PlayBac, publiant trois quotidiens et plusieurs
périodiques2, avec une équipe d’une centaine de personnes – dont 40
journalistes – est inenvisageable sans un recours optimum aux moyens
et techniques numériques.
Grâce aux banques de données, banques d’images, puis à l’Internet,
les rédactions ont progressivement accédé à une multiplicité de sources,
de toutes natures, conduisant à repenser les conditions dans lesquelles
les journalistes doivent se porter physiquement sur le terrain ou
s’appuyer sur leur propre « terrain » à partir du travail en ligne, jusqu’à
la notion de crowd sourcing. Cette opportunité de recourir à ces sources
rendues disponibles via le numérique est d’autant mieux accueillie
par les entreprises de médias qu’elle intervient alors que les effectifs
des rédactions sont en repli et que leurs coûts de fonctionnement
sont passés au crible par les contrôleurs de gestion. Sans compter que
17
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
pour l’information internationale, concernant les crises et les zones de
conflit, l’augmentation de la dangerosité de l’exercice du métier dans
de nombreuses régions du globe3 peut trouver quelques compensations
(via la collaboration avec des journalistes autochtones [Bagdad depuis
2003]4 ou encore les témoignages d’observateurs sur place [cf. Téhéran,
2009 ; Tunisie et Egypte, 2010 / 2011]).
Simultanément, avec le numérique, des concurrents – sites
d’annonces (Craiglist, Monster, etc.), plateformes d’échanges –
siphonnent les petites annonces (PA). Entre 2003 et 2007, Le Figaro,
par exemple, voit son chiffre d’affaires de petites annonces passer
de 97 millions d’euros à 25 millions (Poulet, 2009). Parallèlement,
une multiplicité d’intervenants (portails, moteurs de recherche, sites
aux contenus et objets les plus divers) s’emploient à capter une part
substantielle de la publicité commerciale. Ils introduisent des modes
d’évaluation de l’efficacité des contacts (Charon & Le Floch, 2011)
qui invalident les méthodes des régies publicitaires. Les modèles
économiques des anciens médias sont à réinventer, avec une urgence
particulière pour les quotidiens.
Émergence de nouveaux médias
En matière de nouveaux médias, le numérique prendra d’abord
des formes très éphémères tels Prestel en Grande-Bretagne, le
Bildschirmtext en Allemagne (de Bens & Knoche, 1987 ; Vedel, 1989),
les réseaux de câbles interactifs de Vidéotron au Canada (Burkhardt,
1984). Des systèmes plus pérennes s’installèrent dès les années 1980
tel le Minitel en France5 ou les réseaux privés à destination des microordinateurs en Amérique du Nord tel que Compuserv (Charon, 1991).
Au même moment se mettait en place dans les milieux universitaires,
souvent tentés par des modes de communication alternatifs (Cardon
& Granjon, 2010), les prémices de l’Internet. Celui-ci est ouvert
officiellement au public en 1991, l’Internet Society voyant le jour en
1992. Il ne prend cependant la forme d’un média grand public qu’au
milieu de la décennie, voilà donc plus de 15 ans.
Internet est-il, à proprement parler, un nouveau média ou le
support de nouveaux médias, parmi lesquels, la presse en ligne ?
Nombre d’auteurs y voient le « média des médias » sur lequel se
retrouveraient les médias traditionnels, ainsi que de nouvelles
formes éditoriales. Une telle discussion relève des prospectivistes. Le
chercheur en sciences sociales ne dispose pas des outils lui permettant
de confirmer ou infirmer une thèse plutôt qu’une autre. En revanche, il
18
Les médias à l’ère numérique
peut faire le constat que contrairement aux médias existant jusqu’alors,
Internet transforme rapidement ses fonctionnalités, alors même
que les supports permettant d’y accéder se diversifient rapidement :
smartphones, tablettes, aujourd’hui, e-paper et d’autres dispositifs en
cours de développement dans les laboratoires. Or, contrairement à
une conception qui considèrerait la question des supports et matériels
comme secondaire, chacun de ceux-ci permet des usages différents
(mobilité, qualité du visuel, etc.), qui suscitent en retour des approches
éditoriales leur correspondant.
Sur Internet et ses nouveaux supports cohabite un vaste ensemble
d’activités de natures très différentes : communication interpersonnelle
(mails, chats), sociabilité virtuelle des réseaux sociaux (Facebook,
Twitter), services, échange de musique ou de vidéos, e-commerce,
promotion des hommes et des idées (sites, blogs, groupes Facebook et
comptes Twitter), etc., et bien sûr information de type journalistique.
Elle n’est ni la plus massive, ni la plus rémunératrice. Elle n’est que
rarement rentable. Pour l’utilisateur, l’activité professionnelle cohabite,
voire s’imbrique, avec l’information, mais aussi le divertissement,
la relation, la consommation (Boczkowski, 2010). Pour le même
utilisateur, la frontière traditionnelle entre le rôle du public et celui
des fournisseurs d’information (journalistes) se transforme, devenant
poreuse par endroit ou par moments.
D’emblée les médias traditionnels ont vu dans Internet une
opportunité, voire une menace6 les conduisant à s’y diversifier sous
des formes variées. Le Chicago Tribune hébergé par AOL propose
ses premières informations sur Internet dès 1992 (Pélissier, 2001 ;
Rebillard, 2009). Le Monde crée un service multimédia en 1994, ses
informations sont accessibles via Infoni, en 1995. La même année,
Libération, L’Humanité, Le Parisien, les Dernières Nouvelles d’Alsace, Ouest
France, etc., créent leur propre service sur Internet. Aujourd’hui il existe
certainement peu de titres de presse écrite et certainement de médias
qui n’aient une ou plusieurs applications en ligne, sinon accessible
via les smartphones ou les tablettes. Des acteurs nouveaux, dit pure
players, d’abord peu nombreux, y ont fait leur apparition, tel Salon ou
Slate, aux États-Unis. Depuis le milieu des années 2000, ces pure players
d’information se sont multipliés. En juin 2011, le Huffington Post a
dépassé l’audience de Nytimes.com (New York Times). Les pure players
d’information sont une dizaine en France. De nouveaux venus font
régulièrement leur apparition, tel Owni en 2010 ou Atlantico, en 2011.
19
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
Traits dominants de l’information à l’ère numérique
Qu’il s’agisse des médias traditionnels (presse écrite, radio,
télévision) ou des nouveaux venus, le numérique conduit à l’affirmation
de traits saillants en matière de traitement de l’information. Interviennent
ici les potentialités des techniques liées au numérique, mais également
les choix des applications développées et exploitées par les producteurs
de l’information, et par ailleurs privilégiées par les publics eux-mêmes
(Dominique Cardon, 2011], dans une interrelation nécessaire.
Immédiateté Le premier des traits de l’information lié au numérique,
particulièrement spectaculaire dès les années 1980, en télévision
par exemple, c’est l’accélération du traitement de celle-ci. Cette
accélération est telle qu’il est possible de parler de quasi-immédiateté.
Le développement des radios et télévisions en continu en sont l’une
des manifestations, tout comme le traitement en live de crises ou
événements forts, à coup « d’éditions spéciales », à l’exemple, de la
Guerre du Golfe sur la plupart des chaînes. Avec Tienanmen ou encore
le siège du Parlement de Moscou, en 1993, CNN fera tout un temps
figure de modèle, sa capacité à projeter en quelques heures des dizaines
de journalistes sur le lieu de l’événement7 faisant la différence (de
Montvalon, 1992). Avec le Web, l’immédiateté conduit aux desks des
sites d’actualité au sein desquels les équipes de journalistes se relaient
souvent 20, voire 24 heures sur 24. Les « live tweet » en constituent une
autre forme plus récente, posant des questions inusitées de validation
de contenus produits par des journalistes, mais aussi des divers
contributeurs qui vont les rejoindre.
Terrain et carnet d’adresses virtuels Un second trait caractéristique du traitement de l’information
pourrait être décrit comme un mouvement de déplacement du terrain
physique en une forme de terrain virtuel. Le crowdsourcing en est l’une
des manifestations, mais plus largement il s’agit de la part, sans cesse
plus importante, de sources auxquelles les rédactions accèdent via les
réseaux, téléphoniques bien sûr, mais surtout l’Internet sous toutes
ses formes, des mails aux blogs en passant par les réseaux sociaux et
toutes sortes de sites (de médias, d’entreprises, d’acteurs sociaux et
d’institutions). Ce terrain virtuel prend la forme de l’afflux vers les
rédactions des médias ou des agences des images du Tsunami de 2004
20
Les médias à l’ère numérique
ou des attentats de Londres. C’est également la masse encore plus
impressionnante des documents diplomatiques fournis par wikileaks
en 2010. Ce sont les multiples blogs de spécialistes du nucléaire après
l’accident de Fukushima de mars 2011, comme ceux des opposants et
manifestants des différents pays concernés par le « printemps arabe », à
partir de l’automne 2010. Ce terrain virtuel, chaque journaliste, chaque
rédaction le construit et l’enrichit en permanence afin d’assurer une
sorte de veille vigilante, et de se garantir de faire partie des destinataires
des alertes, lorsqu’un témoin assiste à une action des forces spéciales
au Pakistan ou qu’une personnalité internationale est soudainement
arrêtée au moment de prendre un avion à New York. C’est dire qu’en
plus d’offrir ce terrain virtuel, le numérique transforme le bon vieux
carnet d’adresses, le rendant désormais actif au sens où les multiples
contacts qu’il recèle peuvent prendre eux-mêmes l’initiative de prévenir
le journaliste qu’un événement est en train de se produire.
Récits multimédias Le troisième trait caractéristique de l’information à l’ère numérique,
le plus valorisé depuis l’origine par les journalistes « expérimentateurs »
du Web ou des évolutions de chaque média, est la construction/
conception de récits et contenus multimédias. Il s’agit là d’inventer des
modes de traitement de l’information et formes de récits combinant
texte, son, image et liens hypertextes. Très souvent, cet enrichissement
reste bien modeste. Cependant, au jour le jour, très empiriquement,
de véritables formes originales émergent. C’est le data journalism ou
journalisme de données (Joannès, 2010) qui transforme la conception
même de la compétence et donc de la formation dont le journaliste a
besoin, puisque celui-ci doit pouvoir coopérer avec le développeur.
Cette exigence se retrouve également pour ceux qui s’engagent dans
la voie toute nouvelle du newsgame. Le webdocumentaire remet en scène
le rôle de l’auteur, individuel ou collectif, là où l’information en ligne
avait semblé faire reculer cette notion, avec tous les débats juridiques
qui l’ont accompagné (Derieux, 2010).
Participatif Autre trait caractéristique de l’information, valorisé par les tenants
de la « Révolution Internet » [de Rosnay, 2006 ; Pisani, 2008 ; Bouquillon
2010 ; Rebillard, 2007] consiste dans le participatif ou contributif,
symbole du Web 2.0, soit l’interrelation entre le journaliste et l’amateur,
thème développé par Patrice Flichy. Les formes et les degrés sont très
21
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
divers, du simple commentaire à l’enquête coréalisée par les internautes
du Guardian et les journalistes concernant les notes de frais des députés
britanniques. Owni a repris depuis l’idée en 2011, à propos des factures
d’eau en France. Ce sont plus communément les blogs, les forums et,
de plus en plus, le suivi des réseaux sociaux, avec l’animation de pages,
groupes ou comptes sur Facebook et Twitter. Plus exceptionnel, cela
peut prendre la forme de la conférence de presse en ligne organisée
chaque semaine par Rue898. C’est peu dire que la conception même
du journalisme, la manière de le pratiquer, voire la définition d’une
ou plusieurs spécialités journalistiques en émergence (community
manager, journaliste animateur de communauté, social media editor)
sont à réfléchir, repenser et expérimenter au sein de multiples sites
d’information.
Renforcement ou perte de la relation directe avec le public Le développement de la dimension participative du traitement
de l’information et les compétences nouvelles au sein des rédactions
auquel il donne lieu semblent militer dans le sens d’un renforcement
inusité de la relation directe entre les journalistes et les destinataires
de l’information, les médias et le public. Le développement d’une
éventuelle « coréalisation » de contenus induit une coopération et
une connaissance réciproque inaccessible jusque-là, bien au-delà de la
notion de « contrat de lecture », familière en presse magazine.
En même temps, le renforcement de la place et du poids des
supports numériques de plus en plus sensible pour les médias
traditionnels et surtout nouveaux fait émerger des intermédiaires
incontournables entre les médias et leur public, ces « infomédiaires »
(Rebillard & Smyrnaios, 2010) qui vont en se diversifiant, à mesure que
se multiplient les supports et s’enrichissent les pratiques : fournisseurs
d’accès (FAI) et portails (de ces fournisseurs d’accès particulièrement),
agrégateurs (à commencer par les moteurs de recherche, avec la place
particulière de Google), plateformes d’échanges et réseaux sociaux,
industriels (principalement Apple avec l’Iphone et l’Ipad).
L’interposition des « infomédiaires9 » a un puissant impact sur les
modèles économiques des médias au sens où ils prélèvent directement
une partie des ressources publicitaires10 au moment du passage du
public par leurs services. Ils opèrent un second prélèvement qui
pourra découler de l’exploitation des fichiers d’utilisateurs instruits de
22
Les médias à l’ère numérique
nombreuses données personnelles qu’ils peuvent constituer, à partir
de l’enregistrement des consultations. Un industriel comme Apple
impose en plus une formule de prélèvement substantiel (30 %) sur les
ressources issues du paiement des contenus des médias d’information.
Plus globalement, la question que posent les infomédiaires est celle
du partage de la valeur ajoutée. Les entreprises de médias, plurielles,
diversifiées, atomisées, concurrentes se trouvent, sur ce plan, en
position de faiblesse face à des groupes le plus souvent internationaux,
en position dominante, voire de quasi-monopole (Google, Facebook) et
beaucoup plus innovant (à la mesure d’investissements sans communes
mesures en recherche et développement).
L’impact des infomédiaires sur les modèles économiques a
des effets substantiels sur l’activité des rédactions : c’est d’abord
aujourd’hui la question cruciale du référencement par les moteurs de
recherche, alors que les utilisateurs accèdent beaucoup plus souvent
au travers de ces derniers au contenu des sites d’information. Un site
comme Lexpress.fr, par exemple, n’aurait que 30 %11 de son audience
qui accède directement par la page d’accueil. L’efficacité requise pour
ce référencement impose une collaboration régulière entre journalistes
et marketing, voire l’incorporation de savoir-faire issus du marketing
par les rédactions elles-mêmes. Parallèlement, une seconde forme
d’accès indirect au contenu des sites d’information prend la forme des
recommandations par les utilisateurs eux-mêmes à partir des réseaux
sociaux. Cela devait conduire à renforcer le développement de profils
de journalistes (journalistes animateurs de communautés) dédiés au
suivi et à l’animation des principaux réseaux sociaux, avec la création
de pages, comptes et groupes de « fans ».
Une mutation prolongée qui promet de se poursuivre La numérisation a eu des effets très substantiels sur les médias au
point d’engager une véritable mutation de l’ensemble de ceux-ci, qu’ils
soient anciens ou nouveaux venus. Cette dernière connaît une phase très
active dans laquelle domine une profonde incertitude pour les modèles
économiques, les modes d’organisation, les pratiques professionnelles
et les usages par les différents publics. Loin de devoir se traduire par
des stratégies de repli, un haut degré d’incertitude qui ne peut que se
prolonger sur une période longue, contraint l’ensemble des opérateurs
à placer au cœur de leur activité, la recherche, l’innovation, la créativité,
le laboratoire. Dans ce domaine, les médias partent avec un handicap
23
Les Cahiers du journalisme n o 22/23 – Automne 2011
au regard des nouveaux intermédiaires issus de l’industrie ou du
service de l’informatique et des télécommunications qui ont ancré de
tout temps ce type de démarche dans leurs stratégies.
Les rédactions, leur organisation, leur fonctionnement vont donc
devoir se transformer substantiellement, en même temps qu’elles
sont dans l’obligation d’inventer de nouvelles formes éditoriales, de
nouveaux types d’emplois et d’activités journalistiques. C’est peu
dire que les mouvements ainsi identifiés ont un impact puissant sur la
manière de concevoir la formation des nouveaux journalistes, comme
les moyens d’accompagner l’évolution des compétences des journalistes
en activité. Est-ce à dire que les écoles, les lieux de formation ont un
rôle à jouer dans l’invention de ces nouvelles structures de création
et d’innovation ? Elles ne sauraient jouer ce rôle, seules, en dehors
d’échanges constants avec les personnels les plus créatifs, avec les
équipes qui au sein des entreprises dessinent, expérimentent nouvelles
méthodes et nouveaux contenus. C’est à ce défi que répondaient les
deux journées – « Le journalisme numérique » – organisées par l’École
supérieure de journalisme de Lille en mai 2011, à la fois moment
d’échanges d’expériences et réflexion, mises en perspectives de celles-ci,
avec les journalistes, les éditeurs, les formateurs et les chercheurs. Il faut
souhaiter que de tels moments s’inscrivent dans la durée sous forme de
rendez-vous réguliers n
Notes
1. La 5 s’installe par exemple dans les locaux de la télévision roumaine afin de pouvoir
diffuser en continu de longs moments de cet épisode qui se transformera en cas
d’école en matière de dérive de l’information.
2. Mon Quotidien, Le Petit quotidien, L’Actu, ainsi que My Weekly, My Little Weekly, L’Actu éco.
3. Cf. Rapport annuel de Reporters Sans Frontières.
4. Notamment de la part des grandes agences internationales.
5. La grande majorité des sites d’information liés à la presse écrite proposaient des
services « minitel » très lucratifs à destination du grand public, à commencer par
Libération, Le Nouvel Observateur, Le Parisien, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, Sud
Ouest, La Voix du Nord, etc. (Charon, 1987).
6. Dès l’origine, la presse quotidienne américaine craint de perdre ses petites annonces,
qui constituent pour elle un apport beaucoup plus important que pour la presse
européenne et singulièrement française (Pisani, 2008).
7. En quelques heures, CNN a 65 journalistes et techniciens sur place à Moscou. Ils viennent des bureaux de Londres, Paris, Le Caire, Nicosie. Ils garderont l’antenne jusqu’à
la reddition des derniers parlementaires. Cf. Jean-Marie Charon (1996), « Question de
24
Les médias à l’ère numérique
regard - Les réseaux internationaux de télévision, le cas de CNN » in Les manipulations
de l’image et du son, Hachette-Pluriel.
8. Cf. le documentaire d’Isabelle Régnier, « La rue est à eux ».
9. Frank Rebillard et Nikos Smyrnaios.
10.Selon le Cabinet Marketer (eMarketer), les projections pour 2011 indiquent que le
marché du Display aux États-Unis devrait être dominé par le trio de tête : Facebook,
Yahoo, Google. Toujours aux États-Unis, Google occupe une position plus que dominante sur le marché du « search », avec 75,9 %.
11.Déclaration de son rédacteur en chef, Éric Mettout, lors d’une conférence organisée
par « Ça presse ! » en 2010.
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Comment les médias digèrent le numérique
Par Gabriel Vedrenne - Publié le 26 juin 2012 Europe 1
Les patrons des principaux médias ont fait le bilan de la conquête du Net et des
dernières tendances.
Tous ont compris l'importance du numérique et ont décidé de confronter leurs expériences
journalistiques. Les patrons de plusieurs grandes rédactions étaient réunis mardi matin à
Paris pour le 15e colloque NPA (Les nouveaux paysages audiovisuels), dédié aux médias et
au numérique. Extraits.
INTERNET CONTINUE DE CHANGER LA DONNE
Balbutiants lors de l’élection présidentielle en 2007, Internet et les réseaux sociaux sont
devenus incontournables en 2012. "Ce qui a changé, c’est le traitement de l’information.
Depuis janvier, on constate que la campagne est suivie en direct et nous, France
Télévision, risquons d'arriver en dernier avec des images qui sont déjà en ligne. Ce n’est
plus possible, il existe un risque de redite", comme l’a confirmé Thierry Thullier, directeur
de l’information de France Télévision.
Une telle contrainte a néanmoins un effet vertueux pour Thierry Thullier : "cela nous
contraint à être encore plus journaliste, à faire un effort d’angle dans les journaux et un
effort ‘d’évènementialisation’ dans des grands rendez-vous comme Des paroles et des
actes". Même constat au Figaro, où "on est extrêmement métamorphosé par rapport à
l’élection d’il y a cinq ans", précise Pierre Conte, président de la branche médias du
quotidien. "Ce qui a changé, c’est les news sur le mobile et la convergence complète des
équipes : nous avons fusionné les rédactions".
Du côté de France Télévision, les rédactions restent séparées mais "un journaliste télé est
aujourd’hui habilité à diffuser une information en ligne avant son direct", précise Thierry
Thullier, avant de mettre en avant une autre tendance : "le fact-checking sur [les]
émissions en prime time", c’est-à-dire la vérification en direct des chiffres avancés par les
invités politiques.
COMMENT LES RÉDACTIONS S'ADAPTENT
Bimédia. De facto, tous les médias doivent adapter leur pratique à cette nouvelle donne,
ce qu’a fait la rédaction de L’Equipe. "Prenons l’exemple des Jeux olympiques. A Londres,
nos (50, ndlr) journalistes seront acteurs sur tous les supports alors qu’à Pékin (en 2008,
ndlr) il y avait des groupes séparés : là, ils seront tous ensemble", précise François
Morinière, directeur général du quotidien sportif. Un rapprochement confirmé par
l’existence d’un directeur de l’information unique pour les versions papier et Web.
La direction du gratuit Metro a, elle, fait un choix radical baptisé "reverse publishing".
"Métro va être le premier quotidien à faire disparaitre sa rédaction papier. L’objectif est
de transformer la version papier pour en faire le meilleur de ce qui a été fait sur le Web.
L’essentiel des journalistes travailleront pour la version digitale puis la rédaction en chef
choisira (ce qui est repris dans la version papier)", détaille Edouard Boccon-Gibod,
président de Métro France.
LA MEFIANCE PERSISTE VIS-A-VIS DES RÉSEAUX SOCIAUX
Twitter. "Ce qui m’a frappé, c’est l’absolue prédominance de Twitter pour nos
journalistes", poursuit le président de Métro. D’où cette décision : "nous avons désormais
un journaliste qui suit constamment ce qui se dit sur Twitter".
Du côté de RTL, le président Christopher Baldelli est bien plus sceptique. "Des pronostics
ont été déjoués et notamment celui selon lequel tout se passera sur le Net et les réseaux
sociaux : ce n’était pas pertinent", estime-t-il, avant d’enfoncer le clou : "le Web a servi à
faire circuler les rumeurs et les boules puantes, les réseaux sociaux ont permis ce type
d’action".
UNE CHARTE POUR ÉVITER LES DÉRAPAGES ?
Dérives. Marie-Laure Sauty de Chalon, présidente du site spécialisé Auféminin.com, estime
qu’est en train d’émerger "un nouveau métier de trieur : ce qui doit aller sur Facebook,
sur Twitter, Youtube, etc. Quel type de contenu pour quel moyen de diffusion ? Il y a un
nouveau métier à inventer". Mais cette dernière estime qu'il peut y avoir des dérives dans
l'utilisation de Twitter par les journalistes, c'est pourquoi les dirigeants doivent, selon elle,
"rétablir l'autorité".
A France Télévision, "nous avons écrit une charte pour l’usage des réseaux sociaux : nous
ne pouvons pas relayer en direct des infos que nous ne pouvons vérifier", détaille de son
côté Thierry Thullier, avant de glisser "qu’elle n’est pas respectée" mais l’important est
"de provoquer le débat". La rédaction de L’Equipe a fait de même, tandis que Métro
affirme être "très strict" avec Twitter et que RTL est en train d’élaborer ses règles de
conduite.
MAIS UN MOYEN DE TOUCHER DE NOUVEAUX PUBLICS
Audiences. "Nous avons entrepris un virage numérique, nous avons lancé France TV Info
grâce à laquelle nous pouvons toucher un public qui ne regardait plus nos chaînes",
confirme ainsi Thierry Thullier. "Le numérique est une chance inouïe pour la radio car c’est
un moyen de toucher un public plus large car on est limité en termes de fréquences",
confirme Denis Olivennes, PDG d’Europe 1.
"On a enrichi l’offre de la radio : la radio se regarde de plus en plus, on a des caméras
embarquées dans les studios, ce qui fidélise l’écoute et enrichit le produit. Internet
permet à nos auditeurs fidèles de contaminer leurs amis via les réseaux sociaux", poursuitil, avant d’ajouter : "si je fais la somme de tout cela, je suis ébahi de la chance que cela
offre à notre radio".
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et des médias
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,R
,M
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a
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,M ;
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o F le droit d’auteur)
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ère ♦ les acteurs
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ce de médiasadeti à nos
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,
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et
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es entre le pouvoirpepolitique et les emédias,
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e,
11.
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L
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n,
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1.
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la
défense
du
pluralisme
et
de
l’ino
ce
l’ouverture
de presse ***
,L
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u
Au
a
p
dépendance
de
n
ag 12. Libéraliser
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,O
pe
x
,
la
réglementation
des
points
de
vente
pour
s
jo
p
Ec
iocacité***
év
ran de la presseNen
2. lAméliorer
le financement
développantard en augmenterrle
e
n
nombre
et
l’effi
se
ss
ex un fonds èr
,P
isi les Fondations
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,
on
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la
pratique
du
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domicile
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les
a
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s, dédié*** , RT
I
L
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instruments
de l’aide à la
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en
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une
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des
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L
ou
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an
La
pluralisme
,O
pe
x
,
s
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15.
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la
recherche
et
l’innovation
sur
la
diffusion
élé
ou
Ec
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ard aux pnumérique
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compétences
du CSA (notamment
res
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vis 4.nouveaux
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ng et le saisir edex la question du èrespect
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médias)
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du
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5. Élargir les aides de L
la Commission paritaire
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n- niveau sur leseévo, L aux nou- x16.
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plutions
, L en ligne, gratuits,
89
F1
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a
veaux supports
(journaux tout
etc.)
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des
médias
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l’information
de qualité
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se
ss 17. Susciter,des
ex
ng
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formations
marketing
dans
les
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’hu
P
l
is,
e, les chartestrade déontologieredes
a
6. Inscrire
journalistes , Djournalisme et de
,
communication
r
i
isi
s,
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L’E
Ru
R
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collective
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Gr dans leur TConvention
18. Inciter
les groupes
de presse à former
leurs journalise
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L
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L’E
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en favorisant
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de journalistes
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8. Recentrer
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dia
ex les aides dà èlar presse sur laspresse
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s, mesures d’incitation
ari en place des
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rad et politique***
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en
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io, France PresseExd’un statut et d’une
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sement numérique
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, L pérennes, Lsoutenir
son projet
numérique
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de l’audiovisuel
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22.
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le
périmètre
d’intervention
de
la
Caisse
des
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en
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a
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Dépôts à l’investissement
dans les
groupes de médias
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prles recommandationssqueionous estimons incontournables.
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Sérieux coup de mue pour la presse
musicale
SOPHIAN FANEN ET ISABELLE HANNE 8 JUILLET 2013 À 21:56
Bémol . Victimes collatérales du décrochage de l’industrie du disque,
les magazines cherchent un nouveau modèle économique et éditorial.
La couverture du dernier Vibrations porte le numéro 154 et promet un reportage en Colombie avec Major Lazer, le
groupe américain qui a fait des scènes électroniques des ghettos son terrain de jeu. Alors que la plupart de ses
concurrents de la presse musicale se sont contentés d’une interview depuis Paris, le magazine franco-suisse a choisi de
prendre la tangente pour parler du phénomène. Mais ça ne suffira pas : il n’y aura pas de numéro 155. Après vingt ans
d’existence, l’éditeur de Vibrations a déposé le bilan. Son site continue à vivre en attendant une décision de la justice
suisse. En décembre 2012, c’est le bimestriel Vox Pop qui mettait fin à cinq ans de photos et d’enquêtes singulières :
«L’économie n’était pas suffisante pour le mettre à l’abri», explique son rédacteur en chef, Jean-Vic Chapus. Non
loin, d’autres titres tanguent dans un milieu où lecteurs et annonceurs se raréfient. De là à parler de la fin d’un
modèle…
Où sont passés les lecteurs ?
Certes, les tirages de la presse musicale en France n’ont jamais été pharaoniques. Mais aujourd’hui, on racle les fonds
de tiroir. Rock & Folk, doyen national, vendait 130 000 exemplaires en 1981, contre 30 000 aujourd’hui. Entre les
deux, il y a eu Internet, qui a «totalement modifié le rapport à la découverte musicale, selon Marc Benaïche, le
fondateur de Mondomix, site et journal gratuit devenu depuis fin juin bimestriel en kiosques. Avant, les infos sur un
artiste étaient difficiles à trouver. Aujourd’hui, tout est disponible en ligne…» Et si la lecture d’une critique était un
préalable automatique à l’achat d’un disque, il suffit désormais de l’écouter sur Internet pour se faire son avis.
Dans le même mouvement, «l’éclectisme musical est devenu l’attitude majoritaire, reprend Benaïche. Avant, les
goûts étaient beaucoup plus segmentés : si on était fana de jazz, on n’allait pas écouter du métal. En quinze ans, tout
a changé.» Le constat est unanime : «La musique n’est plus fédératrice, assène Thomas Ducrès, rédacteur en chef de
Gonzaï, parti d’Internet pour arriver sur papier depuis le début de l’année. On écoute tous de la musique, mais plus la
même. Il n’y a donc plus de presse de génération.»
Où sont passés les sous ?
«On est au carrefour des deux crises : celle de la presse et celle de la musique», résume David Commeillas, rédacteur
en chef de Vibrations, dégoûté de voir le titre suspendu «alors qu’il ne perdait pas d’argent depuis deux ans, voire en
gagnait un peu». Mais le magazine dédié aux musiques noires a souffert comme d’autres de l’effondrement de son
premier annonceur : les maisons de disques. Dans les années 80, une major pouvait payer un voyage de presse en
Concorde pour l’écoute du dernier Michael Jackson… Depuis, les labels ont raté le train du numérique et leurs moyens
ont chuté avec les ventes de disques.
Pour exister quand même, certains ont dû trouver un mécène (Magic), s’adosser à une salle de concerts (Tsugi) ou à
une société productrice de spectacles (Mondomix), voire changer carrément de modèle. Tel les Inrocks : l’hebdo a
fondu ses pages musicales dans un magazine orienté société et politique. En élargissant son lectorat, il est parvenu à
attirer des marques de voitures ou de luxe. «On a aussi anticipé la baisse de la pub en faisant des suppléments, des
coffrets de disques» et un festival, explique Jean-Daniel Beauvallet, le rédacteur en chef historique des pages
musique.
Mais des mags plus spécialisés, comme Vibrations, n’ont pas pu emprunter ce chemin-là : «Il est difficile de démarcher
des grandes marques avec en couv un artiste noir comme Cody Chesnutt, regrette David Commeillas. Pour eux, ce
n’est pas un lectorat qui déclenche des achats.» On en revient alors à l’annonceur naturel, les maisons de disques,
quitte à glisser vers des pratiques peu déontologiques : une pub contre un article ou une chronique, voire la vente de
la une du magazine. «Vibrations n’a jamais été un support pour les labels, se défend son rédacteur en chef. Ce qu’on
faisait, c’est démarcher la maison de disques d’un artiste qu’on avait choisi de mettre en avant.» Mais le rapport de
force joue souvent en défaveur du journal. C’est ce que regrette un journaliste musical qui en a connu beaucoup :
«L’économie des canards est fondée sur les annonceurs plutôt que sur les lecteurs, qui ne sont pas dupes. Et comme il
n’y a pas de moyens, tu finis par accepter un voyage payé par Universal.» Et les critiques finissent par être
consensuelles : «Dans une rédaction, t’as toujours trois mecs très pratiques qui aiment tout.» Jean-Vic Chapus, de
Vox Pop, fait le même constat. «Les labels entretiennent la presse qui elle-même entretient les labels.» Intérêt pour
les maisons de disques : booker des dates de concerts pour leurs artistes. «Une couv, ça te donne accès à un festival,
explique Guillaume Heuguet, corédacteur en chef d’Audimat, toute jeune revue sans publicité. C’est un écosystème
dont le lecteur est exclu.» Tous ces journalistes sont critiques face à un modèle économique qui a fini par endormir
l’envie d’une presse de qualité. Pour Chapus, «en France, journalistiquement, la presse musicale est assez nulle
en termes de recherche d’info, d’enquête et de reportage».
Où sont les alternatives ?
Le vieux modèle de la presse musicale en kiosque aurait donc fait son temps. Une situation qu’Internet n’est pas venu
chambouler : le site des Inrocks y domine un paysage où l’on croise aussi Télérama et Libération, où l’on trouve des
blogs passionnants mais peu de journalistes qui en vivent. Quant aux annonceurs, ils se désintéressent d’un lectorat
encore plus insaisissable. Du coup, «tout le monde reproduit sur Internet ce qui s’est fait dans la presse, regrette
Thomas Ducrès, de Gonzaï. Il y a de plus une "prime au lol" et Internet n’est pas fait pour les articles longs. C’est en
réaction contre ça qu’on a lancé avec 800 euros une version papier de Gonzaï .» Le numéro 3 est sorti en juin, avec au
programme des reportages («Sur la route des Carpates») et des interviews loin de l’actualité marketée. Gonzaï se vend
dans des boutiques et sur Internet, comme Audimat, créé «par frustration plus que par antagonisme, selon Guillaume
Heuguet. On veut prendre la musique au sérieux, qu’elle soit commerciale ou expérimentale». Formats longs et textes
hors du tempo imposé par les labels : à l’instar de la presse, le journalisme musical est en train de laisser l’info brute
au Web pour tenter de faire mieux en faisant moins. Le succès de XXI et des mooks a ouvert cette piste. Vibrations
vient d’ailleurs de lancer le Grand Remix sur ce modèle. Quant aux Inrocks, Jean-Daniel Beauvallet évoque un retour à
une parution «mensuelle ou bimestrielle. Le futur de la presse musicale, c’est des beaux objets comme la musique en
produit».
Sophian FANEN et Isabelle HANNE
Avec «Gonzaï», la contre-culture fait
souscrire
JEAN-CHRISTOPHE FÉRAUD 16 DÉCEMBRE 2012 À 19:06
GONZOZOS
«Des faits, des freaks et du fun» : digne héritier de la «free press» des années 70, Gonzaï sévit en ligne depuis 2007.
Et voilà que, fort de ses 100 000 visiteurs uniques, ce rejeton du Web dopé au gonzo-journalisme s’est mis en tête de
devenir un «vrai» magazine papier. Drôle d’idée à l’heure où la presse de l’ère Gutenberg entame sa migration
numérique. Mais Gonzaï a un plan B : exit le vieux système de distribution, le «magazine de la contre-culture
moderne» arrivera directement dans la boîte aux lettres de ceux qui auront préfinancé sur Internet sa version papier.
«On a fait le tour des groupes de presse pour aller en kiosque, mais on s’est fait jeter partout. Alors on a eu l’idée de
faire appel au seul juge : le lecteur», explique Thomas Ducres, alias Bester Langs, le red chef de Gonzaï. Pour ce
grand saut vers l’imprimé, le mag a fait appel à la plateforme de financement participatif Ulule. Résultat : 1
500 souscripteurs ont apporté les 8 500 euros nécessaires à la sortie du magazine papier en pré-achetant le numéro 1
ou en s’abonnant à l’année. Gonzaï sera livré chez ses souscripteurs le 15 janvier, gonzo et banzaï inclus. Au sommaire
: Georges Marchais et le jazz, du glam rock, un reportage sur le rêve américain au cœur de la France profonde...
J.-C.F.Photo DRJean-Christophe FÉRAUD
Le papier bien roulé de Gonzaï, financé via Ulule
Et ne parlez pas de "mook" !
Suivre @ActuaLitte
Le mercredi 27 février 2013 à 16:29:40 - 0 commentaire
Pour tenter le coup de sortir un magazine papier à partir d'un site Web animé par des bénévoles,
il faut probablement avoir « la plume d'un maître reporté, le talent d'un photographe de renom
et les couilles en bronze d'un acteur », emphase sur le dernier élément. Les gusses de chez
Gonzaï, un des rares sites culturels valables, ont choisi cette voie à bord de leur bolide
foutraque. Mais on arrête avec Thompson, Gonzaï mène désormais le business avec sa propre
came.
La foudre ne tombe jamais au même endroit, et la rédaction de Gonzaï peut donc considérer que c'est
une relation durable qui s'est installé entre son magazine et les lecteurs qui en financent la parution :
à 8 heures de la fin du décompte, le numéro 2 de Gonzaï Magazine a en effet obtenu la totalité des
financements nécessaires à sa parution et distribution. « Pour chaque parution, il nous faut atteindre
le plafond minimum » confirme Thomas Ducres, rédacteur en chef de Gonzaï.
« Nous n'avons pas de trésorerie préexistante, pour monter un modèle économique différent. Il y a
bien des forfaits à plus long terme, à proposer aux lecteurs, mais les annonceurs sont une part
minoritaire dans l'équation. Le minimum requis est donc indispensable. Avec, en garantie, le
remboursement si ce plafond n'est pas atteint, et le numéro annulé. » En gros, à chaque réunion de
rédaction, l'équipe Gonzaï pourrait aborder la mort de sa version papier, normal.
Un pari barré qui est celui de la qualité, quand le site Internet de Gonzaï, 6 ans dans les dents, crie
toujours haut et fort que « Seul le détail compte » : à chaque numéro, il faut convaincre le lecteur de
payer, avant même d'avoir pu feuilleter l'exemplaire en question. « Tout ce qui découle de ce modèle
constitue une prise de risque. Je ne dis pas ça pour qu'on se la pète ou quoi, avec le numéro 2
bouclé, mais lancer un magazine aujourd'hui avec ce modèle économique constitue une vraie
pression », termine le red-chef.
Gonzaï.com, à visiter
Là où il faudrait « environ 30.000 € » pour démarrer en kiosques ou librairies, Gonzaï se contente de
6.000 €, pour 1.500 exemplaires envoyés à domicile ou déposés chez des disquaires de France, ou
chez Agnès B., le seul snobisme que s'est permis le mag. « Il était important d'apparaître dans des
lieux, et surtout en dehors de Paris. Et puisque Gonzaï est très, très musique, les lieux se sont
imposés. »
À l'arrivée, le numéro 1 du Gonzaï mag a dû réjouir les aficionados du journalisme à la Thompson :
papier au grain qui rappelle les plus grandes heures de Bizot et d'Actuel, sujets presque attendus tant
ils font partie de la mythologie autour de l'auteur (les gangs, avec les Hell's Angels)... Mais, tout de
même, une surprise : la marionnette Gonzo du Muppet Show dans un cercueil, façon de tuer le père ?
« C'est un clin d'oeil à la pochette de Sgt. Pepper, mais aussi une façon de s'affranchir de l'héritage
Gonzo qui est un peu pesant, aussi. Il fait partie de l'ADN du site web », analyse Thomas Ducres.
Le Web en sauveur du papier ? Du côté de la rédaction, on ne se voit guère en montreur d'exemple :
les contributeurs de Gonzaï sont presque tous engagés dans la version papier, et reçoivent cette fois
un salaire (même réduit) pour les articles publiés dans le magazine : « Vu qu'il y a prestation
commerciale et échange de liquidités avec le client, il fallait une société. »
Que les fervents défenseurs de l'underground ne s'inquiètent pas : le conseil d'administration n'est pas
au programme, et la seule pub du Gonzaï Mag, c'est pour du Jack Daniel's.
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8
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/SALON-LE-RADIO-REFLEXIONS-DEBATS
SALON LE RADIO : REFLEXIONS, DEBATS ET PERSPECTIVES AUTOUR DE
LA RADIO
A quoi ressemblera la radio musicale de demain ?
Article /
mercredi, 8 février 2012 - mis à jour le mercredi 8 février 2012
En 2009, la journaliste de Télérama Véronique Brocard suscitait nombre de réactions, en se demandant si les
radios musicales avaient encore un avenir. "Supplantées par Internet, confrontées au vieillissement de leurs
auditeurs et à la baisse de leur audience", leur déclin semble inéluctable, affirmait-elle. Média de prescription
et de découverte musicale historique, le passage à l’an 2000 a réinterrogé le rôle central de la radio. Depuis
20 ans, alors que tous les médias traditionnels ont connu des mutations profondes, la radio semble ne pas
avoir évolué aussi vite, et être encore à la traîne de la révolution numérique.
Le salon Le Radio, qui s’est déroulé à Paris du 5 au 7 février 2012, a fourni son lot de débats et d’échanges sur
l’avenir de la radio musicale, et de la radio en général. Les réflexions et initiatives autour de ce média sont
nombreuses et riches. Entre innovations technologiques, injonction à intégrer toujours plus d’interactivité,
adaptation des méthodes traditionnelles de programmation musicale… à quoi ressemblerait la radio musicale
de demain ?
La radio et la musique, un couple lié depuis quasiment un siècle. La radio
est en effet un vecteur historique de diffusion musicale. Elle est aussi
indissociable du disque. Un exemple ? Le 45 tours. A l’origine, cette
innovation n’était pas forcément prévue pour constituer un marché grand
public, mais pour alimenter les radios en hits. En France, le marché de la
FM commerciale s’est consolidé à la fin des années 1980 autour de
réseaux musicaux nationaux, puissants supports de prescription. Mais la
radio a peu à peu perdu ce statut, grignoté d’abord par la télévision et
les vidéoclips, puis, et surtout, par Internet et ses formes de
recommandation.
Si dans les années 1980, la révolution de l’ouverture des ondes a vu l’arrivée de nouveaux entrants imposant
de nouveaux fonctionnements, la FM apparaît aujourd’hui vieillissante. Elle doit se réinventer, trouver de
nouveaux formats,… voire même remettre en cause cette notion pourtant si liée à son histoire.
La radio est toujours le média de prescription musicale n°1
Pourtant, la radio garde une côte de popularité et une place de choix. Elle est, selon les résultats de l’étude
Les Français et la musique [1] réalisée en 2011 par la Sacem, le moyen le plus apprécié pour écouter de la
musique (36% des sondés) et le support privilégié de découverte de nouveaux artistes et morceaux (70% des
sondés).
Ces chiffres s’expliquent par la structure même de la population française. En effet, les plus de 50 ans
représentent 45% du total. Si l’on compare ces résultats en isolant la tranche des 15-24 ans, on remarque que
d’importants changements sont en cours. Comme le rappelle Claire Giraudin, "les habitudes de consommation
évoluent doucement, ce qui est normal étant donnée la structure d’âge de la population française". Pour les
15-24 ans, le support préféré d’écoute de musique est le baladeur (27%), devant la radio (20%) et le téléphone
portable (13%). Pour la recommandation, les médias traditionnels (radio, télévision) restent en tête, mais sont
concurrencés fortement par Internet et notamment les sites vidéos, les sites communautaires et les radios en
ligne. 76% des 15-24 ans affirment utiliser Internet pour écouter de la musique, (35% de plus que l’échantillon
global).
L’arrivée des nouvelles technologies et le bouleversement des habitudes d’écoute qui en résulte apparaissent
nettement dans les résultats de l’enquête. Pour les découvertes musicales, les sites de vidéos 2.0 (YouTube,
DailyMotion…) arrivent en 4e position, avec 14% des réponses. "C’est une percée remarquable pour des
prescripteurs qui n’existaient pas il y a quelques années !", souligne Claire Giraudin.
Pour l’Adisq, citant plusieurs études, le constat est le même : la radio traditionnelle est toujours la source la
plus populaire de découverte musicale, mais son statut est contesté. Ainsi "la radio traditionnelle et le
bouche-à-oreille dominent toujours comme source de découverte musicale, mais la télévision, les réseaux
sociaux et les autres formes d’écoute de musique sur Internet progressent rapidement" [2]. Pour les jeunes
générations, la radio est en perte de vitesse, concurrencée de toute part. La musique s’écoute et se regarde
sur mobile. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les premiers ipods, symbole d’un changement d’habitudes
lié à un changement technologique, n’intégraient pas de récepteur radio.
Mais avant de balayer les pistes évoquées, dans les allées et les conférences du salon, pour tenter de
réinventer la radio musicale, il est utile de rappeler la façon dont se font les programmations.
Music in the air…play
"On ne fait pas la radio qu’on aime. Programmer c’est faire des compromis ".
Jérôme Burnichon, Hitwest
Comment se fait la programmation musicale d’une radio ? Qui choisit, et
selon quels critères ? Évidemment, il n’y a pas de réponse unique. Cela
dépend du positionnement de la radio, de son audience, de son ou ses
modes de diffusion. Des constantes sont tout de même identifiables. Tout
d’abord, comme le précise Julien Guicherd, programmateur musical de
Direct star, "programmer, c’est faire des choix, en fonction d’un public
cible". Pour ceux qui s’imagineraient encore l’animateur arrivant dans le
studio avec sous le bras des disques, ou agitant comme un trésor un
lecteur mp3 rempli des nouveautés qu’il a dénichées, la chute risque
d’être douloureuse… Et puis, excepté dans quelques radios associatives,
qui font de la résistance, le support CD a disparu, la musique est
entièrement dématérialisée. De même pour la programmation.
Depuis le début des années 1990 et l’arrivée en France des logiciels de radio-automation, elle est entièrement
automatisée. Initialement assignés à la programmation en avance des playlists de nuit, leur utilisation s’est
vite généralisée. Selector, le premier historiquement et le plus connu serait, selon son éditeur RCS, utilisé par
près de 8.000 stations dans le monde. Et par "l’essentiel des grosses radios françaises ", selon Bruno Witek,
(ex-animateur et ex-directeur d’antenne de plusieurs stations musicales, aujourd’hui expert-conseil en
programmation) [3].
Top/récurrent/nouveautés/gold… ?
Les programmateurs commencent donc par élaborer des playlists, selon des critères variant d’une station à
une autre. Celles-ci sont créées sur les logiciels de radio-automation, comme Selector ou encore Winradio. Les
titres sont classés par catégories (là encore rien n’est gravé dans le marbre). Les "Hit radios" ou radio ne
programmant que des tubes, fonctionnent généralement avec un Top 40 : 40 tubes, qui tournent en boucle.
D’où cette impression d’entendre toujours la même chose. Les catégories les plus communément utilisées
sont :
les
les
les
les
«
«
«
«
tops » (ou leur variante « supertops ») : les tubes incontournables du moment
nouveautés » : comme leur nom l’indique…
récurrents » : des artistes identifiés
golds » : les valeurs sûres, anciens tops ou tubes plus anciens encore (années 1980 ou 1990)
Ces logiciels sont comme des « super jukeboxs ». On y paramètre ainsi les
critères de rotation, et ce que l’on appelle les horloges. Les rotations les
plus fortes sont généralement espacées d’1h30 (durée qui correspond à
peu près à la durée d’un top 40). Ce qui veut dire qu’un même titre est
joué toute les 1h30. Les horloges correspondent à chaque heure de la
journée et sont composées de tous les éléments diffusés. On indique ainsi
au logiciel la composition de la tranche : un supertop / un récurrent /
une nouveauté / un top /un top / un gold/ un supertop…. On peut
aisément repérer des règles en écoutant attentivement les choix de
programmation. En début de tranche horaire, ou lors d’une reprise après
une pub ou un journal, il est rare d’entendre une nouveauté. Un top, un
gold ou un récurrent ont un impact plus positif et évitent le zapping.
Bruno Witek précise : "On peut tout faire avec ces logiciels : mettre en place la playlist, définir les
rotations…On peut même coder les morceaux en fonction de l’intensité musicale : on dit au logiciel que si la
fin d’un morceau est lente, alors il faut que le début du suivant soit rapide. On donne des priorités, des
stratégies, des impératifs de quotas, et le logiciel les applique. On peut entrer près de quarante règles !" [4].
Ces playlists doivent également respecter un certain nombre de contraintes : la durée des titres, très
formatée (d’où l’existence des versions radio edit d’un titre), les emplacements des écrans pub ou encore les
quotas de chansons francophones. Ainsi, les programmateurs musicaux doivent vérifier toutes les playlists et
opérer des modifications manuellement si besoin.
Il va sans dire que les programmateurs des radios sont « choyés » par les maisons de disques, qui leur
communiquent régulièrement leurs nouveautés. Se sont même développés ces dernières années des services
de « coursier numérique », comme par exemple Bya, qui livre directement les nouveautés dans les boîtes mail
des radios. Des artistes font aussi eux-mêmes des envois aux radios dans l’espoir d’entrer dans leur
programmation, mais c’est souvent peine perdue… Un artiste non signé n’a quasiment aucune chance
d’obtenir des passages sur ce type de radio. De plus, les rotations étant composées d’un nombre restreint de
titres, autant dire qu’y entrer n’est pas aisé.
Une situation qui tend les relations entre maisons de disques et radios, les premières ne se montrant pas
toujours satisfaites des choix éditoriaux des secondes, ces dernières reprochant aux premières de ne pas sortir
assez de nouveautés… Comme le résume Julien Guicherd, "maisons de disques et radios sont comme chiens et
chats".
Quelles perspectives pour la radio de demain ?
Si le modèle décrit précédemment n’est évidemment pas figé et a connu des
évolutions, la radio reste encore largement basée sur ce fonctionnement linéaire :
le programmateur programme, l’auditeur écoute ce que le programmateur a
choisi. La radio tient évidemment compte des « voix de retour » depuis longtemps.
On pense au binôme radio/téléphone, grâce auquel les auditeurs peuvent choisir
et/ou dédicacer un titre, mais aussi aux grandes heures de la libre antenne.
Constat symbolique et paradoxal, les radios ont également largement investi les
réseaux sociaux, pour communiquer avec leurs communautés d’auditeurs.
Comme le rappelle Rémi Bouton, journaliste et pionnier des radios libres en France, "la radio au XXe siècle a
été le média le plus souple, le moins cher, le plus instantané, le plus social". Mais avec Internet et la
prépondérance du support mp3, offrant des possibilités simples de stockage et d’échange de musique,
redoublée par le web 2.0 et l’émergence des réseaux sociaux online, ce statut est remis en cause. Les
technologies ont évolué, et les habitudes d’écoute ont changé.
Grille de programme versus « musique à la demande »
Et la radio doit donc changer, évoluer, car elle apparaît un peu comme à la traîne de la révolution numérique.
Comment concurrencer le « tout à la demande », et sa déclinaison en plateformes de « musique à la
demande » ? On peut effectivement envisager la radio comme un simple flux audio, mais cela serait très
réducteur. Et pour évoluer, il est difficile de séparer contenus et interfaces. La radio n’est pas non plus restée
figée : les podcasts se généralisent, mais restent encore minoritaires comme mode de consommation. Quelles
sont alors les pistes de renouvellement, pour inventer la radio de demain ? Doit-elle nécessairement intégrer
du texte, de l’image, au risque de se dénaturer ? Alors que la radio est par essence le média qui ne sollicite
qu’un seul sens, l’ouïe (sans compter l’imaginaire qu’elle suscite !), peut-elle concurrencer un véritable média
d’avenir que l’on envisagerait plutôt comme synesthésique ?
Des évolutions technologiques
Une des pistes possibles passe par la technologie. Par exemple, ce que l’on
pourrait appeler la « radio en 3D ». Il existe actuellement plusieurs projets de
spatialisation du son. Il s’agit d’augmenter l’expérience du son, en utilisant la
diffusion 5 .1, en la poussant encore plus loin. C’est un peu comme l’image 3D
pour la télévision. Le potentiel technique a une marge de progression importante
pour explorer cette voie.
Le développement des métadonnées ou données associées à un fichier son vont
aussi probablement permettre d’offrir plus que simplement un titre de musique :
les informations de base (nom de l’artiste, du titre, de l’album, du label…) mais
aussi un accès à des contenus exclusifs (vidéos, interviews…) ou à l’actualité de l’artiste.
Pour les programmateurs professionnels, mais aussi pour les programmateurs en herbe, les possibilités
d’agrégation de flux audio permettent de se composer sa propre radio à partir de différents flux : playlists
personnelles, ou échangées, podcasts… L’auditeur décide du programme. Des plateformes d’agrégation
proposent déjà du placement de contenu. Les radios en ligne piochent et composent à la carte. Les projets de
ce type se sont d’abord développés pour proposer des placements de pub, mais se positionnent de plus en plus
sur du contenu, en s’adressant directement à l’auditeur.
Les interfaces interactives
Un autre axe potentiel d’évolution s’appuie sur la réflexion autour des interfaces. Pour rester fidèle au média
radio, celles-ci doivent intégrer la dimension sonore. La radio devra sans doute s’appuyer sur ce trait d’ADN
qui est le sien : elle est par excellence le média que l’on écoute en faisant autre chose. Comme le rappelle
Olivier Riou, ancien directeur des programmes d’Europe 2 et fondateur de Hot Mix radio, "la radio, c’est ce
que l’on est capable d’assimiler en faisant autre chose. Et même en associant des images, des informations,
si l’on écoute la radio en cuisinant, l’on est d’abord occupé à cuisiner". Dans cette perspective, l’avenir de la
radio ne doit pas nécessairement passer par l’image, par l’écran. On s’y intéresse plus aux interfaces à
commande vocale, pour partager playlists et podcasts.
Les formats de ces derniers, encore très longs pour la radio, peuvent aussi évoluer. Ils sont moins pratiques
d’usage, encore peu adaptés à l’esprit de zapping, à l’exigence d’instantanéité de plus en plus affirmée. La
commande vocale peut être une piste intéressante à explorer (transposer techniquement le contrôle+F du
texte à l’écran pourrait permettre d’aller directement à la musique souhaitée…).
De même que le recours à des contenus pour pallier le déclin du simple flux musical, le développement des
directs peut conforter la dimension linéarisée de la programmation musicale. Ce qui a été fait pour
l’information journalistique peut être adapté à la musique, en diffusant encore plus de concerts en direct par
exemple.
Interactif et social : l’avenir de la programmation
Au-delà des évolutions technologiques, les principales réflexions portent aussi sur des
systèmes de programmation plus interactifs et plus sociaux. Sur ce point, les radios ont
déjà enclenché leur mutation, en étant présente sur Internet et en investissant les
réseaux sociaux. Pensons à Skyrock, qui a mieux résisté au passage à vide de la radio au
milieu des années 2000 en prolongeant très tôt son périmètre via les skyblogs.
En terme de programmation, une plus grande réactivité est sollicitée, notamment pour
faire entrer plus vite les nouveautés, et augmenter le nombre de titres en rotation, ou
adapter celles-ci : moins de matraquage dans le temps d’une même chanson, ou
l’inverse ! Comme du temps de la K7 audio, nombre d’auditeurs ne souhaitent écouter que les titres qu’ils
aiment… Beaucoup se souviennent des interminables heures passées devant une chaîne hi-fi, à attendre le
titre attendu, l’index nerveusement posé sur le bouton record, prêt à jaillir, en espérant que l’animateur ne
parle pas par dessus la musique…
La prise en compte des auditeurs dans leur interaction avec les contenus et la programmation musicale devra
être encore plus importante. « L’esprit facebook » est aujourd’hui bien ancré. Pouvoir dire « j’aime / j’aime
pas » doit servir à personnaliser la radio écoutée, qu’elle se paramètre en fonction de ce que l’auditeur lui
indique. Cette dimension est déjà intégrée par les radios, avec les panels d’écoute pour les sélections de
titres, ou via les réseaux sociaux justement. Mais cette logique peut être poussée plus loin, jusqu’à
l’individualisation. Comme le rappelle Vincent Castaignet, fondateur de Musicovery, "le premier niveau
d’interactivité, c’est de pouvoir dire non : ce titre je ne veux plus l’entendre". Ce peut être une des « voix de
retour » exploitable pour la radio numérique. Tout en gardant à l’esprit que certaines œuvres méritent en
effet plusieurs écoutes, attentives… Combien d’artistes n’auraient jamais accédé à la notoriété s’ils avaient
été immédiatement « zappés » ?
La dimension sociale peut aussi être envisagée dans une perspective communautaire, en limitant les accès
privilégiés aux suiveurs, amis, abonnés…. Quoi qu’il en soit, il semblerait qu’il faille passer d’une vision
linéaire à une vision éclatée, recomposée.
Tous programmateurs ?
Si l’on suit les pistes d’évolution évoquées lors du salon Le Radio, la radio du futur sera sûrement délinéarisée,
déconstruite et reconstruite. L’auditeur déconstruira ce que lui proposent les professionnels de la radio et
recomposera à sa guise, en poussant au maximum la dimension « à la demande ». Chacun pourrait ainsi
devenir son propre programmateur. Si effectivement, tout le monde ne deviendra pas obligatoirement proactif
et expert, désireux de composer ses propres contenus, les programmateurs des radios sont et seront de plus
en plus concurrencés par des « prescripteurs non professionnels » : amateurs, passionnés, webradios
spécialisées… Bref, par ce que l’on pourrait appeler des leaders de prescription, sur les plateformes de
streaming, les réseaux sociaux… Ce que l’auditeur recherche, ce sont des playlists « expertisées » par
quelqu’un, qui que ce soit, à qui l’on reconnaît sinon un statut d’expert, du moins un statut de connaisseur, ou
tout simplement dont on partage les goûts.
Retour vers le passé : « Le transistor du peintre »
"Le transistor du peintre est toujours le plus important"
Edwige Roncière
Aujourd’hui, la radio apparaît donc condamnée à l’audace, à l’évolution technologique et à l’injonction du
toujours plus social. Il faudrait dès à présent enterrer la « radio de papa », ranger transistors et autres postes
dans les armoires de l’Histoire. Mais n’en déplaise aux thuriféraires
de la radio sociale connectée, la marche du progrès bégaye parfois,
et la radio « à l’ancienne » a encore de beaux jours devant elle. Il ne
faut en effet pas oublier cette dimension, encore très présente, de
l’écoute passive. Selon Edwige Roncière, ingénieure en traitement
d’antenne et test qualité audio à Radio France, "la radio du futur
n’abandonnera pas la radio du passé, elle l’inclura, car même à
l’heure de la radio connectée, augmentée, le transistor du peintre
est toujours le plus important". Cet idéal-type du transistor du
peintre pourrait être décliné en d’autres images : le poste de la
cuisine ou celui qui accompagne le ménage, l’autoradio du
conducteur…
Pour pouvoir faire évoluer cette dimension d’écoute passive, une
typologie et une analyse fine des différents environnements d’écoute
est nécessaire. Et l’on peut légitimement penser, avec Vincent
Castaignet, que "le poste de radio de la cuisine est aujourd’hui encore central. Mais qu’il sera, lui aussi,
inévitablement remplacé".
Entre persistance des modèles classiques, innovations technologiques et montée en puissance des dimensions
interactives et sociales, il semble que l’avenir des radios musicales sera multiple ou ne sera pas. Comme le
rappelle Xavier Filliol, directeur des Éditions de l’Octet et président de la commission musique du Geste,
"l’avenir de la radio ne passe pas par une voie unique, mais sera pluriel. Il ne faudrait pas envisager les
choses comme on a pu le faire avec Internet et se borner à l’opposition des modèles linéaire / personnalisé.
Les deux cohabiteront. Et l’auditeur choisira !".
L’édition 2012 du salon Le Radio a été une réussite. Initiative portée par Philippe Chapot, c’est une occasion
privilégiée pour tous les professionnels, les amateurs et les passionnés de radio d’échanger et de confronter
les points de vue, pour élaborer ensemble la radio de demain.
Romain Bigay
Interviews
La Caution, Arnaud Merlin et Bintou Simporé lauréats des Irmawards 2012
En partenariat avec le salon Le Radio, Les centres infos spécialisés de l’Irma ont remis les Irmawards,
récompensant les émissions de radio qui, sur l’année 2011, ont le plus fait pour la promotion du hip hop, du
jazz et des musiques du monde. Et les lauréats sont :
Catégorie musiques du monde : Bintou Simporé pour "Néo Géo" ;
Catégorie jazz : Arnaud Merlin pour son émission "Le Matin des musiciens jazz" ;
Catégorie hip hop : La Caution aka Hi-Tekk et Nikkfurie pour "Les Cautionneurs".
Rencontres avec ceux qui font la radio musicale.
>>>Lire les interviews
[1] Étude Sacem Les Français et la musique, janvier 2011 : http://www.sacem.fr/cms/home/la-sac…
(http://www.sacem.fr/cms/home/la-sacem/etudes/sondage-francaismusique;jsessionid=63D4A4BAAC6685634C5BE4441AD42118)
[2] In Lettre d’information de l’Adisq : http://www.irma.asso.fr/Quelle-est-…
[3] Cité in « Radio : La Programmation Musicale vue par Libération ! » http://pierrecaubel.typepad.com/pie…
(http://pierrecaubel.typepad.com/pierre_caubel_cratif_libr/2010/07/radio-la-programmation-musicale-vue-par-lib%C3
%A9ration.html)
[4] idem
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/Musique-dans-les-medias-France
Musique dans les médias : "France télévisions doit revoir sa copie"
Musique enregistrée /
mercredi, 9 octobre 2013 - mis à jour le mercredi 9 octobre 2013
Dans un communiqué daté du 9 octobre 2013, Tous pour la musique demande à France Télévisions de "rétablir
son engagement de diffuser un programme à caractère musical de 52 minutes à une heure de grande écoute et
afficher des objectifs clairs et précis quant à l’exposition de la musique sur ses écrans".
Communiqué de presse, mercredi 9 octobre 2013
"France Télévisions doit rétablir son engagement de diffuser un programme à caractère musical de 52 minutes
à une heure de grande écoute et afficher des objectifs clairs et précis quant à l’exposition de la musique sur
ses écrans. L’ensemble de la filière musicale réunie au sein de l’association « Tous pour la Musique » ne peut
que se féliciter de cette recommandation forte de Mme Martine Martinel, auteure du rapport d’information
sur le projet d’avenant au contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions. Lors de l’examen du
rapport par la Commission des Affaires Culturelles de l’Assemblée nationale, la rapporteure a souhaité que la
société rétablisse l’engagement qu’elle avait pris dans le COM initial de diffuser une émission à caractère
musical de 52 minutes à une heure de grande écoute mais que France Télévisions a retiré du projet
d’avenant ! Le CSA avait lui-même relevé la disparition de cet objectif.
L’association TPLM constate avec satisfaction que, après la suppression de deux émissions musicales, la
tentative de France Télévisions d’échapper à ses obligations en matière de diffusion musicale s’est heurtée à
la vigilance de la rapporteure. Mme Martinel relève avec pertinence que « nous aurions besoin de précisions
sur la volonté de France Télévisions de favoriser la musique actuelle et les nouveaux talents ».
Après la récente mise en place par la Ministre de la Culture Aurélie Filippetti d’une Mission consacrée à
l’exposition de la musique dans les médias confiée à Jean-Marc Bordes, l’ensemble des professions de la
musique (auteurs, compositeurs, artistes interprète, musiciens, éditeurs, producteurs, managers,
entrepreneurs de spectacles, disquaires et diffuseurs de musique) resteront attentives à ce que des émissions
à caractère musical et des rendez-vous réguliers figurent dans les programmes de médias audiovisuels,
premiers prescripteurs de musique auprès du public."
A propos de Tous pour la musique : L’association Tous pour la musique fédère toutes les professions de la
musique. Les membres qui la composent sont : ADAMI, CSDEM, MMFF, PRODISS, SACEM, SCPP, SDLC, SFA, SNAC,
SNAM, SNEP, SPPF, UNAC, UPFI, BUREAU EXPORT, CNV, FCM, FRANCOPHONIE DIFFUSION, IRMA.
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/Musique-dans-les-medias-Filippetti
Musique dans les médias : Filippetti missionne Jean-Marc Bordes
Media /
jeudi, 19 septembre 2013 - mis à jour le jeudi 19 septembre 2013
La ministre de la Culture et de la Communication Aurélie Filippetti a mis en place une mission de réflexion sur
l’exposition de la musique dans les médias. Celle-ci est confiée à Jean-Marc Bordes, ancien directeur général
adjoint de l’INA.
La place de la musique dans les médias est une question récurrente, mais qui avait pris un
tour nouveau avec les annonces successives de suppression d’une grande partie des
émissions musicales sur le service public. Les professionnels du secteur musical n’ont
d’ailleurs de cesse de rappeler leur mécontentement face à la réduction permanente des
temps d’antenne accordés à la musique. Pour réfléchir à cette question, Aurélie Filippetti
a confié à Jean-Marc Bordes, ancien directeur général adjoint de l’INA, une mission sur
l’exposition de la musique dans les médias.
Comme le précise le communiqué du ministère, Jean-Marc Bordes devra établir, « en s’appuyant sur une
consultation large des professionnels concernés, un état des lieux qualitatif et quantitatif de l’exposition
actuelle de la musique sur les différents médias, du secteur privé comme du service public ». Il est également
précisé que « des préconisations seront établies afin de conforter la place des médias en tant que
prescripteurs privilégiés dans le paysage musical français, qu’il s’agisse des éditeurs de services de
communication audiovisuelle traditionnels (télévision et radio) ou des éditeurs de services numériques
(services de médias audiovisuels à la demande, sites de vidéo et de musiques en ligne, etc.) ».
La mission conduite par Jean-Marc Bordes rendra ses conclusions en janvier 2014.
Imprimer : Tous pour la musique salue la mise en place ...
http://www.irma.asso.fr/spip.php?page=imprimir_arti...
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/Tous-pour-la-musique-salue-la-mise
Tous pour la musique salue la mise en place d’une mission sur
l’exposition de la musique dans les médias
Media /
jeudi, 19 septembre 2013 - mis à jour le jeudi 19 septembre 2013
Dans un communiqué, Tous pour la musique, qui fédère les acteurs de la filière musicale, se félicite de
l’initiative prise par la Ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, qui vient de confier à
Jean-Marc Bordes, une mission consacrée à l’exposition de la musique dans les médias.
Communiqué de presse :
MISSION MUSIQUE DANS LES MÉDIAS : LA FILIÈRE MUSICALE MOBILISÉE
jeudi 19 septembre 2013
L’ensemble de la filière musicale, rassemblée au sein de l’association « tous pour la musique », se félicite de
l’initiative prise par la Ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, qui vient de confier
à Jean-Marc Bordes, une Mission consacrée à l’exposition de la musique dans les médias.
La place de la musique dans les médias est un enjeu crucial qui mobilise les professionnels de la musique
depuis plusieurs années. La télévision et la radio restent les premiers prescripteurs de musique auprès du
public, y compris des jeunes : ces médias audiovisuels favorisent l’émergence de jeunes talents, le
renouvellement des titres diffusés et la préservation de la chanson française. L’ensemble des professions de
la musique (auteurs, compositeurs, artistes interprètes, musiciens, éditeurs, producteurs, managers,
entrepreneurs de spectacles, disquaires et diffuseurs de musique) participeront donc avec grand intérêt à la
conduite de cette mission, en y apportant leurs contributions.
A propos de « tous pour la musique » :
L’association « tous pour la musique » fédère toutes les professions de la musique. Les membres qui la
composent sont : ADAMI, CSDEM, MMFF, PRODISS, SACEM, SCPP, SDLC, SFA, SNAC, SNAM, SNEP, SPPF, UNAC,
UPFI, BUREAU EXPORT, CNV, FCM, FRANCOPHONIE DIFFUSION, IRMA.
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14/10/13 10:50
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/Accord-entre-Radio-France-et-les
Accord entre Radio France et les sociétés d’auteurs pour renforcer le
développement des nouveaux médias
Media /
mardi, 26 février 2013 - mis à jour le mardi 26 février 2013
Dans un communiqué, Radio France et les sociétés d’auteurs (ADAGP, SACD, SACEM, SCAM, et SDRM) annoncent
un accord sur la diffusion des œuvres musicales en multimédias, permettant une plus grande accessibilité aux
publics tout en favorisant une répartition équitable des rémunérations.
Communiqué :
Accord entre Radio France et les sociétés d’auteurs pour renforcer le développement des
nouveaux médias
Radio France et les sociétés d’auteurs (ADAGP, SACD, SACEM,
SCAM, et SDRM) se félicitent du nouvel accord média global
signé le 25 février 2013. Il permet à Radio France de poursuivre
le développement de son offre multimédia tout en assurant la
rémunération des auteurs et des créateurs, qui participent
grandement au dynamisme et à la créativité des radios
publiques.
Cet accord s’attache en effet à refondre les précédentes
conventions, signées depuis 2006, qui avaient permis de mettre
les émissions radiophoniques à la disposition du public, sur
l’ensemble des plateformes numériques de Radio France, par
écoute et visualisation à la demande ou en flux continu, ainsi que par téléchargement. L’accord du 25 février
2013 permet également de renforcer la présence des radios du groupe Radio France sur Internet en ouvrant la
voie à de nouvelles créations audiovisuelles et multimédia. En s’appuyant sur les possibilités offertes par
l’image et l’animation, la radio peut ainsi trouver de nouveaux développements : elle favorise l’écriture
spécifique à de nouveaux supports de diffusion et continue de chercher à toucher de nouveaux publics. Radio
France montre ainsi qu’elle considère le numérique comme l’un de ses territoires, qui entend servir de
support à la création radiophonique.
Partenaires de longue date, Radio France et les sociétés d’auteurs conçoivent cette collaboration renouvelée
comme un modèle d’innovation, qui doit permettre à la fois de favoriser une répartition équitable des
rémunérations et d’encourager la création dans le monde numérique.
Conclue jusqu’au 31 décembre 2016, cette nouvelle convention rappelle la volonté de Radio France et des
sociétés d’auteurs d’accompagner ensemble l’adaptation de la radio aux usages liés au numérique et à leurs
progrès constants. Elle démontre à nouveau que le droit d’auteur et sa gestion collective restent tout à fait
performants à l’heure de l’innovation numérique.
Les réactions à la signature de cet accord :
« Cet accord témoigne de la volonté de Radio France de déployer l’exercice de ses missions de
service public tout en restant le partenaire privilégié des créateurs, et d’offrir aux auditeurs
des contenus toujours plus variés, dans le strict respect du droit d’auteur. »
Jean-Luc Hees, Président-directeur général de Radio France
« L’ADAGP est très heureuse de cet accord global, qui permet aux auteurs de bénéficier
pleinement de la diffusion de leurs œuvres sur les plateformes numériques de Radio France,
dont l’offre est toujours plus riche et diversifiée. »
Marie-Anne Ferry-Fall, Directrice générale de l’ADAGP
« La SACD se félicite du partenariat fructueux noué depuis plusieurs années avec Radio France.
Ce nouvel accord va faciliter et renforcer l’accès du public aux œuvres radiophoniques tout en
garantissant une juste rémunération pour les auteurs. »
Pascal Rogard, Directeur général de la SACD
« Cet accord symbolise la volonté de la SACEM d’accompagner Radio France dans la diffusion
d’œuvres musicales sur ces médias incontournables pour la vitalité culturelle, dans le respect
des droits d’auteurs des créateurs et leur diversité. »
Jean-Noël Tronc, Directeur général de la SACEM
« La SCAM se réjouit de l’aboutissement de cette négociation qui marque une nouvelle fois la
pertinence de la gestion collective des droits à l’ère du numérique et conforte le rôle qu’elle
joue depuis sa création pour les milliers d’auteurs de Radio France qu’elle représente »
Hervé Rony, Directeur général de la SCAM
Irma : centre d’information et de ressources des musiques actuelles
http://www.irma.asso.fr/Les-investissements-publicitaires,10018
Les investissements publicitaires en baisse dans la musique
Musique enregistrée /
jeudi, 19 avril 2012 - mis à jour le jeudi 19 avril 2012
L’Observatoire de la musique, comme chaque année, vient de publier son Baromètre 2011 des investissements
publicitaires du secteur des éditions phonographiques en radio et télévision. Et la tendance est à la baisse :
-21,9%, pour un montant total de 166,07 millions d’euros.
L’Observatoire de la musique a publié son Baromètre des investissements
publicitaires du secteur des éditions phonographiques en radio et télévision,
réalisé à partir des données fournies par Yacast. Et la tendance est clairement à
la baisse. Au cours de l’année 2011, le secteur des éditions phonographiques a
concouru aux recettes publicitaires des médias (tv + radio) à hauteur de 166,07
M€, soit une baisse de -21,9% sur la période. Ce secteur représente 1,4%
(-0,5 pt par rapport à 2010) de l’ensemble des investissements publicitaires,
tous secteurs confondus (dont 3 626,30 M€ en radio et 8 194,93 M€ en TV).
Cette baisse conséquente affecte principalement les stations radio musicales et
thématiques (-15,7%). Skyrock, avec 21,2% de parts de marché, passe devant Radio classique (17,3% de parts
de marché ). Côté télés, les chaînes hertziennes, en baisse de -26,3 %, ont capté 80,9 % des investissements
publicitaires. La baisse est moins conséquente pour les chaînes du câble-satellite et de la TNT (-14,9 %, pour
19,1% des investissements). BFM TV est en tête, avec 3,8 % de parts de marché (+2,2 pts), devant W9 (3,6%).
731 spots publicitaires ont été recensés pou l’année 2011 (-112), pour 45 082 diffusions (-20 635).
Les investissements publicitaires du secteur des éditions phonographiques en radio et en TV sont à 74,7%
consacrés à la promotion des albums (-0,4 pt), ceux dédiées à la promotion des compilations, DVD et singles,
s’élèvent respectivement à 22,1% (+1,8 pt), 1,9% (-0,6 pt) et 1,3% (-0,8 pt).
La répartition des investissements publicitaires du secteur des éditions phonographiques dans les médias
(radio+TV) par annonceur :
Universal Music : 44% (+2,7 pts)
Warner Music : 16,7% (-4 pts)
Sony Music : 16,5% (-0,7 pts)
Indépendants : 12% (+0,5 pts)
EMI Music : 10,9% (+1,4 pts)
Télécharger la version intégrale du
Baromètre des investissements publicitaires du secteur des éditions phonographiques en
radio et télévision. (http://observatoire.cite-musique.fr/observatoire/)
« Médias » – Concertation territoriale Ville de Toulouse 2013
Bibliographie indicative
Études sur les médias
- Club Averroes, Média et diversité, Rapport, janvier 2010
www.irma.asso.fr/IMG/pdf/rapport_2010_averroes.pdf
-
Observatoire de la Musique, Baromètre des investissements publicitaires du secteur
des éditions phonographiques en radio et télévision, Rapport, 2012
observatoire.cite-musique.fr/observatoire/document/BIP_2012.pdf
-
Observatoire de la Musique, Évolution des investissements publicitaires du secteur des
éditions phonographiques en radio et télévision – Les chiffres clés de l'année 2010
vs.2005, Rapport, 2010
observatoire.cite-musique.fr/observatoire/document/BIP_2010_vs_2005.pdf
-
Observatoire de la Musique, Indicateurs de la diversité musicale dans le paysage
audiovisuel, Rapport, 2012
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