LES RéGImES FRaNçaIS ET BRITaNNIQuE DE

Transcription

LES RéGImES FRaNçaIS ET BRITaNNIQuE DE
Robert Delorme
Sylvain Lassarre
Coordinateurs
ue nous enseigne la comparaison
de l’insécurité routière en France
et en Grande-Bretagne pour l’action de
sécurité routière en France ?
Ce livre apporte une réponse concrète,
dans le prologement d'une étude antérieure parue dans les Collections de
l'INRETS, sur l’effet de miroir de la
comparaison internationale (Rapport
n° 261, 2005). Le groupe franco-britannique d’experts auteurs de cette recherche pluridisciplinaire ouvre une voie
nouvelle fondée sur un schéma interprétatif adapté à la complexité inhérente du
système de sécurité routière : le régime
de régulation du risque routier.
L’analyse quantitative du risque routier
met en évidence que l’écart entre les
deux pays s’est réduit de moitié depuis
2002 grâce à l’action sur les vitesses
pratiquées au moyen des radars automatiques. Le regard croisé français et
anglais sur les acteurs et les actions
nationales et locales en sécurité routière
révèle les cohérences propres à chaque
pays et la marge de progression substantielle dont dispose la France du côté
du management organisationnel de la
sécurité routière.
Synthèse n° 57
Décembre 2008
Les régimes français et
britannique de régulation
du risque routier
La vitesse d’abord.
Prix : 15,24 
ISSN 0769-0274
ISBN 978-2-85782-664-4
N°
57
T HÈSE
SYN
Synthèse INRETS n° 57
Robert Delorme, professeur à l'université de Versailles Saint-Quentin-enYvelines et au Centre pour la recherche économique et ses applications.
Sylvain Lassarre, directeur de recherche
à l’INRETS.
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Q
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Contact : [email protected]
Robert Delorme
Sylvain Lassarre
Coordinateurs
Les régimes français et
britannique de régulation
du risque routier
La vitesse d’abord.
Synthèse INRETS No 57
Décembre 2008
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Les coordinateurs
Robert Delorme, professeur à l’université de Versailles Saint-Quentin-enYvelines (SQY) et au Centre pour la recherche économique et ses applications
(CEPREMAP).
[email protected]
Sylvain Lassarre, directeur de recherche à l’INRETS.
[email protected]
L’unité de recherche
Groupe d’analyse du risque routier et de sa gouvernance (GARIG)
23 rue Alfred-Nobel
F-77420 Champs-sur-Marne, France
Tél. : +33 1 47 40 70 76 – Fax : +33 1 60 06 77 66
Les contributeurs
Amy Aeron-Thomas, conseillère à la recherche, RoadPeace, Londres
Richard E. Allsop, Centre for Transport Studies, University College, Londres
Jeremy Broughton, Transport Research Laboratory, Crowthorne
Laurent Carnis, chargé de recherche, INRETS
Didier Chabanet, chargé de recherche, INRETS
Brigitte Chaudhry, présidente fondatrice, RoadPeace
Hervé Chomienne, maître de conférences, université de Versailles SQY
Robert Delorme, professeur, université de Versailles SQY et CEPREMAP
Pierre-Alain Hoyau, ingénieur d’études, INRETS
Sylvain Lassarre, directeur de recherche, INRETS
Agnès Saudrais-Hough, conseillère, RoadPeace
Ken Spence, Transport Initiatives Limited Liability Partnership, Leeds
Stephen G. Stradling, Transport Research Institute, Napier University, Edinburgh.
Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS)
Direction scientifique / politique éditoriale – Aude Lauby
25 avenue François Mitterrand, Case 24, 69675 BRON CEDEX, France.
Tél. : +33 (0)4 72 14 26 46 – www.inrets.fr
© Les collections de l’INRETS
o
N ISSN 0769-0274 – No ISBN 978-2-85782-664-4
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présent ouvrage par quelque procédé que ce soit, sous réserve des exceptions légales.
Fiche bibliographique
UR (1er auteur)
Projet N°
Synthèse INRETS N° 57
GARIG
Titre
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Sous-titre
Langue
La vitesse d’abord.
Français et Anglais
Auteur(s)
Rattachement ext.
Robert Delorme, Sylvain Lassarre, coordinateurs
Coordonnées du co-financeur
N° contrat, conv.
Ministère de l'équipement, des Transports, du Logement,
du Tourisme et de la Mer
Direction de la Sécurité et de la Circulation routières
Arche Sud
92055 Paris-La Défense Cedex - France
CV 03000078
Date de publication
Décembre 2008
Remarques
Résumé
Le but de cette recherche est de contribuer à la connaissance pour l’action de sécurité routière
en France. Le projet est de structurer la manière dont des facteurs nombreux et hétérogènes
interagissent dans l’action de sécurité routière. La comparaison internationale offre une méthode
susceptible de révéler des aspects significatifs que le confinement à un pays ne permet pas de
déceler. L’objet de la recherche est ainsi de caractériser les régimes de régulation du risque
routier lié à la vitesse (R4V) français et britannique.
Deux résultats émergent. Le premier est la caractérisation de deux R4V nettement contrasté :
un R4V britannique « réparti » et un R4V français sous influence principale de « l’amont » politico-administratif. En second lieu, un groupe nettement discriminant de trois facteurs se dégage :
la professionnalisation des acteurs, l’intégration et l’évaluation de l’action de sécurité routière.
Ces facteurs sont interdépendants et se comportent comme un facteur d’ensemble, le « facteur
PIE ». L’action de sécurité routière en France dispose d’une marge significative d’amélioration et
de pérennisation du côté de ce facteur.
Mots clés
régime de régulation du risque routier vitesse (R4V), facteur PIE.
Nb de pages
Prix
Bibliographie
324
15,24 €
oui
Synthèse INRETS n° 57
3
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Publication data form
Projet N°
UR (1st author)
INRETS synthesis N° 57
GARIG
Title
The French and British road risk regulation regimes
Subtitle
Language
Speed first.
French, English
Author(s)
Affiliation
Robert Delorme, Sylvain Lassarre, editors
Sponsor, co-editor, name and address
Contract, conv. N°
Ministry of Equipment, Transport, Housing, Tourism and Sea
Road Safety Traffic Directorate
Arche Sud
92055 Paris-La Défense Cedex - France
CV 03000078
Publication date
December 2008
Notes
Summary
The aim of this research is to produce new knowledge for road safety action in France. Its purpose is to structure the way in which diversified and heterogeneous factors are at stake in road
safety action. The international comparison provides a method susceptible to help reveal relevant
features that might not be detected by limitating the inquiry to one country. The object of research
is therefore to identify the French and British speed road risk regulation regimes (SR4).
Two results stand out. First, two contrasted SR4s are characterised, a distributed British SR4
and a French SR4 mainly under a central government and administrative influence. Second, a
group of three factors appears especially significative. They are the professionalisation of the
actors, and the integration, and the evaluation of road safety action. They are interdependent and
behave as a global factor, the “PIE factor”. This factor provides a significant potential source of
improvement for road safety action in France.
Key words
Speed and road risk regulation regime (SR4), PIE Factor
Nb of pages
Price
Bibliography
324
15,24 €
yes
4
Synthèse INRETS n° 57
Table des matières
Remerciements
9
Synthèse
11
Introduction générale : Robert Delorme
15
Première partie : Les évolutions récentes : vitesse et risques 23
Introduction : Sylvain Lassarre
25
Chapitre 1. Evolution récente du risque routier en France et en
Grande-Bretagne : Sylvain Lassarre et Pierre-Alain Hoyau
1. Introduction
2. Le contexte du transport routier
3. Evolution de la mortalité routière
4. Evolution des vitesses des automobilistes sur le réseau français
5. Conclusion
Bibliographie
27
27
28
28
33
36
39
Chapitre 2. Casualty trends in Great Britain : Jeremy Broughton
1. Introduction
2. Overall trends
3. Number of deaths
4. Drink/Drive Accidents
5. The influence of speed
References
41
41
42
44
45
47
48
Chapitre 3. Analyses of British vehicle speed data : Jeremy Broughton 49
1. Introduction
49
2. Overall trends
50
3. Disaggregate analyses
51
4. More detailed analyses
76
Conclusions
80
Reference
81
Chapitre 4. Modélisation des vitesses pratiquées en rase campagne :
France et Grande-Bretagne : Pierre-Alain Hoyau et Sylvain Lassarre
1. Les données et les plans de sondage
2. Les modèles de régression
Conclusion
Synthèse INRETS n° 57
87
87
89
92
5
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Chapitre 5. Acceptability of radar and driver’s behaviour in France
and the UK : Steve Stradling
1. Introduction
2. Reasons to speed
3. Speeding behaviour
4. Attitudes to speed limits
5. Acceptability of speed cameras
6. Effects of speed cameras
7. Conclusion
References
Conclusion de la première partie par Sylvain Lassarre
93
93
93
97
101
101
102
106
106
109
Deuxième partie : Les contextes d’action. Les stratégies
et les acteurs
115
Introduction : Robert Delorme
117
Chapitre 6. Speed management in Great Britain and the use of safety
cameras : Richard E. Allsop
119
1. Review of speed policy
119
2. Strategy for safer speeds
121
3. Government structures for implementation
127
4. The use of safety cameras in Great Britain
130
5. Progress, problems and prospects
135
References
136
Chapitre 7. Road safety and speed management at a local authority
level in England : Ken Spence
1. Introduction
2. The context
3. Local transport plans
4. Annual progress reports
5. Road safety strategy
6. The Police
7. The Health Service
8. LTP and APR problems
9. English Regions Cycling Development Team (ERCDT)
10. Good practice
11. An example of best practice, the City of York speed management plan
Références
6
139
139
139
142
143
144
145
146
146
147
150
151
154
Synthèse INRETS n° 57
Table des matières
Chapitre 8. Le management local de la sécurité routière en France :
dispositifs, acteurs et outils. Le cas du contrôle de vitesse dans
deux départements : Hervé Chomienne
Résumé
1. Introduction
2. Genèse de la politique publique de sécurité routière en France :
de la réglementation à la coordination interministerielle
3. Développement d’une politique locale de sécurité routière en France :
mobiliser et coordonner les acteurs locaux
4. Acteurs et dispositifs de la politique locale de sécurité routière
en France : difficultés d’une articulation multiniveaux
5. La place du contrôle de vitesse dans le management local
de la sécurité routière
Conclusion
Bibliographie
Annexe 1
Annexe 2
155
155
155
157
158
163
171
179
180
183
189
Chapitre 9. Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en
Grande-Bretagne. Deux régimes de régulation des vitesses distincts ?
Laurent Carnis
201
1. Introduction
201
2. Le cadre théorique
202
3. Les modalités opérationnelles et managériales du système de contrôle
automatisé des vitesses en Grande-Bretagne
207
4. Les modalités opérationnelles et managériales du système de contrôle
automatisé des vitesses en France
216
Conclusion
228
Bibliographie
229
Chapitre 10. NGOs and the Speed Issue : RoadPeace case study : Amy Aeron Thomas, Agnès Saudrais-Hough and Brigitte Chaudhry
Abstract
1. Introduction
2. Roadpeace background
3. Roadpeace and speeding
4. Roadpeace partnership work
Summary
References
Synthèse INRETS n° 57
233
233
233
234
241
249
253
254
7
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Chapitre 11. L’influence de la Ligue contre la violence routière et
de RoadPeace dans l’action publique de sécurité routière en France
et en Grande-Bretagne : regards croisés en matière de régulation
de la vitesse : Didier Chabanet
Résumé
1. Introduction
2. Du deuil à l’action collective
3. La progressive mise à l’index de la vitesse comme facteur de risque
4. Remarques conclusives
257
257
258
259
266
275
Chapitre 12. Organisation et acteurs de la sécurité routière
en Grande-Bretagne. Les aspects saillants : Robert Delorme
1. Introduction
2. L’organisation administrative et territoriale
3. La sécurité routière
4. Conclusion
Références
Conclusion de la deuxième partie par Robert Delorme
281
281
281
286
294
295
297
Synthèse - DEUX RéGIMES DE RéGULATION CONTRASTéS ET
LE FACTEUR «PIE» par Robert Delorme
1. Introduction
2. Une approche nouvelle
3. Deux régimes de régulation contrastés
4. Un écart entre les contextes d’action des acteurs publics français et
britanniques
Références
8
301
303
304
310
317
322
Synthèse INRETS n° 57
Remerciements
Nous remercions l’ex-ministère de l’Equipement, des Transports, du Logement,
du Tourisme et de la Mer qui nous a donné les moyens de réaliser cette recherche dans le cadre du Predit 3.
Nos remerciements vont aussi à Marie-Claire de Franclieu, Thérèse Spector
et Claude Gilbert pour leurs encouragements ainsi qu’aux participants du groupe
GO3 « Nouvelles connaissances pour la sécurité routière » pour les discussions
qui nous ont permis de mieux formuler nos résultats et conclusions.
Nous remercions vivement Louisa Kahal de l’INRETS et Maryvonne Yvon du
CEPREMAP pour leur patient travail de mise en forme des chapitres du rapport.
Synthèse INRETS n° 57
9
Synthèse
Les auteurs. Une équipe pluridisciplinaire franco-britannique.
La recherche a réuni treize chercheurs et experts : six Français et sept
Britanniques de compétences variées : statisticiens spécialistes de sécurité des
transports, économistes, psychologue, politologue, animateurs d’association, sous
la responsabilité scientifique de R. Delorme, professeur à l’université de VersaillesSaint-Quentin-en-Yvelines, directeur de recherche associé au CEPREMAP (Centre
pour la recherche économique et ses applications), Paris. Les auteurs sont
A. Aeron-Thomas (RoadPeace, Londres), RE Allsop (University College, Londres),
J. Broughton (Transport Research Laboratory, Crowthorne), L. Carnis (INRETS),
D. Chabanet (INRETS), B. Chaudhry (RoadPeace), H. Chomienne (université
de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, R. Delorme, P-A Hoyau (INRETS),
S. Lassarre (INRETS), A. Saudrais-Hough (RoadPeace), K. Spence (Transport
Initiatives Ltd, Leeds), S.G. Stradling (Napier University, Edinburgh).
Le projet : produire de la connaissance pour l’action de sécurité routière
en France.
Le but de la recherche présentée dans ce rapport est de contribuer à la
connaissance pour l’action de sécurité routière en France. Le projet est de caractériser la manière dont des facteurs nombreux et hétérogènes, quantitatifs et qualitatifs, interagissent dans l’action de sécurité routière. La comparaison internationale offre un outil susceptible de révéler des aspects que le confinement à un
pays seul ne permet pas de déceler. Elle est aussi un moyen de faire apparaître
des cohérences nationales difficilement caractérisables autrement. L’objet de la
recherche est donc de caractériser les régimes de régulation du risque routier lié
à la vitesse (R4V) français et britannique.
La méthode : une démarche empirique, interactive et intégrative.
Les travaux ont été conduits sur la base de données statistiques, d’enquêtes, d’entretiens et de plusieurs missions en Grande-Bretagne et en France.
L’interactivité a été continue et scandée par des séminaires de travail de deux
jours à Paris, en novembre 2004 et septembre 2005. Les travaux recouvrent
dans une première partie l’étude des évolutions récentes (risques, comportements, attitudes et vitesses), l’étude des politiques et stratégies de gestion de
la vitesse dans une deuxième partie, enfin l’intégration des résultats dans une
synthèse générale.
Synthèse INRETS n° 57
11
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Les résultats : une marge de progression significative en France.
• Mortalité, vitesses et comportements en changements.
Un rattrapage français partiel se révèle avec netteté en suivant l’évolution du
risque routier après 2002. L’analyse des variations de vitesses conduit à mettre
en relief une interrogation sur leurs origines : s’agit-il plus d’un problème d’infrastructure que de conditions de trafic ? Enfin, l’étude fait ressortir des comportements modifiés des conducteurs des deux côtés de la Manche, en matière de
vitesse, mais des filets aux mailles différentes.
• Deux régimes de régulation du risque routier contrastés.
La régulation désigne les processus de réduction des fluctuations ou écarts
par rapport à une finalité (ici, diminuer l’écart par rapport à une cible de réduction
du nombre de tués). La gouvernance peut être prise au sens de l’ensemble des
manières suivant lesquelles acteurs et institutions publics et privés, gèrent leurs
affaires communes. La gouvernance dans un domaine particulier peut être partagée entre acteurs et institutions, les pouvoirs et capacités d’initiative ne reposant
pas d’une manière manifestement dominante sur un acteur ou une institution.
Elle peut aussi ne pas être partagée en ce sens et être sous la domination d’un
secteur particulier. Il s’agit évidemment d’une question de degrés. Nous suggérons de résumer les R4V en suivant cette voie et de caractériser le régime
britannique comme un régime à gouvernance répartie ou distribuée et le régime
français comme un régime à gouvernance sous influence dominante gouvernementale et administrative.
Une manière imagée est de situer les influences « amont » et « aval » dans
la régulation du risque routier. Dans la gouvernance répartie ou partagée, il n’y a
pas d’influence principale aval ou amont décelable ; les deux opèrent dans leurs
domaines respectifs avec des poids équivalents. Par définition, ceci n’est pas
vérifié dans la gouvernance sous influence principale de l’amont.
• Le facteur PIE, vecteur possible de progression en France.
L’importance des trois facteurs liés à la professionnalisation (P), l’intégration
(I) et l’évaluation (E) s’est imposée grâce à la comparaison internationale. De
surcroît, ils ne sont pas indépendants les uns des autres et composent une cohérence d’ensemble désignée par le « Facteur PIE ». Une cohérence basse peut
s’établir durablement puisque dans ce cas, aucun des trois termes n’exerce une
pression au rehaussement des deux autres. C’est l’opposé qui prévaut en cohérence haute. Une pratique soutenue et étendue d’évaluation exige une professionnalisation ayant des qualités similaires et un langage commun (indicateurs),
ainsi qu’une information suffisamment poussée et transparente, tous éléments de
décloisonnement et d’intégration.
Le niveau d’exigence de l’évaluation a une influence décisive sur les deux
autres facteurs en cohérence haute. Les trois facteurs composent ainsi une
circularité dynamique largement auto-entretenue soit par défaut d’impulsions en
12
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse
cohérence basse, soit grâce aux exigences impulsées par l’évaluation en cohérence haute.
Cette description est bien sûr simplifiée. Mais elle semble capter une différence essentielle entre la France et la Grande-Bretagne, restée semble-t-il indécelée jusqu’ici sous sa forme systémique. Les informations réunies dans cette
recherche permettent de comparer les FPIE britannique et français.
Dans l’évolution à la hausse éventuellement recherchée du FPIE, il convient
d’agir simultanément sur P, I et E, mais en faisant porter l’effort prioritairement sur
le facteur susceptible d’entraîner les deux autres. L’évaluation est ce facteur. Elle
oblige à plus de professionnalisation et contraint à plus d’intégration par l’information qu’elle exige. Faire sauter le verrou des résistances à une évaluation des
actions de sécurité routière émerge comme une tâche prioritaire dans la mise en
marche du processus. L’évaluation a trois vertus. Elle responsabilise, elle est un
vecteur d’intégration et elle appelle la professionnalisation. La complexité effective suggère fortement que l’évolution recherchée, qui devrait se développer en
univers inévitablement controversé et incertain, aurait d’autant plus de chances
d’aboutir qu’elle se ferait d’une manière interactive, intégrative et participative,
même si cela devait demander du temps et sans doute beaucoup d’énergie.
Synthèse INRETS n° 57
13
Introduction générale
Robert Delorme
L’objet et le contexte de la recherche
L’objet de ce livre est de contribuer à la connaissance pour l’action de sécurité routière en France. Ainsi que le titre l’indique, la méthode suivie repose sur
la comparaison internationale, avec la Grande-Bretagne, à propos d’un aspect
de l’insécurité routière, mais un aspect majeur, en l’occurrence, le risque lié à
la vitesse. Comment et sous quelles conditions la comparaison internationale
d’insécurité routière autorise-t-elle à tirer des enseignements pour l’action de
sécurité routière dans l’un des pays comparés ? C’est la question à laquelle ce
livre propose une réponse, sur un aspect particulier, la vitesse, en limitant la
comparaison à deux pays de niveaux de développement, de populations et de
volumes de trafic routier sensiblement similaires, mais de niveaux d’insécurité
routière durablement différents.
Si, selon l’adage, « comparaison n’est pas raison », alors rendre la comparaison raisonnée est une tâche prioritaire. Un cadre d’intelligibilité commun aux
pays comparés est requis. C’est par rapport à lui, et à leur place en son sein,
que des aspects locaux spécifiques, différents ou similaires d’un pays à l’autre,
peuvent être structurés et interprétés.
Dans le cadre sur lequel ce livre repose, l’insécurité routière est le produit
d’activités de circulation et d’actions de sécurité conduites les unes et les autres
par des acteurs dont les attitudes, les comportements et les actions dépendent
pour une large part de contextes d’action eux-mêmes plus ou moins immédiats
ou distants, étroits ou larges. La caractérisation de ces actions et contextes d’action est susceptible de faire apparaître des régularités définies dans le temps.
Lorsque ces régularités sont robustes, l’hypothèse s’impose selon laquelle elles
dénotent une cohérence au sein de leur propre contexte, sans laquelle elles ne
pourraient être durables. Nous proposons d’appeler ces régularités des régimes
d’action ou régimes de régulation dans le cas du risque routier, symbolisés par
R4 pour « régime de régulation du risque routier » et R4V pour régime de régulation du risque vitesse.
La recherche dont ce livre est le résultat aboutit à caractériser deux R4V français et britannique nettement distincts, au terme d’une analyse du risque vitesse
et de l’analyse des attitudes, des stratégies et de l’organisation des activités et
acteurs de la sécurité routière dans les deux pays. Il s’en dégage que chaque
R4V a sa cohérence et son effectivité propres. De surcroît, la comparaison ainsi
conduite fait émerger un jeu commun d’interdépendance auto-entretenue entre
Synthèse INRETS n° 57
15
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
les degrés de professionnalisation, d’intégration et d’évaluation de l’action de
sécurité routière au sein des R4V, mais à des niveaux différents dans les deux
pays. Nous appelons cette réalité robuste le « facteur PIE » ou FPIE (P pour
professionnalisation, I pour intégration et E pour évaluation). La comparaison
des FPIE français et britannique suggère fortement la présence d’une réserve de
progression significative pour l’action de sécurité routière en France.
Longtemps, l’insécurité routière, mesurée par le nombre de tués par milliard
de véhicules*kilomètres (véh*km), a fait de la France l’un des pays les plus en
retard en Europe dans ce domaine. Depuis 2003 cette réalité connaît un changement spectaculaire. L’insécurité routière en France se rapproche de nos jours
d’une moyenne européenne.
Comment ce retard a-t-il pu persister aussi longtemps ? Comment est-il en
train de se réduire depuis une date récente ? Peut-il continuer à se réduire ?
Ces questions sont vastes et il serait présomptueux de vouloir leur apporter des
réponses complètes. Le présent ouvrage les aborde sous l’angle limité, mais
sans doute plus maîtrisable, d’une comparaison avec la Grande-Bretagne, un
pays qui, en compagnie des pays scandinaves et des Pays-Bas, a constamment
obtenu les meilleurs résultats en Europe depuis plusieurs décennies.
Toutefois, la Grande-Bretagne se singularise comme terme de comparaison
avec la France en raison de la forte proximité, qui apparaît même troublante, des
évolutions longues d’insécurité routière entre les deux pays. L’intérêt pour les
recherches qui ont abouti aux résultats décrits dans ce livre est précisément né
au début des années 2000 d’une prise de conscience de cette réalité étonnante
ressortant de la comparaison des statistiques de tués par accidents de la route
dans ces deux pays, des années 1950 aux années 2000.
Partons de 1953, première année pour laquelle les informations statistiques
disponibles permettent la comparaison. Soulignons d’abord que l’insécurité routière d’aujourd’hui doit être mise en perspective d’évolution et ne pas faire oublier
d’où la situation actuelle vient. L’évolution longue montre un progrès constant de
la sécurité routière malgré un trafic croissant dans les deux pays. Le volume de
trafic routier global, en kilomètres parcourus, est passé en France de 46 milliards
à 555 milliards entre 1953 et 2006. En Grande-Bretagne, il est passé de 65 à
506 milliards dans cette même période. Il a donc été multiplié par un facteur 12
en France, 8 en Grande-Bretagne. Cette augmentation régulière constante ne
se retrouve pas dans l’évolution du nombre de tués par accidents de la route.
La Grande-Bretagne passe de 4 836 tués en 1953 à un maximum de près de
8000 en 1964–1966 et 1972, années suivies d’un recul quasi ininterrompu, pour
tomber à 3 172 en 2006. La France se caractérise dès l’année d’origine par un
effectif de tués nettement supérieur, de 7 668 en 1953, en croissance continue
jusqu’au pic de 1972 où il atteint 16 545, plus du double du chiffre britannique.
Ce sommet est suivi d’un recul quasi continu jusqu’au passage au-dessous de
la barre symbolique de 5 000 en 2006, avec 4 942 tués. L’année 1973 a donc
marqué un profond tournant dans les deux pays.
16
Synthèse INRETS n° 57
Introduction générale
Le nombre de tués par milliard de véhicules*km confirme cette évolution et
donne une indication plus précise de l’écart entre les deux pays. En France, il
diminue régulièrement, de 176,9 en 1953 à 66,7 en 1973 et 9,4 en 2006. En
Grande-Bretagne, pour les mêmes années, les chiffres sont respectivement 74,5,
31,7 et 6,3. Surtout, au-delà de cette tendance commune, un trait étonnant est
révélé par l’indicateur d’écart entre les deux pays mesuré par le rapport entre les
taux de tués par milliard de véhicules*km dans chaque pays. Ce rapport France/
Grande-Bretagne est resté sensiblement constant, à 2,1, entre 1953 et 2002. Il
s’abaisse à 1,5 en 2003, en une année, et reste constant à ce niveau jusqu’en
2006.
L’écart d’insécurité routière entre la France et la Grande-Bretagne a été
constamment de plus du double durant cinquante ans. Il a été réduit d’un quart
en 2003, l’année du début de l’installation des radars de contrôle automatisé de
la vitesse en France. Cet écart n’a pas varié après 2003, il est resté à 50 %.
Rapport des taux de tués par milliard de véhicules*km
France/Grande-Bretagne
A – Moyenne arithmétique annuelle
1953-1962
2,1
1963-1972
2,2
1973-1982
1,9
1983-1992
2,0
1993-2002
2,2
1953-2002
2,1
2003-2006
1,5
2005
1,58
2006
1,5
B – Années récentes
2000
2,11
2001
2,06
2002
1,96
2003
1,52
2004
1,53
L’indicateur d’écart et la persistance de la différence entre les deux pays
illustrent le défi posé à l’analyse. L’indicateur ne varie en fait significativement
qu’une fois en cinquante ans. Il semble donc exclu de le faire dépendre de facteurs aléatoires ou erratiques présents dans l’un ou l’autre pays, pour lesquels
il serait difficile de concevoir comment ils se seraient en quelque sorte compensés entre les deux pays et auraient produit la stabilité longue de cet indicateur.
Nous avions estimé dans une étude exploratoire (Delorme, Lassarre, 2005)
que le tiers de l’écart de tués entre la France et la Grande-Bretagne, avant le
changement français de 2002–2003, était attribuable à la vitesse. Dans quelle
mesure précise le rattrapage de la moitié de l’écart en 2003 peut-il être imputé
à l’abaissement des vitesses moyennes en France et à leur rapprochement des
vitesses britanniques ? L’écart persistant de 50 % peut-il être attribué à d’autres
facteurs de risque comme des vitesses encore supérieures en France, l’alcool
au volant, la drogue, le non-port de la ceinture de sécurité, la part des deux
roues motorisées, des 18–25 ans, des piétons, la structure du parc de véhicules,
ou encore l’infrastructure ? La recherche par attribution systématique de causalité à des facteurs individuels juxtaposés et additionnés qu’appelle la question
précédente buterait rapidement en comparaison internationale sur l’obstacle,
entre autres, des ressources considérables qu’elle exigerait (Delorme, Lassarre
Synthèse INRETS n° 57
17
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2005). Surtout, elle ne serait même pas exhaustive. En se concentrant sur la
quantification des risques, c’est-à-dire de résultats d’actions multiples, elle laisserait de côté les contextes d’action. Le contexte d’action est un fait ou phénomène relationnel. Il ne peut être significativement saisi que par différentiation par
rapport à d’autres contextes d’action, c’est-à-dire, au niveau national, que par la
comparaison internationale.
Notre analyse ne prétend pas à l’exhaustivité. Elle porte sur le risque vitesse,
sur les actions qui lui sont liées, sur les comportements des usagers, des acteurs
publics et des organisations non gouvernementales, et sur les contextes d’action
que sont les « R4V » : les « régimes de régulation du risque routier vitesse ».
Les termes utilisés de gouvernance, régulation, régime doivent être précisés
à ce stade. Le terme « gouvernance » désigne le concept de conduite de l’action
collective (au niveau d’un pays, d’un territoire, d’une entreprise, d’une association) non par un gouvernement, un centre, des autorités publiques ou privées
seuls, mais par composition de stratégies et d’actions d’acteurs multiples ayant
des intérêts différents. La gouvernance de l’insécurité routière fait ainsi intervenir
un ensemble d’institutions et d’acteurs qui n’appartiennent pas tous à la sphère
gouvernementale. Elle est synonyme d’action de sécurité routière. La régulation
désigne le ou les processus opérant concrètement en vue d’atteindre un but
dans un domaine donné, ici, la réduction de l’insécurité routière. La gouvernance
est régulatrice quand elle comporte une visée explicite de réduction de l’écart
par rapport à un but ou d’amélioration d’un indicateur. Enfin, un régime désigne
une régularité structurée d’action, ici, pour l’action de régulation, un régime de
régulation.
En somme, l’analyse de l’écart d’insécurité routière entre la France et la
Grande-Bretagne conduit à mettre en relief le risque vitesse en premier lieu. En
deuxième lieu, l’analyse de l’action sur le risque vitesse conduit à mettre en relief
des contextes d’action nationaux différents et durables, comme régimes de régulation. En troisième lieu, l’analyse des régimes de régulation conduit à mettre en
relief le « facteur professionnalisation, intégration, évaluation » ou FPIE à l’œuvre
en leur sein. L’organisation du livre suit cette progression en trois étapes.
Il en découle une démarche mêlant investigation empirique et modélisation
d’une manière interdisciplinaire, interactive et intégrative. Afin d’éviter les biais
éventuels d’une approche qui aurait pu être dominée par une vision principalement française, le groupe de recherche auteur de ce livre a été constitué pour
moitié d’experts britanniques reconnus. De là découle le caractère bilingue des
travaux que ce livre restitue.
Treize auteurs britanniques et français de disciplines et d’expertises très diverses (statisticiens, économistes, psychologues, politologues, responsables d’organisation non gouvernementale, professionnels de la sécurité routière) ont travaillé
sur les secteurs correspondant aux treize chapitres qui suivent. Les travaux ont
pris appui sur les données statistiques, sur des enquêtes spécifiques, sur des
entretiens et plusieurs missions en Grande-Bretagne et en France. L’interactivité
a été continue et concrétisée par des séminaires de travail à Paris.
18
Synthèse INRETS n° 57
Introduction générale
Les résultats résumés
Ce livre comprend deux parties, la première sur les évolutions récentes du
risque vitesse, la seconde sur les contextes, stratégies et acteurs, et une synthèse.
Les chapitres 3 à 5 constituent la première partie sur les évolutions récentes
de la vitesse, leur modélisation, l’évolution du risque routier et celle des comportements des conducteurs. Jeremy Broughton montre dans le chapitre 3 que
les vitesses pratiquées en Grande-Bretagne ont peu changé depuis 2000 sur la
plupart des routes, sauf sur celles à vitesse limitée à 30 mph. Dans leur chapitre sur les vitesses en rase campagne, Pierre-Alain Hoyau et Sylvain Lassarre
modélisent la vitesse moyenne pratiquée de jour, en tenant compte des profils
de débit afin de comparer les vitesses après correction de l’effet de congestion
des réseaux. L’hypothèse d’un effet de la congestion sur la vitesse moyenne est
confirmée pour le réseau britannique des autoroutes de liaison. La modélisation
pour les autres réseaux reste à faire. Dans le chapitre 2, J. Broughton fait ressortir une évolution différenciée de la mortalité selon les usagers. S. Lassarre et
P.-A. Hoyau contrastent dans le chapitre précédent l’accélération de la baisse
des tués en France pour tous les usagers et réseaux à la stagnation en 2000 à
2003 en Grande-Bretagne. En France, l’évolution des comportements de vitesse
des conducteurs semble avoir été le facteur majeur de décroissance du risque, alors qu’en Grande-Bretagne l’évolution des vitesses joue un rôle mineur.
L’acceptabilité des radars et le comportement des conducteurs font l’objet du
chapitre 5, par Steve Stradling. Il en ressort qu’en France, les radars sont placés
nettement plus sur les réseaux en rase campagne et périurbains qu’en GrandeBretagne où ils se situent principalement en milieu urbain. D’un pays à l’autre,
des types différents de trajets sont donc susceptibles d’être contrôlés. Sept
conducteurs sur dix approuvent le système dans les deux pays.
La deuxième partie porte sur les contextes, stratégies et acteurs de gestion de
la vitesse. Elle comprend les chapitres 6 à 12. Dans le chapitre 6 sur le management de la vitesse et l’expérience des radars automatisés en Grande-Bretagne,
Richard Allsop part de la stratégie politique de sécurité routière et de la stratégie
de recherche de vitesse plus sure. Il procède à une description précise des rôles
du gouvernement central, du « gouvernement local » et de la police à propos,
notamment, des partenariats et du contrôle sanction automatisé. Ken Spence,
dans le chapitre suivant, s’adresse au rôle des autorités locales et donne un point
de vue de praticien fondé sur sa propre expérience de road safety officer et sur
son rôle dans un programme de développement de la circulation cycliste, ainsi
qu’au sein du plan de gestion de la vitesse de la ville de York.
Dans le chapitre 8 sur l’organisation et les acteurs de la sécurité routière
en Grande-Bretagne, Robert Delorme met en relief quatre aspects. Le premier
concerne la dynamique des relations entre niveaux local et central. Le niveau
central vient historiquement en complément du niveau local, à l’opposé du cas
français décrit dans le chapitre 9. En second lieu, la notion française de « politique locale de sécurité routière » n’est pas transposable telle quelle à la Grande-
Synthèse INRETS n° 57
19
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Bretagne, laquelle connaît d’abord des stratégies locales de sécurité routière. Un
troisième trait est ce qu’on peut appeler la densité de l’activité de sécurité routière
et sa diffusion dans la société. Il existe enfin plusieurs dispositifs qui marquent
d’une manière forte l’activité britannique de sécurité routière : les plans locaux
de transport, l’intégration contrainte qu’ils entraînent, l’attention à l’évaluation, la
place de la professionnalisation et des road safety officers.
Hervé Chomienne est l’auteur du chapitre 9 sur le management local de la
sécurité routière en France. Il s’appuie sur une enquête menée dans deux départements. Il décrit les efforts de mobilisation et de coordination des acteurs locaux
et souligne les difficultés d’une articulation à plusieurs niveaux. Alors qu’il semble
rigide, le dispositif français apparaît en fait assez souple. Il dépend fortement de
l’action du préfet et de sa volonté de coordonner et d’impliquer les parties prenantes. Dans le chapitre suivant, Laurent Carnis compare les modalités du système
de contrôle automatisé des vitesses dans les deux pays. Le dispositif a débuté
en 1991 en Angleterre. Sept mille radars étaient installés en Grande-Bretagne
en 2003. En France, les premières installations se firent en novembre 2003.
L’objectif est de deux mille radars à la fin de 2007. La comparaison des modalités d’organisation, de décision et de choix d’implantation, de communication et
d’information conduisent L. Carnis à caractériser deux modes de management
fortement distincts, marqués par ce qu’il appelle un « polycentrisme organisationnel » en Grande-Bretagne et une gestion « techno centrée » en France.
Les chapitres 11 et 12 portent sur le rôle des organisations non gouvernementales et diffèrent nettement l’un de l’autre dans leur construction. Le chapitre 11 est un témoignage sur l’association RoadPeace par sa fondatrice Brigitte
Chaudry et deux responsables actives dans l’animation, Amy Aeron-Thomas et
Agnès Saudrais-Hough. Le ton est fermement revendicatif dans la volonté de
défendre le point de vue des victimes. L’idée de sécurité routière est même critiquée au nom d’un objectif plus large de réduction du danger routier : la première
resterait trop limitée à la seule réduction des accidents, le second incluant la
prévention des accidents, la qualité de la vie et la protection de l’environnement.
Didier Chabanet, dans le chapitre 12, propose une comparaison plus distanciée
de l’influence de RoadPeace et de la Ligue contre la violence routière sur l’action publique de sécurité routière en Grande-Bretagne et en France. Il met en
évidence deux registres d’action, l’un de lobbying axé sur la sphère de décision,
l’autre de reconnaissance de la victime. Selon son analyse, la LCVR se distinguerait par son rôle de proposition et une distance moindre à l’égard des lieux de
décision politique, alors que RoadPeace serait plus orientée sur le soutien aux
victimes et à une plus grande distance des lieux décisionnels.
Deux résultats transversaux de cette recherche émergent dans le chapitre
final de synthèse de Robert Delorme, par-delà la moisson d’enseignements qui
vient d’être relatée. Il s’agit en premier lieu de la caractérisation de deux régimes de régulation du risque routier nettement contrastés, un R4V britannique
« réparti » ou « distribué » et un R4V français sous influence principale politicoadministrative. En second lieu, se dégage un groupe de trois caractéristiques
discriminant nettement entre la France et la Grande-Bretagne, portant sur la
20
Synthèse INRETS n° 57
Introduction générale
professionnalisation des acteurs et sur l’intégration et l’évaluation de l’action de
sécurité routière. Ces caractéristiques sont liées par une interdépendance autoentretenue qui les fait opérer comme un facteur unifié, le Facteur PIE, mais avec
une intensité plus faible en France qu’en Grande-Bretagne. Cela suggère que
l’action de sécurité routière en France dispose manifestement d’une réserve de
progression du côté de ce facteur.
Synthèse INRETS n° 57
21
Première partie
Les évolutions récentes :
vitesse et risques
Synthèse INRETS n° 57
23
Introduction
Sylvain Lassarre
L’objectif de cette première partie est de présenter un état des connaissances
sur les tendances du risque routier en Grande-Bretagne (G-B) et en France et
sur le rôle que jouent les vitesses pratiquées dans l’évolution récente du risque
routier. Les limitations de vitesse font partie des premières mesures à caractère
national prises par les gouvernements en 1967 en G-B et en 1973 en France.
L’accroissement de la fréquence et de la gravité des accidents en fonction de
la vitesse pratiquée est bien établie scientifiquement, spécialement d’après des
modèles sur des données agrégées issues des expérimentations des années
soixante et soixante dix dans le monde (Cohen et al., 1998). Si un consensus
s’est fait, surtout après la première crise de l’énergie, sur la nécessité de limiter
les vitesses sur tous les réseaux en fonction de leurs caractéristiques, des variations dans les limites de vitesse imposées s’observent entre des pays comme
la France et la G-B. La limitation de vitesse est quasiment identique en milieu
urbain 30 mph et 50 km/h, légèrement supérieure en G-B sur les routes nationales 60 mph contre 90 km/h, identique sur les 2 × 2 voies, et nettement inférieure
sur autoroute ; en G-B 70 mph contre 130 km/h en France.
L’interrogation principale de cette première partie porte sur les raisons du
rattrapage par la France de la G-B dans les années 2003 et 2004 en matière
de sécurité routière. Les taux de décroissance du taux de tués par milliard de
véhicules*kilomètre sont quasiment parallèles depuis les années 1950. Une cassure apparaît en 2003 avec un décrochement pour la France qui la rapproche de
la G-B.
Figure 1 : taux de tués par milliard de véhicules*kilomètre
en France et en G-B (échelle logarithmique)
Synthèse INRETS n° 57
25
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Quelle part de réduction de cet écart entre l’évolution des taux de tués par
véhicules*kilomètre, qui persistait depuis 50 ans, peut être attribuable aux modifications de comportement vitesse des conducteurs, suite principalement à l’introduction du système de contrôle sanction automatisé dans ces deux pays ?
Avant de répondre à cette question, J. Broughton (Chapitre 3) présente le
système d’observation des vitesses par compteur de trafic automatisé couvrant
neuf catégories de réseau en Grande-Bretagne. Il analyse les vitesses moyennes
et les dépassements des limites de vitesse en fonction de la période horaire,
de la saison entre 2003 et 2004. S. Lassarre et P.-A. Hoyau (Chapitre 4) évalue
la possibilité de développer un modèle conjoint explicatif des paramètres clés
des distributions de vitesse des automobilistes à partir des échantillons de données issus des deux systèmes d’observation britannique et français, qui diffèrent
techniquement. Le système français repose sur des mesures par radar par des
enquêteurs postés au bord des routes sur six catégories de réseau. Une telle
modélisation situerait mieux les limites d’utilisation des statistiques produites par
ces deux systèmes en tenant compte des caractéristiques de la route et du trafic.
J. Broughton (Chapitre 2) donne le point de vue officiel sur l’évolution des tendances du nombre de tués et de victimes en G-B d’après les modèles estimés par
le TRL pour le département de transport afin que le gouvernement puisse fixer
des objectifs réalistes et suivre les progrès des actions engagées. S. Lassarre et
P.-A. Hoyau (Chapitre 1) produisent une analyse comparative de l’évolution des
tendances des taux de tués par véhicules*kilomètre en fonction de l’évolution des
vitesses moyennes sur la période 2000–2004 à l’aide d’un modèle de risque attribuable fondé sur la relation princeps du taux de tués sur un réseau fonction de la
puissance quatrième1 de la vitesse moyenne sur ce réseau.
En plus de cette analyse quantitative de nature épidémiologique sur l’évolution de risque générée par celle des vitesses, on cherche à saisir l’attitude que
les conducteurs, principalement des automobilistes, adoptent vis-à-vis des limitations de vitesse ainsi que leur opinion à propos des contrôles de vitesse par
caméra. Quel est le degré de respect déclaré des limitations de vitesse dans la
population ? Quel est le degré d’acceptabilité du système de contrôle automatisé
des vitesses ? S. Stradling (Chapitre 5) étudie l’effet dissuasif des caméras sur le
comportement vitesse des conducteurs écossais en tenant compte de la variabilité de comportement en fonction du sexe, de l’âge et de la catégorie de réseau et
du degré d’acceptabilité du système des speed cameras.
À la fin de cette première parie, le lecteur pourra juger de la réalité des évolutions récentes du risque routier à l’aune des systèmes d’information respectifs de
chaque pays sur les accidents, les victimes, les vitesses, les opinions des automobilistes et des modèles disponibles dans les deux pays.
Bibliographie
S. Cohen, H. Duval, S. Lassarre, J.-P. Orfeuil. Limitations de vitesse – Les décisions
publiques et leurs effets. Hermès, Paris, 1998.
1 Voir
l’encadré du chapitre 1 pour l’origine de cette relation entre taux de tués et vitesse moyenne sur
un réseau et la référence bibliographique Cohen et al. 1998.
26
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 1
Évolution récente du risque routier
en France et en Grande-Bretagne
Sylvain Lassarre et Pierre-Alain Hoyau
1. Introduction
La comparaison des performances de la sécurité routière entre pays demande
un patient travail d’exploitation et d’homogénéisation des statistiques officielles.
Faire la part les différences démographiques, sociales, culturelles, comportementales, géographiques, météorologiques, etc. est une autre tâche tout aussi ardue.
Néanmoins, il est possible de tracer l’évolution du risque routier sur les deux pays
à l’aide d’indicateurs de risque tels que le taux de mortalité et le taux de tués par
véhicules*kilomètre. L’exploitation des données statistiques sur les accidents et
les blessés est plus délicate compte tenu des variations dans les modes de recueil
des forces de police entre les deux pays. Il devient alors possible de comparer
les niveaux de risque eux-mêmes ainsi que leur évolution pour les tués alors qu’il
faudra se limiter à l’analyse de l’évolution pour les statistiques sur les accidents.
Les bilans des années 2003 et 2004 de la sécurité routière en France ont
été remarquables. La France est le pays qui affiche la plus forte baisse de mortalité sur les routes en Europe. Jamais, depuis trente ans, on n’avait enregistré
une baisse si prononcée du nombre d’accidents et du nombre de victimes. La
France, qui a été classée pendant assez longtemps parmi les mauvais élèves
de l’Europe, commence à rattraper le retard et se trouve maintenant en position
médiane et concrétise ainsi la réalisation de l’objectif ambitieux de la Commission
européenne de réduire de moitié le nombre de tués sur les routes d’ici 2010.
Quant à la Grande-Bretagne, elle garde toujours sa position parmi les pays les
plus sécuritaires sur la route en Europe, et même dans le monde.
Dans ce chapitre, sont présentées les dernières statistiques sur l’exposition
au risque et le risque par type d’usagers et de réseau avec une analyse conjoncturelle des évolutions récentes qu’on cherchera à corréler avec l’évolution des
vitesses sur les réseaux des deux pays.
Synthèse INRETS n° 57
27
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2. Le contexte du transport routier
L’étude du rapport entre population — territorialité et mobilité — réseau est un
préalable indispensable. La France, 2,4 fois plus grande que la Grande-Bretagne
en superficie, compte presque le même nombre d’habitants. Cela joue alors sur
la densité qui est 2,3 fois plus importante en G-B. Le réseau routier est 2,5 fois
plus long en France mais, par contre, les parcs automobiles et les kilométrages
parcourus dans les deux pays sont assez comparables. Par ailleurs, s’agissant
de congestion, les routes du Royaume-Uni se classent au niveau 15 de l’Union
européenne des 15, sur une échelle classant les pays du moins au plus congestionné, tandis que la France ne se situe qu’au sixième niveau2, montrant donc une
circulation beaucoup plus dense en Grande-Bretagne qu’en France.
Tableau 1 : données de base sur la population, le réseau routier,
le parc de véhicules et le kilométrage parcouru
2004
Superficie (km²)
Population
Densité (hab./km²)
Longueur du réseau routier (km)*
dont :
- autoroutes
- routes nationales
- autres
Parc automobile
dont :
- deux-roues motorisés
- véhicules légers
- poids lourds
- autobus
Kilométrage (milliards véh.*km)
France
551 695
60,2
109,1
998 001
10 379
26 127
961 495
Grande-Bretagne
231 298
59,8
258,5
395 797
3 476
50 109
342 212
38 499 000
31 207 000
2 460 000
29 900 000
6 057 000
82 000
559,9
1 154 000
26 279 000
3 073 000
96 000
498,6
3. Évolution de la mortalité routière
L’écart entre les deux pays se comble ces dernières années. Au départ, on était
à 8 079 tués sur les routes de France3 contre 3 409 en G-B en 2000. Suite à la forte
tendance à la baisse en France, contre une stagnation avec une légère inflexion à
la hausse en G-B, en France, en 2004, le nombre de tués à 30 jours est de 5 530
et 3 221 en G-B. La baisse est de 46 % en France, nettement plus marquée à partir
de 2002 et de 5,5 % en G-B gagnée seulement entre 2003 et 2004.
Si les efforts persistent et continuent à porter leurs fruits de cette façon en
France, ce qui est le questionnement majeur de cette recherche, la France peut
2 Philippe
Mathis, Étude prospective de la DATAR, La France en Europe : quelle ambition pour la
politique des transports.
3 En France, jusqu’à l’année de passage à la norme commune est considéré comme victime de la
route l’accidenté qui meurt dans les six jours qui suivent l’accident. Pour pouvoir comparer, on multiplie
le nombre de morts à six jours en France par l’indice 1,057.
28
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
se placer dans le peloton de tête des bons élèves de l’Europe en matière de
sécurité routière.
Figure 1 : évolution du nombre de tués
Figure 2 : évolution du taux de tués par milliard de kilomètres parcourus
Une rupture de niveau plutôt qu’une accentuation à la baisse de la tendance
se manifeste en 2002 en France sur le taux de tués par véhicules*kilomètre qui
demande à être testé par un modèle de risque (Lassarre, 1999). Après une décroissance exponentielle régulière en G-B, une accélération est en cours en 2004. On
est passé de 2000 à 2004 d’un taux de 15,4 à 9,9 en France, 36 % de réduction,
et d’un taux de 7,3 à 6,5 en G-B, une réduction de 11 %. Rappelons que jusqu’en
2000, les pentes de réduction annuelle du taux depuis 1990 étaient quasi identiques entre les deux pays : de 4,8 % en France et de 5,2 % en G-B (Lassarre,
2005). Par rapport à cette décroissance de tendance longue de 20 % en quatre
ans, le ralentissement est net en G-B ainsi que l’accélération en France.
Un modèle structurel de long terme permet d’estimer plus précisément les
phénomènes évolutifs récents (Lassarre, 2001). Sur le long terme, le nombre de
tués en France décroît de 6,7 % par an à trafic constant. En 2003, le niveau du
Synthèse INRETS n° 57
29
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
nombre de tués a baissé de 17 %, comme il avait baissé en 1973 de 14 % sous
l’effet d’une réduction des vitesses pratiquées. En G-B, la baisse à long terme est
de 5,9 % par an à trafic constant, mais depuis 1999, elle n’est plus que de 2,4 %.
Sur la période 2000–2004, la France engrange toujours les effets de la baisse
à long terme réduite en partie par la hausse de la mobilité et en plus l’effet de
changement de politique en matière de répression avec l’introduction du contrôle
sanction automatisé. En G-B, la tendance à la baisse est fortement ralentie et
suffit tout juste à compenser la hausse du trafic dans la période.
Tableau 2 : modèles structurels pour la France et la G-B
(mt est le niveau aléatoire et bt la pente déterministe)
France
G-B
3.1. Par catégorie d’usagers
En utilisant la répartition du kilométrage des véhicules motorisés par catégories et en mettant à part les usagers vulnérables (piéton, cycliste), cavaliers,
et autres usagers tels que voiturettes et tracteurs agricoles, on peut fournir une
estimation du risque « interne » propre au mode de transport.
Tableau 3 : taux de tués par usagers motorisés de la route
(par 10 milliards de véhicules*kilomètre)
Moto
Cyclo
Voitures
Bus
Poidslourds
VUL
Tous
motorisés
134,1
223
–
157,1
4,4
13,1
3,3
8,4
1,9
3,7
1,3
1,0
5,1
12,4
107,7
–
4,2
3,8
1,6
1,0
4,8
2000
G-B
France
2004
G-B
France
8,4
8,5
3,1
0,7
8,5
Remarque : les chiffres 2004 sont provisoires pour la France dans l’attente des calculs plus détaillés
du SES pour les comptes transport de la Nation.
Le trafic des cyclos est négligeable en Grande-Bretagne, mais commence à
croître (15 tués en 2000, 25 en 2004).
Le risque pour les motocyclistes (comme conducteur uniquement) est en
baisse en Grande-Bretagne et celui des conducteurs de véhicules légers est stable. Par contre, les deux risques sont à la baisse en France.
30
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
Tableau 4 : taux de conducteurs d’automobiles et de motos tués
par 10 milliards de kilomètres parcourus
Conducteurs véhicules
Motocyclistes
2000
G-B
France
2004
2,9
9,2
127
205,6
G-B
France
2,8
102,5
Remarque : pour la France, nous sommes dans l’attente des calculs plus détaillés du SES pour les
comptes transport de la Nation.
Pour les piétons et les cyclistes, en rapportant le nombre de tués au kilométrage des véhicules motorisés, on peut suivre le risque « externe » généré par le
trafic motorisé sur les usagers vulnérables.
Tableau 5 : taux de tués par usagers vulnérables
par 10 milliards de kilomètres parcourus
Vélos
Piétons et autres
G-B
France
2004
0,3
0,5
1,8
1,6
G-B
France
0,3
0,3
1,3
1,0
2000
Les usagers vulnérables bénéficient de la baisse du risque en France de 38 %
pour les piétons. En G-B, la baisse n’est que de 28 %. Elle est néanmoins nettement supérieure à l’évolution du risque des automobilistes. Les piétons étant une
des cibles privilégiées du plan à 10 ans en G-B, peut-on attribuer cette baisse à
l’installation des radars principalement en milieu urbain ?
3.2. Par catégorie de réseaux
La catégorisation des réseaux n’est pas la même entre la France et la GrandeBretagne. Pour cette recherche, on doit identifier un découpage en relation avec
les limites de vitesse imposées sur ces réseaux à partir du découpage administratif retenu par les deux pays. On considère trois niveaux de catégorisation : un premier découpage en trois classes larges : autoroutes (motorways), voirie de rase
campagne (non built up), voiries urbaines (built up) sachant que les Britanniques
attribuent le caractère urbain en fonction de la limite de vitesse sur le réseau qui
doit être inférieure ou égale à 40 mph (70 km/h), alors que les Français déterminent le caractère urbain par l’appartenance des sections du réseau à une agglomération. De plus, les autoroutes françaises ont deux régimes de limitation de
Synthèse INRETS n° 57
31
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
vitesse : 130 km/h sur les autoroutes dites de liaison et 110 km/h sur les autoroutes de dégagement. Les deux définitions se rejoignent, car les sections du réseau
français en milieu urbain sont limitées en majorité à 50 km/h (30 mph) et jusqu’à
70 km/h. Les autoroutes dites urbaines limitées entre 80 et 110 km/h se retrouvent dans la catégorie « autoroutes ». Le deuxième découpage décompose le
réseau de rase campagne et du milieu urbain en deux sous-catégories : le réseau
des routes nationales (A road) et le réseau des routes départementales (minor
roads = B- and C- class and unclassified). Le troisième découpage fait intervenir
les limites de vitesses en distinguant sur les autoroutes les sections limités à
110 km/h de celles limitées à 130 km/h, sur le réseau principal de rase campagne
les 2 × 2 voies limitées à 100 km/h (70 mph) et en milieu urbain les réseaux selon
leur limitations de vitesse à 40 mph (70 km/h) et inférieures ou égales à 30 mph
(50 km/h).
Tableau 6 : catégorisation des réseaux
Catégories de réseau
Limitations de vitesse
Autoroutes
130 kmh
110 kmh/70 mph
Rase campagne
Milieu urbain
National/A
2 × 2 voies/dual
110 kmh/70 mph
2 voies/single
90 kmh/60 mph
Départemental/Minor
90 kmh/60 mph
National/A
70 kmh/40 mph
< = 50 kmh/< = 30 mph
Départemental/Minor
70/40 mph
< = 50/< = 30 mph
Le problème pour estimer les taux de tués est la répartition du kilométrage en
France entre les routes départementales de rase campagne et la voirie urbaine.
En effet, nous connaissons la circulation sur les autoroutes et les routes nationales de rase campagne ainsi que la circulation totale. Nous avons deux sources
d’information pour départager entre le milieu urbain et le réseau secondaire de
rase campagne. Une estimation du kilométrage parcouru sur les routes départementales en 1984 de 145,9 milliards de kilomètres et une estimation du pourcentage de kilométrage parcouru par les automobilistes en milieu urbain en 1999
(panel SOFRES) de 31,4 %. En attribuant un taux de croissance du trafic sur RD
légèrement inférieur à celui des RN entre 1984 et 2000, on arrive à un estimateur
de 191,7 milliards de kilomètres sur RD et par différence 136,8 en milieu urbain.
Avec l’autre source, on obtient 165,1 milliards de kilomètres en milieu urbain et
par différence 163,4 milliards de kilomètres sur les RD. Nous proposons de prendre la moyenne des deux estimations pour ne pas privilégier une source.
La hiérarchie des risques du moins risqué au plus risqué s’étale des autoroutes à la rase campagne avec au milieu la rase campagne. Les gains ont été
plus forts sur autoroutes en France et moins forts en Grande-Bretagne en milieu
32
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
urbain. Le risque relatif entre routes nationales et autoroutes est identique et de
5 pour les deux pays. Les risques relatifs urbain/rase campagne se rapprochent
0,79 pour la G-B et 0,74 pour la France.
Tableau 7 : taux de tués par catégorie de réseau en France et
en Grande-Bretagne par milliard de véhicules*kilomètre
Autoroutes
Rase campagne
Milieu urbain
Total
2000
G-B
France
2004
2,0
5,0
10,2
19,7
7,2
15,0
7,3
15,4
G-B
France
1,7
2,6
8,5
13,1
6,7
9,7
6,5
9,9
Tableau 8 : pourcentage d’évolution du taux de tués selon les réseaux
entre 2000 et 2004 en France et Grande-Bretagne
Autoroutes
Rase campagne
Milieu urbain
Total
G-B
15,0 %
16,9 %
7,2 %
11,5 %
France
47,7 %
33,3 %
35,2 %
35,7 %
4. Évolution des vitesses des automobilistes sur
le réseau français
La source de l’information sur les vitesses pratiquées est le sondage sur route
ONISR/ISL mis au point par l’ex-ONSER. Les relevés vitesse se font par radar au
bord des routes ou sur les ponts selon un plan de sondage équilibré entre les jours
et les heures en revenant à intervalle de quatre mois au même site d’observation.
On se limite à l’analyse des vitesses de jour (de 9 à 17 h) et des automobilistes.
On estime la part du trafic de jour à 75 % du trafic total et la part des automobiles
dans la circulation à 72 %.
4.1. En rase campagne
La baisse des vitesses moyennes des automobilistes de jour se manifeste en
2003, alors que l’installation des premiers radars date d’octobre 2003 et va en
s’accentuant en 2004.
Le pourcentage de dépassement de la vitesse limite + 10 km/h commence à
décroître en 2002 pour le réseau des routes nationales et départementales et en
2003 seulement pour le réseau des autoroutes et des routes nationales à 2 × 2
voies. Par contre, la baisse des vitesses et des pourcentages de dépassement se
stabilise en 2004 pour les RN et les RD et s’accentue pour les autoroutes et les
RN à 2 × 2 voies.
Synthèse INRETS n° 57
33
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 3 : vitesse moyenne des automobilistes de jour en rase campagne
et sur autoroute de liaison
Figure 4 : pourcentage du dépassement de la vitesse limite + 10 km/h
des automobilistes de jour en rase campagne et sur autoroute de liaison
4.2. En milieu urbain
La baisse des vitesses est immédiate dès 2003 en milieu urbain à l’exception des
autoroutes de dégagement où il faut attendre 2004. Une baisse précoce se fait sentir
en 2002 sur les RN en traversée d’agglomérations de moins de 5 000 habitants.
Figure 5 : vitesse moyenne des automobilistes de jour en milieu urbain
selon la catégorie d’infrastructure
34
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
Figure 6 : pourcentage du dépassement de la vitesse limite + 10 km/h des
automobilistes de jour en milieu urbain selon la catégorie d’infrastructure
En conclusion, les baisses sont très marquées sur les vitesses hautes, de
l’ordre de 40 à 50 %, et très hautes (de l’ordre de 67 % sur les vitesses supérieurs
à 150 km/h), quelles que soit les catégories de réseau et de limitation de vitesse.
La baisse est marquée en 2003 sur tous les réseaux avec une anticipation (à
confirmer par modélisation) sur les RN et les RD de rase campagne. La baisse
se poursuit seulement sur le réseau urbain et sur les autoroutes de liaison. Une
confirmation de cette baisse est apportée par le panel Secodip qui mesure la
consommation unitaire des véhicules particuliers essence et diesel avec des baisses qui vont en augmentant (–1,8 % en 2003, –0,9 % en 2002, –0,3 % en 2001),
du fait de la diésélisation accrue du parc bien sûr mais aussi en raison du respect
toujours plus strict des vitesses limites.
4.3. Évolution comparée des vitesses des automobilistes
France et en Grande-Bretagne
L’écart de vitesse demeure sur autoroute et sur RN. L’écart s’inverse sur RN
2 × 2 voies et en milieu urbain avec des vitesses hautes en moindre pourcentage
sur le réseau français.
Synthèse INRETS n° 57
35
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Tableau 9 : vitesse moyenne et pourcentage de dépassement
de la vitesse limite des automobilistes
G-B (jour et nuit)
2000
France (jour)
Moyenne Moyenne Pour cent Pour cent Moyenne Pour cent Pour cent
(mph)
(km/h)
> limit >lim + 10 (km/h)
> limit >lim + 10
Autoroute de liaison
GB : 70 mph
F : 130 km/h
RN 2×2
GB : 70 mph
F : 110 km/h
RN
GB : 60 mph
F : 90 km/h
Artères urbaines
GB : 30 mph
F : 50 km/h
Autoroute de liaison
GB : 70 mph
F : 130 km/h
RN 2×2
GB : 70 mph
F : 110 km/h
RN
GB : 60 mph
F : 90 km/h
Artères urbaines
GB : 30 mph
F : 50 km/h
Source : DTLR, ONISR.
70
112,6
55 %
17 %
127
52 %
32 %
70
112,6
52 %
13 %
112
56 %
35 %
45
72,4
9 %
2 %
89
52 %
28 %
32
51,5
66 %
32 %
52
54 %
25 %
71
114,2
56 %
19 %
121
32 %
13 %
69
111
48 %
14 %
104
42 %
20 %
48
77,2
10 %
2 %
84
37 %
17 %
31
50
53 %
22 %
49
45 %
14 %
Tableau 10 : évolution 2000–2004 de la vitesse moyenne et du pourcentage
de dépassement de la vitesse limite des automobilistes
Autoroute de liaison
RN 2 × 2
RN
Artères urbaines
Vitesse
moyenne
1,4 %
–1,4 %
6,6 %
–2,9 %
G-B
Pourcentage > limite
1,8 %
–7,7 %
11,1 %
–19,7 %
Vitesse
moyenne
–4,7 %
–7,1 %
–5,6 %
–5,8 %
France
Pourcentage > limite
–38,5 %
–25,0 %
–28,8 %
–16,7 %
5. Conclusion
La baisse du taux de tués par véhicules*kilomètre s’est fortement accélérée
en France à partir de 2003 pour tous les usagers, pour tous les réseaux avec une
mention spéciale pour les autoroutes. Grâce à un modèle structurel, on chiffre à
17 % la baisse du nombre de tués à trafic constant à partir de 2003. La tendance à
la baisse de long terme n’a pas été affectée et poursuit son chemin. Par contre, la
36
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
réduction des vitesses induite par l’introduction des radars automatiques génère
un impact sur le niveau du risque et non sur sa tendance comme en 1973 suite
aux limitations de vitesse. En G-B, le taux de tués a stagné de 2000 à 2003, il
n’est reparti à la baisse qu’en 2004. La baisse est plus forte sur autoroute et rase
campagne qu’en milieu urbain et touche plutôt les piétons.
La part des tués attribuée à la baisse des vitesses est de 20,6 % en appliquant
le pourcentage des tués aux trois parts attribuables du risque de chaque catégorie de réseau.
soit
Cette estimation est comparable bien que plus faible à l’estimation de la baisse
du risque en 2003 estimée à 17 % par le modèle. Sur la baisse générale entre
2000 et 2004 de 46 %, la part attribuée de la baisse à la vitesse est de 45 %.
L’origine des 55 autre pour cent est à chercher du côté de la tendance à long
terme du risque qui compte pour environ 52 % de la baisse ( = 24/46) à trafic
constant et sur d’autres facteurs comme le port de ceinture à l’arrière, l’alcool au
volant. La décroissance du risque à partir de 2003 peut être mise entièrement sur
le compte de l’évolution des comportements de vitesse des conducteurs entraînée par l’introduction du système de contrôle automatique et par la hausse des
prix du carburant plus marquée en 2004 gazole : +11,4 % (+2,7 % en 2003),
essence : +4,3 % (+0,2 % en 2003) (source : ministère de l’Industrie).
La baisse du risque en G-B est due au plan à dix ans de mesures de sécurité.
L’évolution des vitesses ne joue aucun rôle dans l’évolution et la part attribuable
sur le réseau urbain limitée à moins de 50 km/h est même égale à 11 % de tués en
plus en suivant le même calcul que pour la France. La moindre baisse du risque
sur le réseau urbain questionne la baisse importante constatée pour les piétons
et demande des analyses plus poussées.
Synthèse INRETS n° 57
37
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Tableau 11 : l’impact de l’exposition au risque
Comment mesurer l’impact potentiel d’un changement d’exposition à un facteur de risque ? On a besoin de trois ingrédients : une relation dose–effet qui
établit un lien entre la probabilité d’un effet sur la santé et l’intensité d’exposition
au facteur de risque, une distribution de l’exposition au risque de la population
au facteur de risque et une distribution d’exposition au risque de référence, dite
contrefactuelle. Par exemple, le taux de tués dans les accidents de la route
dépend de la puissance quatrième de la vitesse moyenne pratiquée sur le
réseau, la distribution des vitesses pratiquées par les usagers sur le réseau
fournit l’exposition au risque, la distribution de référence peut être telle que tous
les usagers respectent les limitations de vitesse. Traditionnellement, on transforme la relation dose–effet en une fonction du risque relatif qui est égal au ratio
de la probabilité d’un effet sur la santé pour les personnes exposés à un certain
niveau par la probabilité d’un effet pour une exposition à un niveau de référence
du facteur de risque. Si la relation dose–effet en matière de vitesse s’écrit :
avec τ le taux de tué et la vitesse moyenne, le risque relatif pris avec comme
référence la vitesse de 90 km/h égal à :
dépend toujours de la puissance quatrième de la vitesse moyenne. Si on
roule en moyenne à 100 km/h, le risque relatif est égal à 1,52.
Le coefficient de la fonction puissance entre vitesse moyenne et taux d’accident croit avec la sévérité de l’accident. Il est égal à 1 pour les accidents
matériels, 2 pour les accidents corporels et 4 pour les accidents mortels. Cette
relation a été vérifiée empiriquement à partir des expériences sur les limitations
de vitesse dans le monde. On peut l’expliquer par le fait que la probabilité de
collision est proportionnelle à la vitesse. Si lorsque la collision se produit, le risque de blessure est proportionnel à la vitesse, alors, le taux d’accident corporel
est proportionnel au carré de la vitesse. Si enfin la probabilité d’une blessure
mortelle est proportionnelle à l’énergie dissipée (qui est proportionnelle au carré
de la vitesse), alors le taux d’accident mortel est proportionnel à la puissance
quatrième de la vitesse.
Pour mesurer l’impact d’un changement d’exposition au risque, on utilise la
fraction d’impact, avec un découpage en n classes du facteur de risque, qui est
égal à :
38
Synthèse INRETS n° 57
Évolution récente du risque routier en France et en Grande-Bretagne
avec p’ les proportions d’exposition au risque avant et p’’ après le changement ; avec rr les risques relatifs des différents classes du facteur de risque
rapporté, une classe de référence indexée par 0 (rr0 = 1). Il est égal au différentiel de risque, engendré par le passage d’une distribution d’exposition d’avant à
après le changement, rapporté au risque avant.
Supposons un risque dichotomique à deux classes, par exemple une circulation à 100 km/h et une circulation à 90 km/h, que la classe de référence soit
celle à 90 km /h, que le changement fasse passer toute la population d’une
classe à l’autre
, après le changement, plus personne n’est
exposé à une vitesse de 100 km/h, alors,
La baisse de la vitesse moyenne de 100 à 90 km/h réduit le nombre de personnes tuées de 34 %.
Voir le chapitre 2 “Defining and assessing risks to health in the World” Health
Report 2002. http ://www.who.int/whr/2002/en/.
Bibliographie
S. Lassarre. Analysis of progress in road safety in ten European countries,
Accident Analysis and Prevention, 33 : 743–751, 2001.
S. Lassarre. Facts about road risk in France and Great-Britain. In : R. Delorme,
S. Lassarre. L’insécurité routière en France dans le miroir de la comparaison
internationale. La comparaison entre la France et la Grande-Bretagne.
Rapport de recherche INRETS, no 261, Arcueil, 2005.
Synthèse INRETS n° 57
39
Chapitre 2
Casualty trends in Great Britain
Jeremy Broughton
1. Introduction
In March 2000, the Government announced a new national casualty reduction
target:
“By 2010 we want to achieve, compared with the average for 1994–1998:
•• 40% reduction in the number of people killed or seriously injured in road
accidents;
•• 50% reduction in the number of children killed or seriously injured; and
•• 10% reduction in the slight casualty rate, expressed as the number of people slightly injured per 100 million vehicle kilometres.”
An additional target was subsequently announced for 2005, to reduce casualties in deprived areas of England more rapidly than in England as a whole; the
baseline is the annual average for 1999–2001.
A key element in preparing the new target was to forecast the number of casualties in 2010, taking account of any factors that might influence this number
substantially. These forecasts made use of data up to 1998, and have been
described fully by Broughton et al. (2000). In 2000, TRL was commissioned by the
Department for Transport (DfT) to monitor progress towards the new target. TRL
Report 643 (Broughton and Buckle, 2005) provides an account of progress up to
2003 and describes the casualty trends and what they suggest for the likelihood
of achieving each of the targets. It updates the original analyses with data from
1999–2003 to re-assess the conclusions that were drawn about future casualty
trends, and summarises the results of other investigations that have been carried
out. This account of casualty trends in Great Britain is based on TRL Report 643,
updated to include 2004 data.
Synthèse INRETS n° 57
41
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2. Overall trends
The main road user groups used for monitoring are:
–– car occupants (drivers and passengers);
–– motorcyclists (riders and passengers of all powered two-wheelers);
–– pedal cyclists;
–– pedestrians;
–– others (a relatively small and heterogenous group including people travelling by bus, coach, van or lorry).
Table 1 shows the casualty totals in 2002–2004 for these groups, while the
percentages show changes relative to 1994–1998 baseline. Figure 1 presents
the annual number of fatal casualties, relative to the 1994–1998 baseline. The
number rose for motorcyclists until 2003, then fell sharply in 2004. There were
gradual increases from 1998 for car occupants and others, and reductions for
pedal cyclists and pedestrians. Overall, there was a slight increase from 1998,
followed by an 8% reduction in 2004.
Table 1: casualty totals in 2002–2004
Killed
Baseline 2002
Car
occupants
1,762
Serious casualties
2003
2004 Baseline
1,747 1,769 1671
2002
2003
All casualties
2004
Baseline
2002
2003
2004
2,1492
16,981 15,522 14,473 203,288 197,425 188,342 183,858
Motorcyclists
467
609
693
585
6,008
6,891
6,959
6,063
24,023
28,353
Pedal
cyclists
186
130
114
134
3,546
2,320
2,297
2,174
24,385
17,107 17,033 16,648
1,008
775
774
671
10,662
7,856
7,159
6,807
46,543
38,784 36,405 34,881
Others
155
170
158
160
2,370
1,928
1,770
1,613
21,689
20,936 20,416 19,812
All road
users
3,578
44,078
3,5976 33,707 31,130 319,928 302,605 290,607 280,840
Children
(0–15)
260
179
171
166
6,600
4,417
3,929
3,739
Car
occupants
–1%
0%
–5%
–21%
–28%
–33%
–3%
–7%
–10%
Motorcyclists
30%
48%
25%
15%
16%
1%
18%
18%
7%
Pedal
cyclists
–30% –39% –28%
–35%
–35%
–39%
–30%
–30%
–32%
Pedestrians
–23% –23% –33%
–26%
–33%
–36%
–17%
–22%
–25%
Others
10%
2%
–19%
–25%
–32%
–3%
–6%
–9%
All road
users
–4%
–2% –10%
–18%
–24%
–29%
–5%
–9%
–12%
Children
(0–15)
–31% –34% –36%
–33%
–40%
–43%
–22%
–28%
–30%
Pedestrians
42
3,431 3,508 3,221
3%
44,353
28,411
25,641
34,689 31,988 31,000
Synthèse INRETS n° 57
Casualty trends in Great Britain
Figure 1: fatal casualties, by road user group
Figure 2: fatal and serious casualties, by road user group
Figure 2 presents the annual number of fatal and serious casualties, and
includes an extra line: ‘target’ represents the annual number required to achieve
the 40% reduction target in 2010 in equal steps. Whilst the total lay above this line
in 2001 and 2002, by 2004 it was clearly below.
The ‘target’ line gives a simple indication of progress towards the target. In
order to provide a fuller assessment of the likelihood of achieving the target, TRL
Synthèse INRETS n° 57
43
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
643 applies a version of the forecasting model described in TRL 382 to predict the
number of casualties in 2010 if no significant new road safety measures were to
be introduced. Based on the data to 2003, it appeared that new measures capable
of reducing the number of casualties by over 5% would be needed to be confident
of reaching the target. The casualty reductions in 2004, especially among motorcyclists, mean that it now appears that the first target can be reached without
introducing new measures.
Forecasts of the number of child casualties in 2010 are prepared using the
original approach, but with a slight modification to allow for the fluctuating number
of children in the population from year to year. If the recent trend continues, the
second target for the number of children KSI should be surpassed by 2010 even
if no significant new measures are introduced.
The third of the targets was achieved in 2002, i.e. eight years early, and the
reduction achieved in 2004 was twice the target figure. The extent to which a
reduction in the level of reporting slight injury accidents to and by the police
may have contributed to this reduction, rather than a genuine improvement in
road safety, is the subject of a separate study of the level of reporting road
accidents.
Good progress was made towards the fourth of the targets in 2004, and it
appears that this target may well be achieved by 2005 in most respects.
3. Number of deaths
The fatal and serious casualty trends began to diverge in the mid-1990s: the
annual number of deaths has fallen more slowly since then, and indeed rose
in 2001 and 2003. Consequently, the number of deaths rose as a proportion of
KSI from 7.3% in 1994 to 9.4% in 2003. This substantial increase in the overall
‘severity proportion’ is probably genuine, rather than an artefact caused by any
reduction in the reporting of serious accidents to and by the police. The number
of fatal and of serious casualties fell by 8% in 2004, so the severity proportion did
not change in 2004.
There is no explicit target for reducing deaths, but their failure to decrease prior
to 2004 is a worrying development that has been analysed in detail. The fact that
the severity proportion rose fairly steadily between 1994 and 2003 is significant
as it shows that the main cause or causes for the slower reduction of the fatality
rate must have acted progressively, rather than over a year or two. It has risen
faster for car occupants than for other road user groups, and 2002 was the first
year when this was the group with the highest severity proportion. If the recent
trend in deaths were to persist and no new measures were to be introduced, the
number of deaths in 2010 would be about 18% less than the 1994–1998 average.
New measures focussed on improved car occupant and motorcyclist safety would
need to reduce the overall number of deaths by more than a quarter to achieve a
40% fatality reduction.
44
Synthèse INRETS n° 57
Casualty trends in Great Britain
Analyses of car accident data suggest that declining driving standards may
have contributed to the increased severity proportion for car occupants. The
Contributory Factor data collected by 12 police forces that use a TRL reporting
system show that the proportion of car accidents that were attributed to loss of
control increased significantly between 1999 and 2004. The proportion of accidents for which careless–thoughtless–reckless behaviour and aggressive driving
were identified as contributory factors also tended to increase, although the incidence of some factors fell slightly in 2004.
These indications were confirmed by analyses of more objective accident data.
The proportion of fatal and serious car occupant casualties who were injured in
accidents at bends or when their car left the carriageway and hit an object continued to rise in 2004: both types of accident are associated with loss of control,
often the result of reckless behaviour. On the other hand, although the proportion of casualties injured in Hit and Run accidents on urban roads rose markedly
between 1998 and 2003, it fell in 2004.
Detailed analyses of the reduction in deaths in 2004 show that the greatest
contribution came from the reversal of the previous rising motorcyclist fatality
trend. The reductions occurred principally among men aged 40–59, in June and
August, on rural A-roads. The analyses suggest that the fine summer of 2003
may have led to an increase in high-risk ‘sports’ motorcycling in that year which
gave rise to an exceptional number of dead motorcyclists; the return of more
typical summer weather in 2004 helped to restore this number to a more typical
value.
The previous rising trend for deaths among car occupants was also reversed in
2004; the reduction occurred particularly on minor rural roads, in medium saloons
and among 20–29 year old men. Broughton and Buckle (2005) had linked the
rising trend until 2003 to declining driving standards. The 2004 data provide few
indications of any improvement in driving standards, so it would probably be premature to predict that the reduction in 2004 marked the beginning of a sustained
downward trend for car occupant deaths.
4. Drink/Drive Accidents
Another factor that has contributed to the increase in deaths is the increase
in drink/drive accidents, as shown by official estimates that are summarised in
Figure 3. Results are presented for the three accident severities, with 100 representing the 1994–1998 baseline average in each case. The trends were similar for
fatal and serious accidents until 2002, since when fatal drink/drive accidents have
increased while serious have reduced. The slight accident trend appears to have
turned up rather earlier and risen rather farther, but fell from 2003. Broughton
(2005) presents more detailed results, and concludes that for car occupants “the
estimated number of drink/drive fatalities increased by 54 between 1999 and
2002, about 80% of the overall fatality increase over this period”.
Synthèse INRETS n° 57
45
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 3: estimated number of drink/drive accidents
The provisional casualty estimates for 2004 imply that 18.3% of deaths and
7.5% of serious casualties in 2004 occurred in drink/drive accidents. Similar proportions were last seen in the late 1980s, after which they fell: the lowest proportion occurred for deaths (13.4%) in 1998/1999 and for serious casualties (5.9%)
in 1993.
These official estimates make use of STATS19 data that record breath tests
carried out after accidents. Screening breath tests are another source of information about the level of drink/driving; moreover, the level of testing is indicative
of the extent to which the police enforce the drink/drive law. Home Office publications show the annual number of tests administered by each police force in
England and Wales and the number that were positive (including cases where
drivers failed to provide samples of breath). These can be expressed as a rate
per 1,000 population to allow for variations in police force size. It is interesting
to compare indications about the trends in drink/driving based on the results of
breath tests carried out following accidents with data from screening breath tests
— which are carried out in general traffic.
Figure 4 presents the annual data, and shows that the number of screening
tests fell by 38% between 1997 and 2003. Although the number of drivers who
failed tests fell from 1997, it rose from 2000 and was higher in 2003 than in 1997.
In each year there was a range of almost 10:1 between the highest and lowest
testing rates of individual forces. To put the 534,300 screening tests carried out
in 2003 into context, this total represents about 1 test per 55 drivers in that year.
The decline in the number of screening tests at a time when the level of drink/
drive accidents has risen reflects the reduced priority of traffic policing in Great
Britain.
46
Synthèse INRETS n° 57
Casualty trends in Great Britain
Figure 4: screening breath test data
5. The influence of speed
Analyses of speed survey data show that the speeds chosen by British car
drivers have scarcely changed since 1996, except on roads with a 30 mph speed
limit. The proportion of drivers exceeding the limit on these roads fell after 1998,
from 70 to 53%; the proportion exceeding the limit by more than 5 mph fell from
32% in 2001 to 22% in 2004.
Figures 5 and 6 show the numbers of casualties and of car occupant casualties by road type since 1999. The road types are those used to present results
from the speed survey: Motorways, NBU4 dual carriageways, NBU single carriageways, roads with a 40 mph limit, roads with a 30 mph limit. Data are restricted
to accidents that occurred at least 20 metres from any junction, where free-flow
speeds are likely to have a greater influence on risk.
There are few indications in these figures that casualty trends have been more
favourable on 30 mph roads than on others where the speed choice distribution
does not appear to have changed. Indeed, the trend for car occupant deaths in
Figure 4 has been less favourable on 30 mph roads than on other roads. Other factors have doubtless caused this, but the evidence presented does not demonstrate
that changing speed choice has contributed to recent British casualty trends.
Figure 5: number of road users killed and KSI, by road type
4 NBU
roads have speed limits exceeding 40 mph but exclude motorways.
Synthèse INRETS n° 57
47
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 6: number of car occupants killed and KSI, by road type
References
J. Broughton and G. Buckle. Monitoring progress towards the 2010 casualty
reduction target. TRL Report 643. Wokingham: TRL Limited, 2005.
J. Broughton. Car Occupant and Motorcyclist Deaths, 1994–2002. TRL Report
629. Wokingham: TRL Limited, 2005.
J. Broughton, R.E. Allsop, D.A. Lynam and C.M. McMahon. The numerical context
for setting national casualty reduction targets. TRL Report 382: TRL
Limited, Crowthorne, 2000.
48
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 3
Analyses of British vehicle speed data
Jeremy Broughton
1. Introduction
For over a decade, the British Department for Transport (DfT) has monitored
traffic speeds at about 180 sites throughout Great Britain using automatic traffic
counters. These are generally situated away from junctions, hills or sharp bends,
at locations where traffic is likely to be free flowing. Thus, in principle, they provide
information on the speeds at which drivers choose to travel when their behaviour
is not constrained by congestion or other road conditions. Any sites affected by
long-term road works are excluded. Of course, incidents or congested conditions
may arise at any site, and when this happens it will reduce speeds below those in
free flowing conditions. This is not believed to have a significant effect on the overall results. Results are published in annual bulletins, see for example DfT (2004).
Appendix A is reproduced from the latest bulletin to give more technical details.
The counters run continuously throughout the year, so produce huge volumes
of data: about 677 million vehicle records in 2003. TRL has been supplied with
samples of data as part of the project ‘French and British Road Risk Regulation
Regimes (R4s): Speed First’, and this paper presents a range of results. The traffic
counters recognise 21 vehicle types, and the disaggregate data supplied to TRL
contain this classification. At the workshop in November 2004, however, it was
decided to focus on cars, so only results relating to car speeds will be presented.
The DfT data storage system was changed in January 2003, so it has only
been feasible to extract disaggregate speed data from then onwards. Full details
were supplied for each vehicle observed on the following 6 Tuesdays:
18 February 2003
17 February 2004
17 June 2003
15 June 2004
21 October 2003
19 October 2004
The binary files were processed and the speed analyses are presented in
Section 3. Results from statistical models are presented in Section 4, while Section
5 brings together the principal conclusions.
Synthèse INRETS n° 57
49
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Appendix B lists the national speed limits in Great Britain, i.e. the limits that
apply unless speed limit signs indicate that a lower limit applies in a particular
area. Appendix C includes photographs of several of the speed survey sites.
2. Overall trends
As it was not possible to extract disaggregate data prior to 2003, it is useful
to begin with a summary of trends from data published in the bulletins. Table 1
shows that the speed distributions on the various road types were broadly stable throughout the period. From 2002, all records were processed to produce
the summary statistics shown, whereas previously only a sample of records was
analysed, and this accounts for the sharp increase in the number of observations
reported from that year.
Table 1: details of car speeds observed, by year
Sites with speed limit > 40 mph
Motorways
Sites
Observations (all vehicle
types, millions)
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
25
26
26
26
26
26
27
27
27
104
535
466
561
60.8 65.4 72.4 80.1 54.7
Average car speed (mph)
70
70
69
70
70
70
70
71
71
Percent exceeding speed
limit
57
54
55
56
55
54
54
57
56
19
19
17
18
18
20
19
7
7
7
Percent exceeding speed
limit by more than 10 mph
Dual
Sites
Carriageways
Observations (all vehicle
types, millions)
5
5
4
4
4
4
9.4
7.8
8.4
8.9
6.9
9.2
Average car speed (mph)
69
70
70
70
70
70
69
69
69
Percent exceeding speed
limit
49
53
54
53
52
51
46
50
48
14
14
13
13
14
15
14
28
28
28
Percent exceeding speed
limit by more than 10 mph
Single
Sites
Carriageways
Observations (all vehicle
types, millions)
50
38.9 48.1 56.9
23
24
24
24
24
24
10.5
9.8
9.8
12.8
8.3
14
Average car speed (mph)
47
46
46
47
45
45
47
48
48
Percent exceeding speed
limit
Percent exceeding speed
limit by more than 10 mph
10
9
10
10
9
9
8
9
10
2
2
2
2
1
2
2
46.1 54.1 59.7
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Sites with speed limit > 40 mph
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
8
8
8
8
8
8
10
10
10
1.1
1.1
1.1
0.9
0.8
1.0
Average car speed (mph)
36
36
36
36
37
36
37
36
36
Percent exceeding speed
limit
25
27
26
26
25
25
27
27
27
8
8
7
8
10
10
10
26
26
26
Speed
Sites
limit = 40 mph
Observations (all vehicle
types, millions)
Percent exceeding speed
limit by more than 5 mph
Speed
Sites
limit = 30 mph
Observations (all vehicle
types, millions)
44.7 48.8 70.1
30
30
30
30
30
30
2.0
2.1
2.1
2.2
1.9
2.2
Average car speed (mph)
33
33
33
32
32
32
31
31
31
Percent exceeding speed
limit
72
70
70
69
66
65
59
58
53
33
31
31
32
25
25
22
Percent exceeding speed
limit by more than 5 mph
61.7 60.1 77.1
3. Disaggregate analyses
The original binary file records, for each vehicle detected during each hour of
the specific day, its type and speed. With this wealth of information, it is necessary
to design the analyses with respect to the project objectives. The records were
processed to show, for the cars (not towing trailers) detected at each site in each
hour, the mean speed and the proportion that were:
••
••
••
••
••
not exceeding the speed limit;
were exceeding the limit by up to 10 mph;
were exceeding limit by up to 20 mph;
were exceeding limit by up to 30 mph;
were exceeding limit by over 30 mph.
The data were compiled in an Excel spreadsheet so that the hours and sites
could be grouped flexibly, and statistics for the 6 days compared. Note that,
although the automatic traffic counters record speed in kilometres per hour, they
have been converted to miles per hour.
There is some confusion in the DfT speed bulletins about the use of the term
site. For example, the latest bulletin refers to 27 motorway sites surveyed in 2004
and about 180 sites in total. The files supplied to TRL include the variable ‘site’, and
dual carriageway ‘sites’ are generally paired. Table 3 shows the number of sites
with observations recorded in the day-files, by road class and speed limit (B- and
Synthèse INRETS n° 57
51
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
C-class and unclassified roads are grouped together as minor). The totals are consistent with the reported total of ‘about 180 sites’ by 2003, allowing for some equipment malfunction, yet the motorway numbers are approximately twice the reported
number of 27. The term site in this paper covers the full road at a single carriageway
location and a single carriageway at a dual carriageway location.
Table 2: number of sites per day
Feb 2003
June 2003
Oct 2003
Feb 2004
June 2004
Oct 2004
Motorway
46
53
54
53
51
52
A (70 mph)
2
2
2
2
2
2
A (60 mph)
26
29
30
33
32
33
A (50 mph)
4
4
4
4
5
5
A (40 mph)
12
14
14
16
16
15
A (30 mph)
15
16
16
15
16
16
Minor (60 mph)
17
18
20
20
17
19
Minor (40 mph)
1
3
4
3
4
4
Minor (30 mph)
20
26
28
29
29
29
Total
143
165
172
175
172
175
A range of general results will be presented, followed by more detailed results for
those road categories with at least 10 sites, as shown in the table. The other categories are excluded because site selection is more likely to influence these results.
First, Table 3 groups together all observations to compare the distributions
of car speeds on the various road categories. These data are also presented
graphically in Figure 1. It can be seen that compliance with the speed limit tends
to be worse on A roads than on minor roads, probably because they tend to be
more suitable for higher speeds. The incidence of extreme speeds, exceeding the
limit by more that 30 mph, is greatest on 60 mph A roads. Mean speeds are also
included; only on minor 60 mph roads is the mean speed far below the limit, while
on 70 mph A roads it is well above the limit.
52
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Table 3: distribution of car speeds, 2003–2004
Above speed limit, by:
Within
speed
limit
0–10 mph
10–20 mph
20–30 mph
> 30 mph
Mean
speed
(mph)
Motorway
48.8%
35.7%
13.4%
1.9%
0.2%
70.1
A (70 mph)
39.9%
43.0%
15.1%
1.9%
0.2%
72.3
A (60 mph)
67.4%
18.2%
11.4%
2.7%
0.4%
54.8
A (50 mph)
74.3%
21.3%
3.7%
0.6%
0.1%
45.9
A (40 mph)
76.1%
20.5%
2.8%
0.5%
0.1%
36.3
A (30 mph)
51.3%
43.3%
5.1%
0.3%
0.0%
30.6
Minor (60 mph)
94.6%
4.5%
0.8%
0.1%
0.0%
45.5
Minor (40 mph)
71.4%
26.0%
2.4%
0.3%
0.0%
37.2
Minor (30 mph)
56.9%
38.7%
4.2%
0.2%
0.0%
30.0
Figure 1: distribution of car speeds, 2003–2004
Next, Figure 2 compares results from the individual surveys. The upper set of
data compares the proportions of cars that were travelling within the limit, while
the lower set shows the mean speeds (expressed relative to the speed limit). The
greatest variations between surveys occur for those categories with relatively few
sites, as shown by Table 3, so they are probably random. Even for categories with
15 or more sites, there are few systematic changes. The overall impression is that
the stability of Table 1 has continued through the period of these disaggregate
data.
Synthèse INRETS n° 57
53
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 2: results from individual surveys
3.1. Motorways
Figure 3 shows that the mean speed of cars on motorways varies considerably
by time of day, being lowest during the morning and evening periods of peak flow
and being around 10 mph higher between 8 p.m. and 6 a.m. There have been few
systematic changes over these 2 years: although the mean speed was highest
in June 2004, it fell to its lowest value in October. This fall was almost uniform
throughout the day.
54
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 3: mean speed of cars on motorways, by time of day
Figure 4 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. Predictably, the proportion is high when the mean
speed is low, and vice versa. Again, few systematic changes can be observed
over this period. There has been a slight trend to higher speeds between 8 p.m.
and 4 a.m., although interrupted in October 2004.
Synthèse INRETS n° 57
55
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 4: proportion of cars on motorways, by speed range and time of day
Naturally, one reason for the higher speeds at night is the relatively low traffic
flow in this part of the day. Figure 5 shows the mean flow by time of day, calculated over all motorway sites, and confirms the great variation in flow through
the day.
The intensity of traffic on the British motorway network is highlighted by the
fact that, although the sites for the speed survey were selected in locations where
traffic is likely to flow freely, even the peak flow exceeds 2,000 cars per hour
averaged over these sites. The peak hourly flows occurred between 5 and 6 p.m.,
reaching 2,732 in October 2004. The greatest single hourly flow in the data was
5,161 cars per hour, on the M4 near Maidenhead in Berkshire.
56
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 5: mean flow of cars on motorways, by time of day
3.2. A roads, 60 mph speed limit
These are single carriageway A roads. Figure 6 shows the mean speeds, which
varied less dramatically with time of day than on motorways. There are few signs
of systematic changes over this period.
Figure 6: mean speed of cars on 60 mph A roads
Synthèse INRETS n° 57
57
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 7 shows the proportion of cars that were not exceeding the speed limit
of 60 mph. Overall compliance with the limit is about 20% greater on 60 mph A
roads than on motorways.
Figure 7: proportion of cars on 60 mph A roads not exceeding
speed limit, by time of day
58
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 8 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. As with motorways, the proportion is high when the
mean speed is low, and vice versa, but the variation is less. There have been few
systematic changes over this period, perhaps a slightly increased observance of
the limit and a corresponding slight reduction in speed.
Figure 8: proportion of cars on 60 mph A roads,
by speed range and time of day
Synthèse INRETS n° 57
59
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 9 shows the mean flow by time of day, calculated over all 60 mph A
roads sites. Throughout the day, flows are about one third of the motorway (single
carriageway) flows.
Figure 9: mean flow of cars on 60 mph A roads, by time of day
3.3. A roads, 40 mph speed limit
These are A roads in urban areas, mainly away from central areas. Figure 10
shows the mean speeds, which exceeded the speed limit during the late night and
into the early morning. There are again few systematic changes over this.
60
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 10: mean speed of cars on 40 mph A roads
Synthèse INRETS n° 57
61
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 11 shows the proportion of cars that were not exceeding the speed limit
of 40 mph. Overall compliance with the limit is about 25–30% greater on 40 mph
A roads than on motorways.
Figure 11: proportion of cars on 40 mph A roads not exceeding speed limit,
by time of day
62
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 12 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. As with motorways, the proportion is high when the
mean speed is low, and vice versa.
Figure 12: proportion of cars on 40 mph A roads,
by speed range and time of day
Synthèse INRETS n° 57
63
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 13 shows the mean flow by time of day, calculated over all 40 mph A
roads sites. Throughout the day, flows are about one half of motorway (single carriageway) flows.
Figure 13: mean flow of cars on 40 mph A roads, by time of day
64
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
3.4. A roads, 30 mph speed limit
These are urban A roads, mainly in the busier areas of towns and cities.
Figure 14 shows the mean speeds, which apart from a dip between 8 and 9 a.m.
are consistently at or above the speed limit. There are signs of a reduction in
mean speeds in all parts of the day over this period.
Figure 14: mean speed of cars on 30 mph A roads
Synthèse INRETS n° 57
65
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 15 shows the proportion of cars that were not exceeding the speed limit
of 30 mph. Overall compliance with the limit for 30 mph A roads is similar to that
for motorways.
Figure 15: proportion of cars on 30 mph A roads not exceeding
speed limit, by time of day
66
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 16 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. As with motorways, the proportion is high when the
mean speed is low, and vice versa. There has been a slightly increased observance of the limit and a slight reduction in speed, consistent with the trend shown
in Table 1.
Figure 16: proportion of cars on 30 mph A roads,
by speed range and time of day
Synthèse INRETS n° 57
67
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 17 shows the mean flow by time of day, calculated over all 30 mph A
roads sites. Throughout the day, flows are less than half of motorway (single carriageway) flows.
Figure 17: mean flow of cars on 30 mph A roads, by time of day
68
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
3.5. Minor roads, 60 mph speed limit
These are B-class, C-class and unclassified roads in rural areas. Figure 18
shows the mean speeds, which never exceed the limit. There are few systematic
changes over this period.
Figure 18: mean speed of cars on 60 mph minor roads
Synthèse INRETS n° 57
69
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 19 shows the proportion of cars that were not exceeding the speed limit
of 60 mph. Overall compliance with the limit is over 40% greater on 60 mph minor
roads than on motorways.
Figure 19: proportion of cars on 60 mph minor roads not exceeding
speed limit, by time of day
70
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 20 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. As with motorways, the proportion is high when the
mean speed is low, and vice versa.
Figure 20: proportion of cars on 60 mph minor roads, by speed range and
time of day
Synthèse INRETS n° 57
71
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 21 shows the mean flow by time of day, calculated over all 60 mph
minor roads sites. Throughout the day, flows are far less than one tenth of the
motorway (single carriageway) flows.
Figure 21: mean flow of cars on 60 mph minor roads, by time of day
72
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
3.6. Minor roads, 30 mph speed limit
These are single carriageway A roads. Figure 22 shows the mean speeds,
which are generally at, or above, the speed limit. There have been signs of a
reduction over this period, except perhaps in the period beginning at midnight.
Figure 22: mean speed of cars on 30 mph minor roads
Synthèse INRETS n° 57
73
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 23 shows the proportion of cars that were not exceeding the speed
limit of 30 mph. Overall compliance with the limit is about 10% greater on 30 mph
minor roads than on motorways.
Figure 23: proportion of cars on 30 mph minor roads not exceeding speed
limit, by time of day
74
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 24 now compares the proportion of cars in the various speed ranges in
6–4-hour sections of the day. As with motorways, the proportion is high when the
mean speed is low, and vice versa. There are some signs of increased observance of the limit and reduced speed, although less perhaps than on 30 mph A
roads.
Figure 24: proportion of cars on 30 mph minor roads, by speed range
and time of day
Synthèse INRETS n° 57
75
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 25 shows the mean flow by time of day, calculated over all 30 mph
minor roads sites. Throughout the day, flows are about one-fifth of motorway (single carriageway) flows.
Figure 25: mean flow of cars on 30 mph minor roads, by time of day
4. More detailed analyses
Various factors can influence the distribution of vehicle speeds recorded at a
single site in the speed survey. The principal factor is the speed choice of the drivers; there are additional factors such as flow and weather. Some of the variations
seen in the Figures presented above may be explained by such factors, so a statistical model has been developed to control for them as far as the available data
permit. The following Generalised Linear Model has been applied to the hourly
vehicle observations for a single day:
S(i,h,q) =
Where
exp(αi + βh + γ(q) + ε)
S is the mean speed in hour h at site i with flow q
α and β are coefficients and to be determined, ε is an error term
A similar model is applied to investigate the proportion of vehicles exceeding
the speed limit. For consistency with the French data and to avoid the potential congestion effects associated with peak hours, only observations from the
8 hours 9.00–9.59, 10.00–10.59… 16.00–16.59 have been modelled. Analyses
were made for the following road classes, where data were available from a reasonable number of sites:
–– motorways;
–– roads, 60 mph limit;
–– minor roads, 60 mph limit;
76
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
4.1. Motorways
Data were available from a maximum of 53 motorway sites per day. The mean
flow over all sites over the 6 days and the 8 hours modelled was 590 cars per lane
per hour with a maximum value of 1,452; the average hourly mean speed was
71 mph with a maximum value of 82. An initial analysis of the motorway data used
a quadratic function γ: this showed clearly that the relationship was non-linear, but
further tests showed that a simple spline was superior:
Tests showed that the optimal value for q0 was approximately 800, for each
of the 6 days. The functions that were fitted for each of the days were somewhat
inconsistent, however, as illustrated by Figure 26. The data are standardised to
represent, for the hour beginning at noon, the two sets of functions fitted for a
representative motorway site as flow increases from 0 to 1,500 veh/lane/hour.
The upper limit represents a mean headway of 2.4 seconds, so is approaching
congestion. If the model was fully satisfactory, the functions for the 6 days would
coincide. Although the model explains a large proportion of the variability in the
data, it clearly fails to represent significant factors that influence speed choice.
Figure 26: flow-related functions for a typical motorway site
The range of speed choice between motorway sites is illustrated by Figure 27,
based on the coefficients fitted for day 4. The data are standardised to represent,
for the hour beginning at noon, the mean speed per site and the percentage of
drivers exceeding the speed limit at each motorway site during the hour beginning
at noon with a flow of 500 veh/lane/hour. The sites have been ordered by the estimated proportion of drivers exceeding the speed limit, which correlates well with
the estimated mean speed (r2 = 0.94).
The site with the lowest speed is on the M11, immediately south of the M25,
so traffic conditions on the London orbital motorway may have influenced these
Synthèse INRETS n° 57
77
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
data for the site is not an outlier on the other days for which observations are available. Nevertheless, even when the speed data have been standardised using the
results of the modelling, the results still have a substantial range. The mean speed
ranges between approximately 67 and 78 mph, the proportion of drivers exceeding the speed limit ranges between 40 and 80%.
Figure 27: results for individual motorway sites, day 4
4.2. A roads, 60 mph limit
Data were available from a maximum of 32 A-road sites with a 60 mph limit per
day: these roads are rural single carriageways. The mean flow over all sites over
the 6 days and the 8 hours modelled was 223 cars per lane per hour with a maximum value of 918; the average hourly mean speed was 52 mph with a maximum
value of 76. An initial analysis showed the optimal value for q0 to be approximately
500. The spline terms make a major contribution to the fit of the model, but it can
be seen from Figure 28 that it produces some unexpected results. The reason
may be that they are representing differences relating to site as well as flow, with
the characteristics of low-flow sites tending to preclude high speeds.
Figure 28: flow-related functions for a typical 60 mph A road site
78
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
The range of speed choice between these A road sites is illustrated by Figure 29,
based on the coefficients fitted for day 4 with data standardised to represent the hour
beginning at noon and a flow of 250 veh/lane/hour. The sites have been ordered by
the estimated proportion of drivers exceeding the speed limit, which correlates well
with the estimated mean speed (r2 = 0.96). The range of the results is greater than
for motorways; the mean speed ranges between approximately 45 and 70 mph, the
proportion of drivers exceeding the speed limit ranges between 0 and 70%.
Figure 29: results for individual 60 mph A road sites, day 4
4.3. Minor roads, 60 mph limit
Data were available from a maximum of 32 sites on minor roads with a 60 mph
limit. These roads are also rural single carriageways, but generally of a lower
standard than the Aroads of the previous section. The mean flow over all sites
over the 6 days and the 8 hours was 54 cars per lane per hour with a maximum
value of 580; the average hourly mean speed was 41 mph with a maximum value
of 62. A linear relationship with flow provided the results shown in Figure 30.
Figure 30: low-related functions for a typical 60 mph minor road site
Synthèse INRETS n° 57
79
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
The range of speed choice between these minor road sites is illustrated by
Figure 31, based on the coefficients fitted for day 4 with data standardised to
represent the hour beginning at noon and a flow of 100 veh/lane/hour. The sites
have been ordered by the estimated proportion of drivers exceeding the speed
limit, which correlates reasonably well with the estimated mean speed (r2 = 0.87).
The range of the results is greater than for motorways; the mean speed ranges
between approximately 45 and 70 mph, the proportion of drivers exceeding the
speed limit ranges between 0 and 70%.
Figure 31: results for individual 60 mph minor road sites, day 4
Conclusions
The speed survey that has provided the data, which have been analysed in
this chapter is designed to provide information on the speeds at which drivers
choose to travel when their behaviour is not constrained by congestion or other
road conditions. The speeds measured are not representative of the network as a
whole, but of roads with generally freely flowing traffic.
The main conclusion from Table 1 is that car drivers’ chosen speeds have not
changed on most types of road, but have fallen on roads with 30 mph limits as
illustrated by Figure 32. While the mean speed has only fallen slightly, the proportion of drivers exceeding the limit began to fall in 2000 while the proportion
exceeding the limit by more than 5 mph began to fall in 2002. The explanation
for the reduction being confined to these roads is probably that speed cameras in
Great Britain are principally located on these roads.
80
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Figure 32: speed distribution on 30 mph roads
The analyses of Section 3 have confirmed this conclusion over a shorter timescale, and explored the distribution of speeds in some detail. The modelling of
Section 4 has shown the variability of speeds between sites, even when allowance is made for traffic flow and time of day. The survey sites are spread throughout Great Britain, but the number of sites is not sufficient to determine whether
there are consistent regional variations.
Reference
Department for Transport Vehicle Speeds in Great Britain: 2003. Transport
Statistics Bulletin SB (04) 29, 2004.
7.1. Appendix A: speed data from automatic traffic counters
The counting equipment uses the output from inductive loops and axle sensors
to measure vehicle length, the number and spacing of axles and vehicle speed.
The equipment is capable of classifying 21 different vehicle types. However, it
cannot distinguish between vehicles with the same electronic ‘footprint’ such as
cars and car-based vans (which have an identical chassis to that of a car). Data
for every vehicle detected during the previous day is downloaded from each site
during the early morning. Data for periods where it was known that the site was
malfunctioning was discarded.
Synthèse INRETS n° 57
81
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Motorcycle speeds have always been collected in the survey of built-up sites.
Information on motorcycle speeds at non-built-up sites has been included since
2000.
The accuracies of the measurement of speed are as follows:
Speeds between 40 and 80 kph (24.9 mph and 49.7 mph)
±1 kph (±0.6 mph)
Speeds between 81 and 160 kph (50.3 mph and 99.4 mph)
± 2.0 kph (±1.2 mph)
Speeds above 161 kph (100.0 mph)
±7.5 kph (±4.7 mph)
Therefore, where a large number of vehicles are travelling at the speed limit,
some will be incorrectly recorded at speeds exceeding the speed limit.
7.2. Appendix B: UK maximum speed limits
(Miles per hour)
Vehicle type
Cars/motorcycles1
Cars towing
1 trailer
2 or more trailers
70
60
40
Dual
carriageway
70
60
20
Single
carriageway
60
50
20
Motorway
Buses/coaches
< 12 metres
> 12 metres
70
60
60
60
50
50
Goods vehicle
< 7.5 tonnes2
artic < 7.5 tonnes
70
60
60
60
50
50
artic > 7.5 tonnes3
60
50
40
Goods vehicle towing 2 or more trailers
40
1 Includes car-derived vans.
2 Maximum laden weight; not an artic, trailer puller.
3 Maximum laden weight of cab and trailer.
20
20
82
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
7.3. Appendix C: pictures of several survey sites
Site 2521, M1, 70 mph, Nottingham, between junctions 25 and 26,
motorway.
Site 700, unclassified road, 60 mph, Llanegryn, Gwynedd, non-built-up.
Synthèse INRETS n° 57
83
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Site 707, A25, 40 mph, Guildford, Surrey, A principal road, built-up.
Site 709, unclassified road, 30 mph, Bentley, built-up.
84
Synthèse INRETS n° 57
Analyses of British vehicle speed data
Site 853, A303, 60 mph, Sparkford, near Wincanton, A trunk road,
non-built-up.
Synthèse INRETS n° 57
85
Chapitre 4
Modélisation des vitesses
pratiquées en rase campagne :
France et Grande-Bretagne
Pierre-Alain Hoyau et Sylvain Lassarre
L’objectif de la recherche est d’établir un modèle de la vitesse moyenne pratiquée par les véhicules légers de jour sur les réseaux qui puisse tenir compte des
profils de débit sur ces réseaux afin de comparer les niveaux de vitesse, une fois
l’effet « congestion » dans les réseaux contrôlé.
1. Les données et les plans de sondage
L’unité statistique est un site*période. Les deux systèmes d’observation des
vitesses reposent sur un échantillon des sites de mesure dans chaque pays.
Un site est défini sur autoroute en distinguant les sens de circulation en France
comme en Grande-Bretagne. Sur route, un site couvre les deux sens de circulation en Grande-Bretagne et un seul sens de circulation en France, parce qu’en
France, les observations sont faites par radar qui mesure les vitesses des véhicules dans un seul sens alors que les mesures de vitesse en G-B sont faites par
boucles magnétiques qui sont posées sur les deux sens de circulation. Le nombre
de voies de circulation est connu pour tous les sites. Il faut bien vérifier ce qui est
mesuré selon ces techniques :
–– est-ce qu’avec les boucles sont enregistrées les vitesses des véhicules qui
doublent sur la voie de gauche sur une route à une voie dans chaque sens ?
–– distingue-t-on bien les PL (plusieurs essieux) des VL sans double compte,
ainsi que les motos ?
Les sites sont choisis dans les deux pays selon des caractéristiques géométriques a priori homogènes : ligne droite, loin d’un carrefour, mais avec des largeurs
de chaussée et d’accotement, et des présences d’obstacles en rural variables, de
même qu’en urbain, plus d’autres facteurs propres à l’urbain selon les modèles
existants. L’effet des moyens de contrôle (radars et forces de police) sur ces sites
n’est pas pris en compte actuellement et devra être évalué.
Synthèse INRETS n° 57
87
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Le nombre de sites varie entre 4 et 25 selon les réseaux (Tableau 1).
Tableau 1 : nombre de sites par pays
France
G-B
Autoroute1
2 × 2 voies
2 voies
Urbain
24
26
14
4
30
24
27
30
La vitesse moyenne sur une section de route décroît avec la densité de véhicules mesurée en nombre de véhicules par kilomètre. Dans le modèle, on remplace
la densité par le volume de trafic en nombre de véhicules par heure, sachant que
les mesures de vitesse ne sont pas faites lorsque le trafic est très saturé. Soit Nij
le nombre de véhicules motorisés passant en ce site i dans l’heure j. Ce débit est
estimé à partir des comptages issus des mesures de vitesse. Dans le modèle, on
prendra, pour des raisons de disponibilité de données, le nombre de véhicules
légers passant pendant une heure.
Les vitesses sont observées par site en France sur des périodes de 20 à
30 minutes (la journée5) hors jours exceptionnels (trafic ou météo) sur un sens, et
par voie pour les autoroutes. Elles sont agrégées sur toute la période d’observation par catégorie de véhicules. En G-B elles sont mesurées en continu grâce à
des stations de comptage de trafic automatiques puis agrégées et distribuées en
classes par tranche horaire.
Les vitesses individuelles sont disponibles en France et les vitesses sommées
en cinq classes en G-B :
–– inférieure à la vitesse limite,
–– entre la vitesse limite et la vitesse limite + 10 mph,
–– entre la vitesse limite + 10 mph et la vitesse limite + 20 mph,
–– entre la vitesse limite + 20 mph et la vitesse limite + 30 mph,
–– supérieure à la vitesse limite + 30 mph,
avec, en supplément, la somme de toutes les vitesses. Les effectifs en nombre
de véhicules de chaque classe avec le total sont fournis.
Les données vitesse individuelles françaises des véhicules particuliers ont été
agrégées de façon à respecter les mêmes limites de classes en transformant les
km/h en mph.
La modélisation s’étend sur une période allant de janvier 2003 à décembre
2004 parce que les formats des informations statistiques sur les vitesses britanniques ont changé à partir de 2003 et que l’acquisition des données passées
compatibles demande de gros efforts de traitement de données. On dispose de
six points de mesure sur les deux ans par site. À des jours fixes pour les sites
britanniques, à des jours plutôt variables d’un site à l’autre en France.
5 On
88
dispose aussi de mesures de vitesse de nuit mais sur un nombre restreint de sites.
Synthèse INRETS n° 57
Modélisation des vitesses pratiquées en rase campagne : France et Grande-Bretagne
En France, à chaque site est attribué un jour de la semaine du lundi au dimanche. Les mesures ont lieu ce type de jour à une date fixée par l’institut de sondage. L’équipe d’enquête revient sur le site tous les quatre mois le même type de
jour et sur la même tranche horaire.
La base de données agrégées britanniques par tranche horaire est fournie
pour six jours : 18 Février 2003, 17 juin 2003, 21 octobre 2003, 17 février 2004, 15
juin 2004, 19 octobre 2004. Ces jours ouvrables (un jeudi) ont été choisis approximativement au milieu des quadrimestres. On a tiré au hasard pour chaque site
une tranche horaire entre 9 heures du matin et 18 heures le soir (neuf tranches
horaires) qui lui est attribuée en permanence sur les six jours de façon à être
homogène en termes de durées d’observation avec les données françaises.
Les conditions météo au moment de l’observation, spécialement la pluie, sont
disponibles pour chaque site en France ; en G-B seules les conditions météo du
jour sont connues pour toute l’île. La part de PL (%PLij) dans le flot (en veillant à
l’homogénéité des catégories) n’est pas disponible.
2. Les modèles de régression
Le modèle sera transnational pour pouvoir tester les interactions des variables
précitées avec le pays. L’effet concentration sera particulièrement examiné car on
pense qu’une grosse partie du différentiel de vitesse lui est imputée6. On propose
de commencer par un modèle linéaire simple :
Pi est la variable indicatrice d’un pays, Nij le débit horaire par voie des véhicules légers.
Au lieu de la vitesse moyenne, on peut partir d’une variable d’appartenance à
une classe de vitesse et développer un logit ordonné
Dans le futur, on pourra envisager un modèle linéaire mixte sans et avec transformation logarithmique7 plus riche avec modélisation conjointe de la variance
Pi est la variable indicatrice d’un pays. Sj est un facteur tendance*saisonnier fixe8.
Vi, εijk sont des bruits blancs dont on peut modéliser les variances. On introduira des
interactions de la variable Pi avec les autres variables pour tester l’existence de particularités nationales. Une tendance peut être intégrée avec la possibilité d’un test
sur une différence tendancielle des vitesses moyennes entre les deux pays.
6 Les
routes anglaises seraient plus congestionnées que les routes françaises.
implique de considérer des troncatures bilatérales pour les vitesses en G-B.
8 Il peut devenir aléatoire du fait des politiques de sécurité routière déployées ces dernières années
en France.
7 Cela
Synthèse INRETS n° 57
89
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Le modèle sur données individuelles n’est réalisable que pour la France
Pi est la variable indicatrice d’un pays. Sj est un facteur tendance*saisonnier
fixe9. Vi, εijk sont des bruits blancs dont on peut modéliser les variances.
S’il y a un écart entre les pays, il peut être du à des flottes de véhicules qui
diffèrent par leur puissance et leur ancienneté, par les catégories de conducteurs (âge, sexe, CSP), par les attitudes des conducteurs vis-à-vis du risque et
de la loi ou bien à des facteurs relatifs à l’infrastructure tels que la largeur des
chaussées.
Le modèle de régression simple a été estimé sur le réseau des autoroutes
de liaison pour commencer : 233 sites*heures en France et 234 en G-B. Les
distributions des débits horaires sont très contrastées comme on s’y attendait. La
distribution est lognormale en France avec une moyenne de 390 VL/h et normale
en G-B avec une moyenne de 578 VL/h.
Figure 1 : distribution des débits horaires (unité = 10 VL) selon les pays
Pour la modélisation, deux sites*heures aberrants britanniques avec des vitesses très basses (< 30 mph) et des débits très faibles (voisins de zéro) ont été
exclus.
9 On
90
pourra distinguer en France deux types d’autoroutes : liaison, dégagement.
Synthèse INRETS n° 57
Modélisation des vitesses pratiquées en rase campagne : France et Grande-Bretagne
Figure 2 : distribution des vitesses moyennes par pays
sur autoroute de liaison
Le différentiel de vitesse brute des véhicules légers de jour sous hypothèse
d’une distribution normale des vitesses moyennes est de 6,97 mph entre la
France et la G-B sur les autoroutes de liaison. Le différentiel de vitesse passe
à 5,3 mph en introduisant l’effet de la densité des véhicules. Le coefficient du
nombre de véhicules légers horaires est de –0,0087 et significatif. En passant de
100 à 1 100 VL/h, la vitesse moyenne chute de 8,7 mph. La différence de densité
sur le réseau des autoroutes de liaison entre la France et la G-B génère un différentiel de 1,7 mph sur un écart global de 7 mph. La plus forte densité de véhicules
sur le réseau britannique cause une baisse de la vitesse moyenne par rapport à
la France qu’on peut chiffrer à 27 %.
Tableau 2 : moyenne pondérée par les débits des vitesses selon les pays
Lorsqu’on applique une régression pondérée par les volumes de trafic afin
d’obtenir non plus une moyenne arithmétique des vitesses mais une moyenne
pondérée par les débits, l’écart de vitesse n’est plus que de 5,5 mph entre la
France et la G-B. On donne plus de poids à des sites avec de forts débits et
Synthèse INRETS n° 57
91
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
donc des vitesses plus basses. L’estimateur de la vitesse moyenne baisse plus
en France qu’en G-B où la distribution des débits est plus régulière. La prise en
compte de la densité avec un coefficient égal à –0,011 réduit l’écart à 4,63 mph.
L’effet de la densité est plus marqué ; en passant de 100 à 1 100 VL/h, la vitesse
moyenne chute de 11 mph. La part de la densité dans la baisse n’est plus que
de 16 %.
Conclusion
L’hypothèse d’un effet de la congestion du réseau britannique sur la vitesse
moyenne est confirmée sur le réseau des autoroutes de liaison. Le surcroît de
trafic de 50 % sur les autoroutes britanniques compte pour 16 % de l’écart de
vitesse entre les deux pays qui s’établit à 5,5 mph sur ce réseau, soit une réduction de 0,87 mph. L’effet de la densité sur les autoroutes de liaison est modeste,
mais non négligeable. Il reste à développer la même modélisation pour les autres
réseaux et à introduire des effets aléatoires pour les sites ainsi qu’une tendance
et une saisonnalité pour mieux juger de la variabilité intersite dans chaque pays
une fois retiré l’effet congestion.
92
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 5
Acceptability of radar and driver’s
behaviour in the UK
Steve Stradling
1. Introduction
This chapter compares the speeding behaviour and acceptability of speed
cameras amongst car drivers in UK.
2. Reasons to speed
Silcock et al. (2000) listed the eight most common reasons UK drivers gave to
justify speeding as:
••
••
••
••
••
••
••
••
it was unintentional;
I was in a hurry (e.g. to collect a child at school);
I was being ‘forced’ to speed (e.g., by someone tailgating me);
I think the limit is wrongly set for this location (based on experience of similar
roads with higher limits);
my modern car can stop more quickly than those on the roads at the time
the limit was set, therefore my speeding is safe;
I don’t think the same speed limit should apply at all times (the empty road,
late at night);
the limit does not apply to me because I am an above-average driver;
my speeding is acceptable because it is not a lot over the limit and others
abuse the limit more flagrantly.
Such a list conflates a number of different types of reasons: opportunities for
speeding, perceived obligations to speed, and individual inclinations towards, or
away from, speeding.
Campbell and Stradling (2003) reported a study in which 1121 car drivers in
the Strathclyde region of Scotland were asked to indicate whether they would
drive faster, slower or the same as usual in a number of circumstances. They
Synthèse INRETS n° 57
93
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
rated 18 scenarios ‘Compared to how I normally drive on my own …’ on a 7-point
scale from 1 much slower, through 4 much the same as usual to 7 much faster.
Half of the drivers (52%) said they would speed up when late and a quarter
(27%) would speed up if the traffic around them was moving faster than they
normally drive. Almost all drivers would slow down when driving in fog (98%) and
heavy rain (96%). Many drivers indicated they would make no change in their
speed choice in many of the circumstances. Most of the variables were skewed
to the faster or slower pole with only two situations showing substantial bi-polar
differentiation across drivers: 1 in 5 (19%) would drive more slowly when feeling
stressed while another 1 in 5 (20%) would drive faster; 1 in 8 (12%) of drivers
would speed up when someone was driving close behind them, while one third
(34%) say they would slow down when being tailgated.
Three underlying factors were extracted using principal components analysis.
Table 1 shows the three factors; the percent of drivers who said they would drive
faster and slower in each situation; and on which items there were statistically significant (P <0.05) differences between speeders (the 37% of the sample who had
been ever stopped by the police for speeding or who had been flashed by a speed
camera in the past 3 years) and those who had not been detected speeding; and
between the 16% of the sample (18% of the male drivers and 13% of the female
drivers) who reported having been involved in one or more road traffic accidents
as a driver within the last 3 years.
Table 1: percentage of drivers’ intentions according to the 3 factors
Situational influence on driver speed
Factor 1
Driving in fog
Driving in heavy rain
On unfamiliar roads
Traffic slower than you normally drive
Driving in the dark
Driving in light rain
Driving under streetlights
Factor 2
You spot a speed camera
You see speed camera warnings
With children in the car
With older people in the car
Late for meeting or appointment
Factor 3
Traffic faster than you normally drive
Feeling stressed
Someone is driving close behind you
Listening to music
Driving when weather is hot
People your own age in the car
94
% Drive
Faster
% Drive
Slower
98
96
88
69
66
42
34
65
58
57
37
55
30
21
12
8
6
4
23
34
4
10
6
Speeder
vs. non
Collision
vs. not
86:89
6:3
74:59
63:56
71:64
65:56
44:34
64:49
65:53
35:26
24:18
34:29
28:19
15:7
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
The three factors were labelled responsibilities to others, adverse driving conditions and arousal.
Factor 1, Responsibilities to others, has feelings of responsibility or duty linking the variables. Running behind schedule loads negatively on this factor, which
is consistent with the suggestion that the connection between these variables is
changing speed according to feelings of duty or obligation, whether towards vulnerable present others (children, old people in the car), enforcement authorities,
or to distant others at one’s destination. Running late for a meeting or appointment
tends to make drivers increase their speed, while the other items tend to make
respondents drive slower than their usual speed.
Factor 2 involves variables that have Adverse driving conditions as a common
link, with driving in heavy and light rain, fog, in the dark and under streetlights and
driving on an unfamiliar road loading on this factor. All the variables in this factor
would tend to make the respondent drive more slowly than their usual speed and
they may be seen as constraining the opportunity to speed.
The variables which load positively on Factor 3 are driving while listening to
music, being late, having people of the driver’s age in the car, feeling stressed,
driving when the weather is hot and when the traffic ahead is faster than the
respondent’s usual speed, all situations in which feelings of Arousal or stimulation
are likely to be present. This factor differs from the first two as it consists of variables tending to make respondents drive faster than their usual speed.
These three factors sort influences on driver speed choices into three major
groupings: those influencing obligation to refrain from speeding, those influencing by constraining the opportunity to speed, and those driving the inclination to
speed. This pattern of results is consistent with the claim that transport choices
are driven by the interaction of opportunity (‘Can I do it?’), obligation (‘Should I do
it?’) and inclination (‘Do I want to do it?’) (Stradling, 2002; 2005a).
2.1. Speeding behaviour and collision-involvement
Further analyses of this data showed that tendencies to vary in-journey speed
choices were susceptible to age effects for two-thirds of the situations (12 of 18),
to exposure (annual mileage) effects for half (8) of the situations, and to gender
differences for a quarter (5 of 18). The reported in-journey speed choice behaviour
of speeders, compared to non-speeders, varied in four situations for males and six
for females. For both, those who had been detected speeding were more likely to
slow down for speed cameras and camera warning signs, but to drive faster when
late for a meeting or appointment or if the traffic around them was driving faster
than they normally drove. More male drivers who had been collision-involved indicated they would slow down for a speed camera, slow down with children in the
car, slow down when being close followed, and more said they would drive faster
when late, when feeling stressed, when listening to music and when the weather
was hot.
Synthèse INRETS n° 57
95
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Thus three different types of reasons to speed have been identified and speed
choices in particular situations have been shown to be associated with being an
unsafe driver — a detected speeder or recently collision-involved.
Other studies have shown a clear association between speed choices and
reported collision-involvement. Drivers who break the speed limits and violate
other rules of the road pose greater risks to themselves and to other road users.
Table 2 shows a number of measures of speeding behaviour and aggressive driving that were associated with elevated crash-risk in a large sample of English
drivers (Stradling et al. 2002).
Table 2: risky road behaviours and crash history
3 Year Speeding Offences
Elevated crash risk
Normal Speed Choice
Elevated active crash risk
Preferred Speed Choice
Elevated active crash risk
Highway Code Violations
Elevated crash risk
Aggressive Violations
Elevated crash risk
The speed at which ‘you normally drive’ and the speed at which ‘you would
prefer to drive’, across a number of different road types predicted active (‘I hit
another road user or lost control of the vehicle’), though not passive (‘I was hit
by another road user’) crash involvement - a distinction between crash types
introduced by West (1995). Those who do, and those who would like to, drive
fast are more likely to run into other road users and to suffer loss of control
crashes.
In addition, drivers who had been crash involved in the previous 3 years scored
significantly higher not only on speeding offences but also on Highway Code violations and aggressive violations compared to those who reported no crashes.
This was true for both active accidents and passive crashes. The tendency to
violate the rules of the road was indexed by responses to the Manchester Driver
Behaviour Questionnaire (Lawton et al., 1997), a twenty-item scale consisting of
12 violation and 8 error items.
Data from Scottish car drivers (Stradling et al., 2003) shows in Figure 1 that
collision-involvement is elevated at each of four annual mileage bands for those
who had been flashed by a speed camera compared to those who had not, and
that only for those not flashed did collision-involvement rise linearly with increased
exposure (mileage).
96
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
Figure 1: percent of Scottish car drivers collision-involved in last 3 years
by reported annual mileage bands, separately for drivers flashed by a
speed camera in that time and those not
These findings suggest that being detected speeding is a good indicator of a
car driver’s risk potential. The laws of physics inexorably dictate that the higher
the speed at impact, the more energy must be absorbed by hard metal, soft flesh
and brittle bones. The studies reported here show that speeding behaviour can
elevate crash frequency as well as crash severity. Thus, the kinds of drivers who
speed are potential ‘crash magnets’. Speed at impact kills and speeders are more
likely to crash.
3. Speeding behaviour
Comparison was made between responses to questions asked of Scottish car
drivers in 1991 (Waterton, 1992), in 1994 (Market Research Scotland, 1994) and
in 2002 (Stradling et al., 2003). Table 3 shows the results for a range of unsafe
behaviours including speeding.
Synthèse INRETS n° 57
97
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Table 3: proportions of Scottish drivers who ‘Never’ undertook each
driving infringement in three surveys
% ‘Never’
1991
1994
2002
Driven at 40 mph in a 30 mph zone
16
25
20
Same
Driven at 80 mph in a 70 mph zone
36
42
29
Worse
Carried out a manoeuvre without signalling
39
37
52
Better
Followed too closely the vehicle in front
52
49
64
Better
Driven at 50 mph in a 30 mph zone
59
63
82
Driven at 90 mph in a 70 mph zone
65
67
58
Much
Better
Worse
Driven after drinking alcohol but when you think
you are OK
Driven through a red light
66
75
78
Better
67
68
71
Same
Worse
Crossed a continuous white line
71
60
65
Overtaken on the inside
75
73
76
Same
Speeded up when being overtaken
76
75
86
Better
Had a ‘race’ with another driver
91
88
94
Same
While excessive, though not excess, speed in built-up areas has dramatically
reduced across the last decade amongst Scottish drivers with 4 in 5 (82%) currently saying they never drive at 50 mph in a 30 mph zone, speeding behaviour
on the motorways and dual carriageways continued to increase. In 1991 36% said
they never drove at 10 mph above the speed limit in a 70 mph area and in 2002
this figure had fallen to 29%. In 1991 65% said they never drove at 90 mph on
motorways (speed limit 70 mph), in 2002 this figure was down to 58%. So selfreported excessive speeding in town had reduced, but both excess and excessive
speeding on motorways and dual carriageways had increased.
However, more recently (Stradling, 2005b) a survey of 800 car drivers in the
southeast of Scotland found 51% agreeing that ‘At the moment I am making an
effort to reduce my driving speed’ and 34% saying ‘I have recently reduced my
usual driving speed’.
In 2002 1,000 Scottish car drivers were shown photographs of different road
types and asked how often they used such roads, what they thought the speed
limits were, and their normal and preferred speeds on such roads, whether they
thought the (actual) speed limits too low or too high and what they thought they
likelihood of detection for speeding was (Stradling et al., 2003).
The road types were: P1 a 3-lane motorway; P2 a 2-lane urban dual carriageway with central barrier; P3 a wide suburban road with a central reservation but
with crossing points for right turns; P4 a main road in town with shops, residences,
bus stops and parked vehicles; P5 a wide residential street with parked vehicles;
P6 a narrow residential road with many parked cars on both sides; P7 an empty
rural single-carriageway A road. All seven scenes pictured light or zero traffic flow
under clear daylight and dry weather conditions such that exceeding the speed limit
would be feasible and not constrained by traffic density or inclement conditions.
98
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
Table 4: level of usage, knowledge of speed limit, normal and preferred
driving speeds compared to limit, views on speed limits and likelihood of
speeding detection for seven road types
Use once
a week or
more
Correctly
identify
speed
limit
P1
35%
89%
70
P2
44%
53%
70
P3
79%
49%
40
P4
79%
88%
30
P5
84%
87%
30
P6
83%
80%
30
P7
59%
53%
60
P1, P2 and P7 from FreeFoto.com
Normal
speed >
limit
Preferred
speed < limit
Think
speed
limit ‘too
slow’
Think
speed
limit ‘too
fast’
Think
detection
‘Very
likely’
35%
22%
26%
5%
16%
17%
41%
11%
24%
15%
29%
19%
8%
14%
18%
30%
-
1%
13%
18%
31%
-
3%
12%
14%
18%
-
1%
34%
14%
10%
54%
5%
30%
4%
Males reported driving significantly more often on motorways and country
roads than females, but were better at correctly identifying the speed limit only for
the motorway, with 92% of males and 85% of females selecting 70 mph. Between
80% and 88% of drivers gave the correct answer of 30 mph for the three urban
scenes (P4, P5, P6) but only half were correct for the other three road types (P2
70 mph 53%; P3 40 mph 49%; P7 60 mph 53%). The suburban dual carriageway, P3, was the least self-explaining of the roads in making its speed limit immediately apparent from its geometry.
And not all drivers want to go fast. For example, when drivers who currently
drive on motorways were shown the photograph (P1) of a 3-lane motorway with
free-flowing traffic in good daylight with no visible police enforcement and asked
‘At what speed would you prefer to drive on roads like this?’; 46% of Scottish male
car drivers, and 63% of female car drivers nominated a speed at or below the
speed limit of 70 mph.
Table 5 shows how the proportion that would prefer to exceed the current limit
on motorways varied with age and gender; Table 6 how it varied with gender and
annual mileage; and Table 7 how it varied with gender and car engine size. All
four factors — gender, age, annual mileage, engine size — make a difference to
speeding behaviour.
Synthèse INRETS n° 57
99
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Table 5: percentage of Scottish car drivers who currently drive
on motorways wanting to drive up to, or beyond,
current motorway speed limit by age and gender
Sex
Male
Total
Female
Age in 7 ranges
17–20
21–29
30–39
40–49
50–59
60–69
70+
17–20
21–29
30–39
40–49
50–59
60–69
70+
Total
Up to 70 mph
32
32
33
35
49
70
90
47.3%
61
53
58
69
73
85
97
66.8%
More than 70 mph
67
69
67
66
52
30
11
52.7%
39
47
41
31
27
15
3
33.2%
Table 6: percentage of Scottish car drivers who currently drive
on motorways wanting to drive up to, or beyond, current
motorway speed limit by reported annual mileage and gender
Sex
Male
Total
Female
Annual mileage
in 4 ranges
< 5,000
5–9,000
10–12,000
> 12,000
< 5,000
5-9,000
10–12,000
> 12,000
Total
Up to 70 mph
71
54
40
35
47.3%
81
71
62
39
66.8%
More than
70 mph
29
47
59
65
52.7%
20
29
38
61
33.2%
Table 7: percentage of Scottish car drivers who currently drive
on motorways wanting to drive up to, or beyond, current
motorway speed limit by car engine size and gender
Sex
Male
Female
100
Engine Size
Up to 1.8 litres
1.8 litres and above
Total
Up to 1.8 litres
1.8 litres and above
Total
Up to 70 mph
57
32
47.3%
67
66
66.8%
More than 70 mph
42
68
52.7%
33
33
33.2%
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
4. Attitudes to speed limits
1,000 Scottish car drivers (Stradling et al., 2003) were asked about their attitudes to compliance with speed limits on motorways and on ‘other roads’. Table 8
shows the distribution of responses, separately for males and females. They are
arranged in descending order of endorsement by female drivers.
Table 8: attitudes to speed limit compliance on motorways
and other roads for male and female drivers
[Column%s]
Speed limits…
Should not be broken at all
Should only be broken in exceptional circumstances
Are set below a safe limit and it is acceptable to exceed
them by up to 10 mph
Are set below a safe limit and it is acceptable to exceed
them by more than 10 mph
Don’t mean much on roads and drivers should judge
whether to drive faster or slower
Motorways
M
F
30
45
25
26
32
23
Other roads
M
F
43
55
33
30
18
14
7
2
4
1
6
3
3
1
Male and female drivers differed significantly in their attitude to speed limits.
Amongst the females, approaching half (45%) thought speed limits ‘should not
be broken at all’ on motorways and over half (55%) thought they should not be
broken at all elsewhere. On motorways, equivalent numbers of males thought that
speed limits should not be broken at all (30%: two-thirds of the figure for females)
or that speed limits ‘are set below a safe limit and it is acceptable to exceed them
by up to 10 mph’ (32%: half as many again as the female figure).
5. Acceptability of speed cameras
2,000 Scottish car drivers were asked ‘Are you in favour or against speed cameras?’ More females (82%) than males (68%) were in favour. Support for speed
cameras increases with age, from 57% of 17–24 years old to 87% of the over 65s
in favour and, with 15% ‘undecided’, only 18% of males and 4% of females say
they are against speed cameras.
Synthèse INRETS n° 57
101
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 1: Scottish car drivers’ approval of speed cameras by age and sex
6. Effects of speed cameras
Speed cameras are intended to reduce casualties by reducing accidents by
reducing speeds at specific high-risk locations. Use of speed cameras to supply an evidential basis for prosecution was made possible by Section 23 of the
UK Road Traffic Act 1991. This Act provided that photographs from an approved
automated speed camera may be used as evidence without the corroboration of
a police officer in prosecuting drivers for exceeding speed limits. The UK national
Cost Recovery for Safety Cameras project differs markedly from past speed camera initiatives in financial terms. Previously revenue from court fines and fixed
penalties (currently £60) went directly to the UK central government exchequer.
Neither the local traffic authorities, who purchase and house the cameras, nor the
police, who operate them, nor the courts, who administer the collection of fines,
were able to cover their costs from fine revenue. Now the fine income from cameras introduced under the scheme goes to the local authorities, the court and the
police and is reserved for investment in local road safety and casualty reduction
measures. The project was piloted in 8 UK police force areas and, on the basis of
speed and casualty reduction figures from the pilot, was rolled out nationally from
summer 2002.
In the UK today most automatic safety cameras for detecting speeding motorists are located at crash hot spots and speed cameras should thus act as hazardous location indicators (Stradling, 2005c). The deployment criteria being followed
by the more than 40 Safety Camera Partnerships across the UK require speed
cameras to be placed where there are elevated levels of recent, and speedrelated, RTAs. The fixed-site cameras are also highly visible being painted yellow
or, in Scotland, with yellow and red diagonal stripes. Their first function is thus to
signal to the approaching driver ‘Look out! Take extra care! This has lately proved
102
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
to be a dangerous stretch of road.’ They do not, however, provide any further sitespecific hazard information (‘What, exactly, should I be looking out for?’) beyond
this general alerting function.
6.1. Site-specific general deterrent effects
Data on traffic flow and vehicle speed charted the general deterrence effect
of installation of speed cameras at five new 30 mph sites in Glasgow, Scotland.
When baseline measures were taken 64% of passing vehicles were exceeding
the posted speed limit. Three months later, after speed camera housings had
been installed but before they became operational, only 37% of vehicles were
exceeding the speed limit. After a further three months, when white roadway
gridlines had been added and the cameras had just begun operating (flashing),
this figure had fallen to 23%. The installation of fixed-site speed cameras at five
30 mph sites in Glasgow had reduced the number of speeding motorists from
two-thirds to one quarter over a six-month period. One year on some slippage
had occurred, but less than one third (31%) of passing motorists were exceeding
the limit.
Table 9: effects of gradual installation of site furniture
on speeding behaviour
Date of
measurement
April 2000
July 2000
October 2000
October 2001
Condition
Baseline
Camera housing only
Camera housing + grid lines (+ camera)
Full installation; tickets being issued
Percentage of
speeding vehicles
at 30 mph sites
64%
37%
23%
31%
Figure 2 shows that the number of drivers exceeding the speed limit at these
five 30 mph sites was reduced at all times of the day and the distribution had
changed from one of morning and afternoon ‘speeding peaks’ mirroring traffic flow, to a situation where the largest numbers of excess speeders were to
be observed in the lower traffic flow period between the morning and afternoon
peaks. At all sites there were no appreciable changes in daily traffic flow between
measurements.
Synthèse INRETS n° 57
103
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 2: number of vehicles exceeding speed limit (speeders)
all 30 mph sites
6.2. Specific deterrent effects of receiving a speeding ticket
To gain an understanding of the impact on drivers of receiving a speeding
ticket a questionnaire was sent to drivers who had been detected by speed cameras in Glasgow. Three-quarters (73%) of those receiving speeding tickets were
aged between 25 and 55. 37% were female, and 63% male. UK national figures
show 42% of those holding a driving licence are female and 58% male, with the
average female driver doing a lower average annual mileage. Only 2% of the
males in receipt of speeding tickets were in the ‘boy racer’ age group between 17
and 24 years of age. Over half of the survey respondents were not familiar with,
not frequent or regular users of, the site where they were caught speeding. Only a
quarter of those caught speeding on Glasgow City roads had Glasgow City home
postcodes. Drivers from the outskirts of the city and the rest of the Strathclyde
region constituted 57% of those caught. 9% of drivers receiving tickets were from
the remaining Scottish regions and 7% had English home postcodes.
Respondents were asked about their emotional reaction on receiving the letter
informing them of their speeding offence. The responses indicated that receiving a
speed ticket could be a highly emotional experience. 81% percent of respondents
reported strong feelings, while only 12% discussed their experience with no reference to emotions. The most frequent emotion mentioned was anger. 45% percent
of all respondents reported feelings of anger. While this anger was mostly at the
system and the situation, there were a significant number of these angry respondents (29%) who were annoyed with themselves.
104
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
Write-in responses (Campbell and Stradling, 2002) revealed a range of
reactions to the receipt of a speeding ticket. Some expressed their anger and
frustration:
‘I am really mad — no speed limit signs up — how are people to know what
the limits are?’
‘I was frustrated and annoyed as I am not a speed merchant’.
‘Shock, fear, concern about my driving licence, followed by annoyance and
anger to myself for committing the offence’.
‘I was totally angry at myself for paying money for a stupid mistake’.
Some reported an initial shock:
‘My first reaction was one of dismay’.
‘I received the ticket and my first reaction was dread’.
‘I personally felt gutted’.
Whilst a small but finite number reported effects over and above those changes
to driving behaviour which the issue of a speeding ticket seeks to achieve:
‘I felt physically sick, extremely upset and more than extremely worried. I
had visions of being in jail’.
‘Since the offence I am not the driver I was. I only drive now when I have to’.
For some drivers the desired effect was reported:
‘The punishment was deserved and it has made me make sure I keep to the
speed limit wherever I go’.
‘I consider myself a competent, confident and safe driver but being caught
and having to pay a fine has made me rethink - I have noticeably slowed
down’.
While others were affronted by the perceived inequity of the punishment and
the attack on their self-image as a driver:
‘The punishment was very unfair considering how careful a driver I am’.
‘It made me feel that I was not a good driver, which I am’.
Some indicated they were now sensitised to their speed at camera locations:
‘I certainly drive more slowly along the street with the camera that caught
me last time and I am more careful to look out for speed cameras’.
‘I didn’t know the road and I didn’t know to look out for the speed camera
at this point’.
Whilst others announced themselves unremediated by the experience:
‘I drive my car the exact same way as I do not believe that the speed I was
driving at was reckless or dangerous’.
Receipt of a speeding ticket had changed the behavior of some, but not all,
drivers, with a mixture of speed sensitive drivers (‘I now pay more attention to
my speed while driving’), camera sensitive drivers (‘I now keep more of a look
out for speed cameras’) and insensitive drivers, doing neither. Around half had
become more sensitive to their speed and were driving more slowly, but one third
Synthèse INRETS n° 57
105
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
reported only slowing down for speed cameras, and one sixth reported themselves unremediated, despite paying £60 and receiving 3 penalty points on their
license (where 12 points brings temporary disqualification from driving), and not
slowing down at all.
7. Conclusion
Drivers are attached to their cars and the possibilities that they offer. They
encourage and maintain particular patterns of household location, work, leisure
and familial and social networks. But they also enable drivers to speed. The type
of road they are driving on, the type of car they drive and the present road, weather
and traffic conditions provide different opportunities for speeding. Those who drive
fast are more likely to have recently been crash-involved. In common with other
driving violations, speeding reduces a driver’s safety margins. The presence of
speed camera housings slows drivers down - they have a general deterrent effect
and constrain on-road speeding behaviour. Issuing speeding tickets produces
aversive emotion and has mixed specific deterrent effects even in the short term,
with half of drivers sensitive to their speed and driving more slowly, one third only
slowing down for speed cameras, and one sixth reporting themselves unremediated and not slowing down at all two months after receiving their ticket. It may be
that drivers who persistently pick up speeding tickets need further remediation,
such as speed awareness or driver improvement courses, in order to induce more
lasting changes in their driving style.
Speed reduction may be achieved by modifying roads or vehicles to reduce the
opportunities for speeding, or modifying drivers and their trip agendas to reduce
the inclinations and presses to speed, or by increasing the likelihood of detection
and penalty for speeding. All of these possibilities should be addressed by a road
risk regulation regime.
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Laboratory: Crowthorne, 1995.
Synthèse INRETS n° 57
107
Conclusion de la première partie
Sylvain Lassarre
Dans un précédent rapport (Delorme, Lassarre, 2005), on avait montré
qu’un tiers du différentiel du risque routier en termes de nombre de tués par
véhicule*kilomètre était attribuable aux vitesses plus basses pratiquées en GrandeBretagne, spécialement sur le réseau des routes nationales et des autoroutes.
Les taux d’infraction aux limitations de vitesse sont au même niveau en France
et en G-B, mais les vitesses moyennes sont plus basses soit à cause de la congestion, soit du fait des limites de vitesse inférieures à l’exception du réseau urbain.
Sur le premier type de réseau des routes principales, la congestion en G-B
semble être à l’origine des plus basses vitesses pratiquées alors que les limites
sont du même ordre qu’en France. Sur le réseau des autoroutes, les vitesses sont
plus basses car la limite de vitesse est plus basse de 20 km/h. On avait prédit à
l’aide d’une analyse synchronique sur l’année 2000, que ce différentiel de risque
pouvait être réduit de 50 % si les comportements des conducteurs français en
matière de vitesse et d’alcool au volant s’alignaient sur ceux des conducteurs
britanniques, sachant que les taux de respect des limitations de vitesse et d’alcool au volant sont loin d’être voisins de zéro en G-B. L’idée que les conducteurs
britanniques sont plus respectueux des limitations de vitesse ne tient pas à l’examen des taux de dépassement des limitations de vitesse qui atteint 50 % et plus
sur les réseaux des autoroutes et en milieu urbain. Le respect des limitations de
vitesse sur le réseau des routes nationales provient d’une congestion du trafic sur
ces routes qui empêchent de dépasser les limites. L’analyse diachronique menée
dans cette première partie entre 2000 et 2004 vient confirmer ces résultats.
Un rattrapage partiel de la France en matière de risque d’être tué sur la
route est attribuable à la baisse des vitesses.
Les systèmes d’observation des vitesses des deux pays fournissent des données qui ne sont pas strictement comparables, mais qui permettent d’estimer des
vitesses moyennes qu’on peut rapprocher avec une bonne marge de confiance et
d’analyser l’évolution entre 2000 et 2004 du comportement vitesse. Sur le réseau
britannique, les vitesses moyennes sont restées stables entre 2000 et 2004. La
seule exception est une baisse des vitesses moyennes et des dépassements de
la limitation de vitesse sur les routes principalement urbaines limitées à 30 mph,
réseau sur lequel sont installées en priorité les speed cameras. Cette légère
baisse concentrée sur un seul réseau ne suffit pas pour entraîner une baisse
consistante du nombre de tués en G-B. Sur le réseau français, la baisse des vitesses hautes pratiquées par les automobilistes (+10 km/h au-dessus de la limitation
Synthèse INRETS n° 57
109
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
de vitesse) est très forte, de l’ordre de 40 à 50 %. Elle entraîne une baisse des
vitesses moyennes sur l’ensemble des réseaux de 5 à 7 % entre 2000 et 2004.
Il s’en suit, en appliquant la relation entre le taux de tués et la vitesse moyenne
en puissance 4, que la baisse à trafic constant du nombre de tués attribuable à la
baisse des vitesses est de l’ordre de 21 % (chiffre confirmé par l’estimation d’un
modèle annuel du risque avec intervention).
La France réduit fortement son retard vis-à-vis de la Grande-Bretagne en
matière de sécurité routière spécialement dans les années 2003, 2004 et 2005
grâce à une réduction des vitesses moyennes pratiquées sur le réseau français,
alors que les vitesses moyennes en G-B n’ont guère bougé. L’analyse des tendances du nombre de tués à moyen terme à l’aide de modèles annuels du risque
routier confirment le statu-quo en G-B et la baisse en France. Notons que d’un
point de vue méthodologique, des modèles simples mais robustes suffisent pour
suivre l’évolution du risque routier. Le cas anglais est particulièrement éclairant.
C’est sur la base de ces modèles que le gouvernement fixe les objectifs à moyen
terme de réduction du risque en termes de fréquence et de gravité et évalue l’efficacité des actions. L’Observatoire National Interministériel de Sécurité Routière
pourrait se servir de cet exemple, qui n’est pas isolé en Europe (OECD, 1994)10,
pour estimer la tendance à moyen terme et évaluer l’impact des mesures prises
au niveau national.
En Grande-Bretagne, l’effet dissuasif des radars n’opère que sur le
réseau urbain alors que cet effet est global en France.
Il est tentant de replacer ces évolutions du comportement vitesse des conducteurs automobilistes dans le contexte plus large des représentations sociales en
matière de vitesse et de contrôle de vitesse qui ont évolué suite à l’introduction du
contrôle automatisé des vitesses par caméra au bord des routes. Il semble que
le système de contrôle automatisé des vitesses ait eu un plus grand impact sur le
comportement des conducteurs en France. L’effet est global et massif en France,
alors qu’en G-B, il est limité au réseau urbain à 30 mph, cible désigné par la Police
pour réduire les accidents de piétons qui sont en surnombre.
Les déterminants du respect des limites de vitesse sont identiques dans
les deux pays et la modération en matière de vitesse est de mise dans les
deux pays.
Le choix d’une vitesse est hautement contextuel selon des ensembles de
situations bien distincts, mais l’adoption d’une vitesse en rapport avec la vitesse
limite obéit à d’autres mécanismes car il s’agit d’une norme sociale ; les comportements semblent plus ancrés, soit pour le respect soit pour la transgression,
dans la durée. Les comportements déclarés de dépassement de la vitesse limite
selon les réseaux (autoroute, rural, urbain) permettent de construire une échelle
de respect–infraction sur laquelle se distribuent les conducteurs. L’effet du genre
10 Voir
aussi le dernier rapport d’un groupe de travail OCDE/CEMT : http ://www.cemt.org/JTRC/
WorkingGroups/RoadSafety/Performance/TS3-report.pdf
110
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
et de l’âge sur la pratique des vitesses est marqué. Les hommes déclarent rouler
plus vite que les femmes. Les conducteurs seniors ( > 60 ans) sont les plus prudents en matière de vitesse.
Parmi les hommes, ceux qui possèdent des voitures puissantes sont encore
plus enclins à la vitesse. La différence des sexes se retrouve au niveau des attitudes vis-à-vis de la vitesse et des limites de vitesse. Il y a un lien statistique très fort
entre attitudes et comportements vitesse quel que soit le pays. En Écosse comme
en France, les comportements de vitesse changent progressivement depuis 1990
vers un plus grand respect des vitesses limites spécialement en milieu urbain.
En Écosse, en 2002, les conducteurs semblent compenser la baisse en milieu
urbain par une hausse des vitesses déclarées sur autoroute et sur le réseau rural.
Les enquêtes récentes (2005) révèlent un effort généralisé à tous les réseaux à
modérer la vitesse par les conducteurs en Écosse et en France.
Un système de contrôle–sanction des excès de vitesse qui ratisse large
en France et cible plus les conducteurs dangereux en Grande-Bretagne,
d’où un impact sur l’ensemble des conducteurs en France.
Il est difficile d’identifier les infractionnistes vitesse « pure », car la dominante
est plutôt poly-infractionniste, avec un comportement de base infractionniste plutôt
généralisé que spécifique pour la vitesse, l’alcool au volant, le port de la ceinture,
le respect des feux rouges, des stops… Le lien entre les infractions sanctionnées
et le risque d’accident est bien documenté et connu à travers des modèles poissonniens (Dahchour, Lassarre, 2000) (Dahchour, 2001). Le système de contrôle
sanction automatisé intercepte un plus grand nombre d’infractionnistes ; certains
sont de nouveaux entrants dans le monde de la répression de la délinquance routière, d’autres sont des habitués. Un lien plus spécifique entre risque d’accident
et infractions de vitesse sanctionnées avec le système de contrôle traditionnel ou
avec le système automatisé semble exister sur des données écossaises (Stradling
et al., 2003). Ce lien au niveau du risque individuel n’a pas été mis en évidence
sur des données françaises (Lassarre, 2005). Le système automatisé en France
ratisse plus large que le système automatisé britannique et va chercher des infractionnistes « légers » qui ne sont pas spécialement des conducteurs à risque.
L’effet de dissuasion suite à l’arrivée de l’amende et de la perte de points
est immédiat grâce au système automatisé, et les conducteurs déclarent réduire
ensuite leur vitesse dans les deux pays. Le profil des conducteurs pris par le système automatique mériterait plus de recherche. Compte tenu des stratégies de
certains conducteurs aux lieux des radars fixes et de l’extension de l’usage des
radars automatiques mobiles, il n’est pas surprenant de prendre dans les filets
de nouveaux infractionnistes, alors que les infractionnistes habituels « vitesse »
développent des stratégies d’évitement. D’après Corbett (1995), quatre comportements se distinguent : les conformistes qui respectent habituellement les limites
de vitesse, les dissuadés qui ont réduit leur vitesse pour ne pas se faire prendre,
les manipulateurs qui réduisent la vitesse uniquement à l’approche des radars,
les défiants qui continuent à rouler au dessus des limites de vitesse.
Synthèse INRETS n° 57
111
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Une montée en puissance rapide du système en France et plus progressive en G-B avec le même niveau d’acceptabilité par la population.
C’est plus par l’effet de diffusion de l’information par le réseau social que les
conducteurs ont changé de comportement vitesse en France que par la croissance de la densité des radars automatiques fixes (Lassarre, 2005). Les radars
en France sont placés sur des sites très circulés du réseau (autoroute et route
nationale en rase campagne et périurbain) alors qu’en G-B ils se situent en milieu
urbain. Il s’en suit que les conducteurs français ont plus de chance d’être contrôlés lors de déplacements de loisirs que les conducteurs anglais. Les trajets domicile–travail semblent être contrôlés avec un taux semblable dans les deux pays.
Le nombre de conducteurs ayant reçu un ticket vitesse commence à être impressionnant en France et G-B. Plus de 12 millions en G-B depuis 1992, et deux millions depuis 2003 en France. La part de la récidive n’est pas connue.
Au niveau de l’acceptabilité du système de contrôle automatique, environ
70 % des conducteurs approuvent le système dans les deux pays (Assailly et al.,
2005). Les dimensions pertinentes de l’acceptabilité sont : la crédibilité mesurée
par l’adhésion aux objectifs du contrôle sanction automatisé (prévention versus
répression + reconnaissance du critère de choix des emplacements), la fiabilité du système mesurée par l’estimation du risque d’erreur d’identification des
conducteurs, l’évaluation de la pertinence du mode d’installation mesurée par la
signalisation des radars, l’efficacité perçue mesurée par l’évolution des vitesses
pratiquées, la détection des conducteurs dangereux et l’amélioration de la sécurité routière ; et enfin, l’efficacité, d’un point de vue prospectif, mesurée par l’impact sur les accidents et sur la sécurité routière. Soumises à l’analyse factorielle,
ces dimensions se résument à une échelle unidimensionnelle d’acceptation du
contrôle sanction automatisé allant des conducteurs les plus adhérents au système aux plus réfractaires en passant par les hésitants.
Pourquoi ces différences en matière d’action de sécurité sur la vitesse ?
La réalité du changement en France en matière de respect de limitations de
vitesse est clairement établie et une grande part est attribuable à l’introduction du
contrôle automatisé des vitesses. L’effet d’un tel système est moindre en GrandeBretagne car plus diffus et limité au réseau urbain. Les conducteurs, qui sont les
premiers acteurs concernés du système routier, se sont adaptés en baissant leur
vitesse, dans leur majorité, en France. Mais le consensus est partiel sur l’acceptabilité de ce système et des stratégies d’évitement des radars fixes où des caméras
se font jour en Grande-Bretagne et en France. Il y a place pour des recherches sur
les dynamiques de comportement et de représentation des conducteurs dans le
domaine de la vitesse. Les vitesses sont régulées de manière fine localement sur
la route, mais aussi socialement, et l’intervention des pouvoirs publics en matière
de régulation des vitesses doit s’adapter à cette complexité. L’interrogation sur
« quels sont les moyens et les stratégies d’action mis en œuvre par ces autres
acteurs ? » fait l’objet de la seconde partie.
112
Synthèse INRETS n° 57
Acceptability of radar and driver’s behaviour in the UK
Bibliographie
J.-P. Assailly, J.-P. Cauzard, P. Delhomme, S. Lassarre, I. Ragot. L’acceptabilité.
In : Évaluation de l’impact du contrôle automatisé sur la sécurité routière,
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England : the first self-report survey. Accident Analysis and prevention,
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M. Dahchour, S. Lassarre. L’analyse du risque automobile en 1998. Rapport
DERA no 2000–2001, convention DSCR–INRETS no 99 70 013, Arcueil,
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M. Dahchour. Les assureurs français ont-ils intérêt à utiliser les points de permis
pour tarifer l’assurance automobile ? Assurances, 69(3) : 423–462,
2001.
R. Delorme, S. Lassarre. L’insécurité routière en France dans le miroir de la
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S.G. Stradling, M. Campbell, I.A. Allan, R.S.J. Gorrell, J.P. Hill, M.G. Winter and S.
Hope. The Speeding Driver : Who, How and Why ? Edinburgh : Scottish
Executive Social Research, 2003.
Synthèse INRETS n° 57
113
Deuxième partie
Les contextes d’action
Les stratégies et les acteurs
Synthèse INRETS n° 57
115
Introduction
Robert Delorme
L’objet de cette partie est de connaître les acteurs, les stratégies et les contextes de la gestion de la vitesse en Grande-Bretagne et en France afin de constituer un matériau d’information sûr pour la comparaison. Une découverte de cette
recherche aura été celle de la méconnaissance ou, au mieux, de la négligence des
cadres et des mécanismes organisationnels au sens large dans laquelle se tient
encore couramment la comparaison internationale (Delorme et Lassarre, 2005).
Les données disponibles sur l’accidentologie routière internationale sont principalement constituées de statistiques et d’analyses privilégiant sans surprise les
aspects mesurables et quantifiables. Elles offrent un matériau certes utile mais
qui reste trop partiel. Les aspects structurels, institutionnels, organisationnels, les
stratégies d’action et la caractérisation des acteurs demeurent une quasi terra
incognita, notamment pour deux pays aussi proches que la France et la GrandeBretagne.
Il existe certes dans chacun de ces deux pays des évocations d’expériences faites dans l’autre pays. Ainsi en va-t-il en France de la politique de contrôle
sanction automatisé. Elle n’a pas été développée sans référence à l’expérience
britannique plus ancienne qu’elle. Mais le cœur du problème est qu’au-delà de
cet exemple ponctuel, il n’existe pas de connaissance ni de vision d’ensemble
structurée des contextes d’action au sein desquels des actions particulières se
déploient. Or, l’hypothèse d’ensemble que nous souhaitons mettre à l’épreuve
est que :
•• les actions particulières de sécurité routière, dont celles portant sur la
vitesse, sont liées, dans un lien de dépendance, à leurs contextes d’action
propres ;
•• ces derniers dépendent eux-mêmes de contextes institutionnels et
organisationnels ;
•• les régularités d’action qui en procèdent forment des régimes d’action, d’action régulatrice dans le cas présent de réduction recherchée de
l’insécurité ;
•• ces régimes se révèlent comme compositions unifiées et cohérentes au
niveau national notamment ;
•• dans une perspective « descendante » l’action sur la vitesse dans chaque
pays est sous l’influence du cadre ou contexte d’action particulier propre à
ce pays ;
•• en tenant compte de ce levier qu’est le régime de régulation propre à chaque pays, le débat sur l’action de sécurité routière gagnerait en cohérence,
Synthèse INRETS n° 57
117
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
en vision d’ensemble et en qualité de la comparaison internationale reposant sur une connaissance plus maîtrisée de ses limites et de ses apports
possibles. Contextes, stratégies, actions et acteurs composent ainsi le terrain de l’analyse qui suit.
En premier lieu, s’impose la nécessité de caractériser les contextes britannique
et français. C’est le matériau sur lequel repose la cohérence de l’argumentation.
Il recouvre les aspects structurels, les politiques de sécurité routière, les cadres
institutionnels et organisationnels ainsi que les acteurs des actions de sécurité
routière. Cette caractérisation d’ensemble est conduite dans les chapitres 6 à 10.
Un effort spécial est fait sur le cas britannique tant sa connaissance précise, libérée des simplifications spontanées, fait défaut pour une étude conduite du point
de vue français et est destinée à produire de la connaissance pour le cas français d’abord. Un exemple de simplification spontanée est l’idée d’une discipline
« du conducteur britannique » plus grande que celle « du conducteur français ».
Un panorama de la politique britannique relative à la vitesse, au niveau national
principalement, est proposé par R. Allsop (chapitre 6). Il est suivi d’un panorama
au niveau local par K. Spence, qui livre les enseignements de son expérience
de road safety officer (chapitre 7). Une mise en perspective de l’organisation et
des acteurs articulant les deux niveaux national et local est faite par R. Delorme
(chapitre 8). Le contexte français récent de la politique de sécurité routière est
documenté dans le chapitre 9 par H. Chomienne.
Les expériences comparées du contrôle sanction automatisé dans les deux
pays sont le deuxième thème. Elles sont explorées par L. Carnis dans le chapitre 10. Malgré la nouveauté de l’expérience en France et le faible recul, la comparaison fait ressortir des caractéristiques nettement différenciées.
Une meilleure information sur les acteurs, le troisième thème, oblige à distinguer au moins les trois catégories que sont les usagers de la route de tous
ordres, les acteurs publics et les acteurs « non gouvernementaux », associations
et organisations non gouvernementales (ONG) et autres (assurances, entreprises, constructeurs de véhicules, etc.). Les premiers comprennent les conducteurs
et autres usagers de la route (deux roues, piétons, etc.) L’évolution des attitudes
des conducteurs a été étudiée dans la première partie. Celle des autres usagers n’a pas été abordée directement compte tenu de l’ampleur des ressources
qu’elle aurait exigée. Elle est cependant présente indirectement dans les stratégies des ONG évoquées plus loin. Le jeu des acteurs publics est une partie
intrinsèque des politiques et actions publiques traitées dans les quatre premiers
chapitres de cette partie et ne justifie donc pas un traitement à part ici. Il reste les
ONG. Plutôt qu’une revue d’ensemble, la stratégie suivie a été de rechercher une
connaissance en profondeur sur deux ONG d’importance significative et reconnues — RoadPeace en Grande-Bretagne et la Ligue contre la violence routière
(LCVR) en France. Il en ressort un témoignage de responsables engagés dans le
premier cas, A. Aeron-Thomas, A. Saudrais-Hough et B. Chaudry (chapitre 11). D.
Chabanet propose une analyse distanciée des deux ONG dans le chapitre 12.
118
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 6
Speed management in Great Britain
and the use of safety cameras
Richard E. Allsop
Abstract
Safer speeds is one of the ten themes of the British government’s current road
safety strategy, launched in March 2000. This part of the strategy is based firmly
upon the results of a year-long speed policy review which began in October 1998,
was reported upon concurrently with the launching of the strategy, took account of
extensive earlier research, and continues to be followed up by further research. Its
implementation through speed management relies on the interworking of central
government, local government and the police forces of Great Britain, and the support of all other stakeholders in road safety and of the general public as drivers,
as road users in other ways, and in other aspects of everyday life. An important
element in speed management in the first five years of the strategy has been the
extensive and systematic use of safety cameras in the enforcement of national
and local speed limits with the help of a new funding mechanism. This chapter summarises and illustrates the background to current speed management in
Britain, the relevant arrangements among central government, local government
and the police, and the way in which widespread use of safety cameras has been
achieved.
1. Review of speed policy
The British government’s integrated transport policy was set out by the
Department of the Environment, Transport and the Regions (DETR), predecessor of the Department for Transport (DfT), in a White Paper (DETR, 1998) which
confirmed an earlier commitment to develop a road safety strategy for the period
from the year 2000. In the course of developing that strategy, and in response to
widespread concerns (e.g. PACTS, 1996) about the contribution of inappropriate
speed to death and injury on the roads, the DETR carried out a review of speed
management policy starting in October 1998, whose report (DETR, 2000b) was
published simultaneously with the strategy itself (DETR, 2000c).
Synthèse INRETS n° 57
119
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
1.1. Objectives
The review was “to develop a speed policy that takes account of the contribution of reduced speeds to environmental and social objectives as well as to
road safety” and policies recommended “were to be practical and cost-effective”
(DETR, 2000b), thus countering possible assertions that speed management was
concerned with safety regardless of consequences for other social and economic
goals.
1.2. Coverage
The review undertook consultation and assembled published evidence concerning the effects of speed on road safety and on other social goals and the
economy, observed speeds on different kinds of road, people’s attitudes to speed,
how speed limits are set and what measures are available to influence drivers’
choice of speed. In particular, account was taken of extensive research then being
completed into the effect of drivers’ speeds on different kinds of road upon the
frequency of accidents on roads of those kinds (Taylor et al., 2000), which was
later supplemented in respect of rural roads by further research of a similar kind
(Taylor et al., 2002).
1.3. Recommendations
Analysis of the assembled information led the review to recommend a strategic
approach to speed management to gain the understanding and respect of drivers for a system of speed limits based on a national framework that encourages
consistency between local traffic authorities in setting limits whilst allowing those
authorities flexibility in relation to the nature of their roads and other local considerations. This would provide a foundation for working to change drivers’ attitudes
and behaviour, and for acceptance of enforcement action against those who nevertheless fail to comply with speed limits.
A range of more specific recommendations was made for the use of various
speed management measures, and for further research to fill relevant gaps in
knowledge. Concerning speed cameras in particular, the review reported (p34)
that “Actions should include developing a new financial system using part of the
fine revenue to repay the operational and administrative costs of speed cameras
to the police, courts and local authorities” and “Speed cameras will continue to be
a way of using police resources to best effect”. It went on to recommend “more
intensive use [of cameras] at existing sites, more cameras at new sites with either
a history of speed related collisions, or where there is a known speed related
problem, and reducing trigger speeds to those in [relevant national enforcement]
guidelines”. The last recommendation would have the effect of making the margin
by which a driver could exceed a speed limit at a camera site without incurring a
penalty the same as the margin usually allowed by police officers using conventional speed measuring equipment in person.
120
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
2. Strategy for safer speeds
Prevailing speeds are determined by the choices made by drivers and riders on
each stretch of road as they find it. They get much of the benefit of higher speed
immediately for themselves and their associates in terms of earlier arrival, and
possibly the pleasure of going faster. They do bear some of the cost themselves
(mainly increased running costs and risk to themselves and their associates, and
through insurance many of the material and medical costs of accidents) but they
are known to underperceive these costs. They do not themselves bear any of the
human costs of accidents to others, or much of the resulting damage to the environment. For these reasons, there is a tendency inherent in the road traffic system
for all drivers and riders to go faster than it is good for themselves or society.
All this means that responsible government must seek to influence speed, and
in many respects to moderate it, and this means influencing the choices not just
of a less responsible minority, but of all users of motor vehicles, even those who
may be tempted to think of themselves as the most responsible, even altruistic, of
citizens. All are liable to drive or ride at speeds inappropriate to the circumstances,
and the ultimate aim of speed management is to achieve appropriate speeds by
all drivers and riders in all circumstances.
The government’s road safety strategy and casualty reduction targets for 2010
(DETR, 2000c) identified Safer speeds as one of the ten themes of the strategy
and adopted most of the findings and recommendations of the review of speed
policy (DETR, 2000b). Progress so far and further actions envisaged in implementing this part of the road safety strategy were reported in the first of the threeyear reviews (DfT, 2004e) that were envisaged in the strategy itself. A further
White Paper on transport policy (DfT, 2004d) endorsed the road safety strategy
and its first three-year review.
2.1. Appropriate speeds and speed limits
Imposing a speed limit on a stretch of road does not address the aim of achieving appropriate speeds directly. It does so indirectly by setting a maximum permitted speed, in the reasonable expectation that speeds chosen having regard to
the imposed limit are more likely to be appropriate than would be the case if the
limit were higher (or if there were no limit at all, as was the case on many roads
in Britain until 1965). Where there is a speed limit, speed higher than the limit is
described as excess speed, and it is driving with excess speed that constitutes
an offence. Driving with inappropriate speed within the limit constitutes an offence
only if the speed is so inappropriate as to amount to careless, inconsiderate or
dangerous driving within the meaning of the Road Traffic Act 1991.
The relationship between excess speed, as defined and addressed by imposing a speed limit, and inappropriate speed, which speed management ultimately
seeks to address, may be illustrated by the following table, which shows the resulting four possibilities in respect of the speed chosen by a driver or rider in given
circumstances.
Synthèse INRETS n° 57
121
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Appropriate speed
Inappropriate speed
Speed within the limit
No problem
Not addressed by the limit
Speed above the limit
(excess speed)
Law requires speed to be
reduced for the common good
even though it is appropriate
Addressed by the limit to the
extent that bringing speed below
limit makes it less inappropriate
A speed limit could be a completely effective means of speed management
without requiring anyone to travel more slowly than is appropriate in the circumstances only if all speeds fell in the upper left or lower right hand cells of the table
and all drivers and riders complied with the limit. This will clearly never be the
case, but extent of approximation to it may be a useful criterion in judging how
reasonable an existing or proposed limit is for a given stretch of road and its traffic.
In other words, a reasonable limit is one such that speeds below it are appropriate
and speeds much above it are inappropriate for most drivers and riders in most
circumstances, so that not too many are denied the right to travel at higher but
nevertheless appropriate speeds, and not too many speeds within the limit are
nevertheless inappropriate — though there will always be some of these, notably
when weather or other conditions call for greater caution than is usual for that
stretch of road. The responsibilities of central and local government for setting of
speed limits in Great Britain are outlined in Section 3.1.
Clearly then, speed limits cannot address all kinds of inappropriate speed, but
this fact is no reason for failing to use them to full effect to deal with the kinds of
inappropriate speed that they do address — namely speeds that are usually inappropriately high for the stretch of road concerned. If speed limits are to be effective
and respect for them as traffic law is to be maintained (or, where it has been lost,
regained), they need either to be largely self-enforcing (like 20 miles/h or 30 km/h
limits made so by road layout), or perceived by the majority of drivers and riders
to be reasonable and to be enforced.
2.2. Urban and rural speed management
Like all other aspects of road safety which require action at the local level,
speed management should be addressed in the context of a systematic local
approach to road safety management in the context of other policies for the
local area and relevant national policies and guidance. In Britain this approach
is known as urban safety management in respect of urban areas and rural safety
management in respect of rural areas, and is the subject of guidelines from the
Institution of Highways and Transportation (IHT) (1990, 1999) and the DfT (2003).
Both recognise that vehicular traffic and pedestrian movement are part of the life
of local communities and affect every aspect of their life. They establish a vision
for safer road use and a proactive rather than reactive approach to achieving it,
and guidance on the use of road safety reengineering to contribute to them has
been assembled (Department for Transport, Local Government and the Regions,
2001a). Some aspects of safety management, including the principles of speed
122
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
management, are common to urban and rural areas, but others, including the
practicalities of speed management, differ substantially between the two kinds of
area because of differences in the form and mix of functions of the road network
and in the mix of road uses of different kinds.
2.2.1. Urban speed management
The more recent guidelines for urban safety management (DfT, 2003) draw
together the latest experience from various European countries, as documented
by a research programme known as DUMAS (Developing Urban Management
and Safety), including the British Gloucester Safer City project (Department for
Transport, Local Government and the Regions, 2001b; Mackie and Wells, 2003).
The guidelines describe urban safety management as using an area-wide and
multi-disciplinary approach that considers safety in the whole area to reduce the
incidence of accidents of all kinds, including the scattered ones as well as those
that are concentrated at high-risk sites. This involves many aspects of urban management (traffic engineering and law enforcement, road engineering and maintenance, public transport, land use planning, economic development, environment,
health, education and welfare) in a strategy of traffic safety for the whole urban
community.
Education, training, public information, enforcement and town planning all contribute to the strategy, but safety engineering is a main focus of urban safety
management and is the way the road environment will be changed. There are two
main elements to applying safety engineering to a road network:
–– managing traffic to achieve a safer distribution;
–– managing speed to achieve a safer circulation.
Central to achieving this in practice is seen to be the concept of the functional
hierarchy of roads, first enunciated in the now historic Buchanan Report (Ministry
of Transport, 1963) and developed progressively over the four decades since
then — see for example Section 11.7 of Transport and the Urban Environment
(IHT, 1997). The relevance of the hierarchy to urban speed management can be
summarised as follows.
In an ideal situation roads can be categorised by their functions, as living space
as well as routes for access and longer-distance movement, into five tiers that
have come to be known as primary distributors, district distributors, local distributors and pedestrian streets, and these five categories of road are complemented
by routes for walking and cycling. However, in a real network, many roads may not
be identified with just one tier and compromises have to be made because several
functions have to co-exist on the same road.
Ideally roads in each tier should link with roads of the same tier or one immediately above or below it in the hierarchy. This gives drivers a clear impression of
changes in the road type and therefore an indication of the safe speed at which
to travel. It also helps to avoid fast-moving vehicles travelling directly from a primary or district distributor to a local distributor or access road, causing danger for
pedestrians and cyclists and also for users of other vehicles.
Synthèse INRETS n° 57
123
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Access roads and the three tiers of distributors together provide routes for all
journeys by motor vehicles in the area concerned. Corresponding provision for
walking and cycling should begin by identifying the pattern of journeys that people in the area concerned would like to make on foot or cycle. The road system
should then be adapted to create a network of safe and attractive routes for this
pattern of journeys. Routes will typically consist of a mixture of sections of footpath or cycle path separate from any carriageway, wholly pedestrian areas with
or without admission of cyclists, footways or cycle tracks alongside carriageways,
and carriageways or other surfaces shared with motor vehicles. Where routes
cross appreciable flows of motor vehicles, careful attention should be given to the
location and design of the crossing point and to the speed of vehicles in its vicinity. Where the routes are not separated from carriageways or where surfaces are
shared with motor vehicles, the layout should moderate the speeds of the latter,
so that motor traffic uses each road in ways that are consistent with the safety and
convenience of pedestrians and cyclists.
In the necessarily gradual process of adapting existing road networks in the
light of the principles of the functional hierarchy, each road in the network needs to
be examined in terms of its current function and its observed performance. Where
there are problems in terms of traffic speeds, the level and mix of traffic, risk or
environmental quality, there are two lines of action:
–– alter the mix of functions, notably by transferring some or all vehicular traffic
to other roads;
–– make changes, probably including speed management measures, to
improve the performance of the existing functions.
Programmes of local area schemes are gradually but systematically modifying the road networks of British towns and cities area by area to contribute
to objectives of safety, environmental improvement and social inclusion whilst
not inhibiting the movement of people or vehicles in ways that are damaging to
local economies or the quality of life. Speed management, notably in the form of
20 miles/h (~30 km/h) zones (which may well eventually extend to all urban roads
except identified traffic corridors), 20 miles/h sections on traffic corridors where
the mix of functions (especially use by pedestrians and cyclists) is inconsistent
with the national urban speed limit of 30 miles/h, and lower speed limits than
20 miles/h in specially adapted residential areas known as home zones, is playing
an increasing role in this process. The rate of progress depends strongly on the
priorities in the minds of local decision-makers, and can probably best be accelerated by development of a strategy which wins the consent, and if possible the
enthusiasm, of local people and their elected representatives.
2.2.2. Rural speed management
The concept of rural safety management is emerging as a counterpart of urban
safety management, but is at an earlier stage of development. The essential difference in traffic and therefore traffic safety terms between urban and rural areas
is that, whereas in urban areas all roads except access roads that do not provide
124
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
through routes are liable to congestion at busy periods, so that much of the risk of
death or injury arises from density of traffic and competition for space, much of the
local rural road network other than heavily loaded long-distance routes consists of
roads provided to overcome separation of scattered settlements notwithstanding
the low level of traffic, so that risk arises from high flows at high speeds on the
busy routes, and high speeds on rather empty roads elsewhere.
On both kinds of road, speed is a particular problem where they pass through
villages and approach the edges of larger built-up areas. Whilst the larger number of accidents happen on the main roads, especially on two-lane two-way
main roads, the accident rate per vehicle-km travelled can be higher on the
relatively little-used minor roads, and risk there can be a particular concern to
those walking, cycling, riding animals or moving livestock — a mix of uses which
includes both work and leisure activities, in proportions which reflect the culture
and nature of economic development of the region. These features present a
special challenge in terms of speed management, which is therefore forming
the largest single element of the emerging concept of rural safety management
(IHT, 1999).
The two key elements:
–– managing traffic to achieve a safer distribution;
–– managing speed to achieve a safer circulation;
that have emerged as central to urban safety management are also central to
rural safety management, as is the concept of the functional hierarchy of roads.
The levels of the hierarchy are, however, not yet so clearly established in the rural
context as in the urban (see for example DfT, 2002).
In the hierarchy, the distinction between long-distance, usually essentially
inter-urban, routes in the form of motorways, other dual-carriageway roads and,
where traffic demand is lower, single-carriageway roads on the one hand, and
the network of more local rural roads on the other, is conceptually clear. It is
also usually clear on the ground where the long-distance single carriageways are
highly engineered roads with relatively few junctions with more local roads. The
distinction is less clear in situations where a pre-existing local road has, with only
limited adaptation in form, evolved in its function to become part of a long-distance
route, and in such situations, rural safety management would indicate early action
either to replace that road in the long-distance network or to adapt it better to its
function there.
Among more local rural roads, however, categories to distinguish between the
rural counterparts of the urban distributor and access functions (including possibly
different levels of distributor), and to identify separately those, usually narrowest
and least engineered, roads where provision for motor vehicles should clearly be
subsidiary to provision for other kinds of traffic, have yet to be fully defined in a
way that carries over soundly between regions and countries with different geography, topography and histories of rural development, even among the highlymotorised countries and regions.
Synthèse INRETS n° 57
125
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Nevertheless, the broad shape of rural safety management is emerging,
comprising:
–– identification of the existing road hierarchy, as appropriate to the area under
consideration, and any need for adaptation to it, including speed management, in the light of mismatches between form and functions of particular
roads associated with safety problems;
–– identification and treatment of high-risk sites and route sections, which will
be mainly on the more heavily used roads;
–– systematic and consistent route treatments for all heavily-trafficked routes,
including consistent layout of junctions – especially provision for opposed
turning traffic, and speed management in the form of consistently chosen
and enforced limits reinforced by adaptation to the layout and appearance
of the road;
–– systematic and consistent treatment of roads passing through villages, with
speed management and speed-reducing layout in and on the approaches
to the villages;
–– signing, marking and adaptation to the layout of more local roads of all kinds
to discourage use by inappropriate traffic and encourage safe use by appropriate traffic, again including speed management.
As with urban safety management, effective delivery of this approach will take
time and will require involvement of stakeholders in the development and implementation of a strategy which wins the consent, and if possible the enthusiasm, of
local people and their elected representatives.
2.3. Information and enforcement
Speed limits and the law relating to them are explained in the widely available Highway Code, familiarity with which is a requirement of the driving test,
there are national requirements for the signing of speed limits at the roadside, and
for consultation with local people about local changes in limits. In addition, as a
further development of longstanding central government public information and
publicity concerning road safety, the road safety strategy has since the year 2000
included an innovative road safety publicity campaign known as THINK!, one of
whose priorities is to encourage drivers and riders to slow down, with the aim that
speeding should be seen as just as anti-social as is drink driving. A range of NonGovernmental Organisations also contributes to public information and publicity
material related to road safety, including the choice of speed.
Police enforcement based on measurement of speeds by police officers in
person has been supplemented by widespread use of speed cameras at thousands of sites, the majority of them in built-up areas. This has resulted in an
order of magnitude increase in the detection of speeding offences and a corresponding deterrent effect. Camera detection identifies the vehicle and thus via
national records its registered keeper. The keeper is notified of the time and place
of the offence and is required to name the driver or be penalised for not doing so.
126
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
Detection of speeding by either means normally results in the driver having to pay
a fixed penalty of £60 (about €90) and having their licence endorsed with three
penalty points. The driver can choose to be prosecuted instead of accepting these
penalties, but few do so without strong reasons, because they are unlikely to be
acquitted by the court and may well be required to pay more and might receive
more penalty points if convicted. The penalty points remain in effect for three
years, and accumulation of 12 penalty points results in disqualification from driving for a year. If the police consider a particular offence of speeding to be severe
enough to warrant a higher penalty, they have the power to prosecute the driver,
and if the court then finds the driver guilty, it has the power to impose a larger fine
or more penalty points or both.
3. Government structures for implementation
Great Britain comprises England, Scotland and Wales, with populations of
50, 5 and 3 millions respectively. Parliament at Westminster and the government
departments responsible to it have responsibility in some respects for the whole
of Great Britain, whilst in other respects responsibility for Scotland is devolved
to the Scottish Parliament and its Executive, and in somewhat different respects
that for Wales is devolved to the Welsh Assembly. Responsibility for road safety
is devolved and some arrangements in Scotland and Wales differ in detail from
those in England, but these differences are too slight to affect comparison with
France. The arrangements described in the rest of this section are those prevailing in England.
3.1. Central government
National and local implementation of the government’s road safety strategy lies
mainly in the areas of road user behaviour and road safety engineering, because
responsibility for vehicle-related measures lies so largely with the EU. An important mechanism for such implementation is that each highway authority in Britain
is responsible under the Road Traffic Act 1988 for investigating and taking steps
to reduce the occurrence of road accidents in its area. This includes responsibility
for relevant education, training and public information for road users, as well as for
road safety engineering on its road network. The highway authority for the national network of long-distance roads in England is the Highways Agency of the DfT.
Local authorities with transport responsibilities as described in Section 3.2 are the
highway authorities for the rest of the road network, known as local roads.
Under the integrated transport policy (DETR, 1998; DfT, 2004d) and the
Transport Act 2000, each such authority submits to central government a 5-year
Local Transport Plan (LTP) (DETR, 2000a; DfT 2004a) developed by the authority
in consultation with the transport policy staff of the central government office for
its region. Each LTP is updated annually by means of an Annual Progress report.
The first round of LTPs was produced in 2000 to cover the period 1 April 2001 to
31 March 2006. The second round for publication in March 2006 will cover the
Synthèse INRETS n° 57
127
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
period 1 April 2006 to 31 March 2011; this will differ in a number of ways from the
first round to reflect, for example, developments in regional government and in
the responsibility of local authorities for managing traffic congestion on their road
networks, and a general encouragement to authorities to think laterally across the
range of local policy issues, but there are no substantial changes in respect of
road safety in particular. The LTP system introduced in 2000 was not wholly new,
but was a substantial enhancement of a predecessor system, which had operated
in evolving ways since 1974.
Since the flow of funding from central government to local authorities for transport purposes is in principle and in practice strongly influenced by these LTPs and
the local authorities’ progress in implementing them, and since the LTP includes
a local road safety strategy, this system represents a potentially powerful means
of encouraging local government activity in implementing the government’s road
safety strategy.
An authority’s local road safety strategy should include:
–– local casualty reduction targets (initially to 2005, now to 2010);
–– assessment of current problems;
–– how local people and organizations will be involved in efforts to reduce
casualties;
–– how road safety issues are taken into account in other local policies;
–– performance indicators updated annually, including a prioritized list of proposed schemes and their estimated effects (and later their actual effects);
and
–– education, training and publicity measures to be undertaken.
This system provides the context of central government policy and influence
in which local authorities develop and implement their policies and measures for
road safety and thus for speed management. In this latter respect, however, these
wide-ranging general arrangements have been supplemented by the system of
safety camera partnerships described in Section 4.
Speed limits applying in general to vehicles on any particular road are of two
kinds: national and local. National limits are set by central government with the
approval of parliament and comprise a limit of 70 miles/h (113 km/h) on motorways
and other non-built-up dual carriageways where no other limit is signed, a limit of
60 miles/h (97 km/h) on non-built-up single carriageways where no other limit is
signed, and a limit of 30 miles/h (48 km/h) on built-up roads where no other limit is
signed. All other limits are local limits set and signed by the highway authority for
the road concerned, as are the boundaries of the 30 miles/h limit in each built-up
area, with the help of guidance from central government and subject to certain
requirements in respect of limits lower than 30 miles/h. Such guidance is longstanding and had been last revised in 1993, until under the road safety strategy a
new revision began in 2004 (DfT, 2004c) for completion by the end of 2005 and
supported by research outputs which will be available from TRL Limited www.
trl.co.uk concerning accident analysis on rural roads. Lower limits set by central
128
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
government with the approval of parliament and consistent with EU directives
apply to some particular categories of vehicle.
In respect of public information, the main vehicle nationally is the DfT THINK!
Campaign, and local authorities are encouraged to use material from this campaign in their own education, training and public information work, both directly
and in their own development of locally relevant material.
3.2. Local government
Local government in England differs by type of area. In Greater London (population: 7 million) there are a strategic authority led by the Mayor and 33 local
authorities, and in respect of transport, the strategic authority formulates Londonwide strategy in relation to central government policy and receives funding accordingly from central government to supplement its other sources of funding. The
local authorities then make Local Implementation Plans (LIP) consistent with the
London-wide strategy and in turn receive funding accordingly from the Mayor to
supplement their other sources of funding.
In each of 6 Metropolitan Counties outside London, with populations totalling
nearly 11 million, the county is divided into between 5 and 10 districts, each of
which is responsible for the LTP for its area and relates to central government
accordingly. The rest of England consists of 40 counties, of which 17 are responsible for the LTPs for the whole of their areas and relate to central government
accordingly, 19 are similarly responsible for most of their areas, but also include
areas (mostly cities or large towns) governed separately by so-called unitary
authorities which are responsible for their own LTPs, and the other 4 are governed
wholly by several unitary authorities. There are 44 unitary authorities, which are
not whole counties. This means that outside London there are about 100 authorities each responsible for its own LTP. Their populations lie mainly in the range
80,000 to 800,000, with 5 between 1.0 and 1.4 million.
Each local authority responsible for a LTP (or LIP in London) has a team of
staff responsible for implementing the plan, procuring services from consultants
and contractors as required to do so. These staff include managers responsible
for road safety engineering in the local road network, and a Road Safety Officer
who is responsible for education, training and publicity work related to road safety,
and who often works closely with staff responsible for travel awareness – that is
public information encouraging people to make travel choices that are healthier
and more environmentally friendly. Road safety engineers and officers are typically both active in speed management work.
As an example, the City of Derby, with a population of about 230,000 is a unitary authority in the County of Derbyshire, which has a total population of about
1 million. The City and County Councils agreed to produce the Derby Joint LTP
(2000) and its draft successor (2005), covering the City of Derby and those other
parts of Derbyshire, which form its immediate travel-to-work hinterland, with a
total population of about 250,000. Road safety and travel awareness are dealt
Synthèse INRETS n° 57
129
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
with together in the year 2000 LTP. Local safety schemes, including traffic calming schemes, 20 miles/h zones, and consideration of so-called home zones with
limits lower than 20 miles/h, form large element of the local road safety strategy,
which also states that the City and County Councils have agreed with the police a
strategy for speed management by enforcement where traffic calming measures
are not practicable. The updated strategy for safer roads in the year 2005 draft of
the successor LTP includes a continuing speed management programme comprising engineering measures and participation in the Derbyshire Safety Camera
Partnership described in Section 4.3.
3.3. Police forces
Each part of Great Britain is policed by its own local force under the command
of its Chief Police Officer, overseen by a local Police Authority and responsible
to central government. In addition to the influence of central government policy,
consistency of policing, subject to local requirements, is helped by voluntary collaboration between forces through Associations of Chief Police Officers. A local
police force typically covers a number of highway authority areas and works with
these authorities so that enforcement of the traffic law, including speed limits, contributes to implementation of those authorities’ road safety strategies.
3.4. Wider involvement
In addition to central and local government organisations with formal responsibilities for road safety, many non-governmental organisations contribute in
various ways to implementation of the government’s road safety strategy, and
most of these are concerned to some extent at least about speed management.
Government on all substantial relevant decisions consulted such organisations.
One important group of organisations represent the interests of different kinds of
road user: pedestrians, cyclists, motorcyclists, car users, road freight transport
operators and users, and bus and coach operators, to name the principal ones.
Another important group consists of organisations that articulate concern about
road safety to raise public awareness and support or press for government action.
For example, one of these organisations which operates mainly at the national
parliamentary level and had previously articulated the problem of inappropriate
speed (PACTS, 1996) issued in the context of the government’s road safety strategy an update of its earlier picture of the problem and a list of recommendations
for action by government to tackle it (PACTS, 2002).
4. The use of safety cameras in Great Britain
The use of speed and red light cameras was recommended in 1988 by the
Road Traffic Law Review (Department of Transport and The Home Office, 1988)
and provided for in the Road Traffic Act 1991. Soon after this legal framework
for the use of approved types of camera had been established they began to be
deployed and were found to be cost-effective, but the rate of deployment was
130
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
limited by the resource costs of the installation and operation of the cameras and
the processing of detected offences, because it was not at that time permitted for
these costs to be repaid to the organisations bearing them from the money paid in
penalties by the detected offenders. To address this problem, and in anticipation of
the recommendation of the review of speed policy, HM Treasury set financial rules
for a 2-year pilot scheme starting in April 2000 in 8 police force areas, with the
intention that a wider system would follow if the pilot scheme proved successful.
Under this scheme the police forces would set up partnerships with the highway
authorities in their areas to increase the intensity of use of existing cameras and
install additional cameras on the basis that the costs of doing this and of processing the detected offences would be repaid from the income from penalties paid by
the offenders detected by the cameras. A board was set up by central government
in 1999 to run the pilot scheme and oversee the work of the resulting partnerships.
This meant that the pilot scheme could go ahead as one of the first actions to implement the government’s road safety strategy after its launch in March 2000, thus
also acting on one of the main recommendations of the review of speed policy.
Full evaluation of the pilot scheme was completed in February 2003 (PA
Consulting Group and UCL, 2003), but it became clear enough by the spring of
2001, after only one year of the scheme, that extension was justified to any police
force area where the police force, the highway authorities and the courts were
ready to form a partnership and present an operational plan to the government
board. This was provided for in the Vehicles (Crime) Act 2001. The partnerships
became known as safety camera partnerships and the board became the national
programme board.
4.1. Safety camera partnerships and their purpose
The objectives of the national programme (DfT, 2004b) are to:
–– reduce deaths and serious injuries on Britain’s roads by reducing the level
and severity of speeding and red light running,
–– prevent and detect offences, and
–– encourage changed driver behaviour through the nationally approved work
of local safety camera partnerships.
The partnerships work in the following way:
–– a detailed operational plan is submitted annually to the national programme
board for ministerial approval;
–– new camera sites must comply with national rules;
–– all sites are made conspicuous and their locations are publicised;
–– the performance of each site is monitored regularly;
–– all existing sites are kept under review;
–– a communications plan is developed and implemented to promote understanding and help to change driver behaviour;
–– audited direct costs of operation are refunded to the partnership by the DfT
from penalty income.
Synthèse INRETS n° 57
131
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
In the year 2000 round of LTPs, Derby and Derbyshire, like a number of other
authorities, envisaged the use of this means to deploy more cameras and operate
them for more of the time. Accordingly, the Derbyshire Safety Camera Partnership
www.slowitdown.co.uk, covering the city and county, entered the programme in
October 2001 in the first tranche of the national extension from the pilot areas.
The partners are Derbyshire Constabulary (whose area is the county), Derby City
Council, Derbyshire County Council, Derbyshire Magistrates’ Courts Service, The
Crown Prosecution Service and the Highways Agency.
The first three-year review of the government’s road safety strategy (DfT,
2004e) reported that all but six of the 51 police force areas in Great Britain had
formed partnerships and five of the others were expected to do so by March 2005.
By then there were 47 partnerships covering 50 police force areas. An evaluation
of the first three years experience from the start of the pilot scheme and including
its extension to other areas up to March 2003 led to a generally favourable report
(Gains et al., 2004).
Guidance (DfT, 2004a) on the second round of LTPs to be drafted in 2005 stated
that each authority’s local road safety strategy should include a speed management strategy devised with the local safety camera partnership, but should look
at other methods in addition to automated enforcement. For example the 2005
draft of the Derby Joint LTP notes the effectiveness of the Derbyshire partnership,
regards its continuation as important and relevant to route and area safety treatments, but recognises that local public support for more safety cameras is limited.
The DfT reviewed the national programme in 2005 and authorisation of new camera sites was suspended pending the outcome of the review.
4.2. Rules of operation
The gist of the rules applying to operational plans for the financial year April
2005–March 2006 (DfT, 2004b) is as follows.
General rules. Camera sites are of two kinds, core sites and exceptional sites.
Core sites must be approved as meeting criteria set out in the rules for use of fixed
or mobile cameras. Exceptional sites can have camera enforcement for reasons
of community concern, collision frequency or short-term engineering problems,
but not for more than 15 per cent of the camera-hours of enforcement at core
sites.
The location and visibility of warning signs and the appearance and visibility of
fixed cameras and of vehicles used to deploy mobile cameras must comply with
published criteria. The police may enforce speed limits elsewhere than at camera
sites and may do so inconspicuously, but the costs of doing so cannot be charged
to the programme.
Communications activity can use THINK! Material but must be local, costeffective and consistent, all existing sites must be reviewed in the year concerned
and monitoring data for all sites must be submitted quarterly.
132
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
Criteria for core sites
Fixed camera sites*
Length
Number of fatal or serious collisions
85th percentile speed
Percent exceeding speed limit
Safety of operation
Mobile camera sites
0.4–1.5 km**
0.4–5 km
At least 4 in 3 years
At least 2 in 3 years
Above a threshold agreed nationally by the police
At least 20 percent of drivers in free-flowing traffic
Camera can be
Deploying vehicle can be
serviced
placed
Engineering treatment to moderate
None can be implemented cost-effectively
speed
* Different rules apply to red-light or speed and red-light cameras.
** Time over distance sites can be longer but must justify their cost.
Financial procedures. Fixed penalty payments for offences detected by programme cameras are sent to the DfT and only this money can be refunded to
partnerships to cover approved costs. Expenditure claimed by partnerships must
be relevant to operation of programme cameras, processing the offences they
detect, or communications activity. Partnership budgets are approved annually as
part of their operational plan and exceeding the budget by more than 10 percent
requires separate approval. Audited spending must be reported quarterly and if
any year’s spending exceeds the relevant penalty income, the partners in agreed
shares must meet the deficit. If any year’s penalty income exceeds expenditure
refunded (which has normally been the case so far), the surplus is transferred to
HM Treasury.
4.3. Scale and funding
In the year April 2003–March 2004, 24 partnerships were refunded a total
of £54 million (about €80 million) and benefits to society were valued at about
£220 million (about €320 million) (Gains et al., 2004), but the latter figure was
probably somewhat overestimated because no way was found of allowing reliably
for regression to the mean in estimating the reduction in casualties for purposes
of evaluation.
As an example, for the Derbyshire Safety Camera Partnership (2004), the
numbers of camera sites were:
Before joining programme
In September 2005
in October 2001
Fixed speed camera sites
18
117
Mobile core speed camera sites
28
41
Mobile exceptional speed camera sites
0
65*
Red-light camera sites
1
1
*Largely at the request of communities, subject to at least one injury collision having occurred at the
site; these sites have a camera deployed on average about once a month.
Synthèse INRETS n° 57
133
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
For the year April 2003–March 2004 the finances of this partnership were
(£million):
Penalty income from which expenditure could be refunded
Allowable police costs
Allowable court costs
Allowable highway authority costs
Total allowable expenditure
Surplus transferred to HM Treasury
2.82
1.24
0.09
0.62
1.95
0.87
4.4. Public relations
Widespread use of cameras is supported by about 70 per cent of drivers and
over 90 per cent of those who only occasionally or never drive (DfT, 2004e). Partly
as a result of THINK!, over 75 percent of drivers said in 2003 that they thought it
is unacceptable or highly unacceptable to drive at 40 miles/h where the limit is 30,
compared with 60 percent in 1998 (DfT, 2004d).
But there has been concern or controversy about speed cameras between two
groups of drivers:
–– those who wish the right to chose their own speed, and;
–– generally law-abiding drivers who are shocked to find penalty points on their
licences.
Some elements of the national media have been hostile to speed cameras,
but local media tend to support views favourable to cameras that are held in local
communities.
Response to adverse opinion has been concern at all levels for transparency
and public information. In December 2001, eight months into the pilot scheme,
the rules were revised to require signing and conspicuity of all fixed cameras
and all deployment of mobile cameras funded by the new mechanism. The three
year review of the government’s road safety strategy (DfT, 2004e), in reporting
the positive effects of camera enforcement, emphasised the need for continuing
public information about the purpose, mode and financial basis of operation of
cameras and about all camera locations. The Derbyshire partnership, for example, lists all its camera sites on its website www.slowitdown.co.uk with access to a
map of each and facilities for extracting lists of cameras by road number or locality. A table giving key data for each site can also be accessed. Objections to the
use of cameras have been strongly countered by non-governmental road safety
organisations (e.g. PACTS and the Slower Speeds Initiative, 2003).
Law-abiding drivers who are anxious about nevertheless accumulating sufficient penalty points as a result of camera detection to be disqualified from driving may find reassurance in the finding that whilst numbers of offences detected
by cameras have risen by an order of magnitude, the annual number of drivers
being disqualified through accumulation of penalty points has remained almost
unchanged (PACTS, 2004).
134
Synthèse INRETS n° 57
Speed management in Great Britain and the use of safety cameras
5. Progress, problems and prospects
Speed management including the extensive use of cameras for enforcement
has gained widespread acceptance notwithstanding opposition from some vocal
minority interests and some more understandable anxieties. Speeds have fallen
appreciably on built-up roads where most of the cameras in Great Britain have
been deployed, and driver attitudes to speeding show signs of moving in the
desired direction.
But the price of overcoming opposition and allaying concerns has been twofold. First, the regime under which the safety camera partnerships are obliged to
operate is a highly regulated one which must be expensive in resource terms and
may well be frustrating to those who simply want to get on with the job of enforcing speed limits where speeding is a problem. Secondly, the requirement for all
cameras to be conspicuous and signed and their locations to be public, whilst
reinforcing the deterrent effect of cameras upon drivers who might exceed the
speed limit at the camera sites themselves, denies road users a second potential
benefit of camera enforcement. This is the deterrent effect on drivers throughout
a whole area of the knowledge that cameras may be being used inconspicuously
anywhere in that area.
It is to be hoped that when drivers have become accustomed to widespread
use of cameras and any remaining anxieties on the part of law-abiding drivers
have been allayed, camera partnerships may be allowed a more relaxed regime
in which to operate, and they may in due course be allowed to deploy cameras
inconspicuously as well as conspicuously.
Two different issues will arise if the combination of camera enforcement and
public information campaigns succeeds in producing a lasting moderation in
speeds chosen by drivers. One of these is that the income from penalties for
offences detected by cameras will decline and may become insufficient to cover
the allowable expenditure on camera operation. This difficulty will probably be
addressed by tactical changes in camera deployment and in he processing of
detected offences in order to reduce expenditure. The other is the question that
will arise whether a camera, which has been sufficiently successful in deterring
speeding and reducing accidents and casualties at the site where it has been
deployed as to seem no longer to be needed should then be removed. Reluctance
to do so will stem from suspicion that once the camera is removed, speeding and
the consequent occurrence of accidents and casualties at the site will resume.
The extent to which this will happen, or to which speed choice at the site has been
lastingly changed will probably need to be tested by the monitored withdrawal of
selected successful cameras. Doing this in the form of a statistically designed
experiment should yield findings that will inform subsequent policy on the withdrawal or retention of successful cameras.
All in all, there is still much to be learned from the experience in Great Britain
of the widespread use of camera enforcement in speed management.
Synthèse INRETS n° 57
135
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
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Synthèse INRETS n° 57
137
Chapitre 7
Road safety and speed management
at a local authority level in England
Ken Spence
1. Introduction
Road safety policy and practice within the UK has become highly regulated
and coordinated in the past few decades. The implementation of this policy is
largely the responsibility of Local Authorities (Councils) and local Police forces.
This is not a one-way process working from the top down. Much of the practice,
which has developed in this period has been trailed first at a local level and then
adopted nationally. This chapter will set out the current structure of relationships
between bodies influencing road safety in the UK (particularly for England), the
funding process, some problems to be overcome and possible solutions to these
and finally the development of best practice.
The first step in understanding how road safety regulation and practice works
within the UK is to set out who the main participants are and how they relate to
each other. This is the context for road safety work in the UK.
2. The context
Figure 1 demonstrates the principal bodies involved in delivering road safety
policy and the lines of contact between them. There are essentially five levels at
which activity takes place. However, this is not always strictly hierarchical as often
levels may be bypassed in communication on some issues.
2.1. Central Government
While the Queen is the titular head of state the highest authority in the UK
is really the National Government at Westminster, with the office of the Prime
Minister foremost in this.
Synthèse INRETS n° 57
139
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2.2. Government departments
Separate areas of government policy are delivered through the different government departments. The lead department for road safety policy is the Department
for Transport. Road traffic law enforcement and the Fire/Rescue service are managed through the Home Office. The health service is managed by the Department
of Health.
2.3. Regional offices, devolved government, greater London
authority
Nine government regional offices enable monitoring and some management
of the work of English local authorities. This is particularly so for policy, including road safety. Annual progress reports on transport performance are fed back
to central government through the regional offices. In return the Department for
Transport will feed back its annual funding settlements to authorities through the
regional offices. However, local authorities may bypass the regional offices and
approach government departments in London directly.
The establishment of the Greater London Authority (GLA) with the Mayor of
London at its head means that London Boroughs operate differently from other
English local authorities. The powers of the GLA are devolved directly from
National Government; however, communication on how these are delivered still
tends to be managed through the Government departments. On transport the
GLA has autonomy to set its own transport policy. It does so through its own
transport department, Transport for London (TfL). However, as the funding for this
is delivered through the Department for Transport the overall purpose of policy is
unlikely to diverge greatly from national policy.
The Welsh Assembly and Scottish Parliament also have powers devolved from
National Government. The Scottish Parliament in particular has complete control
of transport and education in Scotland. Scotland also has a different legal system to the rest of the UK. The Welsh Assembly has less devolved power but this
does include elements of transport, although they have more contact with the
Department for Transport than the Scottish Parliament.
2.4. Local authorities
In England, local authorities have contact with the government departments
through the regional offices. As set out above, this is an administrative arrangement, which allows the departments to have a presence closer at hand to each
authority. However, the range of skills and staffing within regional offices means
that often local authorities need to be in direct contact with government departments and vice versa.
140
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
The London Boroughs are directly answerable to the Greater London Authority,
although they too will have direct contact with government departments. However,
this will not be as great as the regional local authorities.
The Welsh local authorities are answerable to the Welsh Assembly and the
Scottish local authorities to the Scottish Parliament.
All local authorities in the UK share best practice among themselves. The links
are strongest between the English regional authorities, which also have good dialogue with the London Boroughs. The professional bodies (see below) provide a
range of forums for this sharing of good practice. It is also a requirement of the
Annual Progress Report process that English authorities share their own good
practice and seek to learn from the good practice of others.
Figure 1: bodies involved in road safety policy
Synthèse INRETS n° 57
141
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2.5. Emergency services, NGO’s, Business and the Public
While I have placed these on a fifth level, this is only to demonstrate how they
interact in relation to local authorities. In reality the local health, police and fire
services operate at the third level, as they are directly answerable to the government departments of Health and the Home Office. However, the local management structures of each will have local government representation (See below in
more detail). Local authorities are also expected to consult with these services on
a wide range of activities including transport policy.
Non-Governmental Organisations (NGO’s), businesses and the public will also
operate at all levels. They may approach or lobby the Government directly, but
will usually be directed to appropriate departments. The level at which they may
attempt to deal will largely be determined by the nature of the issue with which
they are concerned.
Local authorities are expected to consult with NGO’s, business and the public
on a wide range of subjects. Like the emergency services this consultation is particularly relevant to the delivery of transport policy, including road safety.
3. Local transport plans
The implementation of Government transport policy in relation to roads and
road safety will be mainly achieved through local authorities. The chief delivery
mechanism for this is the Local Transport Plan (LTP), which is applicable for all
English regional local authorities. The London Boroughs answering directly to the
Greater London Authority (GLA) do not have to produce LTP’s, but as the transport funding of the GLA comes through the department of transport the policies it
adopts must remain broadly in line with those of the Government.
The Government set out its transport policy in the white paper “A New Deal
for Transport, Better for Everyone” that was published in 1998. Prior to this there
had been no attempt by government to set out an all-encompassing transport
policy in more than two decades. In essence the new transport policy embraced
the need for environmentally sustainable transport. It accepted that reliance on
car transport had to be reduced and replaced by more sustainable modes such
as public transport, cycling and walking. There was also a clear recognition that
transport had seen chronic under investment. As local authorities were the key
deliverers of road transport policy, a more effective method of ensuring policy
delivery and funding streams was needed. To achieve this the policy introduced
LTP’s, five-year local transport policies for local authorities. Previously each local
highway authority was expected to produce an annual “Transport Policies and
Programme” (TPP). This was presented to the regional office in the summer and
then in December the government would feed back the following financial year’s
funding settlement. LTP’s being a five-year plan offered the promise of a more stable funding mechanism, allowing authorities to plan for the longer term and also
more flexibility to carry funding over between financial years. The Government
also made it clear that levels of funding would be radically increased and maintained at a higher level.
142
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
In recognition that authorities would need time to adapt to the new system the
Government allowed a “dry run” of the process in 1999. Local authorities produced draft LTP’s for the period 2000/2001–2004/2005 based on guidance notes
produced by the Department of Transport. This allowed the department to feed
back comments and advice before the first full LTP’s were delivered the following
year. Thus the LTP process was properly introduced in 2000, with Plans covering
the years’ 2001/2002–2005/2006. At the time of writing local authorities have now
submitted their Provisional Local Transport Plan for 2006–2011 (LTP2). The final
version of this must be submitted by 31 March 2006. For LTP2 a slightly different
funding mechanism has been introduced. Authorities have already been told what
they can expect in terms of annual funding, an indicative 100% figure. However,
all LTP2’s will be assessed and scored resulting in a potential variation to this
100% figure of plus or minus 25%.
While the first LTP’s should have included a cycling strategy and a local road
safety strategy the guidance for LTP2 has set out that the Department for Transport
expects elements of these to be spread throughout the document, which will be
based more on the achievement of four shared priorities. These are:
–– tackling congestion;
–– safer roads;
–– delivering accessibility;
–– better air quality;
4. Annual progress reports
To monitor the implementation and progress of the policies included in the LTP
each authority is also required to produce an Annual Progress Report (APR). This
sets out what work the authority has completed in the previous financial year and
the progress it has made in meeting national and locally set transport targets. The
guidelines for preparing APR’s are now very strict. These should guarantee that
authorities report accurately and in a uniform way in which they are implementing
the Government’s transport policy.
While the settlement for LTP2 will set the initial funding an authority will receive,
the content of each APR will play a large part in determining how this will then
continue year on year as part of the settlement, the Department for Transport will
include a letter stating the areas in which it feels the authority is doing well and
not so well. Each APR must state how the authority has responded to the specific
points raised in the previous settlement letter. The APR process is thus a means
for the Department for Transport to encourage change in local implementation and
policy. This can be necessary as some LTP’s fall far short of the standard that the
department would like. As LTP’s are a five-year document the APR and settlement
letter are a means to force local authorities to change. Ultimately funding can be
withheld if authorities fail to make adequate efforts to adopt Government policy.
In preparing APR’s local authorities are also expected to consult widely, setting
up or joining local partnerships with the emergency services, the health service,
Synthèse INRETS n° 57
143
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
business, NGO’s and the public. Failure to do so will be highlighted in settlement
letters. However, as the APR is a paper exercise, it can often hide very poor delivery on the ground. How this problem has been addressed for cycling is examined
below.
5. Road safety strategy
In March 2000, the Government published its road safety strategy “Tomorrows
Roads Safer for Everyone”. This enabled local authorities to include elements of
the strategy within their first full LTP’s, which were submitted in the summer of
2000.
Within the UK there is some conflict between road safety policy and sustainable
transport strategy. Two distinct positions exist on how best to increase safety on
our roads. These can be described as the casualty reduction and danger reduction approaches to road safety.
5.1. Casualty reduction
This is the more traditional approach. Casualty reduction uses as its starting
point the reported road accident casualty statistics. It seeks to analyse these and
then develop means to reduce them. The main interventions used are physical,
either road engineering measures or secondary safety measures for vehicles and
their users. Many who adopt this approach fear that sustainable transport goals to
increase the number of cyclists and pedestrians will increase casualties as these
modes are more vulnerable. Indeed some have described cycling in particular as
“dangerous”.
5.2. Danger reduction
The danger reduction approach has been gaining strength in recent years. In
this danger is defined as the potential to do harm. Therefore the greatest danger
is from motor vehicles as they can inflict great damage. Conversely walking and
cycling are relatively safe as they offer little threat. Pedestrians and cyclists will,
however, be exposed to danger from motor vehicles. Increasing safety will thus
be achieved by reducing the potential of motor vehicles to do damage. This will be
mainly through more stringent regulation and enforcement of their use.
Danger reduction views the casualty reduction approach as much too simplistic. Simply looking at casualty statistics ignores rates of exposure. Casualties can
be reduced where danger increases. A good example is a junction where there
is an absence of pedestrian casualties. The absence of pedestrian casualties is
often not because the site is safe for pedestrians but because pedestrians avoid it
because of the danger from vehicles they would experience there. Therefore real
road safety problems exist for vulnerable road users that will not be reflected in the
casualty statistics. Indeed the fall in reported pedestrian and cyclist casualties in
the UK can thus be described as largely due to reductions in cycling and walking.
144
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
Danger reductionists reject the idea that increasing walking and cycling will
increase casualties, finding this view somewhat illogical. More people will not walk
or cycle unless they perceive a real reduction in danger in the road environment.
Achieving this will not only benefit the vulnerable but motorists too who would be
less likely to be involved in crashes. The evidence of authorities like York where
cycling and walking are positively encouraged is that overall casualties have fallen
significantly more than authorities were a more traditional road safety approach
has been dominant.
The danger reduction view is also very suspicious of secondary safety measures, particularly for vehicle occupants. They argue that making drivers feel safer
can result in them driving with less care. Any claims for potential reductions in
casualties from the introduction must be tempered with investigation of how drivers will adapt negatively to the increase in their own protection.
5.3. Conflict in approach
Whilst the Government’s road safety strategy took on board sustainable transport, some of the conflict between the two road safety approaches can be seen
within it. This conflict is also evident in the delivery of transport strategy at local
authority level. Often road safety officers seem to stand apart from overall strategic transport aims when they should be an integral part of their delivery. Those
taking a danger reduction view will more often be found at the heart of delivering
sustainable transport and thus at the centre of policy.
There are also some problems in delivering engineering that promotes sustainable transport. Traditionally the role of the traffic engineer was to enable as much
traffic as possible to use the road network. Adapting to demand management that
seeks to reduce capacity can thus be a source of difficulty for some.
A further problem in introducing engineering is the widespread use of safety
audit at various stages of the design and implementation of schemes. In many
cases the officers who carry out safety audit of proposed schemes raise objections
to measures that might encourage cycling and walking as they have a perception
that this will reduce safety. The result is designs that ironically often produce a
more hostile outcome for cyclists and pedestrians. The reason for this is a lack
of professional understanding stemming form the training engineers and others
(police) involved in the safety audit process will have received. How this problem
is being addressed for cycling is discussed below.
6. The Police
As described above local authorities are required to work closely with the
Police. This is particularly so for road safety work. Some examples of this are:
•• partnerships to run driver improvement schemes. These are courses that
drivers involved in crashes where they were at fault can choose to attend as
an alternative to a fine and endorsement of their driving licence. They do,
however, have to pay to attend the course, usually around £100;
Synthèse INRETS n° 57
145
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
•• speed (safety) camera partnerships. The introduction of “netting off” where the
police can claim back a proportion of speeding fines to fund further enforcement must be run by a partnership with constituent local authorities;
•• local working arrangements such as safety audit of proposed engineering
schemes. Local authorities should have safety audit policies for new and
remedial highway schemes. These will involve teams of auditors, independent of the scheme designer, to review plans at a number of stages and offer
comments on how safety might be ensured within the final design. Ideally
the audit team should include an engineer and some non-engineers such as
road safety officers and police.
Relationships with the police will vary between local authorities. There are
some 48 different police forces within the UK and each of these will have its own
policy on enforcing road traffic law. Police forces are measured on how they perform on delivering a series of core functions. Their funding from the Home Office
is thus linked to these core functions. As road traffic policing is not one of the core
functions this unfortunately means that enforcement of traffic law is usually given
much less priority. Consequently, the numbers of traffic police have seen a serious
decline in the last few decades. There is a real fear that the introduction of safety
camera partnerships may be used as a further excuse by some forces to reduce
traffic police numbers further.
7. The Health Service
Health Services at a local level are now managed by Primary Care Trusts
(PCT’s). These are local partnerships that will include representatives of their
constituent local authorities. Each PCT has to produce Health Improvement
Modernisation Plans (HIMPs) that explain how they will work with local partners to
achieve Government objectives in four main areas of care:
–– cancer;
–– coronary heart disease/strokes;
–– accidents;
–– mental illness.
Local transport can have a serious impact in all four of these areas, however,
for road safety the primary concern is accidents.
By formalising the need for partnerships PCT’s are a genuine advance, offering
the opportunity to maximise the efficiency of health interventions through coordination and by avoiding the duplication of effort. However, this process is not without its
problems. The PCT area may cover more then one police force or local authority.
Indeed some include parts of several local authorities. This can make partnerships
unwieldy and can also mean that progress is held up by less active partners.
8. LTP and APR problems
The Local Transport Plan structure is a highly significant improvement in the
way transport policy is delivered. It requires local authorities to be answerable to
146
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
Government and also to their local constituents. However, as mentioned above
what on paper may look good may in practice fall far short of the standards desired.
While the annual settlement letter does allow for monitoring, this is still largely a
paper exercise. It can therefore be slow to or fail to recognise the need for change.
Without monitoring on the ground bad practice can continue. It is possible for
the public and local organisations to raise shortcomings and concerns at a level
higher than the local authority, but this is piecemeal and an unreliable substitute
for more structured monitoring.
One area where there was a clear problem was in progress to meet the targets set in the National Cycling Strategy (NCS). The NCS was introduced by the
then Conservative government in 1996 and then confirmed by the current Labour
Government. It set a target of doubling the proportion of cycling journeys from their
1996 level of 2 to 4% by 2002 and then doubling this to 8% by 2012. The requirement for local authorities to include a local cycling strategy within their LTPs was
recognition of the Government’s continued support for the NCS. In 2001, Steven
Norris, who was the Government Minister who had introduced the NCS in 1996
(now retired from Westminster), was appointed as Chair of the National Cycling
Strategy Board, the independent body that overlooks the implementation of the
NCS for the Department for Transport. This was a further boost to the strategy.
By 2002, the proportion of cycling journeys remained unchanged at 2% so the
NCS Board recognised that a major new impetus was needed if there was to be
any hope of achieving the 2012 target. The Government again confirmed its support for the NCS and its targets and the Department for Transport agreed to fund
the setting up of the English Regions Cycling Development Team.
9. English Regions Cycling Development Team (ERCDT)
Following a bidding process, AEA Technology, a private consultancy, won the
contract to establish and run the ERCDT. The Team was appointed and began
work in September 2002. It comprised:
•• 10 regional coordinators (two in the South Region);
•• three development coordinators for:
•• road safety and cycling training;
•• motivational factors and promotion;
•• engineering guidance and professional development;
•• four specialist advisers for:
•• school travel plans, cycling promotion and cycle schemes;
•• training needs/CPD assessment and institutional accreditation;
•• health promotion;
•• traffic/highway engineering, shared use provision and safety audit;
•• a management and support team.
Synthèse INRETS n° 57
147
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
The ERCDT assessed the delivery for cycling of all English highway authorities
and reported on this in August 2003. Each authority was assessed and scored on
a range of 0–5 “bicycle bells” on each of ten criteria. The criteria were:
A. Local Transport Plan and Cycling Strategy.
B. Annual Progress Report.
C. Council Commitment.
D. Infrastructure.
E. Cyclist Training.
F.
Marketing and promotion.
G. Stakeholder Engagement.
H. Wider Engagement.
I.
Planning for Cycling.
J.
Targets and Monitoring.
To complete the assessment the team met with officers and local cycle stakeholders in each authority and audited a range of schemes that had been implemented. The outcome of the assessment was an average bell score total for the
149 authorities of just under 21. Each assessment included a set of recommendations and these then formed the basis for the authorities to develop action plans
that they could then implement with the assistance of the ERCDT. This was to be
the positive outcome of the assessment. The majority of authorities made a positive response to the process. When the team carried out a full progress review in
2004 the extent of the improvement was measured.
The 2004 progress review looked at how each authority (excluding the 33
London Boroughs) had performed on the ten assessment criteria since 2003.
Each was asked to complete a questionnaire detailing evidence for progress they
felt they had made and indicating what bell score they felt they now warranted for
each of the criteria. They were provided with a set of matrices and guidance that
explained how the scoring could be made. The team assessed the completed
questionnaires and a final report prepared. In both 2003 and 2004 the process
was moderated by a core of team members to ensure continuity between the nine
regional coordinators who had carried out the assessments.
The outcome of the 2004 progress review was an average overall increase of
2.3 bells for the 116 authorities included. Some authorities had made substantial
progress. On the whole authorities that had worked closely with the ERCDT made
the best progress. The graph below sets out how involvement with the ERCDT
was mirrored by progress.
148
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
Figure 2: correlation of ERCDT Involvement with LA Performance
The Team not only assessed authorities but also worked closely with them and
other agencies to spread good practice and improve the skills of those involved in
delivering for cycling. By the completion of the ERCDT contract in May 2005 the
following outcomes can be attributed to the team’s work:
•• positive citation of ERCDT assessment in 32 Year 4 (2004) APRs, covering
43 local highway authorities (i.e. 37% of authorities outside London);
•• 21 known authorities where ERCDT recommendations have resulted in new
cycling-related appointments;
•• selection of Sustainable Travel Towns – the bid of Peterborough especially
had a strong ERCDT contribution;
•• numerous cases where ERCDT has led directly to improvements in infrastructure. Of particular note, the concept of ‘invisible infrastructure’ coined
by the ERCDT has helped LAs identify ways of providing benefits to
cyclists where members would not support the provision of cycling-specific
measures;
•• 16 known examples where ERCDT support led to the adoption of a promotion and marketing strategy;
•• 24 new Cycle Forums set up directly as a result of ERCDT support;
•• 400+ individuals from local authorities have received professional training
via the pilot professional training modules. Of these, over 90% were officers
of team leader grade or above;
•• several local authorities have made a firm commitment to take up the training modules once available;
Synthèse INRETS n° 57
149
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
•• the Scottish Executive adopted the ERCDT assessment criteria for its own
assessment of local authority cycling performance;
•• the development of a National Standard and Guidelines for Child Cyclist
Training would not have been completed;
•• ERCDT advice and information was invaluable in developing the concept for
the Bike-It project.
In March 2005 a new body, “Cycling England”, replaced the National Cycling
Strategy Board. Cycling England was given an annual budget of £5 million for
three years and will carry on much of the work initiated by its predecessor. This
will include building on many of the successes of the ERCDT. One particular
stream of work that it is supporting is professional training with the role out of
a programme of training modules prepared by the ERCDT. This is intended to
address the acknowledged skills shortage in delivering infrastructure and other
measures to increase cycling.
A revision of the government’s “Cycle Friendly Infrastructure” guide, also
undertaken by the ERCDT is also being published.
10. Good practice
In setting new guidance on best practice the ERCDT followed the example of
many other official bodies and NGO’s who have published guidance for the benefit
of highway engineers, transport planners and road safety officers. In engineering,
the three professional institutes have been particularly prominent in producing
good practice guides and also in organising both local and national training opportunities for their members. These are:
–– the Institute of Civil Engineers (ICE);
–– the Institute of Highways and Incorporated Engineers (IHIE);
–– the Institute of Highways and Transportation (IHT).
Often good practice guides are produced in partnership with other bodies
including NGO’s. An example is the Road Danger Reduction Forum’s good practice guide “Safe Roads for All, A Guide to Road Danger Reduction” (Road Danger
Reduction Forum, May 2001) that was produced with the support of the IHIE.
These guides offer examples of good practice that has been implemented by local
authorities and road safety organisations. The British Medical Association has
also produced research documents on transport policy and issues.
In the area of speed management, the Slower Speeds Initiative, whose membership includes NGO’s the Children’s Play Council, the Cyclists’ Touring Club, the
Environmental Transport Association, the Pedestrians Association, the Pedestrian
Policy Group, the Road Danger Reduction Forum, RoadPeace, Sustrans and
Transport 2000, produced its own good practice guide “Killing Speed, A Good
Practice Guide To Speed Management” in 2001. This featured the City of York
“Speed Management Plan” as an example of best practice for a local authority
setting its own speed management strategy. York is no stranger in establishing
150
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
practice, which is then adopted nationally. York was the first local authority to
develop a cycling strategy, which as we have seen is now a standard requirement
for all. York was also a partner with Sustrans in the first Safe Routes to School
pilot, now a national programme. Indeed much of what becomes national policy
originates from the initiative of local authorities that are prepared to try out new
ideas. The York Speed Management Plan is one of the latest examples.
11. An example of best practice, the City of York
speed management plan
In the early 1990’s York had introduced significant amounts of traffic calming.
This was mainly in residential streets and usually in direct response to requests
from residents who were concerned about speeding traffic. The authority also had
a form of local democracy where each council ward had its own “Neighbourhood
Forum” with funding that residents could vote to allocate to any scheme they
wished to support. Many of these voted to fund traffic calming, sometimes in
streets and even cul-de-sacs where there was no genuine speeding problem.
However, these schemes were implemented. Then the council undertook a major
new programme of traffic calming on a series of secondary semi residential/commuter routes. The implementation was beset with construction problems, which
helped raise a perception of confused policy and generated a media and public
outcry. The result was a moratorium on all-new traffic calming while the council
undertook public consultation to find out public opinion about its traffic-calming
programme.
The result of this initial consultation was to confirm strong support for the principle of traffic calming. However, the public felt that the council had no clear policy on where it would introduce measures and the type of measures that where
appropriate in different locations. In response to this the council developed its
Speed Management Plan. Before adopting this, the council once more undertook
extensive consultation to ensure that the plan would have public support.
The Speed Management Plan proposed categorising all the authority’s roads
in one of three categories. In consultation with the emergency services and local
bus companies, a map was produced showing how each road was proposed to be
categorised. For each of these categories the council would then state how and
where traffic calming might be introduced. The three categories of road were.
11.1. Traffic routes
The main traffic carrying roads where the council proposed to see current
speed limits enforced by means of “softer” traffic calming measures like pedestrian crossings and cycle lanes. Vertical measures would only be used in very
exceptional circumstances (As yet none have been).
11.2. Mixed priority routes
Synthèse INRETS n° 57
151
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Also quite busy with traffic but also, residential, bus and emergency services
routes with schools and shopping areas. Target speed of 30 mph (existing speed
limit) and lower speeds outside schools and shops where some vertical measures
(humps, speed cushions) would be used.
11.3. Residential areas
All other roads on the plan, where the needs of residents would generally have
priority over motor traffic. Target speed of 20 mph. The full range of traffic calming
measures would be used on these, where residents supported them.
The public consultation that preceded the Plan’s adoption in 1997 was extensive. This included:
•• a leaflet explaining the proposals and including a map of the Plan being
distributed to all 76,000 properties in the authority area. This invited comment and detailed when and where public exhibitions/consultations would
be held;
•• an exhibition road show that was attended by over 400 people;
•• a “talk about” research panel that gained the views of 1,250 people;
•• a survey of 25 road user organisations;
•• consultation with the Disabled Persons Advisory Group;
•• consultation with the 33 Parish Councils;
•• continued consultation with the emergency services and bus companies.
The surveys asked five key questions:
Q1 – Did people feel it was important to have a speed policy?
Q2 – Did they agree with the principle of three road types?
Q3 – Did they agree with the proposed target speeds?
Q4 – What did they think of a range of speed reducing measures?
Q5 – Were there any roads where they would like to see speed reduction?
Questions one and two received over 80% agreement and question three over
70%. The various measures received mostly majority support, although those
measures that the council knew to be most effective were the least popular. The
public wanted to see these well targeted. There were over 400 requests for speed
reduction.
Given such a clear mandate, the plan, with a few amendments from the draft,
was then officially adopted by the Council. Since then it has guided the implementation of speed reduction measures. The Council has been particularly active
in targeting measures outside schools and shops on mixed priority routes. By
the end of the 2003–2004 financial year; where possible, 20 mph “school safety
zones” will have been introduced outside all the authority’s schools.
152
Synthèse INRETS n° 57
Road safety and speed management at a local authority level in England
The Council also introduced a “Child Road Safety Audit Policy” in July 2001.
This set new targets for children’s safety including speed management.
The Government in its road safety strategy “Tomorrow’s Roads Safer for
Everyone” introduced the idea of child road safety audit. However, by 2003 the
Government had given no guidance on how child road safety audit should be carried out. York was not prepared to wait and developed its own policy based on
a position paper written by the Road Danger Reduction Forum. The basis of this
was included in the Council’s Local Road Safety Strategy, which formed part of its
Local Transport Plan.
The Council declared “the over-riding aim of Child Road Safety Audit should
be to provide a framework for improving all factors within the road environment
so that children can experience it as independent road users in ever increasing
safety”. With this in view it set the following targets.
11.4. Infrastructure
By 2006
•• to have completed a survey of traffic speeds on all residential roads;
•• in consultation with local residents to have introduced 20 mph zones on at
least 40% of residential roads where 85th percentile speeds are 20 mph or
less;
•• by agreement with local residents to introduce a minimum of two new Home
Zones each year.
By 2010
•• in consultation with local residents to have introduced traffic calming, 20 mph
zones or home zones on at least 40% of all residential roads;
•• in consultation with schools, parents and local residents, to have introduced
school safety zones, where appropriate, outside all primary schools;
•• in consultation with schools, parents and local residents, to have completed
safe routes to school programmes for all secondary schools and commenced a similar programme for primary schools.
11.5. Speed
By 2006, in addition to comments above:
•• in co-operation with North Yorkshire Police to have established a robust
system of regularly monitoring traffic speeds on a selection of roads in order
to measure progress in increasing speed limit compliance;
•• in co-operation with North Yorkshire Police to have set a target for increasing speed limit compliance;
•• to have begun a programme to reclassify quiet rural roads as “quiet lanes”
with a maximum speed limit of 40 mph.
Synthèse INRETS n° 57
153
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
The Council is making good progress on most of these targets. However,
the weak link is Police enforcement. A safety camera partnership was due to be
launched in 2003, but the North Yorkshire Police withdrew from this largely due to
a desire not to alienate local drivers. This is a curious decision in a Police Authority
area with the highest proportion of killed and seriously injured road crash victims
per head of population in the UK. The decision can be credited to the very negative media campaign against speed cameras that continues in the UK and which
the Government has done little to counter effectively.
11.6. The future
This raises another issue for local authorities. They can only make progress in as
far as the Government and to a lesser extent public opinion will let them. There are
deep cultural attitudes that must be challenged and changed. Many of these persist
because the public debate is ill informed and dominated by a media that on the whole
supports the motor industry. That debate must be moved forward if councils are to be
able to use the tools available to them to make the environment safer.
York’s Child Road Safety Audit Policy is an example of one way forward.
Creating a safe environment for children requires much more than a few road
humps outside schools. It requires changing the environment, including the way
people drive, wherever children might be present. This can quite fairly be sold as
“safety for children”, a cause that few would dare argue against. But even York
has as yet not begun to market this Policy properly to get this message across.
That is the next step not just for York but also for all those who want to see a truly
safe environment.
References
Department of The Environment, Transport and The Regions. A new deal for
transport: better for everyone. London: The Stationery Office, 1998.
Department of The Environment, Transport and The Regions. Tomorrow’s roads –
safer for everyone: The Government’s road safety strategy and casualty
reduction targets for 2010, London, 2000.
Department for Transport. Full Guidance On Local Transport Plans: Second
Edition. London, 2004.
Velocity 2005 Dublin. Raising the bicycle bell curve: the benefits of assessing
local authority delivery of cycling provision. Dublin, 2005.
Road Danger Reduction Forum. Safer roads for all: a guide to road danger
reduction. London, 2001.
Slower Speeds Initiative. Killing Speed, A Good Practice Guide To Speed
Management, 2001
City of York Council. York Speed Management Plan. York, 1997.
City of York Council. York Child Road Safety Audit Policy. York, 2001.
154
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 8
Le management local de la sécurité
routière en France : dispositifs,
acteurs et outils. Le cas du contrôle
de vitesse dans deux départements
Hervé Chomienne
Résumé
Initialisée en 1982, la politique locale de sécurité routière de l’État s’est lentement structurée autour de dispositifs et d’outils visant à aborder la sécurité routière de façon intégrée et pluridisciplinaire. Deux acteurs clés de cette politique
été identifiés, le délégué interministériel à la Sécurité routière (DISR) à l’échelon
interministériel et le préfet à l’échelon départemental, dont le rôle d’élaboration et
d’animation n’est pas rencontrer de difficultés. Dans ce cadre, les contrôles de
vitesse constituent une dimension importante de la politique locale de Sécurité
routière (SR) avec laquelle ils doivent s’articuler. De plus, leur organisation implique plusieurs familles d’acteurs en amont, en aval et lors de leur mise en œuvre,
ce qui pose aussi des problèmes de coordination. L’élaboration de plans départementaux de contrôles routiers mais surtout le déploiement du contrôle–sanction
automatisé offrent des opportunités pour formaliser et accroître la coordination
des acteurs afin d’améliorer l’efficacité des actions de contrôle de vitesse et plus
largement de la politique locale de SR. Toutefois, le développement et la pérennisation de cette coordination ne peut s’envisager que sous la direction du préfet,
par l’intermédiaire d’un chef de projet SR et d’un coordinateur SR impliqués et
compétents.
1. Introduction
L’action publique en France, plus que toute autre forme d’action collective
suscite des réactions contradictoires (Meny et Thoenig, 1989) : les demandes
d’intervention de l’État pour résoudre des problèmes de toute nature ne cessent
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse INRETS n° 57
155
185
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
de croître, alors même qu’il lui est de plus en plus souvent reproché de manquer
d’efficacité dans les politiques qu’il initie. Si ces interventions s’exercent naturellement sous des formes réglementaires et coercitives, les pouvoirs publics font
de plus en plus souvent appel à des registres d’action non contraignants comme
les incitations économiques, le recours à l’information ou la persuasion sociale
(Papadopoulos, 1995).
La politique de sécurité routière en France mobilise l’ensemble des registres
de l’action publique mais son élaboration et sa mise en œuvre font face à une
double difficulté : la complexité du problème en lui-même mais aussi la complexité du dispositif institutionnel progressivement mis en place pour tenter de
le résoudre (Chomienne, Lavoisier, 2004). Ainsi, il nous apparaît que l’enchevêtrement des structures, des outils et des acteurs en charge du management de
cette politique publique interministérielle, aux échelons nationaux et locaux, est
le résultat d’un long processus de structuration qu’il est possible de reconstituer,
ce que nous ferons dans un premier temps. Nous montrerons, dans un second
temps, les apports de ces dispositifs ainsi que leurs difficultés de fonctionnement
en analysant plus particulièrement le rôle de deux acteurs clés : le DISR et le
préfet, en charge de sa déclinaison locale. Nous fonderons notre analyse sur
les résultats d’une recherche que nous avons conduite en 2003–2004 pour la
Direction de la sécurité et de la circulation routières sur « l’évolution des politiques
locales de sécurité routière en France » depuis leur origine jusqu’à 2002. Celle-ci
repose sur une analyse de documents internes à la DSCR et sur une cinquantaine d’entretiens semi-directifs réalisés auprès d’acteurs nationaux11 et locaux12
de la sécurité routière.
Après avoir analysé les origines et mutations des politiques locales de sécurité
routière entre 1982 et 2002, nous nous intéresserons au cas particulier de l’organisation locale des contrôles de vitesse, notamment depuis l’identification de
la sécurité routière comme « chantier présidentiel » en juillet 2002. Nous montrerons comment l’organisation de ces contrôles s’articule avec les autres dispositifs
locaux de sécurité routière, quels en sont les principaux acteurs et en quoi le
déploiement du contrôle–sanction automatisé a impacté leurs pratiques dans ce
domaine. Pour ce faire, nous nous baserons sur les résultats de l’étude du cas
de deux départements, la Savoie et la Drôme, au sein desquels nous avons interrogé, dans le cadre d’entretiens semi-directifs, les principaux acteurs du contrôle
de vitesse13.
11 Notamment,
trois anciens délégués interministériels de la sécurité routière ; des anciens conseillers
techniques des ministères de l’Intérieur, de la Justice, de l’Éducation nationale et de la Gendarmerie ;
les responsables des politiques locales et de la communication à la DSCR ; les responsables des
principales associations en matière de sécurité routière (Prévention routière, Ligue contre la violence
routière, association Anne Cellier) ; une demi-douzaine de chargés de mission sécurité routière.
12 Étude de la situation de deux départements et entretiens auprès de responsables et d’acteurs
locaux, soit une quinzaine de personnes interrogées.
13 Dans chaque département : le chef de projet SR (directeur de cabinet du préfet), l’officier de
gendarmerie et l’officier de police en charge de la SR, le substitut du procureur en charge de la SR,
le responsable de la CDES.
156
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
2. Genèse de la politique publique de sécurité routière
en France : de la réglementation à la coordination
interministérielle
Assurer des transports rapides et sûrs par la construction et l’entretien de
réseaux routiers, fluviaux puis ferrés a de tout temps été une préoccupation des
pouvoirs publics. Les enjeux à la fois stratégiques et économiques des transports
terrestres ont conduit les autorités à réglementer leurs usages afin de protéger les
infrastructures et leurs usagers. Il faut cependant attendre la seconde moitié du
vingtième siècle, caractérisée par une augmentation régulière des flux de circulation dans les pays industrialisés, pour qu’apparaisse la nécessité d’encadrer plus
étroitement le comportement des usagers de la route (Callens, 1996).
En France, l’élaboration du premier code de la route en 1958 s’est révélée
être le résultat d’un long processus impliquant de nombreuses parties prenantes
issues des sphères politiques, administratives et économiques (Kletzen, 2000).
Jusqu’alors essentiellement technique, car centré sur la gestion des infrastructures, le problème de « la circulation routière » prend une dimension politique en
devenant un problème de « sécurité routière » centré sur la régulation des comportements des usagers.
Cette nouvelle problématique de « changement social » devait alors impliquer
la mobilisation de tous les registres de l’action publique, qu’ils soient contraignants
(réglementation, contrôle–sanction) ou non contraignants (éducation et information, persuasion, incitations économiques). Ainsi, le ministère des Transports ne
devait plus être le seul acteur en charge de la sécurité routière : les ministères
de l’Intérieur, de la Justice, de la Santé, de l’Éducation nationale, de l’Économie
et de l’Industrie, de la Jeunesse et les Sports, de la Communication devenaient
aussi les parties prenantes d’une politique interministérielle. Cependant, ce furent
essentiellement les ministères des Transports, de l’Intérieur et, dans une moindre
mesure de la Santé, qui prirent en charge en 1958–1959 la gestion de la sécurité
routière à travers la création de comités ou de conseils travaillant en parallèle
selon des logiques sectorielles (Kletzlen, 2000).
Il faut attendre 1972 et le triste record de près de 16 600 tués sur les routes
françaises pour que la préoccupation de sécurité routière devienne formellement
une politique publique interministérielle à travers la création d’un Comité interministériel à la sécurité routière (CISR) présidé par le Premier ministre, animé par un
délégué à la sécurité routière et constitué de représentants de nombreux ministères14. Ce premier CISR animé par Christian Gérondeau, soutenu par le Premier
ministre de l’époque, Pierre Messmer, a donné lieu à l’élaboration et à la mise en
œuvre, à partir de 1973, d’une vague régulière de mesures réglementaires relatives à l’obligation du port de la ceinture de sécurité, du port du casque pour les
14 Les
ministères de la Défense, de la Justice, de l’Intérieur, de l’Économie et des Finances, de
l’Éducation nationale, du Développement Industriel et Scientifique, de l’Équipement et du Logement,
des Postes et Télécommunications, des Transports, de la Santé Publique et de la Sécurité Sociale
sont, de façon non exhaustive, membres du CISR.
Synthèse INRETS n° 57
157
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
deux-roues, à l’abaissement des seuils de vitesse autorisée et à la mise en place
de dispositifs de lutte contre l’alcoolisme au volant. Ces dispositifs contraignants
et des campagnes nationales de communication ont contribué, en cinq ans, à
réduire de plus de 4 600 le nombre de morts sur les routes pour atteindre un peu
moins de 12 000 morts en 1978.
Toutefois, au début des années 1980, le renforcement des dispositifs réglementaires et des contrôles–sanctions opéré au cours de la décennie précédente ne
semble plus suffisant pour faire évoluer les comportements des usagers de la route,
le nombre de morts demeurant autour de 12 000 personnes chaque année.
Face à cette stagnation, le CISR du 22 décembre 1981 se donne pour objectif
« de réduire d’un tiers en cinq ans le taux de mortalité enregistré sur les routes »,
grâce à des mesures articulées autour de trois axes :
–– renforcer l’adhésion des usagers de la route et améliorer leurs comportements à partir d’actions d’information, de sensibilisation et de formation ;
–– renforcer l’application des réglementations en vigueur ;
–– développer les équipements de sécurité sur les réseaux routiers nationaux
et les voiries des collectivités locales.
De plus, afin de doter le CISR d’un relais opérationnel, le ministère de l’Équipement et des Transports reçoit délégation « pour réunir le Comité et assurer sa
présidence dans l’intervalle des réunions présidées effectivement par le Premier
ministre » et doit créer une Direction de la sécurité et de la circulation routière en
charge notamment du code de la route, de l’information des usagers et de la normalisation technique des véhicules et des infrastructures routières.
Ainsi, parallèlement aux mesures visant à réguler les comportements des usagers, l’enjeu est désormais de modifier en profondeur leurs attitudes face au risque routier, en agissant au plus près du terrain à travers l’élaboration de dispositifs
permettant de mobiliser la société autour du problème de l’insécurité routière. La
création de la Direction de la sécurité et de la circulation routière vise justement à
rattacher de façon privilégiée cette politique interministérielle à un ministère disposant d’une forte expertise technique et d’un réseau dense de structures déconcentrées qui pourraient constituer des relais opérationnels à la mise en œuvre de
cette politique publique. Cette décision de faire cohabiter la structure transversale
du CISR avec une direction sectorielle vise à maintenir le caractère interministériel de cette politique publique, tout en lui donnant une assise opérationnelle
qui lui faisait jusqu’alors défaut. Nous reviendrons par la suite sur l’analyse des
conséquences de ce compromis organisationnel.
3. Développement d’une politique locale de sécurité
routière en France : mobiliser et coordonner
les acteurs locaux
Le CISR du 13 juillet 1982 prolonge les décisions du CISR précédent en statuant que le directeur de la Direction de la sécurité et de la circulation routière serait
158
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
systématiquement aussi le DISR afin d’assurer l’articulation entre cette direction
et le CISR. De plus, il est décidé de mettre en place une « politique locale de
sécurité routière » en complément des dispositifs nationaux existants. Élaborée
par le CISR qui fixe les priorités nationales, sa mise en œuvre est confiée au préfet de département. Elle a pour objectifs de « provoquer une véritable mobilisation
de l’ensemble du corps social, rechercher une prise en charge des problèmes de
sécurité routière par les collectivités locales en les associant aux objectifs gouvernementaux » et d’assurer « l’intervention active des services publics locaux ».
La politique locale repose sur deux dispositifs.
•• Un programme de contrats d’objectifs entre l’État et les collectivités locales (« objectif –10 % ») visant à inciter celles-ci à conduire des actions de
prévention à partir d’incitations financières assorties de primes si l’objectif
de –10 % de tués par an sur leur territoire est atteint. Ce programme a été
arrêté à la fin des années 1980 sans que son efficacité n’ait été évaluée.
•• Un programme d’enquêtes techniques pluridisciplinaires (REAGIR) réalisées à la suite de tout accident mortel et distinct de l’instruction judiciaire.
Ce programme a été régulièrement ajusté jusqu’à être rénové à la fin de
l’année 2004 sous le nom « d’AGIR pour la sécurité routière ».
L’évolution et les prolongements de ce dernier programme entre 1982 et 2002
reflètent, selon nous, les difficultés d’aborder de façon transversale et coordonnée la politique de sécurité routière, problème qui sera aussi rencontré en matière
d’organisation du contrôle–sanction. Par ailleurs, cette organisation ne peut se
comprendre indépendamment de l’organisation générale de la sécurité routière
dans la mesure où elle constitue un élément de ce système.
3.1. Objectifs et organisation du programme REAGIR
La finalité du programme REAGIR (Réagir par des enquêtes sur les accidents
graves et par des initiatives pour y remédier) est d’améliorer la connaissance des
facteurs qui concourent aux accidents graves, de susciter une forte mobilisation
sociale autour du problème de la sécurité routière, de proposer des actions permettant de réduire le risque de voir un accident comparable se reproduire, le tout à
partir d’enquêtes techniques réalisées sur chaque accident très grave ou mortel.
Ce programme doit permettre d’atteindre l’objectif de baisse d’un tiers des
accidents mortels à l’horizon 1986, mais la circulaire du DISR du 10 mai 1983 qui
l’instaure précise qu’il « ne suppose pas la mise en place de moyens spécifiques
ou supplémentaires ». Il doit reposer sur le redéploiement « de l’organisation,
des procédures et des priorités de l’action des services concernés par la sécurité routière et la plus large diffusion de l’esprit de prévention ». Il ne s’agit donc
pas de créer de nouvelles structures mais, sous la responsabilité du préfet, de
mobiliser au sein des services déconcentrés de l’État, des collectivités locales et,
éventuellement, des associations et des milieux professionnels, des inspecteurs
départementaux de la sécurité routière (IDSR) qui ont pour mission la réalisation des enquêtes REAGIR et la mobilisation sociale sur le thème de la sécurité
Synthèse INRETS n° 57
159
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
routière. Par ailleurs, il est demandé au préfet de mettre en place une « instance
départementale de concertation » afin que « s’établissent entre l’État, les collectivités territoriales, les associations et les professionnels concernés des échanges d’informations permettant l’harmonisation de leurs actions et un large débat
public ». La forme de cette instance n’est néanmoins pas précisée, et elle ne sera
généralement pas mise en place.
Une circulaire du DISR du 10 juillet 1984 est venue par la suite préciser les
modalités de mise en œuvre de REAGIR et a notamment clarifié son organisation
administrative, laissée relativement floue dans la circulaire initiale.
Le DISR s’appuie directement sur sa Direction de la sécurité et de la circulation routières dont l’une des missions est la coordination interministérielle nationale des actions de sécurité routière. Ainsi, au niveau national, des chargés de
mission REAGIR ont été nommés et préparés à former les futurs IDSR au niveau
départemental et à contribuer à l’animation des réseaux ainsi constitués. Comme
pour les IDSR, les chargés de mission ne sont pas en poste à temps complet sur
cette nouvelle mission mais sont partiellement détachés par leurs services d’origine pour remplir cette mission normalement selon la logique du volontariat.
De plus, il est rappelé au préfet qu’il a la responsabilité de ce programme et
qu’il doit donc s’impliquer dans la gestion de son fonctionnement et dans son animation. À cet effet, il doit nommer un « coordinateur administratif » qui devra gérer
de façon opérationnelle le fonctionnement du réseau d’IDSR. En outre, afin d’assurer l’animation du programme, le préfet est invité à déléguer sa responsabilité
à l’un de ses « collaborateurs les plus directs (directeur de cabinet ou secrétaire
général) », dont la mission sera de « mobiliser des partenaires tant institutionnels
qu’issus des milieux associatifs et de les amener à collaborer ensemble sans que
les uns ou les autres y perdent de leurs prérogatives ou de leur identité ».
3.2. La difficile cohabitation entre un dispositif transversal
atypique et les structures administratives de l’État
Les circulaires qui ont successivement présenté les objectifs et les modalités
d’organisation du programme REAGIR laissent entrevoir les principes sur lesquels ce programme repose. Mais c’est à partir des récits de ses initiateurs et des
premiers participants que l’on peut tenter de mieux les comprendre. Il apparaît
ainsi que le démarrage de ce programme a été largement porté par l’équipe du
délégué interministériel d’alors, P. Mayet qui a dû s’investir pour « vendre » l’idée
aux responsables politiques. Disposant d’une bonne connaissance des pratiques
locales en matière de sécurité routière, l’équipe de P. Mayet a pu élaborer un
programme visant à généraliser les « bonnes pratiques » en tentant de les institutionnaliser. Les caractéristiques du programme REAGIR mettent en évidence
cette idée de faire émerger du terrain et de l’expérience une prise de conscience
et de nouvelles pratiques professionnelles intégrant la problématique de sécurité
routière dans les missions traditionnelles des services de l’État, des collectivités
territoriales mais aussi dans le monde de l’entreprise.
160
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
REAGIR repose tout d’abord sur une conviction : la sécurité routière n’est pas
un problème administratif classique qui serait de la seule responsabilité de l’État.
L’idée qui légitime l’action locale en matière de sécurité routière est bien que cette
question concerne tous les acteurs de la société qui doivent prendre conscience
des enjeux et de leurs responsabilités dans ce domaine.
La deuxième caractéristique de REAGIR est d’associer étroitement l’amélioration des connaissances en matière de sécurité routière, la mobilisation des acteurs
et leur mise en mouvement à partir d’actions d’amélioration. La volonté de produire
des connaissances rigoureuses, de mener des actions de mobilisation sociale de
type militant et de s’inscrire dans le cadre des structures administratives, constitue à la fois toute l’originalité de ce programme et, sa principale faiblesse, reposer
conjointement sur trois logiques d’action qui cohabitent difficilement.
Une autre caractéristique de REAGIR est de se situer aux frontières des structures administratives classiques. P. Mayet insiste sur le fait qu’il a délibérément
conçu ce programme dans un esprit « subversif, dérangeant, provocateur » afin
d’interpeller le « système bureaucratique » de l’État soupçonné, non sans raison,
de ne pas se donner les moyens de prendre en charge le problème de la sécurité
routière ni de façon spécifique ni dans l’exercice des missions de ses services. Il
apparaît alors que ces derniers sont la principale cible du programme : il s’agit de
leur démontrer à travers les enquêtes techniques en quoi ils sont, de facto, responsables des problèmes de sécurité routière et comment ils pourraient les intégrer dans leurs pratiques professionnelles. Or, ces enquêtes ont un aspect officiel
qui les situe dans le champ administratif, mais elles n’ont pas la même légitimité
institutionnelle que des missions d’inspection ou d’enquête traditionnelles. Les
IDSR peuvent ainsi être amenés à émettre des critiques sur le fonctionnement de
leurs services, ce qui les place en porte-à-faux vis-à-vis de leur hiérarchie et de
leurs collègues. Dans ces conditions, il leur est souvent difficile de remplir sereinement leur mission et d’être entendus au sein de leurs services.
Enfin, la dernière particularité de ce programme est son caractère transversal
et pluridisciplinaire alors que la sécurité routière était, jusqu’alors, plutôt abordée
selon des approches techniques et morcelées. Pour ce faire, REAGIR est un
réseau interministériel et pluridisciplinaire (CRS, gendarmes, DDE, SAMU, pompiers, …) et un lieu d’échanges et d’expression libre entre des acteurs d’origines
et de cultures professionnelles différentes. Ce mode de fonctionnement visait à
rompre les cloisonnements entre les différents services concernés par la sécurité
routière, mais ce but n’a été que très partiellement atteint. En effet, les échanges
entre acteurs du réseau REAGIR n’ont généralement pas entraîné une forte amélioration de la prise en charge de la sécurité routière au sein de leurs services et
de la coordination de leurs actions.
On peut comprendre que ce programme n’a généralement pas suscité une
forte implication des préfets qui ne disposaient pas de moyens spécifiques pour
l’animer et qui, par ailleurs, étaient accaparés par de nombreuses autres missions
prioritaires. La structuration croissante de la politique locale de sécurité routière
à travers des dispositifs transversaux, comme le pôle de compétence, et l’iden-
Synthèse INRETS n° 57
161
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
tification d’acteurs spécifiques au sein des préfectures a cependant entraîné un
besoin croissant d’implication du préfet15, seul acteur à l’échelon local pouvant
légitimement coordonner l’action des services déconcentrés de l’État et inviter les
représentants des collectivités locales et du monde associatif à coopérer.
3.3. Structurer les politiques locales pour améliorer
la coordination des actions
Dans ce contexte, il s’agissait de faire évoluer le dispositif pour que, d’une part,
il s’insère mieux dans l’organisation administrative de l’État et que, d’autre part,
ses acteurs demeurent mobilisés malgré les tensions suscitées et la lenteur de
mise en œuvre des changements proposés.
L’étape suivante de structuration de la politique locale a donc été de mieux
articuler le programme REAGIR avec les structures administratives locales,
notamment en impliquant plus directement leurs responsables et en organisant la coordination des actions locales à partir de nouveaux outils et dans le
cadre de nouveaux dispositifs : REAGIR ne devient alors que la partie opérationnelle d’un ensemble de dispositifs de planification, de coordination et
d’animation. Ainsi, entre 1986 et 2002, l’accent a été mis sur l’organisation de
la transversalité à l’échelon local pour coordonner les actions des différents
acteurs dans le cadre de la politique nationale élaborée par les CISR. Cette
volonté s’est traduite, à travers des circulaires du délégué, par la mise en
place progressive :
•• d’outils d’analyse et de planification stratégique : document général d’orientation (DGO) de trois à cinq ans, plan départemental de sécurité routière
(PDASR, annuel), Plan de contrôle (annuel), plan de prévention des risques
routiers (annuel) ;
•• de dispositifs de coordination à l’échelon départemental : pôle de compétence sécurité routière réunissant les services déconcentrés de l’État sous
la présidence du préfet et complété parfois de groupes de travail thématiques préparant les réunions du Pôle et intégrant des acteurs associatifs ou
des collectivités locales ; structure partenariale réunissant représentants de
l’État et représentants de collectivités territoriales, notamment du conseil
général ;
•• de nouvelles fonctions de coordination à l’échelon départemental : aux
niveaux stratégique (chef de projet sécurité routière, généralement un
sous-préfet) et opérationnel (coordinateur sécurité routière, généralement
un cadre administratif, parfois un agent de catégorie B ou C) ;
15 Au moins symboliquement en participant aux principaux événementiels et plus généralement à
travers le chef de projet sécurité routière, généralement sous-préfet ou directeur de cabinet.
162
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
•• d’une nouvelle fonction d’assistance et de conseil (formation, information,
aide méthodologique) à l’échelon interdépartemental : chargés de mission
sécurité routière (à temps partiel avec une activité fonctionnelle principale)
au sein de pôles d’animation de sécurité routière ;
•• d’une recherche accrue de coopération avec l’environnement socioprofessionnel à travers la signature de conventions de partenariats.
Le bilan des 20 premières années de politique locale de sécurité ne peut être
que circonspect. Aucune évaluation formelle d’efficacité n’a été réalisée pour
apprécier l’impact global de ces dispositifs sur l’évolution du nombre d’accidents
graves ou mortels. De fait, le nombre de tués sur les routes est passé d’environ
12 000 personnes en 1982 à environ 7 200 en 2002, ce qui est un résultat positif
même si le processus a été très lent. Cependant, il est impossible d’attribuer
directement tout ou partie de ce résultat aux politiques locales ou à l’action du
CISR en tant que structures de coordination, car les facteurs entrant en ligne
de compte dans ce résultat sont nombreux (évolutions qualitatives des véhicules et des infrastructures, nouvelles réglementations coercitives, …) et indirectement liés à l’action de ces structures. Il est fortement probable que l’action de
ces dispositifs transversaux ait amélioré la pertinence des mesures prises et la
coordination de leur mise en œuvre, aussi bien à l’échelon national que local,
mais rien ne nous permet de l’affirmer. C’est leur création, leur fonctionnement et
leur articulation avec les structures administratives traditionnelles que nous allons
maintenant analyser.
4. Acteurs et dispositifs de la politique locale de sécurité
routière en France : difficultés d’une articulation
multiniveaux
Cette volonté de définir à l’échelon interministériel une politique nationale en
matière de sécurité routière et de la décliner localement implique un double enjeu
de coordination :
–– entre l’échelon national et local (dans notre cas, le département) ;
–– entre les dispositifs transversaux (CISR, pôle de compétence) et les structures sectorielles (ministères, services déconcentrés) ou territoriales (conseils
généraux, communes).
La figure ci-dessous propose une représentation simplifiée des relations de
coordination (hiérarchiques ou non) entre ces structures.
Synthèse INRETS n° 57
163
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 1 : liens entre les principaux acteurs de la politique
de sécurité routière
Il apparaît que les cabinets ministériels et les directions d’administration centrale ont seules la capacité formelle de donner des instructions à leurs services.
Les dispositifs transversaux sont alors principalement des espaces de négociation au sein desquels le délégué, à l’échelon national, et le préfet, à l’échelon
territorial, jouent un rôle d’acculturation, d’activation et de coordination d’acteurs
représentant des secteurs aux intérêts souvent hétérogènes, voire divergents. Ce
sont les dispositifs transversaux de ces deux échelons que nous nous proposons
d’étudier.
4.1. Le Comité interministériel de sécurité routière :
dispositif de coordination ou de mise en scène
d’une politique publique ?
À défaut de créer une administration de mission spécifique au traitement du
problème de la sécurité routière, la création du CISR en 1972 visait à créer un
espace institutionnel permettant de définir collégialement une politique au nom
du Premier ministre et à coordonner sa mise en œuvre. Dans ce cadre, chaque
164
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
ministère participant à ce comité avait la charge de mettre en œuvre ses décisions dans son champ de compétences propres. Ce dispositif visait à éviter que
les ministères potentiellement concernés conduisent sans coordination leur propre
politique en matière de sécurité routière ou n’en conduise aucune. Cependant,
si la légitimité institutionnelle du délégué interministériel à piloter ce processus
n’était pas contestable, l’absence de relais opérationnels spécifiques affaiblissait
considérablement ses capacités d’action. Ainsi, même si les activités des CISR
successifs entre 1972 et 1982 ont permis de faciliter l’élaboration de nouvelles
mesures réglementaires et techniques en matière de sécurité routière, leur mise
en œuvre effective est souvent demeurée problématique. La volonté de ne pas
attribuer de moyens d’action spécifiques, la crainte du coût politique d’une application trop systématique des mesures coercitives en matière de vitesse, de port de
ceinture ou de consommation d’alcool, le poids des lobbys routiers ont été autant
de frein à la mise en œuvre de la politique de sécurité routière. Dans ce contexte,
le CISR apparaît avant tout comme un dispositif symbolique visant à montrer que
la sécurité routière est un problème pris au sérieux par les autorités politiques sans
toutefois que son fonctionnement apparaisse déterminant en tant que dispositif de
coordination faute de véritable relais opérationnel.
Dans le contexte des lois de décentralisation et d’une volonté politique ambitieuse de diminuer d’un tiers en cinq ans la mortalité routière, le CISR, du 13 juillet
1982, a doté le DISR de deux nouveaux relais pour assurer la mise en œuvre de
sa politique :
•• au niveau national, il est placé à la tête d’une nouvelle direction centrale du
ministère de l’Équipement et des Transports, la Direction de la sécurité et
de la circulation routières (DSCR) en charge, notamment, de la traduction
technique des décisions du CISR en matière de politique locale de sécurité
routière et du pilotage des programmes qui en découlent ;
•• au niveau local, il peut s’appuyer sur le préfet de département qui a la responsabilité de la mise en œuvre de la politique locale de sécurité routière
définie par les circulaires du DISR.
La création de la DSCR dote donc le délégué d’un « bras séculier » administratif et technique mais l’identifie aussi, de façon privilégiée, à un ministère particulier, ce qui peut altérer sa dimension interministérielle.
Cette évolution illustre bien, selon nous, l’une des difficultés de fonctionnement des dispositifs transversaux :
•• si l’animateur de la politique interministérielle ne peut pas s’appuyer sur un
ministère assez puissant pour peser dans les négociations avec les autres
acteurs, ses capacités d’action demeurent limitées et directement liées au
soutien politique du Premier ministre ou du Président de la République ;
•• si l’animateur de la politique interministérielle est rattaché à un ministère
en tant que directeur d’administration centrale, il n’est plus uniquement le
représentant du Premier ministre mais aussi d’un ministre en charge d’un
secteur particulier, défendant ses propres enjeux sectoriels et politiques.
Synthèse INRETS n° 57
165
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Cette situation risque de fragiliser sa position vis-à-vis des autres ministres
qui peuvent légitimement douter de son impartialité. Dans notre cas, ce risque est accentué lorsque le DISR est issu du ministère de l’Équipement. Là
encore, seul un appui politique marqué du Premier ministre ou du Président
de la République peut compenser le soupçon que suscite son rattachement
sectoriel.
Ainsi, nos différents interlocuteurs ayant participé à des CISR ont pu relever
que le DISR doit à la fois :
•• coopérer étroitement en amont des réunions plénières avec les directeurs
d’administration centrale des autres ministères concernés pour préparer les
décisions présentées et désamorcer par avance les points de divergence.
Les conseillers techniques détachés par les principaux ministères concernés par la sécurité routière auprès du délégué ont alors un rôle important
d’interface ;
•• ne pas se comporter en représentant des intérêts politiques du ministre de
l’Équipement qui pourrait être tenté de s’attribuer le mérite de décisions ou
de résultats qui seraient la conséquence du travail interministériel.
De fait, selon un ancien DISR, il apparaît que dans le cadre de ses fonctions
« les structures formelles sont de peu de portée au regard des relations personnelles [nouées avec les autres acteurs] et de la situation politique ». Enfin, nos
interlocuteurs ont souligné l’importance des groupes de pression dans les débats
interministériels et la concurrence que se livrent les différents ministères pour se
voir attribuer de nouvelles prérogatives, et les ressources liées, ou pour conserver leurs prérogatives existantes lorsque le thème de la sécurité routière devient
« politiquement porteur ».
Les décisions prises par le CISR sont donc le fruit de négociations et d’équilibres délicats à instaurer pour lesquels le DISR joue un rôle proche de celui d’un
directeur de programme qui n’aurait pas de relation hiérarchique avec les autres
acteurs du processus décisionnel. Sa capacité à élaborer des décisions de compromis « présentables » à l’opinion et pouvant donner rapidement des résultats
positifs apparaît plus importante que sa capacité à élaborer une stratégie à moyen
et long terme visant à traiter en profondeur le problème de la sécurité routière.
L’enjeu des CISR est alors plus politique et médiatique que stratégique et technique : le « vrai » travail se fait en amont entre le délégué, ses conseillers techniques, les directeurs de cabinet et les directeurs d’administration centrale. Le
CISR met alors médiatiquement « en scène » les décisions prises préalablement
à travers une réunion des ministres concernés et un communiqué de presse.
Leur mise en œuvre repose ensuite essentiellement, d’une part, sur la traduction des décisions par les directions centrales des ministères concernés en
circulaires destinées à leurs services, d’autre part, sur la capacité du préfet d’activer et de coordonner les responsables des services déconcentrés de l’État et les
autres acteurs locaux, notamment dans le cadre des pôles de compétence. Enfin,
pour être effectives, voire efficaces, les actions locales reposent sur l’implication
166
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
d’acteurs de terrain, fonctionnant en réseaux plus ou moins formels, notamment
issus du programme REAGIR. C’est le rôle de ces deux dispositifs locaux que
nous allons analyser.
4.2. Le rôle politique et managérial du préfet en matière
de sécurité routière : un acteur incontournable mais difficile
à impliquer
Le choix de confier au préfet la responsabilité de la mise en œuvre de la politique locale de sécurité routière est cohérent avec l’évolution de son rôle suite aux
lois de décentralisation de 1982.
En effet, bien que dépendant hiérarchiquement du ministère de l’Intérieur, le
rôle de « direction générale des services déconcentrés de l’État » confié au préfet
le plaçait dans une position privilégiée pour piloter la mise en œuvre de politiques
interministérielles (cf. Figure 1). Cependant, c’est à moyens constants que les
préfets se sont vus attribuer la responsabilité de la mise en œuvre des programmes locaux de sécurité routière dont les caractéristiques étaient, en outre, des
plus inhabituelles.
En effet, « objectif – 10 % » était la première tentative formelle d’instaurer des
relations contractuelles entre l’État et des collectivités locales, et REAGIR est un
réseau en marge de l’organisation administrative classique. Ce réseau est de fait
essentiellement composé de volontaires, issus de différents services déconcentrés de l’État (et notamment du ministère de l’Équipement, des forces de l’ordre,
des services de secours et de santé) et qui, en plus de leur activité professionnelle, ont accepté bénévolement de participer au programme. Étonnant mélange
d’approches militante, technique et administrative, REAGIR a eu les plus grandes
difficultés à être accepté par les structures administratives traditionnelles tant sa
logique leur est étrangère, voire suspecte.
On peut comprendre, dans ce contexte, que ces programmes n’aient généralement pas suscité l’adhésion des préfets, par ailleurs, accaparés par de nombreuses autres missions. La structuration croissante de la politique locale de
sécurité routière à travers des dispositifs de gestion plus classiques et l’identification d’acteurs spécifiques au sein des préfectures a entraîné un besoin croissant
d’implication du préfet16, seul acteur à l’échelon local pouvant légitimement coordonner l’action des services déconcentrés de l’État et inviter les représentants
des collectivités locales et du monde associatif à coopérer.
La première interrogation suscitée par cette situation est relative au pouvoir
dont dispose le DISR pour influencer le préfet. D’un point de vue formel, le préfet
doit obligatoirement mettre en œuvre les instructions du DISR, mais de fait le
préfet est quotidiennement assailli de circulaires toutes aussi urgentes et impérieuses les unes que les autres, émanant des services centraux de l’État, et il doit
16 Au moins symboliquement en participant aux principaux événementiels et plus généralement à
travers le chef de projet sécurité routière, généralement sous-préfet ou directeur de cabinet.
Synthèse INRETS n° 57
167
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
donc implicitement hiérarchiser les priorités. Dans ce cadre, quels enjeux représentent, pour lui, la politique locale de sécurité routière ?
De prime abord, ces enjeux peuvent sembler relativement faibles : sauf catastrophe exceptionnelle impliquant de nombreuses victimes, l’accident de la circulation est plutôt banalisé, et ce risque a pendant longtemps été intériorisé par la
majorité des usagers, contrairement, par exemple, à certains risques sanitaires
dont les conséquences sur la vie humaine se sont finalement révélés relativement
marginaux (comme la maladie de la vache folle).
En outre, la politique locale de sécurité routière relève en grande partie d’actions de prévention qui produisent, éventuellement, des effets à moyen–long
terme que l’on ne peut généralement pas imputer directement à leur crédit. Or,
le préfet et ses plus proches collaborateurs ne sont en poste que pour quelques
années et doivent régulièrement agir dans l’urgence. Il ne leur est pas naturel
de s’investir lourdement dans une telle politique publique dont la pérennité au
niveau local repose, de fait, sur le coordinateur sécurité routière. Cependant, son
positionnement hiérarchique et son rôle essentiellement opérationnel ne lui permettent pas de se substituer, même temporairement, au chef de projet, et encore
moins au préfet, dans le rôle hiérarchique et politique qu’ils doivent jouer auprès
des acteurs locaux.
La seconde interrogation porte sur les marges de manœuvre réelles du préfet
pour susciter la coopération des acteurs locaux.
Concernant les services déconcentrés de l’État, le préfet dispose d’une autorité directe sur les chefs des services déconcentrés qu’il peut décider d’exercer
avec plus ou moins de fermeté. Cependant, ce pouvoir est à relativiser :
•• d’une part, tous les services de l’État ne sont pas sous l’autorité du préfet :
la justice est indépendante. Par ailleurs, la gendarmerie et l’Éducation nationale disposent de marges de manœuvre relatives ;
•• d’autre part, les liens entre les services déconcentrés et les directions centrales de leurs ministères sont généralement plus étroits qu’avec le préfet :
l’autorité fonctionnelle du ministère apparaît plus prégnante que l’autorité
territoriale du préfet. De fait, les instructions émanant des services centraux
des ministères ont un fort impact sur la nature et l’intensité de l’implication
des services déconcentrés dans la politique locale de sécurité routière, dont
la problématique n’est généralement pas au cœur de leurs missions.
Dans ce contexte, la mise en place du PDASR, du DGO puis, plus récemment, celle du pôle de compétence État ont contribué à créer des espaces où
les services déconcentrés de l’État sont conduits à réfléchir en termes d’enjeux,
d’objectifs, de moyens et de plans d’actions en matière de sécurité routière. Les
outils et les structures permettant implication et coordination des services de l’État
en matière de sécurité routière sont depuis quelques années stabilisés, fonctionnent généralement de façon effective, mais la question de leur efficacité demeure
encore ouverte, les bilans ponctuels sur ce sujet montrant une grande hétérogénéité des situations en fonction du contexte local.
168
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
Ainsi, le pôle de compétence sécurité routière est un dispositif qui offre l’opportunité au préfet de rassembler les principales parties prenantes de la politique
locale de sécurité routière (les chefs des services déconcentrés, les responsables
des forces de l’ordre, le représentant de la justice, éventuellement des représentants des collectivités locales) afin d’élaborer une politique locale de sécurité
routière sur la base de réflexions en termes d’enjeux, d’objectifs, de moyens et
de plans d’actions, dans le cadre des orientations nationales. Il doit néanmoins,
comme le délégué, s’appuyer sur le soutien des directions centrales de chaque
ministère concerné pour convaincre les chefs des services déconcentrés de s’impliquer dans la politique locale : faute d’un tel soutien, il est difficile pour le préfet
d’obtenir une véritable implication opérationnelle des services déconcentrés.
Généralement, le pôle de compétence sécurité routière de chaque département fonctionne de façon formelle mais son efficacité peut être très variable : les
bilans ponctuels sur ce sujet montrent une grande hétérogénéité des situations
en fonction du contexte local, du simple rituel administratif au véritable dispositif
de management17 de la politique locale. En effet, ce sont, in fine, des variables
contextuelles comme l’engagement du préfet et/ou du chef de projet, la vitalité du
réseau REAGIR, l’action des chargés de mission, les compétences reconnues
du coordinateur sécurité routière mais aussi la qualité des relations nouées entre
les différents acteurs locaux aux échelons techniques et politiques (notamment
l’historique des relations entre la préfecture et le conseil général) qui influencent
de façon déterminante l’efficacité et la pérennité des politiques locales de sécurité
routière. C’est en définitive l’aptitude des responsables opérationnels (notamment
le coordinateur) à constituer des réseaux de partenaires et d’acteurs, à les piloter
selon une logique de management de projets, à valoriser leurs actions auprès des
responsables et des médias et enfin à évaluer leur efficacité qui s’avère déterminante. Or, ces processus managériaux semblent plus s’intégrer malgré les dispositifs organisationnels existants que grâce à eux.
Disposant de ressources limitées, aussi bien en termes de pouvoir formel que
budgétaires, ces dispositifs transversaux ne peuvent agir sans la coopération des
structures sectorielles et territoriales traditionnelles. Parfois créés de toute pièce
par décret ou circulaire dans un but précis, parfois venant institutionnaliser des
pratiques existantes ou expérimentales, ils ont pu effectivement jouer un véritable
rôle dans l’élaboration de politiques nationales et dans leur management local,
mais ils ont pu aussi fonctionner de façon symbolique et ritualisée.
Concernant les collectivités locales, la domination hiérarchique du préfet, qui
précédait les lois de décentralisation de 1982, s’est transformée en des liens complexes de coopération, chaque acteur ayant régulièrement besoin de faire appel à
l’expertise, ou aux ressources de l’autre, mais aussi de concurrence quant à leurs
frontières respectives et à l’accès aux ressources. L’incapacité chronique de la
DSCR à proposer aux préfets une structure de coordination comparable au pôle
17 Au sens d’un ensemble articulé et cohérent de processus de finalisation, d’organisation, d’animation
et de contrôle (Bartoli, 2005).
Synthèse INRETS n° 57
169
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
de compétence État pour développer une logique partenariale avec les autres
acteurs locaux, et particulièrement les collectivités locales, nous apparaît assez
symptomatique de la difficulté rencontrée par l’État français à passer d’une logique
hiérarchique à une logique d’animation et de partenariat avec les autres acteurs
sociaux sur des champs partiellement non régaliens (Chomienne, 2004b). Cette
difficulté est accentuée dans le cas de la sécurité routière qui couvre l’ensemble
du spectre de l’action publique, de ses aspects les plus régaliens (maintien de
l’ordre, législation…) à des dimensions plus techniques (infrastructures, véhicules…) ou les plus ancrées dans la société civile (moralisation des comportements,
éducation, formation…).
Ce sont, in fine, des variables contextuelles comme l’engagement du préfet
et/ou du chef de projet, la vitalité du réseau REAGIR, l’action des chargés de
mission, les compétences reconnues du coordinateur mais aussi la qualité des
relations nouées entre les différents acteurs locaux aux échelons techniques et
politiques (notamment l’historique des relations entre la Préfecture et le Conseil
Général) qui influencent de façon déterminante l’efficacité et la pérennité des politiques locales de sécurité routière. C’est en définitive l’aptitude des responsables
opérationnels (notamment le coordinateur) à constituer des réseaux de partenaires et d’acteurs, à les piloter selon une logique de management de projets, à
valoriser leurs actions auprès des responsables et des médias et enfin à évaluer
leur efficacité qui s’avère déterminante pour la mise en œuvre des politiques locales de sécurité routière. Or, ces processus managériaux semblent plus s’intégrer
malgré les dispositifs organisationnels existants que grâce à eux et ne peuvent
émerger que si le coordinateur développe un engagement
4.3. Les politiques locales de management de la sécurité
routière depuis le 14 juillet 2002 : impulsion politique et
accroissement du contrôle–sanction
La pression politique, l’implication d’acteurs administratifs clés, le relais des
médias, la perception du risque routier par les usagers (Galland 2002) sont autant
de facteurs qui créent un contexte plus ou moins favorable pour que ces dispositifs
transversaux jouent un véritable rôle managérial de coordination entre des structures traditionnelles aux objectifs et aux modes d’action hétérogènes. Le caractère soudainement prioritaire qu’a pris cette politique publique, lorsqu’elle a été
déclarée chantier présidentiel le 14 juillet 2002 par le Président de la République,
a directement contribué à activer spectaculairement les dispositifs transversaux
nationaux (CISR) et locaux (notamment le pôle de compétence) en charge de
cette politique. Réunis jusqu’alors en moyenne une fois par an, ces dispositifs
ont été fortement sollicités18, d’une part, pour illustrer symboliquement la priorité
présidentielle, d’autre part, pour élaborer, communiquer et mettre en œuvre des
séries de mesures techniques et réglementaires visant à donner une nouvelle
dimension à cette politique publique. L’annonce de la mise en place des radars
18 Le
170
rythme de réunion des CISR est généralement trimestriel.
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
automatiques et de l’application stricte des règles (circulaire « anti-indulgence »,
instructions de fermeté de la Chancellerie aux tribunaux) en matière de sécurité
routière a rapidement donné des résultats significatifs19.
Les dispositifs transversaux en place depuis de nombreuses années ont permis de réduire le temps de latence entre la déclaration politique et sa mise en
œuvre. Ils ont pu jouer dans ce nouveau contexte leur rôle « technique » de dispositif de coordination dans la mesure où les acteurs sectoriels et territoriaux étaient
généralement mobilisés par le caractère prioritaire de cette politique (Bartoli,
Chomienne, 2005). Des procédures accélérées ont ainsi permis de mettre rapidement en place les premiers radars automatiques fixes, et des circulaires ministérielles ont fortement incités les services déconcentrés à accroître leur contribution
à la politique locale, notamment dans le cadre des pôles de compétence. Les
préfets ont été amenés, lorsque la sécurité routière représentait un véritable enjeu
pour leur département, à s’impliquer plus directement dans l’élaboration et l’animation de la politique locale, les résultats obtenus dans ce domaine devenant un
critère d’évaluation significatif de leur action. Enfin, nos entretiens, conduits en
2003 et 2004, auprès des acteurs nationaux et locaux ont mis en évidence l’effet
mobilisateur de cette déclaration présidentielle, et de ses suites, sur les acteurs
de terrain qui, pour beaucoup, finissaient par se décourager face au manque de
soutien. La rénovation de REAGIR, qui s’essoufflait depuis une dizaine d’années
sans que cela semble préoccuper les autorités politiques, est une autre mesure
visant à traduire, au moins symboliquement, la volonté politique de traiter le problème de la sécurité routière en s’appuyant sur des réseaux d’acteurs locaux.
REAGIR étant issu d’expériences de terrain, son nouveau format, « AGIR pour
la sécurité routière », fortement associé au chantier présidentiel, suscitera-t-il la
même mobilisation que le programme initial ? Avec quels résultats mesurables ?
Plus largement, une fois l’impulsion politique initiale atténuée, quel régime de
fonctionnement adopteront les dispositifs transversaux, comment évoluera l’articulation avec les structures sectorielles et territoriales traditionnelles ?
Ces questions demeurent largement ouvertes même si l’une des conséquences les plus visibles de l’impulsion présidentielle a été un fort accroissement de
la dimension contrôle–sanction dans le management local de la sécurité routière,
et notamment des contrôles de vitesse avec le déploiement des dispositifs de
contrôle de vitesse automatisés.
5. La place du contrôle de vitesse dans le management
local de la sécurité routière
Lors de l’étude que nous avons conduite entre 2002 et 2004, nos interlocuteurs avaient souligné les faiblesses du dispositif de contrôle–sanction, notamment en matière de vitesse, en place jusqu’au déploiement des dispositifs de
19 Soit
6,2 % de tués en moins en 2003 par rapport à 2002, 20,9 % de tués en moins en 2003 par
rapport à 2002, soit environ 5 700 tués, 8,7 % de tués en moins en 2004 par rapport à 2003 (5 443
tués à six jours). Source : Observatoire de la sécurité routière.
Synthèse INRETS n° 57
171
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
contrôle automatisé (Chomienne, 2004a). D’autres travaux ont aussi mis en exergue les difficultés rencontrées dans ce domaine (Guyot, 2002 ; Ternier et al.,
2003), notamment au regard de la problématique de la vitesse (Namias, 1995).
Au regard de ces études, ces faiblesses apparaissaient essentiellement être d’ordre politique, organisationnel et technique.
La déclaration présidentielle du 14 juillet 2002 et les mesures prises à sa
suite dans le cadre des CISR successifs ont donné une forte impulsion politique,
relayée par des circulaires et des orientations émanant des principaux ministères
concernés par la politique de SR. Ainsi, dans le domaine du contrôle–sanction, le
ministère de l’Intérieur pour la police nationale, le ministère de la Défense pour la
gendarmerie et le ministère de la Justice pour les procureurs de la République ont
formellement relayé la volonté présidentielle de faire de la lutte contre l’insécurité
routière une priorité pour les services opérationnels. Ce relais « vertical » est venu
appuyer les dispositions « horizontales » prises lors des CISR, soutien qui avait
souvent fait défaut dans le passé pour activer les dispositifs mis en place tout au
long des années 1980 et 1990. Comme nous l’avons montré précédemment, les
outils de planification et d’animation, ainsi que les dispositifs de coordination existaient mais étaient jusqu’alors que partiellement activés par les acteurs de terrain,
faute d’incitations et de ressources : l’impulsion politique présidentielle et la mise
en place rapide du programme de contrôle–sanction automatique ont permis de
renforcer et d’activer les dispositifs existant en matière de contrôle de vitesse. Ce
sont ces derniers que nous allons présenter à partir d’une étude documentaire et
de l’étude du cas de deux départements au sein desquels nous avons interrogé
les principaux acteurs du contrôle de vitesse20.
5.1. Les dispositifs de contrôle à l’échelon départemental :
le rôle des plans départementaux de contrôle routier
Nous avons présenté dans une partie précédente le rôle central que joue le
préfet et son équipe (chef de projet SR et coordinateur SR) dans l’élaboration et la
mise en œuvre de la politique locale de sécurité routière. Ce rôle demeure primordial dans le cas du contrôle de vitesse dans la mesure où il est le seul acteur local
disposant de la légitimité à coordonner l’action des principaux acteurs dans ce
domaine : les forces de l’ordre, la justice et l’équipement. De plus, il doit s’assurer
que les actions en matière de contrôle soient cohérentes avec les actions locales
de SR en matière de prévention et d’éducation dans le cadre du plan annuel d’actions de sécurité routière (PDASR), conformément aux orientations stratégiques
fixées dans le DGO élaboré pour cinq ans. Pour ce faire, il doit réunir régulière20 Les
deux départements étudiés sont la Savoie et la Drôme où nous avons interrogé dans le cadre
d’entretiens semi-directifs : le chef de projet SR (directeur de cabinet du préfet), l’adjoint du directeur
départemental de la police nationale en charge de la SR, l’officier de gendarmerie commandant
l’Escadron départemental de SR (EDSR), les responsables de la Cellule départementale d’exploitation
et de SR (CDES) à la DDE, le substitut du procureur en charge de la SR. Ces entretiens ont pu
être organisés grâce à la collaboration de la chargée de mission SR de la Savoie (préfecture) et de
coordinatrice SR de la Drôme (préfecture).
172
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
ment le pôle de compétence SR comprenant l’ensemble des parties prenantes
de la SR à l’échelon départemental (dont éventuellement des représentants du
conseil général, de communes, d’associations) afin de coordonner et d’animer sa
politique de SR. Le contenu du PDASR et du DGO résulte pour partie des échanges et des décisions prises dans le cadre du pôle de compétence SR, et leur mise
en œuvre est aussi orientée par les activités du pôle.
La politique locale de contrôle–sanction est naturellement prise en charge par
ce dispositif puisqu’elle représente une facette importante de la politique locale de
SR. Cependant, il ait apparu que la mise en œuvre du contrôle–sanction souffrait
généralement d’un manque de coordination, ce qui a conduit le CISR du 2 avril
1999 à demander aux préfets d’élaborer systématiquement un plan départemental de contrôles routiers visant justement à assurer la coordination des acteurs du
contrôle–sanction. La circulaire interministérielle (Équipement, Intérieur, Justice,
Défense) du 20 janvier 2000 destinée aux préfets et aux procureurs généraux
a matérialisé cette demande en dressant les contours de ce plan de contrôles
routiers (cf. Annexe 1). Ainsi, cette circulaire dispose que l’objectif du plan de
contrôles routiers « (…) est d’optimiser l’utilisation et l’efficacité des moyens de
contrôle dont [disposent les préfets] », en renforçant la coopération de tous les
services concernés. Bien qu’annuel, ce plan devra se décliner quadrimestre par
quadrimestre afin de le réajuster en fonction des résultats obtenus. Il s’articulera
autour de trois axes :
–– analyse de la situation locale et définition des objectifs ;
–– optimisation des moyens par rapport aux objectifs poursuivis ;
–– évaluation des résultats. »
Toutefois, le CISR du 25 octobre 2000 a souligné que la mise en œuvre des
plans de contrôle se révélait difficile et les situations très hétérogènes, suivant
les départements. Un groupe de travail a alors été constitué afin de proposer aux
acteurs locaux un cadre méthodologique plus précis que la circulaire du 20 janvier
2000 : la note méthodologique, relative aux plans départementaux de contrôles
routiers du 13 septembre 2001, est l’aboutissement des réflexions de ce groupe
et fait référence dans ce domaine (cf. Annexe 2).
Le rappel régulier, dans les circulaires du DISR, de la nécessité d’élaborer des
plans départementaux de contrôles routiers met en évidence que la mise en place
de ce dispositif demeure à l’initiative du préfet21. En outre, un tel plan peut être
conçu de façon purement formelle, afin d’afficher simplement qu’un tel document
a été produit, sans que le processus d’élaboration ou de mise en œuvre produise,
en pratique, des actions concertées entre les acteurs.
Ainsi, la circulaire du DISR du 31 janvier 2004 souligne que « des disparités
fortes apparaissent encore d’un département à l’autre quant à la qualité et au suivi
de ces plans », et il demande aux préfets de les évaluer. Dans cette même circulaire, il invite les préfets « à veiller à l’articulation entre la politique de contrôles et
21 Dans
l’un des deux cas étudiés, le plan de contrôles routiers n’était plus élaboré depuis le
changement d’équipe de direction au sein de la préfecture.
Synthèse INRETS n° 57
173
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
la politique pénale et à intégrer, dans cette réflexion, l’implantation des dispositifs
de contrôle automatique ». Ces derniers ne doivent pas avoir pour conséquence
« de diminuer le nombre et la fréquence des contrôles classiques de vitesse avec
ou sans interception mis en œuvre par les services de police et de gendarmerie ».
Enfin, cette circulaire rappelle que « le plan de contrôle fait partie du plan départemental d’actions de sécurité routière et, à ce titre, une cohérence doit être recherchée avec les politiques de prévention et d’aménagement des infrastructures,
notamment pour la signalisation routière » et que les DDE « doivent s’impliquer
fortement pour la mise en œuvre de ces actions, pour le réseau qu’elles gèrent
mais également pour susciter auprès des collectivités territoriales cette même
implication ».
Cette circulaire illustre la difficulté récurrente d’organiser la coordination entre
les acteurs des contrôles routiers. Traditionnellement, ces acteurs agissaient
chacun dans leur domaine en fonction de leurs propres objectifs et de façon
assez cloisonnée. Les différents dispositifs transversaux mis en place depuis
1982 (REAGIR, PDASR, DGO, pôle de compétence) visaient à décloisonner
les actions de SR à l’échelon départemental en donnant aux préfets les outils
permettant d’aborder les problèmes de SR de façon globale et cohérente. Le
plan de contrôles routiers est un outil supplémentaire visant le même objectif et
rencontrant les mêmes difficultés de mise en œuvre : volonté variable du préfet
de coordonner l’action des acteurs locaux, réticence de ces derniers à coopérer
et à remettre en question leurs pratiques antérieures, fragilité des dispositifs en
place dont le fonctionnement repose sur l’implication de quelques acteurs, relative impuissance de la DSCR à homogénéiser les pratiques en matière de management de la SR à l’échelon départemental, absence d’évaluation d’efficacité,
d’efficience ou d’impact.
Toutefois, la mise en place du contrôle–sanction automatisé est venu réinterroger les pratiques traditionnelles et semble avoir contribué, au moins dans certains
cas, à faire évoluer l’organisation du contrôle–sanction.
5.2. L’impact du contrôle–sanction automatique sur
les dispositifs locaux de sécurité routière
Comme nous l’avons montré précédemment, les plans de contrôles impliquent, sous l’impulsion du préfet, trois catégories d’acteurs qui doivent tenter de
coordonner leurs actions.
•• Les acteurs du contrôle–sanction : missions et articulations
En amont des contrôles, la DDE, à travers sa CDES, analyse l’accidentologie
locale, les flux de circulation et les vitesses puis communique ces informations
aux forces de l’ordre pour organiser leurs contrôles. De plus, elle a la charge
d’étudier la pertinence technique de la signalisation, des aménagements et des
limitations de vitesse au regard notamment de l’accentologie et des vitesses relevées. Par ailleurs, dans le cadre de la mise en place des radars automatiques
fixes, elle apporte une expertise technique dans le choix de leurs emplacements,
174
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
pilote leur mise en place et leur maintenance. Enfin, elle apporte une contribution
méthodologique à la réalisation du DGO, normalement réalisé en partenariat avec
le conseil général et les collectivités locales dont l’objet est de définir les enjeux
prioritaires à cinq ans en matière de SR au niveau du département. Le DGO sert
de cadre stratégique à la politique locale de SR, et notamment à la politique de
contrôle sanction.
Les forces de l’ordre, police et gendarmerie, ont en charge la mise en œuvre
des contrôles routiers sur leurs territoires respectifs. La gendarmerie contrôle les
zones rurales et périurbaines traversées par les principaux axes routiers où ont
lieu la grande majorité des accidents mortels. Pour ce faire, elle dispose d’un
escadron départemental de SR22 (EDSR) et peut s’appuyer sur les brigades territoriales. Le choix des types et des zones de contrôle est lié à l’accidentologie, à
des périodes particulières (vacances par exemple) mais est aussi laissé à l’initiative des brigades en fonction de leur connaissance du terrain. Un plan mensuel
de contrôles routiers est généralement élaboré par le responsable de l’EDSR et
vise à :
–– contrôler systématiquement les principaux axes de circulation (un radar
tous les x km) ;
–– multiplier des contrôles mobiles sur une zone déterminée ;
–– organiser des opérations coordonnées avec la police nationale en zone
périurbaine.
Ce plan de contrôle gendarmerie constitue un outil opérationnel pour organiser les contrôles et s’inscrit dans le cadre du plan départemental de contrôles
routiers (normalement annuel lorsqu’il existe) et du PDASR. L’objectif principal
des contrôles, tel qu’il nous a été présenté, est « d’apaiser la circulation par une
présence visible des contrôles sur tout le territoire » en concentrant les moyens
sur des axes ou des zones et en communiquant via la presse en amont (avertissements) et en aval (résultats).
La police nationale couvre des zones urbaines où il y a généralement peu
d’accidents graves même si les piétons ou les deux roues peuvent représenter
un enjeu sensible. Elle dispose d’une unité spécialisée comprenant, dans nos
deux cas, entre 10 et 15 agents, mais elle peut aussi s’appuyer sur l’action de
ses autres unités dans la mesure où les missions de SR sont intégrées dans les
missions plus larges de lutte contre la délinquance. L’organisation des contrôles
est voisine de celle de la gendarmerie, quoique probablement moins formalisée
au regard des effectifs directement concernés. L’objectif affiché est « d’exercer
une répression visible et communiquer à des fins de prévention ». La coopération entre police et gendarmerie semble ponctuelle dans le cadre d’opérations de
grande envergure, programmées dans le plan de contrôles routiers et visant à
contrôler de façon ininterrompue des axes routiers traversant leurs zones respectives. Cependant, nos interlocuteurs ont généralement regretté la relative rareté
de telles coopérations.
22 Dans
les deux cas que nous avons étudiés, les EDSR comptaient entre 120 et 140 gendarmes.
Synthèse INRETS n° 57
175
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
En aval, la justice a longtemps constitué l’un des maillons faibles de la chaîne
de contrôle–sanction, dans la mesure où les infractions de la route n’apparaissaient pas devoir être traitées en priorité au regard des nombreuses autres missions des tribunaux et du manque de ressources pour toutes les traiter. Ainsi, elles
étaient fréquemment classées sans suite ou ne faisaient pas l’objet de condamnations sensibles. Par ailleurs, certains contrevenants pouvaient échapper aux
sanctions par des moyens détournés (« indulgences »).
Néanmoins, les procureurs disposent de marges de manœuvres significatives
pour appliquer la politique pénale nationale, et les infractions de la route peuvent
faire l’objet de poursuites plus systématiques, suivant les départements. La politique du procureur de la République doit normalement être harmonisée avec la
politique locale de SR définie par le préfet mais ce dernier ne peut l’y contraindre.
Le cadrage national du ministère de la Justice et sa propre perception des enjeux
de la SR orientent fortement sa politique en matière de SR ainsi que son engagement dans la politique locale de SR.
La politique nationale en matière de sanctions relatives aux infractions routières s’étant particulièrement durcie depuis 2002, les politiques locales en matière
de sanction ont eu tendance à suivre la même direction et à être homogène. Cette
évolution a été rendue possible par d’importantes réformes juridiques (loi relative
à la violence routière du 12 juin 2003, réforme dite « Perben 2 » de mars 2004)
qui ont offert aux services des procureurs une réponse pénale adaptée à chaque
catégorie d’infraction. Ainsi, un traitement de masse peut être fait des infractions
« moyennes », seuls les faits les plus graves font désormais l’objet d’audiences
judiciaires classiques et d’un traitement généralement plus sévère qu’auparavant.
Dans ce contexte, les procureurs peuvent adapter leur politique de sanction en
fonction des infractions qui semblent les plus problématiques au regard de l’accidentologie locale et des priorités du DGO.
•• L’impact du contrôle–sanction automatique sur les pratiques de contrôle
La mise en place effective du contrôle–sanction automatique a permis d’accroître les opportunités de coopération entre les acteurs et leur a permis de redéployer sur le terrain des membres des forces de l’ordre jusqu’alors fortement
mobilisées par le traitement administratif du contrôle–sanction.
En effet, le déploiement des radars automatiques combiné avec l’impulsion
politique, le fort relais des administrations centrales et l’existence à l’échelon local
d’acteurs et de dispositifs en charge de la SR a créé un cadre propice à une évolution des pratiques en matière de contrôles de vitesse.
Les études d’implantation des radars fixes ont naturellement rapproché les
services de l’Équipement des autres acteurs dans la mesure où ils ont largement
contribué à éclairer les décideurs sur le choix des emplacements. Par ailleurs, le
déploiement de ces appareils a réactivé les réflexions sur la signalisation et l’analyse locale de la pertinence des limitations de vitesse afin de tenir compte des
nouveaux moyens de contrôle. Plus largement, le déploiement des radars automatiques fixes et mobiles doit se faire en tenant compte des enjeux prioritaires
176
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
du DGO, puisqu’ils sont des moyens au service de la politique locale de sécurité
routière : leur rôle doit être autant dissuasif que répressif et leurs emplacements
en lien avec l’accidentologie locale et les enjeux prioritaires.
Le déploiement des radars automatiques a eu un fort impact sur les pratiques
de contrôles routiers des forces de l’ordre. Combiné avec des instructions hiérarchiques mettant l’accent sur l’importance des contrôles routiers, ces dispositifs
automatiques ont permis de franchir les deux principaux obstacles qui entravaient
l’action des forces de l’ordre en matière de contrôle de vitesse.
Le premier obstacle était le travail administratif très important suscité par le
traitement des infractions constatées lors des contrôles de vitesse classiques : les
délais de développement des pellicules et des procédures lourdes avaient pour
effet de déconnecter nettement le constat de l’infraction de la réception par le
contrevenant du procès verbal. Ainsi, le constat d’infraction apparaissait peu apte
à faire évoluer le comportement des usagers, et ce d’autant plus que la probabilité
de se faire contrôler était faible et qu’ils pouvaient espérer échapper à la sanction
(amnistie, indulgence, …). Le caractère automatique et très rapide du traitement
des infractions relevées par les moyens de contrôle automatique résout les problèmes de traitement des procédures qui se révélaient bloquant pour le système
de contrôle–sanction. Les radars mobiles automatiques constituent un outil complémentaire aux radars automatiques fixes (CAF) car, dans le cadre des plans de
contrôles, ils permettent de traiter des zones techniquement inaccessibles aux
CAF, de se placer en amont ou en aval des CAF, d’être chaque jour présent sur
de longues périodes23 à des emplacements différents.
Les infractions de masse étant désormais traitées automatiquement, les forces de l’ordre peuvent consacrer plus de temps à des contrôles plus nombreux
et plus « qualitatifs ». Par exemple, les jumelles laser, très souples d’utilisation,
permettent d’établir un contact direct avec les usagers interceptés à des fins de
sanction mais aussi pédagogiques. En outre, les moyens traditionnels demeurent
utiles pour cibler les usagers qui échappent largement aux contrôles automatiques (PL, étrangers, fausses plaques, …).
Le second obstacle se situait en aval des contrôles et était lié aux défaillances
du système de sanction. Au-delà des voies détournées permettant d’échapper
aux sanctions, les instances judiciaires n’ont jamais eu les moyens de traiter la
masse d’infractions routières qui leur parvenaient et devaient faire l’objet d’un traitement lourd. Ainsi, les cas les plus graves se trouvaient traités au même niveau
que les infractions plus légères, contribuant à banaliser les premiers, voire à en
classer un grand nombre sans suite, les infractions routières n’étant pas prioritaires pour les parquets au regard des autres problèmes de sécurité. Ces pratiques
fréquentes de classement sans suite des infractions routières n’encourageaient
pas les forces de l’ordre à s’investir lourdement dans les missions de contrôle de
vitesse à partir du moment où une partie significative de leur travail ne donnait
pas lieu à sanction. Le contrôle–sanction automatisé et des modifications de la
23 Une
activité journalière d’au moins huit heures est généralement demandée par le préfet.
Synthèse INRETS n° 57
177
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
procédure pénale24 permettent aux autorités judiciaires de ne plus être saturées
par les infractions « moyennes » et ainsi de traiter spécifiquement les infractions
les plus lourdes, au-delà de la quatrième catégorie. Désormais, les procureurs
peuvent réprimer systématiquement les infractions constatées que leur transmettent les forces de l’ordre :
•• les délits non intentionnels peuvent faire l’objet d’un simple rappel à la loi ;
•• les délits « mineurs » (petites alcoolémies, refus d’obtempérer, défaut d’assurance ou de permis, …) peuvent faire l’objet d’ordonnances pénales
délictuelles (traitement par courrier sans audience) ;
•• les délits plus graves (ex. : alcoolémie moyenne) peuvent faire l’objet d’un
plaider coupable lors d’une audience devant le procureur qui propose une
sanction qui, si elle est acceptée par le prévenu, est homologuée par le juge
et exécutée ;
•• les délits graves (ex. : alcoolémie lourde) peuvent faire l’objet d’une audience
correctionnelle avec un juge unique qui prononce généralement des sanctions plus dures que ce qui et proposé en « plaider coupable » ;
•• pour les accidents corporels avec situation aggravante, une comparution
immédiate à l’issue de la garde à vue peut être organisée, les peines prononcées étant généralement sévères ;
•• enfin, pour les cas les plus graves (accidents de transports collectifs, matières
dangereuses, …), une information judiciaire doit généralement être ouverte.
Alors qu’auparavant tous les délits, quelle que soit leur gravité, passaient en
audience, il existe désormais une réponse pénale graduelle en fonction de la gravité des délits, l’audience étant réservée aux cas les plus lourds qui sont traités
de façon approfondie. Les cas de récidive entraînent généralement un passage
devant un juge quelle que soit la gravité du délit. Enfin, les délits les plus légers
peuvent donner lieu à une alternative aux poursuites (stage spécifique) si le procureur est favorable à ce type de dispositif.
Le contrôle–sanction automatique, dans sa phase de mise en place, a provoqué de nombreuses interactions entre les acteurs du contrôle–sanction et a
été généralement l’occasion d’activer ou de pérenniser l’élaboration des plans
départementaux de contrôles routiers. Ces derniers, comme les autres dispositifs
transversaux, produisent de la coordination grâce à la prise de décision commune
et à la diffusion d’information mais aussi une culture commune en matière de
SR. Cette culture commune permet d’aborder la SR de façon plus globale, plus
systémique que les approches spécialisées traditionnelles qui ne traitent qu’un
aspect du problème (infrastructures, prévention, contrôle, sanction). Le contrôle
24 Notamment,
le décret no 2003-293 du 31 mars 2003 relatif à la sécurité routière et modifiant le code
de procédure pénale et le code de la route qui étend la procédure de l’amende forfaitaire à l’ensemble
des contraventions de 4e classe du code de la route, rétablissement pour certaines d’entre elles de
la peine complémentaire de suspension du permis de conduire, création d’une contravention de 2e
classe pour « téléphone portable tenu en main » (retrait de deux points), aggravation des sanctions du
port de la ceinture et du casque (4e classe et retrait de trois points pour les deux).
178
Synthèse INRETS n° 57
Le management local de la sécurité routière en France : dispositifs, acteurs et outils
de vitesse est alors un moyen parmi d’autres au service d’une politique locale
et nationale de lutte contre l’insécurité routière, au même titre que l’éducation,
la formation ou la communication. Plus encore, les actions de contrôle–sanction
doivent être articulées et cohérentes avec les autres actions en matière de sécurité routière, l’objectif commun étant de faire évoluer durablement le comportement des usagers de la route dans le sens d’un respect des règles de conduite.
Néanmoins, même si les acteurs rencontrés ont conscience de l’intérêt d’une
approche globale et coordonnée de la SR, les pratiques reflètent souvent un cloisonnement persistant entre spécialités.
Conclusion
La mise en œuvre de la politique interministérielle de sécurité routière en France
implique d’importants efforts de coordination transversale, particulièrement difficiles à déployer au sein d’organisations publiques structurées autour de logiques
sectorielles et territoriales (Muller, 1990) et généralement peu familiarisées avec
les mécanismes de coordination interministérielle (Bachelet et Rangeon, 1996).
Elle reflète le constat selon lequel l’organisation traditionnelle de l’État est peu
adaptée à la prise en charge des problèmes transversaux, dont les contours sont
souvent mouvants (Duran, 1999), d’où la création de dispositifs ad hoc reposant
sur des logiques d’interministérialité ou de « pluri-territorialité » tels que le CISR
ou les pôles de compétences SR.
La mise en place progressive de dispositifs visant à réunir régulièrement les
acteurs (CISR, pôles de compétences, structures partenariales, …), d’outils de
planification et de coordination visant à co-construire des stratégies locales d’action (notamment le PDASR et le plan de contrôles routiers) ainsi que la création de
nouvelles fonctions transversales (délégué interministériel, chef de projet, coordinateur, …) reflètent, selon nous, une réelle volonté d’appréhender cette politique
publique de façon intégrée. Néanmoins, la concrétisation d’une telle approche se
heurte encore aujourd’hui à des difficultés d’ordre socio-organisationnel, politique
et contextuel. Plus largement, cette situation met en exergue la difficulté d’élaborer une politique publique transversale visant un problème sociétal aux contours
complexes dans le cadre d’institutions dont les différentes composantes sont traditionnellement cloisonnées, concurrentes pour des raisons politiques et/ou d’accès
à des ressources rares, représentant des intérêts hétérogènes et parfois opposés.
La question des effets de la cohabitation entre structures fonctionnelles classiques
et dispositifs transversaux demeure ouverte (Tarondeau, Wright, 1995).
Lorsque des compromis émergent du processus décisionnel central, comme
cela est le cas depuis que la SR est un chantier présidentiel, la mise en œuvre
des décisions à l’échelon local tend à rencontrer des difficultés similaires. La fonction de « chef de projet SR » prend alors toute sa signification puisqu’il s’agit de
piloter et de fédérer des acteurs peu habitués, et souvent peu incités, à coopérer
sur une thématique transversale dont l’enjeu, pour chacun d’entre eux, n’était
traditionnellement pas prioritaire. Le positionnement institutionnel et hiérarchique
Synthèse INRETS n° 57
179
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
de ce « chef de projet » prend alors une importance toute particulière : le chef de
cabinet du préfet, souvent détenteur de cette responsabilité, occupe une position
qui apparaît pertinente en termes de légitimité et de pouvoir d’action en matière
de SR. Cependant, sa disponibilité et ses compétences dans ce domaine suscitent des interrogations. De même, le coordinateur SR, sur lequel il doit s’appuyer
d’un point de vue opérationnel, a une position statutaire, des ressources à sa disposition et des compétences en matière de SR très hétérogènes. Or, le bon fonctionnement de la politique locale de l’état en matière de sécurité routière repose
en grande partie sur le bon fonctionnement de ce tandem. Enfin, la place des
collectivités locales, et notamment du conseil général, dans les dispositifs locaux
de SR est très variable en fonction des contextes locaux, et ce malgré les récents
transferts de compétence en matière d’exploitation des réseaux routiers.
Dimension importante de la politique locale de sécurité routière, l’organisation
du contrôle de vitesse pose les mêmes problèmes de coordination entre acteurs
aux logiques et priorités souvent hétérogènes. L’élaboration d’un plan départemental de contrôles routiers, dans le cadre plus large du fonctionnement du pôle
de compétence sécurité routière, a offert aux acteurs une première opportunité
formelle de mettre en commun leurs informations et compétences en matière de
contrôle, de l’amont (choix des modes et sites de contrôle) à l’aval (traitement
effectif par la justice des infractions constatées). Le déploiement du contrôle–sanction automatisé a eu un impact plus direct sur les pratiques des différents acteurs
et a nécessité, au moins dans sa phase initiale, une forte coordination sous la
direction du préfet. L’automatisation de la procédure administrative de traitement
des constats d’infraction et des aménagements juridiques a libéré des ressources
qui peuvent être consacrées au traitement ciblé des infractions jugées prioritaires
au regard des enjeux locaux. L’articulation entre contrôle automatisé fixe, mobile
et contrôle de vitesse traditionnel permet de couvrir les différentes zones accidentogènes et légitime d’autant plus l’intérêt d’une démarche coordonnée dans le
cadre d’un plan départemental de contrôles routiers. Cependant, sans l’impulsion
du préfet, à travers son « chef de projet SR », la coordination entre les acteurs du
contrôle de vitesse est fragile, car elle repose essentiellement, lorsqu’elle existe,
sur la bonne volonté de quelques individus. La nécessité de consolider le tandem
chef de projet/coordinateur n’en apparaît que plus important afin de développer et
pérenniser des politiques locales de sécurité routière performantes.
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180
Synthèse INRETS n° 57
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Synthèse INRETS n° 57
181
ANNEXE 1
Synthèse INRETS n° 57
183
Annexe 1
J.O. n° 26 du 1 février 2000 page 1657
Textes généraux
Ministère de l’Équipement, des Transports et du Logement
Circulaire du 20 janvier 2000 relative à la mise en œuvre
des plans départementaux de contrôle routier
NOR : EQUS9901689C
Paris, le 20 janvier 2000.
Le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, le ministre de l’Intérieur, le ministre de la Défense et le ministre de l’Équipement, des Transports et du Logement,
à mesdames et messieurs les Procureurs généraux, mesdames et messieurs les
préfets, monsieur le préfet de police,
Le comité interministériel de la sécurité routière qui s’est tenu le 2 avril dernier
a confirmé l’importance d’un renforcement significatif des contrôles routiers. Dans
ce but, il est exprimé le souhait que soit systématisée et harmonisée la pratique
des plans annuels de contrôles, qui, établis sous l’autorité des préfets en concertation étroite avec les procureurs de la République, doivent constituer un des
volets des plans départementaux de sécurité routière.
L’objectif est d’optimiser l’utilisation et l’efficacité des moyens de contrôle dont
vous disposez en renforçant la coopération de tous les services concernés. Bien
qu’annuel, ce plan devra se décliner quadrimestre par quadrimestre afin de le
réajuster en fonction des résultats obtenus.
Il s’articulera autour de trois axes :
•• analyse de la situation locale et définition des objectifs ;
•• optimisation des moyens par rapport aux objectifs poursuivis ;
•• évaluation des résultats.
I. - Analyse de la situation locale et définition des objectifs
A. - Recueil de données
Il sera procédé au recueil des données susceptibles de contribuer à une
meilleure organisation des contrôles de la manière suivante :
a) en analysant l’accidentologie locale (nombre d’accidents, de tués et de blessés des années précédentes) et la répartition géographique et temporelle des
accidents telles qu’elles ressortent en particulier des données fournies par les
Synthèse INRETS n° 57
185
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
forces de l’ordre. Il conviendra de s’attacher à l’identification des causes des accidents répétitifs, tout spécialement lorsqu’elles sont révélatrices de comportements
manifestement dangereux et habituels des conducteurs en de mêmes lieux. Cette
analyse s’exprimera notamment par l’élaboration d’une carte de l’accidentologie
du département, qui mettra tout particulièrement en évidence :
•• les lieux où les vitesses pratiquées sont anormalement élevées et génèrent
de nombreux accidents ;
•• les lieux particulièrement accidentogènes, alors que les vitesses pratiquées
y sont réglementaires.
b) en améliorant la connaissance des trafics à partir des données susceptibles
d’être fournies, notamment par les stations SIREDO mises en place par les directions départementales de l’équipement, en termes de comptage de véhicules, de
vitesses moyennes pratiquées par type de véhicules et éventuellement de surcharge
des poids lourds. Ces directions pourront vous assister dans la fourniture et dans
l’interprétation des données qu’elles recueillent pour l’exploitation de la route ;
c) ces deux catégories de données devront être croisées afin de mettre en
évidence les lieux et axes où devront porter les efforts principaux.
B. - Comparaison des données
Les données recueillies devront être confrontées avec les résultats des contrôles des années antérieures (vitesse, alcoolémie, ceinture, système de retenue
pour enfants, etc.).
Cette comparaison peut aussi être déclinée par thèmes tels que
l’alcool, les jeunes, les sorties de discothèques et tout thème résultant
de l’observation locale et justifiant une approche approfondie.
C. - Définition d’objectifs
Les éléments de bilan obtenus vous permettront de définir des objectifs
annuels locaux de contrôle, à partir des objectifs nationaux de sécurité routière et
des spécificités de l’accidentologie du département.
II. - Optimisation des moyens par rapport
aux objectifs poursuivis
À partir des objectifs qui auront été ainsi fixés, des réunions périodiques seront organisées sous l’autorité des préfets, en concertation avec le procureur de la République,
ainsi qu’avec l’ensemble des représentants des forces de l’ordre et des administrations concernées. Il conviendra de leur donner une périodicité au moins quadrimestrielle. Il y sera mis en évidence les comportements infractionnistes lorsqu’ils sont la
cause essentielle d’accidents répétitifs sur un même tronçon routier.
Ces réunions auront pour objet de préciser les périodes et les lieux où devront
s’exercer en priorité ces contrôles.
186
Synthèse INRETS n° 57
Annexe 1
La plus grande complémentarité possible entre les forces de police, de gendarmerie et, éventuellement, de police municipale doit être recherchée afin de
couvrir au maximum, dans le temps et l’espace, les axes repérés. Les contrôles
d’initiative locale devront, dans toute la mesure du possible, s’intégrer dans le
cadre des objectifs définis par ces plans.
S’agissant des grands axes de circulation, une concertation interdépartementale, voire interrégionale, est souhaitable. À cet égard, vous veillerez particulièrement à assurer une bonne complémentarité de l’organisation des contrôles des
véhicules lourds de transport de marchandises et des véhicules de transport en
commun de personnes.
III. - Évaluation des résultats
A. - En termes d’accidentologie départementale
L’évolution de l’accidentologie locale doit être surveillée en permanence. Il
s’agit d’analyser les conséquences de l’évolution du comportement des conducteurs (vitesse, ceinture, alcoolémie, etc.). Cette évolution doit permettre d’évaluer
la pertinence des contrôles effectués.
B. - En termes de rapport organisation/efficacité
Cette évaluation des résultats doit aboutir à des réajustements du plan de
contrôle du département, de préférence sur une base quadrimestrielle.
Ce suivi qualitatif essentiel ne se substitue pas aux dispositions propres aux
forces de l’ordre pour rendre compte de leur activité.
Le compte rendu annuel du plan de contrôle figurera au bilan du plan départemental d’action de sécurité routière.
Conclusion
L’objectif majeur de ce dispositif est de conférer une efficacité maximale aux
contrôles et de permettre au procureur de la République d’apporter des réponses
judiciaires rapides et adaptées. Le rapprochement dans le temps des contrôles et
des sanctions revêt, en effet, une importance capitale pour la crédibilité de la lutte
contre l’insécurité routière.
La délégation interministérielle de la sécurité routière est à votre disposition
pour tout éclaircissement que nécessiterait la mise en œuvre de ce dispositif.
Le ministre de l’Équipement,
des Transports et du Logement,
Jean-Claude Gayssot
Le Garde des Sceaux, ministre de la Justice,
Elisabeth Guigou
Le ministre de l’Intérieur,
Jean-Pierre Chevènement
Le ministre de la Défense,
Alain Richard
Synthèse INRETS n° 57
187
ANNEXE 2
Synthèse INRETS n° 57
189
Annexe 2
Premier Ministre
La Défense, le 30 janvier 2004
Le délégué Interministériel à la sécurité routière
à
Mesdames et messieurs les préfets
Monsieur le préfet de police,
SR/IC2/YL/MR
2004 circulaire politique locale SR
Affaire suivie par : Yvon Lebas
Téléphone : +33 1 40 81 80 55
Fax : +33 1 40 81 81 00
Objet : Mise en œuvre de la politique locale de sécurité routière
Chantier prioritaire du président de la République, la politique de sécurité routière mobilise de façon déterminée les services de l’État, tant au plan national que
départemental.
L’action du gouvernement, centrée sur trois axes principaux — assurer une
meilleure application des règles, améliorer la formation du conducteur et développer une véritable politique de prévention du risque routier — a permis d’abaisser
significativement le nombre des victimes sur la route.
Le bilan provisoire de l’année 2003 montre des diminutions proches ou supérieures à 20 %, aussi bien pour le nombre d’accidents corporels (–17,5 %) que
pour les nombres de tués (–20,9 %) ou de blessés (–19,4 %).
En 2003, ce sont, par rapport à 2002, 1 510 vies qui ont été sauvées et 26 704
blessés qui ont été évités.
Synthèse INRETS n° 57
191
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Le président de la République a rappelé, lors d’un Conseil restreint des ministres du 14 octobre 2003 consacré à la sécurité routière, que ces résultats encourageants pouvaient et devaient se poursuivre, et il a invité les pouvoirs publics à
ne pas relâcher les efforts et la vigilance.
Les assises départementales de la sécurité routière, qui se sont déroulées pendant la semaine de la sécurité routière du 15 au 22 octobre 2003, ont regroupé,
grâce à votre implication et à celle de vos services, environ 20 000 personnes
sur l’ensemble du territoire. Le renforcement de la mobilisation de l’ensemble des
acteurs locaux a été au cœur de tous les débats. Vous trouverez, en Annexe 1, un
bilan national de ces rencontres établi à partir des éléments que vous avez bien
voulu m’adresser, et que je vous invite à diffuser à tous ceux qui y ont participé.
Dans ce contexte, un effort important doit être engagé dans chaque département pour mettre en œuvre les décisions prises lors du Comité interministériel de
la sécurité routière du 13 janvier 2004 et au cours de ceux qui l’ont précédé en
décembre 2002, mars et juillet 2003. Il s’agit de renforcer l’implication des services de l’État, le partenariat avec les acteurs locaux et notamment les collectivités
territoriales, ainsi que la mobilisation des associations et des bénévoles.
Pour 2004, l’action départementale doit donc se concentrer sur cinq axes
prioritaires :
•• renforcer et évaluer les plans de contrôle ;
•• développer la protection des jeunes ;
•• mettre en œuvre une politique contractuelle avec les collectivités
territoriales ;
•• professionnaliser l’organisation et l’action de la sécurité routière et développer le partenariat ;
•• renforcer la mobilisation des associations et des bénévoles.
La mise en œuvre des trois derniers axes prioritaires, structurant le développement de la politique locale de sécurité routière, nécessite un effort important
de modernisation et de professionnalisation des programmes actuels, et enfin
d’adaptation des moyens consacrés par les services de l’État.
Ainsi, la réalisation du document général d’orientations (DGO) doit être menée
à son terme, en partenariat avec les collectivités territoriales, pour devenir le cadre
de référence à cinq ans de l’action locale et favoriser ainsi sa lisibilité.
Les plans départementaux d’action de sécurité routière (PDASR) annuels, qui
en découleront, devront donc progressivement s’écarter de la simple collecte des
initiatives locales, pour décliner les orientations du DGO en termes de projets
structurés.
Le programme REAGIR, mis en œuvre en 1983, a eu un rôle décisif dans le
développement de la mobilisation locale sur la sécurité routière et dans l’apport et
la diffusion de connaissances sur les accidents mortels de la circulation. Toutefois,
un certain essoufflement est aujourd’hui perceptible, et les difficultés d’animation
et de gestion sont importantes.
192
Synthèse INRETS n° 57
Annexe 2
Ce programme sera remplacé au premier semestre 2004 par un nouveau programme de mobilisation des acteurs locaux, qui leur proposera d’agir concrètement et rapidement pour la sécurité routière.
Les enquêtes techniques d’accidents seront poursuivies pour approfondir les
enjeux du département.
1 - Renforcer et évaluer les plans départementaux de
contrôle
Concernant les plans de contrôle mis en œuvre depuis l’année 2000, des disparités fortes apparaissent encore d’un département à l’autre quant à la qualité et
au suivi de ces plans.
Quatre ans après leur lancement, je vous demande d’en faire une évaluation
en conférence départementale de sécurité et de réaliser une mise à jour pour
2004, en lien étroit avec le(s) procureur(s) de la République de votre ressort, et
en y associant les collectivités territoriales.
Je vous rappelle que les trois principaux facteurs d’accidentalité (vitesse,
alcool, ceinture) doivent être en priorité pris en compte.
Je vous invite par ailleurs à veiller à l’articulation entre la politique de contrôle
et la politique pénale et à intégrer, dans cette réflexion, l’implantation des dispositifs de contrôle automatique. L’installation de radars automatiques ne doit pas
avoir pour conséquences, en l’état du déploiement de ces appareils qui ne sont
aujourd’hui qu’au nombre de 100, de diminuer le nombre et la fréquence des
contrôles classiques de vitesse avec ou sans interception mis en œuvre par les
services de police et de gendarmerie. Les moyens en personnel éventuellement
dégagés à la suite de l’installation des radars automatiques doivent être redéployés sur des objectifs de sécurité routière, tels des contrôles d’alcoolémie ou du
port de la ceinture de sécurité.
Le plan de contrôle fait partie du plan départemental d’actions de sécurité routière et, à ce titre, une cohérence doit être recherchée avec les politiques de prévention et d’aménagement des infrastructures, notamment pour la signalisation
routière. La mise en cohérence de la signalisation, et particulièrement des limitations de vitesse avec les caractéristiques de l’infrastructure et surtout son environnement (urbanisation, lisibilité, visibilité…), est essentielle dans la modification du
comportement des usagers et leur respect de la règle. Les directions départementales de l’équipement doivent s’impliquer fortement pour la mise en œuvre de ces
actions, pour le réseau qu’elles gèrent mais également pour susciter auprès des
collectivités territoriales cette même implication, se conformant aux instructions qui
leur ont été données par note circulaire en date du 17 novembre 2003.
2 - Développer la protection des jeunes
Le président de la République a décidé lors du conseil restreint des ministres du
14 octobre 2003 de faire de la protection des jeunes un objectif prioritaire pour 2004.
Synthèse INRETS n° 57
193
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Je vous demande de mettre en œuvre, dans le cadre de votre PDASR, toutes les mesures permettant de favoriser l’éducation et la formation à la sécurité
routière, tout en garantissant l’accès de tous à la conduite, y compris des plus
défavorisés.
- L’enseignement obligatoire
Tout au long de la scolarité obligatoire, la prévention passe par un enseignement
très encadré de la sécurité routière dans les établissements relevant de l’Éducation nationale : à l’école élémentaire (attestation de première éducation routière
— APER), dans le secondaire (attestation scolaire de sécurité routière — ASSR
premier et deuxième niveaux). L’efficacité de ces dispositifs nécessite un renforcement de la formation des enseignants et de tous les responsables pédagogiques.
Il convient aussi de rappeler aux chefs d’établissements et aux enseignants des
collèges que depuis le 1er janvier 2004, les jeunes qui ont 16 ans depuis cette date
et qui souhaitent conduire un cyclomoteur doivent être titulaires soit d’un permis
de conduire, soit du brevet de sécurité routière (BSR), et donc de l’ASSR premier
niveau. L’ASSR de deuxième niveau est, quant à elle, exigée pour l’obtention du
permis de conduire. L’information de tous les jeunes, scolarisés ou non, doit être
assurée dans tous leurs lieux de vie : établissements scolaires, centres de formation
pour apprentis, clubs sportifs, services municipaux de recensement, auto-écoles…
Les jeunes qui, ayant 16 ans depuis le 1er janvier 2004, n’ont pu obtenir les ASSR
dans le cadre scolaire devront passer l’attestation de sécurité routière (ASR) dans
un groupement d’établissements en charge de la formation continue (GRETA).
- Le permis de conduire
Afin d’informer la population sur le permis probatoire, une campagne de communication (Annexe 2) sera lancée dès le début du mois de février 2004, avec
pour objectifs, d’une part, de sensibiliser l’opinion sur la démarche préventive
sous-tendue par ce « nouveau permis » et, d’autre part, d’informer sur les changements opérés et leurs conséquences. Par ailleurs, le permis probatoire fera
l’objet d’une information spécifique vers les jeunes. Il conviendra au plan local de
relayer cette information.
Les actions tendant à faciliter l’accès au permis devront, en lien avec les collectivités territoriales et les sociétés et mutuelles d’assurances, être encouragées.
Il s’agit notamment de la promotion de l’apprentissage anticipé de la conduite
et des actions visant à la formation des jeunes en difficulté, pour lesquelles des
apports financiers seront recherchés.
Enfin, je vous demande d’être particulièrement attentifs aux dérives de la
conduite sans permis, dont le Parlement vient d’aggraver la répression en érigeant ce comportement au rang du délit.
- Les initiatives venant des jeunes
Après 16 ans, les jeunes doivent être encouragés, aussi bien dans les lycées, les
universités et les grandes écoles, les structures d’insertion ou les centres de formation, à devenir autonomes et acteurs de leur propre sécurité et de celle des autres.
194
Synthèse INRETS n° 57
Annexe 2
Il conviendrait pour cela d’engager dans chaque département un recensement
des associations de jeunes et des associations œuvrant pour la prévention du risque chez les jeunes, afin de favoriser leur implication dans la sécurité routière.
Le programme LABEL VIE est reconduit en 2004. Il vous appartient d’informer
les associations sur ses objectifs et son fonctionnement et, par ailleurs, de simplifier les procédures de labellisation des projets.
Au premier trimestre 2004, le ministre de l’Équipement et des Transports organisera une table ronde avec les représentants des discothèques, des bars d’ambiance et des restaurants, les associations de jeunes, les forces de l’ordre, des
chefs de projet sécurité routière. L’objectif est la signature d’une charte nationale,
avec les organismes représentants ces professionnels, qui devra être déclinée
ensuite au plan local. Vous serez tenus informés du résultat de ces travaux.
3 - Mettre en œuvre une politique contractuelle
avec les collectivités territoriales
- Une politique contractuelle
Le partenariat avec les collectivités territoriales est essentiel pour développer
l’action de sécurité routière. Les assises départementales ont montré dans un
certain nombre de départements la volonté des conseils généraux ou de communes de s’impliquer plus largement dans la lutte contre l’insécurité routière en fonction de leurs champs de compétences : infrastructure, urbanisme, action sociale,
information…
Ces partenariats pourront se concrétiser localement par la signature de
contrats d’actions, portant sur un ou plusieurs enjeux retenus par le département
et intégrant éventuellement la mise en place d’une maison de la sécurité routière.
Les contrats locaux de sécurité entrent dans cette démarche, dès lors qu’ils comportent ou qu’ils sont complétés par un volet sécurité routière.
Enfin, afin de renforcer cette concertation, je vous invite à demander au président du conseil général et aux maires de nommer dans leur collectivité un élu
référent en sécurité routière, « une madame ou un monsieur sécurité routière ».
Correspondant privilégié des services de l’État et des autres acteurs locaux de la
sécurité routière, ce référent veillera à la prise en charge de la sécurité routière
dans les différents champs de compétences de la collectivité et coordonnera les
actions mises en œuvre par ses différents services.
- Des lieux d’information et d’accueil : les maisons de la sécurité
routière
Depuis quelques années, un centre de ressources matérielles a été créé par
presque toutes les préfectures. Il répond aux besoins exprimés en supports de
communication par les acteurs locaux.
L’information et l’accueil des citoyens, concernés ou intéressés à un titre ou à
un autre par une question ayant trait à la sécurité routière, méritent en outre d’être
renforcés.
Synthèse INRETS n° 57
195
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Le concept de maison de la sécurité routière, proposé lors des assises départementales de la sécurité routière, regroupe ces différentes suggestions sur un
même site :
•• accueil des familles de victimes par les associations et des professionnels
de la prise en charge psychologique, en continuité et lien avec les établissements de santé publics et privés ;
•• information des citoyens et des contrevenants ;
•• orientation des bénévoles vers des actions de proximité ;
•• centre de ressources pour les associations, administrations, collectivités
territoriales et acteurs socioprofessionnels recherchant des documents, des
outils, des professionnels ;
•• lieu d’échanges entre les bénévoles, les associations et les institutionnels.
La mise en œuvre de ces maisons de la sécurité routière devra se concrétiser dans le cadre des contrats d’actions État–collectivités territoriales, pouvant
être élargis sur ce point à d’autres acteurs locaux (assurances, CRAM, autoécoles…).
4 - Professionnaliser l’organisation et l’action locale
de la sécurité routière et développer le partenariat
Lors des assises départementales de la sécurité routière, de nombreux participants ont souhaité une plus grande lisibilité de l’action locale, une professionnalisation et une disponibilité accrue, notamment des services de l’État et la
réalisation d’enquêtes et d’études circonstanciées permettant de mieux fonder
les actions.
- L’organisation départementale
La prise en charge de la sécurité routière dans les dispositifs territoriaux de
prévention de lutte contre la délinquance n’est pas encore effective dans de nombreux départements. Je vous invite à rendre opérationnelle cette organisation,
souhaitée par le ministre de l’Intérieur et le ministre de l’Équipement dans leur
circulaire commune du 30 janvier 2003.
Les mesures prises depuis plus d’un an et les orientations définies pour 2004
nécessitent un renforcement des moyens en personnel consacrés par les services
de l’État à l’action locale de la sécurité routière, particulièrement pour le pilotage,
par vos services, de l’ensemble de cette politique. En ce qui concerne l’implication des services de l’État dans leurs champs de compétences, je vous invite à
demander à chacun d’entre eux la désignation d’un référent sécurité routière. Un
effort particulier devra aussi être engagé pour favoriser l’articulation entre la sécurité routière et les autres politiques publiques (contrats de ville, CLS, lutte contre
la drogue et la toxicomanie…).
- Le DGO et le PDASR
La démarche d’élaboration du DGO a été lancée comme prévu dans tous les
départements en 2003, et la première phase relative au choix des enjeux de l’État
196
Synthèse INRETS n° 57
Annexe 2
a été menée à son terme. Les assises départementales de la sécurité routière ont
permis de présenter ces enjeux aux collectivités territoriales et aux autres acteurs
du département.
Il est essentiel que la réflexion sur l’approfondissement de la connaissance et
la compréhension de ces enjeux soit poursuivie, et que les collectivités territoriales soient associées à la définition des orientations de la politique du département
pour les cinq prochaines années.
L’élaboration du PDASR doit, dans ce cadre, s’écarter de la simple collecte
des initiatives locales pour décliner les orientations du DGO en termes de projets impliquant l’État, les collectivités territoriales, les associations et les milieux
socioprofessionnels.
Enfin, il est important que le DGO et le PDASR de votre département soient
intégrés dans le site Internet « Action Locale », outil de travail au quotidien pour
la gestion et le pilotage de l’action locale, mais aussi outil de partage des informations issues aussi bien du niveau local que national.
- La connaissance de l’insécurité routière
Dans le domaine de la connaissance de l’insécurité routière, les directions
départementales de l’équipement doivent apporter toutes les informations nécessaires à l’élaboration de la politique locale : analyse des accidents, connaissance
du territoire, des réseaux, de la population… Cette contribution concerne notamment l’élaboration du DGO et du PDASR, l’élaboration de leur politique sectorielle par les différents services de l’État (plan de contrôles routiers, politique de
protection des jeunes, plan de prévention des risques routiers…), ainsi que les
demandes des collectivités territoriales.
Comme dans les autres domaines d’action, le partenariat devra être recherché
avec les autres acteurs locaux et notamment les collectivités territoriales. Leurs propres informations, comme par exemple la localisation des accidents sur leur propre
réseau ou l’analyse des infractions relevées par la police municipale, contribueront
au renforcement général de la connaissance sur l’insécurité routière locale.
Les enquêtes techniques sur les accidents, dites aujourd’hui REAGIR, doivent
désormais être réalisées pour approfondir les principaux enjeux du département.
Les équipes d’enquêteurs doivent être renforcées en compétences, notamment
en matière d’analyse des comportements. Des médecins hospitaliers pourront y
être associés dans le cadre de leur activité générale, sur la base du volontariat.
Les enquêtes, dont la qualité doit être indiscutable, seront ainsi d’excellents supports de communication.
- L’amélioration des infrastructures
Un effort important reste à engager dans la conception des infrastructures,
leur entretien et leur exploitation, par les services de l’État et les collectivités
territoriales.
Outre l’action sur la signalisation déjà évoquée, une action particulière devra
être engagée sur la résorption des obstacles latéraux en 2004.
Synthèse INRETS n° 57
197
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
- La prise en compte du risque moto
Une attention toute particulière devra être portée aux actions concernant les
motocyclistes, en concertation avec les représentants locaux des associations et
fédérations concernées. Dans ce cadre devra être favorisé l’accès aux circuits
publics et privés. Les directions départementales de la jeunesse et des sports
seront mobilisées à cette fin, conformément aux orientations arrêtées lors du
CISR du 13 janvier 2004.
- Le partenariat avec le monde de l’emploi
Dans la prévention et la prise en charge du risque routier, en tant que risque
professionnel, l’État doit se montrer exemplaire. Ainsi, a-t-il déjà été demandé
que chaque service de l’État, et notamment les services déconcentrés, se dotent
d’un plan de prévention des risques routiers (PPRR). Dans le bilan d’exécution
du PDASR 2003, vous inclurez un bilan de la mise en œuvre des PPRR dans les
services de l’État, en soulignant les démarches exemplaires qui pourraient être
portées à la connaissance des autres départements.
Afin de favoriser l’élaboration de ces plans de prévention dans les entreprises, je vous invite à renforcer le partenariat avec la Caisse régionale d’assurance maladie et les chambres consulaires de votre département, en proposant
une stratégie spécifique vers les petites et moyennes entreprises, en valorisant
l’action des entreprises les plus impliquées. En outre, vous veillerez à une plus
grande implication des services de l’État, en particulier de l’inspection du travail
dans la prise en compte de ce risque dans les entreprises, dans le cadre notamment de l’établissement du document unique.
Enfin, la charte nationale signée le 13 janvier 2004 par le Premier ministre
avec les trois fédérations professionnelles de transport routier de marchandises
pourra utilement être déclinée au plan local.
- L’articulation avec la politique de santé
Le partenariat avec les acteurs de santé, et notamment les Agences régionales de santé, est essentiel pour décliner les préoccupations sécurité routière
dans l’ensemble des programmes de santé publique. Il s’agit en particulier de
développer dans les établissements de santé, publics et privés, la prise en charge
globale des accidentés de la route et de leurs proches, et plus globalement, leur
implication dans les actions de prévention du PDASR. Il est aussi souhaitable
d’étendre la procédure d’élaboration des plans de prévention des risques routiers
à toutes les structures œuvrant dans le domaine de la santé : SDIS, établissements publics et privés…
Enfin, un référent sécurité routière pourrait être désigné dans chaque Agence
régionale de santé et chaque établissement public et privé.
5 - Renforcer la mobilisation des associations et
des bénévoles
Jusqu’à présent, la mobilisation des acteurs locaux, bénévoles et militants,
s’exprime soit dans l’action organisée par les associations locales, en lien avec
198
Synthèse INRETS n° 57
Annexe 2
le PDASR, soit dans les actions de proximité initiées par les inspecteurs départementaux de sécurité routière (IDSR) dans le cadre du programme REAGIR.
Dans le contexte actuel de mobilisation nationale, des citoyens souhaitent aussi
s’impliquer dans des actions concrètes de prévention.
Le programme REAGIR sera remplacé par un nouveau programme de mobilisation des acteurs locaux qui leur proposera d’agir concrètement pour la sécurité
routière, de prendre des initiatives et d’être de véritables « porte-parole » auprès
de leurs concitoyens. Une consultation auprès des IDSR devrait permettre rapidement de doter ce dispositif d’un nom précis.
Les IDSR actuels, soucieux d’une forte implication dans la prévention, trouveront naturellement leur place dans ce nouveau dispositif. Les jeunes seront au
cœur du dispositif, et les expérimentations effectuées autour du concept d’IDSR
juniors seront resituées dans cette perspective.
Chaque citoyen volontaire, pour y participer, se verra proposer une liste d’opérations concrètes, dans lesquelles il pourra s’impliquer et qui seront initiées et
pilotées par des associations (aide aux victimes, opérations capitaine de soirées…), des collectivités ou l’État (LABEL VIE, conducteur désigné, promotion
de l’AAC…).
Il devra remplir un engagement personnel relatif à son comportement sur la
route. Il bénéficiera d’une formation initiale et d’éventuelles formations complémentaires, en fonction de son champ d’activité, ainsi que d’un accès aux supports
d’information.
Ce nouveau programme de mobilisation sera lancé au premier semestre 2004.
Il sera initié par les préfectures, et un partenariat actif sera recherché avec le
conseil général et les autres collectivités pour en assurer le fonctionnement. Des
informations portant sur l’organisation pratique du nouveau programme et les
outils techniques nécessaires seront mises à votre disposition. Une communication nationale et locale permettra de lancer un appel aux citoyens et notamment
aux jeunes.
Vos collaborateurs et les IDSR de votre département seront associés très prochainement à la préparation du lancement de ce programme.
Enfin, la semaine de la sécurité routière, temps fort de la mobilisation de tous les
acteurs locaux, aura lieu du mercredi 13 octobre au mercredi 20 octobre 2004.
6 - Les modalités administratives et financières
Le plan départemental d’actions de sécurité routière 2004, intégrant le plan
départemental de contrôle et le bilan d’exécution 2003, doit parvenir à la délégation interministérielle pour le 30 avril 2004.
Compte tenu du décalage dans le temps qu’a pu entraîner la préparation des
assises départementales et afin de permettre un travail de qualité dans l’approfondissement des enjeux retenus, avec une implication département pour permettre une dotation sur le chapitre 44-20, article 50 dès le début de l’année, des
Synthèse INRETS n° 57
199
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
dotations complémentaires pourront être allouées, en fonction des besoins, après
engagement de la première dotation et dans la limite des crédits disponibles.
Je vous rappelle que les dotations financières du PDASR doivent en priorité
être réservées aux actions de prévention. Si, à titre exceptionnel, l’achat de matériels de contrôle de la vitesse ou de l’alcoolémie peut être envisagé, l’acquisition
de matériels lourds, comme des véhicules, ne saurait intervenir sur cette ligne
budgétaire.
La politique de sécurité routière ainsi déclinée devra faire l’objet d’une communication mettant en exergue l’équilibre recherché entre les actions de prévention et les opérations de contrôle. Un partenariat pourra utilement à cette fin être
engagé avec la presse quotidienne régionale.
Les actions engagées au cours de l’année 2003 ont permis une évolution
significative dans la lutte contre l’insécurité routière. Les orientations proposées
pour la politique locale de sécurité routière en 2004 doivent permettre de conforter et d’amplifier le changement de comportement des usagers de la route. J’ai
demandé aux pôles d’animation sécurité routière, dans le cadre de leurs missions, de vous apporter toute l’assistance requise pour la mise en œuvre de ces
orientations.
Je sais pouvoir compter sur votre implication personnelle pour que l’année
2004 permette, dans chaque département, de nouvelles avancées dans ce combat en faveur de la vie des collectivités territoriales, le délai de transmission du
document général d’orientations a été, si nécessaire, reporté jusqu’au 31 mars
2004.
Le montant de votre dotation de crédit sur le chapitre 37-06 de l’article 20 vous
sera indiqué dans les prochains jours. Une première dotation correspondant à
80 % de ces crédits vous sera déléguée dans les plus brefs délais.
Des crédits spécifiques sont réservés pour soutenir les premières initiatives
de contractualisation avec les collectivités territoriales. Les financements seront
mis en œuvre, après discussion avec mes services, sur présentation détaillée du
projet de contrat.
En ce qui concerne l’opération LABEL VIE, les besoins budgétaires 2004 doivent être indiqués à la délégation interministérielle par chaque
Signé
Rémy Heitz
200
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 9
Le contrôle automatisé de la vitesse
en France et en Grande-Bretagne.
Deux régimes de régulation
des vitesses distincts ?
Laurent Carnis
1. Introduction
De nombreux pays ont procédé à l’installation de dispositifs de contrôle automatisé de la vitesse, profitant ainsi des nouvelles possibilités techniques offertes par le progrès de la technologie pour contrôler les vitesses de circulation.
L’utilisation de radars photographiques automatisés, de la vidéo et des possibilités de la numérisation représentent en quelque sorte la suite logique des progrès
enregistrés pour le contrôle de la vitesse depuis le chronomètre en passant par
les premières générations de radars. Elle s’inscrit également dans un processus
plus large de recours aux nouvelles techniques de contrôle qui sont largement
utilisées dans le cadre de la surveillance des transports publics et de la protection
des biens privés (caméras de surveillance utilisées dans les magasins).
L’introduction de tels dispositifs s’est faite de manière plus ou moins précoce
selon les pays et avec des degrés de réussite divers [Blackburn et Gilbert, 1995].
Ainsi, la mise en place de radars automatisés avait suscité la réprobation des
populations dans certaines villes américaines et certaines provinces canadiennes
et avait conduit à terme les autorités à renoncer à pérenniser le fonctionnement
des premières installations. L’acceptabilité sociale par les populations constitue
en cela une contrainte incontournable pour implanter, développer et pérenniser un
dispositif de contrôle automatisé, dimension sur laquelle nous avions déjà insisté
dans des travaux antérieurs [Carnis, 2001, pp. 612–614].
Même si la Grande-Bretagne s’est équipée très tôt en radars automatisés au
début des années 1990, elle a généralisé et développé cette stratégie seulement
à la fin de la décennie, tandis que la France a procédé à ses premières installations au cours de l’année 2003. En cela, il existe un certain retard commun
Synthèse INRETS n° 57
201
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
aux deux pays (voire une certaine rétivité) relatif à l’utilisation de tels dispositifs. De ce trait commun et à partir de la mise en œuvre d’expériences distinctes
de contrôle des vitesses concernant deux pays européens voisins peut-on pour
autant en conclure à l’existence d’un régime de régulation unique de régulation
des vitesses ?
Dans l’objectif d’apporter un début de réponse à cette question, nous développons un cadre théorique qui s’appuie sur les enseignements robustes de l’analyse économique des actes illégaux, lequel nous permet de circonscrire et de
caractériser des évolutions systémiques et organisationnelles à partir de typologies préétablies. Ce modèle nous servira alors de guide pour comprendre à la
fois l’implantation et l’articulation organisationnelle et institutionnelle des dispositifs de contrôle britannique et français, dont les modalités de développement
et de fonctionnement ainsi que les effets produits seront présentés. Chaque dispositif fait également l’objet d’un essai d’interprétation permettant de faciliter la
comparaison.
2. Le cadre théorique
L’analyse économique justifie l’intervention des autorités dans la régulation
des vitesses par l’existence d’un coût social qui leur est associées. La politique de
contrôle et de sanction doit, en conséquence, conduire à une réduction de ce coût
social par l’intermédiaire d’une diminution des dommages liés à la survenance des
accidents. L’introduction d’un contrôle automatisé de la vitesse conduit à améliorer la probabilité de détection et de sanction des contrevenants, de manière à ce
qu’une réduction additionnelle du coût social doit en découler. L’introduction d’un
tel dispositif modifie également le mode initial de régulation des vitesses en modifiant la structure productive des différentes organisations qui interviennent dans
ce champ. D’un point de vue théorique, il devient alors possible de définir une
typologie des différents agencements organisationnels possibles.
2.1. L’approche traditionnelle
L’accident de la route constitue, du point de vue de l’analyse économique du
bien-être, un effet externe négatif, qui justifie à ce titre l’intervention des autorités
pour procéder à son internalisation [Carnis, 2001(a), p. 211 et s.]. En effet, les
dommages associés aux accidents de la route sont estimés, pour la France en
2004, à 24,3 milliards d’euros, dont 11,7 milliards pour les seuls dommages corporels [ONSIR, 2005, pp. 230–231]. Ce coût social est estimé à 17 milliards de
livres pour la Grande-Bretagne [Secretary of State for Transport, 2002, p. 4].
La procédure d’internalisation des effets externes négatifs exige au préalable
l’identification des facteurs accidentogènes, afin de pouvoir définir une intervention idoine. Parmi ces facteurs, les conduites avec une vitesse excessive sont
clairement identifiées [Carnis, 2001(a), chapitre 5]. Les autorités doivent alors
mobiliser des ressources pour contrôler et sanctionner les contrevenants, et de
produire un effet dissuasif. L’objectif final étant de réduire le montant du coût
social.
202
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
Les apports théoriques de Becker et Ehrlich permettent d’élaborer un cadre
théorique
pour un
rendre
compte àL’objectif
la fois du
à l’acte et l’action des
contrevenants,robuste
et de produire
effet dissuasif.
finalpassage
étant de réduire
autorités.
Ehrlich
a ainsi mis en évidence l’importance du niveau de détection et
le montant
du coût
social.
de la sanction dans la réalisation d’un acte illégal. Il a également souligné les
Les apports
de Becker
et Ehrlich
d’élaborer
implications
desthéoriques
dispositions
au risque
despermettent
conducteurs,
que un
rend compte l’excadre théorique robuste pour rendre compte à la fois du passage à l’acte et
pression
particulière
des
fonctions
individuelles
de
satisfaction
l’action des autorités. Ehrlich a ainsi mis en évidence l’importance du niveau de [Ehrlich, 1973].
Quantetaux
dedans
Becker,
ils précisent
les illégal.
conditions
d’intervention des autodétection
de apports
la sanction
la réalisation
d’un acte
Il a également
souligné
les implications
dispositions
au risqueoptimale
des conducteurs,
que renddes infractions à
rités [Becker,
1968].des
Ainsi,
une politique
de dissuasion
compte
l’expression
particulière
des fonctions
individuelles
de non
satisfaction
la limitation
de vitesse
implique
l’existence
d’infractions
poursuivies. Celles-ci
[Ehrlich 1973]. Quant aux apports de Becker, ils précisent les conditions
sont
considérées
comme
des
infractions
optimales
à
la
vitesse
d’intervention des autorités [Becker 1968]. Ainsi une politique optimale de limite dans la
mesure des
où leinfractions
gain associé
supérieur
à leurimplique
coût. Il l’existence
n’y a donc aucun intérêt
dissuasion
à la est
limitation
de vitesse
d’infractions
non poursuivies.
Celles-ci
considéréesCette
comme
des infractions
économique
de procéder
à leursont
dissuasion.
analyse
conduit également les
optimales
à laàvitesse
limite
la mesure
où ressources
le gain associévers
est supérieur
à
autorités
arbitrer
et dans
à allouer
leurs
les composantes
de leur
leur coût. Il n’y a donc aucun intérêt économique de procéder à leur dissuasion.
appareil
de
dissuasion
les
plus
efficientes.
La
politique
de
détection
sera
priviléCette analyse conduit également les autorités à arbitrer et à allouer leurs
giée dans
mesure
où à undecoût
identique
ressources
versla les
composantes
leur d’intervention
appareil de dissuasion
lespour
plus les autorités, le
efficientes.
La politique
de détection
sera supérieur
privilégiée dans
la mesure
à un
niveau de
dissuasion
atteint sera
à celui
produitoùpar
l’augmentation de
coût
pour les autorités, le niveau de dissuasion atteint
la d’intervention
sévérité de identique
la sanction.
sera supérieur à celui produit par l’augmentation de la sévérité de la sanction.
Les décisions individuelles et les stratégies choisies par les autorités particiindividuelles
et lesd’un
stratégies
choisies par
les autoritésle niveau de respentLes
à ladécisions
détermination
conjointe
« équilibre »,
caractérisant
participent à la détermination conjointe d’un «équilibre», caractérisant le niveau
desdes
limitations
parles
lesusagers
usagers
le niveau
de violation [Bjφrnskau
de pect
respect
limitationsde
de vitesse
vitesse par
ou ou
le niveau
de violation
et
Elvik,
1992].
L’introduction
des
dispositifs
automatisés
peut
être assimilée à un
[Bjφrnskau and Elvik 1992]. L’introduction des dispositifs automatisés peut être
assimilée
à un choc modifiant
l’équilibre
initial,
en produisant
effet
fois sur la demande
choc modifiant
l’équilibre
initial, en
produisant
un un
effet
à àlalafois
sursociale
la demande
sociale (le
d’infractions
(le nombre subies
d’infractions
subies et par les individus
d’infractions
nombre d’infractions
et acceptées
acceptées par les individus dans leur ensemble) et l’offre d’infractions (le
dans leur ensemble) et l’offre d’infractions (le nombre d’infractions à la vitesse
nombre d’infractions à la vitesse limite commis par les conducteurs).
limite commis par les conducteurs).
FigureFigure 1 :
1. Nombre d’infractions
détectées
nombre d’infractions
Euros
O’
D
d
O
D’
a
détectées
b
c
i
i*
infractions
L’offre d’infractions (O) représente la relation entre les coûts marginaux
acceptés par le conducteur pour commettre une infraction à la vitesse limite
(risque de se faire arrêter et de payer le cas échéant une amende, dommages
potentiels liés à la survenance d’un accident) et le nombre d’infractions. Plus
les infractions sont nombreuses, plus le coût marginal associé à une infraction
Rapport
INRETS
n°
221 de vitesse est
est
élevé.
L’infraction
est commise si le revenu associé à l’excès
suffisamment important pour compenser le coût associé. Il y a donc une limite
« naturelle » au nombre d’infractions.
Synthèse INRETS n° 57
203
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
La demande d’infractions (D) représente la relation entre les ressources
consenties par la population (dépense privée) et les autorités (dépense publique) pour se protéger des conséquences associées à la réalisation d’infractions. Or, les individus sont d’autant moins disposés à accepter de tels actes
qu’ils impliquent l’existence de dommages. Les individus investiront des ressources en conséquence pour se prémunir contre la survenance de tels effets,
dépenses qui conduisent à la réduction du nombre d’infractions commises.
L’introduction des dispositifs automatisés de la vitesse conduit ainsi à modifier à la fois l’intensité de la surveillance (la probabilité de détection s’en trouve
désormais accrue) et la sévérité de la sanction (l’effectivité de la condamnation
s’accroît). L’amélioration des capacités de détection des agences policières et
de contrôle ainsi qu’une meilleure exécution des sanctions peuvent être interprétées comme une diminution de la demande sociale d’infractions, c’est-à-dire une
moindre acceptation sociale des dommages associés aux accidents de la route
(effet  [D vers D’]). Face aux nouvelles orientations des autorités publiques,
certains usagers de la route vont modifier leurs styles de conduite et renoncer
dans une certaine mesure à commettre des excès de vitesse (effet  [O vers O’])
(Figure 1). L’effet  et  se combinent pour produire la dissuasion.
2.2. Les interactions systémiques
De nombreuses études ont mis en évidence la capacité d’adaptation du
conducteur à son environnement de conduite. Il apprend à connaître les lieux
de contrôle et à détecter les stratégies suivies par les autorités [Carnis, 2001 pp.
540–543]. Cette capacité de résistance à la politique menée peut être appréciée
par les effets de halo spatial et temporel, lesquels désignent la permanence de
l’effet du contrôle (avant/après) tant d’un point de vue spatial que temporel [Vaa,
1997 ; Holland et Conner, 1996]. La combinaison des effets de halo spatial et
temporel permet de définir des toiles de surveillance [Carnis, 2001(b)] de dimensions différentes. Le contrôle automatisé peut être conceptualisé sous la forme
d’un ensemble de toiles de surveillance différentes selon leur lieu d’implantation
et selon l’information qui en est faite25. En conséquence, l’importance des toiles
de surveillance (intensité) influencera de manière plus ou moins significative les
comportements de vitesse et l’accidentologie associée.
Les interactions systémiques résultant, entre autres, de l’interaction entre les
réseaux et leur connexité26, mais également des effets de seuil doivent être précisés. L’interaction entre les réseaux peut conduire à des effets d’entraînement :
la politique de contrôle menée sur certains axes amène le conducteur à modifier
son comportement sur les autres axes. En cela, il s’agit d’un impact plus géné25 Les
contrôles de vitesse automatisés mobiles ne sont pas médiatisés.
phénomènes similaires ont été identifiés pour l’analyse des effets associés à la modification
des limites de vitesse [Lave et Elias, 1994].
26 Des
204
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
ralisé et plus profond, qui peut traduire en fait une évolution des préférences
(attitudes) des conducteurs. La connexité des axes implique des modifications
comportementales de la part des conducteurs sur les réseaux à proximité des
lieux de contrôle. Ces effets de déport se caractérisent par leur impact localisé
et traduisent plus une adaptation comportementale limitée dans l’espace et le
temps, tandis que les effets de seuil reviennent à intégrer dans l’analyse l’importance du dispositif automatisé à l’échelle du pays27. En effet, si le dispositif
est composé de quelques appareils répartis sur un large territoire, leur effet sera
dilué, et leur mise en relation difficile. Au contraire, un dispositif fourni, maillant le
territoire démultipliera l’impact dissuasif produit par chaque appareil, car les uns
et les autres se feront écho.
Le conducteur peut moduler sa conduite en adoptant un comportement plus
stratégique. Disposant d’informations transmises par les autorités (publicisation
et médiatisation des lieux de contrôle) et par les autres conducteurs (appels de
phare, conversation) ou tirée de ses propres expériences de conduite, le conducteur peut adopter des comportements stratégiques, qu’illustre dans une certaine
mesure la théorie du saut du kangourou [Oie, 1998]. Le conducteur met sa vitesse
de conduite progressivement en conformité avec la limitation en vigueur à l’approche du lieu de contrôle, pour ensuite adopter, après le contrôle, un niveau de
vitesse relativement proche du niveau initial.
Ces différents effets systémiques soulignent à la fois la difficulté de pouvoir
identifier correctement les effets associés à une modification environnementale et
la nécessité de définir au préalable le champ d’investigation (effets locaux ou
globaux). La capacité adaptative des conducteurs met en évidence un processus
d’apprentissage et de recherche d’information, ce qui nécessite de tenir compte à
la fois des stratégies retenues en matière de publicisation des lieux de contrôle et
de l’ancienneté de la mise en œuvre du dispositif de contrôle.
2.3. Les impacts organisationnels
Les contrôles manuels de la vitesse sont assurés par les membres des agences de contrôle, tandis que les tribunaux traitent des contestations et des demandes d’audition, ainsi que des convocations pour les infractions les plus graves.
L’automatisation des contrôles automatisés a introduit une série de modifications
importantes dans la chaîne du contrôle-sanction.
L’automatisation du système a permis d’alléger substantiellement le traitement du travail administratif des agents de contrôle. Non seulement le contrôle
automatisé permet d’accroître la capacité d’identification des contrevenants mais
a également permis d’externaliser les tâches administratives. Les agences de
27 Ces
effets d’entraînement et de déport peuvent s’avérer être positifs dans la mesure où ils
amplifient l’effet dissuasif. Des effets négatifs peuvent exister avec les phénomènes dont rend
compte la migration des accidents. Les conducteurs modifient leur itinéraire de conduite pour éviter
les contrôles et prennent des réseaux plus dangereux. D’autres conducteurs peuvent modifier leur
vitesse de conduite sur les autres axes à des niveaux plus importants pour compenser la perte de
temps initiale.
Synthèse INRETS n° 57
205
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
contrôle se voient ainsi décharger de certaines tâches et de disposer désormais
de ressources supplémentaires.
Le système de contrôle et sanction automatisé permet également d’alléger les
charges des tribunaux, dans la mesure où les infractions relevées laissent peu de
place à la contestation et la capacité dissuasive du système permet de décongestionner les tribunaux.
Par ailleurs, la mise en place de moyens importants pour la lutte contre l’insécurité routière en général et la lutte contre les vitesses excessives en particulier influe également sur les incitations des agents de contrôle. Il s’agit plus d’un
impact psychologique, mais qui peut produire un impact sur l’efficacité du dispositif du système. Disposant de moyens techniques adaptés, les agents de contrôle
peuvent montrer une plus grande motivation pour une activité peu attractive et
peu valorisée [Boullier, et al. 1995].
L’organisation policière se situe en effet au centre du processus de dissuasion
traditionnel. Elle combine des facteurs de production pour produire de la dissuasion, à savoir de la surveillance générale du territoire et des contrôles dans le
secteur de la sécurité routière (contrôle des vitesses, détection de l’alcoolémie
au volant, contrôle administratif…). L’introduction de systèmes automatisés de
contrôle implique donc des modifications concernant le mode de régulation de la
vitesse et plus particulièrement certaines dimensions de la structure productive.
Ce nouveau mode de régulation peut associer les agences policières à leur gestion ou au management du système ou encore consister à leur confier la gestion
du dispositif. Lorsque les deux systèmes de contrôle traditionnel et automatique
sont intégrés, le processus peut être qualifié d’associatif ou de complémentaire.
L’introduction des radars automatiques conduit ainsi à modifier la division du travail de régulation des vitesses initiale. L’association peut prendre deux formes
différentes. Une première comprend les dimensions opérationnelles et managériales. Dans ce cas, l’agence de police est associée à la stratégie suivie par les
autorités et dispose de matériels automatisés qu’elle intègre dans sa politique de
contrôle. Une autre forme d’association concerne la participation des agences de
contrôle à la seule stratégie.
Les systèmes de contrôle peuvent également être mutuellement exclusifs, et
le schéma organisationnel être agencé de manière à limiter ou à rendre impossible les interférences entre les deux systèmes. Dans cette situation, le processus
à l’œuvre est de nature commutative. Le processus de commutation ou de substitution implique que les contrôles traditionnels sont remplacés par des appareils
automatisés. La régulation des vitesses de circulation échappe désormais au
contrôle des agences policières. De fait, les forces de l’ordre se trouvent exclues
du processus de régulation des vitesses.
Ces différents régimes de régulation des vitesses peuvent être déclinés sous
différentes formes :
–– le processus de commutation totale : les forces de l’ordre sont exclues du
système de contrôle automatisé des vitesses tant du point de vue managérial qu’opérationnel ;
206
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
–– le processus de commutation opérationnelle : les forces de l’ordre se trouvent associées aux dimensions stratégiques du déploiement du dispositif
et à son fonctionnement mais n’utilisent pas les appareils de contrôle dans
leur activité ;
–– le processus d’association opérationnelle : les forces de l’ordre coopèrent au
fonctionnement du dispositif en utilisant les dispositifs mobiles de contrôle
automatisé mais se trouvent exclues des choix stratégiques ;
–– le processus d’association totale : le dispositif automatisé de contrôle fait
partie des modalités de contrôle à disposition des forces de l’ordre qui en
assure à la fois le déploiement stratégique et la dimension opérationnelle.
3. Les modalités opérationnelles et managériales
du système de contrôle automatisé des vitesses en
Grande-Bretagne
L’étude de l’organisation du contrôle automatisé britannique met en évidence
la logique d’autofinancement qui l’anime, l’existence d’une dualité organisationnelle (local/national) qui s’accompagne d’une division du travail particulière
(opérationnel/expertise). Les analyses de différents experts et universitaires s’accordent pour affirmer l’impact significatif du dispositif sur les vitesses de circulation et spécialement les plus excessives, mais également sur le nombre de
victimes des accidents de la circulation. Le ratio coût/bénéfice du dispositif est
également impressionnant et met en évidence la rationalité économique de sa
mise en œuvre. D’un point de vue interprétatif, le dispositif britannique obéit à une
logique polycentrique, accorde une réelle importance à la transparence organisationnelle et informationnelle et s’inspire clairement de principes économiques et
managériaux.
3.1. Le déploiement du dispositif
Les premiers dispositifs automatisés de contrôle de la vitesse ont été installés en Angleterre au cours de l’année 1991 et en 1993 en ce qui concerne
l’Ecosse. Au cours de l’année 2000, les autorités britanniques expérimentent un
fonctionnement spécifique, à partir des partenariats locaux ou local partnerships
qui s’appuient sur le principe du netting off system. Le dispositif automatisé doit
s’autofinancer. Compte tenu des succès prometteurs de ce système, un programme national est conçu afin de coordonner l’ensemble des dispositifs locaux
et d’assurer un fonctionnement homogène sur l’ensemble du territoire28. À la fin
de l’année 2004, près de 45 dispositifs locaux avaient adhéré au programme
national. Le processus d’« almagation » arrivait donc à son terme en seulement
trois années, et la généralisation des local partnerships au bout d’un an seulement après la mise en œuvre des sites pilotes.
28 Même
s’il subsiste quelques différences entre les systèmes écossais et anglais, la philosophie du
système reste identique.
Synthèse INRETS n° 57
207
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Actuellement, environ 7 000 dispositifs de contrôles sont déployés sur l’ensemble du territoire, dont 5 000 sites possibles (mobiles et fixes) pour les seuls
appareils alloués à la régulation des vitesses [Mountain et al., 2004, p. 280]. Le
dispositif britannique dispose donc d’une relative maturité (plus de dix années
d’expérience) et d’un retour d’expérience considérable compte tenu d’un nombre
considérable d’études menées [Mountain et al., 2005(a) et (b) ; Gains et al., 2004 ;
Mountain et al., 2004 ; Christie et al., 2003 ; Gains et al., 2003 ; Hess, 2003 ;
Stradling et al., 2003 ; Hooke et al., 1996 ; Corbett, 1995]. Le dispositif automatisé
se distingue également par une intensité de contrôle relativement importante si
le nombre de sites possibles est pris en considération. Le contrôle automatisé ne
constitue donc pas un dispositif d’appoint mais un élément central de la politique
de sécurité routière, d’une part, et de régulation des vitesses, d’autre part.
La conception du dispositif de contrôle automatisé britannique s’articule
autour de deux structures : l’une nationale, l’autre locale. Le ministère des
Transports joue un rôle de superviseur afin de s’assurer du bon fonctionnement
du programme national. Ce programme est composé de plusieurs instances. Le
National Safety Camera Programme Board associe les acteurs clés du domaine
de la sécurité routière (représentants des ministères des Transports et de la
Santé, représentants des provinces galloise et écossaise et représentants des
dispositifs locaux…) et assure une fonction de conseil en matière de stratégie,
de direction et de contrôle du dispositif national (dimension nationale). Il assure
le contrôle du fonctionnement opérationnel et de la viabilité financière des dispositifs locaux (dimension locale). Chaque dispositif local doit assurer l’équilibre
financier entre ses débours et ses recettes. L’éventuel déficit de fonctionnement
devant être supporté par les acteurs impliqués dans le dispositif local de contrôle.
Le mécanisme de subvention croisée entre dispositifs n’est pas prévu. Le programme national comprend également un Safety Camera Programme Office qui
a en charge une fonction opérationnelle nationale (gestion des données statistiques, production d’analyse et de recherches…). Il effectue également un travail
d’identification des bonnes pratiques, permettant d’homogénéiser et d’harmoniser l’ensemble des dispositifs locaux et s’assure de leur diffusion et de leur application. Il réalise aussi le travail d’évaluation des dispositifs locaux et constitue
une structure de support et de liaison avec les structures locales. Le programme
national mène sa propre politique de communication au niveau national qui est
définie par la National Safety Camera Liaison. Le niveau national assure donc
à la fois un rôle de coordination et d’harmonisation des pratiques. Centralisant
l’ensemble des informations sur les différents partenariats locaux, le programme
national apparaît comme étant le véritable lieu de détention de l’expertise et de
définition de la stratégie.
L’instance nationale travaille en collaboration avec les dispositifs locaux qui
assurent l’ensemble du travail opérationnel. Au niveau local, le système de gouvernance est structuré autour des partenariats locaux29. Ces partenariats associent
29 Un
partenariat local peut comprendre plusieurs sites de contrôle répartis sur plusieurs juridictions
politiques.
208
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
et fédèrent les différents intervenants locaux intéressés à la résolution des problèmes de sécurité routière (magistrats, policiers, services de santé et de secours,
représentants de l’équipement, élus, chercheurs…) [Department for Transport,
2004, p. 14 et s.]. Les dispositifs locaux sont responsables auprès des instances
nationales (accountability) pour le respect des règles de fonctionnement et de
déploiement des appareils, mais également pour bénéficier des remboursements
et de l’agrément les autorisant à participer au programme national.
Le partenariat local dispose de trois organes. Le bureau de la direction (partnership steering group or board) qui surveille le fonctionnement opérationnel du
dispositif et définit la stratégie locale. L’instance de direction opérationnelle (partnership working group) assure le bon fonctionnement opérationnel local (management, finance, analyse des données…). Les organes opérationnels (Partnership
Project Office) prennent en charge le travail quotidien de contrôle et des poursuites, assurés par des civils sous la direction de policiers. Chaque partenariat
local doit assurer son autofinancement, et tout déficit éventuel sera supporté par
les différents associés du système. Toute activité déficitaire doit être notifiée au
bureau national du programme. Les dépenses remboursables sont spécifiées, et
l’éventuel surplus financier reversé au Trésor.
3.2. Des impacts significatifs
Les nombreuses études sur le contrôle automatisé des vitesses en GrandeBretagne concluent toutes à un impact significatif sur les vitesses de circulation et
sur le nombre de victimes [Christie, et al. 2003 ; Gains et al., 2003]. Le caractère
significatif des résultats est maintenu lorsque la zone d’évaluation est élargie :
“The results show that in the 250 meter range, the average effect of the installation of a speed limit enforcement camera is a drop in (weighted) injury–accident
numbers by an astounding 45.74%, corresponding figures for the 500, 1,000 and
2,000 meter ranges are reductions by 41.30, 31.62 and 20.86% respectively…”
[Hess 2003, p. 9]. Les effets des dispositifs automatisés semblent ainsi démontrés une certaine robustesse.
Le Tableau 1 met en évidence un effet significatif à la fois sur les vitesses de
circulation de manière générale et un resserrement de la distribution des vitesses, avec une diminution importante du 85e centile de 3,2 mph en moyenne,
soit une baisse de 7 %. Le dispositif produit également un effet dissuasif notable puisque le nombre de véhicules en excès de vitesse a chuté de 32 % en
moyenne pour l’ensemble des sites et ceux en excès de vitesse de plus de
15 mph de 43 %.
Synthèse INRETS n° 57
209
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Tableau 1 : impact des dispositifs automatisés
sur les vitesses de circulation
Limite de
vitesse
Évolution
de la vitesse
moyenne
(mph)
–2,4
–2,8
%
30 mph
–8
40 mph
–7
Sites
–2,5
–8
urbains
50 mph
–1,7
–4
60 mph
–2,2
–4
70 mph
–2,6
–4
Sites
–2,1
–4
ruraux
Total
–2,4
–7
(Source : Gains et al., 2004, p. 25).
85e centile
(mph)
%
Évolution des
usagers en excès
de vitesse (%)
–3,4
–3,2
–9
–7
–33
–34
Évolution des
usagers en excès
de vitesse > 15 mph
(%)
–46
–47
–3,3
–9
–33
–46
–1,0
–2,9
–2,5
–2
–5
–3
–19
–23
–20
–12
–35
–14
–2,5
–4
–22
–29
–3,2
–7
–32
–43
Les auteurs soulignent également un impact différencié selon le lieu de
contrôle ; l’effet le plus important concerne les dispositifs urbains. Ce résultat différencié pourrait s’expliquer pour partie par la technologie utilisée : des dispositifs
mobiles essentiellement utilisés en milieu rural, tandis que les dispositifs fixes
sont installés en grande partie en milieu urbain.
Tableau 2 : répartition des sites de contrôle
selon le lieu de contrôle et le mode utilisé30
Mode de contrôle \
lieu de contrôle
Fixe
Mobile
Urbain
Rural
45,2 %
36 %
7,15 %
11,65 %
Ainsi, le dispositif britannique se caractérise pour moitié par des dispositifs
mobiles et essentiellement localisés en milieu urbain (environ 80 % des sites). En
milieu urbain, 55 % des appareils sont fixes, tandis qu’un peu plus d’un tiers l’est
en zone rural. Les autorités britanniques ont donc adopté une stratégie particulière, qui doit être intégrée dans l’analyse lorsque des comparaisons sur les vitesses pratiquées sur les différents réseaux français et britanniques sont menées.
Les résultats sont également significatifs, concernant l’accidentologie. Le nombre de tués et de blessés graves a diminué en moyenne de 40 % pour l’ensemble
des sites, avec un effet relativement identique quel que soit le lieu de contrôle.
Toutefois, les dispositifs fixes semblent démontrer une plus grande efficacité, qui
doit être relativisée dans la mesure où les conditions d’implantation sont différentes et le niveau d’accidentologie initial également. L’analyse des résultats relatifs
30 Calcul
210
effectué à partir de l’échantillon de Gains et al. (2004).
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
à la diminution des accidents corporels souligne une réduction plus importante
pour les dispositifs fixes et pour les sites situés en milieu urbain.
Tableau 3 : effets des contrôles automatisés
sur le nombre des tués et blessés graves et sur le nombre
des accidents corporels selon le lieu et la modalité de contrôle
Évolution du nombre de tués
et blessés graves
Mode de contrôle \
lieu de contrôle
Fixe
Mobile
Évolution du nombre
d’accidents corporels
Urbain
Rural
Urbain
Rural
–49,0 %
–29,4 %
–59,9 %
–24,0 %
–42,1 %
–25,2 %
–38,1 %
–15.2 %
Non seulement le dispositif britannique modifie significativement les vitesses
de circulation et les accidents associés, mais son fonctionnement est économiquement viable puisque les revenus générés sont largement supérieurs aux coûts de
fonctionnement. Selon une étude pilote, le retour pour chaque livre dépensée est de
cinq au bout d’une année de fonctionnement et de 25 après cinq années de mise en
œuvre [Hooke et al., 1996, p. vii]. Le dispositif automatisé permet ainsi de réduire
les pertes humaines et matérielles associées à la survenance des accidents, soit
environ 30 millions de livres chaque année. Il dégage également les agences policières d’un certain nombre de tâches lié à l’insécurité routière. Ainsi, 11 % environ
de leur activité est consacrée aux seules interventions lors d’accidents, tandis que
chaque point d’activité équivaut à environ quatre millions de livres. Le coût de production d’une amende a été estimé à 27 livres, tandis que le montant de celle-ci est
de 60 livres31. Une autre étude précisait que le dispositif automatisé avait permis
de dégager six millions de livres (différence entre le produit des amendes et le fonctionnement du dispositif), auxquels 112 millions de gains liés aux accidents évités
devaient être ajoutés. Ces 112 millions de livres résultent de l’évitement de pertes
de production à hauteur de 24,5 millions, l’économie de frais médicaux pour 4,5 millions, ainsi que des coûts évités liés à la personne de l’ordre de 112 millions de
livres [Gains et al., 2003, pp. 6–2]. L’évaluation du programme national du contrôle
automatisé (comprenant également le dispositif déployé pour le respect des feux
de circulation) a généré un produit financier de l’ordre de 99 millions de livres, alors
que son coût s’élève à environ 79 millions pour son installation et son fonctionnement, permettant de dégager un surplus sur trois ans d’environ 20 millions de livres,
dont 75 % pour la seule année 2003. Plus de 220 millions de livres ont été également économisées suite à l’évitement d’accidents [Gains et al., 2004 pp. 58 et 59].
Le ratio coût/bénéfice est ainsi de l’ordre de 4 pour 1, confirmant dans une certaine
mesure la tendance avancée lors de l’étude pilote32.
31 Lorsque
l’automobiliste désire présenter sa défense devant un juge, le produit de l’amende n’est
pas versé au partnership. Ainsi, le dispositif automatisé peut détecter certaines infractions, pour
lesquelles aucun revenu ne sera associé.
32 Si le dispositif a été déployé prioritairement aux endroits les plus dangereux, les gains marginaux
doivent nécessairement décroître, ce qui explique un ratio légèrement moins favorable.
Synthèse INRETS n° 57
211
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
3.3. Éléments d’interprétation
Le modèle britannique de contrôle automatisé des vitesses apparaît comme
un dispositif polycentrique dans son organisation, faisant preuve de transparence
dans son fonctionnement et s’appuyant pour cela sur des efforts de communication conséquents. Son fonctionnement fortement inspiré de principes économiques et managériaux semble mettre en évidence un processus de commutation
dans le processus de régulation des vitesses.
Le système britannique se caractérise par un polycentrisme organisationnel,
dans la mesure où il est le produit de deux programmes nationaux (écossais et
anglais [et le pays de Galles]). Il est surtout le fait de 47 partenariats locaux33.
Bien que les décisions stratégiques et les règles de fonctionnement soient définies au niveau national, la direction opérationnelle des contrôles est assurée par
les partenariats locaux. L’activité de régulation des vitesses de circulation est le
résultat d’actions concertées et menées au niveau local. La mise en œuvre de
dispositifs automatisés et le déploiement des appareils découlent de prises de
décision locales, même si leur travail s’en trouve facilité par le support et l’expertise offerte au niveau national.
L’organisation polycentrique résulte aussi du processus de développement
lui-même dans la mesure où l’implantation de contrôle automatisé procédait de
décisions locales autonomes. Les premières installations ont débuté au début des
années 1990, tandis que le programme national a débuté par une expérimentation en 2001.
Même si la dimension locale reste une caractéristique essentielle pour comprendre le fonctionnement du dispositif de contrôle automatisé britannique, la
création d’un programme national peut s’interpréter comme une volonté de centraliser le dispositif à l’aide de différents moyens : harmonisation des règles de
fonctionnement, contrôle de l’expertise et pouvoir de l’octroi de l’agrément qui est
renouvelable chaque année34. Dans un rapport officiel35, la position du gouvernement central apparaît sans ambiguïté. Le gouvernement dispose du leadership
pour définir une stratégie nationale cohérente et homogène : …“The Government
should establish a National Speed Management Strategy…” “Speed Management
strategy is nationally based for consistency and applied locally with sufficient permitted to accommodate local needs and experience.” … ”Local authorities rightly
cherish their independence, but this should not extend to neglecting road safety :
saving lives should not be a matter for discretion.” … “Finally, and most importantly, the Government needs to give political leadership.”
33 Information
qui nous a été fournie par Richard, c’est lors du second workshop sur le contrôle des
vitesses en France et en Grande-Bretagne.
34 Le lecteur pourra se référer aux guides édités par le ministère des Transports anglais et écossais
pour connaître les détails de la procédure et l’obtention de l’agrément [Department for Transport,
2004 ; Scottish Safety Camera Programme, 2004].
35 Secretary of State for Transport (2002), “The Government’s Response to the Transport, Local
Government and the Regions Committee’s Report, Road Traffic Speed”, Presented to Parliament by
the Secretary of State for Transport by Command of Her Majesty, The Stationery Office.
212
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
Une dimension essentielle du fonctionnement du dispositif britannique se
réfère à la dimension informationnelle et à sa transparence. La dimension informationnelle concerne notamment le fonctionnement des dispositifs locaux pour
lesquels des procédures d’audit régulières sont menées concernant à la fois
les dépenses et les recettes. À ce titre, des obligations de reporting sont prévues pour les éléments financiers. Chaque année, un audit est mené afin de
contrôler le bon usage des ressources, tandis qu’une analyse des performances
financières est assurée régulièrement afin de limiter les problèmes de trésorerie
[Department for Transport, 2004, pp. 51–55]. L’obtention de l’agrément exige de
la part des autorités locales un réel travail de justification et l’élaboration d’un
plan d’activité (développement, politique de communication, évaluation des sites
existants…). La transparence est également au centre de l’activité opérationnelle
avec la médiatisation de l’implantation des lieux de contrôle et leur signalisation
(un panneau de signalisation doit être installé à moins d’1 km du lieu de contrôle
fixe, le boîtier doit être visible par le conducteur et peint d’une couleur jaune)36
[Ibid. pp. 25–26].
La transparence informationnelle résulte également de la production d’études
et de recherches menées à la fois par des experts et des universitaires. Le dispositif automatisé constitue un objet de recherche à part entière et sur lequel le
débat est possible. À ce titre, les débats sur les phénomènes de migration d’accidents et des alternatives possibles à l’automatisation des contrôles pour réguler
les vitesses de circulation soulignent une certaine vitalité de la réflexion sur le
contrôle automatisé [Moutain et al., 2005 (a) et (b)]
La définition de guides pour le fonctionnement des dispositifs automatisés
met en évidence le soin relatif apporté à la définition de règles de fonctionnement
transparentes. Ainsi, le niveau de tolérance est clairement défini : la vitesse limite à
laquelle on ajoute 10 % et 2 mph. Pour une limite de vitesse de 30 mph, le conducteur pourra recevoir une amende s’il dépasse le niveau de 35 mph. Le ministère
des Transports précise : “The enforcement of traffic law by the police should be
guided by the principles of proportionality in applying the law and securing compliance ; targeting of enforcement action ; consistency of approach ; and transparency about what enforcement action is undertaken and why ; and recognition that
effective partnership with other organisations is essential.” Le montant de l’amende
prévu pour la réalisation d’un excès de vitesse est de 60 livres. L’installation d’un
dispositif fixe se trouve justifiée lorsque, sur une période de 36 mois, le site (dont
la longueur peut varier de 0,4 à 1,5 km) se caractérise par un nombre d’au moins
quatre victimes (tuées et blessées gravement) par kilomètre. Ces critères sont de
deux victimes tuées ou blessées gravement par kilomètre sur les 36 derniers mois
pour des sites dont la distance peut varier entre 400 m et 5 km. Par ailleurs, le
site doit se caractériser également par un 85e centile supérieur au seuil défini par
36 Selon Pilkinton (2003), la signalisation et la définition de critères d’implantation seraient relativement
récents et résulteraient de la pression des lobbies antiradars. Il s’agirait de laisser une plus grande
chance à l’usager. Des considérations en termes d’équité entreraient en jeu au détriment de l’efficacité
du système.
Synthèse INRETS n° 57
213
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
l’association des policiers et une proportion d’au moins 20 % d’usagers au-dessus
de la limite de vitesse. De plus, l’installation d’un dispositif de contrôle automatisé
nécessite l’impossibilité de procéder à une modification de l’infrastructure.
La politique de communication apparaît comme une dimension clé du dispositif de contrôle automatisé. Celle-ci est menée au niveau national, mais également au niveau local. Les objectifs de la politique de communication visent à la
prise de conscience des usagers des dangers de la vitesse et de l’existence des
sites de contrôle et en publicisant les lieux d’installation de les rendre acceptable
et légitime par la population. La politique de communication doit s’intégrer dans
une politique tenant compte des actions menées par ailleurs par les différents
partenaires. La communication vise aussi à fournir des informations sur les lieux
de contrôle, le type de matériel utilisé, les chiffres relatifs à l’accidentologie locale
et leur évolution, à justifier les raisons de l’installation de sites de contrôle spécifiques, et à recherche une transparence financière sur leur fonctionnement à
l’égard des associés et de la population.
Le fonctionnement du dispositif de contrôle automatisé britannique est fortement inspiré de principes économiques et managériaux. Cette influence de la logique managériale et économique transparaît à la fois par les différentes modalités
de contrôle financier (audit, plan d’action…) mais également par les principes de
fonctionnement. En 2001, l’adoption du programme national impose l’autofinancement des dispositifs de contrôle automatisés. Les termes retenus pour qualifier
ce type de fonctionnement sont le système de netting off ou d’hypothecation. Les
revenus générés par l’activité de contrôle doivent couvrir les dépenses de fonctionnement éligibles des différents partenaires associés (police, magistrature…).
Tableau 4 : revenus et coûts de fonctionnement du programme national de
contrôle automatisé de la vitesse britannique (en millions de £)
Année
2000–2001
2001–2002
2002–2003
Total sur les 3 années
Revenus
10 532
19 660
68 872
98 872
Coûts
8 985
16 106
54 256
79 348
Surplus/déficit
1 367
3 554
14 615
19 537
(Source : Gains et al., 2004, p. 57).
Les autorités britanniques sont également capables de fournir des informations sur le coût de production d’une infraction issue du dispositif automatisé. Ce
coût est d’environ 30 £ sur les derniers exercices. Au-delà du caractère plus ou
moins précis des chiffres avancés, ce qui est notable réside dans cet effort de
raisonner en termes de revenus d’activité et de coûts de production. Les termes
pour désigner la différence entre les produits et les débours se référent au surplus
et à la notion de déficit pour ne pas utiliser le terme de profit.
En fait, le développement du programme s’appuie sur les notions de « Best
Value » (BV), qui associe les concepts d’économie, d’efficacité et d’efficience.
L’objectif d’économie consiste à atteindre un objectif au coût le plus faible possible
214
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
pour un service de qualité défini. L’objectif de l’efficience implique de dépenser
le budget donné de manière à pouvoir acheter des dispositifs qui produisent
le niveau de dissuasion le plus élevé possible. Quant à l’objectif d’efficacité, il
consiste à déterminer l’agencement organisationnel permettant d’obtenir le
niveau de production le plus important pour un budget donné [Department for
Transport, 2004, p. 41]. Malgré la complexité de la mise en œuvre opérationnelle
du principe de la BV, l’intégration d’un tel concept dans le guide publié par le
ministère des Transports britannique souligne l’importance de la place accordée
à l’analyse financière. La conception de certains rapports indique ainsi que les
principes de la comptabilité analytique font partie intégrante du fonctionnement
du dispositif. Les dépenses sont ventilées selon l’utilisation (publicité, activité
opérationnelle, réparation, frais administratifs…) [Hooke et al., 1996, p. 15]. Ainsi,
sur un échantillon de sites de contrôle, le coût moyen d’un site est de 12 500 £,
dont 80 % pour le matériel de détection et 5 % pour la signalisation. Le coût
de fonctionnement est estimé à huit 500 £. La répartition des dépenses selon
les agences indique que les frais fixes sont essentiellement le fait des autorités
locales (avance pour l‘achat des radars, entre autres, représentent 68 % du total
des frais fixes), tandis que les dépenses de fonctionnement sont concentrées sur
les agences policières (63 %) et les tribunaux (33 %).
Cependant, cette logique financière doit faire face à ses propres limites. Le
déploiement initial des appareils a été facilité dans la mesure où les sites présentant des gains assurés ont été privilégiés. Les dispositifs subsistant étant
donc ceux pour lesquels le respect des critères d’implantation est plus difficile.
En somme, les autorités doivent faire face à une situation de gains marginaux
décroissants. Des solutions alternatives existent : mettre désormais l’accent sur
les dispositifs mobiles pour lesquels les critères sont moins exigeants, modifier
les critères d’équipement ou encore faire une pause dans l’installation des radars
pour travailler plus à leur intégration dans la politique de sécurité routière. En
Écosse, cette dernière solution semblerait avoir des chances de s’imposer, selon
notre interlocuteur en charge du programme national écossais de contrôle automatisé. Ainsi, il existe une limite à l’extension d’un dispositif automatisé, et cette
limite peut être appréciée en définissant des critères économiques. Le système
est également confronté à la baisse des revenus associés au respect des limites
de vitesse par les conducteurs. Dans ce cas, l’autofinancement du dispositif peut
devenir problématique. Nous touchons ici à un problème lié à l’adoption d’une
optique comptable de la part des autorités qui raisonnent en termes de revenus
et de coûts monétaires. Or, le système automatisé génère également des gains
liés à l’évitement d’accidents et de victimes qu’il convient de réintégrer. En cela,
l’optique économique souligne la rentabilité de tels dispositifs et la nécessité de
les maintenir, voire de prévoir leur extension [Gains et al., 2004 ; Hooke et al.,
2003]. En effet, selon Gains et al., les gains liés à l’évitement des dommages
matériels et corporels s’élèvent à plus de 200 millions de livres, soit des gains dix
fois supérieurs au surplus comptable [Gains et al., 2004, p. 58].
L’introduction d’un dispositif de contrôle automatisé de la vitesse a modifié
substantiellement le mode de régulation policière des vitesses de circulation.
Synthèse INRETS n° 57
215
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
D’une part, la constitution d’un programme national a permis aux autorités centrales britanniques de se positionner comme leader dans le traitement de la sécurité
routière. Même si l’activité de sécurité routière constitue une prérogative des forces policières britanniques, celle-ci n’apparaît pas comme une activité prioritaire
[Ogilvie-Smith et al., 1994]. D’ailleurs, le gouvernement incite la police métropolitaine du grand Londres de faire preuve d’une considération plus importante pour
l’activité de sécurité routière et de la considérer dorénavant comme une priorité
[Secretary of State for Transport, 2002, pp. 22–23]. Outre la place restreinte qu’occupe l’activité de sécurité routière dans les préoccupations des forces policières,
l’activité de régulation de la vitesse semble être désormais le fait des dispositifs
automatisés. Quatre-vingt-cinq pour cent des infractions à la vitesse résultent du
système de contrôle automatisé, soit près de 1,5 million d’infractions [Ayres et al.,
2004]. Le nombre d’infraction pour excès de vitesse s’est accru de 40 % entre
2001 et 2002. Ces chiffres signifient que l’activité de régulation des vitesses s’appuie essentiellement sur les dispositifs automatisés. Certes, les forces de police
sont associées aux dispositifs, mais, dans la pratique, la régulation des vitesses
ne constitue plus une activité essentielle. Un processus de commutation s’est
produit lors du déploiement des radars automatiques. Cela constitue une opportunité pour les forces de police de se décharger d’une activité peu populaire,
qui leur permet désormais de se concentrer sur d’autres types d’infractions au
code de la route et d’autres activités criminelles. Outre cet effet de substitution
relatif à la régulation des vitesses, le mécontentement des populations s’est réorienté vers les dispositifs automatiques, ce qui a conduit les autorités à apporter
une réponse ambivalente. Les lieux de contrôle sont désormais signalés et les
équipements munis de caractéristiques spécifiques afin d’éviter le sentiment de
piége pour le conducteur, tandis que le montant de l’amende a été porté de 40 à
60 £. Le système apparaît relativement efficace dans le traitement des infractions,
puisque seulement 15 % environ des contrevenants défendent leur cas devant un
juge, contestation qui peut se traduire par un renforcement de la sévérité de la
sanction (112 £) [Hooke et al., 1996, p. 30]. En conséquence, les forces de l’ordre
se trouvent quasi exclues de la régulation opérationnelle des limites de vitesse
mais participent à la définition stratégique et supervisent le fonctionnement opérationnel. En suivant notre typologie, la situation britannique se caractérise par un
processus de commutation opérationnelle.
4. Les modalités opérationnelles et managériales du
système de contrôle automatisé des vitesses en France
Le déploiement du dispositif de contrôle automatisé français s’est effectué en
trois étapes. Il s’agit d’un dispositif reposant sur une technologie de pointe, et
en cela il représente un véritable choix technique pour réguler les vitesses de
circulation. Les premiers éléments en possession semblent indiquer que la mise
en œuvre du contrôle–sanction automatisé a produit sans doute des effets sur
les vitesses de circulation et sur l’accidentologie. L’absence de données économiques relatives à son fonctionnement constitue cependant un handicap pour
216
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
déterminer la viabilité et la pérennité d’un tel système. Cette absence d’analyse
reflète la dimension technocentrée du dispositif, son insuffisante transparence
quant à ses modalités de fonctionnement, malgré une insertion plutôt réussie au
sein du dispositif de contrôle des vitesses traditionnel. Il est raisonnable d’affirmer
qu’il existe d’ailleurs une certaine complémentarité entre les deux dispositifs que
nous caractérisons par un processus d’association opérationnelle.
4.1. Les différentes phases du développement
Lors du discours présidentiel de juillet 2002, le président Chirac place la sécurité routière comme un chantier national pour le quinquennat à venir. Dès lors, des
réflexions sont menées quant aux modalités d’interventions en s’inspirant notamment des expériences étrangères [Carte Blanche Conseil, 2003 ; Certu, 2001]. Il
s’agit de disposer de propositions techniques afin de faciliter le déploiement du
dispositif.
Le dispositif a donc été, dès sa conception, pensé en termes techniques et de
technologie. À cet égard, les rapports remis sont exemplaires puisque les comparaisons étudient les techniques d’automatisation et les problèmes organisationnels. Les considérations institutionnelles sont absentes des réflexions (insertion
des dispositifs dans la politique de sécurité routière, impact sur l’activité traditionnelle des acteurs des organisations policières et judiciaires, politique de légitimation du dispositif à l’égard des populations…). Le choix se pose d’abord en termes
d’efficacité technique.
« Afin de faciliter la transposition en France des solutions qui permettent de
lever les principaux obstacles à une bonne efficacité et à un large déploiement
de tels systèmes, la présente étude décrit et analyse des chaînes de contrôle–
sanction étrangères qui ont atteint un contrôle plus efficace qu’en France. Elle
s’intéresse particulièrement aux systèmes automatisés, puisque c’est sur l’automatisation que reposent en grande partie les gains de productivité de la chaîne
complète, visés par le gouvernement français… Elle comprend l’efficacité comme
le rapport entre les moyens déployés et le nombre de contrôles effectués et de
sanctions produites » [Carte Blanche Conseil, 2003, p. 3].
Le dossier de presse remis par les autorités sur le déploiement des radars
automatiques sur les années 2004–2005 confirme cette prédominance de la technique et de la technologie. En effet, le déploiement des radars automatisés est
décliné selon les thématiques des choix de zone d’implantation, les considérations techniques des lieux d’implantation, l’automatisation de la chaîne contrôle–
sanction et la technologie des radars employés [Sécurité routière, 2004 (b)].
Les premières expérimentations des radars automatisés se sont déroulées au
début de l’année 2003 sur six sites distincts. Les sites d’Angers, de Saint-Étienne
et des tunnels du Fréjus, du Mont-Blanc et des Monts à Chambéry ont été retenus
[Arrouet, 2003, p. 5]. Ces choix s’expliquent en partie par des initiatives locales
fortes (préfet, juge et forces de l’ordre). Les enquêtes de terrain sur le département de la Savoie nous permis de rencontrer les acteurs impliqués dans cette
Synthèse INRETS n° 57
217
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
expérimentation et de confirmer l’hypothèse de la rencontre d’investissements
d’acteurs locaux et des demandes nationales. Au tunnel de Ponserand, l’installation d’un radar de première génération produit des effets remarquables avec une
chute significative de la vitesse moyenne (–6 km/h) et le resserrement de la distribution des vitesses. La proportion de conducteurs en situation d’excès de vitesse
diminue également de manière significative (–90 %).
Suite à la création officielle du CSA en octobre 2003, les premiers appareils
sont installés en novembre 2003. L’objectif retenu par le comité interministériel
vise le déploiement de 100 appareils d’ici la fin de l’année 2003, dont 30 dispositifs mobiles37. Finalement, compte tenu des problèmes techniques liés à la
technologie retenue (liaison par réseau), seuls 50 dispositifs fixes ont été installés [Sécurité routière, 2004(b)]. Au 30 juin 2005, environ 727 sont installés dont
plus de 280 mobiles. Les objectifs du gouvernement français sont de poursuivre
le déploiement des radars automatiques sur le territoire, avec 1 000 appareils
reliés d’ici la fin de l’année 2005. Il est prévu d’installer 500 appareils supplémentaires sur l’année 2006 en les déployant essentiellement sur le réseau rural. En
somme, le processus de déploiement s’est appuyé sur trois phases successives :
une phase expérimentale (2003), la phase 1 de déploiement (2003–2005) et une
phase 2 de consolidation et de poursuite du développement (à partir de 2005).
L’architecture institutionnelle, du fait d’une complète automatisation, s’en
trouve simplifiée. La mission interministérielle du contrôle–sanction automatisé
(MICSA), qui est devenue la direction interministérielle de projet du contrôle automatisé (DPICA)38 soulignant dans une certaine mesure la pérennité du dispositif
institutionnel. Cette organisation centralise à la fois les demandes d’installation
émanant du niveau local, gère le processus et préside in fine aux choix d’installation des dispositifs automatisés. Elle dispose également des informations relatives à son fonctionnement qu’elle garde secrètement. Elle assure également la
formation des forces de l’ordre qui seront amenées à utiliser les équipements
mobiles. Le Centre national de traitement (CTN) de Rennes centralise l’ensemble
des infractions relevées par les dispositifs mobiles et fixes et gère la procédure
jusqu’au paiement de l’amende. Seules les procédures de contestation sont assurées par les tribunaux et peuvent être considérées comme échappant au dispositif
automatisé. L’automatisation quasi complète du système implique l’absence de
relais locaux, à l’exception de la mobilisation des acteurs périphériques pour la
proposition de lieux d’implantation et les forces de l’ordre comme moyens opérationnels supplétifs dans le cadre du fonctionnement des dispositifs mobiles. En
effet, l’impossibilité d’intervenir dans le choix des seuils de vitesse et l’imperméabilité technique du système aux interventions humaines (empêchant la destruction de preuves de certaines infractions) assurent un fonctionnement cloisonné du
système et son contrôle par une organisation nationale.
37 Il
s’agit de respecter une proportion de deux tiers pour des appareils fixes et un tiers pour des
appareils mobiles.
38 On notera la disparition du terme Sanction dans le sigle retenu, qui laisse suggérer qu’il s’agit plus
d’un dispositif de surveillance que de sanction.
218
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
4.2. Les premiers enseignements
Contrairement à la situation britannique, aucune évaluation nationale39 n’est
disponible quant aux effets sur les vitesses de circulation et l’accidentologie,
même si des travaux sont menés pour en mesurer les impacts au niveau local.
Toutefois, entre octobre 2003 et octobre 2004, environ deux millions d’infractions
à la vitesse ont été constatés par les dispositifs automatisés, dont les trois quarts
concernent des véhicules immatriculés en France [Canel et Nouvier, 2004, p. 58].
La plupart des infractions constatées relève d’excès de vitesse mineurs, et la distribution des excès de vitesse semble être stable au cours du temps (Tableau 5).
[Comité interministériel de sécurité routière, 2005, p. 6 ; Canel et Nouvier, 2004,
p. 58]. Les conducteurs ont donc diminué sensiblement leur vitesse de circulation
au niveau des points de contrôle.
Tableau 5 : répartition des excès de vitesse selon leur importance
D = dépassement de
la vitesse autorisée
D < 20 km/h
20 km/h < D < 30 km/h
30 km/h < D < 40 km/h
40 km/h < D < 50 km/h
D > 50 km/h
% du total des infractions
(Canel et Nouvier, 2004)
87,9
8,3
2,4
0,8
0,6
% du total des infractions
(CISR, 2005)
88,5
8,0
2,2
0,8
0,5
Selon une première ébauche d’évaluation du contrôle–sanction automatisé,
qui reprend elle-même certaines « affirmations d’experts », l’effet de halo local lié
aux contrôles automatisés aurait une portée de 3 km40 [Chapelon, 2004, p. 9]. Si
ce chiffre est retenu, les dispositifs locaux toucheraient seulement 3 % de l’ensemble du réseau français41. L’intensité de contrôle s’avérerait donc fort limitée et
en diminuerait d’autant les effets sur les vitesses de circulation et les accidents.
Toutefois, la mise en place du CSA a permis d’accroître de manière substantielle
la probabilité de contrôle des conducteurs. Un usager du réseau national serait
ainsi contrôlé en moyenne deux fois par mois. Par ailleurs, le taux de dépassement de la limite de vitesse au niveau des dispositifs automatisés est inférieur à
1 % (0,3 %), ce qui implique une adaptation comportementale des conducteurs.
L’effet de dissuasion s’en trouve donc vérifié empiriquement. D’autre part, le nombre d’accidents aux lieux des contrôles aurait diminué de 85 % [Comité interministériel de sécurité routière, 2005, p. 6]42.
39 Un
document d’évaluation du CSA devrait être rendu public d’ici la fin de l’année 2005.
effet de déport
41 L’intensité du dispositif peut être appréciée de différentes manières, comme par le kilométrage de
voies impactées par celui-ci, par le nombre moyen de contrôles d’un usager, ou encore par le nombre
d’infractions par conducteurs.
42 Nous ne disposons ni de l’étude, et a fortiori, ni de la méthodologie utilisée qui permettrait de vérifier
à la fois les chiffres avancés et les moyens pour parvenir à cette estimation.
40 ou
Synthèse INRETS n° 57
219
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Outre un effet local notable, un effet de dissuasion global43 ne peut être exclu.
Ainsi, les dépassements de plus de 30 km/h et de plus de 40 km/h ont fortement
diminué depuis 200244. Les premiers ont chuté de 80 %, tandis que les seconds
ont baissé de 85 %. Les gros excès de vitesse ont donc quasiment disparu.
Tableau 6 : taux de dépassement de la vitesse limite
tous véhicules et tous réseaux (en % et par quadrimestre)
Q1
2002
Q2
2002
Q3
2002
Q1
2003
Q2
2003
Q3
2003
Q1
2004
Q2
2004
Q3
2004
Q1
2005
Q2
2005
Dépassement
> 30 km/h
4,97
4,69
3,95
2,81
2,35
1,98
1,65
1,39
1,30
1,21
0,91
Dépassement
> 40 km/h
1,72
1,69
1,31
0,91
0,61
0,66
0,46
0,42
0,23
0,26
0,25
Source : Observatoire interministériel de sécurité routière – Observatoire des vitesses, mai 2005.
L’effet global de dissuasion associé aux contrôles automatisés de la vitesse
peut aussi être apprécié par l’indicateur synthétique de la vitesse calculé par l’Observatoire national interministériel de sécurité routière. Celui-ci se définit comme
l’indicateur de vitesse moyenne tenant compte de la répartition du trafic sur les
différents types de réseaux tant urbains que de rase campagne, de jour comme
de nuit, en circulation de circulation non contrainte. Or, cet indicateur met en évidence une diminution de 7,8 km/h, soit une baisse de près de 10 %.
Tableau 7 : évolution de la vitesse moyenne en km/h
à partir de l’indicateur synthétique
Q1
2002
Q2
2002
Q3
2002
Q1
2003
Q2
2003
Q3
2003
Q1
2004
Q2
2004
Q3
2004
Q1
2005
Q2
2005
90,5
88,5
88,8
87,3
87,0
86,1
84,9
84,4
84,2
83,0
82,7
Source : Observatoire des vitesses, second quadrimestre, 2005.
Nilsson a établi de manière empirique une relation entre le niveau de la vitesse
et le nombre de victimes tuées lors d’un accident de la route [Cohen et al., 1998,
p. 123]. Celle-ci prend la forme suivante :
, avec n désignant le nom-
bre de tués et v le niveau de la vitesse45. Si cette formule est appliquée en prenant en compte la diminution de 7 % de la vitesse moyenne de circulation entre
2001 et 2004, alors la chute du nombre de tués sur les routes doit être de l’ordre
43 ou
effet d’entraînement
l’on se réfère aux expériences internationales, il serait le fait essentiellement des dispositifs
mobiles.
45 Les indices a et b désignent respectivement les périodes après et avant.
44 Si
220
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
de 25 %46. Or, sur cette période, le nombre de tués a diminué de 32 %. Outre l’hypothèse d’une sur-réaction des conducteurs face à la mise en place du nouveau
dispositif de contrôle qu’ils connaissent mal, d’autres facteurs explicatifs doivent
être recherchés pour expliquer cette baisse.
La diminution des vitesses de circulation peut être appréciée par l’intermédiaire des taux de dépassement des vitesses limites pour les différentes catégories d’usagers. Ainsi, entre début 200 et fin 2004, le pourcentage des véhicules de
tourisme dépassant la vitesse limite a diminué de 22 et de 38 % pour des excès
d’au moins 10 km/h. Les effets sont moins marqués pour les motocyclettes dont
les diminutions sont respectivement de 10 et 21 % sur la même période. Les chutes sont respectivement de 5 et de 44 % (pour les dépassements de + de 10 km/h
hors autoroutes).
Même si l’ensemble des indicateurs de vitesse met en évidence un mouvement de baisse des vitesses de circulation et celles qui sont les plus excessives,
aucune étude scientifique n’a démontré que la totalité de la baisse était attribuable au déploiement au contrôle automatisé de la vitesse. Le renchérissement
du prix du carburant et une activité économique peu dynamique ont sans aucun
doute également contribué positivement à l’évolution du bilan accidentologique
[Carnis 2001(a), p. 452 et s.]. Cependant, il ne s’avère pas possible de déterminer
les parts attribuables aux différents facteurs.
Des indicateurs similaires peuvent être analysés non pas par type d’usagers,
mais par type de réseaux (Graphique 1). Le constat général confirme les résultats
précédemment avancés à savoir une diminution des vitesses de circulation, d’une
part, et un resserrement de la distribution des vitesses avec une diminution significative des vitesses les plus excessives d’autre part. Ainsi, les dépassements
de vitesse supérieurs à 10 km/h qui se situaient entre 20 et 30 % selon les axes
convergent vers un taux de 10 %, ce qui signifie une réduction par deux, voire par
trois de la valeur de ce taux.
Néanmoins, les taux de dépassement restent à des niveaux substantiellement
plus élevés que ceux constatés à proximité des lieux de contrôle. Les limites du
dispositif de dissuasion liées à l’effet de halo expliquent ce différentiel. Cependant,
l’interprétation qui peut en être tirée doit souligner l’adaptation comportementale
des conducteurs qui réduisent leur vitesse de circulation au niveau des lieux de
contrôle et accélèrent de nouveau après leur passage. En cela, les dispositifs
fixes produisent des effets de dissuasion locale limités au niveau spatial, tandis
que les dispositifs mobiles influent sur les vitesses pour l’ensemble du réseau.
Ces résultats confirment ainsi d’autres résultats obtenus dans d’autres pays qui
ont déployé des dispositifs automatisés [Cameron et al., 2003].
46 L’hypothèse
implicite, ici, consiste à attribuer l’ensemble de la diminution des vitesses de circulation
au seul déploiement des dispositifs de contrôle automatisé.
Synthèse INRETS n° 57
221
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Figure 2 : évolution de la vitesse moyenne et
du taux de dépassement de plus de 10 km/h sur routes
nationales et départementales hors intempéries
Source : Observatoire des vitesses, second quadrimestre 2005.
À notre connaissance, les autorités françaises ne semblent pas avoir pas
mené d’études coût–avantage sur le CSA comme cela est le cas pour la GrandeBretagne47. Les informations concernant cette dimension restent donc relativement éparses. Ainsi, sur l’exercice 2003–2004, les dépenses occasionnées par le
CSA se sont élevées à 101 millions d’euros, tandis que le produit des amendes
encaissées était de l’ordre de 106 millions d’euros [CISR 2005, p. 7]. En fait, selon
d’autres sources, chaque radar coûte environ 100 000 euros pour une période
de trois ans. Ce coût comprenant à la fois l’installation, l’exploitation et la maintenance48 [Canel et Nouvier, 2004, p. 58]. Si ce chiffre est rapporté au coût du
dispositif britannique : 34 000 £ pour une période similaire (trois années), alors
le dispositif français coûte environ deux fois plus cher. Le choix technologique
auquel ont procédé les autorités françaises a donc un prix et pose la question du
caractère approprié de ce choix technologique. Ce premier chiffre est également
à rapporter à l’importance des revenus générés : environ 30 millions d’euros sur
47 Lors
de notre présentation “Automated Speed Enforcement : Political Objective or Economic
Choice”, relative aux résultats intermédiaires concernant nos recherches menées sur le CSA dans
le cadre du Workshop on French and British Road Risk Regulation Regimes (R4) – Speed First,
CEPREMAP (Paris), un débat a été ouvert avec un représentant administratif, dont la position, fort
claire, consistait à affirmer l’inutilité de telles approches.
48 Nous ne disposons pas d’informations relatives aux coûts liés aux dégradations volontaires que
subissent les appareils, et si ces dépenses sont inclues dans les coûts de maintenance.
222
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
trois ans pour 5 000 sites de contrôles du côté britannique, tandis que le système
français a généré 1 million d’euros sur 2003–2004. Le rendement financier du dispositif britannique s’avère trois fois supérieur49. Malgré la disponibilité d’informations éparses et une certaine prudence à l’égard de l’interprétation des données, il
reste raisonnable d’affirmer que le système français ne soutient pas l’efficacité du
système britannique et, à ce titre, nécessite de développer une analyse économique fouillée du fonctionnement du système français. Il nous semble que le choix
technologique au-delà de son coût d’installation et de fonctionnement présente un
coût non négligeable en termes d’efficacité.
Par ailleurs, la loi du 12 juin 2003 précise également que le produit des amendes doit être affecté à des actions de sécurité routière, dont l’utilisation sera précisée dans un rapport remis annuellement. Cette même loi assure le versement
du produit des amendes à l’État jusqu’à l’exercice 2006 inclus, ce qui signifie que
ces revenus pourraient échapper, d’une part, au CSA lui-même pour assurer sa
maintenance et au secteur de la sécurité routière et, ainsi, financer d’autres interventions de l’État. L’absence de visibilité à terme dans l’utilisation des fonds, le
financement et l’extension du dispositif de contrôle automatisé français soulève
des questions quant à sa pérennité, d’une part, la fragilité de sa place dans le
dispositif institutionnel de sécurité routière d’autre part.
4.3. Éléments d’interprétation sur le système de contrôle
automatisé des vitesses
Compte tenu de l’introduction récente du système de contrôle automatisé des
vitesses qui, à cet égard, n’est pas encore parvenu à sa maturité, le retour d’expérience reste limité. L’interprétation proposée se veut également prudente du
fait des informations limitées dont nous disposons malgré des demandes répétées auprès des autorités compétentes. Néanmoins, un premier constat n’est pas
impossible à établir. Il nous semble que le dispositif français peut être qualifié
de technocentré, ayant une relation ambivalente quant à la transparence informationnelle, mais démontrant un processus de régulation des vitesses de type
association opérationnelle. Ces différentes lignes d’interprétation le distinguent
ainsi clairement du modèle britannique.
Le système français de contrôle automatisé peut être qualifié de technocentré. En effet, les autorités françaises ont opté pour une technologie privilégiant
à la fois la vidéo numérique et l’automatisation quasi complète du processus de
contrôle et de sanction. Ce choix technologique nécessite un accès au réseau
informatique et informatique afin de pouvoir relier les dispositifs au CNT. Cette
technique s’appuyant sur des caméras vidéo numériques permet la transmission
aisée de fichiers images, la reconnaissance des numéros de plaque… [Sécurité
Routière 2003, p. 14]. Ce choix technique impose des contraintes géographiques
importantes pour l’installation des dispositifs fixes du fait de la possibilité techni49 Supposons
que le surplus soit uniquement valable pour l’année 2004 et pour 500 sites de contrôle
compte tenu du déploiement progressif des appareils.
Synthèse INRETS n° 57
223
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
que de raccorder les appareils aux différents réseaux et influe en conséquence,
de manière notable, sur le choix des lieux d’installation, et donc sur le niveau de
dissuasion produit. Il implique également la quasi-élimination de toute intervention
humaine dans la procédure du contrôle et de la sanction des excès de vitesse.
En conséquence, la régulation des vitesses excessives apparaît ainsi comme
un problème essentiellement technique et difficilement contestable. L’élimination
systématique des clichés litigieux répond ainsi à une volonté de rechercher une
garantie absolue de fiabilité du dispositif50. La quasi-automatisation du processus
de traitement de l’infraction rend également possible la centralisation du traitement de l’information au CNT. Cette centralisation technique et géographique du
traitement des infractions s‘accompagne également d’une centralisation stratégique. La direction de projet interministérielle du contrôle automatisé (DPICA), sous
la direction d’un préfet et avec la collaboration de représentants des forces de
l’ordre et du ministère de l’Équipement, centralise ainsi les demandes de propositions de lieux d’implantation et prend la décision de donner suite à celles-ci le cas
échéant. La DPICA contrôle la collecte, le traitement et la diffusion des informations relatives au contrôle automatisé. En cela, elle dispose d’une position particulière et d’une relative autonomie dans ses interventions, du fait même de la rareté
des informations disponibles relatives à son fonctionnement et au fonctionnement
du dispositif et de leur diffusion extrêmement restreinte. Même si le déploiement
des dispositifs fixes se réalise de manière coordonnée avec les responsables
politiques et administratifs locaux et l’utilisation des dispositifs mobiles mobilisent
les forces de l’ordre locales, l’ensemble des informations relatives à l’activité de
contrôle remonte au CNT et à la DPICA en ce qui concerne la dimension synthèse. Contrairement au modèle britannique fonctionnant à partir de dispositifs
locaux décentralisés, le modèle français s’articule autour d’un centre technique et
technocratique, qui exclut de fait de son fonctionnement les représentants de la
société civile et les acteurs clés de la sécurité routière. En cela, la mise en œuvre
du CSA relève d’une décision administrative contrainte par des choix techniques
particuliers. Par ailleurs, il existe aussi une forme de paradoxe dans la mesure où
sa dimension organisationnelle s’appuie sur une direction de projet, et donc une
structure qui doit être théoriquement relativement flexible, mais qui s’accompagne
dans les faits de rigidités administratives liées à des comportements de protection
de l’information et d’opacité quant à ses modalités de fonctionnement.
Autre distinction notable du modèle français par rapport au modèle britannique, sa position ambivalente à l’égard de l’information. Aucune procédure d’audit
et de contrôle n’est prévue dans les modalités de fonctionnement du CSA, alors
que ces mesures constituent des points essentiels dans le système de gouvernance britannique. Nos enquêtes de terrain ont montré ainsi un fonctionnement
de chaque dispositif local relativement autonome par rapport à l’action des acteurs
locaux et par rapport aux autres dispositifs.
50 Ainsi,
seul 1 % des infractions donne lieu à une contestation devant le juge. Outre la qualité des
clichés et la démarche qualité adoptée, cette faible proportion s’explique également par le mécanisme
de la consignation qui consiste à s’acquitter au préalable du montant de l’amende. Cette disposition
très efficace soulève toutefois des questions de justice : peut-on justifier la condamnation au préalable
d’un conducteur au nom de l’efficacité du dispositif ?
224
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
Les informations relatives à la dimension opérationnelle (dégradation, heures
de fonctionnement de chaque dispositif, activité par site de contrôle), financière
(coût de fonctionnement par département, par régions…) ne sont pas rendues
publiques si toutefois cette information existe réellement ou en partie. Aucun élément d’appréciation n’est transmis quant aux modalités de constitution, d’agrégation et d’interprétation de l’information diffusée. Par ailleurs, à ce jour, aucune
étude scientifique n’a démontré les gains attribuables en termes de vies sauvegardées associés au dispositif de contrôle automatisé. En cela, il existe une réelle
opacité de l’information qui est à la fois subie (les outils d’information n’ont pas été
conçus lors de l’implantation du dispositif) et voulue (suite à la polémique engendrée par les propos tenus et volontairement provocateurs d’un universitaire). Le
seul souci de transparence des autorités à l’égard de la population est de médiatiser les lieux d’implantation des contrôles en précisant leur implantation géographique, entre autres, sur le site du ministère de l’Équipement et la disposition de
panneaux de signalisation en amont des lieux de contrôle. Les autorités veulent
éviter que n’émerge de la population le sentiment que les appareils ne soient
pas implantés aux endroits les plus dangereux, et qu’ils ne servent qu’à prélever une nouvelle ressource fiscale. Il s’agit ici clairement de rendre acceptable
socialement le contrôle automatisé. D’ailleurs, un membre de la DPICA souligne
que le CSA ne sera accepté par l’usager que s’il répond à un souci de réduction
de l’insécurité routière, et qu’un effort national de pédagogie soit entrepris [Canel
et Nouvier 2004, p. 58]. Le dispositif de contrôle automatisé britannique a, pour
sa part, intégré la nécessité de mener une politique de communication adaptée et réalisée de manière professionnelle. Le programme national dispose de
prérogatives en ce sens pour communiquer au niveau national, tandis que les
dispositifs locaux sont en charge de la politique de communication au niveau de
leur juridiction. Les politiques locales et nationales se confortent ainsi l’une l’autre,
ce qui permet d’obtenir un fort soutien de la part des usagers. Cette politique de
communication n’a pas été conçue comme partie intégrante du CSA, car la résolution du problème du respect des limites de vitesse est conçue d’un point de vue
mécanique et technique faisant, en cela, abstraction des réactions des populations concernées. Elle découle donc de cette conception technocentrée dont nous
avons fait état, qui consiste à penser que le seul déploiement d’appareils suffit à
répondre au problème du contrôle des vitesses51. En fait, dans le cas français, la
politique de communication s’est articulée autour du soutien implicite des médias
locaux et nationaux qui ont relayé les efforts entrepris par les autorités.
L’opacité existe également quant aux critères justifiant l’implantation d’un dispositif automatisé. Les critères officiels avancés sont ceux d’une dangerosité de
l’axe (sans que la notion de dangerosité de l’axe ne soit précisée), l’existence
51 Il
est assez significatif que le dossier de la conférence de presse tenue le 10 décembre 2004 sur les
radars automatiques et son déploiement sur 2004 et 2005 s’appuie uniquement sur des présentations
relatives aux lieux d’implantation, les considérations techniques d’implantation et les modalités
techniques (appareils) de l’organisation du contrôle sanction. Aucune perspective sur la diminution
des vitesses de circulation, la baisse attendue des victimes ou encore sur les gains pour la société ne
sont évoqués [Sécurité Routière, 2004(a)].
Synthèse INRETS n° 57
225
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
d’un problème de vitesses excessives expliquant le caractère accidentogène de
l’axe et l’impossibilité de procéder à des contrôles traditionnels [Sécurité routière 2004 (b), p. 6 ; Canel et Nouvier 2004, p. 56]. Or, nos enquêtes de terrain
infirment en partie ces affirmations. Certains dispositifs ne répondent pas à un
objectif de réduction d’insécurité routière liée à la vitesse mais aux caractéristiques des infrastructures (tunnels par exemple) et ne sont pas toujours disposés
aux endroits les plus accidentogènes (ce qui s’explique, entre autres, par des
contraintes d’installation d’ordre technique et des logiques politiques locales de
réduction de la congestion et des nuisances sonores…). Par ailleurs, l’impossibilité des contrôles traditionnels ne semble pas un bon argument dans la mesure
où, d’une part, certaines forces de police doublent les contrôles automatisés par
des contrôles traditionnels pour éviter que les ajustements comportementaux
des conducteurs ne se limitent aux seuls lieux de contrôle et du fait, d’autre part,
de l’utilisation des jumelles laser qui ont considérablement accru les possibilités géographiques des forces de l’ordre pour effectuer des contrôles. Le choix
contestable de certains lieux de contrôle renforcé par des limites de vitesses pas
toujours adaptées a d’ailleurs conduit les autorités en décembre 2004 à diminuer le montant de l’amende de 90 à 45 euros pour les petits excès de vitesse
(inférieurs à 20 km/h)52, pour lesquels une partie de la population commençait
à manifester une certaine contestation. Même si l’objectif reste l’implantation
de dispositif automatisé où existent des problèmes d’insécurité routière, l’absence de critères relativement précis conduit à des pratiques hétérogènes qui
nuisent in fine à l’acceptabilité du dispositif par les populations. Les pratiques
de tolérance technique consistent à relever les vitesses excessives à partir de
10 % au-dessus de la vitesse limite à la fois pour les dispositifs britannique et
français. Mais compte tenu d’une unité de mesure différente et l’ajout de 2 mph
supplémentaire, la tolérance totale est plus importante en Grande-Bretagne. Le
montant des sanctions pécuniaires est relativement similaire pour les deux pays,
même si le dispositif français prévoit une modulation pour les petits excès de
vitesse et le retrait de points supplémentaires. La progressivité de la sanction
beaucoup plus marquée pour la situation française semble plus rationnelle et
plus adaptée si l’on rapproche des enseignements de la théorie économique des
actes illégaux [Carnis, 2002].
L’introduction des radars automatisés a produit également des modifications
de nature organisationnelle. Les forces de l’ordre : gendarmerie nationale et
police nationale doivent désormais composer avec des dispositifs fixes qui sont
déployés dans leur circonscription et doivent moduler leur activité de contrôle
du fait de leur équipement en appareils mobiles. Alors que la sécurité routière
était considérée antérieurement comme une activité peu valorisante pour les
membres des forces de l’ordre, qu’elle permettait des ajustements d’ordre organisationnel avec les pratiques de tolérance et d’indulgence [Carnis 2001, pp.
52 Les
grands excès de vitesse supérieurs à 50 km/h voient leur sanction accrûe avec un retrait de
points passant de quatre à six points.
226
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
563–572 ; Boulier, et al. 1995], l’introduction des radars automatisés a permis
de modifier en partie ces comportements. Nos enquêtes de terrain ont montré
un enthousiasme certain quant à l’équipement et le déploiement de dispositifs
automatisés mobiles et fixes du contrôle de la vitesse. En effet, cet effort sans
précédent a été perçu comme un signe politique fort quant à la priorité à donner
aux missions de police routière. La mise en place d’appareils modernes et leur
mise à disposition auprès des forces de l’ordre sont relativement bien appréciées
dans la mesure où ces appareils permettent d’accroître de manière substantielle la probabilité de détection des contrevenants. Elle implique également une
réduction des charges administratives de traitement liée aux procédures qui sont
désormais prises en charge par le CNT. L’automatisation du contrôle de la vitesse
permet également de décharger les policiers d’une contrainte relationnelle avec
les citoyens. L’automatisation sert en quelque sorte de bouclier contre les critiques éventuelles d’une politique de contrôle trop contraignante. Par ailleurs, ne
pouvant plus intervenir dans la procédure de traitement, les gendarmes et les
policiers disposent désormais d’un argument technique pour refuser d’octroyer
une indulgence à leurs administrés53, argument technique qui se combine à son
caractère moralement moins acceptable compte tenu de la priorité donnée à la
lutte contre l’insécurité routière.
Une autre distinction avec le cas britannique concerne le type de processus
de régulation de la vitesse qui a émergé avec le déploiement du CSA. Alors que
le processus à l’œuvre chez les Britanniques est de type commutation opérationnelle, le cas français reflète plus un processus d’association opérationnelle. Les
forces de l’ordre font partie intégrante du dispositif opérationnel du CSA (opérateurs des dispositifs mobiles), tout en intégrant également le dispositif dans leur
propre contrainte opérationnelle (utilisation des dispositifs mobiles pour atteindre
leurs propres objectifs de sécurité routière).
Figure 3 : évolution du nombre de PV pour excès
de vitesse mars 2003–juillet 2005
Source : Observatoire des vitesses, second quadrimestre 2005.
53 Ce
qui ne signifie pas que de telles pratiques ont disparu.
Synthèse INRETS n° 57
227
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
L’activité traditionnelle de contrôle54 des vitesses ne diminue pas. Plus de
120 000 infractions mensuelles sont relevées, malgré la montée en puissance
progressive du contrôle automatique. Cette dernière est essentiellement et initialement le fait des dispositifs fixes, même si les appareils mobiles s’imposent
progressivement à partir du début de l’année 2005. En juillet 2005, 30 % des
infractions à la limite de vitesse résultent des contrôles manuels, 42 % des contrôles automatisés avec les dispositifs fixes. Vingt pour cent de l’activité résulte des
dispositifs mobiles. Le début de l’année 2004 témoigne d’un point de retournement, puisque désormais les infractions relevant du dispositif automatisé sont en
nombre plus important que celui des infractions relevées de manière traditionnelle
sans pour autant affecter sa valeur en niveau. En somme, le dispositif automatisé se superpose au dispositif de contrôle traditionnel lui préexistant, mais il ne
s’y substitue pas. Plus précisément, la régulation des comportements de vitesse
semble s’appuyer sur trois dispositifs distincts : le contrôle traditionnel qui reste
relativement constant, le contrôle automatisé fixe dont la montée en puissance
s’effectue sur la période (janvier 2003–juin 2004) et le contrôle automatisé mobile
avec une mise en œuvre notable à partir du début de l’année 2005. Se mettrait
ainsi en place une division particulière du travail de régulation et de contrôle des
vitesses de circulation.
Conclusion
L’étude des dispositifs français et britannique met clairement en évidence à la
fois des dimensions communes et des caractéristiques de dispositifs fonctionnant
de manière radicalement différente.
Plus précisément, l’installation de dispositifs automatisés de contrôle conduit,
dans chacun des cas, à des réductions significatives de la vitesse de circulation
et de l’accidentologie. En cela, elles confirment les effets prédits a priori par l’élaboration théorique. Le dispositif automatisé accroît les possibilités de contrôle et
la probabilité d’être effectivement sanctionné pour la réalisation d’une infraction.
L’application de la réglementation devenant effective, nombre de conducteurs
ajustent leur vitesse de circulation, ce qui conduit ensuite à réduire le risque routier. Des accidents de la route sont évités et des vies sauvegardées.
Cependant, la mise en œuvre institutionnelle diffère dans chaque pays. La
dimension locale du système de contrôle constitue une dimension essentielle du
dispositif britannique, même si l’expertise reste le fait d’une organisation nationale. L’importance accordée à la transparence informationnelle, à la communication, mais également la nécessité de contrôler des dispositifs qui s’autofinancent
sont d’autres traits distincts. Par ailleurs, le processus de commutation opérationnelle souligne que l’introduction du contrôle automatisé a modifié profondément
la division du travail initiale de régulation des vitesses et peut conduire à redéfinir
les interventions antérieurement dévolues à certaines organisations.
54 Plus
228
précisément, il s’agit ici des infractions relevées et non des heures de contrôle.
Synthèse INRETS n° 57
Le contrôle automatisé de la vitesse en France et en Grande-Bretagne
La situation française met en évidence un choix technologique spécifique et
contraignant, qui s’explique en partie par une tradition centralisatrice qui s’en
trouve renforcée par l’agencement organisationnel du dispositif lui-même. Les
modalités de fonctionnement s’avèrent relativement opaques tant sur les critères d’implantation que sur la dimension financière et les résultats obtenus par le
dispositif. La communication pour justifier et expliquer le dispositif reste relativement rudimentaire et semble résulter de la dimension technocentrée du dispositif.
Ce défaut de communication et de transparence peut trouver une explication,
qui reste somme toute limitée et partielle, dans le caractère relativement récent
du déploiement du dispositif. Il reste qu’à terme la transparence s’imposera du
fait des exigences liées à l’acceptabilité du dispositif par les populations et la
nécessité d’adapter le dispositif (traitement de la récidive, limites de la détection
de certains usagers…). L’adaptation du dispositif britannique, qui s’explique en
partie par une volonté de répondre aux critiques dont il était l’objet, constitue une
source appréciable d’enseignements pour les autorités françaises et suggère que
tout fonctionnement autarcique soit voué à terme à l’échec en fragilisant à la fois
la pérennité et le développement d’un tel système. En cela, les contraintes budgétaire et politique existent également pour les deux dispositifs, même s’ils peuvent s’exprimer différemment, et si les autorités réagissent de manière distincte.
Il reste que ces deux systèmes mettent en évidence des processus différents
qui empêchent de conclure à l’émergence d’un régime de régulation unique. Le
processus d’association opérationnelle à l’œuvre dans le cas français montre qu’il
est possible de combiner différentes modalités de contrôle, ce que ne semble pas
suggérer le cas britannique.
Ainsi, il en serait de même pour la régulation des vitesses que pour la conduite,
les lois de la mécanique, comme les mécanismes de la dissuasion, s’appliquent
de manière identique aux conducteurs britanniques et français. Cela n’en signifie pas pour autant qu’ils conduisent du même côté de la route et de la même
manière. Sans aller jusqu’à parler de spécificité culturelle, les mécanismes de
régulation de la vitesse sont fortement emprunts de traditions différentes.
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de presse du 10 décembre 2004, 2004(a).
Sécurité Routière. Radars : la révolution du contrôle sanction automatisé, Revue du
Comité de la Sécurité Routière, décembre, numéro spécial, 2004(b).
Synthèse INRETS n° 57
231
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
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T. Vaa “Increased Police Enforcement : Effects on Speed”, Accident Analysis and
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232
Synthèse INRETS n° 57
Chapitre 10
NGOs and the Speed Issue:
RoadPeace case study
Amy Aeron Thomas, Agnès Saudrais-Hough
and Brigitte Chaudhry
Abstract
This paper gives an insight into how RoadPeace, the UK’s national charity for
road traffic victims, has tackled the speed issue in the last decade. First, it will
highlight the charity’s aims and development, and the importance of bringing the
victim perspective to the road safety debate. Then, it will describe the key speed
related work RoadPeace has undertaken on its own. This is followed by a summary of the speed related coalitions RoadPeace has helped found and their key
efforts. As will be shown, how the burden of speed is downplayed is symptomatic
of the overall approach towards road traffic victims.
1. Introduction
The problem of speeding in the UK remains today as acute as ever. The
annual toll is estimated to be over 900 people killed and 33,000 injured in speed
related crashes reported by the police. Tackling the speed problem provides a
major opportunity to contribute to the reduction of the single biggest cause of fatal
road crashes. Besides the social and economic benefits of reducing the scale
and costs of road trauma, there are increased safety benefits for all kinds of road
users, as well as significant environmental gains. For RoadPeace and its partners, reducing the negative impact of speed is not just a safety issue, but also a
matter of social justice, equity, transport sustainability and human rights. In order
to understand the involvement of RoadPeace in the speed issue, it is important
first of all to bear in mind the historical background and the specific reasons which
led to the creation of this organisation.
Synthèse INRETS n° 57
233
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2. Roadpeace Background
2.1. Need for RoadPeace
RoadPeace was set up in February 1992 by Brigitte Chaudhry following the
killing, in October 1990, of her 26-year-old only son, Mansoor, by a red light
offender. In an article entitled ‘Hidden Victims’, she described why the organisation was set up. She describes the deep shock at the offensive way the death of
her son — the victim of a reckless driver — was treated, the lack of consideration
shown to her as the bereaved mother, the absence of any information — about
the circumstances of death, the procedures that would follow, the time this would
take, her and her family’s rights or the support available to them. She was not
informed that a post mortem would be carried out or that she could be represented. It took nine long months before a hearing took place — for a minor traffic
offence, which completely disregarded her son’s death — for which the driver
was fined £250 and given 8 penalty points. Contrary to law, the inquest was
scheduled after the hearing instead of before, but only the witnesses attended,
not the driver, and Brigitte Chaudhry for the first time learnt what they had seen.
When the inquest eventually took place, the verdict was “accidental death”, even
though the driver had already pleaded guilty to an offence. She subsequently
challenged the court’s decision, via judicial review, in the High Court and at the
European Court of Human Rights in Strasbourg, unsuccessfully. Her case is
included in the All England Law Book.
At first, she believed that something had gone terribly wrong in her case, that
maybe the driver was well connected, that there was prejudice against her family, but too many things had happened for these theories to be plausible, and
statements made confirmed this: the police said about the driver “he only went at
35 mph through red lights” and “everyone goes through red, therefore it is only
careless”, and the magistrate said: “under the present law, the consequences are
not considered”.
She began to look for others bereaved through a road death and found that
many of those deaths were treated in the same offensive, shabby way, which
presented no deterrent to irresponsible drivers, who seemed to be given the message that to kill on the road was not only not reprehensible, but not even serious.
Even acts of gross negligence and recklessness that have led to a death were
termed “accidents”. Those other bereaved had too been left to fend for themselves, without support, or to struggle to find individual justice. Some of them were
keen to join the committee of an organisation aiming to support road crash victims
that Brigitte Chaudhry sought to establish–RoadPeace.
2.2. Establishment of RoadPeace
Through letters received and contact with bereaved and injured victims, many
sources of suffering were identified — they are quoted in Hidden Victims — and a
questionnaire confirmed the areas of need. The aims and objectives of RoadPeace
234
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
were chosen, and the constitution drafted, according to these findings. The objectives of the charity as defined by its constitution were and continue to be:
–– to relieve poverty, sickness and distress suffered as a result of a road crash,
by providing support and assistance to road victims and their families;
–– to promote and encourage all efforts aimed at reducing danger on the roads
by educating and informing the public;
–– to conduct research into the aforementioned.
The RoadPeace helpline was opened on 8 February 1992 and this marked
the start of RoadPeace. On 7 April 1993, the World Health Day dedicated to the
‘prevention of accidents and injuries’, RoadPeace held its public launch with a well
attended conference, to focus attention on the many thousands of preventable
deaths and hundreds of thousands of injuries on Britain’s roads. It had by then
already received charitable status.
RoadPeace became the first organisation to represent road victims of all types of
offences and to demand that every preventable cause of road danger is addressed
— be it speed, red light running, drink or drug driving, or any other type of negligence or factor. However, RoadPeace was not just focusing on the immediate
causes of the crash, equally important were the reasons why the system operates in
such a way that road deaths and injuries are not taken seriously at so many societal
and institutional levels. This led the charity to take on a particular radical agenda at
that time, endorsing the Road Danger Reduction approach, and adopting a strong
stance to defend the interests of the bereaved and injured to end their marginalisation. As noted in Corbett’s Car Crime, ‘unsurprisingly, they may feel themselves
treated as the unwanted by-product of car culture and dismissed as part of the price
paid for the mobility and convenience of the masses (Corbett, 2004).
2.2.1. RoadPeace committees
RoadPeace brought together committee members who possessed a mixture
of skills - as teaching, legal and transport professionals, who additionally, with one
or two exceptions, had direct experience of road bereavement and/or injury, and
they led RoadPeace’s Support and Advocacy services.
RoadPeace’s Chair from the mid to the end nineties was John Stewart, a
respected transport professional and campaigner, who was instrumental in
RoadPeace forging close links with transport campaigning organisations and
working with them in various coalitions — the Transport Activists Roundtable,
Pedestrian Policy Group, Slower Speeds Initiative and Safer Streets Coalition,
the latter a collaboration of 29 social justice organisations. RoadPeace had a
unique role to play within these coalitions — informing them of the appalling legal
response to road death and injury and treatment of victims, and making it clear to
them that road safety and a serious post crash response are interdependent.
John Stewart put RoadPeace also in contact with other transport experts –
academics, such as Dr Mayer Hillman, Stephen Plowden, Prof. John Adams and
Prof. John Whitelegg, who were also perceived as ‘road safety radicals’ and they
Synthèse INRETS n° 57
235
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
have played a role as speakers, patrons or members of RoadPeace’s Advisory
Committee of professionals, which included also medical and legal experts — all
of them people with a strong commitment to the aims of RoadPeace and the road
danger reduction approach.
Being able to call on the expertise of their Advisory Committee members was of
great relevance to the success of the charity. Meetings of the Chair and National
Secretary with Ministers — whether at the Department of Health or Transport,
the Home Office, Attorney General’s or Chancellor’s Departments — were usually accompanied by relevant professionals. On one occasions, three lawyers
— one criminal barrister and two personal injury lawyers — accompanied Zoe Stow
(RoadPeace Chair) and Brigitte Chaudhry to a meeting with three ministers from
the three Government law offices. While for a meeting at the Department of Health,
RoadPeace could invite a chartered psychologist (Dr Noreen Tehrani) and a public
health professor (Dr Ian Roberts, lecturer at the London School of Hygiene and
Tropical Medicine, a WHO Injury Prevention Collaborating Centre), to help them
present their arguments. A video about the work of RoadPeace contains interviews
with many of those experts, who from their own profession’s perspective appreciate
the value of the contribution of victims and the dedicated work of RoadPeace.
2.2.2. Road danger reduction
An early committee member was Dr Robert Davis, author of ‘Deaths on the
Streets’ (1992), who influenced RoadPeace’s Road Danger Reduction agenda.
This was an easy philosophy for road victims to adopt, as they quite naturally tend
to look at prevention from the post crash stage — i.e. what has caused the crash
and how could this have been prevented.
The Road Safety that RoadPeace started to pursue was therefore based on
road danger reduction principles — shifting the emphasis away from a victim blaming road safety culture, and instead identifying and addressing the sources of danger. It also linked to wider sustainable transport objectives and other issues such
as: walking, cycling, quality of life, children’s mobility, social exclusion and social
justice. The approach has been partly adopted by the more progressive members
of the road safety profession, but is basically different in a number of respects:
•• The level of safety on the road cannot be adequately indicated by adding up
the total of “road traffic accidents”. Lower casualties may be the result of:
––superior emergency medical treatment;
––absence of the most vulnerable road users such as elderly pedestrians or
child cyclists.
Neither of these would indicate that the road environment has become safer,
and it may arise because it has become more hazardous and is accurately perceived as such by potential pedestrians:
•• RTA casualties are anyway comprised of the results of quite different occurrences: adding them up together makes the basic statistical mistake of
failing to compare like with like. For example, a country like Denmark or
236
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
the Netherlands may have higher overall casualties per head of the population because a lot of journeys are made by the vulnerable mode of cycling
in those countries. However, the chances of being killed or hurt as a cyclist
in these countries is substantially lower than in Britain, and they also benefit
from the life years gained from cycling.
•• Road users adapt to changed perceptions of risk. Not only vulnerable
road users moving out of the road environment because of increased perception of danger, but better protected car occupancy, leading to less careful driver behaviour are examples of this.
•• Road safety is a moral and political issue, not a neutral one. There is
a fundamental obligation on the part of those capable of endangering others (generally the motorised) to be accountable for endangering other road
users. This may be through:
––motor and highway design. Designing “smart” vehicles to not endanger
those outside them;
––or at least have black box technology so that post-crash investigation
accurately establishes causation;
––law enforcement and sentencing policy operating to deter road users from
endangering others;
––transport policy which encourages (instead of discourage) car, motorcycle
and road freight use.
While road danger reduction can be promoted by some road safety professionals, broadly speaking the “traditional road safety” approach has failed because
generally:
–– it has treated the potential to endanger others in a much more relaxed manner than safety procedures in industrial safety, maritime safety, aviation and
industrial safety;
–– it has done so primarily by adopting an advisory or voluntary code — for
example, reminders to not drink and drive, rather than random or targeted
breath tests and citizen informing programmes;
–– has protected the most dangerous from their danger — by vehicle and highway design — so that danger to the non-car occupant is increased or colluded with;
–– it tends to blame the most vulnerable and put additional obligations on them.
2.3. Support services
2.3.1. Basic needs
Basic needs of trauma victims include:
–– full and accurate information;
–– upholding of their human rights;
–– acknowledgement of their loss and suffering by society, government and the
judicial system.
Synthèse INRETS n° 57
237
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
According to Prof McEwen, a Scottish psychiatrist, no counselling, however
well, can ever make up for the lack of these. Indeed, denial of their basic needs,
so frequently experienced by road traffic victims, makes many unable to benefit
from help and actually causes psychological harm.
RoadPeace believes that the needs of road traffic victims, like those of other
trauma victims, must be seen and treated as a priority. The onus must be on the
authorities to provide the information, which is particularly vital where time-limited
rights are concerned.
RoadPeace offers a tailor-made service to the bereaved and injured, which
has developed, over the past 14 years, in direct response to victims’ experiences
and the needs expressed by them, and which is based on empathy, understanding and the accumulated knowledge of thousands of cases.
2.3.2. Helpline
Set up in 1992, RoadPeace’s first ever helpline for road crash victims — 0845
4500 355 — is a lifeline offering vital information, advice and support on 7 days
a week, 12 hours each day. This is supported by free literature, written from the
victims’ perspective, on procedures that follow. In 1995, notably, RoadPeace produced and funded the first Guide ever produced on the ‘Aftermath of a Road
Death’, an invaluable tool for bereaved families who have to cope with a maze of
legal procedures.
Long-term support and friendship are offered through mailings, local groups,
annual events and many joint acts and ways of remembrance:
–– internet memorial on www.roadpeace.org;
–– remember Me roadside memorials and books;
–– World Day of Remembrance for Road Traffic Victims, initiated by RoadPeace
in 1993 and promoted by them for years — nationally and internationally,
resulting in a United Nations resolution to: “recognize the third Sunday
in November of every year as the World Day of Remembrance for Road
Traffic Victims as an appropriate acknowledgement for victims of road traffic
crashes and their families”, adopted on 26 October 2005, an important milestone for road victims, achieved thanks to RoadPeace and FEVR. This day
has been observed with either religious or secular events such as annual
concerts and has been introduced to schools and community groups;
–– planting a tree in the RoadPeace Wood in Staffordshire;
–– setting up local memorials, like the RoadPeace Garden in Manchester;
–– August National Road Victim Month observance;
–– National Road Victim Memorial project for a memorial in London.
2.4. Research
In order to highlight the systematic problems encountered in the investigation
and prosecution of crashes and the civil damages and support services available
to road traffic victims, RoadPeace has undertaken victim surveys.
238
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
The 1994 report ‘Support for Families of Road Death’, was based on the 150
case studies compiled by RoadPeace (Independent Working Party, 1994) and
made 80 recommendations for better practices by all agencies. It was a very
comprehensive and progressive report, assisted throughout by the victim input at
the design stage. The implementation of these recommendations would greatly
improve the situation of road victims, but sadly most have yet to be implemented
almost twelve years later. Here is a quote from the questionnaires, which contributed to the report:
“For a family to be allowed to leave a hospital after seeing the body of their
loved one in the mortuary and not being given any advice, words of consolation, a
cup of tea to steady their nerves, was, and still is beyond belief.”
An important pioneering study ‘Impact of Road Death and Injury: proposals for improvement’ was undertaken between 1995 and 1997 by the European
Federation of Road Traffic Victims, of which RoadPeace became a member in
1993; Brigitte Chaudhry is the current president of FEVR. RoadPeace provided
the second largest number of responses to this research, which was designed to
uncover the principal causes of the decline in quality of life and living standards
suffered by road victims and victim families, the first ever such research to take
place.
The findings pointed to immense, long-term, often permanent suffering by
the bereaved and the injured and their families. Many experience suicidal feelings 37% (26%), depression, eating disorders, anxiety attacks, and almost 100%
declared that they could not enjoy life as before. The British respondents declared
the greatest dissatisfaction with their criminal justice system — 97% declared that
justice was not done in their case. Injustice suffered has an additional detrimental
effect on people’s well being.
RoadPeace has also conducted a review of under-reporting in the UK and a
systematic review of the effectiveness of red light cameras (Aeron-Thomas and
Hess, 2004).
2.5. Awareness raising and advocacy
2.5.1. Justice Campaign
In July 1998, RoadPeace launched a 5-year education and awareness raising
Campaign for Justice for Road Traffic Victims, which highlights six areas of need:
–– victims’ right to information and consultation;
–– criminal proceedings to bring justice;
–– national standards for road crash investigations;
–– reform of civil proceedings to bring justice;
–– national standards for medical – physical and psychological care;
–– a strategic approach by all relevant government departments to address this
major public health and human rights issue in partnership.
Synthèse INRETS n° 57
239
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Part of the Justice Campaign was the setting up of a Lawyers’ Group as well as
an All Party Parliamentary Group for Justice for Road Traffic Victims, which meets
regularly and has the support of some 150 parliamentarians. Its statement of purpose is: “To raise Parliament’s awareness of road death and injury as a major
public health and human rights issue, with the aim of reducing the scale and eliminating the major injustices suffered by bereaved and injured road traffic victims”. In
1999, recognition of the work was given by a Home Office minister, Paul Boateng,
who stated in a parliamentary debate that: “RoadPeace has put the issue of road
death and injury firmly on to the political agenda”. RoadPeace’s effective lobbying
in ensuring the inclusion of road victims in the Victims’ Charter, was also recognised in a recent academic book (Rock, 2004). However, the Victims’ Charter was
then replaced by a Victim’s Code, still excluding most of them again and forcing
RoadPeace to continue to lobby on this.
Many RoadPeace members have been encouraged to have contact with
their MPs and to invite them to attend the regular Parliamentary meetings with
them. The last meeting of the Parliamentary Group debated the proposals of
the Road Safety Bill, with the Home Office Minister for Justice as one of the key
speakers.
Although some progress has been made in some of the six areas, much still
remains to be done and RoadPeace has decided to embark on Phase 2 of the
Justice Campaign, for another five years — until 2008. RoadPeace’s view is that
road traffic victims are an inalienable part of any transport and casualty related
issues and strategies and that they should be consulted and involved.
RoadPeace responds to all relevant consultations, reviews and enquiries
by government and other bodies and departments, providing the unique road victim perspective, and has over the years contributed to a large number of such
enquiries. After submitting their response to the Transport Select Committee on
Traffic Law and its Enforcement, RoadPeace was invited to give oral evidence
before the committee. Throughout the years, a critical element of its campaigning
has been the law, and the way it applies to road death and injury. This included
the delivery of 40,000 signatures of a petition to end the present dismissive law,
together with the publication of a report ‘Towards Justice’ RoadPeace (2001a, b,
c). Proposals for legislation change are now included in the current Road Safety
Bill; RoadPeace can claim credit for this to be happening.
RoadPeace publishes regular press releases on topical issues, own activities, particular campaigns, etc. and through its membership has a wide network
of media advocates. The extent of the successful media relationships of their
members became clear when the RoadPeace Remember Me roadside memorial
plaque was launched and over 400 articles appeared in one month on this topic.
Members regularly write to their local papers, as well as national ones, presenting RoadPeace’s views.
The following letter on speeding, written by a bereaved mother, was published
in a Cornwall local paper, 18th November 2005:
240
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
“The killing game. I felt I ought to reply to the article of 21 October, which
stated that speed cameras weren’t playing the game. What game would you like
to call it? The killing game! Justin, our son, our only child was killed by a dangerous driver where there were no speed cameras, on 13 January 2003. The killer
was racing home from a rugby club bar with his old school mate, and off duty special constable. They were driving straight to avoid the S bends, which is common
practice there, so taxi drivers say. His critical speed on the bend was in excess
of 86 mph on the wrong side of the road; he killed two people and another has
life changing injuries. Justin was crushed to death in the glove compartment. I
am one of many members of RoadPeace, some of whom have been fighting for
justice. Speed kills. Speed cameras are a deterrent, if only to some driver’s pocket
money. Mrs D A Sumpter”
2.5.2. Publications
RoadPeace publishes SafetyFirst three times a year — an eight-page publication outlining the latest developments in road safety, which is distributed to a wide
range of national and local politicians and decision makers, as well as individuals
and organisations with an interest in those issues.
RoadPeace publishes occasional papers and briefings, such as the Missing
Chapter, under-reporting briefing, Briefing on strict liability and many others.
2.5.3. RoadPeace Lectures
The annual RoadPeace lecture is also a platform for awareness raising and
lobbying and Professor Whitelegg held the last two lectures — topic: ‘Weapons of
mass destruction and 1.26 million deaths on the World’s roads ignored’, and Prof
Ian Roberts — topic: ‘Road Crime — a neglected social justice and public health
challenge’.
3. Roadpeace and speeding
3.1. Current environment
Before reviewing RoadPeace’s efforts against speeding the current environment is first summarised, including the priority given to tackling speeding by the
government.
3.1.1. Role of speeding
Speeding is the single largest contributory factor in fatal road crashes. The UK
government estimates that speed is involved in between 28–30% of fatal road
crashes (Mosedale and Purdy, 2004). This is a conservative estimate as it does
not include other factors, such as ‘following too closely’, that are influenced by
vehicle speed (Taylor, 2001). Furthermore, contributory factors are estimated at
the time the crash is reported and thus based on preliminary statements only.
Speeding will have had to be very obvious to be reported as a factor. RoadPeace
has campaigned for contributory factors to be identified at the close of the investigation, after travelling and impact speeds have been properly calculated.
Synthèse INRETS n° 57
241
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
For the past twenty-five years, the prevailing understanding has been that if
hit at 30 mph (48 kph), 45% of pedestrians will die. This was based on the 1979
Ashton and MacKay research and used by the government in their campaigns
and in Tomorrow’s Roads — Safer for everyone, the government’s road safety
strategy and casualty reduction targets for 2010 (DETR, 2000). Then in 2004, the
DfT revised its interpretation of this research and reported that pedestrians have
an 80% chance of survival when hit at 30 mph (DfT, 2004). This is much higher
than is believed elsewhere; the Swedish National Road Administration currently
estimate that 80% of pedestrians hit at 50 kph (31 mph) will die (Johansson,
2005). Given the human survival sensitivity to speed, they have adopted a policy
of restricting speed limits to 30 kph (19 mph), or less, on roads used by pedestrians and cyclists.
3.1.2. Speed enforcement and penalties
In 2003, 2.2 million drivers were detected speeding (Home Office, 2005).
Speed enforcement is done primarily through the use of speed cameras with
approximately 80% of all speeding offences detected by cameras. Although with
6,000 safety camera sites (of which only 1,000 are active at any one time), the
UK has more speed camera sites than any other country, this still only results in
0.25% of the road network (total length) with active camera speed enforcement.
The maximum fine for speeding is £1000 but this only applies if the offence has
been detected by a police officer. Camera detected offences are restricted to a
£60 fine and a maximum of three penalty points.
The Road Safety Bill, currently being discussed in Parliament, proposes
increasing the range of speeding penalties, including a reduction in the fine and
penalty points for those speeding up to 9 mph over the limit on roads with a
30 mph limit or higher.
3.1.3. RoadPeace anti-speeding and pro-camera campaigns
Tough on Speed, Tough on the Causes of Speed (1996)
RoadPeace was one of the first organisations to campaign against speeding
in recent times. ‘Tough on Speed, Tough on the Causes of Speed’, published
in 1996, highlighted the human and financial costs of speeding. It argued for a
20 mph speed limit as the norm in built-up areas and automatic speed limiters in
new vehicles. Speed cameras were to be more widely used with tougher policing
and more realistic penalties as ’Speeding motorists know that, if caught and convicted, they will get away with a small fine and a few penalty points, even when
they have killed or injured. Legislation needs to be introduced that enables the
courts to impose penalties that will act as real deterrents and bring about a shift
in the current cultural acceptance of speeding which stems in part from the casual
attitudes of those in authority to the problem’.
242
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
3.1.4. Speed and speed cameras (2001)
A briefing sheet on speed and safety cameras, produced in 2001, stated
RoadPeace’s opposition to the reactive “body count” approach to road safety
where casualties have to occur before action is taken, and criticised the inconsistent and restrictive approach to speed cameras. It also recommended that the
camera revenue be shared with the emergency services and for evidence based
decision making, as the ‘only benefit of the government’s cautious approach to
speed management is that it provides the chance to conduct randomised controlled trials in order to properly assess the effectiveness of safety cameras’.
Safety Camera Briefing Pack (2005)
In 2004, RoadPeace received funding to promote safety cameras by a medical
company that was dismayed at the attacks on cameras in the media. RoadPeace
developed a Safety Camera Briefing Pack for the benefit of the Safer Streets
Coalition and others who wanted to campaign in support of safety cameras. The
Pack’s main enclosure was a briefing on ‘How cameras can help reduce speeding
— the leading cause & contributory factor in fatal crashes and the most common
type of anti-social behaviour. It also contained a summary of a systematic review
of red light cameras, and the Safer Street Coalition Manifesto, which included
SSC endorsements for safety cameras. The RoadPeace endorsement stated:
As the national charity working on behalf of bereaved and injured road traffic
victims, RoadPeace knows only too well the high cost of road crashes and the
need for increased traffic law enforcement. Cameras offer the benefit of round
the clock enforcement without the risk of high-speed pursuits. They also have the
advantage of being self-financing, with the offender, instead of the law abiding
public paying for their operational costs.
We are against the government’s ‘body count’ approach that requires repeated
deaths and injuries to occur before a camera can be justified — four fatal or serious injury crashes in the case of a fixed speed camera. We do not think communities should have to wait for people to die or be hospitalised before the law
is enforced. Speeding is a crime and responsible for more deaths than guns and
knives combined.
That drivers choose to speed is a challenge the government should face with
the same strength and conviction it has found to tackle other social evils such as
racism and domestic violence. Being prevalent does not make it right. It is the
duty of the government to protect the public from speeding drivers and cameras
should be installed where there is community concern about the potential risk of
crashes.
The briefing reviewed the restrictions imposed on safety cameras (both red
light and speed cameras), as many of the safety camera partnerships do not mention the required casualty quota before a camera can be considered. The speed
camera briefing also ridiculed the notion that drivers are ‘victimised’ by speed
enforcement (see below).
Synthèse INRETS n° 57
243
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Box 1: Speeding drivers are encouraged in five ways
1. Enforcement is rare
With speed cameras restricted to the worst locations--traffic law enforcement is
undertaken on only a minute fraction (<1%) of the network.
2. Drivers are forewarned
Warning signs are required to be posted in advance of camera sites and cameras must
be highly conspicuous. Thus the message is ‘only here is the speed limit enforced’.
3. High speed tolerance
The cameras are set at an enforcement threshold much higher than the legal limit.
Moreover, in reality, many safety camera partnerships enforce speed at much higher
thresholds than recommended by ACPO (Association of Chief Police Officers) in order to
control the administrative burden of processing fines.
4. Minimum penalties
Camera detected speeding incurs a fixed penalty charge of £60 and three points, the
minimum possible under the law. The fine is less than that for being drunk in public or
littering. Bus lane and parking violations, in London, incur a higher fine, which is halved
if paid within 14 days, yet this approach is not used with speeding fines. Penalties do
not increase with repetition despite the evidence that behaviour is not changing and
research showing that those who are caught speeding are ‘crash magnets’, with twice
the risk of being involved in a crash.
5. Repeat violations allowed
Drivers can be caught speeding up to four times before they are banned. Disqualification
is not mandatory and magistrates often allow drivers to continue driving if they claim their
livelihood depends on driving.
Excerpt from How cameras can help reduce speeding—the leading contributory factor
in fatal crashes and the most common type of anti-social behaviour, Safety Camera
Briefing Pack, RoadPeace and Slower Speeds Initiative, 2005
Table 1: speeding and cause of deaths
For every death
From…
Bullying
CJD
Gun crime
Heroin
Domestic violence
Knife attacks
Passive smoking
MRSA superbug
Speeding kills these
times as many…
60
15
12
10
6
4
1
1
The importance of speeding as a public health and policing priority was also
highlighted, using the government’s conservative estimate of over 900 speeding
related deaths. The briefing also reminded readers that a recent Home Office British
Crime Survey reported speeding as the leading form of anti-social behaviour.
The briefing also included a summary table of 12 safety camera evaluation
studies and compared their size (these ranged from an international systematic
review to four sites), their findings on speed/speeding, crashes and casualties.
Particular attention was given to the extent to which the studies used control
groups and considered the regression to mean effect.
244
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
Key speed camera summary points included:
–– speeding is involved in almost twice as many deaths as drink driving, and in
12 times as many deaths as gun crime;
–– less than 1% of the road network has its speed limit enforced, and 80% of
enforcement is through cameras;
–– fixed speed cameras are only allowed at sites where there have been four
separate fatal or serious injury crashes, and where speeding is a problem
and no other practical engineering or educational measure is appropriate;
–– the total camera revenue in 2003 (£120 million) was equal to 10% of the DfT
road safety budget, which is less than 1% of the national cost of road crashes;
–– only £20 million, some 17% (the equivalent of VAT) of the 2003 camera
revenue went to the Treasury;
–– nine UK studies have evaluated speed cameras and found them to be effective, with a reduction in casualty crashes from 11%-43%;
–– research indicates greater casualty reduction benefits are possible with covert cameras and more cameras.
Key changes requested included:
–– the casualty requirements for safety cameras (both speed and red light cameras) to be ended. Safety cameras should be used to increase compliance
with road traffic laws and to prevent death and injury;
–– inconspicuous, i.e. covert, cameras to be trialled;
–– existing cameras to be used more effectively and additional speed cameras
to be installed according to local operational criteria established in consultation with communities;
–– consistent and proper evaluation of all road safety interventions, including
those aimed at reducing excessive and inappropriate speed. A lower standard should not be tolerated for more popular measures that may well be less
effective at saving lives and preventing disability;
–– fine revenue to be invested in national publicity campaigns explaining rationale for safety cameras and also in road traffic victim support and rehabilitation
services. This would remind drivers that speeding is not a victimless crime;
–– involvement of speed to be estimated by speed calculations recorded at the
end of the investigation, not at the initial reporting stage, as is currently done
when only a ‘best guess’ is possible.
Against aggressive driving campaign (2005)
In 2005, the DfT awarded a Road Safety Challenge Fund grant to RoadPeace
to campaign against aggressive driving. Speeding, red light running, tailgating and
pedestrian vulnerability were the four key themes to be tackled. The project included
training local RoadPeace groups to become more effective campaigners and developing basic resources. A leaflet was produced which highlighted how many more
people were killed in speed related crashes (over 900) than by knife attacks (237)
or shootings (68). As according to the road danger reduction approach, it showed a
Burden of Speed triangle, which highlighted the negative impacts of speed, in addition to the primary casualties. Speeding is also responsible for worsening casualty
Synthèse INRETS n° 57
245
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
severity (even where it did not cause the crash), deterring cycling and walking,
social isolation, and harming the environment. Posters were also produced and
used at local exhibitions during August, National Road Victim Month.
RoadPeace local groups’ and members’ initiatives
The above activities were conducted at the national level but RoadPeace’s local
groups are also active in campaigning against speeding in their local areas. The
media to speak on behalf of those affected by crashes often contacts RoadPeace
members. Other actions have included the following:
–– a 1995-Vigil by bereaved women called for Real Road Safety against
the message of the motor industry’s Prince Michael of Kent Road Safety
Awards which was focusing on the theme of speeding that year. RoadPeace
denounced the hypocrisy involved;
–– a silent vigil outside the Department of Transport to protest against the statistics cover up as these do not point to a genuine reduction in road danger;
–– in 1997, the Red Flag Campaign was launched to highlight the impact of
speeding with an appeal for a memorial to road victims.
More recently:
–– In 2003, the Remember Me Roadside Memorial Campaign was launched to
pay tribute to road victims and highlight the impact of road danger, notably
speeding;
–– the London Safety Camera Partnership used the RoadPeace Remember
Me plaque in a poster with photos of those killed by a speeding driver at a
speed camera site in North London. ‘See Camera, Think Memorial’ was a
slogan included in the Safety Camera Briefing Pack;
–– RoadPeace Northwest Group, Manchester Branch, has participated in a bus
publicity campaign sponsored by the local government. This included photos of their family members killed in crashes being shown on city buses;
–– Surrey and London members are participating in the Stay Alive Safe Drive
programme which is presented to several thousand sixth form students
(over 500 in each performance). The Against Aggressive Driving leaflet is
handed out at these events;
–– many members, including the RoadPeace Northwest Group Coordinator,
have campaigned for speed reductions at the site of the crash, which killed
their loved ones;
–– RoadPeace member initiated a private prosecution against a Chief Constable
who was detected speeding much over the limit;
–– RoadPeace member applied for a judicial review over the DfT’s speed camera casualty quota requirement, on the ground of a human rights breach
(Article 2, Right to Life) as speed cameras can only be considered after
there has been at least four fatal or serious injury collisions in the past three
years at the site. (High Court of Justice, 2005).
In denying this appeal for a judicial review, the High Court cited the government’s argument that the Safety Camera Partnership Handbook, which contains
the casualty quota requirements, ‘was sent in draft to the Department’s Road
246
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
Safety Advisory Panel comprising representatives of the police, local authorities,
motoring, road safety and other organisations for the purpose of consultation, who
made no comment on the criteria for camera sites (High Court of Justice, 2005).
Neither RoadPeace, SSI, or Transport 2000 are on the Road Safety Advisory Panel,
whereas many of the motoring industry or transport sector funded organisations
are on this panel but did not oppose the casualty requirements at this opportunity.
Government consultations
RoadPeace has responded to many government consultations related to
speeding and the main points from two key consultations are summarised below.
Extracts from RoadPeace responses are shown in italics.
Speed Inquiry
In 2002, the House of Commons Transport Select Committee undertook
an Inquiry on Speed. In their response, RoadPeace included an article from a
national newspaper that quoted a government minister saying, “people don’t think
of themselves as criminals if they are caught speeding. The courts should not be
wasting their time on things like that’. Box 2 includes an extract from the summary
of RoadPeace’s submission.
Box 2: Extract from RoadPeace response to Transport
Select Committee Speed Inquiry, 2002
Key Findings
• Official statistics underestimate the number seriously injured in speed related crashes.
• The role of speed in contributing to crashes is under-estimated, with insufficient attention
given the role of speed in preventing casualty severity.
• The use of speed management interventions, i.e. safety cameras, are restricted to
worst locations only, which is inconsistent with property protection measures (i.e. CCTV)
and highly inappropriate for such an effective and self financing measure.
Key Recommandations
1. The number of speed related casualties should be based on hospital statistics, not
police databases.
2. Contributory factors, including speed, should be determined at the end of an
investigation.
3. Casualty avoidance/amelioration and road danger reduction, rather than crash
causation, ought to be the key performance indicators (and objectives) of any speed
management strategy or intervention, including safety cameras (whose main disadvantage
appears to be their effectiveness).
4. Fines from speeding should be shared with ambulance services, A& E Departments
and other organisations, which cope with the consequences of speeding.
5. A survivable speed limit, i.e. 20 mph default speed limit, should be the urban default.
6. Drivers should be presumed liable for all crashes involving children and elderly
pedestrians and cyclists, if not of all ages.
7. Any speeding related casualty occurring in area where no speed reduction efforts
have been undertaken should be compensated in similar fashion to BSE victims.
8. In its Ten Year Plan, government should commit to catching up on traffic calming.
9. Government should make a commitment to use for the Government fleet vehicles with
speed limiters and black boxes.
10. Improved monitoring of speeding offences, including casualty consequences and
fines, improved training of magistrates and reconsideration of separate traffic court.
11. All local authorities should have speed management strategies based on clear
framework of appropriate speed limits for different categories of roads, framework
provided by Government.
Synthèse INRETS n° 57
247
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Graduated speeding penalties consultation
As mentioned previously, in 2004, the Government consulted over a ‘graduated system of speeding penalties’, with a reduced fine and fewer penalty points
for speeding up to nine mph over the limit. RoadPeace rejected this proposal as
even minor speeding on other roads can mean the difference between death, disability and chance of a full recovery to vulnerable road users. The vast majority of
vulnerable road user deaths and serious injuries occur in built up areas where the
majority of drivers speed, but only a minority speed at great excess.
Box 3: Transport Select Committee response
to reducing speeding penalties
“We reject outright the Government’s suggestion that there should be lower penalties for speeding in
built-up areas or villages. Exceeding a low speed limit is even more serious than exceeding a higher
speed limit, because it increases so significantly the risk of death in an accident: 50% of pedestrians
hit at 30 mph will live; 90% of pedestrians hit at 40 mph will die. We do not understand how a
Government which professes to practice evidence-based policy-making could even contemplate
such a change”.
House of Commons Transport Select Committee, 2004.
As shown in Box 3, others shared RoadPeace’s response to the proposal.
RoadPeace also argued for consistency and an evidence led approach to
speed reduction. ‘Alternatives such as remedial education programmes, i.e. speed
awareness courses, should be considered, but all programmes should be held
to the same standard of independent and lengthy evaluation as that applied to
speed cameras. …It should be noted that at present speed awareness courses are
offered to some drivers and taken up by only those wiling to pay for the training.
This group is not representative of all drivers who speed… RoadPeace hopes that
remedial education can be developed and delivered so that drivers voluntarily and
consistently change their driving behaviour, but findings from previous research do
not show this to be an easy or likely outcome. A Cochrane systematic review of post
license driver education found no conclusive evidence that remedial driver education programmes were successful in reducing collision risk (Ker et al., 2003)’.
RoadPeace also campaigned that ‘the speed tolerance levels/margins should
be reduced to zero as soon as technology permits, since the speed limit should
be seen as the maximum and not plus another 10–15 percent’. In addition to penalties, RoadPeace also urged the government to reconsider the priority given to
speed control as …” we are aware of research findings that the risk of detection
is more important than the level of fine and urge the government to reconsider its
approach to speed management, which seems to reinforce the erroneous belief
that speeding is only risky in a minority of locations, i.e. where it has already contributed to crashes”.
What a sad statement it is on our society that cameras for bus lanes can be
introduced without any prerequisite loss of life, but safety cameras are restricted
to only those sites of repeated death and injury. Is the flow of traffic really more
important than the sanctity of life?
248
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
4. Roadpeace partnership work
RoadPeace has undertaken many events in association with other transport
organisations concerned about speeding. This has included:
–– meeting Prime Minister Blair in December 1999 including 13 children, following an action coordinated by Transport 2000. The feedback later from
an official source was that Blair insisted the target for child casualties was
inserted into the road safety policy and that he personally launched it;
–– a public stunt in February 2000 by the Environmental Transport Association,
Transport 2000, RoadPeace and the London Cycling Campaign by laying
down on the road near Downing Street with 300 white crosses to mark the
number of people killed until the launch of the road safety strategy by the
Government;
–– marking the launch of the Government’s Road Safety Strategy by using a
hearse car covered with white lilies to draw attention to the scale of road
death and injury and to the social impact of speed;
–– endorsing Transport 2000’s legal challenge of the ACPO speed tolerance
limits. (RoadPeace endorsed this course of action and issued a press
release but could not act directly because of its charitable legal status).
In addition, RoadPeace has also co-founded three key coalitions in recent
years. The first, Slower Speeds Initiative, focuses solely on speed, while speed
management was a prime concern for the other two, The Traffic and Children
Coalition and the Safer Streets Coalition.
4.1. The Slower Speeds Initiative (SSI)
4.1.1. SSI background
In late 1981, Mayer Hillman and Stephen Plowden, two technical advisors of
SSI, started work on a study on road safety for the Policy Studies Institute. The
inspiration of the study was that a huge amount was known about what could be
done to make roads safer, but that knowledge was not being used. The study was
intended to explore the institutional and attitudinal reasons for that.
Their method was to select a number of topics and trace how they had been
handled over the years. They decided to take speed as one of these topics. Early in
the study they visited the head of road safety at the Transport Research Laboratory,
who implored them not to take speed. She said that its importance was greatly
exaggerated; changing speed would make a difference in only a tiny proportion
of accidents, and in some cases safety required speed limits to be raised not lowered. (At that time there was quite a lot of pressure being put on local authorities
to change the 30 mph speed limit on some urban roads to 40 mph on the grounds
that for those roads a 30 mph limit was “unrealistic”.) They were not convinced by
her arguments, so they wrote to the relevant authorities in a number of countries
seeking information on changes in speed limits, which had been accompanied
by some kind of statistical before-and-after study. The results, tabulated in the
Synthèse INRETS n° 57
249
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
chapter on speed in their report (Danger on the Road, the Needless Scourge,
1994), were overwhelming. This study did contribute to getting speed onto the
road safety agenda in Britain, where it now has a prominent place.
In 1994, Dr Hillman and Stephen Plowden tried to launch a study on the relationships between speed and all the various impacts of road transport, not danger
only. They approached the Department for Transport early on, but it was towards
the end of the financial year and they were told that the research budget was
exhausted. By the beginning of the next financial year they had still not obtained
much support, so they approached the Department again. This time they were
told that the subject was not a priority.
A principal aim of this study (Speed Control and Transport Policy, PSI 1996)
was to calculate the optimal speed limit for roads of different classes by trading
off those benefits for which official money values existed (crashes and casualties, fuel consumption, other vehicle operating costs) against travel time. The
study showed clearly that speed limits were too high on roads of all classes,
but because they had not been able to take all relevant considerations into
account, and because of the crudity of our techniques, which meant among
other things that the travel time penalties of lower speeds were exaggerated,
their conclusions on what the precise limits should be were very tentative. They
recommended that the Government should announce that it accepted the conclusion that all the limits were too high and should make more calculations,
which the researchers specified, and should undertake some actual trials of
properly enforced lower limits, in order to calculate them more finely. Neither of
these things has been done.
Speed Control and Transport Policy had a major influence and was used as
a key tool by NGOs. A group called “Slow Down” was established in 1996 to
promote the book. This led to the formation of the Slower Speeds Initiative (SSI)
in March 1998. Founder members included the Children Play Council, CTC (the
national cyclists’ organisation), the Environmental Transport Association (a motoring organisation), Pedestrians’ Association (now Living Streets), the Pedestrians’
Policy Group, Road Danger Reduction Forum, RoadPeace, Sustrans and
Transport, 2000. Two major areas of research are the use of 20 mph limits in build
up areas and evidence speed limits.
4.1.2. SSI key actions
SSI’s first objective was to get the issue of speed included in the Transport
White Paper as it had been left out of the draft Paper. Lobbying by SSI and other
concerned organisations, including over 1,000 letters being sent, succeeded in
securing a commitment in the published White Paper to review speed policy. This
was to be the first time speed policy had been reviewed in 50 years.
In 2000, SSI published ‘Speed Kills’, a 12-page briefing, that described the
magnitude of the problem and argued the case for better enforcement and lower
speed limits, tougher penalties and sentences, a new respect for law and community, including the right to freedom of movement. A year later, SSI produced also a
250
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
‘Good Practice Guide to Speed Management’, which was followed by a series of
conferences across the country in partnership with local authorities. These events
attracted good local media coverage.
In 2002, the SSI challenged the legality of the Government’s safety camera
guidelines. Their press release stated “The SSI argues that the Government has
undermined both community safety and speed limits by issuing these guidelines
(See Press Release, Slower Speed Initiative, 11th May 2002, www.slower-speeds.
org.uk). First because this body count approach is simply immoral and a form of
human sacrifice.” “Secondly, the Initiative also argues that by requiring that drivers should be warned of the presence of cameras the Government has effectively
made other speed limits advisory.” This was settled in court with the Government
backing down from its previous position that all speed cameras must be painted
yellow. It agreed that safety cameras partnerships could use hidden fixed speed
cameras if they received permission from the Secretary of State for Transport to
do so.
In 2003, SSI also collaborated with PACTS (Parliamentary Advisory Council
for Transport Safety) on producing a rebuttal to the camera critics in the briefing
titled ’10 common myths about speed cameras”. SSI also assisted RoadPeace
with the production of its Safety Camera Briefing Pack. SSI and RoadPeace are
currently conducting an ‘End the Body Count’ campaign and are asking for people
to contact their MPs with their concern about the camera guidelines and requests
for greater use of safety cameras.
Children and Traffic Coalition (2001)
In late 2001, RoadPeace co-founded, with the Children’s Play Council, ‘the
Traffic and Children Coalition’ (comprising children and social organisations) and
helped prepare the response to the Road Traffic Speed Inquiry: it was seen as an
opportunity to focus on the impact of inappropriate and illegal speed on children
who suffered not just as the victims of road crashes but also through the loss of
freedom and independent mobility. Indeed the death rate from road traffic injuries
for children in the UK is twice the European average. Most of these injuries occur
in urban areas. Furthermore the deterioration in children’ s quality of lives had
been highlighted in a study of children’ s independent mobility (Hillman et al.,
1991). The Coalition’s response also showed that many families live in fear of
traffic. Crime and Disorder Strategies (Philipps et al., 2000) notably have highlighted strong community concerns about road danger and speeding traffic. There
are indications that speeding is not just perceived as antisocial, but a crime. The
Coalition called for a change of attitudes and to stop blaming the children and
ignoring their rights to safety as shown in past studies (Roberts and Coggan,
1994; Rosembaum, 1993). The dilemma as put by Mayer Hillman as far back
as 1993 was quoted: “In terms of children’s quality of life as it is affected by the
rising volume and speed of traffic, there appear to be two alternative responses
— either we can continue to withdraw children from the growing threat that is
posed and inculcate fear in parents and children about the risks; or we can withdraw that threat from the children by taming the traffic.”
Synthèse INRETS n° 57
251
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
A key recommendation was for well-enforced 20 mph speed limits around all
schools and parks as the first step in making villages; towns and cities safer and
healthier for children. In the conclusion the response stressed that the evidence
and arguments in favour of this measure are so strong that its complete omission
from any government strategy is all the more striking… There is a huge irony in the
fact that due to traffic danger of which speed is an integral element the section of
the population most eager to travel by environmentally sustainable and health promoting modes of travel are restricted from doing so. This is evidenced by the high
demand for cycling and walking among school children surveyed for safe routes to
school surveys… Government has it in its power to achieve health environment and
transport policy goals by reducing the dangers posed to children and young people
through policy change and concomitant resources… Their needs and expectations
and those of the local community should be of paramount importance rather than
those of passing motorists…The coalition also proposed in another response to
‘Building a Strategy for Children and Young People’ which paid little attention to
the effect of a hostile road traffic environment on them, other indicators relating to
children’s independent mobility such as to walk and cycle to and from school on
their own, cycle on main roads, cross roads on their own, etc.
FEVR cited the Traffic and Children Coalition’s recommendations in their
response to the UNICEF consultation on violence against children.
Safer Streets Coalition (2003)
RoadPeace was a founding member of the Safer Streets Coalition (SSC),
which was established from a common concern for the impacts of road danger
on transport choice, health, social inclusion and quality of life. Twenty-six social
justice organisations, representing children, pedestrians, cyclists, engineers, elderly, disabled, environmental and transport charities, public health sector, and
road traffic victims, launched the SSC in February 2003. Key demands included
a review of speed limits (expected to result in reduced speed limits), increased
enforcement of speed limits, greater investment in traffic calming and pedestrian
priority schemes, and government taking a stronger stance against dangerous
driving, particularly speeding,
Graduated speed penalties (2004)
The Safer Streets Coalition was united in its opposition to the government’s
proposal to reduce the penalties for low-level speeding.
Road Safety Bill amendments (2004–2005)
The SSC is concerned that the Road Safety Bill, the first such bill in over
40 years, does not go far enough in reducing road danger. In its press release,
the SSC warned the ‘Road Safety Bill could cost more lives than it saves’ (SSC,
January 10 2005). Key speed related amendments being proposed by the SSC
include:
–– speeding penalties allowed to be increased, but not decreased;
–– 20 mph speed limit to be the default speed limit in built-up areas, with other
lower speed limits for rural lanes and villages;
252
Synthèse INRETS n° 57
NGOs and the Speed Issue: RoadPeace case study
–– banning equipment which detects or jams speed cameras;
–– creating a new duty to reduce road danger (to balance the new traffic management duty);
–– event data recorders (black boxes) to be included in new vehicles.
Summary
RoadPeace’s role
RoadPeace has consistently argued that:
–– the burden of speeding was being underestimated due to the focus on primary casualties, and the problem of under-reporting, as well as premature
contributory factor estimation;
–– speeding has not been treated as the leading cause of premature and violent
death, as well as anti-social behaviour, that it is. Instead, safety cameras are
the only safety measure where central government requires repeated death
and injury before they can be used;
–– safety cameras should be more widely used, with camera revenue invested
in rehabilitation and support services for crash victims, and helping dispel
the notion that speeding is a ‘victimless’ crime;
–– road danger reduction (casualty prevention and quality of life and environment
enhancement) is more appropriate than road safety (casualty reduction);
–– an evidence led approach is needed — A lower standard should not be tolerated for more popular measures that may well be less effective at saving
lives and preventing disability.
NGO’s Impact on Government Speed Policy
–– NGOs succeeded in getting the issue of speed included in the Transport
White Paper;
–– NGOs secured a review of speed policy in 1998–2000;
–– NGOS have contributed to the situation where speed cameras are used
much more widely in the UK than in any other European country;
–– With the minimum investment in campaigns against speeding and promoting the benefits of cameras, NGOs have had to take a lead role in supporting safety cameras;
–– NGOs are optimistic that they have deterred the Government from reducing
speeding penalties in 30 mph zones.
RoadPeace and speeding
As road victims are not treated as ‘victims of crime’ in crashes involving a road
traffic offence by the justice sector, RoadPeace’s main role has been to campaign
against this prejudice and to work to fill the associated support gap. RoadPeace
has led the way in advocating the rights of road crash victims and it has also been
pioneering in its approach to speeding and road danger reduction.
Synthèse INRETS n° 57
253
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Speeding is not the only issue for RoadPeace, but it is symptomatic of the
problems road crash victims face. Just as the burden of speeding is not taken
seriously by society, either in terms of the number of primary victims or secondary casualties, so road crash victims do not receive an appropriate treatment or
response. As speeding is the leading contributory factor in fatal road crashes, it
can be assumed that any improvements in the response to road crash victims will
require a toughening of the approach towards speeding, and vice versa.
Acknowledgements
We are very grateful to those who agreed to be interviewed or who contributed to this chapter in particular: John Stewart, Paige Mitchell, Robert Davis and
Stephen Plowden. Responsibility for the text lies with the authors only.
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Synthèse INRETS n° 57
255
Chapitre 11
L’influence de la Ligue contre
la violence routière et de RoadPeace
dans l’action publique de sécurité
routière en France et en GrandeBretagne : regards croisés en
matière de régulation de la vitesse
Didier Chabanet
Résumé
Symbole de modernité et de performance, la vitesse est aussi un facteur accidentogène dont le rôle est aujourd’hui bien connu, qui frappe en premier lieu
sur la route les populations les plus jeunes. Les familles de victimes et les organisations qui défendent leurs intérêts s’organisent à la fois pour leur venir en
soutien, interpeller l’opinion publique et faire pression sur les pouvoirs publics.
L’action que développent en ce sens RoadPeace et la Ligue contre la violence
routière55 s’inscrit dans un cadre national beaucoup plus ouvert et favorable pour
la seconde que pour la première. Le soutien dont bénéficie la Ligue depuis que
la sécurité routière est considérée comme une priorité nationale en France, lui
permet d’exercer une influence significative, en particulier dans la lutte contre les
vitesses excessives. Par contraste, le rôle de RoadPeace est plus limité et est
davantage orienté vers l’obtention d’une reconnaissance qui lui fait actuellement
largement défaut. Dans les deux cas, l’analyse montre que le rapprochement,
voire les alliances, avec des acteurs tiers (chercheurs, experts, consommateurs,
différentes catégories d’usagers de la route, etc.) est un facteur essentiel, qui
détermine en partie l’efficacité du combat mené.
55 Désignée
dans la suite du texte sous le raccourci de « Ligue ».
Synthèse INRETS n° 57
257
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
1. Introduction
Les sociétés post-industrielles modernes sont caractérisées à la fois par une
croissance importante des moyens de transport et par une intolérance grandissante à l’égard du risque que ces derniers génèrent, notamment sur la route.
L’insécurité produite par l’utilisation de véhicules accessibles à la grande majorité de la population des pays riches est d’autant plus vivement ressentie qu’elle
s’abat, avant tout, sur les jeunes, qui en sont les principales victimes. Autrement
dit, les modes de transport les plus courants, pleinement inscrits dans la modernité, frappent le plus cruellement ceux qui représentent l’avenir des sociétés et
incarnent le renouvellement des générations. Dans ces conditions, « l’accident de
la route » — surtout quand il est mortel — est toujours un traumatisme pour les
proches de la victime, a fortiori quand il s’agit d’un jeune. La brutalité de l’événement — qui en tant que tel constitue déjà un choc — est alors redoublée par la
douleur de la perte de celui/celle qui avait la vie devant lui/elle et devait survivre
à ceux qui sont confrontés à son décès. Cette expérience est nécessairement
vécue comme une rupture terriblement injuste de l’ordre généalogique et biologique : à l’époque contemporaine et compte tenu du niveau de développement
atteint dans les pays riches, il n’est pas dans la « nature des choses » de mourir
avant ses parents …
Malheureusement, un très grand nombre de personnes et de familles font, jour
après jour, l’expérience de cette épreuve insoutenable. Tous les ans, à l’échelle
de l’Union européenne, les accidents de la route causent ainsi la mort de près de
40 000 personnes, ce qui représente la première cause de mortalité des moins
de 45 ans56. Face à ce fléau, des familles se regroupent pour venir en aide aux
victimes et/ou à leur entourage et tenter de lui trouver des réponses collectives.
Ce phénomène est émergent, au sens où l’apparition d’organisations créées sur
l’initiative de familles de victimes, pour en défendre les intérêts, est récente et
ne commence à se développer, en tout cas sous une forme pérenne et stabilisée, qu’à partir des années 1980. Il reste, en outre, relativement limité et ne
concerne dans chaque pays que quelques centaines, voire milliers, de personnes
au maximum, investies, à des degrés divers, dans une action de type militante57.
Compte tenu du nombre total de victimes, « l’engagement » (Ion et Péroni, 1997)
reste donc en ce domaine une exception statistique, qui contraste étonnement
avec l’ampleur des ravages provoqués par l’insécurité routière. Dans l’écrasante
majorité des cas, les proches d’un accidenté de la route ne rejoignent aucune
56 Commission
européenne (Direction générale énergie et transports), « Réduire de moitié
le nombre de victimes de la route dans l’UE d’ici 2010 : une responsabilité partagée », p. 1.
Selon les auteurs de l’enquête Sartre, « environ 1,25 % des gens de l’Union européenne
mouront 40 ans trop tôt et 33 % nécessiteront des soins hospitaliers durant leur vie par
suite d’un accident de la route » (cf. (http ://www.inrets.fr/services/presse/resume_sartre2.
htm).
57 À l’exception des États-Unis, où la très puissante Mothers Against Drunk Driving
revendique le statut de « largest crime victims’ assistance organization in the world with more
than 3 million members and supporters » (http ://www.madd.org/aboutus/0,1056,1686,00.
html).
258
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
des organisations qui pourraient les représenter spécifiquement, les aider dans
l’épreuve qu’ils traversent et ne participent donc ni à l’amélioration des droits des
victimes ni à la lutte contre l’insécurité routière58.
En dépit de leur jeunesse et du faible nombre d’adhérents, les groupes défendant les intérêts des victimes de la route — et par extension ceux de l’ensemble
des usagers — sont partie prenante d’un système d’action publique de sécurité
routière (Spenlehauer, 2005) et, à ce titre, sont impliqués dans la façon dont cet
enjeu est formulé. Dans cette perspective, l’exercice de comparaison entre la
France et la Grande-Bretagne permet de mettre en valeur les facteurs de convergence et de divergence qui caractérisent — comme dans un jeu de miroir — les
deux contextes nationaux. Nous l’appliquons, plus précisément, aux deux organisations les plus importantes qui ont vocation, dans les deux pays, à parler au
nom des victimes de la route, à savoir respectivement la Ligue et RoadPeace.
L’une comme l’autre se sont progressivement imposées comme des leaders
d’opinion et occupent aujourd’hui une position centrale dans la représentation
des victimes de la route. L’action qu’elles déploient est évidemment multiple et
prend sens dans une stratégie globale définie par l’organisation qui, elle-même,
s’inscrit dans une configuration sociétale qui lui offre des espaces d’intervention
plus ou moins grands (Crozier et Friedberg, 1977). Il est essentiel de prendre en
compte ces éléments de contextualisation pour comprendre pourquoi et comment
leurs orientations sont définies et se développent. Les prises de position de la
Ligue et de RoadPeace en matière de régulation de la vitesse s’insèrent donc
dans un cadre général, qui permet d’en saisir les motifs et le sens. Notre approche s’inspire étroitement de la tradition d’analyse de l’action collective. À l’aide
des outils forgés dans cette discipline (Balme et Chabanet, 2002), nous voulons
mettre en évidence les logiques sociopolitiques de l’action entreprise par la Ligue
et RoadPeace. Nous verrons ainsi, dans un premier temps, comment s’effectue le
passage du drame que constitue l’accident de la route à une démarche collective
plus ou moins revendicative. Dans un deuxième temps, nous nous intéresserons
aux prises de position et aux préconisations que RoadPeace et la Ligue ont pu
formuler en matière de réglementation de la vitesse.
2. Du deuil à l’action collective
La Ligue et RoadPeace ont comme point commun fondamental d’avoir vu le
jour à la suite d’initiatives prises par des parents de victimes de la route et, plus
précisément, par des mères. Geneviève Jurgensen a ainsi fondé la Ligue en 1983
— dont elle est toujours la porte parole officielle — quelques années après le
décès de ses deux petites filles, écrasées par un conducteur sur une aire d’autoroute (Jurgensen, 1994). Brigitte Chaudhry a pris la décision de créer RoadPeace
en 1992 — dont elle est toujours la présidente — à la suite de la mort de son fils,
58 En creux, cette remarque nous permet de suggérer l’urgence d’une étude systématique
de l’entourage des victimes de la route, préalable indispensable à une meilleure prise en
compte de leurs besoins.
Synthèse INRETS n° 57
259
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
tué par un automobiliste qui ne s’est pas arrêté à un feu rouge59. Même si la Ligue
et RoadPeace accueillent tous les citoyens sensibilisés à la lutte contre l’insécurité routière, la majorité de leurs membres ont été, de fait, gravement affectés
personnellement, ou dans leur entourage familial proche, par un accident de la
route. Les circonstances dans lesquelles ces deux organisations ont vu le jour
sont déterminantes pour comprendre leurs orientations et leurs logiques de fonctionnement. Plusieurs caractéristiques méritent ainsi d’être soulignées.
2.1. Un déficit de ressources
Les membres fondateurs de RoadPeace et de la Ligue n’ont ni compétences
ni moyens spécifiques pour s’engager collectivement. Même s’ils sont généralement dotés d’un capital social et culturel important, très nettement supérieur à
la moyenne de la population, ils ne bénéficient pas des ressources (cognitives,
stratégiques et financières) et des réseaux relationnels nécessaires à l’entreprise
qu’ils entament. Profondément affectés par un drame personnel, ils sont animés
par un besoin viscéral de rompre l’isolement dans lequel la douleur les confine
souvent60 et par l’envie de défendre les victimes, mais ne sont pas préparés à
cette tâche et, à certains égards, n’en ont pas la capacité. Si la connaissance
technique et l’expertise indispensables à l’action que mène la Ligue et RoadPeace
peuvent s’acquérir progressivement ; en revanche, les moyens financiers et
logistiques sont beaucoup plus difficiles à obtenir et restent réduits, contraignant
énormément leur capacité d’intervention. Ce n’est pas faire injure à leur action
que de dire qu’elle repose sur un art consommé du bricolage, de l’obstination
et de la débrouillardise. Ainsi, pendant de nombreuses années, les locaux de
RoadPeace se sont confondus avec la maison de Brigitte Chaudhry. Le budget
de l’organisation est extrêmement faible, presque dérisoire, même s’il connaît
une augmentation sensible, passant de près de 2 000 £ en 1992 à 140 000 £ en
200461. À la Ligue, les moyens budgétaires sont un peu plus substantiels, tout en
étant très limités (environ 400 000 euros, en 2004 ). De façon générale, le degré
d’institutionnalisation des deux organisations est fragile et n’est que partiellement
compensé par le dévouement de leurs membres qui, sauf pour quelques tâches
de secrétariat, sont généralement bénévoles. L’énergie des individus se substitue
59 Entretien,
le 15 décembre 2004.
du deuxième Foro Contra la Violencia Vial, qui s’est tenu à Madrid en juin 2005, sur
l’initiative de l’Association espagnole Stop Accidentes, Chantal Perrichon, invitée à rendre
compte de l’action de la Ligue dans le contexte français, a très justement insisté sur cet
aspect. « Très souvent, quand les familles vivent ce drame, elles sont seules. Pourquoi
elles sont seules ? C’est que les voisins, les amis ont peur de les aborder, peur d’aller
vers elles, en disant nous sommes maladroits dans ces moments-là. Nous allons dire des
choses qui blesseront. C’est le contraire que les familles attendent. Il y a l’absence et notre
société rajoute de la solitude en plus. Nous avons tous peur. Il ne faut pas avoir peur. Il faut
aller vers. Il faut dire. Tous les mots aideront les familles, les familles sont désarmées, ont
doit les aider c’est essentiel ».
61 Bilans financiers.
60 Lors
260
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
en quelque sorte aux carences de l’institution. À terme, cette situation provoque
l’épuisement des premiers et compromet la survie de la seconde62.
2.2. La construction d’une cause
L’enjeu de départ — posé sous forme de dilemme — auquel la Ligue et
RoadPeace sont confrontés est similaire : comment à partir d’un drame personnel, touchant l’individu dans sa chair et/ou sa sphère d’intimité, passer à la
construction d’une « cause », construite pour interpeller un large public ? Cette
opération suppose, avant tout, de faire reconnaître l’importance et la « grandeur »
(Boltanski et Thévenot, 1991) de l’enjeu défendu et donc de le distinguer d’autres
facteurs de morbidité. L’opinion, partagée par la Ligue et RoadPeace, est que le
risque routier est, depuis longtemps, sous-évalué. Il s’agit donc, en établissant
des comparaisons multiples63, de faire ressortir ses éléments spécifiques, son
caractère prioritaire et de justifier ainsi l’attention toute particulière que devrait lui
accorder les pouvoirs publics. L’exercice est difficile et délicat64 et doit se comprendre comme une tentative tactique d’interpellation politique et médiatique
visant, in fine, à compenser une insuffisante prise en compte et un déni de justice
(Gamson, 1975 ; Cefaï et Pasquier, 2003). Le sentiment que l’accident de la route
n’est pas traité à la hauteur de la gravité du phénomène est insupportable et
ajoute l’isolement, la solitude, voire le mépris à la douleur des familles. Comme le
souligne RoadPeace « Where an untimely or traumatic death or injury occurs in a
factory, ship, or mine the event is carefully investigated, causal factors are identified and where appropriate action taken to reduce the likehood or similar incidents
occurring again. In the case of death or injury on the road, post incident investigations are often minimal and occur in an atmosphere where road death is regarded
as an unavoidable outcome of a minor road traffic offence. The death or injury of
the victims is sometimes not seen as significant enough to warrant a mention in
court. This attitude of society has a profound impact on road crash victims and
their families who often feel let down and marginalized in their distress. A frequent
cry from victims of road crashes is for justice and an appropriate recognition of the
pain and suffering they have experienced »65.
62 Depuis les travaux précurseurs de Talcott Parsons, la sociologie des organisations a bien
montré que le haut degré d’institutionnalisation d’une organisation permet d’économiser
l’énergie des individus qui la compose. Dans le cas des groupes défendant les victimes
de la route, ce processus est le plus souvent limité, l’organisation dépendant fortement de
l’implication d’un nombre très limité d’activistes.
63 Avec, par exemple, les accidents domestiques, les morts de la guerre en Irak, de la
Seconde Guerre mondiale, du 11 septembre 2001, des catastrophes ferroviaires ou
aériennes, les homicides, etc.
64 D’autres systèmes de justification pourraient amener à relativiser le caractère prioritaire
de la lutte contre l’insécurité routière, au regard, par exemple, du nombre et de la gravité
des accidents domestiques. Hiérarchiser les causes et les urgences remplit une fonction
légitimatrice, mais qui est sujette à caution et qui, en fonction des critères d’évaluation
retenus, reste toujours contestable.
65 Archive RoadPeace.
Synthèse INRETS n° 57
261
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Les deux organisations oscillent, à des degrés divers, entre la prise en charge
du deuil des familles et une logique d’action collective plus revendicative. Ces
deux orientations ne sont pas exclusives et sont d’ailleurs constamment discutées et en tension à RoadPeace comme à la Ligue : pour les proches des victimes, appréhender la question de la sécurité routière comme une cause — par
définition globale — s’oppose parfois à la reconnaissance de leur souffrance, du
drame qui les affecte spécifiquement et peut même être ressenti comme un déni
de mémoire à l’égard de ceux qui ont disparu. La mise en œuvre d’une stratégie
de lobbying implique une montée en généralité et, par conséquent, un travail de
dépersonnalisation qui est douloureux, voire insupportable, pour ceux qui sont
enfermés dans leur souffrance. Le choix des dirigeants de la Ligue est cependant
sans ambiguïtés : l’organisation refuse d’être considérée comme une association
de défense des victimes de la route et revendique haut et fort le statut de groupe
de pression66. Il est à cet égard significatif que Chantal Perrichon soit la première
présidente de la Ligue à ne pas être une parente de victimes. Sans nier la douleur,
toujours particulière et individuelle, des familles, la Ligue se donne avant tout à
voir comme une organisation au service de l’ensemble des usagers de la route.
Les drames personnels et l’émotion que les accidents de la route suscitent ne
sont ni ignorés ni cachés67, mais ils ne sont pas particulièrement mis en avant et
sont accompagnés d’une argumentation scientifique, très fortement documentée,
mise au service de l’interpellation des pouvoirs publics.
RoadPeace se démarque, au moins en partie, de cette ligne de conduite. Elle
se présente à la fois comme un lobby — « RoadPeace researches and documents the experiences of road crash victims using the findings to inform and
influence policy makers, the media and the public68 » — mais aussi et peut-être
surtout comme une « Organisation of compassion [which] primary objective was
and always be to provide vital information and support to road victims, based on
practical experience and knowledge of road victims’ needs »69. Ce rôle d’aide
aux victimes correspond à l’intention et à la démarche première des membres
fondateurs de RoadPeace, notamment de Brigitte Chaudhry qui, avant de créer
l’organisation, s’était tournée vers une association d’aide aux parents endeuillés
(Compassionate Friends) et avait alors pu mesurer l’étendue de leurs demandes
et l’insuffisance des réponses apportées. Aujourd’hui encore, RoadPeace entretient d’excellentes relations avec cette organisation, ou Cruse, qui ont vocation
à accompagner le deuil des familles. La volonté de porter secours aux victimes
66 Cette affirmation est d’autant plus spectaculaire qu’elle ne correspond pas à la
tradition française, relativement hostile aux lobbies, considérés comme des éléments de
déstabilisation, voire de corruption, du système démocratique.
67 Les membres de la Ligue passent même un temps considérable à accompagner les
familles (tant psychologiquement que dans leurs démarches administratives), mais cette
action personnalisée s’inscrit plus largement dans une stratégie visant à obtenir des
pouvoirs publics une amélioration globale des conditions d’aide et d’accompagnement des
victimes et de leur entourage.
68 http ://roadpeace.org/index.html
69 Archive RoadPeace.
262
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
de la route et à leur entourage se traduit dans de multiples dispositifs, notamment la mise en place d’une ligne téléphonique, ouverte 12 heures sur 24, sept
jours sur sept, destinée à leur fournir les informations et le soutien nécessaires.
Elle se manifeste également à travers plusieurs manifestations de célébration
de la mémoire des victimes. Tous les ans, depuis 1993, RoadPeace organise
ainsi une journée européenne70 du souvenir, qui est maintenant soutenue par
le Programme d’action de lutte contre l’insécurité routière des Nations-Unies.
« The Day of Remembrance responds to the great need of road crash victims
for public recognition »71. RoadPeace a également lancé récemment, en mars
2005, à l’occasion de la fête des mères et du mois international de la femme,
une action spécifique, intitulée « Global Campaign’ Women for worldwide peace
on the roads ». Brigitte Chaudhry indique « Women around the world are at the
forefront of campaigning for justice and reduction of danger on the roads, since
they tend to bear the brunt of the devastation suffered by families when children
or loved ones are cruelly and needlessly killed or maimed in traffic [...]. “Mother’s
Day in spring — instead of being a happy occasion, brings extra pain to all too
many bereaved mothers and to all too many children of mothers killed in a road
crash, which is why we chose the month of March to start this worldwide initiative”
[...]. “While males account for the majority of primary casualties, women suffer
more often as the bereaved mothers, partners and carers”72 ». Sans entrer dans
le détail des diverses commémorations organisées par RoadPeace, il faut noter
qu’elles comportent souvent, plus ou moins explicitement, une connotation religieuse73. Conformément à la tradition laïque française, la Ligue, en revanche,
ignore complètement cette dimension. Les oppositions bien connues entre les
modèles de citoyenneté en Grande-Bretagne et en France, le premier reconnaissant l’existence des appartenances communautaires dans l’espace public, alors
que le second tend à les reléguer dans la sphère privée, trouvent ici une forme de
concrétisation et orientent l’action de RoadPeace et de la Ligue.
Ces registres d’intervention différenciés entre les deux organisations s’expliquent
par différentes raisons. Les personnalités et les sensibilités des dirigeants peuvent
jouer. Par ailleurs, la Ligue est plus ancienne que RoadPeace et a donc eu plus
de temps pour évoluer et se structurer en un groupe d’intérêt, cherchant au fil du
temps à accroître et à rationaliser son influence. Plus fondamentalement encore,
les « structures d’opportunités nationales » (Eisinger, 1973 ; Kitschelt, 1986 ;
Tarrow, 1994 ; McAdam et Marks, 1996), plus ou moins ouvertes ou favorables, ont
fortement orienté et différencié les répertoires d’action (Tilly, 1984). Les demandes
exprimées en termes de reconnaissance sont d’autant plus importantes pour
70 Devenue
mondiale en 2003.
71 http ://www.roadpeace.org/projcamp/worldday.html
72 http ://www.roadpeace.org/pr/womecamp.html
73 À travers l’utilisation de symboles (la Colombe de la paix), de lieux (les Églises), ou
même des références à la prière et à la Bible. Cf. « Prayers and Thoughts for the European
Day of Remembrance for Road Crash Victims » élaboré par RoadPeace. Lors du décès
de Jean-Paul II, Brigitte Chaudhry a d’ailleurs tenu à rendre publiquement hommage au
Pape.
Synthèse INRETS n° 57
263
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
RoadPeace qu’elles ne sont pas, ou peu, satisfaites par le système britannique,
alors que la Ligue est, au moins actuellement, en mesure de se faire entendre
et de collaborer — de façon exigeante — avec les pouvoirs publics, ce qui l’incite
à vouloir exercer la plus grande influence possible. En d’autres termes, nous
émettons l’hypothèse que la dimension symbolique et émotionnelle de l’action est
un indicateur de marginalisation politique et institutionnelle. Or, pour RoadPeace,
la question de la reconnaissance de la victime est un enjeu et un objectif décisif, au
regard du dispositif actuel et de la façon dont il occulte le statut de cette dernière :
« At present a custodial sentence can only be imposed on somebody who has
caused death and injury on the roads if the case is heard in the Crown Court. But a
Crown Court hearing only takes place if the charge is “Causing death by dangerous
driving” or “Causing death under the influence of drink”. The majority of offenders
are charges with “Driving without due care attention”, heard in a Magistrates Court,
where typically, the offenders get a £250 fine plus a few penalty points on their
licence. Frequently the death is not even mentioned in court. It is never recorded”
(SafetyFirst, no 20, 2005). Il est significatif de noter que les victimes de la route
ne figuraient ni dans la première Charte des victimes élaborée en 1990, ni dans
sa version révisée de 1996. Le Victim’s Code of Practice, récemment proposé, et
qui devrait remplacer la Charte des victimes, énumère leurs droits et les services
mis à leur disposition, mais ne s’appliquerait aux victimes de la route que dans la
mesure où elles auraient été tuées délibérément, ce qui est bien évidemment un
cas de figure rarissime74.
Pour la Ligue, la situation est sensiblement différente. La question du statut de
la victime en tant que telle et de sa visibilité administrative n’est pas un motif central
de revendication, ce qui ne signifie pas que les droits qui lui sont attachés soient
considérés comme suffisants par les familles. Qui plus est, depuis le discours du
président de la République, en juillet 2002, faisant de la sécurité routière l’un des
trois « chantiers nationaux », la Ligue bénéficie d’une entente exceptionnelle avec
le gouvernement et les représentants de l’État. Les raisons ayant amené à cette
mise à « l’Agenda politique » (Garraud, 1990) restent obscures. Il n’est pas interdit
de faire l’hypothèse que Jacques Chirac et ses conseillers ont choisi de répondre
à l’inquiétude grandissante d’une majorité de français en matière de sécurité sur
la route — dont témoignaient clairement les sondages d’opinion — sachant qu’en
ce domaine une politique volontariste avait toutes les chances d’obtenir des résultats rapides et probants, compte tenu du retard que la France accusait par rapport
à ses voisins étrangers. Quels qu’en soient les motifs, cette décision a donné une
impulsion radicalement nouvelle à l’action publique de sécurité routière et a bouleversé les conditions dans lesquelles s’exerce le rôle de la Ligue. Comme le dit
justement sa présidente, « nous sommes passés d’une culture d’opposition à une
culture de concertation »75. Cette situation inédite apparaît à la fois miraculeuse
et fragile. Miraculeuse, parce qu’elle n’est pas directement le résultat du lobbying
74 Récemment,
le Home Office s’est dit favorable à une augmentation des amendes
infligées aux contrevenants sur la route, qui viendrait alimenter un fond d’aide aux victimes
autres que celles de la route, puisqu’elles ne sont pas reconnues en tant que telles !
75 Entretien, le 22 janvier 2005.
264
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
exercé par la Ligue ou d’une quelconque association de victimes et ne peut difficilement être interprétée comme un signe de leur vigueur et de leur capacité
d’influence. Fragile, parce que la « fenêtre d’opportunité » ainsi ouverte (Keeler,
1993) peut se refermer d’un moment à l’autre. Dans cette éventualité, il sera alors
temps de juger à long terme des effets de la politique menée en matière de lutte
contre l’insécurité routière et de la place que les associations de victimes de la
route, notamment la Ligue, seront en mesure de jouer. D’une certaine façon, les
progrès réalisés dans ce domaine s’évalueront véritablement lorsque la sécurité
routière ne sera plus une priorité gouvernementale.
2.3. Les signes embryonnaires d’une transnationalisation de
l’action
Le cadre d’intervention de RoadPeace et de la Ligue n’est pas exclusivement
national et comporte aussi une dimension européenne, voire mondiale. L’une et
l’autre se retrouvent ainsi au sein de la Fédération européenne des victimes de
la route (FEVR) dont le siège est situé à Genève. À la suite du décès de son
Président, Brigitte Chaudhry a pris la tête, en 2003, de cette organisation, dont
l’existence même témoigne d’une tendance à « l’européanisation de l’action collective » (Chabanet et Giugni, 2005) des victimes de la route. Pourtant, hormis
une mise en commun d’informations — qui auraient pu être échangées par un
autre moyen — la FEVR joue un rôle limité. Les dernières réunions ont d’ailleurs
été marquées par l’absence d’organisations nationales, comme la Ligue ou Stop
Accidentes et ne laissent entrevoir aucune action concertée consistante. À cet
égard, il est symptomatique que la journée européenne de sensibilisation à la
sécurité routière ait été initiée, en mai 2003, par la Ligue — à l’occasion de son
vingtième anniversaire — et non par la FEVR. Le constat est sans surprise et vient
renforcer les études faites sur les difficultés d’organisation que rencontrent la plupart des mouvements sociaux à l’échelle de l’Union européenne76. Alors que les
intérêts des constructeurs, par exemple, sont depuis longtemps très bien représentés auprès des institutions européennes77, aucun groupe de défense des victimes de la route n’est en mesure d’exercer directement une influence significative à
cette échelle78. Au moment où la Commission manifeste clairement, à travers son
76 Dans
un travail de synthèse, Dieter Rucht (2002) identifie quatre obstacles principaux : le
rôle prépondérant des États et des Gouvernements nationaux dans le processus politique
européen ; la complexité des institutions et de la décision européenne ; les difficultés
d’organisation et de coordination entre des acteurs sociaux fortement segmentés ;
enfin, le manque de structuration de l’opinion publique européenne interpellée par ces
mobilisations.
77 Dans un passé assez récent, on a, par exemple, pu voir le PDG d’un grand constructeur
français accompagner à Bruxelles Jean-Claude Gayssot, alors ministre des Transports,
lors d’une rencontre officielle avec des membres de la Commission européenne (Sur le
sujet, cf. Moguen-Toursel, 2002).
78 Ce qui ne veut pas dire que dans certaines circonstances favorables — on pense
évidemment au cas français — les exécutifs nationaux ne relaient pas ces intérêts auprès
des sphères européennes, que ce soit au Conseil qu’à la Commission.
Synthèse INRETS n° 57
265
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
livre blanc, son ambition en matière de sécurité routière79 et où des discussions
sont entamées sur des sujets aussi importants que l’harmonisation des vitesses
et/ou le bridage des moteurs dans les pays de l’UE, cette dissymétrie leur est bien
évidemment très préjudiciable. Elle pourrait, au moins en partie, être comblée si la
FEVR avait son siège à Bruxelles et était inscrite au titre des Eurogroupes80. Pour
l’heure, les organisations membres de la FEVR consacrent la quasi-totalité de
leurs (faibles) moyens et de leur (grande) énergie81 à se mobiliser à l’intérieur des
espaces nationaux — cherchant à interpeller les exécutifs gouvernementaux — le
niveau européen jouant davantage comme un obstacle que comme un recours
alternatif. Parallèlement, RoadPeace a consacré des efforts importants à interpeller les enceintes internationales, en particulier l’Organisation des Nations Unies.
Ces démarches ont d’ailleurs plusieurs fois été couronnées de succès et se sont
traduites par la mise en œuvre de journées et de programmes de sensibilisation à
la sécurité routière parrainés, ou soutenus, par cette dernière. L’impact de ce type
d’initiative dépend fortement des capacités décisionnelles de l’institution ciblée
— qui sont en la matière quasi-inexistantes — mais peut néanmoins bénéficier de
la résonance que des enceintes aussi prestigieuses procurent.
3. La progressive mise à l’index de la vitesse comme
facteur de risque
Aujourd’hui, pour RoadPeace comme pour la Ligue, la vitesse est incontestablement considérée — avec l’alcool au volant — comme l’un des principaux
facteurs de risque routier. Il est important de rappeler que pendant longtemps,
son rôle dans l’apparition et la gravité des accidents sur la route a été vivement
79 On
notera, incidemment, que cette importance accordée à la sécurité routière ne
paraît pas résulter de l’influence exercée par les associations de victimes. On peut faire
l’hypothèse que, dans ce domaine comme dans d’autres, la sociologie spécifique de la
Commission européenne (dont les membres sont globalement plus jeunes, surdiplômés
et féminisés que parmi les élites nationales) n’est pas étrangère à cette ouverture.
Parallèlement, l’émergence d’un espace politique européen encourage la confrontation
des expériences nationales et permet d’identifier plus facilement les « bonnes » des
« mauvaises » pratiques, notamment en matière de sécurité, ce qui contribue parfois à
faire ressortir certaines priorités.
80 Sans entrer dans les détails, rappelons simplement que les groupes d’intérêts européens
sont officiellement répertoriés dans deux registres différents, l’un auprès de la Commission,
l’autre auprès du Parlement. Cette inscription est soumise à des règles très légères (respect
d’un code de conduite qui n’a pas de force contraignante), est peu sélective et gratuite. Elle
donne un droit d’entrée aux deux enceintes européennes, peut permettre de participer à
un certain nombre de comités consultatifs et facilite grandement l’accès à des informations
plus ou moins stratégiques.
81 Travaillant constamment dans l’urgence et submergés par l’immensité de la tâche à
accomplir, ces derniers n’ont tout simplement pas le temps nécessaire pour investir un
cadre politique — l’UE — qui reste aujourd’hui encore, à leurs yeux, un espace de « second
ordre ».
266
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
contesté, notamment par certains constructeurs82 et une partie importante de
l’opinion publique83. Plus encore, il a été purement et simplement oublié, y compris de la part des chercheurs et des pouvoirs publics et n’a donc pas été pris en
compte comme un facteur de risque majeur. « A report to the Department’s Road
Safety Division issue in 1974 made no reference to lowering speeds in the seven
basic option set out in its accident reduction strategy » (Plowden et Hillman, 1985,
p. 84). En France comme en Grande-Bretagne, la lutte contre l’alcool au volant a
d’ailleurs précédé la mise en place de mesures effectives visant à réguler efficacement les vitesses pratiquées84.
3.1. Le développement des dispositifs de contrôle–sanction
RoadPeace et la Ligue ont d’abord dû faire valoir l’idée que des vitesses
excessives allaient à l’encontre de la sécurité des usagers de la route. Depuis sa
création, la Ligue a ainsi pris de nombreuses mesures en ce sens. Dès ses premières années d’existence — c’est-à-dire lorsque sa visibilité politique et médiatique était très faible — la Ligue a eu recours, à deux reprises, à des procédures
contentieuses pour tenter de lutter contre la vitesse au volant85. En 1984, elle a
intenté un procès au constructeur Citroën et à une agence de publicité, accusant
l’un et l’autre de se livrer à une « apologie de la vitesse », amenant ainsi les pouvoirs publics à décider de la création d’un bureau de vérification et de contrôle
des publicités et, finalement, à interdire l’utilisation explicite de la vitesse comme
argument de vente et de promotion. Quelques années plus tard, la Ligue a traîné
Peugeot devant les tribunaux, au motif qu’il mettait en vente des cyclomoteurs
allant au-delà des 45 km/h autorisés. Si, au bout de quatre ans de procédure, la
Ligue a perdu ce procès86, elle a néanmoins réussi à susciter l’intérêt des médias
et a eu la satisfaction de constater que, dans le même temps, Peugeot avait
82 En France, Jacques Calvet pouvait vanter en toute impunité, dans les années 1990,
alors qu’il était PDG de PSA Peugeot Citroën, les vitesses que ses modèles étaient
capables d’atteindre, arguant qu’elles étaient un gage de sécurité, notamment en situation
de dépassement (argument dit de la « réserve de puissance »).
83 Alors même que la vitesse de pointe des véhicules ne cessait d’augmenter : « En
1967, 29 % des véhicules français n’atteignaient pas 13 km/h et 10 % pouvaient dépasser
150 km/h. Vingt ans plus tard, il n’y avait plus que 4 % de ces véhicules qui n’atteignaient
pas 130 et 73 % dépassaient 150 »
(cf. http ://www.securiteroutiere.org/Connaître/vehicule.htm).
84 Même si, comme le souligne Claude Got, la France a été le premier pays européen à
fixer, en 1973, des limites généralisées à la vitesse sur les routes. Dès 1961, la vitesse est
limitée à 90 km/h, le week-end, sur les 2 100 km de route les plus chargées (cf. http ://www.
securite-routiere.org/Connaitre/decision.htmn).
85 Les dynamiques juridiques ont ceci de particulier qu’elles échappent, en partie, aux
logiques politiques et peuvent parfois, pour cette raison, constituer des alternatives
favorables aux groupes à faibles ressources. Parce que leurs effets sont difficiles à anticiper
et, parfois, surprenants — et qu’elles constituent également des fenêtres médiatiques —
elles contribuent à redéfinir les rapports de force dans un espace politique donné.
86 Pour des raisons formelles liées à l’impossibilité de prouver selon une procédure
incontestable la faute commise par le constructeur.
Synthèse INRETS n° 57
267
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
cessé de fabriquer des deux roues motorisés excédant les limites en vigueur.87 De
même, le lobbying qu’elle a exercé a sans aucun doute contribué à la généralisation de la limitation de la vitesse à 50 km/h en zone urbaine, en 1990. Elle a également, pendant longtemps, agit en faveur du délit de grande vitesse, finalement
obtenu en juin 1999. La Ligue se réjouit bien évidemment que depuis novembre
2003, des radars automatiques aient été installés sur le territoire français et s’est
félicitée que cet effort soit poursuivi, avec l’annonce de l’installation courant 2006
de nouveaux appareils (Perben, 2005)88. Ce contrôle devrait, en outre, s’exercer
à l’avenir avec beaucoup d’effectivité à l’encontre des conducteurs étrangers qui,
pour l’heure, échappent en grande partie au dispositif mis en œuvre. Le ministre Perben a ainsi prévenu que « au-delà de l’accord déjà signé entre la France
et le Luxembourg, le ministre de la Justice, à la demande du Président de la
République, s’est engagé à ce que des conventions bilatérales de poursuites des
infractionnistes soient signées avec tous les pays limitrophes de la France d’ici à
la fin de 2006 ». Une loi facilitant l’immobilisation et la confiscation des véhicules
pour les excès de vitesse excédant de plus de 50 km/h les limites autorisées
devrait également être adoptée dans les prochaines semaines. Le limitateur de
vitesse devrait lui aussi être généralisé sur les véhicules neufs, dans un premier
temps sur la base du volontariat. Aujourd’hui, Claude Got, l’un des plus proches
collaborateurs et alliés de la Ligue89, propose d’utiliser les tickets de péage sur
les autoroutes pour contrôler les excès de vitesse et milite également pour que la
France invite les institutions de l’UE à prendre des mesures contraignantes visant
à limiter — à la construction — la vitesse de tous les véhicules.
3.2. La « voiture citoyenne »
Très récemment, en début novembre 2006, la Ligue et le magazine 60 millions de consommateurs ont dévoilé un projet extrêmement ambitieux de « voiture citoyenne », établissant un palmarès de 772 différents modèles de voiture
actuellement en circulation90. Plus ou moins directement, il s’agit de lutter contre
la dangerosité des véhicules atteignant les plus hautes vitesses. L’élaboration,
et surtout la publicisation d’un tel classement — qui, pendant plusieurs décennies, n’avait pu voir le jour malgré plusieurs initiatives prises en ce sens — sont
révélatrices de l’entente et de la concertation qui existent aujourd’hui en France
87 À
cet égard, il faut souligner que RoadPeace ne dispose pas des mêmes armes que
la Ligue et ne peut pas — en vertu de son statut de Charity — engager de poursuites
judiciaires. En revanche, elle soutien publiquement tous les recours — intentés par ses
membres à titre individuel, ou par d’autres organisations — qui lui semblent fondés.
88 Le ministre des Transports, de l’Équipement, du Tourisme et de la Mer a déclaré le 5
novembre 2005 à Vérone que 850 radars étaient actuellement en service, et que leur
nombre serait porté à 1 000 en fin d’année, puis 1 500 en 2006.
89 Médecin de formation, spécialiste reconnu et influent, investi dans plusieurs dossiers
sensibles de santé publique, dont celui de l’amiante.
90 Quatre critères sont pris en compte : a) la protection des occupants de voitures
particulières ; b) des piétons et des usagers de la route ; c) des occupants d’autres voitures ;
d) de l’environnement (cf. http ://www.voiturecitoyenne.fr).
268
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
entre des représentants de la société civile91 et des responsables politiques pour
lutter contre l’insécurité routière. La participation des organisations de défense
des consommateurs à cette entreprise est un signe remarquable du désenclavement de la lutte contre la sécurité routière, dont les exigences s’imposent en
quelque sorte sur le marché de l’automobile. En ce sens, il sera évidemment
important de connaître les éventuelles répercussions de ce classement sur les
comportements d’achat. Il est tout aussi significatif que le ministre Perben ait fait
écho aussi explicitement à cette initiative — et ce dès son lancement — montrant
ainsi le soutien et la détermination du gouvernement. « Nous voyons s’imposer
en France un thème fédérateur qui, pour moi, résume l’essentiel : le renforcement
de la citoyenneté routière. Cette thématique englobe bien sûr, au premier chef, la
question du “véhicule citoyen” » (Perben, 2005). Qu’aujourd’hui les propos d’un
ministre d’État, qui plus est principal maître d’œuvre de la politique de sécurité
routière en France, rejoignent les préoccupations des responsables de la Ligue
et, surtout, soient suivis par un ensemble de décisions énergiques, atteste de
façon éloquente du rôle que peut jouer la Ligue.
3.3. L’importance des cadres d’interprétation
De façon beaucoup plus générale, une véritable lutte terminologique et linguistique est engagée, en France comme en Grande-Bretagne, pour que les facteurs
de risque (dont la vitesse) et, plus largement, la responsabilité des conducteurs
mais aussi, parfois, des pouvoirs publics, soient dénoncés à chaque fois qu’il
semble opportun de le faire. L’enjeu fondamental consiste à ne pas accepter l’idée
que les accidents de la route seraient le fruit d’un processus aléatoire, ou puissent
être imputés, implicitement ou non, à une quelconque fatalité. Le rôle pédagogique joué par les médias est, à cet égard, primordial92. RoadPeace comme la
Ligue sont très sensibles à la façon dont les accidents de la route sont décrits, ce
qui détermine en grande partie le « cadre cognitif » (Snow, 2005) à partir duquel
la question de la sécurité routière est traitée dans chaque pays. L’une et l’autre
s’attaquent aux travers qu’elles estiment constater, notamment dans la presse
et les journaux télévisés, et produisent leurs propres catégories discursives,
qu’elles mettent en quelque sorte à disposition dans l’espace public, pour peu
qu’on veuille bien les écouter. Elles œuvrent ainsi à la constitution d’un « stock de
connaissances disponibles » (Berger et Luckmann, 1986), qui vient concurrencer
d’autres points de vue, perspectives et intérêts. En fonction des espaces et des
ouvertures politiques et médiatiques dont elles disposent, ces registres sont plus
ou moins utilisés par d’autres acteurs. Ce rôle est loin d’être négligeable, même
si ses effets sont difficiles à mesurer93. En France, une partie du vocabulaire et
91 Appuyés
par le travail discret mais efficace d’un certain nombre d’experts et de
chercheurs.
92 Dire d’un véhicule qu’il « roulait trop vite alors qu’il y avait du brouillard » n’a évidemment
pas la même signification pédagogique que d’affirmer qu’il « est sorti de la route en raison
du brouillard ».
93 De façon stimulante mais peut-être un peu excessive, Rochon (1998) estime que les
changements linguistiques, même lorsqu’ils semblent anecdotiques, sont révélateurs et
parfois annonciateurs d’évolutions sociales majeures.
Synthèse INRETS n° 57
269
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
du lexique traditionnellement familier aux associations de défense des victimes
de la route a ainsi été repris par les médias et les pouvoirs publics, sans que cela
ne s’accompagne d’ailleurs toujours du travail de réflexivité nécessaire. Le terme
de « chauffard », par exemple s’est, en quelques années, imposé pour désigner
le comportement d’un automobiliste imprudent et/ou dangereux — souvent en
raison d’une vitesse excessive — alors qu’il était utilisé beaucoup plus rarement et
avec parcimonie autrefois, et spécifiait surtout l’argumentation des victimes et de
leur entourage94. En d’autres termes, l’énonciation et la construction à propos de
l’insécurité routière d’un « drame social » (Gusfield, 1981) qui vise à souligner l’urgence et l’acuité de la situation, est aujourd’hui, en France, le produit d’un effort
conjugué, qui semble socialement dominant. Il est en ce sens significatif que la
loi sur la violence routière, votée par le Parlement français en juin 2003, reprenne
mot pour mot l’intitulé que la Ligue s’est donné et consacre ainsi le terme, symboliquement fort et très connoté, de « violence ».
3.4. L’aide de certains milieux de la recherche
En Grande-Bretagne, les scientifiques ont joué un rôle essentiel dans la prise
de conscience — assez tardive — de la vitesse comme facteur accidentogène.
Dès 1985, Steven Plowden affirmait, « Speed limits on inter-urban roads should
be reduced. Trials are required in order to ascertain the optimum speed limit, but
experience in the United States and New Zealand suggests that for the motorways 55 or 50 mph might be appropriate. Motorways and other selected trunk
roads should be made into toll roads ; to prevent traffic diverting from the toll
roads onto other less suitable routes speed limits lower than those applying to
motorways should be set and strictly enforced » (Plowden, 1985, p. 9). Il précisait
même, « the present urban speed limit of 30 mph is almost certainly too high »
(Ibidem), rejoignant l’une des revendications de RoadPeace, demandant que la
vitesse soit limitée à 20 miles en zone habitée95. Le livre ne se contente pas de
mettre à jour les nuisances et les méfaits que cause la vitesse, il dessine également les conditions de possibilités d’une politique ambitieuse de sécurité routière96. En 1996, l’ouvrage Speed Control and Public Policy co-écrit par Steven
Plowden et Mayer Hillman traite lui aussi, de façon systématique, des conséquen-
94 Il
serait intéressant de disposer de données systématiques permettant de caractériser
avec exactitude — en France et en Grande-Bretagne — les registres discursifs de trois
grandes catégories d’acteurs (victimes, médias et acteurs décisionnels) pour, notamment,
avoir une idée des emprunts, ou des effets d’imitation qui peuvent s’exercer de l’une à
l’autre.
95 L’argumentation est notamment fondée sur le fait que le nombre de piétons tués et/ou
blessés en Grande-Bretagne est relativement élevé (cf. Hillman, et al., 1990).
96 L’auteur identifie très précisément : a) l’insuffisante pression de l’opinion publique ; b)
la nécessité d’interpeller davantage les partis politiques et les médias ; c) l’utilité de créer
une agence de sécurité routière qui puisse constituer un interlocuteur auquel les acteurs
associatifs pourraient s’adresser ; d) l’intérêt pour tous ceux qui veulent œuvrer à une
amélioration de la sécurité routière de nouer des coalitions, prenant particulièrement en
compte les enjeux environnementaux (pp. 207–209).
270
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
ces de la vitesse non seulement sur le risque routier mais également, plus largement, sur l’environnement social et écologique. Les informations rassemblées
et produites contribuent à la sensibilisation d’un public qui, sans être très élargi,
n’est plus complètement confidentiel. Par ailleurs, les deux auteurs ont des liens
avec RoadPeace et soutiennent son action. Cette connivence est importante et
explique que RoadPeace ait été en mesure de se saisir rapidement de ce livre et
de s’en servir pour la cause qu’elle défend. La même année, RoadPeace a ainsi
rédigé pour la première fois un document fort bien étayé, consacré spécifiquement
aux conséquences de la vitesse97. La collaboration entre scientifiques et militants
a des effets multiples : non seulement les membres de RoadPeace peuvent s’approprier cette connaissance experte, mais leurs interlocuteurs leur reconnaissent
plus aisément une compétence propre dans la mesure où la source de ces informations est considérée comme crédible98. Elle amène également à un nouveau
cadrage (Cefaï et Trom, 2001).
3.5. L’expertise comme rempart à la stigmatisation
Il apparaît clairement que la mise en forme d’une argumentation experte,
fondée sur des sources et des données scientifiques, de même que le soutien
apporté par des ingénieurs ou des chercheurs présentent l’avantage de crédibiliser l’image des associations de défense de la route. Cette opération est
d’autant plus importante pour RoadPeace qu’elle n’est pas reconnue — à l’inverse de la Ligue — comme un interlocuteur pleinement légitime, encore moins
comme un partenaire par les pouvoirs publics. En ce sens, elle est un moyen de
répondre aux tentatives de stigmatisation dont elle fait souvent l’objet dans les
débats publics. Une des stratégies couramment utilisée par les détracteurs de
RoadPeace consiste, en effet, non pas à discuter les arguments qu’elle met en
avant, mais à la discréditer en tant qu’organisation soupçonnée d’être incapable
de faire preuve de rationalité, comme génétiquement prisonnière de la dimension
émotionnelle (colère, souffrance, vengeance, etc.) qui se trouverait à la source de
l’engagement des familles de victimes. Ici, la compassion qui peut parfois s’exprimer est aussi une disqualification. Ceux qui ont recours à ce procédé cherchent
à déposséder les victimes de leur faculté de discernement et, du même coup, à
97 « Tough
on Speed ».
la suite notamment des travaux pionniers de John Kingdon sur les politiques de
santé aux États-Unis (1984), de multiples auteurs ont su montrer, dans des domaines
différents, l’importance des liens et des interactions entre scientifiques et militants. Pour
ces derniers, l’apport est à la fois cognitif (avec la mise à disposition de connaissances
précises, argumentées) et stratégique (les informations ainsi produites étant généralement
considérées comme légitimes, s’imposant souvent comme telles aux décideurs politiques
et pouvant combler, au moins en partie, le déni, voire la stigmatisation, dont les activistes
associatifs et/ou bénévoles peuvent souffrir). L’analyse de l’action publique fourmille
d’exemples montrant que la provenance d’une information détermine au moins autant, sinon
plus, la façon dont cette dernière est perçue socialement que l’information stricto sensu. Les
jeux d’images et d’étiquetage — autrement dit les processus de croyance — sont donc
consubstantiels de la circulation des idées, ce qui ne veut pas dire que tout se vaut !
98 À
Synthèse INRETS n° 57
271
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
exclure leurs propos(itions) du champ rationnel de la délibération et de la décision
(Habermas, 1987). Si la posture de victime peut être la source d’une exposition
de soi fondée sur l’affectif — et visant alors à susciter l’attention d’autrui et, dans la
mesure du possible, réparation du préjudice subi — elle peut donc également être
utilisée comme un stigmate, c’est-à-dire comme une identification dévalorisante
imputée à un adversaire (Goffman, 1975). Sous cet angle aussi, RoadPeace est
davantage concernée que la Ligue, dans la mesure où celle-ci refuse précisément
de se considérer comme une association de victimes. En nouant des alliances
avec des acteurs qui ne font pas l’objet des mêmes processus de stigmatisation
qu’elles et, ce faisant, en se dotant d’une légitimité technique et scientifique qu’elles auraient du mal à acquérir par elles-mêmes, les associations de défense des
victimes inversent en quelque sorte un rapport de force symbolique qui leur est
a priori défavorable (Chabanet, 2003)99. Plus encore, il n’est pas anodin de souligner que s’attaquer à la vitesse revient à mettre en cause une qualité qui, dans
le domaine automobile, est associée à la puissance et donc, en filigrane, à des
attributs que les sociétés modernes reconnaissent le plus souvent au genre masculin100. En investissant ce terrain — comme on marque un champ de bataille —
c’est donc fondamentalement un rapport d’égalité que RoadPeace et la Ligue
cherchent aussi à instaurer.
3.6. La création de Slower Speeds Initiative
En s’inspirant des thèses défendues dans Speed Control and Public Policy,
RoadPeace s’intéresse ainsi du même coup à un plus large éventail d’aspects,
intégrant notamment les conséquences environnementales de la vitesse101. Ce
faisant, elle se donne les moyens de converger plus facilement avec d’autres
catégories d’acteurs — qui ne sont pas en tant que telles des victimes de la
route — en particulier les cyclistes, les piétons et les écologistes. La création en
1996 du groupe Slow Down, qui a donné naissance à la plate-forme intitulée The
99 Nous avons souligné l’importance des relations de domination qui peuvent exister entre
les associations de victimes de la route et les acteurs politiques, à qui l’essentiel de leurs
revendications s’adressent. Les inégalités sont multiples et, surtout, largement cumulatives,
autour des dualités suivantes : profane–expert ; amateur–décideur ; femmes–hommes ;
émotionnel–rationnel.
100 Pour une analyse stimulante du sens et des symboles constitutifs de la « culture
de l’automobile » et parfois de leurs rapports à la masculinité, cf. Guillaume et Debray
(2001).
101 Malheureusement pour RoadPeace, ces questions ont eu tendance à être subsumées
par d’autres problèmes, en particulier la congestion dans les grandes villes (Londres en
premier lieu) et le montant des taxes sur l’essence. En tant que tels, ces deux sujets sont
étroitement liés à la vitesse sur les routes, puisque conduire moins vite diminue à la fois
les embouteillages et la consommation de carburant. Pourtant — et pour des raisons qui
n’incombent évidemment pas qu’à RoadPeace mais qui sont partagées par l’ensemble
des composantes de la société britannique — cette connexion a très rarement été faite,
ce qui met une nouvelle fois en exergue l’importance des phénomènes cognitifs dans la
résolution des problèmes sociaux, autrement dit de ce qui, à un moment donné, dans une
société donnée, est (ou non) pensable.
272
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
Slower Speeds Initiative (SSI), lancée officiellement en mars 1998, est l’un des
principaux résultats de cette évolution. Fondée par sept organisations — outre
RoadPeace, Children’s Play Council, Cyclist’s Touring Club, Environmental
Transport Association, The Pedestrian Association, Sustrans et Transport 2000 —
elle cherche à informer le public des nuisances associées à la vitesse et, surtout,
à faire pression sur les pouvoirs publics pour que la limitation de la vitesse soit
davantage intégrée dans les politiques de transports. La coalition ainsi constituée
accroît considérablement les moyens d’action mis en œuvre. Chaque organisation fondatrice apporte un peu d’argent, ce qui permet de salarier deux jours par
semaine une coordinatrice (Paige Mitchell). La cause défendue gagne également
en visibilité et, surtout, devient plus influente102. Le nombre de personnes représentées augmente considérablement, en particulier grâce à l’afflux des membres
cyclistes103. Cette croissance des effectifs rend envisageable, plausible et crédible l’instauration d’un rapport de force avec des décideurs politiques et, plus
généralement, la mise en œuvre de formes revendicatives et conflictuelles d’interpellation. Progressivement, le fonctionnement de SSI s’institutionnalise et se professionnalise, sous l’impulsion notamment de quelques membres de RoadPeace,
soucieux d’améliorer l’efficacité de l’action menée. Des documents sont élaborés,
des conférences et des manifestations sont systématiquement organisées, des
contacts avec des hommes politiques sont également régulièrement entretenus.
L’objectif poursuivi est de créer un groupe de pression en mesure d’infléchir les
choix des pouvoirs publics. Dans ce cadre, SSI a obtenu un début de représentation officielle, parvenant à faire partie de plusieurs comités consultatifs auprès du
Parlement et des ministères notamment. Si l’influence du SSI est difficile à spécifier et reste vraisemblablement limitée, son inscription dans les processus consultatifs existants témoignent incontestablement d’un « gain procédural » (Gamson,
1975)104. John Stewart, qui a rejoint RoadPeace en 1994, a joué un rôle essentiel
dans ce succès. Son expérience professionnelle de chargé de projet dans diverses ONG militant pour un usage plus citoyen des moyens de transports a constitué une ressource précieuse, qui l’a amené d’une part à densifier les liens avec
les milieux associatifs, d’autre part, à envisager des développements stratégiques
à l’action entreprise par RoadPeace, à partir d’une meilleure articulation de deux
registres : les droits des victimes et, de façon plus générale, la réduction du danger sur la route. Cette opération est essentielle dans la mesure où elle permet
102 Sans entrer dans les détails, on notera simplement que les deux dimensions ne sont
pas nécessairement liées. Une organisation peut être très visible et faiblement influente,
de même qu’elle peut être faiblement visible et fort influente (c’est même un cas très
répandu). Dans une perspective stratégique, il est essentiel de se poser la question de la
relation entre ces deux aspects, c’est-à-dire de leur efficacité respective.
103 À elle seule, RoadPeace compte environ 1 400 adhérents.
104 La notion de « procedural gains », définie par William Gamson, sert à caractériser
certaines formes d’influence que parviennent à exercer des mouvements sociaux ou des
groupes d’intérêts. Elle se différencie fortement de gains directement orientés vers la
satisfaction des revendications émises, mais représente cependant une étape importante
dans le processus de reconnaissance d’un groupe — et d’une cause — qui annonce
souvent, mais de façon non systématique, l’obtention de gains plus substantiels.
Synthèse INRETS n° 57
273
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
d’élargir le spectre d’action de RoadPeace, mais elle est en même temps difficile puisqu’elle suppose de trouver des points de revendication et des éléments
de convergence entre deux populations, l’une déjà touchée par un accident de
la route, l’autre simple usager. Cette articulation ne s’est d’ailleurs faite ni aisément ni sans déchirements pour les familles des victimes. Au sein de RoadPeace
comme de la Ligue, il est ainsi toujours difficile, pour ceux qui ont été durement
affectés par un accident de la route, d’accepter que la question de la sécurité
routière soit appréhendée comme un phénomène global et/ou statistique qui — en
tant que tel — ne reconnaît pas l’abîme de douleur qui les frappe de façon si
personnelle105.
3.7. La mise en place des radars automatiques
Récemment, RoadPeace a pris position sur la question des radars automatiques, se prononçant en faveur de la généralisation de ces dispositifs mais
contre les conditions actuelles de leur implantation (SafetyFirst, no 17, 2003).
RoadPeace défend l’idée que le contrôle des vitesses sur la route est un moyen
efficace d’améliorer la sécurité, mais conteste farouchement les critères de localisation qui ont été retenus. Le fait de retenir un certain nombre de « point noirs »
— définis comme des lieux particulièrement accidentogènes, où au moins quatre
accidents graves sont survenus au cours des trois dernières années — équivaut,
selon RoadPeace, à une acceptation tacite de ces drames106. En d’autres termes,
RoadPeace estime nécessaire que ces radars soient installés avant que des événements particulièrement dramatiques n’interviennent. « The guidelines for speed
cameras must be amended. It is “perverse” that cameras can only be used as
last resort »107. Quoi que l’on pense de ce discours — sur un sujet extrêmement
sensible et débattu en Grande-Bretagne — on peut se demander s’il est bien audible pour l’ensemble de la population. Alors que les associations de conducteurs
britanniques et la presse automobile spécialisée sont plutôt opposées au principe
même de la mise en place de radars, RoadPeace prend le risque d’adopter une
prise de position complexe, sophistiquée et quelque peu ambiguë. En ne soutenant pas sans réserves la politique d’implantation des radars, RoadPeace ne
brouille-t-elle pas son message, voire — involontairement — ne fournit-t-elle pas
105 Dire cela est un moyen de souligner que la ligne de conduite définie par l’organisation
en tant que telle ne recueille pas nécessairement l’assentiment de tous ses membres. À la
Ligue, il est manifeste que certains adhérents au niveau local souhaiteraient que la place
accordée à la reconnaissance des victimes soit davantage valorisée. La grande autonomie
d’action laissée à chaque section départementale permet néanmoins d’articuler — mais de
façon peu visible — des orientations d’action sensiblement différenciées.
106 Il est intéressant de souligner qu’en France, pays pourtant réputé pour être plus
centralisé que la Grande-Bretagne, l’implantation des radars automatiques est décidée
localement. Il n’existe donc pas de critères homogènes, valables pour l’ensemble du
territoire, les enquêtes de terrain effectuées en la matière pointant au contraire une très
grande diversité des critères de choix (réseau routier le plus fréquenté/le plus dangereux/
le moins propice à une intervention humaine, etc.).
107 Archive RoadPeace.
274
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
des arguments à certains de ceux qui sont opposés à une limitation des vitesses
sur la route, qu’ils jugent trop contraignante ou simplement inutile ? En France,
le débat sur l’emplacement des radars est resté finalement assez limité et n’a,
en tout cas, pas été alimenté par la Ligue, trop heureuse de voir se répandre les
formes automatisées de contrôle de la vitesse. Cette question ne la laisse évidemment pas indifférente et aurait pu l’amener à soulever publiquement quelques
doutes, que ce soit sur la pertinence des sites sélectionnés ou sur la politique
consistant à signaler aux automobilistes l’implantation d’un radar automatique108.
Il n’en a rien été. C’est ici, notamment, que le soutien de la Ligue à l’égard de la
politique gouvernementale actuellement menée en France en faveur de la sécurité routière se fait sentir et se distingue de l’orientation prise par RoadPeace.
Sa démarche vise clairement à encourager les efforts développés par les pouvoirs publics, en particulier en matière de contrôle et de sanction des excès de
vitesse et à veiller à ce qu’ils ne faiblissent pas109. Elle est, en ce sens, soumise
à une « éthique de responsabilité » (Weber, 2003), qui l’amène nécessairement
à clarifier son discours, dans une certaine mesure à le simplifier et, surtout, à
constamment chercher à anticiper ses effets politiques et médiatiques. Dans cette
perspective, l’essentiel pour elle est que le processus politique en cours depuis
peu en France, se traduisant par une démarche volontariste de régulation des
vitesses pratiquées, s’installe dans la durée, s’intensifie et devienne irréversible.
À l’inverse, RoadPeace est très largement tenue à l’écart des sphères décisionnelles et n’est pas liée par les mêmes obligations.
4. Remarques conclusives
Le rôle, l’action et l’influence de RoadPeace et de la Ligue s’inscrivent dans
des cadres nationaux différenciés, qui restent largement prédominants à l’heure
actuelle. Dire cela est un moyen d’insister sur l’importance des facteurs exogènes
comme éléments explicatifs de la capacité à intervenir et à faire pression des
deux organisations. Le caractère plus ou moins favorable et incitatif des contextes
sociopolitiques dans lesquels évoluent les associations de défense des victimes
de la route est donc déterminant. RoadPeace souffre d’un manque de visibilité et
de reconnaissance qui tend à l’isoler des sphères décisionnelles et explique, en
partie, que son action soit orientée prioritairement vers le soutien des familles. La
108 Dans les deux pays, il a été décidé de ne pas dissimuler ces radars et même d’indiquer
leur présence aux automobilistes. En Grande-Bretagne, les radars fixes étaient jaunes, de
telle sorte qu’ils soient facilement repérés. Sous la pression notamment de RoadPeace
et de SSI, le ministère des Transports a décidé de modifier leur couleur et de les rendre
plus discrets. C’est l’orientation — plus ou moins répressive ou éducative — de la politique
de sécurité routière qui est en jeu à travers le caractère apparemment anecdotique de ce
changement.
109 Récemment, lorsque les déclarations de Dominique Perben, nouveau ministre des
Transports, ont pu laisser penser que le gouvernement était tenté de se désengager
quelque peu de la lutte contre l’insécurité routière, elle a ainsi exprimé de très vives
désapprobations. En quelques semaines, le gouvernement a d’ailleurs radicalement
changé d’orientation.
Synthèse INRETS n° 57
275
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Ligue bénéficie au contraire du volontarisme manifesté en France, depuis 2002,
dans la lutte contre l’insécurité routière, ce qui lui permet d’agir dans des conditions très favorables. Les mesures préconisées par l’une et l’autre en matière de
réglementation de la vitesse — et surtout leur capacité d’influence — doivent se
comprendre dans ce contexte général. Pour RoadPeace, la création de SSI est
un moyen de sortir de son isolement, en créant des alliances avec les différentes
catégories d’usagers de la route et une façon de développer, de systématiser et
de professionnaliser son action de lobbying. À la Ligue, le combat mené contre la
vitesse s’effectue progressivement, sans provoquer d’évolutions organisationnelles internes particulières ou spécifiques.
Un enjeu essentiel porte bien évidemment sur l’efficacité des deux registres
d’action (lobbying–reconnaissance) adoptés tendanciellement par la Ligue et
RoadPeace. C’est une question à laquelle il est très difficile de répondre théoriquement, d’autant plus que les deux organisations ont recours — certes à des
degrés divers — à l’un comme à l’autre. Par ailleurs, une multitude de travaux
consacrés aux effets des mobilisations sociales (Chabanet et Giugni, 2005) montrent que ceux-ci ne sont généralement pas causaux et en tout cas rarement
identifiables de façon stricte110. Il est essentiel, ici, d’insister sur la nécessité d’un
va et vient entre ces deux orientations. Le lobbying est prioritairement axé sur les
sphères décisionnelles et, en tant que tel, ne bénéficie pas d’une forte publicisation dans l’espace public. Le besoin de reconnaissance est sans doute plus à
même de susciter un large intérêt, mais n’interpelle pas directement, en tout cas
sous un mode revendicatif, les responsables politiques. Leur articulation présente
les meilleures garanties d’efficacité — appréhendée ici à travers l’intervention des
pouvoirs publics en faveur du groupe mobilisé — dans la mesure où elle allie
la représentation d’une catégorie particulière (les usagers ou les victimes de la
route) et la pression de l’opinion publique. Dans cette perspective, il s’agit donc,
autant que faire se peut, d’exercer ces deux activités de façon coordonnée et
articulée111.
Dans l’ensemble, il apparaît que, en France comme en Grande-Bretagne,
les associations de défense des victimes ne sont pas suffisamment fortes pour
décider de — ou simplement exercer une influence significative sur — la mise à
l’agenda politique de la sécurité routière comme objectif prioritaire. Pour autant,
leur rôle est utile, d’abord en raison du soutien qu’elles apportent aux victimes
et à leur famille, ensuite au regard du travail de proposition et d’interpellation
qu’elles effectuent. Quand des conditions politiques favorables sont réunies, les
pouvoirs publics et ces associations peuvent alors collaborer dans une relative
harmonie. Les décideurs politiques peuvent ainsi utiliser ces associations à la
110 La
définition même de la notion « d’effets » pose problème, pouvant recouvrir des
impacts médiatiques, culturels, ou politiques, perceptibles à court, moyen, ou très long
terme.
111 Des groupes d’intérêts fortement institutionnalisés, voire cooptés, peuvent se permettre
d’avoir une faible visibilité sociale, puisque leurs droits sont garantis, mais ce n’est pas le
cas ni de RoadPeace ni de la Ligue.
276
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
fois comme des conseillers — et piocher dans leur « boite à outils » — et des
relais auprès d’une opinion publique dont il faut sans arrêt s’assurer du soutien.
La mise en forme par ces acteurs associatifs d’un corpus discursif à forte charge
émotionnelle, mais aussi pédagogique, dans lequel peuvent puiser les médias,
ou certains responsables politiques et, plus largement, des franges grandissantes
de l’opinion publique, n’est pas le moindre des effets que ces derniers peuvent
exercer. C’est aussi en ce sens que les propositions de RoadPeace et de la Ligue
en matière de réglementation de la vitesse peuvent jouer un rôle, plus ou moins
décisif en fonction du volontarisme ambiant…
Bibliographie sélective112
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critique », Communication écrite au colloque tenu à Science Po Paris les
21 et 22 octobre 2005 à l’occasion des cinq ans de la revue « Politique
européenne », 2005.
112 Ne
sont pas mentionnées les archives non répertoriées de RoadPeace.
Synthèse INRETS n° 57
277
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Commission européenne, Direction générale énergie et transports. Réduire de
moitié le nombre de victimes de la route dans l’UE d’ici 2010 : une
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278
Synthèse INRETS n° 57
L’influence de la Ligue contre la violence routière et de RoadPeace dans
l’action publique de sécurité routière en France et en Grande-Bretagne
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2003.
Synthèse INRETS n° 57
279
Chapitre 12
Organisation et acteurs de la sécurité
routière en Grande-Bretagne.
Les aspects saillants
Robert Delorme
1. Introduction
L’objet de ce chapitre est de présenter des aspects originaux et importants de
l’action de sécurité routière en Grande-Bretagne. Ces aspects concernent l’organisation administrative et territoriale d’une part, et les acteurs de la sécurité routière d’autre part. Certains traits ont déjà été évoqués à propos du management
gouvernemental et local de la vitesse (chapitres 7 et 8), du contrôle sanction automatisé (chapitre 10) et des organisations non gouvernementales (chapitres 11 et
12). Ils ne sont pas repris ici. Ce chapitre s’adresse à des traits significatifs peu ou
pas évoqués dans les chapitres précédents. Il s’agit d’abord de l’organisation territoriale. Elle forme un cadre particulier pour les stratégies de sécurité routière et
pour le jeu des acteurs. Ces aspects sont abordés successivement ci-dessous.
2. L’organisation administrative et territoriale
2.1. Le Royaume-Uni
Le Royaume-Uni comprend la Grande-Bretagne et l’Irlande du Nord. Il est
composé de quatre nations : l’Angleterre (50,1 millions d’habitants), l’Écosse
(5,1 millions), le Pays de Galles (2,95 millions) et l’Irlande du Nord (1,7 million).
La population totale du Royaume-Uni est estimée à 59,8 millions d’habitants en
mi-2004. Elle est du même ordre de grandeur que la population de la France
(60,2 millions) au 1er janvier 2004.
Une donnée fondamentale est la tradition du gouvernement local qui remonte
aux origines de l’histoire politique britannique (Grande Charte imposée au roi en
1215 et confirmée en 1297, reconnaissant les privilèges et coutumes des villes ;
séparation du parlement en Chambre des Lords et Chambre des Communes au
Synthèse INRETS n° 57
281
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
xive siècle).
La situation insulaire de la Grande-Bretagne et l’échec des tentatives
d’absolutisme permettent de comprendre que le gouvernement royal n’a pas eu
besoin d’un appareil administratif important, et que la plus grande partie des fonctions administratives internes a pu être exercée par les autorités locales (Ziller,
1993, 51). Il en est résulté une organisation administrative territoriale compliquée, produit d’une histoire multiséculaire et de réformes successives commencées dans la deuxième moitié du xixe siècle, certaines portant sur l’ensemble du
royaume, d’autres sur certaines parties seulement. Ce mélange a pu être décrit
comme un chaos de circonscriptions, de franchises et d’autorités (Ziller, 1993,
52). La loi sur l’administration locale (Local Government Act) de 1888 introduisit
une simplification et une uniformisation relatives du système.
Malgré l’évolution récente, l’organisation territoriale actuelle garde l’empreinte
des origines dans sa complication. Elle repose sur les comtés et les districts avec
des différences entre l’Angleterre et les trois autres nations. L’Angleterre comprend 354 autorités du niveau du district elles-mêmes regroupées en 34 comtés
(« non unitary authorities », à deux niveaux d’autorité, le comté proprement dit,
les districts à un niveau inférieur), 32 London Boroughs (bourgs de Londres), la
Cité de Londres, 36 districts métropolitains et 47 « unitary authorities » à un seul
niveau d’autorité (Tableau 1).
Ces « local authorities » sont toujours à un seul niveau dans les trois autres
nations, depuis les réformes des 30 dernières années (22 « unitary authorities »
au Pays de Galles, 32 « council areas » en Écosse et 26 « district council areas »
en Irlande du Nord). La Grande-Bretagne compte donc 408 circonscriptions locales de base, le Royaume-Uni 434.
Le seul échelon supérieur est la région, en Angleterre. Il en existe neuf, en
incluant le Grand Londres. Leur rôle est limité. Elles servent de relais et d’intermédiaire entre le gouvernement et les autorités locales et sont parfois désignées
comme les Government Office Regions. Chacune comporte un « Government
office » et quelques institutions et agences associées. Il n’existe pas d’élections
régionales. Les représentants locaux en leur sein sont nommés par les conseils
de comtés, d’autorités unitaires et de bourgs.
Les autres nations ont leur propre mode de « gouvernement » ou administration en vertu de la dévolution :
•• Écosse : Scottish Parliament et Scottish Executive ;
•• Pays de Galles : National Assembly for Wales et Welsh Assembly Government ;
•• Irlande du Nord : Northern Ireland Assembly et Northern Ireland Executive.
Le contraste est frappant avec l’architecture territoriale française. À la base
se trouve en France la commune, instituée en 1789, qui a succédé aux villes et
paroisses d’Ancien Régime, et qui reçut un début d’autonomie avec la loi du 5 avril
1884. Il existe, aujourd’hui, 36 778 communes (dont 162 dans les départements
et territoires d’outre-mer). À l’échelon supérieur sont 100 départements (dont 4
d’outre-mer), créés par la Révolution, devenus collectivités locales autonomes en
1871. Enfin se trouvent les régions, devenues collectivités territoriales en 1986,
282
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
année de leur première élection au suffrage universel. Il y a en France 26 régions
dont quatre d’outre-mer.
L’autorité locale de base britannique comporte en moyenne plus de 138 000
habitants. Aucune, sauf deux exceptions, n’a moins de 10 000 habitants. La commune en France compte en moyenne 1 648 habitants. Elle est de ce point de
vue dans un rapport de 1 à 84 avec son homologue britannique. Moins de 3 %
des communes françaises ont plus de 10 000 habitants. Plus des trois quarts ont
moins de 1 000 habitants.
Pour comprendre l’organisation territoriale britannique, il faut partir de la base
puis remonter aux échelons supérieurs, à l’inverse de l’habitude française de
partir du sommet d’une pyramide et de descendre jusqu’aux communes via les
régions et les départements suivant des principes de décomposition communs. Il
faut donc abandonner la perspective d’une construction rationnelle descendante
et s’imprégner des complications d’une construction historique longue qui a produit une grande hétérogénéité et des modalités de gouvernement des affaires
locales fortement ancrées dans les traditions qui n’ont commencé à faire l’objet
d’efforts de simplification que depuis la fin du xixe siècle, efforts poursuivis de
nouveau depuis la décennie 1970. L’atmosphère de réforme a été pratiquement
permanente depuis trois décennies, avec des remodelages et fusions de circonscriptions qui créent une certaine instabilité dans le dénombrement exact des unités territoriales. Ce constat vaut spécialement pour l’Angleterre.
2.2. L’organisation locale anglaise
Les comtés
Le comté est la subdivision historiquement première en Angleterre. Ils subsistent sous une forme modifiée. Ils sont souvent divisés eux-mêmes en districts
appelés parfois bourgs (« boroughs »). Chaque district a sa propre administration. Il existe 82 comtés en incluant la Greater London Authority qui est en même
temps une région administrative.
Trois types de comtés existent.
Il y a, en premier lieu, 35 comtés (« shire counties », dont le nom contient en
principe le suffixe shire, avec des exceptions) comportant plusieurs districts et
deux sortes de conseils : le conseil de comté et les conseils de districts. Ce sont
les comtés à deux niveaux d’autorités (« two tier »).
En second lieu figurent les comtés métropolitains, au nombre de six (Greater
Manchester, etc.). Ils sont divisés en bourgs. Le Grand Londres est une « zone
administrative » créée en 1965, qui a reçu un statut de région gouvernementale,
et n’est donc pas formellement un comté.
Enfin, il existe 40 comtés ayant une structure d’autorités unitaires « unitary
authorities », c’est-à-dire un seul niveau d’autorité et un seul conseil.
Les districts et assimilés
Les circonscriptions de base, districts et assimilés, sont au nombre de 354.
Elles sont de quatre types différents. La première catégorie dite des « non-metro-
Synthèse INRETS n° 57
283
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
politan districts » est de loin la plus nombreuse. Il s’agit des districts contenus
dans les comtés à deux niveaux d’autorités.
La deuxième catégorie est formée par les 36 districts ou bourgs des comtés
métropolitains.
En troisième lieu, il y a les bourgs de Londres : 32 London Boroughs. La Cité
de Londres a un statut à part. Elle est administrée par la « Corporation of London »
et n’est pas un borough. Elle comporte un peu plus de 7 000 habitants sur une
superficie d’un mile carré (2,6 km2) au cœur de Londres.
La quatrième catégorie est constituée des « unitary authorities », au nombre
de 47, supérieurs à celui des comtés unitaires, car il existe des autorités unitaires
de base qui ne sont pas des comtés.
Tableau 1. Les subdivisions administratives de l’Angleterre
Régions administratives : (9)
Comtés (82)
Comtés à deux niveaux
Comtés métropolitains
Comtés à un seul niveau
Greater London Districts et assimilés (354)
Districts non métropolitains
Districts, bourgs métropolitains
London boroughs
City of London
Autorités unitaires
35
6
40
1
238
36
32
1
47
Un aperçu historique
1888 : création des conseils de comtés en Angleterre et au Pays de Galles,
1965 : Greater London Authority (GLA),
1972 : définition de comtés et districts métropolitains,
1974 :extension à toute l’Angleterre (sauf GLA) de la structure à deux niveaux
(two-tier),
1990 : rétablissement des autorités unitaires « single tier, Unitary Authorities »,
2004 : projet gouvernemental de réforme régionale (élection d’assemblées
régionales) en Angleterre du nord-est soumis à référendum et rejeté
à une forte majorité.
284
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
Fonctions et pouvoirs
Dans les circonscriptions à deux niveaux, le conseil du comté a la responsabilité de l’éducation, du transport et des routes principales, des services d’incendie,
de la protection du consommateur, des services sociaux. Les conseils de districts
sont responsables des routes locales, du logement, de la qualité environnementale, de la gestion des ordures ménagères, des cimetières, des services de loisirs,
parcs et tourisme. Les autorités unitaires exercent l’ensemble de ces fonctions.
Tous les membres des conseils sont normalement élus. Des « joint boards »
administrent la gestion des services recouvrant plusieurs autorités locales, qui
désignent leurs représentants à ces conseils communs.
Le financement provient d’une combinaison de fonds alloués par le gouvernement central et de la taxe locale, la Council Tax. Cette dernière source est faible
et impopulaire et fait l’objet de débats répétés.
2.3. La gestion du réseau routier
Le réseau routier britannique est divisé en deux grandes catégories, les routes nationales et les autres. Les premières sont d’importance nationale et sont
sous la responsabilité de l’autorité des routes principales de chaque nation. En
Angleterre, il s’agit de la Highways Agency. Toutes les autres routes sont sous la
responsabilité des autorités locales, normalement les conseils de comtés. Ces
aspects sont abordés avec plus de précision ci-dessous.
L’organisation d’ensemble de la gestion du réseau routier laisse apparaître en fait deux niveaux principaux. Le premier, gouvernemental, concerne la
responsabilité globale de la politique des routes qui incombe au ministre des
Transports (Secretary of State for Transport) et au ministère (DfT : Department
for Transport).
Le second niveau est plus opérationnel et recouvre trois groupes d’acteurs ou
agences.
1 – La Highways Agency on Agence des Routes, en Angleterre, à la responsabilité de plus de 5 000 miles d’autoroutes (motorways) et de routes nationales
principales (all purpose trunk roads). Créée en 1994, elle est une agence du DfT.
Elle ne gère pas les dispositifs de contrôle automatique des vitesses (radars)
placés sur son réseau. Ceux-ci sont sous la responsabilité de la police. L’Écosse,
le Pays de Galles et l’Irlande du Nord ont leurs propres agences homologues de
la HA.
2 – Toutes les routes qui ne sont ni « motorways » ni « all purpose trunk
roads » sont sous la responsabilité des « local highways authorities ». Ces dernières sont les organes de décision locaux, habituellement les conseils de comté
dans les circonscriptions à deux niveaux, parfois les conseils de district.
3 – La situation de Londres est particulière. Transport for London (TfL) est
le principal organisme responsable de tous les transports publics londoniens,
incluant les grandes artères. Il est sous l’autorité du maire de Londres.
Synthèse INRETS n° 57
285
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Petit glossaire
All-purpose roadL’opposé d’une autoroute. Une route qui peut être
utilisée par tout véhicule, pas uniquement les véhicules motorisés.
A-roadsRoutes dont le numéro est précédé du préfixe « A ».
À l’origine, la lettre A désignait les routes principales.
Cette signification a disparu.
B-roadsPréfixe des routes de seconde classe reliant des
villages, en rase campagne ; et certaines rues en
zones urbaines.
C-, D-roadsRoutes de moindre importance. �������������������
U-roads : « unclassified ». Préfixes à usage des services des routes.
Trunk roadUne route gérée directement par la Highways
Agency.
Local highway authorityAutorité ayant la responsabilité des « non-trunk
A-Roads » et de toutes les autres routes publiques
(B-roads, etc.). Il s’agit d’un conseil de comté, d’un
conseil métropolitain, d’une autorité unitaire ou de
Transport for London.
3. La sécurité routière
3.1. Les stratégies nationales et locales
3.1.1. Le cadre
Le parlement et le gouvernement, dont le ministère des transports, fixent
le cadre et l’orientation stratégique. Sous le premier aspect, l’introduction des
Local Transport Plans en 2000 marque une étape importante. L’orientation stratégique actuelle de la Grande-Bretagne en sécurité routière est exposée dans
le programme Tomorrows roads safer for everyone publié par le ministère des
Transports en 2000. Ce programme fixe des cibles de diminution des dommages
par accidents de la route à l’horizon 2010. Il prévoit de mesurer la progression
réalisée par comparaison avec les moyennes des années 1994–1998. Les cibles
fixées de diminution de l’insécurité portent sur trois aspects :
–– une réduction de 40 % du nombre de tués ou grièvement blessés ;
–– une réduction de 50 % du nombre d’enfants âgés de moins de 16 ans tués
ou blessés ;
–– une réduction de 10 % du nombre de dommages légers (nombre de personnes légèrement blessées par 100 millions de véhicules par kilomètre).
286
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
La tendance des trois premières années est indiquée sur la figure ci-dessous. Les résultats de 2004 sont respectivement 28, 43 et 20 % au-dessous de
la référence.
Source : DfT (2005) Memorandum to the House of Commons Transport Committee.
Cette stratégie est accompagnée de textes de recommandations, comme New
Directions in Speed Management. A review of policy (ministère des Transports :
DTLR, 2000) et de guides de « best practice », une notion qui a pris une place
centrale dans les actions de sécurité routière en Grande-Bretagne. Cette orientation stratégique est la référence utilisée dans les relations avec les autorités
locales. Elle est la base d’évaluation de la conformité des actions locales.
Un Road Safety Bill a été introduit à la Chambre des Lords en mai 2005 dans
le but de renforcer les actions et l’atteinte des objectifs pour 2010. Il se trouve
encore en discussion en novembre 2005.
Au niveau local, il est difficile de parler d’une « politique locale de sécurité
routière » en Grande-Bretagne. Cette expression n’existe simplement pas au
plan gouvernemental. En revanche, il existe bien, évidemment, des stratégies de
sécurité routière des autorités locales. Celles-ci sont très diverses. Les conseils
locaux disposent d’une large marge d’autonomie et d’initiative dans le choix de
leurs actions sous la condition de leur conformité avec la stratégie gouvernementale évoquée précédemment, pour le respect de laquelle le financement gouvernemental est un puissant levier d’incitation. Le gouvernement incite fortement à la
constitution de partenariats (partnerships). Le contrôle sanction automatisé en est
l’exemple type. Il est traité ailleurs dans ce rapport. D’autres aspects ressortent.
Ils concernent les plans locaux de transport (LTP : Local Transport Plans), les
chargés de mission sécurité routière (RSO : Road Safety Officers) et la notion de
best practice ou meilleure pratique. Ils sont présentés ci-dessous.
3.1.2. Les LTP
Les LTP sont devenus l’outil majeur de la mise en œuvre de la politique intégrée de transport du gouvernement. Leur introduction fut annoncée dans le livre
blanc du gouvernement « A New Deal for Transport : Better for Everyone » publié
en 1998. Ils sont devenus obligatoires en 2000 pour toutes les autorités locales en
Synthèse INRETS n° 57
287
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Angleterre ayant une responsabilité de planification des transports, ce qui exclut
les districts. Londres fait exception. Les 33 autorités locales du Grand Londres
produisent des Local Implementation Plans, proches des LTP, mais soumis à
l’évaluation des services du maire de Londres, non du ministre des Transports
comme le sont les LTP. Cela signifie qu’une centaine d’autorités locales tout au
plus, en dehors de Londres, doivent établir un LTP.
Le LTP doit contenir cinq éléments (Mackie, 2002) :
•• des objectifs cohérents avec la politique gouvernementale des transports et
recueillir un support local ;
•• une analyse des problèmes et solutions envisagées ;
•• une stratégie de long terme ;
•• un programme de mise en œuvre des actions sur cinq ans ;
•• un ensemble d’indicateurs de performance et de résultats.
Les objectifs sont :
•• protéger et améliorer l’environnement construit et naturel ;
•• la sécurité des transports, notamment la sécurité routière ;
•• l’accessibilité aux moyens de transport pour tous, spécialement les nonautomobilistes ;
•• l’intégration de toutes les formes de transport et de l’aménagement du
territoire.
Le LTP fait obligation à l’autorité locale de présenter sa stratégie de sécurité
routière d’une manière détaillée. La stratégie 2010 du gouvernement forme la
référence.
Les premiers LTP furent produits en 2000, pour la période 2001–2005. La
deuxième vague est en préparation et couvrira la période 2006–2011.
Chaque année, les autorités locales doivent produire un rapport d’avancement
(APR : Annual Progress Report) avec un détail poussé faisant apparaître dans
quelle mesure les actions conduites ont contribué aux objectifs locaux affichés et
nationaux. L’évaluation des APR est faite par les neuf offices gouvernementaux
régionaux qui formulent leur avis dans une « settlement letter ». Tous ces documents figurent sur les sites internet des autorités concernées, dans leur quasiintégralité, ce qui témoigne d’une transparence élevée de l’information. L’office
gouvernemental établit une note par rapport à une moyenne. Chaque autorité
peut ainsi comparer son évaluation par rapport aux autres. Les citoyens y ont
accès librement. L’évaluation mobilise une batterie de critères qui font l’objet de
publications gouvernementales. Cela ne va pas sans tensions et débats. Mais,
selon une enquête de PACTS, (2003), l’acceptation de cet outil est largement
majoritaire. Cela rejoint la position favorable exprimée dans ce rapport (chapitre 8) par K. Spence.
La deuxième vague de LTP (« LTP 2 ») couvrira la période 2006–2011. Les
autorités locales doivent soumettre leurs LTP avant le 31 mars 2006. Un niveau
288
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
indicatif de financement gouvernemental auquel les autorités locales peuvent prétendre annuellement leur a été annoncé. Cependant, tous les LTP seront évalués
et notés, ce qui pourra entraîner une variation de plus ou moins 25 % au plus par
rapport au montant annoncé. Les quatre priorités de LTP 2 sont la gestion de la
congestion, la sécurité routière, l’accessibilité et la qualité de l’air.
3.1.3. L’évaluation
Une constante de l’activité de sécurité routière britannique est la référence à la
« bonne » ou « meilleure » pratique, tant dans des publications du ministère des
Transports que dans celles des associations professionnelles et des associations
d’usagers. La bonne pratique a un statut officiel. Le Local Government Act de
1999 en a fait sous le nom de « best value » une responsabilité légale des autorités locales. Celles-ci ont le devoir de démontrer une amélioration des services
qu’elles fournissent par la mise en place de programmes de bonne pratique (Best
Value Reviews ou BVR) portant sur toutes les fonctions locales, sur cinq ans
(2000–2005) renouvelables. Les BVR imposent aux autorités locales l’application
des « 4C » à chacune de leurs fonctions. Il s’agit de :
•• « challenge » : mettre en question et justifier la production d’un service ;
•• « compare » : comparer sa propre performance avec celle d’autres autorités ;
•• « consult » : consulter les habitants et les usagers ;
•• « competition » : faire jouer la concurrence pour une efficacité accrue.
La procédure est soumise au contrôle d’une commission d’audit et ultimement
du ministre. La commission définit des indicateurs de performance. L’indicateur de
sécurité routière repose sur la publication par l’autorité locale des accidents pour
100 000 habitants décomposés en fonction de leur gravité et du type d’usagers.
K. Spence souligne dans le Chapitre 8 le rôle de trois grands instituts professionnels dans la production de guides de bonne pratique et l’organisation de programmes de formation à l’intention de leurs membres. Il s’agit en premier lieu de
l’ICE (Institution of Civil Engineers), qui regroupe plus de 77 000 membres, ensuite
de l’IHIE (Institute of Highway Incorporated Engineers) et de l’IHT (The Institution
of Highways and Transportation). Il vaut la peine de mentionner que les institutions professionnelles d’ingénieurs jouent un rôle original et sont sans équivalent
en France dans la mesure où elles apportent la reconnaissance professionnelle
de l’ingénieur au cours de sa carrière. La reconnaissance comme ingénieur agréé
(chartered engineer) passe par un examen professionnel et suppose une ancienneté pour devenir membre distingué (fellow) par cooptation. Une autre particularité est l’existence d’une filière de formation « ingénieur de la circulation » (traffic
engineer) qui ne semble pas avoir d’équivalent en France (Machu, 1989, p. 8).
Le document de référence du DfT Road Safety Good Practice Guide (2001) rend
explicite le but de la « bonne pratique » : informer et aider les autorités locales
à atteindre les objectifs fixés dans la stratégie pour 2010 du ministère. La même
logique domine dans l’importante étude publiée par le PACTS (Parliamentary
Advisory Council for Transport Safety) sous le titre Best Value, Local Transport
Plans and Road Safety : Listening to and Learning from the Profession (Londres,
Synthèse INRETS n° 57
289
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
2003). L’insistance
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sur la « best practice » ou « best value » surprend l’observateur peu familier des procédures d’évaluation. Or un trait peu niable de l’activité de
sécurité routière en Grande-Bretagne est l’acceptation majoritaire et la diffusion
de l’évaluation comme outil de régulation dans un milieu par ailleurs décentralisé
et actif. Ce caractère trouve des illustrations dans l’affluence aux conférences
professionnelles, dans le climat d’émulation et de concurrence encouragé par les
privatisations, et surtout dans la qualité des magazines spécialisés (notamment le
bimensuel Local Transport Today et l’hebdomadaire Surveyor destiné à un public
de professionnels) dont les rubriques d’offres et de demandes d’emplois témoignent de la présence d’un véritable marché de l’emploi en sécurité routière.
3.2. Les RSO
Les RSO ou chargés de mission en sécurité routière sont devenus progressivement, depuis les années 1950, des acteurs et une institution clés de l’action de
sécurité routière par les autorités locales au Royaume-Uni. Ils forment, aujourd’hui,
un groupe professionnel qui est parvenu à se construire une représentation institutionnalisée double. Ils sont regroupés d’une part au sein du LARSOA (Local
Authority Road Safety Officers’ Association), organisation fonctionnelle représentant les RSO dans la promotion de la sécurité routière au plan national et, d’une
manière générale, dans l’exercice de groupe de pression auprès du personnel
politique et de l’opinion publique. Le LARSOA représente les RSO employés par
les autorités locales dans tout le Royaume-Uni. D’autre part, les RSO ont leur propre organisation professionnelle, l’IRSO (Institute of Road Safety Officers) dont le
rôle s’apparente à celui d’un syndicat, dans la défense des intérêts professionnels
de ses membres. La mission statutaire des RSO est de réduire le nombre et la
gravité des accidents de la route par une triple action d’éducation, de formation et
de publicité et communication habituellement désignée par l’acronyme « ETP »
(Education, Training, Publicity). L’évolution récente, notamment la mise en place
des plans de transport locaux, conduit à adjoindre une quatrième action liée à l’élaboration des stratégies locales de transport. Les LTP et les compétences requises
pour leur conception et leur gestion sont en train de renforcer le rôle des RSO et
de mettre en relief des exigences de qualification et de professionnalisation.
L’IRSO a sa propre revue trimestrielle, In Roads, diffusée à ses membres mais
aussi auprès des autorités locales et gouvernementales et des enseignants. Il
organise des cours et séminaires et une conférence annuelle. La dernière, coorganisée avec le LARSOA et d’autres organismes, eut lieu à Birmingham les
21 et 22 juillet 2005 sur le thème « International Best Practice in Road Speed
Management ».
Les sites internet de ces deux organisations constituent des sources d’information abondantes et tenues à jour. Ce sont : www.larsoa.org.uk et www.irso.org.uk.
L’histoire de l’émergence des RSO en Grande-Bretagne illustre le passage
d’une phase initiale au cours de laquelle un besoin devient peu à peu admis, à
une phase de reconnaissance professionnelle de l’activité visant à répondre à ce
besoin.
290
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
La première guerre mondiale fut le tremplin d’une progression de la fabrication de masse de véhicules motorisés et de leur diffusion après guerre. Les accidents de la route prirent des proportions inconnues auparavant et devinrent un
sujet de préoccupation collective. La ROSPA (Royal Society for the Prevention
of Accidents) naquit à cette époque. Dès les années 1920, beaucoup de forces
de police avaient formé du personnel en vue de diminuer l’insécurité routière et
de conseiller les usagers. C’est dans ces années de l’entre deux guerres que se
dessina une approche de la prévention qui devint identifiée comme le célèbre
« trois E » (« three Es’ » : Enforcement, Engineering, Education). Cette approche reprit vigueur après la deuxième guerre mondiale, mais avec une insistance
croissante sur l’éducation. Des autorités locales prirent l’initiative de recruter des
personnes capables de délivrer un message sur l’éducation à la sécurité routière auprès de leurs populations. Une partie de ces recrutements s’adressa à
des retraités de la police ou de l’armée. Le nombre des recrutements augmenta
suffisamment au cours des années 1950 pour rendre possible la fondation en
1957 de la NARSO, National Association of Road Safety Officers, alors que le
titre d’officer n’avait pas eu jusqu’alors de reconnaissance officielle. Une circulaire ministérielle de 1967 définit pour les « highway authorities » (services des
routes) une obligation d’inclure dans leurs attributions une activité de sécurité
routière, ce qui les conduisit à recruter du personnel qualifié et à dégager des
moyens de financement.
En 1971, le NARSO se transforma en institut professionnel sous le nom d’IRSO.
La loi sur la circulation routière de 1974 (Road Trafic Act) déjà évoquée marqua
une étape importante. (K. Spence, chapitre 8). Elle donna aux « Local highway
authorities » la responsabilité de programmes d’enseignement, de formation et de
publicité de la sécurité routière connus sous le sigle « ETP » (Education, training
and publicity). Pour la première fois, la mission des RSO recevait un statut légal.
C’est la base sur laquelle le rôle moderne du RSO s’est développé, alors que
jusque-là, comme l’écrit K. Spence, le rôle de RSO « avait reçu le contenu que lui
donnèrent ceux qui furent recrutés initialement et s’était développé en suivant la
ligne de moindre résistance ».
Aujourd’hui, un décompte des équipes de sécurité routière établi d’après la
liste publiée sur le site du LARSOA fait apparaître un total de 165 « road safety
teams » pour le Royaume-Uni. Chaque équipe comprend à sa tête un RSO ou
son équivalent (Road Safety Manager) et d’autres RSO ou assistants, en nombre
variable suivant les équipes.
3.3. La police et les principes de répression
3.3.1. La police
Une seule catégorie de police a dans ses attributions la circulation routière et
les fonctions afférentes. Le Royaume-Uni comprend 52 forces locales de police
(« Police Authorities ») : 39 en Angleterre, quatre au Pays de Galles, huit en
Écosse et un service de police en Irlande du Nord. La police est sous l’autorité
Synthèse INRETS n° 57
291
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
du ministre de l’Intérieur (Home Secretary). L’ACPO (Association of Chief Police
Officers), fondée en 1948, joue un rôle actif. Elle regroupe les responsables des
autorités de police d’Angleterre, du Pays de Galles et d’Irlande du Nord. Il est
souvent reproché à la police de ne pas faire une priorité de la sécurité routière. La
gestion des radars est sous sa responsabilité.
Le système britannique de la police se caractérise donc par une forte décentralisation des forces de police. Il n’existe pas de police nationale à l’instar de celle
existant en France, mais seulement des forces locales placées sous la responsabilité hiérarchique du ministère de l’Intérieur et la responsabilité fonctionnelle
d’autorités élues.
Le Police Act de 1964 a fixé à 43 le nombre de forces de police pour l’Angleterre et le Pays de Galles (L’Écosse a sa propre autonomie en la matière).
Chaque comté ou groupement de comtés a sa force de police, seule responsable
dans son ressort de compétences. Les responsabilités en matière de police en
Angleterre et au Pays de Galles sont réparties entre trois organes : le chef de la
police et l’autorité de police pour chaque force de police, et le ministre de l’intérieur au niveau central (C. Machu, 2004).
Le chef de la police (chief constable) se trouve à la tête de chaque force.
Choisi par l’autorité locale de police sur une liste présentée par le Home Office
(ministère de l’Intérieur), il dispose d’une grande autonomie opérationnelle. Il ne
peut être démis que par le ministre de l’Intérieur.
L’autorité de police est chargée d’assurer la gestion financière de la force de
police et de contrôler l’utilisation du budget par le chef de la police. Elle est constituée de deux tiers de conseillers locaux et d’un tiers de magistrats. Elle se réunit
tous les mois pour entendre le rapport du chef de la police sur les activités de
sa force de police et sur la façon dont sont poursuivis les objectifs qui lui ont été
assignés.
Au niveau central, la responsabilité de la police incombe au ministre de l’Intérieur. Il peut intervenir pour définir les règles de nomination, d’avancement et de
cessation d’activité, la discipline, l’uniforme, les horaires et la rémunération.
Il est assisté par des Home inspectors of constabulary qui inspectent chaque
année les forces de police. Ce contrôle a pour but d’apprécier l’application des
directives ministérielles et l’adéquation entre les moyens financiers dégagés et
les résultats obtenus. Le Home Office contribue au budget des forces de police à
hauteur de 51 %, le reste étant financé par le niveau local.
3.3.2. Un regard sur le système répressif (C. Machu, 2004)
Il convient de remarquer que, si le Code de la Route français (et Code Pénal
relatif au code de la route) punit en fonction du résultat, la législation britannique
réprime en premier lieu en fonction d’un comportement. Le droit pénal anglais
connaît deux infractions spécifiquement destinées à punir les comportements
dangereux, même s’il n’en est pas résulté d’accident, alors que le code de la route
ne connaît que la notion de maîtrise du véhicule.
292
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
L’infraction dite de dangerous driving
Prévue par la loi de 1988, il s’agit de la plus grave des deux infractions
puisqu’elle est passible du tribunal correctionnel.
Littéralement, le texte prévoit qu’ « une personne est considérée comme conduisant dangereusement si la manière dont elle conduit est très en deçà de ce qui est
attendu d’un conducteur compétent et prudent, sachant qu’il est évident pour un
conducteur compétent et prudent qu’une telle conduite est dangereuse ».
Cette infraction permet, en dehors de tout accident, de réprimer divers comportements comme par exemple :
•• la conduite avec un véhicule en très mauvais état ;
•• la conduite par un conducteur dont l’état de santé au moment donné est
incompatible avec la maîtrise du véhicule (diabétique en crise d’hypoglycémie, personne sous l’influence d’une drogue) ;
•• la conduite d’un véhicule surchargé ou qui tire une remorque mal arrimée ;
•• la vitesse très excessive : comme 180 km/h sur une autoroute déserte et
par temps sec où la vitesse est normalement limitée à 115 km/h, les juges
considérant qu’un obstacle peut survenir à tout moment.
Cette qualification est habituellement utilisée pour réprimer les comportements des jeunes conducteurs, fréquents en Grande-Bretagne comme en France
(exemple : accélération brutale en agglomération) ou encore les dépassements
dangereux. C’est cette qualification qui était retenue pour ceux qui conduisent
tout en utilisant un téléphone mobile.
Ce comportement est punissable d’une amende, d’un emprisonnement jusqu’à
deux ans et de l’annulation du permis de conduire. Si le comportement qualifié de
dangerous driving a causé un décès, le conducteur sera alors poursuivi pour une
infraction spécifique dite de « causing death by dangerous driving ».
L’infraction dite de careless driving
Prévue par la loi de 1988, modifiée par la loi de 1991, cette infraction punit
celui qui conduit un véhicule terrestre à moteur, sur une route ou endroit ouvert au
public « sans l’application et l’attention requises ou sans considération suffisante
pour les autres usagers ».
Alors que l’infraction précédente suppose que le comportement dangereux ait
pu entraîner des blessures physiques ou des dommages matériels, il suffit, ici,
que l’action cause un risque par référence à une conduite standard d’un conducteur « raisonnable, prudent et compétent ».
La jurisprudence est très fournie en la matière. Parmi les agissements réprimés sous cette qualification, on peut noter :
•• le conducteur qui ne s’est pas arrêté à temps parce qu’il s’est endormi ;
•• le changement de direction sans précaution ;
•• l’annonce d’un changement de direction finalement non exécuté ;
Synthèse INRETS n° 57
293
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
•• le conducteur qui lit le journal ;
•• le conducteur qui roule dans une flaque d’eau ou arrose les piétons.
Ces infractions sont du domaine de l’équivalent de notre tribunal de police.
La question immédiatement soulevée est de savoir comment de telles infractions peuvent être constatées, puisqu’elles ne surviennent évidemment pas toujours sous le regard d’un policier.
Premièrement, il convient de garder à l’esprit que la procédure pénale britannique est accusatoire, et qu’en conséquence les preuves ne résultent pas d’un
procès-verbal rédigé par la police (lequel ferait foi sans autre forme de procès)
mais des déclarations à l’audience des différents témoins. En Grande-Bretagne,
la parole du policier a la même valeur que celle de n’importe quel citoyen.
Pour cette raison, les usagers de la route se considèrent comme autorisés,
et même requis, de signaler les comportements dangereux dont ils sont les
victimes ou auxquels ils ont assisté. Si l’enquête permet de réunir des preuves suffisantes qu’une manœuvre dangereuse a bien eu lieu, son auteur sera
poursuivi, quand bien même les faits n’ont pas été vus par un policier. De telles
dénonciations se font dans un pays qui n’a pas connu l’occupation, et de culture
protestante.
Deuxièmement, une partie des effectifs de la police locale est affectée à la
surveillance du réseau routier et patrouille avec des véhicules banalisés dont la
plupart sont équipés de caméras. Ces vidéos sont facilement utilisées à charge.
Elles sont également reprises pour sensibiliser les automobilistes à la sécurité
routière dans des émissions de télévision dont la plus connue est POLICE STOP
sur la chaîne privée SKY.
En Grande-Bretagne, la sanction a souvent un double visage, à la fois de
répression, très sévère, mais aussi d’éducation, voire de rééducation. De nombreuses peines de substitution sont proposées par les magistrats.
4. Conclusion
Ce chapitre a permis de mettre en relief quatre aspects. Le premier, peu
perceptible, concerne la dynamique des relations entre niveaux local et central en Grande-Bretagne. Le niveau central vient historiquement en complément
du niveau local, à l’exact opposé du cas français décrit dans le chapitre 9. En
second lieu, et en quasi-corollaire de la propriété précédente, la notion française
de « politique locale de sécurité routière » n’est pas transposable telle quelle à
la Grande-Bretagne, laquelle connaît d’abord des stratégies locales de sécurité
routière. Un troisième trait est la densité de l’activité de sécurité routière et sa
diffusion dans la société. Il existe, enfin, plusieurs dispositifs qui caractérisent
d’une manière forte l’activité britannique de sécurité routière : les plans locaux
de transport, l’intégration contrainte qu’ils impulsent, l’attention à l’évaluation, le
climat d’émulation, enfin la place de la professionnalisation et des road safety
officers.
294
Synthèse INRETS n° 57
Organisation et acteurs de la sécurité routière en Grande-Bretagne. Les aspects saillants
Références
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2001.
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Committee www.dft.gov.uk, 2005.
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C. Machu Regard sur l’ingénierie de la circulation en Grande-Bretagne. Revue
générale des Routes et des Aérodromes n°668, novembre, 1–8. 1989.
C. Machu Compte rendu de mission en Grande-Bretagne pour la recherche sur
« Les R4 vitesse français et britannique. La vitesse d’abord », 2004.
A. Mackie United Kingdom dans Fleury D. (ed) : A city for pedestrians : Policymaking and implementation. Cost Action. C6-EU : Luxembourg, 2002.
PACTS Best Value, Local Transport Plans and Road Safety : Listening to and
Learning from the Profession. London. www.pacts.org.uk, 2003.
A. Ziller Administrations comparées. Paris : Montchrestien, 1993.
Synthèse INRETS n° 57
295
Conclusion de la deuxième partie
Robert Delorme
Nous proposons en conclusion de cette deuxième partie une synthèse des
enseignements obtenus sur les trois thèmes du contexte d’action, de l’action et
des acteurs.
Des contextes fortement contrastés
Rappelons que les contextes d’action portent sur l’environnement de l’action de
sécurité routière susceptible d’exercer une influence décelable sur cette dernière.
Le contenu substantiel de cet environnement pertinent peut difficilement être identifié par un raisonnement abstrait et déductif. C’est à ce point que la comparaison
internationale peut permettre d’identifier les traits les plus robustes de différentiation et de similitude et, partant de cela, orienter le questionnement sur les mécanismes et les cohérences dynamiques dans lesquels s’inscrivent ces traits.
À ce stade, au-delà des différences structurelles, géographiques, de densité de
population, et autres, l’examen des situations britannique et française fait ressortir
quatre aspects majeurs décelés dans les chapitres sur la Grande-Bretagne et qui
se trouvent renforcés par le chapitre sur la France. Le premier aspect concerne
la dynamique des relations entre niveaux central et local de l’action publique.
En Grande-Bretagne, le niveau central vient historiquement en complément du
niveau local, à l’inverse de la situation française. Cette antériorité britannique du
niveau local a pour conséquence une présence intense et, à certains égards,
prédominante, dans le cas de la gestion de la vitesse, des stratégies locales de
sécurité routière. C’est le deuxième aspect. La notion française de « politique
locale de sécurité routière » telle qu’elle a été décrite dans le chapitre 9 n’est pas
transposable à la Grande-Bretagne. L’antériorité historique « du local », le poids
des stratégies locales et l’ancienneté relative des préoccupations de sécurité routière en Grande-Bretagne se conjuguent et donnent lieu à une activité de sécurité
routière dense et répartie entre niveaux de gouvernance qui contrastent avec
une « politique locale » française sous l’emprise d’impulsions venant du niveau
central. C’est la troisième différence majeure. Enfin, les conséquences de ces
aspects se lisent dans une suite de dispositifs et de propriétés qui caractérisent
d’une manière forte l’activité britannique de sécurité routière, au-delà des objectifs du plan national : plans locaux de transport, intégration contrainte d’acteurs
différents impulsée par les précédents, place déterminante de l’évaluation des
actions et du climat d’émulation ainsi créé, importance de la professionnalisation
et des road safety officers. L’absence de traits équivalents en France, en niveau
ou degré, s’impose à l’examen.
Synthèse INRETS n° 57
297
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Contrôle automatisé de la vitesse : l’empreinte des contextes
Le choix du contrôle automatisé de la vitesse comme expérience à laquelle
nous nous intéressons pour la comparaison n’a aucune signification normative
sur le bien-fondé ou non de ce type d’action et de la place qu’elle a prise dans
le dispositif global de régulation de la vitesse. Simplement, il s’agit d’un dispositif
récent et important, dont les caractéristiques techniques sont pratiquement similaires, et qui se prête en principe aisément à l’examen comparé de sa mise en
œuvre, de sa gestion, et de ses effets. Dans les deux pays, le contrôle automatisé
a conduit à des réductions significatives de la vitesse et de l’accidentologie, indépendamment de variations dans les rythmes de réduction qui justifieraient une
analyse future calée sur une plus longue durée de l’expérience. Cependant, la
mise en œuvre institutionnelle diffère entre les deux pays. La dimension locale du
système de contrôle, malgré l’expertise à un niveau national, constitue un aspect
essentiel de l’expérience britannique, que complètent la transparence de l’information, le souci de la communication et l’attention à son autofinancement.
La tradition française est marquée par un choix technologique spécifique en
phase avec une tradition centralisatrice. Force est de constater que l’information
sur les critères d’implantation, sur les aspects financiers et sur les résultats obtenus est relativement opaque. Cela peut être dû à la jeunesse de l’expérience. La
dimension technocentrée n’en demeure pas moins le trait marquant du dispositif,
en contraste avec le caractère réparti du dispositif britannique. Ces traits expriment une cohérence avec leurs contextes respectifs.
Les acteurs : contrastes et défis communs pour les ONG
Deux groupes d’acteurs de la sécurité routière ont fait l’objet d’une attention
spécifique, les acteurs publics et deux ONG d’importance significative.
De nouveau, le contraste est net pour les acteurs publics, et l’empreinte des
contextes sur la nature des acteurs clés dans les deux pays semble peu faire de
doute. D’un côté, le road safety officer s’impose comme le professionnel clé de
la sécurité routière au niveau local en Grande-Bretagne. De l’autre côté s’impose
une hiérarchie allant du délégué interministériel à la Sécurité Routière au préfet,
dont le rôle clé a été souligné, au chef de projet et au coordinateur. Les chargés
de mission des conseils généraux restent peu nombreux.
Le contraste est moins net pour les deux ONG étudiées, RoadPeace et la Ligue
contre la violence routière (LCVR). Certes, des différences existent. La LCVR est
reconnue en France et « visible » au niveau central grâce à une action de communication relayée par les médias nationaux. En Grande-Bretagne, RoadPeace a
une faible reconnaissance institutionnelle et se concentre sur un lobbying revendicatif. Cependant, dans les deux cas, les effets de l’action des ONG dans la mise
sur l’agenda politique de questions portées par elles sont diffus et limités. Cela
suggère que, contrairement à une idée assez répandue, l’influence des ONG britanniques sur les autorités politiques n’est peut-être pas plus effective que celle
des ONG françaises sur les leurs. Cette question reste peu documentée et mériterait une recherche approfondie.
298
Synthèse INRETS n° 57
Conclusion de la deuxième partie
L’étude de D. Chabanet suggère fortement que les rapprochements ou alliances avec des acteurs tiers (chercheurs, experts, consommateurs, usagers de la
route) sont un aspect essentiel pour l’efficacité des actions menées dans les deux
pays et constituent une sorte de défi commun pour les ONG.
Synthèse INRETS n° 57
299
Synthèse - Deux régimes
de régulation contrastés et
le facteur PIE
Robert Delorme
Synthèse INRETS n° 57
301
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
1. Introduction
L’objet de cette synthèse est de dresser un bilan des résultats obtenus.
Chacune des parties précédentes de ce livre a déjà donné lieu à ses propres
résultats. L’examen des évolutions récentes de la vitesse et des risques associés
dans les deux pays, réalisé dans la première partie, a abouti à insister sur les six
aspects suivants :
•• des vitesses moyennes plus basses en Grande-Bretagne malgré des taux
d’infraction aux limitations de vitesse similaires ;
•• un rattrapage partiel par la France en matière de risque d’être tué sur la
route, attribuable à la baisse des vitesses ;
•• un écart sur le champ dissuasif des radars, global en France, limité au
réseau urbain en Grande-Bretagne ;
•• une similitude dans les deux pays des déterminants du respect des limites
de vitesse ;
•• un contrôle–sanction des excès de vitesse portant sur l’ensemble des
conducteurs en France, ciblant les conducteurs dangereux en GrandeBretagne ;
•• une montée en puissance rapide du dispositif en France, plus progressive en
Grande-Bretagne, à niveaux semblables d’acceptabilité par la population.
La deuxième partie a concerné les acteurs et stratégies d’action de la sécurité
routière proprement dite. Elle a permis de mettre en relief trois aspects :
•• des contextes d’action français et britannique nettement contrastés ;
•• une empreinte significative de ces contextes sur le contrôle automatisé de
la vitesse ;
•• un contraste net entre acteurs publics de la sécurité routière français et
britanniques, mais moindre, avec des défis communs, entre les deux organisations non gouvernementales retenues dans l’enquête.
À ce stade se pose la question de savoir si nous pouvons nous satisfaire de
ces résultats, aussi substantiels soient-ils, pour l’action de sécurité routière en
France. L’hypothèse générale de travail sous-tendant cette recherche était, et
reste, que la comparaison entre deux pays A et B, France et Grande-Bretagne ici,
est un moyen d’améliorer la connaissance sur A et B, en donnant naturellement
la priorité au cas français ici. Sommes-nous arrivés au terme de cette comparaison ? La réponse est clairement négative. Il reste à élaborer une modélisation,
une représentation structurée et unifiée commune par rapport à laquelle les deux
situations nationales pourront être lues et interprétées. Erik Hollnagel, dans son
livre Barriers and Accident Prevention (2004) souligne que la manière dont l’insécurité et les accidents sont perçus détermine la façon de répondre et d’agir. La
modélisation et la prise de conscience des différences de perception d’une situation donnée au gré des différences de modélisation sont des aspects essentiels.
Sur une situation aussi compliquée que celle présente dans cette recherche, il
Synthèse INRETS n° 57
303
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
convient de construire une modélisation permettant de comprendre la nature de
la situation avant d’envisager de donner leur place aux liens de causalité entre
aspects spécifiques locaux à l’intérieur de ce cadre d’ensemble. Dans un contexte
différent, c’est une idée similaire qu’exprime le sous-titre du livre de Hollnagel :
« Ou comment améliorer la sécurité par la compréhension de la nature des accidents plutôt que par la découverte de leurs causes ».
Il nous faudra en un premier temps recoller les morceaux de l’approche nouvelle que constitue cette recherche. Des chercheurs d’expertises diverses ont
accepté d’entrer dans un exercice nouveau et risqué pour eux, reposant sur la
perspective d’une théorisation en prise sur le concret qui se construirait après
l’obtention des résultats, par construction partielle, de leurs propres travaux. Le
cadre théorique de la « Complexité effective », développée par l’un des initiateurs de cette recherche, offre cette perspective unificatrice. Ces aspects sont
présentés dans la section suivante. La caractérisation du régime de régulation
R4 en découle et permet de comparer les situations contrastées française et britannique, dans la section 3. Enfin, cette modélisation permet de dégager une
différence profonde entre les deux pays qui réside dans un aspect spécifique
des contextes d’action des acteurs publics, que nous appelons le facteur PIE
(Professionnalisation, Intégration, Évaluation) dans la dernière section.
2. Une approche nouvelle
2.1. Le chemin parcouru
Il apparaît avec le recul que le matériau élaboré dans les deux parties précédentes recouvre une séquence d’étapes qui part de l’observation de statistiques
de tués comme produit de la circulation routière et de l’activité de sécurité routière
via l’évaluation du risque lié à la vitesse. Cette séquence se prolonge en considérant ces dernières comme le produit de comportements d’acteurs de la circulation et de la sécurité routières. Les acteurs agissent eux-mêmes dans le cadre
d’une organisation des activités. En remontant d’un pas supplémentaire, cette
dernière se déploie dans un cadre institutionnel de lois et de règlements. Le point
ultime de cette remontée est dans le passage aux données d’ordre géographique,
de réseau de transport, de structure de trafic, d’orientation de la politique des
transports, voire aux aspects culturels, tous susceptibles d’être sources de différentiation entre les deux pays. Tous ces aspects ont été évoqués dans les deux
parties, mais d’une manière non linéaire qui, à ce stade, demande à être mise en
perspective et structurée, ce qui est fait dans le tableau ci-dessous.
304
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
Tableau 1 : un aperçu d’ensemble des aspects traités
dans les deux premières parties
Institutions Organisation
CR, SR
SR
Première
partie
Deuxième
* (CR, SR)
partie
CR : circulation routière Acteurs
CR, SR
Activité
de SR
* (CR)
*
* (SR)
Circulation
routière CR
Risque
vitesse
Tués
*
*
*
*
SR : sécurité routière
En simplifiant, le raisonnement sur la remontée de « l’aval » des tués jusqu’à
« l’amont » des institutions passe par cinq étapes intermédiaires successives, en
colonnes du tableau. Les aspects propres aux étapes particulières abordés dans
chacune des parties sont symbolisés par le signe « * ». Une case vide signifie
l’absence de traitement. La première partie porte sur les tués, la circulation et le
risque, et sur les acteurs de la circulation routière (attitudes et comportements des
conducteurs abordés dans le chapitre 5). La deuxième partie s’adresse au versant
allant des institutions aux acteurs de la sécurité routière (acteurs publics, ONG) et
à l’activité de sécurité routière (sous l’angle du contrôle–sanction automatisé).
À ce stade, la présentation précédente suggère qu’une couverture large du
problème a été réalisée en associant interdisciplinarité et analyses quantitative et
qualitative. Ces contributions restent toutefois simplement juxtaposées. La tâche
qui demeure est d’en construire une synthèse structurée et opérationnelle. Mais
avant d’envisager une synthèse, il faut la construire et répondre à la question de
la méthode de modélisation. Comment se pose le problème de la méthode et
comment la méthode de « Complexité effective », symbolisée par CXE, apporte
une réponse sont les questions abordées ci-après.
2.2. Modéliser, mais comment ?
Rappelons une vérité simple : les tués par accidents de la route sont les produits d’actions de circulation et de sécurité routières. Sans la circulation routière, il
n’y aurait pas de tués. Sans la sécurité routière, il y en aurait plus. Au-delà de cette
évidence première, la nature du lien entre les « produits » observés (les nombres
de tués) et les « processus » de production de ces effets divise les chercheurs.
Selon E. Hollnagel déjà cité, trois positions théoriques se présentent dans la
modélisation des accidents. La première porte sur des modèles séquentiels décrivant l’accident comme une séquence d’évènements se produisant dans un ordre
spécifique. L’identification de liens bien définis conduit à la définition de causes
précises. En second lieu, des modélisations épidémiologiques se sont développées à partir des années 1980. Elles décrivent l’accident par analogie à la diffusion
d’une maladie, comme le produit d’une combinaison de facteurs, certains étant
manifestes, d’autres latents, qui parviennent à exister et opérer ensemble dans
l’espace et dans le temps (ibid. p. 54). Propagateurs, barrières de défense, condi-
Synthèse INRETS n° 57
305
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
tions latentes et comportements à risque ou déviants sont parmi les notions clés
de cette perspective. Le but de l’action de sécurité qui s’en dégage est de renforcer les défenses alors que dans la conception séquentielle, il s’agit principalement
d’éliminer ou de contenir les causes. La modélisation systémique est le troisième
type. Elle place l’accent sur la marche d’ensemble d’une activité à risque conçue
comme un système, plutôt que sur des liens de cause à effet ou des facteurs
épidémiologiques (ibid. p. 59). Il en découle une conception de l’accident comme
phénomène émergent au niveau du système, mais non prévisible et non déductible de l’observation du fonctionnement des parties constituantes du système. Les
étapes ou phases qui ont conduit à l’accident sont conçues plus comme parties
d’une totalité que comme évènements successifs et distincts. La concentration de
l’attention sur des liens de causalité ou des facteurs privilégiés n’est donc plus de
mise. Elle se porte cette fois sur la compréhension du fonctionnement du système
plutôt que sur des mécanismes internes particuliers (défaillances, erreurs, etc.)
ou des liens de causalité puisque les modélisations qui leur correspondent ne
peuvent pas rendre compte de la dynamique des interactions et de la non-linéarité de leurs effets (ibid., p. 65). Les modélisations systémiques des accidents
reposent sur la reconnaissance d’une variabilité de performance d’un système
attestée par l’expérience après la survenance d’un accident. Cette variabilité est
inévitable. Son élimination est illusoire, d’autant plus qu’une certaine variabilité
est nécessaire afin de permettre l’apprentissage par les opérateurs et de maintenir la vigilance. Le contrôle suppose donc de pouvoir distinguer une variabilité
nécessaire et la variabilité potentiellement dangereuse.
Cette distinction entre trois représentations des accidents n’a pas pour but
de démontrer que l’une est supérieure aux autres car chacune peut avoir sa propre pertinence dans un contexte spécifique. Cependant cette distinction met en
évidence l’existence de conceptions différentes qui, surtout, ont des implications
différentes sur les actions de sécurité et de prévention à entreprendre. La manière
dont l’insécurité et les accidents sont perçus détermine la façon de répondre et
d’agir. C’est ici que cette façon de typologiser les représentations atteint une limite
car sa conséquence logique devrait être d’expliquer comment peut se faire le
choix d’une modélisation plutôt qu’une autre, ou les autres, ou bien comment
les combiner. Cet aspect est crucial car l’action de sécurité réalisée en dépendra
directement. Or, cet aspect déterminant de la connaissance pour l’action est habituellement laissé sous silence. Il est nécessaire de disposer d’une représentation
ou modélisation de la manière d’agir en présence d’options dont il est reconnu
qu’aucune n’est a priori supérieure aux autres. Sans cela, doit-on s’en remettre
à une préférence personnelle pour une approche plutôt qu’une autre, ou bien à
un éclectisme flottant de bricolage empirique, ou encore à un mimétisme de ce
qui se fait habituellement dans la branche d’activité ? C’est le constat de ce problème d’irréductibilité à une solution satisfaisante qui crée une situation complexe
à l’origine des travaux sur la « Complexité effective ». Ces travaux aboutissent
à concevoir un cadre d’aide à la décision et à l’action qui part de la situation faisant problème en laissant ouvertes les options entre modélisations spécifiques.
Indépendamment du contenu substantiel du cadre, qu’il serait hors de propos de
306
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
détailler ici, c’est le fait qu’un cadre structurant la modélisation soit enfin disponible qui importe. La notion de R4, le Régime de Régulation du Risque Routier,
en découle directement. Le R4 offre une représentation qui subsume les modélisations particulières dans un cadre structuré. Son apport est de structurer une
situation problématique mal structurée en son absence.
2.3. Le regard de la « Complexité effective » (CXE)
« Complexité effective » ou CXE est l’expression abrégée de « complexité profonde effective », la formulation proposée dans des travaux récents et en cours
(Delorme, 2003, 2005, 2008) pour désigner à la fois une difficulté insurmontée à
résoudre une situation problématique (profondeur) et sa conversion en un processus d’aide à la décision et à l’action dans un cadre recomposé (effectivité). La
CXE désigne d’abord la difficulté, irréductible à un degré de réduction satisfaisant
avec les outils et méthodes courants, que peut présenter un problème créé par
une situation cognitive. Cette dernière n’est pas donnée. Elle résulte d’un faisceau de facteurs exprimant le degré de difficulté d’une opération compte tenu
d’un objet, d’un projet (niveau d’aspiration), des ressources disponibles (état des
connaissances) dans un domaine précis. Il y a complexité, en un sens profond,
lorsque les connaissances disponibles dans un domaine ne permettent pas de
traiter de manière satisfaisante un problème. Ces éléments définissent la situation cognitive. La recherche présentée dans ce livre est née d’une situation de ce
type créée par l’absence de réponse satisfaisante à la question des sources de
l’écart d’insécurité routière entre la France et la Grande-Bretagne.
Si l’espace disponible ne permet pas de présenter le procédé de la conversion en aide à la décision, ses implications peuvent toutefois être condensées
en une séquence de dix moments (Encadré). Ces moments du processus sont
en fait reliés circulairement en boucles par le retour possible sur un ou plusieurs
moments antécédents et de nouveau un cheminement se bouclant sur une validation et un éventuel retour, etc. La CXE exprime prioritairement une posture épistémique, relative à la connaissance (moments 1, 2 et 3) ayant des implications
ontologiques (moment 4), théoriques (moment 5) et méthodologiques (moments
6, 7, 8, 9 et 10). Ces moments font système et font de la CXE un système d’aide
à la décision et à l’action à la fois autoréflexif et objectal, concernant à la fois l’observateur et le monde observé.
Synthèse INRETS n° 57
307
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
La « Complexité effective » en dix moments
1. Reconnaissance de situation. Caractère profondément complexe ou non de la situation créée
par le problème. Complexité profonde définie comme irréductibilité à un niveau ou degré de
réduction « satisficing » (satisfaisant pour un niveau d’aspiration donné).
2. Saut autoréflexif. Renoncement à l’exclusivité du cadre classique. Recherche d’un cadre
recomposé si la situation est profondément complexe. Plusieurs formes d’irréductibilité. Si
perception d’un enchevêtrement non décomposable de manière satisfaisante, alors représentation
initiale du phénomène comme une composition de constituants, non déductible (pas de déduction
satisfaisante) ni accessible par extension à partir d’un certain nombre de cas (pas d’induction
satisfaisante) car singularité a priori du phénomène.
3. Abduction et boucle récursive (PG,P). Méthode d’investigation d’un cas singulier perçu comme
le résultat d’un processus d’engendrement suivant un déroulement ou règle entre un principe
génératif PG et le résultat ou produit P. Le produit est observé ou « connu ». La tâche est de trouver
ou construire un PG qui, suivant une règle de production, a P comme résultat possible.
4. Hypothèse ontologique. Le monde (W) comme processus ouvert auquel appartiennent le
phénomène étudié (W1) et l’étude du phénomène (W2).
5. Modélisation théorique. Objet modélisé comme composition de traits a priori non séparés mais
différenciés par la modélisation. Priorité à PG. Recherche de régularités, régime d’engendrement
de P (régime d’action en sciences humaines et sociales).
6. Priorité à l’investigation et à l’expérience empiriques comme bases de la théorisation.
7. Variation. Produire de la variation du et dans le phénomène étudié, dans le temps et dans
l’espace, en comparaison, comme moyen d’information et de connaissance de ses propriétés.
8. Interactivité et intégrativité transdisciplinaires. Croiser les perspectives disciplinaires d’une
manière interactive et intégrative.
9. Construction. Élaboration d’une hypothèse de structuration. Construction d’un cadre recomposé
subsumant le cadre initial.
10. Validation. Mise à l’épreuve : cohérence, expérience par mise en œuvre. Retour éventuel sur
un ou plusieurs moments antécédents puis validation…
La CXE part toujours d’une situation problématique initiale irréductible qui
invite à se demander si le blocage ne vient pas de l’absence de prise en compte
par les outils classiques disponibles d’aspects pertinents pour le problème. Elle
consiste toujours en un élargissement du cadre initial, élargissement du champ
de vision et recomposition à partir de laquelle une réduction est recherchée.
Mais le résultat réduit ou simplifié ainsi obtenu après complexification n’est pas
le même que celui de la simplification obtenue à partir d’un objet pris comme
donné dans le cadre spontanément disponible, non complexifié, offert par les
méthodes classiques adaptées à des situations cognitives certes problématiques, mais non complexes, c’est-à-dire réductibles à des degrés de réduction
satisfaisants.
La CXE ne peut donc pas prendre appui sur un schéma déductif initial, ni sur
un cadre d’induction compte tenu de la singularité intrinsèque de la situation. La
référence à un système ou à une « théorie » des systèmes –– des « systèmes
de sécurité routière français et britannique » –– n’apporte également pas d’aide
initiale car ce qui « fait système » est à construire dans et par l’investigation et
ne saurait résulter d’une connaissance spontanée d’une notion aussi peu théorisée et floue. Enfin, la méthode qui consisterait à se satisfaire de l’éclectisme
308
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
résultant de la juxtaposition de points de vue quantitatifs et qualitatifs produits
par des démarches séparées sans intégration dans un schéma unifié resterait
un éclectisme flottant et trompeur car susceptible de faire passer pour perspective d’ensemble ce qui ne peut rester qu’une sommation de points de vue
séparés.
La CXE est transdisciplinaire, interactive et intégrative tant dans son déroulement que dans la validation des résultats. Elle est prioritairement abductive,
orientée sur la recherche en profondeur, sur le principe ou processus génératif
d’abord, plutôt que sur le résultat ou produit du processus. Cela n’exclut pas, dans
l’éventualité où la progression de l’investigation ferait apparaître localement de
la non-complexité, de recourir pour ces aspects locaux à la démarche classique.
Dans un domaine consistant en activités et actions créant une situation complexe,
il n’y a donc aucune surprise dans l’orientation de la recherche sur des contextes
d’action, c’est-à-dire les processus selon lesquels s’actualisent les produits que
sont les actes de circulation et de sécurité routières, et les accidents qui en sont
aussi les produits.
Le caractère intégratif de la CXE est essentiel et justifie une explication.
En effet, si la différence entre la CXE et la perspective strictement analytique
est sans ambiguïté, la différence avec l’approche systémique semble moins
évidente. Comparons ces trois approches. Une expression maîtresse de la
démarche suivie en CXE est sans doute celle de « modélisation intégrative ».
Elle se comprend mieux par la comparaison avec les démarches dont elle se
distingue, l’approche par les systèmes et l’approche analytique. L’approche
par les systèmes, dès ses origines, a été présentée par ses fondateurs (L. von
Bertalanfly, A. Rapoport entre autres) comme une voie palliant des limitations
de l’approche analytique. Il est hors de propos d’entrer dans une comparaison détaillée. Mais il existe une manière simple de présenter ces différences,
en prenant appui sur une phrase emblématique des systémistes : « Penser
globalement, agir localement ». Son équivalent résumant la démarche analytique pourrait alors être : « Penser localement, agir localement ». Mais ce
serait manquer un échelon intermédiaire sur lequel la devise systémique est
silencieuse, mais que la démarche analytique embrasse totalement : entre la
pensée et l’action, il y a la théorisation, modélisation ou représentation, tous
termes équivalents. La force de la démarche analytique est de reposer sur
une modélisation analytique unifiée et structurante. La faiblesse de la démarche systémique est l’absence d’une modélisation de statut analogue. C’est la
source de la critique commune à la démarche systémique. Le caractère confus,
imprécis et non stabilisé de l’approche systémique naît dans ce manque, qui
la fait dériver immanquablement vers la modélisation analytique lorsqu’il s’agit
de systèmes techniques, et laisse un vide béant quand il s’agit de systèmes
sociaux ou sociotechniques, tels que ceux auxquels on peut songer pour la
sécurité routière. La démarche de « Complexité effective » est une troisième
voie qui, à l’instar de la systémique, repose certes sur une pensée « globale »
ou, mieux, élargie, et une action locale, mais s’en différencie par une modélisation intégrative explicite.
Synthèse INRETS n° 57
309
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Tableau 2 : trois approches scientifiques
Pensée
Modélisation
théorique
Action
Approche par
les systèmes
Penser globalement
Absence d’un corps
unifié et structurant
Agir localement
Approche
classique
Penser localement
Cadre analytique
Agir localement
Approche de
la « Complexité effective »
Penser « globalement »
Cadre de modélisation
intégrative
Agir localement
Cette comparaison entre les trois approches repose sur leurs orientations
essentielles en termes de cadres de pensée, de styles de modélisation et d’orientations d’action. Dans tous les cas, l’action ne peut être que locale. Le style de
pensée « globale » des systèmes renvoie par opposition à un mode classique
« local ». La démarche de « Complexité effective » s’efforce de concilier une pensée « globale » ou élargie avec une modélisation intégrative qui offre une option
différente du « tout analytique ». La CXE n’exclut pas l’analyse, localement, mais
n’en fait pas le mode exclusif de modélisation. Elle n’exclut pas l’approche par les
systèmes, en un sens spécifique puisqu’elle consiste, elle-même, en un système
d’aide à la décision et à l’action. Mais elle exclut l’investigation fondée au départ
sur une typologie de systèmes et de propriétés systémiques qu’il s’agirait d’appliquer. La CXE part de la situation problématique. Si système « il y a », cela ne peut
apparaître que dans la construction de l’argumentation.
3. Deux régimes de régulation contrastés
L’objet de cette partie est de mettre en œuvre la démarche de « Complexité
effective ». Rappelons que le premier effet de l’approche par la CXE a été de se
libérer d’une perspective étroitement statistique de la comparaison internationale
et de s’engager dans une investigation empirique pluridimensionnelle, interdisciplinaire, interactive, quantitative et qualitative. Le second effet est d’inviter à
modéliser sur cette base en se libérant du cadre, soit « causaliste séquentiel », soit
« épidémiologique », soit « systémique », non pour rejeter ces aspects, mais pour
leur donner leur place en fonction de leur degré de pertinence, dans une modélisation unifiée intégrative. C’est l’assimilation de ces trois aspects à des cadres
alternatifs exclusifs qui se trouve rejetée. Comprendre la situation qui engendre
les tués devient la tâche première, plutôt que la démarche qui consisterait à partir de l’identification de causes spécifiques. Il s’agit de concentrer l’attention au
départ sur le principe génératif PG plutôt que sur l’une des trois modélisations en
sachant qu’elles peuvent toutes être, à des degrés divers, des aspects de ce PG
commun.
Nous nous retrouvons donc engagés dans un cheminement abductif. Le résultat recherché dans cette « hypothèse R4 » de Régime de Régulation du Risque
Routier ne procède pas de l’application d’un schéma substantiel ou d’un modèle
prédéfinis. La modélisation de R4 se construit en parcourant un chemin. Le parcours a débuté par l’observation de statistiques de tués dans les accidents de
la route, avec la constatation d’un écart durable entre la France et la Grande-
310
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
Bretagne et le projet de mieux comprendre les sources de cet écart. Le parcours
se poursuit avec l’introduction de plusieurs hypothèses. Selon la première, les
tués sont le produit d’actions. Selon la seconde, ces actions sont sous l’influence
significative, mais non totale, de contextes immédiats ou proches d’action. Enfin,
ces contextes d’action sont eux-mêmes influencés par leur propre contexte. D’où
l’engagement dans une recherche allant des tués à l’organisation et aux institutions, puis la réflexion sur les régularités et la structuration qui s’en dégagent, par
abduction. D’où, aussi, l’accent sur la notion de principe génératif et la construction d’un objet théorique générique, le R4, rendant intelligible le fait de ne pas
prendre appui au départ sur l’une ou l’autre des trois perspectives habituelles de
modélisation. Un schéma générique du R4 est élaboré dans le paragraphe suivant. Il sera ensuite mis en œuvre concrètement sur les deux pays.
3.1. Un principe génératif et son produit : R4
Un R4 est une représentation structurée de la gouvernance régulatrice de l’insécurité routière mesurée ici par le nombre de tués. L’attente envers R4 est qu’il
fournisse au minimum une grille de lecture de régularités importantes présentes
dans l’enchevêtrement des influences et actions entre les accidents mortels et
leurs environnements immédiats et plus distants. Cela vaut pour l’insécurité routière en général, pas seulement les tués. Le R4 doit offrir un cadre commun par
rapport auquel des spécificités nationales peuvent être définies. L’accent mis sur
les notions d’action et de principe génératif rend nécessaire d’être explicite sur
les acteurs, les activités et les contextes d’action avant de construire un cadre
intégratif. Ces aspects sont abordés ci-dessous.
Le contexte d’action
L’insécurité routière est le produit d’activités et d’actions de circulation routière
et de sécurité routière dont les auteurs sont des acteurs ayant des attitudes et
des comportements dépendant pour une large part de leurs contextes d’action
propres. Il ne s’agit pas de substituer un déterminisme des contextes d’action à
un déterminisme des comportements mais de reconnaître la place des contextes
d’action immédiats, notamment. Un contexte immédiat d’action pour un conducteur est l’état de la circulation autour de lui. Il y a une différence entre une grande
fluidité sur une infrastructure sur laquelle le conducteur se trouve momentanément seul, et le flux dense qui l’entoure et lui dicte dans une très large mesure
sa vitesse et son comportement. Les institutions et l’organisation de la sécurité
routière, les données géographiques et climatiques illustrent des contextes d’action plus distants mais dont la place ne peut être ignorée dans la réflexion sur les
régimes nationaux de régulation.
On pourrait également distinguer des contextes d’action proches dont des
exemples seraient l’ordre de priorité dans une variété de tâches prescrites dans
l’activité d’un opérateur ou, à une autre extrémité, les priorités des politiques de
circulation et de sécurité routières. Le risque dont il faut néanmoins être conscient
est de diluer la notion de contexte d’action dans une conception vague concernant
Synthèse INRETS n° 57
311
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
tout ce qui précède et entoure l’événement. Nous nous en tenons ici à la conception dans laquelle est contexte d’action, dans un domaine particulier, un champ
de circonstances constituées de traits susceptibles d’exercer une influence décelable sur l’action, eux-mêmes susceptibles d’être influencés en retour par l’action,
circonstances dans lesquelles s’insère l’action. Lorsque ces traits sont suffisamment durables et complémentaires, ils peuvent former une configuration stable et
identifiable. Selon cette hypothèse, une tâche de la caractérisation de R4 est de
contribuer à identifier des contextes d’action opérant du point de vue de l’action
de sécurité routière.
Il est habituel de faire dépendre une action donnée de l’attitude et du comportement de son auteur. Ces traits sont à leur tour sous l’influence du contexte
immédiat d’action. Pour un acteur donné, des contextes d’action différents sont
susceptibles de conduire à des actions différentes. Il semble ainsi approprié de
considérer qu’entre un acteur et l’action actualisée, il existe une catégorie intermédiaire faite de contexte d’action, d’attitude et de comportement. Un exemple
important apparaîtra dans le paragraphe suivant. Idéalement, il faudrait pouvoir
distinguer dans les attitudes et comportements la part qui relève du contexte
immédiat d’action et celle qui en est plus distante. Cela est hors d’atteinte dans
cette étude. La recherche peut, cependant, s’intéresser à la comparaison de certains traits durables des contextes d’action et en explorer les différences et leur
portée éventuelle.
Acteurs et activités de la sécurité routière
Il apparaît utile de distinguer et regrouper en trois catégories les acteurs de
la sécurité routière. Tous les acteurs sont d’abord et simultanément des usagers
de la circulation routière. Une deuxième catégorie est celle des acteurs publics
« gouvernementaux » et territoriaux de la sécurité routière proprement dite. Il
existe enfin un regroupement hétérogène, spécifique à la sécurité routière, d’acteurs non publics que nous appelons « autres » faute de mieux, et qui réunit
notamment les organisations non gouvernementales, les entreprises, les fabricants de véhicules, les auto-écoles et centres de formation, les assureurs, les
professions de santé, les chercheurs scientifiques. L’inclusion de cette dernière
catégorie ne doit pas surprendre dès lors qu’on admet, comme cela a été écrit
plus haut, l’influence de la modélisation de l’insécurité sur la conception de l’action de sécurité. Il n’apparaît pas de raison pour laquelle la recherche en sécurité
routière devrait échapper à cette constatation.
Une découverte de cette recherche aura été de constater l’absence d’une
catégorisation suffisamment détaillée des domaines ou champs de l’action de
sécurité routière, au-delà de la distinction traditionnelle fondée sur le triptyque
conducteur–véhicule–infrastructure et sur les activités liées à la mobilité dans un
environnement sécuritaire. Il nous est ainsi apparu nécessaire de distinguer onze
domaines (Tableau 3) en incluant un domaine d’information–communication dans
le champ relevant du conducteur, et un autre d’information–recherche pour la
raison mentionnée plus haut. Le croisement entre acteurs et activités produit une
image d’ensemble de l’action de sécurité routière et montre la place éminente des
312
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
acteurs publics, tout en ayant un caractère inévitablement simplifié. Ainsi, associer les seuls acteurs publics aux soins de santé ne fait pas apparaître la place,
certes réelle, mais mineure, des acteurs privés. Ce tableau ne peut être plus
détaillé ici. Il comble malgré tout un vide et trouve son intérêt dans la comparaison
internationale terme à terme à laquelle il pourrait conduire avec des moyens de
recherche suffisants.
Tableau 3 : domaines d’activité et acteurs de la sécurité routière
Acteurs
Usagers
Champs de l’activité de SR
1. Éducation
2. Formation
3. Information-communication
4. Véhicules
5. Infrastructure, voirie
6. Ingénierie de la circulation routière
Gestion de la mobilité
7. Prévention, assurances
8. Contrôle-sanction – Réglementation
Justice
9. Secours d’urgence
10. Soins de santé
11. Information-recherche
*
*
*
*
Acteurs
publics
*
*
*
*
*
*
*
*
*
*
*
Autres
(ONG, etc.)
*
*
*
*
*
Le R4
Les considérations sur les contextes d’action et sur le tableau croisant les
activités de sécurité routière avec les acteurs indiquent une orientation de
réflexion sur la manière d’exploiter les matériaux empiriques constitués dans les
deux premières parties et informés maintenant par la CXE. En fait, concevoir
un R4 revient à formuler une hypothèse respectant un véritable cahier des
charges imposant de :
•• structurer un enchevêtrement apparent d’influences d’ordres divers dont les
tués apparaissent comme le produit P ;
•• rendre compte d’une remontée de P (tués) à une notion générique de principe génératif PG par pas successifs, d’actions d’abord, puis de contextes
d’action immédiats, attitudes et comportements, puis de contextes d’action
plus distants mais néanmoins opérants ;
•• exprimer le caractère dynamique et évolutif de la composition d’actions,
contextes d’action et interactions ;
•• distinguer ce qui relève d’actions, l’aspect fonctionnel, et l’aspect structurel
qui relève des structures, et les articuler ;
•• mettre en œuvre la modélisation concrètement.
Synthèse INRETS n° 57
313
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
L’aspect fonctionnel concerne les actions liées à l’accidentologie. Il s’agit des
actions de circulation routière, incluant le risque vitesse, et des actions de sécurité routière. Ces actions sont sous l’influence des contextes d’action, attitudes
et comportements des acteurs. Ces trois catégories sont elles-mêmes sous l’influence de traits structurels, de régularités structurées provenant de la structuration des activités et acteurs, de leur organisation et des institutions et règles qui
les encadrent. Elles sont à l’intersection de l’aspect structurel et de l’aspect fonctionnel dont l’union compose une cohérence ouverte par rapport à un environnement externe et susceptible d’évoluer au cours du temps. Le R4 est symbolisé sur
la figure suivante. Il combine une architecture générique, quel que soit le risque
spécifique, et ce qui relève de la vitesse en particulier. La référence à la vitesse
n’a pas d’effet sur le schéma générique du R4. En revanche, elle est le levier sur
lequel se fonde l’étude empirique et la caractérisation des R4 Vitesse concrets
dans le paragraphe suivant.
Figure 1 : le R4, régime de régulation du risque routier
Le numérotage des symboles suit la direction du raisonnement. La flèche T symbolise la direction du
temps et souligne le caractère processuel et évolutif du R4.
Légende :
. Nombre de tués
. Risque (vitesse, …)
. Circulation routière (CR)
. Action de sécurité routière (SR)
. Contexte immédiat d’action ; attitudes et
comportements (CR et SR)
. Structuration des acteurs
314
. Structuration des activités de sécurité routière
par domaines
. Organisation de la circulation et de la sécurité
routières
. Institutions, législation
. Sous-régime structurel
11 . Sous-régime fonctionnel
12 . Environnement
externe
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
Le sens des influences et relations entre composants est toujours double afin
de signaler que l’effet en retour plus ou moins marqué est toujours présent. Le
R4 exprime une composition de processus d’interactions dynamiques en déroulement temporel. Il n’est pas figé a priori. Les tués sont le produit d’actions. Ils ne
sont pas vus comme l’ « output » d’un « système » mais sont partie intégrante du
processus d’ensemble qu’est le R4. L’environnement externe recouvre les relations entre R4 et les aspects historiques, géographiques, culturels et sociétaux,
ainsi que les aspects relatifs à la politique des transports pertinents pour la circulation et la sécurité routières. Le contexte immédiat ou proche d’action, et les attitudes et comportements, occupent une place à part en étant d’un côté structurels
et sous l’influence d’autres aspects structurels, et d’un autre côté fonctionnels et
influençant eux-mêmes les autres aspects fonctionnels.
Rappelons que la représentation du R4 ne doit pas être assimilée à une recherche de causalité séquentielle stricte. C’est le propre de la CXE que de combiner
la possibilité de relations causales locales, tel le lien entre vitesse et accidents, et
le jeu d’influences constitutives de circonstances d’insécurité et d’accidents, sans
que l’on puisse parler de causalité directe au sens strict du terme. Le R4 offre une
articulation non fonctionnaliste et ouverte de ces aspects, mais organisée en une
représentation cohérente.
3.2. Les R4 français et britannique au concret
Nous suivrons le schéma de la Figure 1 en portant pour chaque bloc le composant les informations livrées par les différents chapitres. Ces résultats par chapitres ont été abondamment présentés. Nous ne reprenons que les idées clés les
synthétisant en mentionnant dans chaque cas le chapitre pertinent. Il en résulte
le Tableau 4 ci-après.
Chaque colonne, pour la France et la Grande-Bretagne, décrit dans son
ensemble un R4V. Il s’en dégage une cohérence spécifique dans les deux cas
qui s’exprime dans des régimes fonctionnels nettement différenciés : décentralisation et partage des stratégies d’action entre niveaux locaux et gouvernemental
en Grande-Bretagne ; impulsions d’origine gouvernementale et recherche d’une
déconcentration, principalement, en France. Les rôles clés sont tenus en GrandeBretagne par les autorités locales et le gouvernement, l’initiative des buts stratégiques d’ensemble et des règles du jeu incombant au pouvoir central, l’initiative de
la définition et de la mise en œuvre sur le terrain relevant des stratégies locales.
Au risque de nous répéter, il faut souligner qu’en Grande-Bretagne une densité
d’actions locales de sécurité routière préexistait aux réformes centralisatrices des
dernières décennies. La stratégie gouvernementale est venue en quelque sorte
compléter et tenter d’orienter et d’unifier un ensemble de stratégies locales. Les
deux sortes de stratégies cohabitent. L’expression « politique locale de sécurité
routière » décidée au niveau gouvernemental et interministériel, relayée par le
niveau préfectoral, n’existe pas et n’aurait pas de sens en Grande-Bretagne.
Il existe seulement plusieurs dizaines de stratégies locales exposées dans les
plans locaux de transport et soumises à des procédures d’évaluation évoquées
dans les chapitres 7, 8 et 13.
Synthèse INRETS n° 57
315
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
Tableau 4 : une stylisation des R4V français et britannique
Grande-Bretagne
Environnement externe.
Densité de population élevée.
Volume de trafic similaire.
Chap. 4, 8
Institutions.
Acquis historique de
décentralisation.
Réformes centralisatrices depuis
les années 1970.
Chap. 6, 7, 8
« Organigramme ».
Chap. 7
Non documenté ici.
Organisation.
Domaines d’activité SR.
Acteurs de
- sécurité routière :
publics, autres ;
- circulation routière.
Local Authorities et Department
for Transport.
Stratégies locales de SR et
stratégie gouvernementale.
Chap. 5, 11, 12
Contextes d’action
immédiats ; attitudes et
comportements des
acteurs publics de SR.
Action de SR
(domaines 1 à 11).
Cas du domaine 8.
Circulation routière et
vitesse.
Intensité relative sur trois aspects
(professionnalisation, intégration,
évaluation).
Chap. 8
CSA réparti, « polycentré ».
Chap. 5,10
Nombre de tués.
Caractéristique
d’ensemble
du R4V.
Pas d’inflexion récente à la
baisse nette.
Chap 1, 3, 4
Tendance longue à la baisse,
ralentissement récent.
Chap. 3, 4
R4V réparti.
France
Densité de population plus
faible.
Volume de trafic similaire.
Chap. 4
Acquis historique de
centralisation.
Réformes décentralisatrices
depuis 1982.
Chap. 9
« Organigramme ».
Chap. 9
Non documenté ici.
CISR, DISR, Préfets, conseils
généraux.
« Politique locale de SR »
impulsée depuis le niveau
gouvernemental.
Chap. 5, 9, 11, 12
Faiblesse par rapport à la
Grande-Bretagne.
Chap. 8, 9
CSA « technocentré ».
Chap. 10
Inflexion récente nette.
Chap. 2, 4
Progrès récent dans une
tendance longue à la baisse.
Chap. 2, 4
R4V sous influence
principale de « l’amont »
politico-administratif.
La régulation française a sa cohérence. Elle part d’une perception d’un excès
de centralisation, à l’inverse de la situation britannique. Les efforts s’exercent
dans la recherche d’une décentralisation et d’une déconcentration qui viennent
en complément d’une politique centrale héritée de l’histoire. La place des collectivités locales dans les actions de sécurité routière demeure seconde par rapport
à celle de leurs équivalents britanniques.
Nous suggérons de résumer les R4V en suivant cette voie et de caractériser
le régime de régulation britannique comme un régime à gouvernance répartie et
le régime français comme un régime à gouvernance sous influence dominante
gouvernementale et administrative. Dans la gouvernance répartie ou partagée, il
n’y a pas d’influence principale en aval ou en amont décelable, les deux opèrent
dans leurs domaines respectifs avec des poids dont aucun n’apparaît a priori
316
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
prédominant par rapport à l’autre. Par définition, cela n’est pas vérifié dans la
gouvernance sous influence principale de l’amont.
4. Un écart entre les contextes d’action des acteurs
publics français et britanniques
4.1. P.I.E. : Professionnalisation, Intégration, Évaluation
Selon le dictionnaire, un facteur est un élément qui concourt à un résultat.
Parfois, la simple observation suffit pour déceler ce lien. L’expérience du contrôle–
sanction automatisé et son effet sur la diminution recherchée d’excès de vitesse
en France en fournissent une illustration. Le CSA semble exercer une influence
manifeste sur les comportements de vitesse des conducteurs en France. En ce
sens, il apparaît comme un facteur d’évolution de comportements. La comparaison avec la Grande-Bretagne ne dément pas cette idée même si elle la rend
moins simple.
Les facteurs émergents auxquels il est fait référence ici sont d’une nature différente. Ils n’affectent pas directement les comportements des usagers mais portent
sur les attitudes et comportements des acteurs de la sécurité routière et affectent
donc, à des degrés divers, les dix activités de sécurité routière. Ces facteurs sont
la professionnalisation, l’évaluation et l’intégration, notions qui seront explicitées
ci-dessous. Il n’y a nul mystère autour d’elles. L’évocation de l’une ou de l’autre
revient assez souvent dans le discours sur la sécurité routière. Elles font partie
des vœux communément réitérés en France parmi d’autres objectifs de la politique de sécurité routière. Ainsi, la circulaire Politique locale de sécurité routière
du 30 janvier 2004, (chapitre 9, Annexe 2) mentionne, entre autres : l’évaluation
des plans départementaux de contrôle routier, une forme d’intégration (« développer le partenariat » avec les collectivités locales, « avec le monde de l’emploi »,
invitation au préfet à demander au président du Conseil général et aux maires de
nommer un élu référent « Madame ou Monsieur sécurité routière »…), et invite à
professionnaliser « l’organisation et l’action locale de la sécurité routière » dans
un discours de déconcentration, injonctions venant du niveau interministériel où
apparaissent aussi des objectifs de communication (Annexe 2, p. 8) et d’information (les DDE « doivent apporter toutes les informations nécessaires à l’élaboration de la politique locale » : ibid, p. 5).
Or, c’est là qu’apparaît un apport décisif de la comparaison avec la GrandeBretagne. La comparaison permet de créer la variation qui, seule, fait apparaître
des choses qui demeurent invisibles ou non décelées sans elle.
En restant limités au cas français, nous nous trouvons devant une palette très
riche d’objectifs et de dénominations d’entités et de plans. La comparaison fait
prendre conscience de la présence, en Grande-Bretagne, de préoccupations
portant sur des dénominations similaires (intégration, professionnalisation), mais
avec des contenus et significations parfois très différents (voir le paragraphe suivant). La comparaison informe donc sur ce qui est commun et permet de faire un
Synthèse INRETS n° 57
317
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
tri entre ce qui relève de régularités fortes entre les deux pays et procède ainsi à
plus de problèmes intrinsèques à la sécurité routière, quel que soit le pays, que
de spécificités nationales. La comparaison permet, par effet de miroir, de déceler
des régularités fortes et de hiérarchiser les problèmes, alors que le confinement à
l’intérieur d’un pays ne peut pas, par définition, bénéficier de ce levier.
De surcroît, ici, elle conforte la signification d’aspects comme les attitudes et
comportements qui sont très difficiles à caractériser à un niveau de généralité
aussi élevé que celui de R4V. Une exception est l’exemple du système répressif britannique (chapitre 12) qui illustre clairement une différence d’attitude avec
la France. Mais ce n’est pas la seule source de différence. Il est moins difficile
d’identifier des facteurs d’attitudes et de comportements des acteurs de la sécurité routière que les attitudes et comportements eux-mêmes. Cela concorde entièrement avec la « Complexité effective » selon laquelle il est moins difficile de
caractériser le principe génératif PG que le produit P.
La comparaison confirme qu’il existe des facteurs d’attitudes et de comportements communs à l’action de sécurité routière dans les deux pays. Trois de ces
facteurs se détachent.
La professionnalisation. Elle revêt trois aspects. Elle concerne d’abord la part
du temps de travail rémunéré consacrée à l’activité de sécurité routière par un
acteur, entre emploi à temps partiel et emploi à plein temps, à qualification donnée. En un deuxième sens, la professionnalisation désigne, à un niveau collectif d’activité de sécurité routière, la part de l’emploi professionnel à plein temps
comparée à celles du volontariat et du temps partiel. Un troisième sens concerne
le niveau de qualification professionnelle des acteurs, soit individuellement, soit
statistiquement pour la population d’acteurs. Ce sont ces deux derniers aspects
qui sont significatifs dans la comparaison. Au sens 3, le degré de professionnalisation ne semble pas être inférieur en France à ce qu’il est en Grande-Bretagne.
En revanche, la professionnalisation est sans conteste plus élevée en GrandeBretagne au sens 2, ne serait-ce que par la présence généralisée et dense des
road safety officers, très supérieure à celle des chargés de mission de sécurité
routière en France.
L’intégration. Intégrer, c’est faire entrer dans un ensemble, mettre ensemble,
coordonner. L’appel à une meilleure, ou à plus, (d’)intégration est une attitude
constante des responsables des deux côtés de la Manche. Mais ce terme revêt
également plusieurs significations qui font apparaître des priorités différentes
entre les deux pays. Le premier sens est la coordination et le décloisonnement. Il
s’agit d’envisager, de traiter ou de faire agir, ensemble, des éléments qui, jusquelà, étaient séparés. Une implication nécessaire est la communication et l’information : la fabrication de l’information, sa circulation et sa diffusion, sa transparence,
gage de connaissance, mais aussi de progrès par l’exposition ainsi permise à la
critique constructive, constituent les ingrédients d’un système d’information sans
lequel les progrès de l’intégration ne peuvent que rester des vœux. Le manque
d’intégration commence avec le manque d’information. L’intégration peut aussi
être verticale ou horizontale. Verticale, elle concerne l’articulation entre niveau
318
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
central et niveaux locaux. Horizontale, elle est entre services ou fonctions. En
ce sens, l’ingénierie de la circulation routière n’est pas étrangère à la sécurité
routière, ce qui justifie de la placer, même si ce n’est que pour partie, au sein des
activités de sécurité routière. L’insistance du ministère britannique des Transports
sur l’intégration de la sécurité routière et d’autres aspects (mobilité, etc.) au sein
des Local Transport Plans est aussi de l’intégration fonctionnelle horizontale. Cela
est la priorité manifeste en Grande-Bretagne. Il s’agit d’inciter les autorités et
partenariats locaux à traiter ensemble, en interdépendance, stratégie de sécurité
routière et stratégie de transport. La priorité en France semble être différente.
Elle s’adresse à ce qui est perçu comme une source de difficultés dans un pays
s’efforçant de déconcentrer et de mettre en place plus de coordination transversale entre services déconcentrés et collectivités locales. Décloisonner l’action de
sécurité routière y apparaît comme un impératif premier (chapitre 9).
L’évaluation. L’évaluation est un domaine pour lequel la distance entre les
deux pays atteint un maximum. Et pourtant, elle est invoquée depuis longtemps
en France (années 1980 et enquêtes REAGIR, Rapport du CNSR 2004, Circulaire
du DISR 2004, Réforme de la loi de finances). Le mouvement est lancé. Mais
il semble s’être heurté à des obstacles importants en sécurité routière jusqu’à
présent. En Grande-Bretagne, à l’opposé, l’évaluation est une pratique admise
(chapitre 12). Sur un plan général, l’évaluation concerne en premier lieu les opérateurs (« accountability », évaluation des actions), mais aussi les évaluateurs
(réflexivité). Elle implique la responsabilisation, dans tous les cas.
4.2. Dans le miroir, la densité du facteur PIE
Les aspects P, I et E, introduits d’une manière décomposée dans la représentation des régimes de régulation français et britannique ne jouent pas en complète
indépendance les uns par rapport aux autres. Chacun a sa spécificité, mais au
sein d’une interdépendance d’ensemble qui produit une véritable circularité entre
eux. Cette circularité est robuste. Elle constitue en elle-même un facteur composite, car composé des facteurs P, I et E. Nous proposons de dénommer facteur
PIE (FPIE) cette réalité à l’œuvre dans le régime de régulation et dans l’action de
sécurité routière.
La circularité entre évaluation, professionnalisation et intégration s’auto-entretient et forme une cohérence à des niveaux qui peuvent être soit faibles, soit
élevés. On peut difficilement envisager des degrés très différents les uns des
autres entre les trois termes. Ainsi, pas ou peu d’évaluation et peu d’intégration
impliquent une absence de pression vers une professionnalisation élevée et sont
compatibles avec une faible professionnalisation. Peu d’intégration et peu de
professionnalisation justifient une absence d’évaluation : comment en effet envisager une évaluation significative quand la professionnalisation et l’information
nécessaires pour la conduire font défaut ? Enfin, l’absence d’évaluation et la faiblesse de la professionnalisation s’accommodent très bien d’une intégration que
rien ne rend nécessaire dans ces conditions et qui peut donc rester à un niveau
très bas. Une cohérence basse peut s’établir durablement puisque, dans ce cas,
Synthèse INRETS n° 57
319
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
aucun des trois termes n’exerce une pression à l’amélioration des deux autres.
C’est l’opposé qui prévaut en cohérence haute. Une pratique soutenue et étendue d’évaluation exige une professionnalisation ayant des qualités similaires et
un langage commun (indicateurs), ainsi qu’une circulation d’information transparente, tous éléments de décloisonnement et d’intégration. Le niveau d’exigence
de l’évaluation a une influence décisive sur les deux autres facteurs en cohérence
haute. Les trois facteurs composent ainsi une circularité dynamique largement
autoentretenue, soit par défaut d’impulsions en cohérence basse, soit grâce aux
exigences impulsées par l’évaluation en cohérence haute.
Cette description est bien sûr simplifiée. Mais elle semble capter une différence
essentielle entre la France et la Grande-Bretagne et restée, semble-t-il, indécelée
jusqu’ici sous sa forme systémique. Les informations réunies dans cette recherche permettent de comparer les FPIE britannique et français.
Tableau 5 : le facteur PIE
Grande-Bretagne
Professionnalisation
Intégration
Évaluation
Présence dense de RSO
(Road safety officers).
Intrinsèque et effective par
les LTP (Local transport
plans) bien qu’inégale selon
le ministère (Department for
Transport).
Admise et étendue.
France
Chargés de mission peu
nombreux.
Appels à plus de coordination
et partenariats.
Le DGO (Document général
d’orientation) induit-il plus
d’intégration ?
Faible.
Il est peu contestable que dans la comparaison entre degrés de cohérence
du PIE, la cohérence française est à un niveau relatif plus bas que la cohérence
britannique.
4.3. La place du facteur PIE dans l’action de sécurité routière
Le FPIE apparaît comme une charnière au sein des régimes de régulation, en
étant à la fois du côté structurel et du côté fonctionnel. Du point de vue structurel,
le FPIE est le dispositif par lequel du structurel plutôt statique (un agencement
organisationnel d’activités et d’acteurs de la sécurité routière) se transforme en
du fonctionnel dynamique. Du point de vue fonctionnel, une multitude d’actions de
sécurité routière dans une pluralité de domaines sont conduites par des acteurs
dont les attitudes et comportements sont informés par un cadre de facteurs PIE
faisant système, à caractère structurel. Le FPIE constitue ainsi l’intersection entre
le sous-régime de régulation structurel (SR4S) et le sous-régime de régulation
fonctionnel (SR4F) au sein du régime de régulation complet R4 dans son environnement externe et en évolution.
Heureusement, pour la France, les résultats de sécurité routière ne dépendent
pas que du seul facteur PIE. L’accélération connue depuis 2002 s’est même pro-
320
Synthèse INRETS n° 57
Synthèse - Deux régimes de régulation contrastés et le facteur PIE
duite avec un PIE pratiquement inchangé. Toutefois, on le verra plus bas, si le PIE
n’est pas tout pour la sécurité routière, il n’en demeure pas moins un générateur
de gains potentiels.
Les bons résultats obtenus ne peuvent être dissociés non seulement de l’impulsion politique exprimée au plus haut niveau de l’État et relayée à tous les
échelons, mais également du soutien des médias, de la réception favorable dans
l’opinion, de l’acceptation par les usagers de la capacité de mise en œuvre rapide
d’un dispositif de contrôle–sanction automatisé effectif.
Ces faits illustrent la cohérence d’un régime de régulation dont la gouvernance reste sous l’influence majeure des acteurs politico-administratifs d’État et
déconcentrés. Le progrès de sécurité routière a procédé d’une impulsion dans un
cadre organisationnel et un agencement de pouvoir d’acteurs permettant sa mise
en œuvre concrète rapide sous forme d’actions de sécurité routière. En prenant
appui sur le schéma du R4, il y a eu un passage direct du bloc « acteurs » au bloc
« action de sécurité routière » comme si le FPIE était tellement diaphane que sa
présence était restée inaperçue.
Une stratégie similaire serait difficilement imaginable en Grande-Bretagne car
elle se heurterait à la densité organique d’ensemble, de l’organisation et des dispositifs d’acteurs en place, que produisent la gouvernance répartie et « l’épaisseur » du FPIE.
En définitive, la composition du régime de régulation fait apparaître plusieurs
voies possibles d’amélioration de la sécurité routière en France.
Une première voie repose sur l’initiative d’acteurs clés, politiques, administratifs, associatifs, élus locaux et autres.
Une deuxième voie porte sur les activités du bloc action de sécurité routière, et
l’augmentation des ressources sur une ou plusieurs des dix activités. Le contrôle–
sanction automatisé en France l’illustre.
La combinaison de ces deux méthodes décrit l’expérience française récente.
Une troisième voie pourrait être de modifier l’organisation. Elle prendrait inévitablement du temps. Surtout, dans quelle direction devrait-elle s’exercer si elle
devait laisser inchangée la cohérence en place du FPIE ? La « nécessité de
consolider le tandem chef de projet/coordinateur » exprimée par H. Chomienne
(chapitre 9) est une façon de contribuer à plus de coordination. Exige-t-elle une
évolution de l’organisation ?
Toutes ces voies s’exercent à FPIE pratiquement inchangé. Il reste donc la
voie de l’évolution provoquée du FPIE vers le haut. Il semble raisonnable de penser qu’un FPIE rehaussé entraînerait une action de sécurité routière de meilleure
qualité. On mesure alors l’ampleur de la progression encore possible en France.
Mais il est un deuxième aspect qui fait du rehaussement du FPIE français une
nécessité. C’est celui de la pérennisation de la stratégie et de l’action d’ensemble
en cours. Des progrès spectaculaires ont pu être obtenus en France grâce à un
volontarisme en cohérence avec les possibilités et contraintes du régime de régu-
Synthèse INRETS n° 57
321
Les régimes français et britannique de régulation du risque routier
lation en place. C’est la force de l’expérience française. Mais cette dépendance
à l’égard d’une conjoncture politico-administrative particulièrement favorable est
aussi sa faiblesse à terme. Plus de sécurité routière passe aussi par plus de
pérennité des actions. Cela suppose un FPIE à la hauteur de cette ambition, qui
créerait la densité suffisamment forte d’évaluation, de professionnalisation et d’intégration prises ensemble pour prévenir le risque de recul.
Dans cette recherche d’un relèvement du FPIE, il convient d’agir simultanément sur P, I et E, mais en faisant porter l’effort prioritairement sur le facteur
susceptible d’entraîner les deux autres. L’évaluation est ce facteur. Elle oblige
à plus de professionnalisation et contraint à plus d’intégration par l’information
qu’elle exige. Faire sauter le verrou des résistances à une évaluation des actions
de sécurité routière émerge comme une tâche prioritaire dans la mise en marche
du processus. L’évaluation a trois vertus. Elle responsabilise, elle est un vecteur
d’intégration et elle appelle la professionnalisation. La « Complexité effective »
suggère fortement que l’évolution recherchée, qui se fera en univers controversé
et incertain, aura d’autant plus de chances d’aboutir qu’elle se fera d’une manière
interactive, intégrative et négociée, même si cela se paie par du temps et de
l’énergie à consacrer à cette tâche.
Références
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routière en France dans le miroir de la comparaison internationale. La
comparaison entre la France et la Grande-Bretagne. Rapport n°261,
INRETS, Arcueil, 2005.
R. Delorme. Notes on effective complexity : a post-Simonian modelling of very illstructured problem situations. International Workshop on Evolutionary
Macroeconomics. The University of Queensland, Brisbane 14–17 juillet :
21p, 2005.
R. Delorme. Deep complexity in social science : experience and modelling. À
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E. Hollnagel. Barriers and Accident Prevention. Aldershot, Ashgate, 2004.
322
Synthèse INRETS n° 57
Imprimé en France - Jouve, 11, bd de Sébastopol 75001 PARIS
N° 476028F - Dépôt légal : Décembre 2008

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