Les Caprices (1799)
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Les Caprices (1799)
GOYA Les Caprices (1799) Exposition au Palais des Beaux-Arts de Lille - 24 Avril / 28 Juillet 2008 GOYA Les Caprices (1799) Exposition des 80 estampes Le Caprice contemporain, exposition et programmation culturelle Palais des Beaux-Arts de Lille - Avril / Juillet 2008 L’artiste espagnol, réfugié en France en 1823, naquit près de Saragosse où il commença son apprentissage de peintre. Après un séjour en Italie, il s’installa à Madrid. Il fut nommé peintre du Roi Charles III en 1786, à l’âge de 40 ans, puis de Charles IV. Devenu sourd en 1792, suite à une maladie, Goya transforma son art jusqu’alors fait de scènes religieuses, de scènes aimables aux couleurs gaies, pour des tapisseries, et de portraits ; genre qu’il n’abandonna jamais et dans lequel il excella. Il employa alors son imagination créative à composer des oeuvres d’une force expressive d’une grand originalité, aux tons plus sombres, portant un regard critique sur les événements et la société de son temps. Les Caprices en sont une des expressions majeures. « Goya n’est précisément rien de spécial, de particulier, ni comique absolu, ni comique purement significatif, à la manière française. Sans doute il plonge souvent dans le comique féroce et s’élève jusqu’au comique absolu, mais l’aspect général sous lequel il voit les choses est surtout fantastique ou plutôt le regard qu’il jette sur les choses est un traducteur naturellement fantastique...» (Baudelaire critique d’art. Folio/essais, 1992. P.227-228) Francisco de Goya y Lucientes (Fuendetodos, 1746 – Bordeaux, 1828) compte, avec Vélasquez, parmi les plus grands peintres de l’école espagnole et de l’histoire de l’art européen. Il fut également un dessinateur et un graveur hors normes. La série des Caprices se compose de 80 estampes réalisées à l’aquatinte, rehaussées de burin, d’eau-forte et de pointe sèche. La première édition parut en 1799, après deux années de travail. L’ordre des estampes n’est pas strict. Nous pouvons cependant diviser la série en trois grands thèmes: un premier consacré à la satire sociale, un second aux relations amoureuses et un troisième à la sorcellerie, où le fantastique règne davantage. Ces Caprices de Goya, images satiriques d’une grande finesse d’imagination, sont comme des rébus dont la subtilité de lecture pose de nombreuses interrogations sur leur interprétation. En explorant l’âme humaine à travers ces estampes, Goya leur conféra un langage universel et intemporel. C’est un exemplaire de cette première édition que le Palais des Beaux-Arts de Lille conserve et présentera dans son intégralité. Contemporain des célèbres caricaturistes anglais, William Hogarth (1697-1764), Thomas Rowlandson (1756-1827) et George Cruikshank (1792-1878), Goya, s’affranchit, dans les Caprices, des règles du genre. Il se détache du divertissement pour produire une diatribe visuelle où il synthétise tous les genres. Les représentations divines, humaines, animales n’ont d’existence que dans leur rapport analogique. Modelées selon le principe des métamorphoses, leurs apparences stigmatisent toutes les vanités et les ridicules. Cette création protéiforme passe de l’attaque franche à l’insinuation. Le génie de Goya est de dominer tous les sujets grâce à la souplesse de son graphisme, à son sens des proportions dans les transmutations et à sa capacité à convertir les sujets en symboles définitifs. A côté des événements qui sont saisis et interprétés dans l’actualité, Goya développe une critique universelle des mœurs à travers des personnages qui symbolisent des impulsions collectives. Mais ces « types » ne sont jamais dépourvus d’ambiguïté. Son audace se pare du prestige accordé à ceux qui jugent l’ordre établi sans établir une nouvelle morale. Les Caprices ne témoignent jamais d’un parti-pris sans nuance. En cela le caprice chez Goya est l’art du refus de la suffisance, de la bêtise et de l’aveuglement. La série d’eaux-fortes commence sur le ton d’une satire légère, puis devient un acerbe réquisitoire social. Les souffrances et la violence endurées par l’Espagne ne laissaient subsister dans l’homme que les instincts fondamentaux. Objet mystérieux, véritable préfiguration de l’art moderne, à plusieurs titres, la célèbre suite des Caprices anticipe la syntaxe satirique contemporaine. En correspondance avec l’exposition des Caprices, le Palais des Beaux-Arts propose de témoigner de l’héritage satirique de Goya. Le caprice contemporain, tout comme la satire du maître espagnol, puise ses ressorts dans l’élégance critique et l’impertinence lucide. Moins évidente que la caricature ou le gag insolent, la satire touche de façon autrement plus profonde. Pour autant, elle ne fait pas preuve d’angélisme en considérant l’art comme un absolu coupé des déterminismes psychologiques et psychanalytiques, sociologiques et historiques. Dans le sillage des avant-gardes polémiques (Futurisme, Dada, International Situationniste, Fluxus,…) et des sciences humaines qui constituent les références majeures de leur formation, les artistes contemporains ont acquis la conviction que l’art doit interroger selon un point de vue conceptuel et critique pour nourrir pleinement une spéculation esthétique. En ce début de 21e siècle, la force corrosive et critique de l’art contemporain découvre l’envers du miracle du libéralisme et de la mondialisation. Comme chez Goya, le triomphe du sarcasme et du cynisme de la société trouve dans la satire son contrepoint idéal pour représenter les traits pathologiques d’une société qui perd son centre de gravité, ses repères et ses valeurs, voire son regard. Sans jamais céder à la facilité expressive, sans s’attarder sur les ressorts comiques, les satiristes de l’art contemporain ne donnent pas raison aux critiques méprisantes. La satire contemporaine n’est pas la caricature. Elle n’est pas aussi à confondre avec le grotesque. Les déformations, les métamorphoses ou les hybridations sont vues comme les allégories d’une idée ou d’une situation. Fables ou farces tragiques, narrations romanesques ou sketchs, neutralité documentaire ou distance grotesque, sous des formes diverses, la satire contemporaine atteint des profondeurs indûment réservées au drame et à la tragédie. Nous retrouvons ici la quintessence de l’art de Goya. Table des caprices Francisco Goya y Lucientes, peintre Elles prononcent le “oui” et tendent la main au premier venu Voici le Croque-mitaine Le Vieil Enfant gâté Qui se ressemble, s’assemble Personne ne se connaît Même de si près, il ne la voit pas ! Et ils l’ont enlevée ! Tantale L’Amour et la Mort Au travail, les enfants ! La Chasse aux dents Ils s’échauffent Quel sacrifice ! Jolis conseils Dieu lieu pardonne : et c’était sa mère ! Il est bien tiré Et sa maison brûle Ils tomberont tous Les voilà plumés ! Comme ils la plument ! Pauvres petits ! Telle poussière Il n’y a rien eu à faire Mais il a cassé la cruche Les voilà bien assises Quel est le plus soumis ? Chut ! Voilà qui s’appelle lire Pourquoi les cacher ? Elle prie pour elle Parce qu’elle fut sensible Au comte Palatin Vaincues par le sommeil Elle le plume Mauvaise nuit L’élève en saurait-il plus ? Bravissimo ! Jusqu’à son aïeul De quel mal mourra-t-il ? Ni plus ni moins Toi qui n’en peux mais ! Le sommeil de la raison enfante des monstres Elles filent fin Il y a beaucoup à sucer ! Correction Hommage au Maître Mouchards Petits gnomes Les Chinchillas Ils se bichonnent Ce que peut un tailleur ! Quel bon bec ! L’homme honteux Jusqu’à la mort Monter et descendre La Filiation Avale, chien ! Et ils ne s’en vont pas encore ! Essais Volacerunt Qui le croirait ? Voyez comme ils sont serieux Bon voyage Où va maman ? Ils s’en vont par là ! Attends qu’on te graisse... Jolie maîtresse ! Souffle Profession de foi Voici l’aube, nous partons ! Tu ne t’échapperas pas Mieux vaut se la couler douce Ne crie pas, sotte ! Il n’y a personne pour nous détacher ? Vous y êtes ?... Comment dire... Eh, attention, sinon ! Chacun son tour Vite, ils vont s’éveiller Personne ne nous a vus C’est l’heure Songe. Du mensonge et de l’inconstance Lamentations sur un chien blessé Vieille femme et un soupirant Telle poussière... Un catalogue sera publié avec la reproduction de la série complète. Auteurs pressentis : Alain Tapié, conservateur en chef, directeur du Palais des Beaux-Arts de Lille. Cordelia Hattori, chargé du cabinet des dessins, Palais des Beaux-Arts de Lille. Catriona Seth, professeur de litterature, Université de Nancy. Simon André-Deconchat, doctorant, pensionnaire à l’INHA, Institut National d’Histoire de l’Art et Nicole Van Hoeke Exposition : Le caprice contemporain Liste des artistes et des œuvres pressentis : Volumes et installations, lieu d’exposition : Atrium Wang Du : Défilé / FNAC, Paris Thomas Shütte : Série “United Enemies”, 1993 / Centre Pompidou Erwin Wurm : Adorno as Oliver Hardy In The Bohemian Girl (1936) And The Burden Of Desperation, 2006 / Galerie Xavier Hufkens Pierre Joseph : Oogie l’ectoplasme, Collection frac Champagne-Ardenne, Reims Gilles Barbier / Galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois, Paris Olivier Blanckart / Loevenbruck, Paris Richard Fauguet / Art: Concept, Paris Gloria Friedmann : Envoyé spécial / Cent8, Paris Maurizio Cattelan Jake & Dinos Chapman Damien Hirst Paul Mc Carthy Rona Pondick Peintures, estampes et photographies contemporaines, lieu d’exposition : William Kentridge : Suite de cinq dessins, Man with Hat / Frac Picardie Christian Boltanski : Saynètes comiques, 1974 / Centre Pompidou Arnulf Rainer : Face Farces / Frac Picardie Glen Baxter : Série Que Sais-Je? / Frac Picardie Pierre & Gilles / Jérôme de Noimont, Paris Philippe Ramette / Xippas, Paris Cindy Sherman / Centre National de la Photographie Glen Brown John Currin Keith Edmier Simon Larbalestier Vidéo Matthew Barney : Cremaster 4 / Galerie Barbara Gladstone, New-York Ugo Rondimone : If There Were Anywhere But Desert + Where Do We Go From Here ? / Galerie Almine Rech, Paris Cinéma Portrait Carlos Saura : Goya, 2002, Espagne, Italie, 1h42, couleur avec Francisco Rabal, Jose Coronado, Maribel Verdu, Eulalia Ramon... 1828. Francisco Goya a 82 ans. Après avoir fui le régime répressif de Ferdinand VII, il vit en exil à Bordeaux avec sa dernière maîtresse, Leocadia et il reconstitue pour sa fille Rosario les principaux événements de sa vie. Ecrit et mis en scène par Carlos Saura , le film nous fait pénétrer dans l’enfer mental de Goya et s’approche au plus près de sa sombre fibre créatrice. La satire au cinéma Peter Greenaway : Le Cuisinier, le voleur, sa femme et son amant, 2h, film néerlandais, britannique, français, 1989 Avec Richard Bohringer, Helen Mirren, Tim Roth «Le modele de l’histoire est la tragedie classique de la vengeance, avec un accent mis sur les fonctions du corps humain: manger, boire, defequer, copuler, roter, vomir, se devetir, saigner... Le titre du film suggere son intrigue: une liste de quatre personnages formant l’eternel triangle amoureux avec le cuisinier dans le role de l’outsider. Le film s’articule autour du voleur, incarnation parfaite du mechant. Il ne possede aucune qualite.» Peter Greenaway Larry Charles : Borat, leçons culturelles sur l’Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan, USA, 90’, 2006 Avec Sacha Baron Cohen, Ken Davitian, Pamela Anderson… Borat, reporter kazakh, est envoyé aux Etats-Unis par la télévision de son pays pour y tourner un reportage sur le mode de vie de cette nation vénérée comme un modèle. Au cours de son périple, il rencontre de vraies personnes dans des situations authentiques, avec les conséquences les plus incroyables. Son comportement à contre-courant provoque les réactions les plus diverses, et révèle les préjugés et les dessous de la société américaine. Gus Van Sant : Prête à tout (To Die For), 107 mn, film britannique, américain, 1995 Après avoir enterré ses années « star du cinéma indépendant » avec le flop d’Even Cowgirls Get The Blues (1993), Gus Van Sant s’essaie au cinéma de studios avec une comédie satirique sur l’arrivisme pour Nicole Kidman. La réussite est totale. Kidman est révélée à elle-même, mise à nue dans sa folie propre. Gus Van Sant, très à l’aise dans ce registre persifleur, affirme son extraordinaire mobilité. Et déjà quelques teens désespérés (Joaquin Phoenix, Casey Affleck) pointent le bout de leur nez. Autres propositions : Fantaisie militaire Stanley Kubrick : Docteur Folamour présenté par Michel Ciment La Farce Marco Ferreri : La grande bouffe invité : Michel Piccoli Concert Von Magnet Spectacle de danse flamenco sur des musiques électroniques originales, accompagnée d’instruments live: guitares, trompette, percussions… et de projections vidéo. Troupe de danseurs, performeurs, musiciens de l’élite électronique française ; ils sont les seuls représentants d’un genre qu’ils ont eux-même créé : l’Electro-flamenco. Comme le flamenco des origines, la musique de Von magnet palpite, à la fois âpre et rugueuse, douce et vénéneuse, triste et extatique, sauvage et mathématique. Par l’expressionnisme des guitares flamenco, le lyrisme des voix, la pulsion des percussions, le martèlement des pieds, les climats sonores et cinématographiques, un lien se tisse entre la tradition et la création en marche. Colloque & rencontres publiques La satire dans l’art du XVIe au XXe siècles : Conférences autour de Goya, son œuvre gravé, son influence esthétique, la fortune critique des Caprices, son héritage contemporain. Autour de la satire médiatique avec : Les auteurs des Guignols de l’Info (canal+) Les rédactions du Canard enchaîné, Charlie-Hebdo … Littérature Régis Jauffret : Lecture des Microfictions (extraits) 500 fictions d’une page et demie exactement, au cœur des microcosmes sociaux et de leur dérive. L’écriture est ici acérée et si elle plonge dans quelques existences renfermées, c’est parce que Régis aime à tourmenter l’aspect maniaque de la nature humaine. Ce pavé de Jauffret est donc une sorte d’encyclopédie du juste vivre.