Patrimoine marin, géologique et botanique

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Patrimoine marin, géologique et botanique
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Les Jardins de l’Espérance
Chemin des poissonniers 13600 La Ciotat
Particularités biologiques et géologiques des falaises
de LA CIOTAT et de l’ILE VERTE
et du milieu marin environnant
Jacques Laborel
Professeur honoraire
Université de la Méditerranée, Marseille
Préambule
Le Golfe de la Ciotat et les cotes rocheuses qui le bordent au Sud et au Sud Ouest sont
souvent mal connus des plaisanciers qui, venant de l’Est, préfèrent souvent tirer
directement depuis Porquerolles vers les Iles de Marseille. Randonneurs, escaladeurs,
spéléologues et plongeurs en connaissent par contre bien la beauté et l’originalité.
Géologie
Les falaises de Cassis et de la Ciotat constituent un ensemble géologique d’une extrême
importance pour la compréhension de la géographie de notre région au Crétacé supérieur,
il y a une centaine de millions d’années. A cette époque (Turonien), la région des
calanques marseillaises était sous les eaux (non pas de la Tethys, océan qui donna
naissance à la Méditerranée, mais d’un golfe du domaine atlantique, couvrant à l’époque
une partie de l’Espagne), la région de la Ciotat par contre formait une baie peu profonde,
entourée au Nord et Nord-ouest par un arc de récifs et limitée au Sud par une grande île
(ou plusieurs) située au Sud, séparant ce golfe de l'océan Tethys au sud.
De cette île coulait un torrent, comparable à notre Durance actuelle et venant du Sud–est.
Les cailloutis du delta de ce torrent, provenant sans doute d’une région gréseuse d’age
Permien, ont constitué les magnifiques formations de poudingues, uniques en France, qui
vont du Soubeyran jusqu’à l’île Verte en formant au passage le massif des Trois Secs. Des
formations récifales à base de Rudistes, d’Eponges calcifiées et de coraux s’entremêlent
d’une façon spectaculaire, en particulier au Pont Naturel (le détail de ces interactions
n’est pas totalement connu et fait l’objet de recherches)
Les falaises de la Ciotat, ne sont donc pas une simple « suite » des calanques
marseillaises mais une formation originale, à la fois différente et complémentaire des
falaises calcaires de la cote des calanques dont elles diffèrent par leur morphologie, leur
flore et même leurs couleurs.
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1) Calanque de Gameu : trottoirs biologiques et concrétions exceptionnelles.
2) Grotte des Trois Pépés : exceptionnelle enclave abyssale à faible profondeur..
3) Balise des Canonniers du Sud, comporte, outre des épaves des formations récifales
exceptionnelles et le gisement le moins profond de corail rouge connu .
4) Anse du petit Mugel où fonctionne depuis 1986 un sentier sous-marin, créé et animé
par l’Atelier Bleu
5) Pont naturel sous-marin, dit « grotte à la Vierge » ou « Grotte à Gaby »
6) et 7) Pierres de l'île Verte, situées entre 20 et 50 mètres de profondeur, coeur de la zone
plongeable de notre région, célèbres par leur richesse en poissons et en invertébrés
spectaculaires
8) Pentes sous-marines du Cap de l’Aigle, taffoni immergés.
Les poudingues et les falaises
Les poudingues de galets gréseux mêlés de quelques galets calcaires, forment des
couches dont le fort pendage vers le Nord est du en partie à celui, originel, des pentes du
delta sous-marin et aux modifications tectoniques ultérieures. Les formes d’érosion sont
spectaculaires et leur vision, en particulier dans les chaudes lumières de l’après midi
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constitue un spectacle fascinant. Ce sont d’abord des érosions différentielles, localement
appelées « parpelles » en raison de leur ressemblance avec des paupières dans lesquelles
les couches plus résistantes sont en fort relief. ; d’autre part de vastes abris sous roche en
fort surplomb, excavés dans la falaise et appelés du vocable d’origine corse « taffoni On
considère que ces formes d’érosion ne sont plus actives mais fossiles et qu’elles se sont
formées pendant les périodes glaciaires quand le niveau de la mer était plus bas ; ceci
explique que l’on retrouve des taffoni submergés jusqu'à une cinquantaine de mètres de
profondeur.
Enfin, en allant vers l’ouest on remarque l’alternance en «tranche napolitaine» de
poudingues et de calcaires récifaux blanc. Ceci peut être expliqué par des divagations
périodiques du delta vers l’est permettant aux récifs de s’établir puis les recouvraient de
galets quand la rivière se dirigeait de nouveau vers l’ouest (d’autres interprétations sont
aussi proposées).
Les galets gréseux doivent leur couleur rougeâtre a des sels métalliques. Au cours des
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millénaires, ceux ci, tout d’abord répartis en couches, migrèrent à l'intérieur des galets
pour donner des formations en anneaux concentriques bien visibles en section.
Les galets, après dissolution du ciment calcaire, retombent souvent dans le milieu marin,
ils fournissent les galets des plages du Mugel et de Figuerolles
Les conditions océanographiques
Notre région est particulièrement intéressante du fait de la forte influence des eaux
froides des grands fonds qui remontent (phénomène dit d’ upwelling) du Canyon de la
Cassidaigne par jours de Mistral. L’influence de ces eaux froides (aux alentour de 12-13°)
se fait très rapidement sentir sur nos plages dés les début des coups de vent, entraînant en
quelques heures une perte de plusieurs degrés de la température de surface. Si ce
phénomène est désagréable sur le plan balnéaire, il a par contre un effet salutaire
important sur la répartition, la richesse biologique et la santé de nos peuplements marins.
C’est en particulier à ce contrôle thermique que l’on doit la richesse exceptionnelle de nos
eaux en grand Invertébrés fixés, ainsi que les conditions particulières qui font de la grotte
dite des Trois pépés un des très rares « laboratoire sous-marin naturel » connus au monde
pour l étude en plongée des organismes des grands fonds. . Enfin, si notre zone, comme
toute la côte provençales est soumise au courant ligure venu de l’est, l’influence de ce
courant, qui ne passe pas trop près des côtes dans la région de la Ciotat, est relativement
faible par rapport à celle du Mistral.
La cartographie biologique des fonds du Golfe, une de plus complète des côtes françaises,
a été effectuée par les équipes de la Station marine d’Endoûme jusqu’aux années 1980
(Bourcier et Picard 1976, Bourcier 1979, 1980) Ces études ont en particulier permis
d’établir que l’envasement des fonds du Golfe était inversement proportionnel à
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l’abondance des jours de Mistral. Les travaux de suivi de l’herbier de Posidonies ont été
ensuite continués par les équipes du GIS Posidonie (Charbonnel et Francour 1994).
Les peuplements marins littoraux
Les peuplements terrestres halophiles Nous ne ferons que les citer ici mais ils
sont d’un intèrêt exceptionnel, d’une part par la présence d’un certain nombre d’espèces
phanérogamiques rares, notamment l’ibèrique Anthyllis cytisoides, (voir en Annexe le
rapport de Monsieur Paul Moutte). Ils présentent des caractèristiques différentes de ceux
des calanques de Marseille par suite des différences de substrat et de microclimat..
Les peuplements marins superficiels : (supralittoral et médioliittoral) Ils se
distinguent de ceux de la région occidentale des calanques calcaires par la présence
occasionnelle d’algues calcifuges comme Rissoella verruculosa et par l’absence
d’érosion mediolittorale. En effet la nature siliceuse des galets constituant le poudingue
ne se prête pas au développement d’algues filamenteuses (Cyanobactéries) perforant la
roche et donc à l’érosion biologique due aux arapèdes (Patella sp.). Le résultat est que la
zone médiolittorale, c’est à dire celle qui est soumise au mouvement habituel de la mer,
ne permet pas le développement d’une encoche littorale.
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Le trottoir d’algues calcaires Tout le long des falaises et sur les parties les plus
exposées au ressac de l’île verte, le développement des algues calcaires mediolittorales,
Lithophyllum lichenoides en particulier est suffisant pour qu’un « trottoir » calcaire en
encorbellement puisse s’y développer, en particulier quand la roche présente des entrants
et des fissures . Ces trottoirs sont formés par les thalles calcaires de l’algue qui forment
des coussinets sur la roche et se superposent les uns aux autres, finissant par se solidifier
en un ciment dur et résistant que seuls peuvent détruire les Oursins et les Éponges
perforantes. Les algues calcaires du trottoir ne se développant que dans les 20 centimètres
immédiatement au dessus du niveau moyen et elles sont tuées en cas de montée montée
du niveau marin ; leurs restes calcaires cimentés et très durs sont alors recouverts par
d’autres espèces algales qui peuvent les protéger pendant quelques millénaires de
l'érosion biologique des Oursins et des Éponges perforantes.
Ces restes fossiles, si on arrive à les échantillonner et à les dater par le Carbone 14,
représentent donc des témoins des positions anciennes du niveau marin au cours des
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derniers millénaires et leur relevé permet d’établir une courbe de la remontée du niveau
marin aux temps historiques.
Les « trottoirs » algaux de Gameu, enregistreurs des variations du niveau marin :
C'est dans cette calanque que notre équipe a pu tracer, pour les 4000 dernières années une
courbe de l’évolution du niveau marin qui peut servir de référence pour l’ensemble des
côtes provençales. Nous avons ainsi pu montrer que le niveau marin, contrairement aux
idées acquises, se situait aux alentours de 40 centimètres au dessous du niveau actuel à
l’époque romaine et vers moins 60-80cm il y a 2600 ans lors de la fondation de Marseille.
La courbe obtenue montre également que la montée du niveau de la mer s’est beaucoup
ralentie au cours des dernières 1500 années, pour repartir au XX° siècle, en accord avec
ce que nous pensons être du au réchauffement climatique actuel.
Enfin, cette étude, corroborant les observations des peintures rupestres de la grotte
Cosquer, a montré, par l’absence totale de restes de calcaire algal au dessus du niveau
actuel, que celui ci n’avait jamais été dépassé par la mer pendant les derniers millénaires.
Les fonds et les paysages sous—marins du golfe de La Ciotat
Les paysages sous-marins de la régions de la Ciotat sont connus pour leur beauté et l’Ile
Verte en particulier est considérée comme un site ramarquable (Mouton, 1981). Nous les
analyserons brièvement en fonction de la profondeur croissante et de l'éclairement
décroissant.
Les petits fonds rocheux et les peuplements de forte lumière
.
Les fonds rocheux à faible profondeur sont couverts par des peuplements algaux à base
d’algues brunes, amis de la lumière. Comme partout en Méditerranée occidentale l’algue
rouge invasive Asparagopsis armata, apparue dans nos eaux dans les années 1920 s’y
développe en abondance au printemps sans préjudice apparent pour les peuplements
autochtones. Plus intéressant est le fait que le Golfe de la Ciotat et les falaises
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Soubeyrannes n’ont jusqu’à présent pas encore été touchées par les Caulerpes invasives
(Caulerpa taxifolia et Caulerpa prolifera).
La forêt de Posidonies
Les zones bien éclairées, au large des falaises et tout autour de l’île Verte, portent de
denses prairies de Posidonies (Posidonia oceanica) (a) espèce protégée qui peut se
développer aussi bien sur la roche (en particulier sur les « ragues » calcaires du fond du
Golfe, dans la zone du Cap de La Vierge (e) que sur du sable. Ces prairies sont
régulièrement étudiées et cartographiées par les laboratoires de notre région (GIS
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Posidonie) et s’étendent jusque devant le port de La Ciotat ; Comme dans toute notre
région ces prairies sont surtout intactes en dehors des zones de forte activité humaine (en
particulier devant l’entrée du vieux Port où elles sont assez fortement dégradées) Elles
sont par contre florissantes sur le littoral Nord de l’île Verte et dans la passe entre celle-ci
et la terre. Avec le réchauffement climatique, les Posidonies paraissent maintenant fleurir
régulièrement (b) alors que ce phénomène était considéré comme exceptionnel il a
seulement une quarantaine d’années. Les Poissons de l'Herbier sont essentiellement la
Saupe Sarpa salpa, principal herbivore de nos eaux (c) et les Serrans Serranus spp. (d).
Enfin des prairies denses de la Gorgone blanche Eunicella singularis (e) peuvent se
développer sur roche en concurrence avec l'herbier.
Un certain nombre d’autres espèces, rares ou d’un intérêt biologique particulier se
trouvent aussi dans le secteur compris entre le Mugel et la dorsale des Canonniers :
en particulier le Madréporaire Cladocora cespitosa (b), le seul « corail récifal » de
Méditerranée, y est assez commun, ainsi que l’éponge en tubes jaunes verdâtre Verongia
aerophoba (c) assez rare dans notre région, qui y développe des colonies de grande taille
à faible profondeur (Nego fremo) . On peut noter aussi de beaux peuplements de
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Zoanthaires, Parazoanthus axinellae, jaune vif, mais surtout, bien moins répandu
d’Epizoanthus arenaceus (d) de couleur blanc transparent, ainsi que du « corail sans
squelette » Corynactis viridis que l’on trouve qu’à très faible profondeur (moins de un
mètre) dans la calanque de Nego fremo et sur le socle de la balise des Canonniers.
Enfin la grande Nacre Pinna nobilis (a) qui avait pratiquement disparu commence à se
retrouver, depuis sa protection, en particulier dans l’herbier des Canonniers.
Le passage aux peuplements d'ombre (sciaphiles) est souvent brutal sur roche où les pans
verticaux ou les cots 'une fissure peuvent porter des peuplements très contrastés
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Les peuplements de lumière faible
Entre le Sémaphore et les pierres de l'île Verte ainsi qu’autour de la Balise de La
Cassidaigne, s’étendent des fonds sous-marins d’une beauté exceptionnelle et d’une
morphologie très originale. En particulier les peuplements correspondant à la biocénose
« coralligène » qui se développent sur roche à partir d’une certaine profondeur, ainsi que
dans les zones naturellement ombragées, sont parmi les plus riches et les plus beaux des
cotes provençales.
Les espèces fixées de grande taille y sont nombreuses. Les parois verticales ou
« tombants » surtout celles qui sont soumises aux courants côtiers, portent de denses
peuplements de Gorgones violettes (Paramuricea clavata) et jaunes (Eunicella cavolini)
alors que sur les parois légèrement inclinées entre 10 et 40 m de denses prairies de la
Gorgone blanche (Eunicella singularis) se développent. On note aussi de nombreux
individus du grand Spongiaire rameux Axinelle polypoides ainsi que de petits
peuplements de la gorgone grêle, Lophogorgia ceratophyta, qui tend a devenir plus
commune depuis une dir-zaine d’années Ces remarquables « bosquets animaux », très
sensibles à la pollution, qu’elle soit chimique, sédimentaire ou thermique, ont été touchés
par plusieurs crises récentes en 1984 et 1999 (Garrabou et al. 2001) mais semblent avoir
un bon potentiel de récupération, elles sont cependant très sujettes à dégradation,
notamment du fait des ancrages des bateaux de pêche et de plongée (Blouet et al. 2006).
Les parois verticales et surplombantes sont très fortement couvertes et colorées,
notamment par des Spongiaires encroûtants et des Bryozoaires
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Une autre caractéristique des fonds marins des falaises et du golfe de la Ciotat est le
grand développement des formations « récifales » construites par des Algues calcaires.
Celles-ci (en particulier l’algue calcaire Mesophyllum lichenoides de couleur rose pale) se
développent dés une quinzaine de mètres de profondeur et peuvent donner des masses de
taille considérable avec des morphologies très particulières. C’est ainsi que des formes en
« murette » ou en « draperies » ont été décrites de la dorsale des Canonniers et de la
région de Figuerolles (Laborel 1961) ainsi que des formations en « piliers » à très faible
profondeur qui, pour l'instant, ne sont connues que dans les grottes-fissures de la
Calanque de Gameu (Sartoretto, 1994). Si certaines de ces formations, comme celles de la
calanque de Figuerolles, ont été en partie détruites depuis l’époque de leur description
(sans doute du fait de la pollution des eaux de la station d’épuration de la Ciotat dont
l’exutoire est tout proche), il n’en est pas de même partout.
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Il existe en particulier, en arrière et autour de la balise des Canonniers sud une série
exceptionnelle de formes construites par le Mesophyllum à la profondeur de 15 à 20
mètres :
Ces formes en murettes, boules libres, voire corniches larges de plus de un metre et
perpendiculaires aux parois, sont actuellement en très bon état et florissantes. C’est ainsi
qu’une fissure de quelques mètres de largeur située immédiatement au sud de la balise
montre une série d’encorbellements horizontaux dépassant un mètre de large et
représentant plus de 2000 ans de croissance continue des algues calcaires.
Le corail rouge
Corallium rubrum, le corail rouge précieux, est très abondant dans la baie de La Ciotat;
sous tous les rochers surplombants et les plafonds de grottes à partir d’une dizaine de
mètres seulement. Dans la passe entre la Balise des Canonniers et l’île Verte, il existe
certaines fissures dans la roche dont les parois sont entièrement couvertes de jeunes
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branches de corail malgré les prélèvements de certains corailleurs plus ou moins
autorisés. Une profondeur aussi faible est exceptionnelle dans notre région provençale.
En effet si la limite supérieure de l’espèce se situe vers –15m dans la région marseillaise,
elle est de 20-25m dans la région de Porquerolles et de plus de 60m à Port Cros ; en
Corse elle va de 20-25m dans la Réserve marine de Scandola à plus de 60m sur les cotes
ouest du Cap Corse. Les avis varient sur la signification de ces différences de profondeur
minimum (Harmelin 2004). Il pourrait s’agir au moins en partie de l’effet des remontées
d’eaux du Canyon de la Cassidaigne.
Cependant, il faut noter que, malgré la densité du peuplement, la taille moyenne des
branches reste extrêmement faible, de l’ordre de quelques centimètres dans les fissures
des Canonniers.
Ceci est du à l’extrême lenteur de la croissance de cette espèce (Marschal et al. 2004) et
aux prélèvements répétés. La protection de cette zone permettrait de laisser les plafonds à
corail se développer, en jouant un rôle plus important dans l’ensemencement des parois
rocheuses de la région en individus de cette précieuses ressource renouvelable.
Sur les côtes méridionales de l’île Verte et sur les haut-fonds rocheux à l’est de celle ci,
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par contre, le corail rouge se localise essentiellement dans les grottes et sous les
surplombs construits des concrétionnements coralligènes à une profondeur moyenne de
35 à 45m, sans doute par manque de substrats convenables à plus faible profondeur.
On notera que, comme d'autres grands invertébrés, le Corail rouge a été touché par les
mortalités récentes, en particulier celle de 1999. Cependant les peuplements des fissures
dans la passe de l’île Verte ont récupéré en quelques années une forte densité de colonies.
Les grottes sous-marines
Malgré la nature non calcaire de la roche, les grottes et surplombs sont nombreux au pied
des falaises et autour de l'île Verte, quoi que généralement de moins grandes dimensions
que sur la cote des Calanques de Cassis. On trouve trois types de grottes.
a) - Des « taffoni » de dimensions métriques à décamétriques creusés pendant les
périodes glaciaires et immergés pendant la dernière transgression marine. On en trouve de
beaux sur les tombants externes de l'île Verte et sous le Cap de l’Aigle.
b) - Des grottes-fissures de dimensions variables, moins d’une dizaine de mètres pour les
plus petites, qui correspondent en général à des réajustements de blocs faillés, comme les
petites grottes autour de la balise des Canonniers, beaucoup plus pour celles creusées
dans les falaises, notamment dans la calanque de Gameu ou un réseau de failles larges de
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deux mètres seulement s’étend a plusieurs dizaines de mètres à l’intérieur de la falaise.
c) – Des grottes d’empilement de blocs comme au pied du haut-fond sud de la
Cassidaigne par –35m (qui correspondent à un ancien niveau marin)
d) - Beaucoup plus rares, des « ponts naturels » : grottes à deux ouvertures correspondant
au dégagement de la roche sous une dalle. La plus connue est la grotte « à la Vierge » ou
« à Gaby » à travers la dorsale des Canonniers qui est très fréquentée.
e) – Des grottes d’origine biologique, dues au développement des formations algales
coralligènes qui se développent le long des parois en laissant des espaces libres parfois
importants, ou à la fermeture d’auvents rocheux par des « murettes » concrétionnées
(dorsale des Canonniers)
Le cas de la grotte des ‘trois pépés »
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Is’agit d’un cas très rare de grotte obscure à profil inversé par rapport à celles, karstiques,
des calanques marseillaises et qui se comporte comme un piège quasi-permanent pour les
eaux froides à 12-13° remontant du canyon de la Cassidaigne.Comme la Méditerranée est
une mer isotherme où la température des plus grands fonds (5000m dans la fosse de
Matapan) ne descend pas au dessous de 12°, les conditions de luminosité et de
température sont celles des grands fonds et de nombreuses larves en provenance de 2000
m peuvent donc s’y maintenir et se développer normalement. Le fond de la grotte n’étant
qu’à quelques 28m de profondeur, c’est en toute sécurité que les biologiste peuvent
étudier et prélever des espèces abyssales dans leur milieu de vie sans avoir à leur infliger
le traumatisme d’une montée de plusieurs kilomètres. C’est donc dans cette grotte,
véritable laboratoire sous-marin naturel que les chercheurs N. Boury-Esnault et J.Vacelet
découvrirent Asbestopluma hypogea, l’éponge carnivore, un véritable phénomène
zoologique, vivant normalement jusqu’à plus de 8000m de profondeur et plusieurs autres
espèces nouvelles. Une autre grotte de ce type a été récemment découverte dans
l’Adriatique.
La faune ichtyologique
De tout temps le Golfe de La Ciotat a été connu pour la richesse de ses peuplements de
Poissons.. Cependant, durant les dernières années de la dernière guerre le développement
d’une chasse sous-marine de subsistance, due aux restrictions avait entraîné une
raréfaction considérable des espèces littorales de grande taille et de capture facile comme
le Mérou, le Corb et les grands Labres. Par contre les multiples espèces de petite taille,
moins touchées par la pêche et la chasse; les essaims de « barbier » Anthias anthias et de
Girelle, Coris julis faisaient et font toujours de nos tombants un spectacle très coloré,très
recherché des photographes sous-marins.
Fig : à gauche Apogon imberbis des grottes, à droite un Barbier Anthias anthias
Au cours des dernières décennies un certain nombre de mesures de protection visant des
espèces menacées ont produit des effets spectaculaires. En particulier le Mérou
Epinephelus guaza, devenu rarissime dans les années 1950 a maintenant reconstitué ses
effectifs comme le montrent les recensements du Groupe d’Etude du Mérou. Sur les
hauts-fonds à l’est de l'île Verte ce Poisson est devenu une véritable attraction, attirant
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dans nos clubs des milliers de plongeurs étrangers.
Parmi les espèces abondantes, sur les herbiers, les bancs de Saupes (Sarpa salpa) les
différentes espèces de Sars et en particulier le Sar tambour Diplodus cervinus, autefois
extrêmement rare qui se trouve mainteant par très petits groupes ou par individus séparés.
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Les grands carnivores semi-pélagiques comme les Dentis Dentex dentex, les Dorades
(Sparus aurata) et les Sérioles (Seriola dumerili). Certaines espèces cependant comme les
Corbs et les grands Labridés ne se sont que très modérément multipliés. On peut
cependant dire que les populations ichtyologiques du Cap de l’Aigle et de l’île Verte
apparaissent en bon état. Les eaux sont également fréquentés par de grandes espèces
pélagiques de grandetaille; Thons, Requin pèlerin et Poisson-lune en particulier. Quelques
grands tortues marines sont parfois même aperçues en été.
On note l’abondance des Poissons benthiques, différentes espèces de Scorpènes ; Serrans,
petits Labridés, Mostelles, Murènes, Congres etc.
Dans un autre domaine on enregistre aussi l’établissement récent, à très faible profondeur
d’une population de la Girelle-paon, Thalassoma pavo, Poisson originaire du sud et de
l’est de Méditerranée. Autre conséquence du réchauffement des eaux le Barracuda
Sphyraena sphyraena est maintenant commun, ainsi que d'autres espèces d’eaux chaudes.
Sur le plan des petites espèces notons la grande richesse spécifique du Cap de l’Aigle en
Gobiidae et Blenniidae, avec plusieurs espèces encore peu connues.
La Ciotat, atelier de pédagogie sous-marine.
La Ciotat a toujours été une ville où les sports marins (voile, planche à voile, plongée)
sont enseignés aux enfants par des clubs et associations nombreux et dévoués. La richesse
et la clarté de nos eaux en on fait depuis des décennies un véritable haut-lieu de la
plongée sous-marine avec des clubs parmi les plus anciens de France comme le G.P.E.S.
Depuis une vingtaine d’années, dans le cadre de l’Atelier bleu du Cap de l’Aigle, de
nombreuses activités de pédagogie sous-marine ont été expérimentées. (Laborel et
Laborel-Deguen, 1991), en particulier :
.
Un sentier sous-marin dans la calanque du Petit Mugel : ce sentier a été ouvert dès 1986
et visité au masque et au tuba par de nombreuses classes d’écoles de La Ciotat et de la
région. Un certain nombre d’innovations comme l’utilisation de projecteurs sous-marins
pour l’étude des petites grottes littorales y ont été expérimentées.
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L’utilisation de la télévision sous-marine interactive : inauguré en 1989 sous le
nom de « projet GOBIE » il s’agissait d’une classe sous-marine « à sec » dans laquelle les
enfants dialoguaient depuis la terre avec un plongeur muni d’une caméra video et d’un
système téléphonique. Ce système unique en France a fonctionné plusieurs années et reçu
des milliers d’écoliers
Enfin, profitant de l’existence à La Ciotat de l’entreprise SMAL Industries,
malheureusement disparue, qui fabriquait alors de petits sous-marins à vocation
touristique nous avons pu procéder , en première européenne, à l'expérimentation de
l'utilisation pédagogique de ceux-ci,. Il n’est pas interdit de penser que la création d’un
parc sous-marin permettra de reprendre ces expérimentations sur une grande échelle,
plaçant La Ciotat au tout premier plan des villes européennes en ce qui concerne la
pédagogie marine des enfants.
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Naturelle du Bagnas Domaine du Grand Clavelet Route de Sète N 112 – 34300 Agde
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Document internet :Espèces, peuplements et paysages marins remarquables de La Ciotat
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ANNEXE I
INTERET DE LA VEGETATION TERRESTRE.
DU PARC DU MUGEL ET DU CAP DE L'AIGLE
Paul MOUTTE
Maitre de Conférences à l'Université de Provence
Rapport dactylographié pour le compte de l’Atelier Bleu du Cap de l’Aigle,
1987
I. GENERALITES
Dans ce travail de reconnaissance, nous n'avons considéré que les plantes supérieures (Fougères, Gymnospermes, Angiospermes) en excluant les Lichens et
Champignons Les notes prises en cours d'excursion permettent, non pas de donner un recensement exhaustif des espèces mais de tracer une esquisse de la végétation et des associations végétales.
2 LES ESPECES RENCONTREES
Si la majorité des végétaux rencontrés apppartient au fond commun floristique de notre région , il n'en est pas moins vrai que de nombreuses espèces
présentent un intêrêt notoire, car leur présence est due à des combinaisons de facteurs geologiques, climatiques ou historiques propres à la zone en question.
A ) Les espèces autochtones
On reconnaitra des plantes liées aux facteurs edaphiques (nature du sol) qui
peuvent être liées :
a) à la nature siliceuse du substrat (poudingues de la Ciotat) particulièrement
pauvre en calcaire; ce sont surtout : L'arbousier (Arbutus unedo), la bruyère arborescente : (Erica arboréa,) la Lavande des îles (Lavandula stoechas), espèces
communes en Provence cristalline (Cap Sicié, Maures, etc) mais très rares en
Provence occidentale calcaire où on ne les trouve qu'associées à des affleurements géologiques particuliers.
La station de Lavande des îles en particulier est une des trés rares connues
dans les Bouches du Rhône. On note de plus que la présence de certaines espèces
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introduites par l'homme, comme le chatâigner et le chêne-liège n'est rendue possible que par l'absence de calcaire. La présence d'une très faible couche de sol,
peu piètinée, alliée aux caractéristiques chimiques du rocher nous vaut la présence de nombreuses plantes à bulbe caractéristiques des pelouses méditerrannéennes xériques et en particulier d'une belle flore d'Orchidacées : dont les trés
beaux Barlia robertiana, Orchis champagneuxi, Ophris holosericea, Serapias
spp., Spiranthus automnalis , S. aestivalis etc.
b) à la présence du sel : liées aux embruns : tous les rochers littoraux (notamment dans le secteur du Cap de l'Aigle et de l'île Verte) présentent un beau développement de cette flore, dite halophile. Nous avons même eu la surprise de rencontrer l'une de ces espèces : la Carotte maritime Daucus gingidium, au niveau du
Belvédère des Parpelles, à environ 80 mètres au dessus du niveau de la mer!
c) à des facteurs climatico-historiques : une légumineuse ibérique : l'Anthyllis
à feuilles de Cytise (Anthyllis cytisoides), petit arbuste au feuillage gris et poilu,
aux belles fleurs dorées, se rencontre ici en bordure des falaises littorales : cette
localité (et celle du Fort Sainte Marguerite à Toulon) marquent l'extrêmité orientale de l'aire de répartition de cette espèce normalement répandue dans les Pyrénées Orientales, l'Espagne et l'Algèrie. Il en est de même d'un très bel oeillet sauvage : le très rare Oeillet de Sicile, Dianthus siculus (normalement répandu en
Italie, Sicile, Grèce, Algérie et Espagne) qui se rencontre en grande abondance
dans la totalité du secteur littoral, de l'île Verte à Figuerolles et dont c'est la seule
localisation connue sur le littoral continental français.
B) Les espèces introduites par l'homme.
Il s'agit d'espèces parfois communes en d'autres régions de Provence et acclimatées :
La Coronille faux baguenaudier (Coronilla emerus) : cette légumineuse arbustive des forêts de chêne blanc a été introduite comme plante mellifère auprès
de la maisonnette de l'ancien gardien
Le cytise des Alpes (Cytisus alpinus), autre légumineuse arbustive, aux
feuilles trifoliées et aux grandes grappes dorées : ses stations naturelles sont les
bois de chêne blanc et surtout les hêtraies préalpines.
Les Chênes-liège, les Chataigniers, le Caroubier, ainsi que les Palmiers nains
ont été introduits vers les années 1950 par Monsieur ROUVIER, jardinier de la
ville.
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C) Les espèces indigènes dont l'introduction par l'homme n'est pas certaine.
Plusieurs espèces présentent ici un caractère exceptionnel sans que l'on puisse
assurer avec certitude qu'elles ont été introduites par l'homme, ce sont :
Le Grand Houx (Ilex aquifolium), des forêts de Chêne blanc et des hêtraies
plus septentrionales: nous connaissons, dans l'Estérel, vers la Napoule, des vallons littoraux où cet arbuste pousse naturellement, c'est pourquoi on ne peut exclure a priori son caractère autochtone au Bec de l'aigle, bien que nous soyons ici
dans un climat moins pluvieux que dans l'Estérel.
Le Laurier-sauce, ou Baguié, appelle les mêmes remarques, son indigénat en
Provence ne fait plus aucun doute, il vient bien dans des fonds de vallées littoraux
de la région hyèroise et tropézienne, les quelque plants ici présents peuvent très
bien provenir de pieds sauvages.
Le Cyclamen aurait existé ici à l'état sauvage, d'après Monsieur ROUVIER,
ce qui serait très exceptionnel dans notre région (un cas connu à Saint Tropez) et
marquerait des affinités floristiques et climatiques avec la Corse.
3) PRINCIPAUX GROUPEMENTS VEGETAUX
Les pelouses
Nous regroupons sous ce terme les formations herbeuses dans lesquelles dominent des graminées dont la "baouco" des provençaux, généralement installées
sur les talus et champs récemment abandonnés. Dans ce dernier cas elles
indiquent la présence d'un sol profond et meuble. Ce sont des zones à grand
risque d'incendie (elles ont été particulièrement touchées lors du feu de 1982).
Garrigues et cistaies.
Les deux garrigues de la Provence occidentale calcaire sont ici présentes :
Garrigue à chêne kermes ("rouganeu"), surtout vers Figuerolles
Garrigue à Romarins et bruyères, entre Figuerolles et l'anse Gameau
(dévastées en 1982) et dans l'île Verte (qui n'a pas été touchée)
Ces deux garrigues, et surtout la seconde, sont ici fortement imprègnées de
cistes ("messugo" ou ciste de Montpellier, Ciste à feuille de sauge) et de Calyco-
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tome épineux qui arrivent à certains endroits à imposer leur physionomie au paysage.
Ceci est sans doute du au caractère siliceux de la roche, qui explique par
ailleurs la présence de la bruyère arborescente, de l'Arbousier et de la Lavande
des îles.
Bois de chêne vert ("éuse", yeuse, Quercus ilex) : les bois de chêne vert ou
yeuseraies, constituent l'optimum forestier possible en Basse Provence : une lente
évolution a conduit à un complexe sol-microclimat-flore-faune en équilibre avec
les conditions générales du milieu. La flore caractéristique est ici trés bien représentée avec, outre des chênes verts de belle venue, le viorne -tin, le petit
houx, le filaire, le chèvrefeuille, la capillaire noire etc.
De tels bois sont actuellement bien rares dans la zone littorale et nous devons
dire combien grand a été notre émerveillement en certains points du parcours où
des chênes de 12 à 14 mètres constituent une futaie remarquable, aussi belle que
les plus belles connues à Port Cros dans la forêt domaniale, et qui a été heureusement épargnée en grande partie par l'incendie de 1982 (gràce en particulier à l'heureuse initiative de la municipalité de la Ciotat qui a fait mettre cette futaie
sous arrosage constant pendant plusieurs jours après le sinistre, sauvant ainsi de
nombreux arbres). Sans doute ces yeuseraies ont-elles bénéficié (un peu comme
dans la forêt de la Sainte Baume), de l'abri formé par les rochers, ainsi que des
eaux de ruissellement et de suintement; mais leur présence et leur bon état n'en
sont pas moins exceptionelles, et il convient de maintenir et de renforcer leur protection.
Les pinèdes : Le Pin d'Alep (Pinus halepensis) ou Pin blanc, recouvre surtout
les formations arbustives (garrigue et cistaie) ainsi que certains pans de falaises
dominant la mer, il est alors littéralement plaqué contre la roche, sa hauteur maximum pouvant ètre inférieure à un mètre!. Il est évident que ce sont ces formations
qui ont le plus souffert de l'incendie de 1982 : les pinèdes ont été complétement
détruites le long d'une ligne Figuerolles-Cap de l'Aigle : un plan de reforestation
de cette zone, axé sur la reconstitution d'un paysage naturel sans souci de rentabilité immédiate est en cours d'étude avec le concours de l'ONF. Par contre la pinède de l'Ile Verte, intacte, demande à être protégée de toute urgence.
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La végétation halophile : elle est particulièrement bien représentée sur tout
le littoral depuis Figuerolles et l'anse Gameau jusqu'à l'Ile Verte. Le meilleur endroit pour l'observer étant les rochers situés dans l'ancienne proprièté BRONZO,
(crique de Nego Fremo) .
4) LES PLANTES EXOTIQUES
Les massifs de bambous, Gleditschia, Vernis du Japon, Pittosporum etc que
l'on observe dans le parc municipal représentent des exotiques bien acclimatées .
Actuellement recensées et étiquetées, elles constituent l'ébauche d'un jardin botanique et peuvent représenter un élément pédagogique important.
5) CONCLUSIONS
L'ensemble constitué par l'Ile Verte, le massif du Cap de l'Aigle et les vallons situés immédiatement en arière est donc d'une grande richesse et variété
floristique. L'état général des peuplements est, compte tenu de l'incendie de 1982,
encore trés bon (Ile Verte complètement indemne, yeuseraie et parc municipal
épargnés).
La perspective de classement de ce secteur ainsi que de la bande marine joignant le Cap de l'Aigle à l'Ile Verte est donc particulièrement souhaitable à condition que ce classement ne s'accompagne pas d'un accroissement de la pression
touristique sur les secteurs les plus sensibles (précautions à prendre dans le tracé
des cheminements, le balisage et l'indication des sentiers etc.)
L'intérêt pédagogique des formations naturelles et artificiellement implantées
(forêt d'yeuses, jardin potager pédagogique, circuit botanique, jardin exotique) est
considérable et devrait permettre de développer cet aspect important.
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ANNEXE II - FLORE LICHENIQUE DES ENVIRONS
DE L'ANSE DE FIGUEROLLES.
Cl. ROUX CNRS, Laboratoire de Botanique et Ecologie méditerranéenne
Faculté des Sciences et Techniques de St.Jérome. Marseille.
La flore lichénique des environs immédiats de l'anse de Figuerolles a été étudiée au cours de 2 excursions, en 1976( ROUX, I977) et en I98I( ROUX, I982).
111 taxons (espèces et sous-espèces) ont été recensés dont plusieurs présentent un très grand interêt non seulement floristique mais également biogéographique; en particulier, un groupe d'espèces très méridionales, ayant leur optimum
dans le Sud de la Péninsule Ibérique, est tout à fait remarquable:Buellia cerussata, B. subcanescens , Pertusaria gallica Rinodina alba, Xanthoria resendei.
Au point de vue floristique, un nombre relativement important d'espèces
rares, très rares et même de taxons non décrits se rencontre dans cette station:
1) Une variété nouvelle pour la science, en cours de description ( article
sous presse):Lecanora psarophana v. aquilina CLAUZ et ROUX var. nov.
2) Deux espèces, en cours d'étude, peut être nouvelles pour la science:Lecania cf.tenera; Rhizocarpon cf. simillimum.
3) Une espèce connue en France seulement à Figuerolles:Buellia cerussata L limonna.
4) Deux espèces très rares( outre Figuerolles, une seule autre station
connue en France): Lecanora fugiens Nyl.(Finistère), Mullerella plyspora Hepp
ex Müll.Arg, champignon lichénicole non lichénisé parasite de Lecanora praepostera Nyl.(Auvergne).
5) Onze espèces rares ( connues seulement dans un petit nombre de localités en France), très méridionales, méritant d'être protégées:
Acarospora heufleriana Körb.Buellia crozalsiana B.de Lesd. Buellia subcanescens Werner., Dermatocarpon contumescens (Nyl) Zahlkr.,Lecania holophaea (Mont.) A.L. Sm.,Lichinella stipatula Nyl.,Pertusaria gallica B. de Lesd.,
Physcia biziana v. leptophylla Vezda., Rinodina alba Netzler ex Arnold.Toninia
sbarbaronis B.de Lesd. Xanthoria resendei Poelt et Tav.
Une étude sur le secteur du Sec et la pointe du Cap de l'aigle serait nécessaire
afin de compléter ou modifier les observations faites aux environs immédiats de
Figuerolles.
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