Fuite de gaz toxiques dans une usine agrochimique Nuit du 2

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Fuite de gaz toxiques dans une usine agrochimique Nuit du 2
N° 7022
Ministère chargé du développement durable - DGPR / SRT / BARPI
Fuite de gaz toxiques dans une usine
agrochimique
Nuit du 2 au 3 décembre 1984
Bhopal
Inde
Accident majeur
Chimie
Isocyanate de méthyle (MIC)
Insecticide
Automatismes / régulations
Défaillances / négligences
Organisation
Entretien
Victimes / séquelles
Pollution eaux / sols
Photo D.R. http://www.ktaland.com/degazage/
Le site :
Union Carbide (UC), compagnie américaine, implante en 1969 à Bhopal, capitale de l’état
du Madhya Pradesh (Inde), une usine de fabrication de Sevin, puissant insecticide utilisé
sur les cultures de tomates et pommes de terre en particulier. Une licence accordée par le
Ministère indien autorise l’usine à produire 5 000 t de Sevin par an.
Des convois routiers amènent les matières premières : l’isocyanate de méthyle (MIC) et
l’a-naphtol jusqu’à Bhopal où elles sont transformées en pesticide. Deux unités de
production sont construites sur le site : une d’a-naphtol en 1978 et une de MIC en 1979. A
partir du 4 mai 1980, l’unité de production de MIC est mise en service.
Le complexe chimique proche de la gare (1,5 km), s’étend sur plus de 6,8 ha et emploie
1000 travailleurs le plus souvent non qualifiés.
Pour faire face à la concurrence sur le marché d’autres insecticides (pyréthroïdes), UC
décide dans un premier temps de fermer cette usine financièrement peu rentable (déficit
budgétaire du site : 4 millions $ par an). Après des négociations avec le gouvernement
indien, elle choisit de supprimer finalement de nombreux postes (ingénieurs de
maintenance…) et de faire fonctionner cette installation au moindre coût.
Synthèse du MIC et du Sevin :
La réaction du MIC (CH3NH-COCl) avec l’a-naphtol (
) conduit au carbaryl (C12H11NO2), le Sevin.
Le MIC est obtenu par réaction du phosgène qui est synthétisé sur place (CO+Cl2 COCl2) et de la monométylamine
(CH3NH2) en présence de chloroforme (CHCl3). La présence d’impuretés dans le MIC évolue en fonction de la
température et de la pression de stockage. En effet, le MIC est très réactif en présence d’eau, d’alcools…et du MIC luimême (polycondensation). Il doit être stocké sous pression d’azote et à 0°C afin d’être conservé à l’é tat liquide. La
pression de vapeur du MIC à 0°C est de 0,267 bar et à 20 °C de 0,46 bar. A Bhopal, le stockage est mai ntenu sous une
pression d’azote de 0,35 à 0,69 bar. Lorsque la pression dépasse 2,76 bar une soupape de sécurité s’ouvre et laisse
échapper les gaz vers une tour de neutralisation.
L’installation comprend deux cuves de stockage du MIC liquide (E610 et E611) de 60 m3
(50 t) chacune. Une troisième cuve identique (E619) maintenue vide, constitue un réservoir
de secours en cas d’accident sur les autres réservoirs dont le remplissage ne doit pas
dépasser la moitié de leur capacité. Un disque de rupture constitue un joint étanche entre la
soupape de sécurité et le contenu de chaque cuve. Ces réservoirs cylindriques horizontaux
en acier inoxydable (≈2 m de diamètre, ≈13 m de long) partiellement enterrés dans un
sarcophage de béton, sont reliés entre eux et aux réacteurs de fabrication du MIC et du
Sevin par un réseau complexe de canalisations équipé de vannes et de soupapes. Chaque
cuve est connectée aux systèmes de sécurité suivants :
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Photo D.R.
http://www.paralibros.com/passim/drcat41.htm
L’unité impliquée :
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dossier/cas_historique/bhopal.html
LES INSTALLATIONS CONCERNÉES
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√
un système de réfrigération maintient en permanence la température du MIC aux environ de 0°C afin de l imiter
son évaporation, sa polycondensation et sa réaction avec les impuretés
√
un laveur de gaz d’échappement ou tour d’abattage ou VGS (Ø 1,7 m) mettant en œuvre de la soude (NaOH)
pour neutraliser les gaz toxiques en cas de fuite ou de surpression
√
une torchère (40 m de haut) pour brûler les gaz provenant de la tour d’abattage ainsi que les gaz
excédentaires d’une unité d’oxyde carbone (CO), l’évent de stockage de méthylamine et l’évent de la soupape
de l’unité de distillation du MIC
√
un système de pulvérisation d’eau (rideau d’eau) pour diluer les vapeurs.
Photo D.R..
http://www.natlenvtrainers.com/modul
es/hazwopersuper/example.htm
Une manche à air indique le sens du vent pour éviter aux employés de
demeurer sous le vent en cas de fuite de gaz.
Photo D.R..
http://darkwing.uoregon.edu/~ecotone/es203/
envmvmt/bhopal.html
L’ACCIDENT, SON DÉROULEMENT, SES EFFETS ET SES CONSÉQUENCES
L’accident :
Le 2 décembre 1984, la direction de l’usine ordonne le nettoyage de plusieurs canalisations reliant le secteur phosgène
au laveur de gaz d’échappement. L’opération débute vers 21h30.
Toutes les vannes sont fermées au moment de l’accident à l’exception de celle conduisant à la soupape de sécurité et
au disque de rupture. Les cuves contiennent 63 t de MIC : 42 t dans E610 (remplie au-delà de la limite imposée), 20 t
dans E 611 et 1 t dans E619.
Vers 23h30, des opérateurs décèlent, dans l’unité de stockage du MIC, une fuite de MIC qui provoque une irritation
oculaire et une fuite d’ « eau sale » au-dessus de la cuve de stockage de MIC E610.
La pression augmente rapidement de 0,14 à 3,8 bar, le disque de rupture se rompt, la soupape de sécurité s’ouvre. Au
maximum des réactions chimiques (hydrolyse et polycondensation du MIC), la pression atteint 13,79 bar et la
température 200°C. Sous l’effet de la chaleur, la c uve E610 se dilate sans céder et fait éclater le sarcophage de béton.
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Photo D.R.
http://www..umweltinstitut.org/frames/all/m99.htm
A 00h30, l’alarme de l’usine est déclenchée. Cent vingt ouvriers sont présents
sur le site. Les vannes de communication avec les autres cuves sont fermées
pour limiter la quantité de MIC impliquée. La manette de commande du laveur
est activée mais le voyant lumineux reste éteint.
Vers 01h00, des lances à incendie ainsi que des rideaux d’eau sont utilisés
dans le but de diluer les émanations toxiques et de refroidir la citerne.
Vers 02h00, la police enregistre les premiers appels téléphoniques concernant
l’accident.
Vers 02h30, la sirène avertissant la population est activée alors que 23 ou 42 t
de MIC (selon les sources) ont déjà été émises dans l’atmosphère. L’émission
de MIC s’arrête vers 02h30 après fermeture de la soupape, la pression étant
retombée au-dessous du seuil de tarage de 2,76 bar. Les gaz émis sont
refroidis au contact de l’air froid ambiant et cheminent au niveau du sol car le
MIC est plus lourd que l’air. Un vent faible de N/NO dirige le nuage toxique
vers le SE en direction des bidonvilles. Il s’étend sur plus de 3 km et sur une
superficie estimée à 20 km² ou plus de 50 km² selon les sources.
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Vers 05h30, la température du réservoir n’est plus que de 45-60°C. A 06h00, la température de la soude d’abattage est
de 60°C montrant que des gaz sont passés dans le VG S (Vent Gas Scrubber). Mais, le titrage de la soude n’avait pas
été contrôlé depuis le 23 octobre 1984.
Les conséquences :
Les données résumées ci-après relatives aux conséquences de la catastrophe proviennent de rapports d’investigation,
d’articles de presse, de vidéos…
Selon un bilan officiel des autorités indiennes, le nombre de victimes atteint 1754 morts et 170 000 intoxiqués dont 12
000 dans un état critique le jour même de l’accident. Selon d’autres sources, 2500 morts dont 1000 enfants seraient à
déplorer et 200 000 victimes dont 50 000 handicapés et 3 000 aveugles à vie. On compte entre 500 000 et 600 000
intoxiqués en 1998. Le bilan des victimes s’alourdira encore pour atteindre 3350 morts en 1989 et 16 000 morts en
1998. En 2000, Bhopal compte près de 200 000 personnes chroniquement affectées. En 2001, on aurait recensé 20 000
morts. En 2004, les autorités locales déclarent que 800 000 personnes sont affectées et une association humanitaire
internationale avance le nombre de 22 à 25 000 morts. Certaines sources estiment que 15 à 20 nouvelles victimes
décèdent chaque mois des suites de l’accident.
Les victimes souffrent de différentes pathologies graves (œdème aigu du poumon,
détresse respiratoire, toux persistantes, cécité, cataractes juvéniles, dépression,
troubles neurologiques, cancers, tuberculoses, douleurs articulaires, dérèglements
gynécologiques, ménopauses précoces, avortements spontanés…). Le taux de
mortalité infantile est augmenté de 300 %. Le taux de cancer de l’utérus est le plus
élevé de l’Inde. Des médecins indiens indiquent que la contamination liée à
l’accident semblerait résulter de rejet MIC associé à de l’acide cyanhydrique. Un
cancérologue indien indique que de plus en plus de jeunes souffrent de cancers, de
leucémies.
Le bétail, les chiens, chats et oiseaux ont aussi été intoxiqués : plus de 4 000
animaux sont morts. La végétation a également souffert des émanations toxiques
(défoliation…). L’impact notable sur l’agriculture entraîne des répercussions socioPhoto - Courtesy: Pablo Bartholomew © 1985 All économiques.
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Une pollution chronique pré-existait toutefois avant l’accident au niveau du sol et de
http://www.ieo.org/bhopal_photos08.html
l’eau contaminés par des effluents de l’usine riches en métaux lourds et substances
toxiques. Le sol contenait encore en 1999 de fortes quantités de mercure, de
chrome, de cuivre, de nickel et de plomb. En 2003, les taux de mercure sont six millions de fois supérieurs à ceux des
normes en vigueur. Du chloroforme, du tétrachlorure de carbone et du benzène étaient détectés dans l’eau des puits
situés au sud et sud-est de l’usine. Les légumes et fruits renferment en fortes quantités ces composés toxiques. Cette
pollution chronique aggravée par les rejets toxiques affecte de longue date la population.
Des milliers de tonnes de déchets toxiques sont stockées dans de mauvaises conditions, contaminant l’eau du réseau
public. Certaines sources évoquent la présence sur le site de 25 000 t de déchets solides. Un journaliste affirme avoir
constaté la présence de mercure dans des bassins, de bennes remplies de substances toxiques et de sacs contenant
des produits chimiques très dangereux dans certains hangars. Il précise également que lors de la mousson, les eaux de
pluie en s’infiltrant se chargent en composés toxiques et polluent les puits dans lesquels les gens viennent s’abreuver.
Échelle européenne des accidents industriels :
En utilisant les règles de cotation des 18 paramètres de l’échelle officialisée en février 1994 par le Comité des Autorités
Compétentes des Etats membres pour l’application de la directive ‘SEVESO’ et compte-tenu des informations
disponibles, l’accident peut être caractérisé par les 4 indices suivants :
Les paramètres de ces indices et leur mode de cotation sont disponibles à l’adresse : http://www.aria.developpementdurable.gouv.fr.
Les 23 ou 42 t de MIC rejetés représentent 15333 à 28 000 % du seuil Seveso correspondant (0,15 t - MIC), ce qui
équivaut au niveau 6 de l’indice « matières dangereuses relâchées » selon le paramètre Q1 (Q1 > 10 fois le seuil).
Trois paramètres entrent en jeu dans la détermination du niveau de cotation de l’indice « conséquences humaines et
sociales » : H3, H4 et H5.
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√
Le paramètre H3 atteint le niveau 6, le nombre de morts est supérieur à 50.
√
Le paramètre H4 atteint le niveau 6, le nombre de blessés graves est supérieur à 200.
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√
Le paramètre H5 est coté 1 par défaut, le nombre de blessés légers n’étant pas connu.
Le niveau global de l’indice « conséquences humaines et sociales » atteint par conséquent 6.
Trois paramètres entrent en jeu dans la détermination du niveau de cotation de l’indice « conséquences
environnementales » : Env10, Env12 et Env13.
√
Le paramètre Env10 est coté 1 par défaut, le nombre d’animaux sauvages tués, blessés ou rendus impropres
à la consommation n’étant pas connu.
√
Le paramètre Env12 est coté 1 par défaut, le volume d’eau polluée n’étant pas connu.
√
Le paramètre Env13 est coté 4 : 5 000 tonnes de déchets toxiques sont stockées sur les 35 ha du terrain de
l’usine.
Le niveau global de l’indice « conséquences environnementales » atteint par conséquent 4.
Trois paramètres entrent en jeu dans la détermination du niveau de cotation de l’indice « conséquences économiques
» : €15, €16 et €18.
√
Le paramètre €15 est coté 1 par défaut, le montant des dommages matériels dans l’établissement n’étant pas
connu.
√
Le paramètre €16 est coté 1 par défaut, le montant des pertes de production de l’établissement dans n’étant
pas connu.
√
Le paramètre €18 atteint le niveau 6 : l’élimination des 5 000 tonnes de déchets toxiques est estimée à 500
millions de dollars (> 20 M€).
Le niveau global de l’indice « conséquences économiques » atteint par conséquent 6.
L’ORIGINE, LES CAUSES ET LES CIRCONSTANCES DE L’ACCIDENT
Les 30 novembre et 1er décembre 1984, les opérateurs essaient de transférer les 42 t de MIC vers l’unité de fabrication
du Sevin. Le contenu de la cuve doit être pour cela mis sous une pression supérieure à la pression atmosphérique par
apport d’azote (N2) afin d’éviter les entrées d’humidité. Une vanne étant défectueuse, il est impossible de mettre la cuve
sous pression, n’importe quel produit contaminant venant de l’extérieur pouvant ainsi pénétrer dans l’installation.
Le 2 décembre 1984 au soir, un obturateur coulissant, barrière physique devant empêcher les liquides de passer, n’est
pas mis en place lors du nettoyage des canalisations. En effet, c’est le responsable d’entretien qui doit donner l’ordre de
placer l’obturateur, et son poste vient d’être supprimé quelques jours avant l’accident. On note que les canalisations de
purge sont partiellement bouchées. Toutefois, la manière dont l’eau a pénétré dans le réservoir E610 n’est pas
clairement identifiée.
L’eau (500-1000 l) pénètre dans la cuve E610 contenant du MIC à la suite d’un reflux favorisé par le raccordement
entre deux canalisations menant d’un côté à l’épurateur de gaz, de l’autre à E610. En outre, il semble que cette
canalisation de raccordement installé en mai 1984 soit en acier simple « facilement » corrodable et non en inox comme
il est recommandé dans le guide technique d’Union Carbide.
La quantité anormale de CHCl3 (12-16 % au lieu de 0,5 %) présente dans le stockage du MIC lors de l’accident résulte
d’une distillation réalisée à température trop élevée entre le 18 et le 22 octobre. Elle est à l’origine de la corrosion de la
paroi par les chlorures Cette corrosion a libéré des ions ferreux, catalyseurs de la réaction de trimérisation du MIC.
Depuis le 19 octobre 1984, jour où la production est arrêtée, le contenu des cuves n’a pas été analysé.
La réaction exothermique du MIC entraînant une élévation de température n’est pas détectée par l’alarme de
température hors service. L’hydrolyse du MIC produisant de la diméthylurée et du CO2 ainsi que la trimérisation sont à
l’origine de la transformation du MIC liquide en MIC gazeux, de l’élévation de température et de pression responsables
de l’ouverture de la soupape de sécurité. La chaleur de trimérisation de 40 % du MIC a suffi à vaporiser les 60 %
restant.
Le laveur des gaz de neutralisation des gaz d’échappement était hors service depuis le 23 octobre 1984.
La torchère utilisée pour brûler les gaz d’échappement provenant du stockage du MIC, était démontée quelques jours
avant l’accident, son absence a permis aux gaz toxiques de s’échapper directement à l’atmosphère.
L’unité de refroidissement était arrêtée depuis juin 1984 afin d’économiser 18% d’énergie. De ce fait, le MIC était stocké
à température ambiante (20 °C).
Les rideaux d’eau d’une hauteur de 10 m mis en œuvre la nuit de l’accident n’ont pas eu d’effet sur la dérive du nuage
de MIC qui était émis par une soupape à 30 m de hauteur.
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Sont énumérés ci-après les défaillances et négligences identifiées dans les publications et le rapports d’enquête relatifs
à l’accident :
Systèmes de sécurité :
√
arrêt de l’unité de refroidissement depuis juin 1984
√
arrêt du laveur de gaz d’échappement le 23 octobre 1984
√
démantèlement de la torchère pour entretien quelques jours avant l’accident
√
alarmes sonores de température haute débranchées
√
indicateurs de température, de pression et de niveau du stockage de MIC défaillants
√
vérification des paramètres au début toutes les heures, puis toutes les 2 heures et un mois avant l’accident
toutes les 8 heures
√
rideaux d’eau mal conçus
√
alarme externe avertissant la population déconnectée de l’alarme interne alertant le personnel donc non
déclenchée en temps utile
√
pas assez d’issues de secours rendant l’évacuation difficile : usine entourée d’un mur de 2,5 m de haut
surmonté d’une rangée de barbelés, la plupart des sorties de secours étant bloquées, seule une porte ouverte
dans la zone où les gaz sont présents.
√
absence de plan de secours interne
√
cuve E610 non mise sous pression d’azote
√
cuve de secours E619 remplie en partie
Personnel :
√
manque de personnel, mauvaise qualification et formation du personnel :
√
Le nombre d’ouvriers est passé de 1350 à 950 en 4 ans. Aucun ingénieur présent la nuit de l’accident, pas de
consignes en cas d’accident. L’obturateur n’est pas placé sur la canalisation lors du nettoyage, l’ordre n’ayant
pas été donné (poste du responsable de maintenance supprimé le 26/11/1984)
√
manque d’informations des ouvriers (panneaux d’instructions en anglais alors que la plupart des ouvriers ne
comprend que l’hindi)
Population :
√
manque d’informations sur la toxicité des produits
√
absence de plans d’évacuation et d’urbanisation
√
manque d’informations auprès des médecins la nuit de l’accident : démenti d’UC sur l’utilisation de thiosulfate
de sodium pour traiter l’intoxication à l’acide cyanhydrique (HCN) prétextant que le MIC n’est pas dangereux et
qu’aucun dégagement d’HCN n’a pu être possible.
Photo D.R.. http://membres.lycos.fr/onirik31/inde/bhopal.html
Rapports d’audit antérieurs :
En mai 1982, des ingénieurs américains du centre technique de la division des produits chimiques et des matières
plastiques du groupe UC à South Charleston expertisent le fonctionnement de l’usine de Bhopal dans le but de vérifier
le respect des normes édictées par UC. Ils dénoncent dans leur rapport le non respect des règles d’exploitation et de
sécurité, ainsi que de nombreuses négligences (corrosion de circuits, absence d’extincteurs automatiques dans les
zones dangereuses, déformation de pièces d’équipement, manque d’indicateurs de pression, fuite de MIC, phosgène et
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chloroforme, ruptures de canalisations, personnel insuffisamment qualifié…). Ils précisent également que le nettoyage
d’une canalisation avait été effectué sans obstruer les extrémités de la conduite et pouvait donc conduire à une tragédie.
Accidents antérieurs :
√
24 décembre 1978 : lors d’un incendie, on recense 2 blessés.
√
26 décembre 1981 : une fuite de phosgène entraîne 1 mort.
√
10 janvier 1982 : une fuite de MIC intoxique 18 ou 24 personnes (selon les sources).
√
10 février 1982 : une fuite de gaz sur une pompe de phosgène intoxique 25 ouvriers hospitalisés d’urgence.
√
août 1982 : un contact avec du MIC entraîne une brûlure de 30% du corps d’un technicien.
√
5 octobre 1982 : lors d’une émission de vapeurs toxiques suite à la rupture d’une collerette reliée à plusieurs
canalisations au niveau de l’unité de production du MIC, 4 victimes sont à déplorer.
√
octobre 1982 : une fuite de MIC, HCl et CHCl3 atteint 3 ouvriers et plusieurs riverains.
√
1983 : 2 victimes
√
janvier 1984 : 1 mort par inhalation de gaz toxiques
LES SUITES DONNÉES
Photo D.R.
.http://news.bbc.co.uk/1/hi/
sci/tech/1748482.stm
L’opération Faith, menée sous le contrôle des autorités, débute le 16 décembre 1984 pour
éliminer le MIC encore présent après l’accident dans les cuves E611 et E619. Le but de
l’opération est de remettre momentanément en fonctionnement l’usine de production de Sevin
pour déstocker le MIC. Toutes les précautions vont être prises (protection des réservoirs de
l’entrée de polluants, information de la population sur l’opération, mise à disposition de
masques à gaz, périmètre de sécurité, cordons d’ambulances, présence d’un nombre important
de pompiers et de policiers…).
Le gouvernement de l’Etat du Madhya Pradesh refusant de renouveler l’autorisation de
fonctionnement de l’usine, la fermeture du site prononcée en juillet 1985 supprime ainsi environ
700 emplois.
Le montant des dédommagements négocié entre UC et le gouvernement indien s’élève à 378
millions d’euros (470 millions $). Cette somme versée le 24 février 1989 par UC et Union
Carbide India Limited (UCIL) le 24 février 1989, gérée par la Banque Centrale Indienne, est
bloquée en partie sur un compte. En 1989, afin de pouvoir dédommagé toutes les victimes, les
autorités versent le minimum autorisé à chacune : 1 750 euros par décès et 450 euros par
blessé.
En 1991, le tribunal de Bhopal assigne le président d’UC, à comparaître pour « homicide dans une affaire criminelle ».
Le mandat d’arrêt international lancé contre lui par le justice indienne via Interpol reste sans effet ainsi que les
assignations à comparaître présentées aux Etats Unis à la suite des pourvois demandés par des associations de
victimes.
Le gouvernement indien a également été mis en cause pour ne pas avoir suivi le plan industriel du 25 août 1975
prévoyant l’installation des usines à risques à 24 km de la ville. En effet, le ministre de New Delhi avait accordé à Union
Carbide la licence industrielle d’installation à moins de 1 km des habitations.
En mai 2004, le gouvernement régional indien annonce la gratuité des soins
pour toutes les victimes et non seulement pour les plus pauvres.
Le 24 juin 2004, le gouvernement indien donne son accord à une procédure
judiciaire en cours aux USA afin d’obliger la société américaine ayant racheté
UC à nettoyer le site. L’élimination de près de 5 000 tonnes de déchets
toxiques sur les 35 ha du terrain de l’usine et aux alentours est estimée à 500
millions de dollars.
En juillet 2004, la Cour Suprême indienne ordonne à la banque centrale de
débloquer au plus vite le reste de la somme versée en 1989 par UC et de la
distribuer aux victimes. Elle annonce le début des versements dès le 15
novembre.
Le 16 décembre 2004, le Parlement européen demande aux gouvernements de l’Etat de Madhya Pradesh et de l’Inde
d’assurer dans un délai bref la décontamination et le nettoyage effectif du site. Les eurodéputés notent que les produits
chimiques laissés sur place continuent à polluer le réseau d’adduction d’eau, provoquant des cancers et des
malformations congénitales. Ils demandent à l’Inde d’assurer un approvisionnement régulier en eau potable. La
résolution adoptée par le Parlement européen suggère à l’UE de réfléchir à la manière d’aider à la décontamination et à
Date d’actualisation de la fiche : Juin 2010
Photo D.R..
http://www.greenpeace.ch/bhopal/deutsch
.html
Après cette tragédie, UC a arrêté la production de MIC dans ses différentes
usines et laissé en l’état le site de Bhopal après sa fermeture.
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l’approvisionnement en eau. La Commission européenne se déclare prête à aider le pays dans sa stratégie. Les
députés désirent également que les victimes bénéficient d’indemnités plus substantielles et de meilleurs traitements.
Lancée en 1987, la procédure judiciaire connaît plusieurs rebondissements. Initialement poursuivis pour homicide, les 8
prévenus (7 Indiens et un Américain, le président de la compagnie) ont bénéficié en 1996 d’un arrêt de la Cour suprême
indienne. La plus haute instance judiciaire avait alors requalifié les faits en homicide par négligence, un délit puni d’une
peine de deux ans de prison au maximum.
Le 7 juin 2010, le tribunal de première instance de Bhopal condamne à deux ans de prison et 100.000 roupies d’amende
(1.751 euros) 7 personnes, jugées responsables de la catastrophe. Une amende de 10 000 dollars (8 354 euros) est
infligée à Union Carbide India pour négligences. Le PDG de l’entreprise à l’époque, déclaré « en fuite » par la cour, n’a
pas été nommé lors du verdict.
LES ENSEIGNEMENTS TIRÉS
Cette catastrophe est la plus grave qui ait marqué l’histoire de l’industrie chimique. Ces conséquences tragiques mettent
en évidence le lourd tribut payé par la population voisine, en l’absence de gestion de la sécurité d’une unité présentant
des risques majeurs. Des mesures élémentaires de gestion des risques doivent être appliquées en terme :
√
de réduction des risques à la source par des mesures organisationnelles et techniques
√
d’éloignement suffisant des zones destinées à l’habitation pour limiter l’exposition des populations
√
de plan de secours dimensionné en fonction du potentiel de danger
√
et d’information préventive des populations sur les risques auxquels elles sont exposées.
BIBLIOGRAPHIE
√
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REUTERS/REINHARD KRAUSE (D.R)
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