T-LOR :un projet exemplaire de la Télé-Imagerie en

Transcription

T-LOR :un projet exemplaire de la Télé-Imagerie en
Propos recueiUlspar Déborah Guedj
T-LOR :un projet exemplaire
de la Télé-Imagerie en Loraine
Frédéric LEFÈVRE
Radiologue a u CHU de Nancy
GSC Télé-Scnté, Pro jet T-lOR.
HÔPITAUX MAGAZINE : Comment
avEZ-VOUS imaginé le projet T-lDR?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE : N o u s avo ns
commenc é à pa rler de ce projet il y a un
peu plus de Ira is a ns. Il fouI savoir qu 'il
existait déjà un projet similaire . En effet, il y
a quinze ans a été développé en lorraine un
outil permettant de tran smettre des images
d' explorations scanogra phique du crâne,
exclusivement dans des contextes d'urgences
neurochirurgica ux et neurorodiclcqiques. les
systèmes éta ient efficaces à l'é poque mais
aujou rd'hui, et en toute logique, ils sont
obsolètes et ont vieilli, même s'ils sont utiles
et toujours utilisés . Parallèlement, un au tre
fac teur nous a décidés à mener à bien le
projet nOR: c'e st la baisse de la dé mographie méd ica le en lorrcine.
HÔPITAUXMAGAZINE :Est-ce cetameux
problème de pénune des praticiens que
les détracteurs du numerus clausus
combattentdepuisp1usi8.lrs années?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE : Dans notre cas de
figure, on ne pe ut parler de « pénurie» de
médecins, mais on constate plutôt une ba isse
du nomb re de pra ticie ns disp onibles en
lorraine, région peu attractive {ne possédan t
ni montagne, ni mer, ele). Nous souffrons de
cela surtout dans le monda public. C' est un
peu les vases communicants : les prat icie ns
du public pa rtent dans le privé et la conséquence directeest le grande difficultéd'assurer
la perma nence des soins en image rie.
HÔPITAUXMAGAZINE :Cette permanence
dessolns ne sefatt passansdebonsoutils
d'échangededonnées médicales. comme on
peut leconst ater au vu derévoluti on du
métier deradiologue?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE :En effet, l'autre facteur
nous ayant décidé à mettre e n œ uvre le
projet T-lO Resfi'èvcluticn naturelle de noire
profession : la communication néce ssa ire
des donné es, notamment pour des pa thologies lourdes comme le cancer, la nécessité
de mai ntenir la perman ence d es soins,
notamment des urgences, ont été nos deux
axes de réflexion penda nt ces troisannées.
Au C HU, nous avions installé e n 2003
un systèm e PACS (picture archiving a nd
communication system) performants afin de
stoc ker une grande qu antité de don nées
électroniques relatives aux examens rodlologiques des patients. Cet outil nous a montré
l'efficacité et les perspectives d'un acc ès a ux
images sans support physique Toutefois les
patients sont e ès mobiles et se dé placent du
CHU à d'autre établissement au sein de la
région, il devient alors diffi cile de synthétiser
un dossier potient morcelé surtout dans les
cas de canc ers où la multiplicité des consu]tenons fait légion. Ilest donc indispensable
de fac iliter les écha nges afin de garan tir
des soins de quali té tout en perm ettant
aux patients de faire réaliser les examens de
suivis sans avoir besoin de revenir systêmati.
quernent sur le centre régional.
HÔPITAUX MAGAZINE :Quelles ontétéles
premières structures deceprojEt?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE : Au dépa rt, ca volet
d'échange des donnée s devait être assuré
dans la région lorraine pa r l'associatio n
Hermès . Mais les limites de celle structure
étaient essen tiellement financières ... Elle a
do nc été transformée en GCS Téléscnté en
lorraine, qui a été soutenu et va lidé par
l'A RH. les mem br es fond ateurs de celt e
entité ne son t pa s des médecins mois des
établissements de soins privées et publiques,
la platefarme créée par le GCS-TSl, a ppelée« Solstice », va régionalement menre en
place des chanti ers tels que la messagerie
sécurisée, l'identification des professionnels
de santé, des patients, la veille sanitaire, ou
encore le pro jet T-lOR . Ce dernier a pris
forme au moment plutôt délicat où l'association Hermès est devenue GCS . En Iant que
médecins, nous avions déjà co mmencé à
d iscute r a ve c He rm ès de la pr emière
mouture de T-lOR ma is nous n'av ion s pu
mener le projetà terme. A la disparition Iotale
d'He rmès, nous sommes quasiment re partis
de zéro pour rebâtir à nouveauT-lOR.
HÔPITAUXMAGAZINE :Quelles ontétéles
Étapes dans la repriSE dece dossier?
Y'a-t-ll eu un changement d'équipes,
dem€thodes?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE :le projet se devait de
voir le jour cor les besoins d'écha nge des
données pat ients, que ce soit des urgences
ou en oncologi e étaie nt de plus en plus
important . Quand le pro jet s'est remis en
roule après ces retords organisationnels, ily
OctobrEë!OO9 HOPITAUX MAGAZINE
19
SUPPLÉMENT RADIOLOGIE
a eu changement d'éq uipe avec la nomination d'un nouveau directeur d u GCS TSl e n
10 pe rsonne de Christian Bodinier. Ouerre
g roupe s de tra va il a vec la pa rticipat io n
de l'ARH o nl été cons titué : le s urge nces,
l'oncologie, le volet médico-technique el le
volet médico-économique. les Irais premiers
groupes de !r<MJil onl chacun émis un cahier
des chorges. le derni er groupe procède à
un travail plus complexe et c' e st do nc le
moins abouti, ca r l' on y d iscute à une
échelle nationale. l'ensemble du travai l a
pe rmis 10 rédactio n d u cah ier de chorges,
puis nous avons foi' un appel d'offres.
HOPITAUX MAGAZINE :Comment s'est
dérouléeœt!Eétape<!eprÉSÉiectlon?
FRÉoéRIC LEFÈVRE : Pour être choisi, il
fall ait répondre aux différents scénarii
é mis do ns le ca hie r des c horge s, mois
a ussi ré pondre à de s critères techniques et
financiers, posséder une certaine expérience
en ima g e rie .. . Aprè s aud it de s ci nq
ca ndidats, nou s le ur ovons tran smis un
que stionna ire co mplémenta ire a fin q u'i ls
adoplent\eu r première réponse et qu'ils nous
proposent une seconde offre définitive . Puis
la cellule opérotionnelle du GCS-Télésanlé
de lorroine . co mposée d' informoticie ns,
de radiologues, de manipulateurs d' élecjrora dio log ie, de re présen ta nts du GCS, de
l'ARH, etc- a éva lué les atouts de chaque
ca ndidature et a proposé a la commission
d'appel d'offre un cla ssement.
HOPITAUX MAGAZINE :Vous avezchoisi
Gk>ballmagingOnHnE/Expertise RadIologie.
OuEIs sont leséléments qui ontfait pencher
labalanœenfaveurdecettesrtreprlse?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE :Toul d'abord, aucune
firme ne savaii foire louI ce que nous exigions.
Global lmaging et Expertise Radiolog ie sont
a rrivés en tête car ce sont des soc iétés qui
sont très à l'écoute de nos do léa nces . Au
dé pa rt, ils répo ndaient positivement à tout,
ce qui m'a d'ailleurs que lque peu surpris...
Quand nous tes a vons reç us, nous ne le s
co nna issions que très peu, ca r ils n'éta ient
pa s implanté s en Lo rra ine . Nous a vons
oppris à les connaÎlre et il faut dire que leur
co mposa nte mixte, tec hnique et médica le,
est une lormule sédui sa nte, Iout comme ta
personnal ité du directeur généra l Vince nt
Costa la t, qu i e st aussi médecin da ns un
CHU. Cette approche multidisciplinaire est
simila ire à celle que nous av ions mise en
place en 2002 lor s de l' insta lla tion d 'un
20
PACS da ns le CHU et q ue nou s avio ns
re pr ise pou r ce lle appel d'offre . G lo ba l
Imoging et Expertise Radiologie ont manifestés d'emblée leur envie de tra vailler avec
nous pour développer nos idées, développer
10 télém édecln e en la quelle leurs équipes
croient. Ils ont aussi mis en place un partenariat : pour suivre le pro jet et en mesurer les
impacts sur la pra tique usuelle de la t él èrodiologi e, ovec po urquo i pa s une possible
publica tion do ns une revue scien tifique.
Nous n'y sommes pas encore mais je sera i
heureux que nous puissions a boutir à un telle
résultat ...
expérience le s intér e sse : ils so nt a la
recherche d 'expérie nce s régio na les. Ilest
vita l pou r nou s de con tinue r à avoir de s
contacts nationaux pour 10 mise en plcce de
ce q u' on pou rrai t appele r un no uveau
modèle économique de 10 permanence des
soins. l'idée est de ne pas réitérer la même
erre ur de l'out il de téléradiologie mis en
place en lor raine il y a 15 ons qui n'ava it
qu'u n finan ce ment en investissement et n'a
donc pa s pu évoluer.
Aujourd'hui, avec une Sécurité socia le
gravement déficita ire , il fout trouver des
économies en s'appuyant sur 10 technolog ie
de l'informa tion.
HOPITAUX MAGAZINE : Pensez-vousque
l'initiativenancéenne va fairedes émules
surleterritoirE?
FRÉDÉRIC LEFÈVRE : l'a pproche q u'a
HOPITAUX MAGAZINE: CUEls ont été les
principales difficultés danslaréalisation du
projEtT-lDR?
cho isie la lorraine esl différe nte de ce lle
de s a utres rég ions pu isq u'ell e e ssoye
d ' a bor de r la pro blé mat iqu e techn iqu e,
organisa tionne lle et finan cière en même
temps. Je ne les conna is pas toutes mai s il
existe déià des platelorme de téléradiologie
(Rennes, Toulouse, lV.ontpelier, te Cantate ... 1,
des plus avan cées, des novatrices comme
l'expérience menée à lyon et GreoobIe avec
un PACS régional. Nous n'ovons pas adopté
ce sché ma da ns notre rég ion car nous ne
nous en sentio ns pas capable de le fair e,
tant techniquement que financièrement. Ce
sera peut êlre le cas plus tard. D'autre part,
nous avons suivi avec attention te DMp, mais
il est au jourd'h ui davan tage une pollution
qu'autre chose, même si mon terme est un
pe u fort. Le DMP comp orte beaucoup de
d 'élémen ts comme ce fa meux numéro
d'identification de santé pour chaque patient :
o n l' atte nda it, il ne deva it plu s ven ir,
linal ement il devrait ven ir, mai s avec du
relard...
FRÉOÉRIC LEFÈVRE : Nous a vons dé ià
HOPITAUX MAGAZINE : Comment allezvousgérervotrestatut derégion pilote.
notamment sur levolet déploiement et
EX!Ension duprojet?
FRÉDÉRIC LEFèvRe:Nous ne sommes pas
seuls dans la mise en œuvre du projetT-lO R:
nou s som mes soutenus pa r l'ASIP qui e st
en contact direct avec Christia n Badi nier (le
respo nsable du GCS-Télésanté en lcrmine].
Ils nous a ident dans la partie médicoéconomique qui est, co mme je le ra ppe lle , la
moins a boutie car la pluscomplexe à mener.
les éq uipe s de l'ASIP nous indiquent si l'on
fai t fau sse route et nous gu ident cor noire
HOPITAUX MAGAZINE 1 oct..... eooe
beauco up de co ntra intes : re spect e r les
règle s de stockage de do nnées électroniques, la du rée d 'ar chiva ge de do nnées
méd icales, considérer la question épi neuse
de l'a ccès au x informat ions pe rsonnelles
avec la CN IL, etc . Toules tes structures ne
sont pa s non plus prêtes à accueillir ce proje!
: certa ines sont encore da ns des systèmes
a na logiques e t doi vent se co nve rtir a u
numériq ue . Ce rta ins établissements n'ont
toujours pas de RIS ni de PACS : la volonté
orga nisa tionne lle es t là ma is pas l'outil.
Enfin, le s contra inte s écon om ique s sont
acluelle mentlrès fortes : les hôp itaux ne sont
pa s da ns leur meilleure forme.
Aujourd'hu i, le projet T-lO R essaie d'impliquer les praticiens publics et libéraux afin de
créer une so lid a rité entre les deux. En
Lorraine, la rad iologie est un petit mili9IJ : on
comp te 250 ra diolog ues, et peu t-être une
dizai ne de personna lités q ui co mpte nt
vrai ment da ns le pro jet. Nous ne sommes
pa s nombreux sur le pro jet : il est do nc
inutile de se disperser.
Il est vra i que le GCS Télésanté en Lorraine
a été mis en pla ce par des établissements
de soins et pa s pa r de s praticie ns. En tant
que médecins , nous exe rçons une certa ine
pression sur le GCS et nos Melles car nous
voulons que la pa rtie télérad iologie de cet
ensemble, ce service public de permanence
des soins, soit managée par de s médecins
et non par des établissements. C' est tout
le cha llenge a ctuellement du projet T-lOR
don s la région lorrai ne puisque l'outil est
maintenant en cours de déploiement.