Lecture II La Nouvelle Vague - French at HKU
Transcription
Lecture II La Nouvelle Vague - French at HKU
School of Modern Languages and Cultures, The University of Hong Kong LANG3073 - French and Francophone Cinema Lecture II La Nouvelle Vague Née sous la plume de Françoise Giroud dans l'hebdomadaire L'Express, la formule « Nouvelle Vague » s'applique à la fin des années 1950 à toute une génération. L'expression qualifie bientôt un petit groupe de cinéastes, issus pour la plupart des Cahiers du cinéma, parmi lesquels Éric Rohmer, Claude Chabrol, JeanLuc Godard, François Truffaut. Ces jeunes critiques, chacun à sa manière, bousculent alors les normes d'un cinéma français conservateur. Historique L'expression est tout d’abord utilisée pour désigner un mouvement qui anime la jeunesse de l’après-guerre en France dont L’Express, dans son édition du 3 octobre 1957, annonçait la venue prochaine sous le titre «La Nouvelle Vague arrive». Un an plus tard le terme est repris par un autre journaliste, mais cette fois, ne s’applique qu’aux jeunes cinéastes de la relève. Ce mouvement trouve sa première expression dans la salle de rédaction de la revue Les Cahiers du cinéma fondée en 1951. S’y retrouvent, autour d’André Bazin, de jeunes critiques qui ont pour nom François Truffaut, Claude Chabrol, Eric Rohmer et Jean-Luc Godard. Ils attaquent le cinéma de la qualité française et défendent ce qu'ils appellent la politique des auteurs ; le réalisateur est l'auteur du film, le film est son œuvre, sa vision personnelle. Le réalisateur a le contrôle de son film. Ces critiques soutiennent aussi des réalisateurs américains tels qu'Alfred Hitchcock, Orson Welles ou Howard Hawks. C’est dans cette même revue, qu’en 1954, François Truffaut publie son article «Une certaine tendance du cinéma français», une violente mise en accusation des pratiques cinématographiques de l’époque, texte par lequel il signe l'acte de naissance du mouvement de la Nouvelle Vague. À partir de 1958, ces critiques de cinéma échangent le crayon pour la caméra et mettent à l'épreuve les théories qu’ils ont élaborées et défendues. Aux films Le Beau Serge (1958) et Les Cousins (1959) de Claude Chabrol, Les Quatre Cents Coups (1959) de François Truffaut et À bout de souffle (1960) de JeanLuc Godard s’ajoutent également Hiroshima mon amour (1959) d’Alain Renais. Surprenant par sa liberté d'écriture et son ton inconvenant, Les Quatre Cents Coups de François Truffaut est primé à Cannes (mise en scène) en 1959. Une fois le mouvement lancé, suivront les contributions d’autres cinéastes tels Claude Sautet, Louis Malle et Georges Franju. Le tout forme un ensemble plus ou moins hétéroclite, mais qu’on rattache tout de même à cette tendance. La Nouvelle Vague, en tant que mouvement, connaît une existence éphémère. Dès 1962, le mouvement s’essouffle et les cinéastes évoluent pour la plupart vers d’autres approches cinématographiques ou vers d’autres carrières. À tort ou à raison, Certains reprochent aux réalisateurs de la Nouvelle Vague (notamment à Truffaut) de s’être, par la suite, adonnés au cinéma qu’ils avaient un tellement critiqué à ses débuts. Caractéristiques formelles et esthétiques On voit apparaître une nouvelle façon de produire, de tourner, de fabriquer des films qui s'oppose aux traditions et aux corporations. L'invention du Nagra, magnétophone portable autonome, celle de la caméra 16mm Éclair 16, légère et silencieuse, le goût des tournages en extérieur, imposent une nouvelle esthétique plus proche du réel. Godard rompt avec le formalisme des règles traditionnelles de prise de vues et de montage et invente ainsi une esthétique proche du style journalistique. Dans le film À bout de souffle, il se joue des continuités spatiales et temporelles. Les nombreuses sautes à l'écran (ou jump cut) entre les plans rompent avec les règles du montage classique et donnent un caractère heurté au film qui prive le spectateur de ses traditionnels repères. Dans La jetée, Chris Marker présente une sorte de diaporama, une succession d'images fixes avec un narrateur unique et un fond sonore léger. Il ne s'agit pas uniquement de rompre avec une tradition par provocation, mais bien de faire ressentir quelque chose de nouveau au spectateur, ou encore de représenter une face de la « réalité » : les souvenirs que l'on a d'un moment de sa vie sont partiels, et lorsque l'on regarde un album photo, les souvenirs viennent dans le désordre avec des « sauts dans le temps ». Acteurs et actrices L'arrivée d'une nouvelle génération d'acteurs (Jean-Paul Belmondo, Jean Seberg, Jean-Pierre Léaud, Jeanne Moreau, Anna Karina, Jean-Claude Brialy, Bernadette Lafont, Brigitte Bardot…) et de techniciens comme Raoul Coutard, le soutien d'une poignée de producteurs-mécènes (Georges de Beauregard, Pierre Braunberger) furent aussi des éléments déterminants. Le cinéma français n'avait pas su renouveler ses acteurs depuis l'entre-deux guerres, et l'apparition de nouveaux visages permit notamment de toucher le jeune public. Jean-Paul Belmondo incarne, grâce à la direction de Godard, le visage masculin de la Nouvelle Vague. Il est l’acteur type de ce mouvement de par son physique qui ne répond pas aux critères du jeune premier classique et par un jeu très spontané. Ses rôles majeurs sont ceux de À bout de souffle, qui lui offre le statut d’acteur vedette, puis Une femme est une femme et Pierrot le fou. Jean-Pierre Léaud incarne lui aussi les exigences des nouveaux metteurs en scène, avec un jeu souvent décalé, qui paraît gêné. C’est lui qui va incarner le grand personnage de Truffaut ; Antoine Doinel. Chez Godard, il incarne le mal-être de la jeunesse d’avant 1968, aussi déboussolée que révoltée, à la recherche d’un idéal révolutionnaire et d’une vraie relation avec des jeunes femmes toujours insaisissables et incompréhensibles. Jean Seberg, Anna Karina et leur relation avec Godard : Jean Seberg est l'héroïne de A bout de souffle ; contrairement aux actrices classiques, elle apparaît plutôt comme une « antifemme », avec ses cheveux courts et son allure androgyne. Mais c'est surtout avec Anna Karina que Godard va enrichir sa palette de rôles féminins. Elle tourne dans 7 films majeurs de Godard. Comme Jean Seberg, Anna Karina contribue à prolonger l'attraction séductrice du Français prononcé avec un accent étranger. Influences et effets durables de la Nouvelle Vague La Nouvelle Vague a eu un impact considérable sur le cinéma en France, mais son influence ne se limite pas à un seul cinéma national. Aux États-Unis, l'influence de la Nouvelle Vague se fait sentir dès le milieu des années 60 (par exemple, dans Bonnie and Clyde d'Arthur Penn en 1967). La génération des réalisateurs américains de la fin des années 60 et du début des années 70, connue sous le nom de New Hollywood (Altman, Coppola, De Palma, Polanski et Scorsese), revendiquent aussi l'influence de la Nouvelle Vague. La Nouvelle Vague a également influencé d'autres pays européens et certains pays d'Asie comme le Japon ou Hong Kong. Beaucoup de réalisateurs contemporains comme Quentin Tarantino ou Wong Kar Wai revendiquent aussi l'influence de la Nouvelle Vague. Quentin Tarantino a nommé sa maison de production "Band Apart", un jeu de mots sur le titre du film de Godard, Bande à part. En 1994, il réalise Pulp Fiction (1994), une oeuvre qui rend hommage à ces réalisateurs préférés dont Martin Scorsese et Jean-Luc Godard. Plusieurs scènes du film ainsi que sa déconstruction temporelle et narrative renvoient à la nouvelle vague. Enfin, le film de Michel Gondry, Eternal Sunshine of the Spotless Mind (2004) a été filmé en utilisant des techniques empruntées à la Nouvelle Vague.