DURABILITE DES BETONS LEGERS A BASE DE COPEAUX DE BOIS

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DURABILITE DES BETONS LEGERS A BASE DE COPEAUX DE BOIS
Journal des Sciences
DURABILITE DES BETONS LEGERS A BASE DE COPEAUX DE BOIS
S. TAMBA1, L. M VOUMBO2, A. WEREME3, S. GAYE4,
G. SISSOKO5
1
Département Génie Civil, Ecole Polytechnique de Thiès, Université de Thiès, Sénégal
2
Ecole Nationale Supérieure Polytechnique, Université Marien Ngouabi, Congo Brazzaville
3
Département Energie, Institut de Recherche en Sciences Appliquées et Technologies(IRSAT),
Centre National pour la Recherche Scientifique et Technologique (CNRST), Burkina Faso
4
Département Génie Electro-Mécanique, Ecole Polytechnique de Thiès, Université de Thiès, Sénégal
5
Laboratoire des Semi-conducteurs et d’Energie Solaire, Département de Physique,
Faculté des Sciences et Techniques, Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Sénégal
Abstract:
The use of wood shavings in lightweight concrete would be
interesting for the recycling of this industrial subproduct. In
France, the destruction of the pineforest in the south-west
have re-actualised this domain of research. This study is
carried out with Senegal, which is interested in the re-use of
waste wood.
In the first part, we have determined the optimal compositions
of these composite concretes. We observed that the cement
matrix - wood shavings bonding could be ameliorated by a
water saturation treatment.
In the second part, a treatment based on saturation with a
sodium silicate solution have been tested in order to obtain a
better matrix-wood bonding. Microstructural observations and
mechanical behaviour are displayed.
The last part concerns the first fire tests that are showing good
results for a use of these lightweight concretes as f1re
insulation materials.
Keywords : lightweight
fire insulation material.
concretes,
wood
Résumé:
Le bois est utilisé dans l’industrie, la menuiserie, les
charpentes ou le chauffage. Dans tous les cas, il génère une
grande quantité de déchets. Ces matériaux ne peuvent être mis
en décharge directement à cause de la pollution que cela
engendrerait. C’est pourquoi, l'utilisation de copeaux de bois
dans la fabrication de bétons légers contribue à valoriser
certains sous-produits de l'industrie du bois.
En premier lieu, nous avons déterminé les compositions
optimales de ces bétons composites. Nous avons observé que
l'adhérence matrice cimentaire - copeaux de bois pouvait être
améliorée par un traitement préalable qui consistait à saturer
en eau les copeaux.
Dans un deuxième temps, nous pensons pouvoir atteindre de
meilleures liaisons ciment - copeaux à l'aide d'un traitement de
ces derniers avec du silicate de sodium. Nous présentons donc
les observations micro structurales et le comportement
mécanique de ces bétons légers.
Enfin, les premiers tests au feu sur ces matériaux donnent des
résultats encourageants. Une utilisation de ces composites en
tant que gaine coupe feu est envisagée.
shavings, Mots clés : bétons légers, copeaux de bois, parois coupe-feu.
I . INTRODUCTION
L'utilisation de copeaux de bois dans la, fabrication de bétons légers contribue à valoriser certains
sous-produits de l'industrie du bois. L'objectif est d'obtenir un matériau composite, répondant aux
recommandations RILEM sur les bétons légers et permettant une utilisation comme paroi coupe -feu.
Plusieurs études ont porté sur l'utilisation de bois sous forme de cendres dans les bétons, jouant ainsi le rôle
de filler (Naik et al., 1999, Campbell 1990, Fehrs, 1996). Une utilisation sous forme de copeaux dans une
matrice de ciment (Mimoune et al., 1999) ou bien dans une matrice de ciment et d'argile (Bouguerra et al.,
1999) est également envisageable. On obtient ainsi un béton léger, bon isolant thermique et acoustique.
Dans cette étude, nous nous sommes intéressés dans un premier temps à la fabrication de composites
copeaux de bois + ciment, en essayant d'optimiser le rapport pondéral Ciment/Bois. De plus, les propriétés
hygroscopiques du bois nous ont amené à réfléchir sur des pré-traitements des copeaux avant malaxage avec
la pâte de ciment. Puis nous avons étudié le comportement de ces bétons en flexion et en compression à court
terme.
Dans un deuxième temps, nous avons soumis ces bétons de bois à des essais thermiques afin de tester et
d'observer leur tenue au feu.
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II . PREPARATION DES ECHANTILLONS
Nous avons utilisé un ciment Portland CEM II B-V 32,5 R et des copeaux de bois dont la répartition
granulométrique s'étale entre 0,5 et 20 mm (Fig. 1). Les copeaux ont un aspect fibreux (Fig. 2) très marqué.
Les canaux qui conduisent la sève confèrent à ce matériau une grande porosité communicant par
l'intermédiaire d'orifices. Ceci conduit à un caractère fortement hygroscopique. De ce fait, lorsqu'ils sont
introduit en substitution des granulats dans la pâte de ciment, ils absorbent une grande partie de l'eau ce qui
contrecarre la prise. Un traitement préalable de saturation en eau des copeaux permet de pallier à ce
problème. Ils sont donc immergés pendant 24 heures, puis ressuyés sur un tamis avant d'être malaxés.
Figure 1 : Analyse granulométrique des copeaux de bois
a)
b)
c)
Figure 2 : Observations au MEB des copeaux de bois
Le malaxage et le gâchage sont des opérations délicates car il faut s'assurer de l'état d'enrobage et de la tenue
des copeaux, donc respecter un ordre d'introduction des constituants et une vitesse de malaxage assez faible,
de l'ordre de 50 tours.mn-1. L'utilisation de la table vibrante est proscrite car elle conduit à une ségrégation
des différents éléments. Le remplissage des moules est effectué manuellement.
II . 1 Optimisation de la composition des bétons
Les méthodes classiques de composition des bétons ne sont pas applicables pour les bétons à granules légers.
Nous avons donc étudié les relations qui existent entre composition en granulats et la masse volumique d'une
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part et les résistances mécaniques d'autre part. Nous avons fait varier le rapport massique ciment / copeaux
secs entre 2 et 9. Les caractéristiques physiques et mécaniques à 28 jours sont reportées dans le tableau 1.
Rapport pondéral
Masse volumique
Résistance en compression
Résistance en flexion
(C/B)
(Kg/m3)
(Mpa)
(Mpa)
2
780
6,7
3,6
2,5
795
11,5
3,5
3,0
850
12,0
4,3
3,6
1016
14,6
7,4
5,5
1380
16,4
7,9
7,5
1690
27,0
8,9
9
1780
31,6
9,7
Tableau 1 : Evolutions des caractéristiques physiques et mécaniques en fonction du rapport Ciment/Copeaux
Il est logique que la résistance en compression augmente avec la teneur en ciment. Il en est de même pour la
masse volumique, qui varie de 780 à 1800 kg/m3(limite supérieure admise pour les bétons légers). En
revanche, lorsque l'on augmente la quantité relative de ciment (tout en restant inférieur à 4%), la résistance
en flexion atteint rapidement une valeur relativement élevée pour un rapport C/B limite de 3,6, puis varie
peu.
A partir de ces résultats expérimentaux reliant les caractéristiques mécaniques aux masses volumiques, nous
avons fixé le rapport Ciment / Bois à 3, compromis que nous avons choisi pour rester dans le domaine des
bétons légers mais avec des résistances correctes.
II . 2 Optimisation du traitement des copeaux
Nous avons vu précédemment que les copeaux à caractère fortement hygroscopique devaient: subir un
traitement de saturation en eau pendant 24 h, avant malaxage avec le ciment. Ainsi, nous évitons que l'eau
nécessaire à l'hydratation du ciment ne soit absorbée par les copeaux et n'assure plus l'hydratation complète
du ciment anhydride.
Dans une autre étude sur des bétons légers à base de balles de riz (Jauberthie et al., 2003), nous avons
constaté que la présence de silice amorphe dans les balles avait un rôle bénéfique sur la liaison pâte de
ciment - balle. Par analogie, un traitement des copeaux de bois dans une solution de silicate devrait conduire
à un phénomène similaire. La silice étant très faiblement soluble dans l'eau, nous avons utilisé une solution de
silicate de sodium. Nous avons donc traité des copeaux dans une solution de silicate de sodium avec une
concentration de 100 kg.m-3. Après ce traitement, les copeaux de bois subissent un ressuage avant malaxage avec
le ciment.
III . ESSAIS MECANIQUES ET OBSERVATIONS MICROSTRUCTURALES
Deux séries d'éprouvettes 4x4xl6 cm3 sont réalisées soit avec des copeaux traités à l'eau pure soit avec la
solution de silicate de sodium. Deux types de conservation sont utilisés : en salle humide (20°C, 95%HR) ou
à l'air ambiant pendant un m6is. Au terme de ces conservations, les éprouvettes sont ensuite testées en
traction par flexion 3 points et en compression pour la moitié d'entre elles. L'autre moitié est stockée en salle
sèche (20°C, 50%HR) pendant un mois supplémentaire pour être testée en compression.
Les résultats sont donnés dans le tableau 2 et dans la figure 3 l’axe des abscisses traduit le mode de
traitement et de conservation référencés au tableau 2.
Traitement
de saturation /Conservation
Flexion 3 points
(Mpa)
Compression
(Mpa)
Compression après 1 mois
supplémentaire en salle sèche
1.Eau/salle humide
1.Eau/Air
1.Silicate/salle humide
1.Silicate/Air
5,92
8,1
7,51
10,15
4,78
7,57
6,82
9,85
8,5
8,67
11,5
9,10
∆m/m après 1 mois
supplémentaire en salle sèche
(%)
-39,7
-0,4
-36,9
-4,7
Tableau 2 : Résistances mécaniques des bétons légers
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Rc Mpa
12
10
8
6
4
S2
2
S1
0
1
2
3
4
Figure 3 : Evolution de la résistance en compression - Avant et après 1 mois supplémentaire en salle sèche
Les essais en compression montrent que la cure en salle sèche conduit à une augmentation de la résistance des
éprouvettes. Nous pouvons relier cette observation au fait que les copeaux sèchent et gagnent en rigidité. Si l'on
compare les éprouvettes fabriquées à partir de copeaux traités et non traités pour des modes de conservation identiques,
nous remarquons une meilleure résistance du béton aux copeaux traités. Cette observation est également vérifiée dans le
cas des essais en traction.
La Fig. 4 présente les observations au MEB des différents échantillons. Nous observons dans la matrice de ciment, les
cristaux de chaux hydratée sous forme de plaquettes, la mousse de CSH et des aiguilles d'ettringite. Ces dernières
apparaissent en général plus nombreuses dans des zones peu denses et dans les éprouvettes préparées à partir de
copeaux traités au silicate de sodium. A la surface des copeaux traités, nous observons nettement des aiguilles
d'ettringite qui n'apparaissent pas sur les copeaux non traités.
Ces observations confirment le fait que le sodium favorise la formation d'ettringite qui, de part sa structure fibreuse et
des fibres entrelacées donnent des caractéristiques mécaniques améliorées. En outre, l'augmentation de résistance
pendant le mois supplémentaire de conservation en salle sèche peut s'expliquer par un effet pouzzolanique entre la silice
introduite par le silicate dans les copeaux et la portlandite libérée lors de la prise du ciment. Les CSH formés par ce
biais ne peuvent qu'améliorer la liaison pâte - copeau et augmenter l'effet de fibre.
Figure 4 : Observations microstructurales des éprouvettes :
a) matrice de ciment, b) surface des copeaux non-traités
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Figure 4 : Observations microstructurales des éprouvettes :
c) surface des copeaux traités et d) ettringite très présente dans les éprouvettes aux copeaux traités.
IV . ESSAIS THERMIQUES
A la suite de la caractérisation. mécanique de ces matériaux, nous avons réalisé des essais de simulation de
tenue au feu afin d'étudier la possibilité d'une utilisation en protection incendie.
Pour ces types d'essais, les matériaux à l'état frais sont moulés en plaques carrées d'épaisseur constante (55 x
55 x 4cm3). Un premier échantillon est réalisé avec des copeaux de bois imbibés d'eau et un deuxième
imbibé avec la solution de silicate de sodium selon le protocole décrit précédemment. Le rapport pondéral
ciment/bois est fixé à 3. Un échantillon de plâtre (matériau couramment utilisé en protection incendie) sert de
référence. L'hémihydrate est de type β (plâtre d'appellation commerciale ‘ normal’ ) et le rapport eau / plâtre
= 0,6.
Ces échantillons sont posés horizontalement sur un four de puissance électrique nominale 12kW. Un joint de
laine de verre assure l'étanchéité thermique jusqu'à la température de 1300°C. La montée en température est
asservie et, programmée pour suivre la courbe iso (345xlog (8t+l), t (min). La quantité de chaleur émise par
le four traverse l'échantillon de bas en haut. Le suivi et l'enregistrement des données sont réalisés au moyen
de thermocouples, de type k, reliés à une chaîne d'acquisition par l'intermédiaire d'une boite isotherme. Deux
capteurs sont utilisés pour le contrôle de la température au voisinage de la face chaude et deux capteurs sont
implantés dans l'échantillon respectivement à 10 et 30 mm de la face chaude (ces capteurs occupant une
place centrale par rapport au carré 55 x 55cm2. L'enregistrement est réalisé pendant toute la montée en
température et limité à 2h. La figure 5 représente l'évolution des températures de la face chaude et de la face
froide de l'échantillon de plâtre. Le même type d'enregistrement est fourni sur la figure 6 pour le béton léger
aux copeaux de bois.
Nous n'avons pas observé de différences de comportement sur ce type d'essais lorsque les copeaux de bois
sont ou non traités au silicate.
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Quel que soit le matériau, on peut remarquer un palier à environ 100°C qui correspond au départ de l'eau ou
des OH de constitution. Il est plus long avec le plâtre, ceci est en accord avec sa constitution. L'isolation due
à ce départ est donc de plus longue durée pour le plâtre que pour le béton. Au delà de ce pallier de chaleur
latente, les matériaux perdent rapidement leur caractère isolant. Pour une même durée d'exposition, la
température de la face froide du béton est toujours plus élevée que celle du plâtre, élément en sa défaveur.
Les déformations engendrées par la chaleur sont plus importantes sur le béton mais ceci n'entraîne pas de
ruine de l'élément. En revanche, le plâtre se fracture et s'effondre sous son propre poids. Ce phénomène est la
cause principale de la limitation de la tenue au feu du plâtre lors des essais normalisés.
V . CONCLUSION
La nature fortement hygroscopique des copeaux de bois empêche leur utilisation directe en tant que granules
légers dans les bétons. Une pré humidification s'avère indispensable et permet l'hydratation de la base
cimentaire. Nous avons montré qu'un traitement supplémentaire de ces copeaux au silicate de sodium
améliorait la liaison pâte granulat et, par là même, les résistances mécaniques du matériau. Elles sont
augmentées de 10 à 20% sans variation de la masse volumique de ce béton léger.
L'utilisation de ce matériau en tant que solution coupe feu présente, par rapport au plâtre habituel,
l'inconvénient d'avoir une faible chaleur latente mais à l'avantage de rester stable mécaniquement pendant
toute la durée de la chauffe.
Les premiers résultats de vieillissement aussi bien en salle humide qu'en salle sèche, laissent présager un
comportement durable de ce type de matériau.
Les observations microstructurales réalisées sur les échantillons chauffés semblent montrer une protection
partielle de la matrice cimentaire par les copeaux mais ces essais mériteraient d'être confirmés.
VI . REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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