Lyon conjuguée au passé et au futur

Transcription

Lyon conjuguée au passé et au futur
N° 27 - Jeudi 24 février 2011
■ Focus 9e
Il y a 36 ans,
le juge Renaud
était abattu
Page 6
Ce quotidien d’information locale est réalisé
par les étudiants en journalisme de l’ISCPA
Entre les murs
Par Jérôme Paquet
En marchant dans la rue, levons la
tête un instant. Au lieu de foncer
tête baissée sur la personne qui
bloque le passage sur le trottoir,
posons un regard vers le bâtiment
qui se trouve derrière elle.
Ces pierres ont certainement une
histoire à raconter, si elles ne
racontent pas plutôt une partie de
l’Histoire. Déambuler dans les rues
de Lyon, c’est comme reconstruire
les deux millénaires d’existence de la
ville.
Du martyr des chrétiens dans le
théâtre gallo-romain sur la colline
de Fourvière jusqu’à la très design
tour Oxygène à la Part-Dieu,
chaque lieu représente une tranche
de l’Histoire de la ville. Capitale
des Gaules au début de notre ère,
métropole de nos jours, mais aussi
royaliste, mystique, secrète ou
soyeuse, Lyon se raconte à travers
son architecture.
En marchant au fil des rues,
tournons les pages du livre
d’Histoire de la cité. Les quartiers
deviennent alors des chapitres. Les
personnages, eux, ne durent pas.
Ils sont remplacés et l’Histoire
continue. ■
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Lyon conjuguée
au passé et
au futur
Du théâtre antique de Fourvière au nouveau
quartier de la Confluence, l’architecture
lyonnaise a traversé les âges.
PAGES 2 et 3
■ Dans les coulisses de...
Cours Lafayette, trois
ans après la fuite de
gaz, la vie reprend
Page 4
■ UPI - René Cassin
Internet : accès limité
pour les étudiants
en wi-fi
Page 7
LE FAIT DU JOUR
LE FAIT DU JOUR
Deux millénaires d'échaffaudages
Joyau du Rhône, Lyon a un patrimoine architectural à
ville, les Lyonnais voient pousser de nouveaux immeubles,
l’épreuve de la modernité. Jusque dans le cœur de leur
plus futuristes les uns que les autres.
Par Lucas Demangeat
et Léo Faure
L
es rues de la Capitale des
Gaules vivent aujourd’hui
leur XXIe siècle d’architecture. L’histoire commence
dans l’antiquité, deux millénaires avant que des pelleteuses ne redécouvrent le théâtre antique de la colline de Fourvière. Deux mille ans plus
tard, le dernier auditorium construit à
Lyon est celui qu’épousent les formes
futuristes de la Cité Internationale dessinée par Renzo Piano.
L’architecture suit son temps
L’architecture est un art persistant qui
marque son époque. Les murs restent,
narrent les histoires des hommes qui
ne sont plus là pour les transmettre. à
l’image des appartements des Canuts
de la Croix-Rousse, dont les hauts
plafonds nous rappellent la présence des
métiers à tisser Jacquard. " L’architecture
suit ainsi son temps ", explique Jacques
Beaufort, ancien professeur de lettres
et auteur de Vingt siècles d’architecture à
Lyon. " La construction de Lyon s’est faite
principalement au rythme de l’évolution
des matériaux de construction : de la
pierre brute de l’antiquité aux matériaux
composites, au verre et au bois qu’on
utilise aujourd’hui en construction. "
Si une partie des constructions se renouvellent, les vieilles pierres, qui composent les 427 hectares d’architecture
lyonnaise classés au patrimoine mondial de l’Unesco, sont elles à l’épreuve
du temps.
La basilique de Notre-Dame de Fourvière, de style néogothique, a été construite en 1884 sur
les vestiges du forum antique de Trajan / Photo Jérôme Paquet
La pierre caractérise les vestiges de
Lugdunum. Plus tard, à cette pierre
s’ajoutent les armatures en métal des
monuments gothiques comme la
Cathédrale Saint-Jean. Le XIXe siècle a
été celui du fer et du béton armé, avec la
naissance des quartiers haussmanniens
de la Tête d’Or et de la basilique de
Fourvière. " Aujourd’hui, les matériaux
doivent répondre esthétiquement à
des contraintes environnementales. à
l'époque il s'agissait de monuments de la
foi. Aujourd'hui nous connaissons le bâti
de l'ère capitaliste " continue l’auteur.
Pour ce fan inconditionnel d’architecture, il n’y a pas de honte à ce que
les édifices du futur que l’on construit
dans le quartier de Confluence côtoient
les chefs-d’œuvre de nos ancêtres. à
l’image du toit de l’Opéra de Lyon,
revisité au début des années 90 par l’architecte contemporain Jean Nouvel :
" du moment que c’est beau. ", déclare
Jacques Beaufort.
Cure de jouvence
Le cœur de Lyon vit une petite révolution. La Presqu’île, réputée pour son architecture haussmanienne superbement conservée, voit pousser à son extrémité Sud un quartier flambant neuf. Confluence, gigantesque chantier entamé en 2003, fait la
part belle à l’architecture moderne.
150 hectares de bâtiments en tout genre voient actuellement le jour. Les travaux s’étaleront en quatre actes, dont le premier
doit s’achever en 2015. Le siège du Conseil régional, un centre commercial de 70 magasins, des logements pour attirer 10
000 personnes sur la zone (actuellement 7 000 habitants). Ce sont au final un million de mètres carrés de bâtiments qui
sont en construction. Reste la question de la complémentarité entre cette architecture moderne et le joyau historique de la
Presqu’île. ■
[ 2 ] Jeudi 24 février 2011 10 du MAT’
La conservation des monuments
historiques
Quand Michel Noir, maire de Lyon
de 1989 à 1995, projette de remettre
en état la toiture de l’Opéra de Lyon,
il fait appel au corpus lyonnais
d’architectes en chef des monuments
historiques. Quand on travaille sur
ce type de monuments, les travaux
sont soumis à l'accord très strict de
l'architecte des bâtiments de France. JeanFrançois Grange Chavanis, architecte
au cabinet AEC à Lyon, fait partie des
professionnels contactés par l’ancien
maire de la ville : " Quand on rénove
un monument historique, on essaie d’agir
dans son respect, préserver son authenticité
et sa culture. Mon projet pour l’Opéra,
qui n’a pas été retenu, conservait la salle
ancienne et son plafond. Selon moi, la
classification monument historique est le
mode de conservation le plus fort ".
L’architecte explique que le projet adopté n’ait pas conservé les traits historiques
de l’Opéra : " Michel Noir était en pleine
gloire politique, il lui fallait un architecte
connu, comme Jean Nouvel, qui propose
quelque chose de moderne ".
Un jour peut-être, comme les églises et
cathédrales, les tours qui façonnent le
quartier de la Part-Dieu seront inscrites
au panthéon des œuvres architecturales. ■
427.
C’est le nombre
d’hectares lyonnais
classés au patrimoine
mondial de l’Unesco.
Cette zone comprend
Fourvière, le Vieux
Lyon, la presqu’île et
Croix-Rousse. C’est la
deuxième zone française
classée la plus large,
après Bordeaux. ■
" Lyon vitrine des lumières "
Le patrimoine lyonnais jouit d’une mise en lumière unique en Europe. Florent Vandestoke,
président de l’association Asso’Lumière, décrypte cet atout.
Quelles techniques permettent une bonne mise en valeur d’un bâtiment ?
Pour des raisons aussi bien esthétiques que d’économies d’énergie, nous avons arrêté
d’arroser les bâtiments de lumière. Aujourd’hui, nous travaillons sur un soulignement
des lignes architecturales fortes du bâtiment. La couleur joue aussi énormément auprès
du grand public. Sur les bâtiments modernes et évènementiels, on peut se permettre un
éclairage coloré. Pour les bâtiments historiques et institutionnels, on reste par contre sur
du blanc, plus ou moins chaud, pour éviter les connotations. Imaginez par exemple, si
on éclaire l’Hôtel de ville en rouge, les habitants y verront une symbolique communiste.
Quelle réglementation encadre l’éclairage public ?
L’économie d’énergie est notre première contrainte. De nos jours, la mode est aux diodes.
Pour le reste on est plutôt libres. Chaque ville peut décider du type d’éclairage architectural qu’elle souhaite, sans véritable réglementation.
Comment jugez-vous la mise en valeur du patrimoine lyonnais ?
C’est la référence, avec le 8 décembre comme laboratoire géant ! Lyon est la vitrine euLa rénovation du toit de l’Opéra, réalisée
ropéenne, voire mondiale en terme d’éclairage architectural. Cela date du mandat de par Jean Nouvel, a duré de 1989 à 1993
D.R.
Michel Noir (1989-1995, ndlr), qui a lancé le premier plan lumière au monde. ■
10 du MAT’ Jeudi 24 février 2011 [ 3 ]
DANS LES COULISSES DE...
économie
Retour cours Lafayette
Le CD baisse d’un ton
Le 28 février 2008, une fuite de gaz meurtrière a rendu inhabitable
l’immeuble, cours Lafayette, dans le 6e arrondissement. Trois ans
plus tard, les résidents ont regagné leurs appartements.
Les ventes de disques n’en finissent plus de
chuter. Cette industrie devrait baisser ses prix
au risque de voir le CD disparaître.
ela fait une semaine
que j’ai retrouvé mon
appartement. Les derniers travaux ont été achevés
aujourd’hui (mardi dernier
nldr). Cependant, je me sentirai vraiment chez moi, une
fois mes meubles récupérés. Je
suis fatiguée de tout cela ",
souffle Jacqueline Marque,
habitante du troisième étage.
Ces trois années ont été un
long chemin de croix pour
les résidents du 117 cours
Lafayette, victimes de cette
fuite de gaz qui a fait 40
blessés et un mort. La régie
lui a trouvé un appartement
au 156 cours Lafayette après
avoir séjournée deux mois
chez sa fille à Paris. " Il est
vrai que j’ai pu bénéficier d’un
endroit proche de mon appartement. Je pouvais suivre les
travaux tous les jours. Cependant, c’était comme si j’étais à
des kilomètres : Ce n’était pas
mon quartier ! ", se rappelle
la doyenne de l’immeuble.
Autre témoignage, celui de
Claude Gindre qui réside
L
C
au cinquième étage : " Ma
femme et moi avons enchaîné les studios, les chambres
d’hôtels et les appartements.
Cela parait excessif, mais nous
étions comme des zombies en
errance. "
En février 2010, tous ont
pu venir constater les dégâts
grâce à un escalier de fortune installé dans la cour.
" Les portes étaient défoncées
et l’escalier s’était effondré. Les
lieux étaient méconnaissables
bien que les travaux aient
avancés ", explique Anne
Delorme, propriétaire d’un
appartement au cinquième
étage.
Pour Claude Gindre, " l’humidité a été la source la plus
importante des dégâts. Un an
sans fenêtres a transformé les
tapisseries en lambeaux sans
compter les fientes de pigeons
qui jonchaient le sol ". Jacqueline n’a pas été sinistrée
de la même façon puisque
ses fenêtres étaient renforcées par un double vitrage.
Si les pigeons ont épar-
Jacqueline Marque est la dernière résidente à avoir regagné son
appartement / F.L.
gné son domicile, " les rats
étaient en train de dévorer
mes victuailles car le frigo
était ouvert. Cela a fait beaucoup rire mes proches mais je
pensais surtout à mes douze
bouteilles de champagnes que
je conservais précieusement.
Une fuite de gaz meurtrière
Sur les lieux du drame, tous ont été sidérés par l’importance de l’incident qui s’est déclaré à midi le 28 février 2008. " J’avais donné rendez-vous à mes petits-enfants pour aller au
restaurant. Les ouvriers me conseillaient de quitter les lieux " car on ne sait jamais " à cause
des travaux. Alors que je déjeunais au restaurant avec mes petits-enfants à Saint-Jean, ma fille
qui habite à Paris m’a appelé car les chaînes d’information en parlaient. Je me suis précipitée
pour constater l’ampleur du sinistre. M’empêchant d’entrer, un pompier m’a rapporté qu’un
trou énorme des caves au toit témoignait de la violence de l’explosion ", raconte Jacqueline
Marque. Anne Delorme a " vécu en direct l’explosion ". " J’ai su que la situation était grave
que je ne retrouverais pas mon chez-moi avant longtemps. Une boule me nouait le coeur. ",
poursuit la jeune femme. Ce n’était que le début d’une longue traversée du désert.
[ 4 ] Jeudi 24 février 2011 10 du MAT’
Lorsque nous ne vivons pas
une telle situation, nous ne
nous rendons pas compte que
le moindre bien préservé est
un réconfort ".
Aujourd’hui, tous les appartements ont été refaits à
neuf, " une copie conforme
à l’existant. Nous sommes
tellement soulagés et nous
nous sentons vraiment à la
maison. Naturellement, je ne
dirais pas que c’est une bonne
chose mais ce drame nous a
tous rapprochés. Bien que très
soudés auparavant, désormais
nous faisons attention aux uns
et aux autres ", assure Anne
Delorme. Inutile de dire que
personne " n’oublie le pompier décédé lors dans l’explosion de la fuite de gaz ".
Fabien Leone
e téléchargement illégal, " ça fait
mal, mais je comprends les gens ".
Laurent, vendeur au rayon musique à
la FNAC de Bellecour depuis 25 ans,
ne cautionne pas pour autant cette pratique, première responsable de la chute
vertigineuse de CD. " Mais il n’y a pas
que cela : le prix est affolant. Environ
20 euros quand on aime juste un titre ou
deux, je comprends qu’on n’achète pas ".
La FNAC a-t-elle une politique pour
enrayer la chute des ventes ? " Je ne pense
pas. Mais en revanche, nos offres de quatre
CD à 20 euros marchent très bien ".
Pour Fabien, responsable de la boutique
OCD (DVD et CD d’occasion), rue
Victor Hugo, " c’est le numérique qui est
responsable de cette crise ". Et les deux
vendeurs de préciser une chose essentielle à leurs yeux : " la qualité acoustique ! ". Sur le disque, la musique n’est
pas compressée, et cela s’entend. " Le
gars qui veut écouter du Sexion d’Assaut
il n’a pas besoin d’un CD… ", lâche Fabien, dans un sourire à peine dissimulé.
Les modes de consommation ont évolué. " On change de musique comme on
change de restos. Tout le monde écoute de
Les ventes de CD sont en chute libre / J.P.
tout, reprend le vendeur d’OCD, moins
inquiet qu’avant pour l’avenir des ventes
d’album. Il y a sept ans je me disais que
c’était la fin. Or le CD est toujours là ".
Si les ventes d’albums de hip-hop ou de
reggae se sont effondrées, la musique
metal tient toujours la route. " Les métalleux sont des fétichistes, très attachés à
l’objet ".
De son côté, la vente de vinyles reprend
des couleurs. Mais " c’est un phénomène
trop ponctuel " selon Fabien. " C’est
une question de mode. Quand les jeunes
en auront assez de changer de face
toutes les 20 minutes, ils reprendront le
téléchargement ".
Jean Rioufol
De nouveaux moyens de consommer
Le schéma classique
" nouveau CD - tournée
de promotion " semble
avoir vécu, et le groupe
anglais Radiohead fait
figure de pionnier. En
2007, leur album In
Rainbows était disponible
en téléchargement à
prix libre sur Internet
avant sa sortie physique
en magasin. Pour leur
nouvel opus The King
Of Limbs, le quintet
propose de nouveau
une version digitale sur
son site Internet, mais
cette fois en fixant le
prix. La version CD sera
disponible le 28 mars.
D’autres groupes suivent
un parcours similaire :
nombreux sont les artistes
débutant leur carrière
(Wonderflu ou Guru
Meditation en France)
qui laissent l’internaute
décider du prix de
l’album, en prenant le
risque que celui-ci ne
paye rien. D’autres encore
préfèrent distribuer leur
musique gratuitement,
en cherchant surtout à
toucher un public plus
large, comme The Brassic.
Enfin, le groupe francoaméricain
Moriarty
organise sa tournée de
promotion avant la sortie
de son nouvel album,
cette année.
►►►
Fil Info
■ édouard herriot
à flot
Le port édouard Herriot a
connu une hausse du trafic
fluvial et ferroviaire de 5 % en
2010, une première depuis trois
ans. 5,8 millions de tonnes de
marchandises ont ainsi transité
par le port l’année dernière, une
hausse de 8,2 % par rapport à
2009. Le trafic de bateaux de
croisière a pour sa part augmenté
de 13,4 %, pour un total de
10 311 passant par le port du
Sud de la ville.
■ L’hôtellerie à la
hausse
Les hôtels de Lyon ont connu
une hausse de leur fréquentation
de 1 % en 2010 et de 3 % en
terme de recettes moyennes
par chambre disponible.
Le secteur de l’hôtellerie
représente plus de 16 000
emplois dans l’agglomération.
4 600 entreprises sont
spécialisées dans ce domaine.
■ 247 postes en moins
dans le fret
La direction de la SNCF a
annoncé avoir supprimé 247
emplois entre 2009 et 2011 dans
le secteur du fret dans la région
lyonnaise. La CGT dénonce
une " casse sociale ", et souligne
" qu’un train sur cinq est en
retard " au départ de Lyon. Le
syndicat estime qu’il y a " une
baisse étourdissante des volumes
transportés [...], de 55 milliards
de tonnes en 2000 à 22 milliards
prévus en 2011. "
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10 du MAT’ Jeudi 24 février 2011 [ 5 ]
FOCUS 9e
UPI RENé cassin
Un juge assassiné
Attention, surf interdit
François Renaud, juge d’instruction lyonnais, a été exécuté il y a
36 ans en pleine rue, au-dessus du bâtiment de l’UPI.
Pour des raisons de sécurité, l’accès à certains sites est restreint sur le
campus. Comment sont-ils choisis ? Facebook est-il sur la sellette ?
T
H
rois coups de feu. Trois balles
d’un calibre 38 spécial, dont
deux qui se logent dans la
nuque, ne laissant aucune chance de
survie. Il est 2 h 45, le 3 juillet 1975.
Le juge d’instruction lyonnais François
Renaud vient d’être exécuté. Au beau
milieu de la rue de l’Observance
(Lyon 9e), sur la colline de Fourvière.
C’est une première en France. Jamais
auparavant le grand banditisme ne
s’en était pris aussi directement à
l’institution judiciaire. " Tout sera mis
en œuvre pour que les auteurs de ce crime
de sang soient recherchés, poursuivis et
traduits devant les tribunaux " assène
alors Jean Lecanuet, Garde des Sceaux
à l’époque. L’assassinat est pourtant
resté sans explication.
Le " sheriff ", l’homme à abattre
La première explication tient dans la
personnalité même du juge François
Renaud, en poste à Lyon depuis trois
ans. Ancienne gloire de la Résistance,
ayant accomplie la majorité de sa
carrière de magistrat en Afrique
coloniale, François Renaud, surnommé
" le sheriff ", ne laisse pas indifférent.
Large moustache, costumes bigarrés,
lunettes de soleil. Courageux, voire
intrépide, entreprenant, arrogant... les
qualificatifs fusent dans les couloirs
du Palais de Justice de Lyon. Toujours
est - il que ses élans de " super - flic " lui
valent d’être en charge des dossiers les
plus chauds. En tête : le casse de la
Poste de Strasbourg, communément
attribué au Gang des Lyonnais.
Dès lors, tous les regards se tournent
vers ce fameux gang, emmené par
Edmond Vidal. " Le milieu lyonnais était
structuré, avec une véritable influence sur
la vie de la ville. On sortait, à l’époque,
de la guerre d’Algérie. Les anciennes
[ 6 ] Jeudi 24 février 2011 10 du MAT’
Patrick Dewaere joua François Renaud, deux ans après l’assassinat, dans le film Le juge
Fayard dit le shériff, directement inspiré du meurtre du juge. / D.R.
gloires de l’armée se sont recyclées soit en
politique, soit dans le business, soit dans le
banditisme. Les liens entre les trois cercles
sont donc étroits " explique Georges
Fenech, dernier juge d’instruction en
charge du dossier.
La piste politique
Les exécutants sont rapidement
identifiés : Jean - Pierre Marin, Robert
Alfani et Michel Lamouret, trois
truands du quartier de Vaise. La voiture
utilisée le soir du crime, une Audi 80
retrouvée sur un parking, rue Pierre
Audry (dans le prolongement de la rue
du sergent Michel Berthet), atteste de
cette piste. Mais les suspects sont des
habitués de la garde à vue, et les preuves
restent inexistantes.
Jean - Pierre Marin est abattu par la
police, neuf mois après la mort du juge
Renaud, dans une affaire parallèle. Mais
les yeux des policiers restent rivés sur
ses deux compères, reliés indirectement
au Gang des Lyonnais.
Pourtant, dans leur dos, une piste
plus politique grandit, alimentée
par Francis Renaud, fils du juge, et
son avocat - star Jacques Vergès. Et si
François Renaud était sur le point de
démanteler un réseau de financement
via les casses du Gang des Lyonnais.
Un détournement qui profiterait au
SAC (Service d’action civique), bras
exécutant des basses oeuvres de l’UDR
(ancien RPR, devenu UMP) ? L’idée
est séduisante, mais ne fait pas long feu
devant la justice. " C’est une thèse surtout
médiatique. On a creusé, mais il n’y avait
aucune consistance. Tout nous ramenait
toujours au grand banditisme. Même si
nous n’avons jamais trouvé d’éléments
concrets à charge ".
Faute de preuve, le dossier est finalement
clôs en 1992. Six juges auront planché
dessus, pendant plus de dix - sept ans.
Pour un crime finalement impuni.
Léo Faure
ier, j’ai fait une recherche pour
un reportage sur le suicide des
enfants. J’ai trouvé un forum
qui semblait particulièrement intéressant.
Mais la page ne s’est jamais ouverte, le
site était bloqué ". Marion, 21 ans,
n’est pas la seule à avoir connu ce
problème avec le wi-fi de l’UPI. PierreMarie Drewnowski, responsable du
service informatique, ne manque pas
d’exemples : " Il y a quatre ou cinq jours,
nous avons débloqué un site proposant
des stages aux états-Unis et considéré
comme potentiellement dangereux par les
antivirus de notre base de données ".
Le but de la manœuvre est double :
protéger les ordinateurs portables des
étudiants, et leur éviter les sites dits
sensibles. Il détaille : " C’est presque un
contrôle parental, sauf que l’utilisateur
ne peut pas passer outre. Les sites régulés sont définis par une base de données
que l’on achète aux Américains. Parfois,
elle est un peu trop puritaine. Nous avons
par exemple eu un problème avec le site
de Durex, car un élève voulait faire un
exposé sur leur communication et il était
bloqué. Il est venu nous voir et nous avons
autorisé l’accès à ce site ".
Facebook bientôt bloqué ?
Pour autant, les écoles ont aussi leur
mot à dire sur les sites dont l’accès est
interdit en wi-fi et bientôt sur les ordinateurs fixes. Marie Chausse, directrice
déléguée de l’IGS résume : " Ces décisions sont prises lors d’un comité de pilotage qui regroupe toutes les écoles. Mais
on y réfléchit d’abord au sein de chacune
d’elles. Par exemple, la question d’interdire Facebook s’est posée. Mais rien n’a
encore été décidé ".
Pierre-Marie Drewnowski commente :
" Il y a un aspect moral à cela. Les parents
qui payent l’école n’apprécieraient sans
doute pas que leurs enfants passent tous
leurs cours à surfer sur Facebook ". Même
si le site représente 50 % du trafic wifi de l’UPI, le responsable ne croit
pas en sa censure. " Facebook n’est pas
pédagogique, mais il sert pour d’autres
aspects de la vie étudiante, et c’est aussi
cela que vendent les écoles ".
En revanche, l’interdiction pourrait
venir suite au ralentissement que provoque l’utilisation de Facebook sur le
réseau. Le responsable du service informatique rejette cette idée : " Je ne vois
pas comment on peut bloquer des outils
qui représentent la liberté de parole uniquement parce que cela consomme. Si
on veut que la qualité soit meilleure
pour les étudiants, alors seules les écoles
le peuvent, en achetant une connexion
plus importante. Et cela représenterait des
milliers d’euros supplémentaires ". Or la
►►► Les rendez-vous de l’UPI
■ Bas les masques à l’ISCPA
Ce soir, 7 C&J, le BDE de l’ISCPA
organise une soirée masquée au Red
House (2 Petite rue de Monplaisir,
métro Sans souci). L’occasion pour
les communicants et journalistes en
3e année de fêter la fin des cours. Début du bal à 21 heures. Entrée 7 euros.
Réduit avec Izipass : 6 euros.
■ Retours sur le wi-fi
Suite au sondage réalisé à l’UPI sur la
qualité du wi-fi, le service informatique a réalisé des modifications sur le
réseau. Il espère désormais des retours
détaillés (endroits où persistent les
problèmes et où les améliorations sont
visibles) afin de lutter au mieux contre
les déconnexions intempestives.
à lui seul, Facebook représente 50 % du
trafic wi-fi de l’UPI / Photo Virginie Malbos
connexion coûte déjà 4 000 euros hors
taxes par mois. Ce qui explique que
l’UPI en appelle à la responsabilité de
chacun.
Virginie Malbos
Réagissez !
sur www.keskiscpass.com
Le 10 du mat’
Adresse : 47, rue sergent Michel Berthet,
69009 Lyon
Site web : www.keskiscpass.com
Email : [email protected]
Tél : 04 72 85 71 71
Directrice de la publication : Isabelle Dumas
Directeur de la rédaction : Christian Redon
Rédacteur en chef : Jérôme Paquet
Secrétaire de rédaction : Baptiste Marsal
Coordinateur web : Jean Rioufol
Rédaction : Grégoire Arnould, Camille Brunier,
Lucas Demangeat, Sarah Duverger, Fabien Leone,
Virginie Malbos, Baptiste Marsal, Hermance
Murgue, Jérôme Paquet, Jean Rioufol, Léo Faure.
Réalisé dans le cadre de la spécialisation presse écrite
des étudiants de l’ISCPA Lyon
10 du MAT’ Jeudi 24 février 2011 [ 7 ]
SCIENCES
Culture
Murs végétaux dépolluants
Le concept se développe dans l’agglomération lyonnaise. Au-delà de
l’esthétique, les plantes sont au service de l’atmosphère.
Le silo de la gare de Perrache dispose
d’un mur végétal depuis 2007
Photo D.R.
E
n 2007, la communauté urbaine du Grand Lyon a financé
à hauteur de 213 000 euros
un mur végétal baptisé " dépolluant ",
sur l’une des quatre parties du silo du
centre d’échange de Perrache, côté
place Carnot.
La société lyonnaise Canevaflor, spécialisée dans ce type de projets en a assuré
la réalisation. Sylvie Rutler, assistante
de direction et spécialisée dans les projets internationaux, notamment au
Brésil explique : " L’objectif poursuivi
pour le mur végétal est bien celui de la
lutte contre les émissions de CO2. Le support vivant capte les particules polluantes
et de gaz à effet de serre via la terre
humide. Le mur est composé d’arbustes,
de plantes, d’insectes, les polluants sont
détruits par l’action des tissus végétaux et
des micro-organismes ".
René Rohr, spécialisé en écologie
microbienne à l’Université Lyon 1, et
qui travaille en étroite collaboration
avec Canevaflor, souligne que
" 19 espèces végétales composent cette
installation.
Les
micro-organismes
[ 8 ] Jeudi 24 février 2011 10 du MAT’
présents dans ce mur végétal ont pour but
de métaboliser l’air pollué du parking ".
Le mur possède en outre, grâce au
volume de mélange terreux humidifié
contenu entre ses parois, la capacité
à jouer le rôle de climatiseur d’air
urbain et d’isolant thermique. Grâce
à la biofiltration, une étude réalisée en
2005 en partenariat avec la Ville de
Lyon a permis de mettre en évidence
un effet significatif sur le dioxyde
d’azote – environ 50 % de réduction –
que l’expérimentation de Perrache
permettra de confirmer.
" Car nos résultats chiffrés ne seront
connus qu’en 2012. Nous travaillons
avec une étudiante qui réalise sa thèse sur
cette question ", poursuit Sylvie Rutler.
Sa société est loin de connaître la
crise et les projets fleurissent : rue de
l’Annonciade dans le 1er arrondissement,
un mur végétal temporaire va voir
le jour en avril. Le quartier Cusset à
Villeurbanne a emboîté le pas à Lyon,
avec un mur végétal de 17 mètres de
hauteur pour 14 mètres de largeur.
Jean Rioufol
Une maison de
la biodiversité
La ville de Lyon a décidé
d’installer une branche du CNRS
dans les locaux du Parc de la
Tête d’Or afin de valoriser la
biodiversité auprès des visiteurs.
Pour ce faire, les locaux de
l’Orangerie vont être réhabilités
afin de mettre en place un
programme tourné vers le public.
L’accent va être porté sur la
signature naturelle à travers les
matériaux et le geste spatial.
La délibération du meilleur
projet, piloté par les étudiants de
l’ESAIL, école
supérieure
d’architecture
d’intérieur de
Lyon, aura lieu
demain.
Le jeu, c’est du sérieux
V
ous êtes dans la peau d’un
membre
d’une
ONG
(Organisation
nongouvernementale). Choisissez votre
scénario : feu de forêt, tsunami, cyclone
ou tremblement de terre. Ensuite, à
vous de protéger les populations. Le but
du jeu de stratégie Halte Catastrophe :
initier à la gestion des catastrophes
naturelles. Ce serious game a été créé
par l’ONU et l’ISDR (International
strategy for disaster reduction).
Ce terme a fait son apparition en 2002
aux Etats-Unis avec America’s Army, un
jeu en 3D créé pour promouvoir l’armée américaine. Les joueurs doivent se
mettre dans la peau d’un GI, remplir
des missions. Une rumeur dit même
que si vous obtenez l’un des meilleurs
scores, un recruteur viendra sonner à
votre porte.
Aujourd’hui, on trouve des serious game
sur tous les thèmes : l’écologie, l’alcoolisme ou encore les dangers d’Internet.
Carole Duguy est animatrice de l’espace numérique Part-Dieu : " Ces jeux
vidéo sont utilisées pour transmettre un
savoir, une information. Le support est
excitant pour les apprenants et permet un
meilleur apprentissage ".
Un concept qui plaît aux universités,
comme Lyon I : " Nous savons d’ores et
déjà que c’est efficace car nous avons tous
appris en jouant. Les futurs étudiants sont
nés avec des ordinateurs entre les mains.
Il faut que les institutions s’adaptent à
ce nouveau rapport à la technologie "
analyse Nicolas Coltice, directeur
d’Icap (Innovation conception et
accompagnement pour la pédagogie) à
Lyon I. Mais ces serious game nécessitent
des moyens financiers et humains : " Il
faut définir le message que le jeu devra
véhiculer puis le retranscrire sous forme
ludique et bien sûr avoir les compétences
techniques pour créer le jeu ou déléguer
à des entreprises spécialisées " continue
Nicolas Coltice. Pour l’instant,
l’Université Lyon I utilise ces serious
game pour certains cours d’anatomie
ou encore pour simuler les gestes de
première urgence. Les budgets peuvent
Autour d’une table
Photo Jérôme Paquet
Non, personne ne déménage place Gabriel Péri !
Cette " Tour de table " est en fait le point de départ d’" Always
All Ways ", une exposition d’art contemporain de 17 œuvres
dispersées dans la ville. Un parcours qui dure 1 h 30,
gratuit, est organisé tous les samedis. Ces œuvres, de l’artiste
Pascale - Marthine Tayou, seront au centre de la prochaine
exposition du Musée d’Art Contemporain qui débute
aujourd’hui.
Halte Catastrophe est un jeu de simulation
pour se sensibiliser à la prévention des
catastrophes naturelles / Photo D.R.
varier de 1 000 à 500 000 euros. La
conception d’America’s Army, elle,
coûte 7 millions de dollars. Des
moyens financiers que les universités ne
sont pas encore prêtes à engager selon
Nicolas Coltice : " Il faut se débarasser
de ce mythe du jeu vidéo très design. Si le
concept est bon, les graphismes n’auront
aucune importance et l’apprentissage sera
d’autant meilleurs ". Jouez gratuitement.
Sarah Duverger
> Jouez gratuitement à différents serious game sur
www. vive-laculturenumerique.org.
►►► Fil
culture
► Soirée Jeunes
Talents France Ô
Cinq groupes
régionaux, d’horizons
musicaux variés( electro,
folk ou hip hop), se
donnent rendez-vous
ce soir, à 20 h 30 sur
la scène de l’Epicerie
Moderne, à Feyzin. Ils
ont été selectionnés par
un jury d’amateurs et
de professionnels parmi
80 candidatures. Une
ultime sélection au
mois de juin propulsera
l’un de ces groupes au
festival des Francofolies
de la Rochelle.
L’entrée est gratuite.
► Concert d’Asa au
Transbordeur
La chanteuse
nigérienne, Asa,
sera ce soir, à 19 h,
au Transbordeur.
Reconnue pour ses
tubes Fire on the
moutain et Jailer, elle
viendra présenter
son deuxième album
Beautiful Imperfection.
Entrée : 30 euros.
Retrouvez Radio ISCPA,
partenaire du 10 du mat’,
sur www.keskiscpass.com
10 du MAT’ Jeudi 24 février 2011 [ 9 ]
Ils font bouger lyon
Un marché timbré
Un jour, un marché (3/4). Tous les dimanches depuis 35 ans,
Mehdi Bensemoun vend ses timbres place Bellecour.
P
our
Mehdi
Bensemoun,
72 ans, impossible de rater le
traditionnel marché aux timbres
du dimanche matin, place Bellecour.
Déjà 35 ans que ce philatéliste lyonnais
expose ses " joujoux ", comme il aime
à les appeler. Peu importe le temps qu’il
fait, à 8 h 30 du matin, son stand est
déjà soigneusement installé.
Rangés par couleur dans une quarantaine de gros classeurs, les
130 000 timbres de ce passionné sont
une véritable fierté. " Parfois, je passe
des nuits entières à classer et à ordonner
mes timbres. Il faut que tout soit parfait. Quand les passants feuillettent mes
albums, ils sont toujours agréablement
surpris et ils me félicitent, c’est un vrai
bonheur " explique le philatéliste.
Mehdi Bensemoun n’a pas toujours
été passionné par les petites vignettes.
"
ON EST LA POUR
SE FAIRE PLAISIR "
" Tout est parti de mon beau-frère qui
était un véritable fan de timbres. Un jour,
il en a eu marre et a donné sa collection à
mes enfants. Mais, ils n’en prenaient pas
soin et les laissaient traîner partout. Alors,
c’est moi qui m’en suis occupé et je me suis
complètement pris au jeu " confie Mehdi.
Par semaine, le collectionneur consacre
environ 35 heures à sa passion, soit une
moyenne de 5 heures par jour.
à la Poste ou chez des grossistes, il est
sans cesse à la recherche de nouveautés
qui pourraient agrémenter, un peu
plus, sa collection. " J’achète près de
15 000 timbres par an " assure t-il.
Qu’ils soient neufs ou oblitérés (avec
le tampon original), Mehdi propose
[ 10 ] Jeudi 24 février 2011 10 du MAT’
Le marché aux timbres de la place Bellecour est né en 1849 et a lieu tous les dimanches de
8 h 30 à 12 h 30 / Photo Hermance Murgue
des timbres pour toutes les bourses.
" Les tarifs pour les timbres vont de 20 à
30 centimes, c’est-à-dire, deux à trois fois
moins cher que le prix habituel. Je vends
également des carnets, des enveloppes personnalisées et des blocs souvenirs. Là, les
prix peuvent aller jusqu’à 7 euros ".
Sur le marché de la place Bellecour,
Mehdi Bensemoun fait partie des plus
anciens.
Au fil des années, il a tissé des liens
d’amitié avec les sept autres collectionneurs. " Je vois les mêmes personnes
depuis 35 ans alors c’est un peu comme
une famille ".
Malgré leur fidélité et leur attachement
au marché, la vente de timbres ne fait
plus recette. Mais pour Mehdi, ce
n’est pas l’essentiel : " Je suis là pour
promouvoir la philatélie et me faire
plaisir. Ce qui est important, ce n’est pas
de gagner de l’argent mais de partager
notre passion avec ceux qui viennent
nous rencontrer ". Avec une pointe de
regret, Mehdi Bensemoun commence à
s’interroger sur le devenir de sa passion.
" Je vieillis et j’espère que mes enfants
reprendront ma collection. Mais, pour
l’instant ce n’est pas gagné ".
Hermance Murgue

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