Résumé - Association Démocratique des Femmes du Maroc

Transcription

Résumé - Association Démocratique des Femmes du Maroc
Mise en œuvre de la convention CEDAW
Rapport parallèle des ONG au 3ème et 4ème rapport
périodiques du gouvernement marocain
Résumé
Octobre 2007
Ont contribué à ce rapport :
Alliance des femmes du Maroc pour le Développement et la formation
Amnesty International – Maroc
Aspirations Féminines
Association Sayeda Al Horra
Association Troisième 3ème Millénaire pour le développement et la Protection de l’Enfance
Association Ain Ghazal
Association Amal
Association AMNA
Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM)
Association Ennakhil pour la Femme et l’Enfant
Association Espace Citoyenneté
Association INSSAF
Association Marocaine de Planification familiale (AMPF)
Association Marocaine des Déficients Moteurs (AMDM)
Association Marocaine des Droits des Femmes (AMDF)
Association Marocaine de Lutte contre les Violences à l’égard des Femmes
Association Solidarité Féminine
Centre Droits des Gens
Association Chaml pour la Famille et la Femme
Comité d’Appui à la Scolarisation des Filles Rurales (CSSF)
Initiatives pour la Protection des Droits des Femmes – Fés
Initiatives pour la Protection des Droits des Femmes – Meknes
Joussour, Forum des Femmes Marocaines
Ligue Démocratique des Droits de s Femmes (LDDF)
Organisation Marocaine des Droits Humains (OMDH)
Organisation Panafricaine de Lutte contre le Sida (OPALS)
Solidarité Féminine
Coordonné par
L’Association Démocratique des Femmes du Maroc
Contexte général
Depuis l’examen de son 2ème rapport périodique (CEDAW/CMOR/2),1 le Maroc a consolidé
un certain nombre de réformes et ouvert de nouveaux chantiers en matière de protection et de
promotion des droits de l’homme, d’une façon générale et des droits humains fondamentaux
des femmes et fillettes, plus particulièrement.
Cette évolution positive est manifeste notamment par : i) les réformes législatives visant à
lutter contre les discriminations à l’égard des femmes, ii) l’amorce de nouvelle vision des
politiques publiques de promotion des femmes de plus en plus intégrée dans les programmes
gouvernementaux dans le chapitre relatif aux droits de l’homme et aux libertés
démocratiques et non plus uniquement comme questions sociales et enfin, iii) par l’ouverture
de certains ministères techniques tels que le ministère de l’Economie et des Finances et le
département de la planification à la problématique du genre.
L’une des plus grandes réalisations qui sont intervenues est incontestablement la réforme du
Code de la famille (2004) après un long processus marqué par des confrontations ayant
opposé le mouvement des femmes et ses alliés d’une part et les courants conservateurs,
d’autre part.
Résultant de la rencontre entre les aspirations et demandes du mouvement des femmes et la
vision moderniste du Roi du Maroc, d’autres mesures ont été mises en œuvre pour lutter
contre les discriminations à l’égard des femmes et fillettes depuis l’examen du 2ème rapport
périodique du Maroc, à savoir:
ƒ la révision en avril 2007 du Code de la nationalité qui confère, désormais, aux femmes
marocaines le droit de transmettre leur nationalité à leurs enfants (article 6 du code de
la nationalité révisé) ;
ƒ la révision partielle du code pénal et de la promulgation d’une nouvelle législation du
travail (2003) ayant permis de supprimer un certain nombre de dispositions
discriminatoires à l’encontre des femmes et fillettes.
Toutefois, en dépit de ces progrès indéniables, le cadre juridique marocain est loin d’être
entièrement conforme aux différentes dispositions de la CEDAW et plus particulièrement à
son article 2 et aux recommandations du Comité Cedaw à l’issue de l’examen du 2ème rapport
périodique (2003)2. En effet, plusieurs questions critiques ayant fait l’objet de
recommandations sont toujours d’actualité. Il s’agit notamment de:
- La levée des réserves et la ratification du protocole facultatif ;
- L’incorporation du principe d’égalité entre les hommes et les femmes dans la
constitution ;
- L’inscription de la définition de la discrimination à l’égard des femmes tel que énoncée à
l’article premier de la Convention dans la législation nationale ;
- La définition du statut des conventions internationales dans le cadre juridique interne ;
- L’inscription des dispositions de la Convention dans la législation nationale ;
- La promotion de la représentation politique et publique des femmes ;
- La modification des attitudes stéréotypées ainsi que les pratiques culturelles
discriminatoires relatives aux rôles des femmes et des hommes dans la famille et dans la
société.
1.
2
627e et 628e séances du Comité le 15 juillet 2003 (CEDAW/C/SR 627 et 628)
Conformément à la procédure d’examen des rapports (art 20 de la convention)
A quelques exceptions prés, l’interdiction de la discrimination ne fait pas partie encore de
l’esprit et de la lettre de la constitution marocaine ni des autres lois qui régissent le statut des
citoyens et citoyennes au Maroc comme nous allons le voir dans l’évaluation de la mise en
œuvre par le Maroc des dispositions de fond de la Cedaw.
Par ailleurs, les progrès accomplis en matière de promotion du cadre juridique sont confrontés
dans leur mise en œuvre à des obstacles et des contraintes de plusieurs ordres : résistances
politiques, sociales, culturelles, absence de vision intégrée, de moyens humains et matériels,
d’instruments et de mécanismes de mise en œuvre, etc. Ces contraintes, si elles ne sont pas
adressées d’une façon prioritaire et urgente, risquent de discréditer les réformes entreprises et
leur ôter tout impact positif sur la vie des femmes et des fillettes.
Partie I : Les engagements et politiques publiques pour lutter
contre les discriminations
Quelque soit les avancées sectorielles, les déficits en matière de politiques publiques
globales incluant des choix stratégiques fondés sur vision équitable et égalitaire des
relations hommes femmes, et dotée des outils institutionnels, législatifs, administratifs,
humains et matériels de mise en œuvre, constituent le principal domaine ou aucun effort
n’a été consenti par le gouvernement depuis le précédent rapport. L’effet direct de ce
déficit consiste en la fragilisation des acquis obtenus de haute lutte dans un contexte
marqué par la montée des conservatismes politiques et religieux et dans lequel la question
de la lutte contre les discrimination à l’égard des femme représente un enjeu politique et
social considérables .
Une politique publique volontariste en faveur de l’égalité, avec les moyens
d’application :
- Incite à se référer aux normes et orientations internationales auxquelles l’Etat – partie
a contribué et/ ou adhéré, tel est le cas du Maroc ;
-
Incite à l’identification des obstacles et à mettre en œuvre des stratégies afin de les
vaincre, en tirant vers le haut, y compris en instituant les mesures de discrimination
positive ;
-
Incite à mettre en place des mécanismes institutionnels capables d’impulser,
concevoir, mettre en œuvre, faire le suivi et évaluer les stratégies et programmes en
faveur de l’égalité ;
-
Incite à la création de synergies et faire des ONG un partenaire actif, qui joue son
propre rôle, mais dont les actions convergent vers des objectifs communs ;
-
donne une cohérence, et par conséquent, un sens à l’ensemble des actions sectorielles
en capitalisant et mutualisant les effets et impacts tant au niveau du changement social
que culturel.
Cette politique, possible dans le Maroc d’aujourd’hui qui a opté pour un projet de société
démocratique et moderniste, est indispensable afin de donner l'élan nécessaire à la
promotion des droits humains des femmes et à l’évolution rapide des mentalités.
Recommandations
Pour ce faire elle devrait s’articuler autour des axes suivants:
- Inscrire l’égalité hommes – femmes en tant que priorité gouvernementale et
mettre en place les mécanismes adéquats (voir partie mécanismes) ;
-
Constitutionaliser la primauté du droit international, tel recommandé par le
rapport de l’Instance Equité et Réconciliation (IER, 2006) ;
-
Constitutionnaliser l’égalité telle que définie par la convention CEDAW, et la
traduire dans l’ensemble des lois ;
-
Lever toutes les réserves sur la convention CEDAW et ratifier son protocole
optionnel dans le cadre d’une dynamique de parachèvement des réformes
législatives, et tout particulièrement le code de la famille ;
-
Parachever la réforme des lois pour abolir toutes les discriminations sexistes et
réduire les écarts entre l'égalité de droit et l'égalité de fait ;
-
Promulguer des mesures provisoires spéciales destinées à réaliser l‘équité de
genre et à réduire les écarts entre les hommes et les femmes dans tous les
domaines et plus particulièrement en matière de participation politique et de prise
de la décision publique ;
-
Mettre en œuvre les actions visant la promotion de la culture de l’égalité à travers
les vecteurs de formation, éducation et sensibilisation contenus dans le Plan
d’action national pour la promotion de la culture des droits de l’homme ;3
-
Mener ces réformes en les accompagnant d’un large débat et d’actions de
sensibilisation et de conscientisation du large public.
Partie II : Participation politique et nationalité
La sous représentativité des femmes aux mandats électifs et aux postes de décision caractérise
encore le Maroc.
Contrairement aux attentes du mouvement des femmes, les élections de 2007 n’ont pas connu
d’améliorations par rapport à 2002. La liste nationale qui réserve près de 10% des sièges aux
femmes, et qui, en elle-même, n’est pas porteuse d’impact significatif, n’a pas été
institutionnalisée et la présence des femmes sur les listes régionales permis d’élire que 4
femmes. La non institutionnalisation des mesures temporaires explique également l’absence
quasi-totale des femmes des conseils locaux (0.6 %) et aux postes de responsabilité dans
différents secteurs même si le gouvernement qui vient d’être nommé (octobre 2007) compte 7
femmes sur 34.
3
Plan réalisé à l’initiative du Conseil consultatif des droits de l’homme, dans le cadre d’un partenariat entre des
départements gouvernementaux, des instituions nationales et des associations (présenté publiquement février 2007).
Recommandations
100. La promotion des femmes aux postes de décision devrait s’inscrire dans le cadre d’une
vision intégrée de l’égalité hommes-femmes, d’une stratégie de mise en œuvre des
engagements du Maroc et de la volonté politique affichée par la définition d’objectifs et de
résultats à atteindre en perspective des 30% de sièges prévus pour 2015.
A cet effet, il faudrait :
- introduire dans la constitution, à la faveur de sa révision prochaine, une disposition
qui reconnaît au législateur le droit de recourir à des mesures temporaires de nature à
favoriser la concrétisation de l’égalité entre les femmes et les hommes,
- consolider le mode de scrutin à la proportionnelle et le revoir à la lumière de la
représentation des femmes,
- institutionnaliser des quotas de manière progressive en perspective de la parité qui
concernent les mandats électifs et postes électoraux ainsi que les postes exécutifs et
administratifs,
- introduire des mesures d’incitation/sanction financières pour garantir l’éligibilité des
femmes, et non seulement leur « candidabilité » ainsi que des dispositions de non
recevabilité des listes de candidature sans femmes
Les prochaines élections locales (2009) devraient constituer l’occasion pour la mise en
application d’actions affirmatives institutionnalisées et réellement significatives
Nationalité
La législation sur la nationalité vient d’être amendée en reconnaissant aux femmes
marocaines le droit de transmettre automatiquement leur nationalité à leurs enfants avec effet
rétroactif. Toutefois, le code de la nationalité révisé a maintenu la discrimination entre les
deux sexes dans la mesure où l’épouse étrangère du marocain peut acquérir la nationalité par
le mariage alors que ce droit n’est pas reconnu à l’époux étranger de la marocaine. Ce même
code introduit une nouvelle discrimination qui n’existait pas dans l’ancienne législation, en
stipulant que la femme marocaine perd sa nationalité si, épousant un étranger, elle acquiert,
la nationalité du mari et si elle a été autorisée par décret préalablement à la conclusion du
mariage, à renoncer à la nationalité marocaine ».
Recommandations
Supprimer toutes les dispositions discriminatoires par :
- la reconnaissance du droit des femmes de transmettre leur nationalité à leurs époux
étrangers sur un pied d’égalité et dans les mêmes conditions exigées pour les hommes
marocains ;
- le droit, sur un pied d’égalité, des hommes et des femmes de demander d’être déchus de
leur nationalité en cas d’acquisition, en vertu de leur mariage, de la nationalité de leur
conjoint et qui sont contraints, par la force d’un décret, d’abandonner la nationalité
marocaine avant l’établissement de l’acte de mariage ;
- la ratification de la Convention sur la nationalité de la femme mariée (1957).
Partie 3 : Les droits économiques, sociaux et culturels
Les droits économiques, sociaux et culturels enregistrent des déficits dont certains sont
alarmants.
Education
Les engagements chiffrés de l’Etat concernant la réduction de l’analphabétisme (10 ans et
plus), la généralisation du préscolaire (4-6 ans) et de l’enseignement de base n’ont pas été
honorés, l’indice de parité dans ces domaines ne s’est pas amélioré de façon significative, à
part l’enseignement primaire en milieu urbain. La discrimination est visible également à
travers le système d’orientation et la persistance de stéréotypes sexistes dans les contenus
scolaires, surtout dans certaines disciplines tel l’arabe et l’éducation islamique.
Recommandations
-
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-
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Mettre en œuvre la loi sur « l’obligation de la scolarisation » à travers une stratégie gendérisée
d’application à court terme, tenant en compte, de façon transversale, les déficits en matière
d’accès, de rétention et de réussite des filles conformément aux engagements du pays.
Faire référence, de façon explicite, aux articles 1, 5, et 10 de la CEDAW4 et les articles 2, 28 et
29 de la Convention des Droits de l’Enfant (CDE) dans tout document de cadrage du système
éducatif y compris les termes de référence pour les révisions des curricula, la confection des
manuels scolaires ainsi que la production de littérature pour enfants et adolescents.
Mettre fin à la «schizophrénie» des contenus éducatifs qui vis-à-vis des mêmes élèves
véhiculent des valeurs et des contre valeurs en terme d’égalité hommes/femmes. Dans ce cadre,
institutionnaliser l’éducation à l’égalité en tant que « droit de la personne » et entant
qu’indicateur de la qualité de l’enseignement et ce à travers l’ensemble des disciplines et
activités pédagogiques.
Analyser les résultats médiocres des politiques d’alphabétisation et éducation informelle et tirer
les leçons pour rattraper d’urgence, par des mesures structurelles et affirmatives le retard
accusé, en parfaite coordination avec l’amélioration des indicateurs quantitatifs et qualitatifs du
système éducatif.
Emploi
Concernant la protection du droit des femmes au travail les avancées dues notamment à la
reforme du code du travail (principe de non discrimination …) et du code pénal (incrimination
du harcèlement sexuel …) sont doublement limitées, d’une part par la subsistance de lacunes
dans les deux textes et par des déficits en matière de mise en œuvre. Si la structure de
l’emploi féminin a enregistré une amélioration du statut professionnel des femmes, plusieurs
indicateurs révèlent la précarité de ce statut tel l’analphabétisme, la part de l’activité non
rémunérée, les bas salaires notamment dans l’industrie. Dans la fonction publique les femmes
continuent à occuper généralement les postes les moins bien rémunérés. Par ailleurs le travail
des enfants et des fillettes reste une réalité et le projet de loi relatif au travail domestique tarde
à être rendu public.
Recommandations
Mesures de discrimination positive
- Mettre en œuvre des mesures de discrimination positive afin de réduire les disparités vécues par
les femmes en terme d'accès aux postes de responsabilité dans la fonction publique.
- Assurer la parité H/F dans l’ensemble des organes représentatifs: comités d’entreprise, délégués
élus, comité de sécurité et d’hygiène.
- Mettre en place des points focaux genre au sein du ministère de l’Emploi (Direction du travail)
et au sein des dispositifs de conciliation (destinés à prévenir et à gérer les conflits individuels et
collectifs).
- Favoriser le recrutement des femmes aux postes d’inspecteurs du travail, en vue d’une parité
effective.
- Conformité du cadre normatif des entreprises avec la législation du travail
- Assurer la conformité du cadre normatif des entreprises (règlements intérieurs, procédures,
code de conduite, etc.) avec les dispositions du Code du travail, notamment celles relatives à la
non-discrimination et aux mesures spécifiques de protection du travail des femmes et des
enfants.
- Conférer une place particulière aux innovations du code du travail relatives à l’égalité ainsi
qu’à la protection des femmes et des enfants : travail de nuit, durée de travail et heures
supplémentaires, conditions d’hygiène et de sécurité, situation de la femme enceinte, etc.
- Lutter contre le travail des enfants de moins de quinze ans dans les entreprises soumises au
code du travail.
Programmes et politiques de promotion de l’emploi
- Mettre en place des stratégies d'insertion en faveur des femmes les plus exposées au chômage et
concevoir des programmes de lutte contre le chômage selon une perspective genre tant au
niveau de la conception, de la mise en place des nouvelles formules d'insertion (emploi
formation-jeune, crédit jeune-promoteur) que de formation-insertion (formation alternée,
formation par apprentissage).
- Réglementer le travail domestique des mineures d’autant plus qu’il donne lieu à l’emploi des
jeunes filles à un âge précoce et réunir les conditions d’applicabilité et de la mise en œuvre de
ce projet de loi.
- Faire de l’éducation pour tous, le moyen le plus efficace pour l’élimination du travail des jeunes
filles domestiques
- Mettre en place une stratégie de promotion de l’entreprenariat féminin y compris la micro et
petite entreprise.
- Réduire les situations de disparités, d'exploitation et de précarité, vécues par les femmes dans le
cadre du travail (salariat, travail indépendant ou à domicile, aides familiales).
Formation et sensibilisation
- Intégrer des modules spécifiques «genre dans le travail » dans le cursus de formation dispensé
par l’Institut du travail, notamment en faveur des contrôleurs et inspecteurs du travail.
- Mettre en place des activités de sensibilisation et d’information pour l’instauration de la parité
hommes/femmes (et, le cas échéant, d’une participation proportionnelle aux effectifs en
présence) dans les comités d’entreprises du secteur industriel;
- Harmoniser les moyens d’encadrement assurant la formation aux jeunes filles et réfléchir à une
meilleure adéquation des formations destinées aux femmes en fonction de la demande au
niveau du marché de l’emploi et permettant une meilleure insertion professionnelle.
- Diversifier et décentraliser les filières de formation afin d’en faire bénéficier les jeunes rurales
qui restent faiblement insérées dans la formation professionnelle.
- Assurer la connaissance et l’assimilation des nouvelles dispositions du Code du travail relatives
à l’égalité des chances et à la non-discrimination par l’ensemble des acteurs sociaux (inspection
du travail, représentants des travailleurs (es), des entreprise et autres décideurs.
Santé reproductive
De nombreux indicateurs relatifs à la santé reproductive attestent des carences que connaît ce
domaine. La mortalité maternelle est alarmante, le taux de prévalence des contraceptifs a peu
évolué. L’avortement autre que thérapeutique est incriminé par le code pénal ce qui donne
lieu la pratique clandestine dangereuse pour la vie des femmes. L’épidémie du SIDA
progresse chez la femme. Le cancer du sein et du col de l’utérus représente actuellement un
véritable fléau alors que la majorité des femmes des classes démunies ne bénéficie d’aucune
couverture sociale ni d’assurance maladie.
. Recommandations
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-
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Généraliser la couverture sociale obligatoire et garantir la gratuité des soins pour les
femmes issues des milieux défavorisés et enclavés.
Assurer une meilleure répartition des structures, unités et des effectifs du personnel
médical pour mieux répondre aux besoins des populations les plus défavorisées et
enclavées ;
Généraliser les maisons d’accouchements, d’instaurer un système de consultations
prénatales et de visites postnatales à domicile ;
Elargir et cibler les campagnes de sensibilisations afin d’impliquer les hommes dans
le recours et le choix des méthodes contraceptives ;
Autoriser l’avortement pour les femmes qui le souhaitent et surtout, celles qui sont
célibataires, les femmes victimes de viols, les femmes victimes d’inceste et dans les
cas de viol d’handicapées mentales ;
Elaborer une stratégie spécifique en matière de protection des femmes des
IST/SIDA et renforcer la composante prévention par l’instauration d’une approche
multisectorielle basée sur un message clair et franc sur les dangers des IST et
l’intégration des modules de santé reproductive et des IST/SIDA dans les
programmes de formation professionnelle et dans les programmes d’alphabétisation ;
Mettre en place une stratégie de dépistage précoce systématique du cancer du sein et
généraliser la sensibilisation à la nécessité de la vaccination anti-papillomavirus
Humain pour les adolescentes en vue de prévenir le cancer du col utérin.
Partie IV : Capacité juridique et égalité dans la famille
Malgré les réformes engagées pour harmoniser la législation interne avec les dispositions de
la CEDAW, des incompatibilités et des insuffisances subsistent. Les principaux textes
amendés, grâce à une grande mobilisation du mouvement des femmes n’ont pas mis fin aux
discriminations à l’égard des femmes. Il s’agit des codes suivants:
Le code du travail dont les dispositions ne protègent pas certaines catégories de
travailleuses, notamment les employées de maison dont un grand nombre est constitué de
petites filles, et dont l’application ne couvre pas l’égalité dans les salaires la protection des
salariées contre le licenciement abusif, le harcèlement sexuel et la garantie des droits de
maternité.
- Le code pénal qui demeure marqué par une vision non égalitaire basée sur deux principales
notions : l’honneur masculin et le contrôle de la sexualité féminine. les dispositions pénales
sur le viol qui sont profondément discriminatoires et introduisent une hiérarchie entre femmes
mariées et non mariées, vierges et non vierges. Par ailleurs le maintien des poursuites pénales
en cas d’adultère et de relations sexuelles hors mariage, et l’interdiction de l’IVG (et sa
cherté) incite les femmes enceintes à l’abandon de leurs enfants ou même à des infanticides
ou à exposer leur vie à des dangers mortels.
- Le code de la famille qui maintient la polygamie, la discrimination en matière d’héritage et
de tutelle légale sur les enfants ainsi que la dissolution des liens du mariage. Quant à
l’application des déficits sont visibles dans plusieurs domaines tel l’autorisation du mariage
des filles mineures, de la polygamie, du divorce pour discorde et de la reconnaissance de la
paternité.
Recommandations
Constitutionnaliser le principe d’égalité entre l’homme et la femme et disposer d’une façon
explicite, au niveau de la constitution de la primauté des lois internationales sur les lois
nationales.
Code Pénal
- Réviser les dispositions discriminatoires du code pénal notamment celle se
rapportant à la sanction du viol (sans ou avec défloration) ; à la cessation des
poursuites pénales à l'encontre du violeur quand le violeur épouse sa victime
mineure et nubile, à l’incrimination du viol conjugal, à la soustraction de la femme
mariée de l’autorité sous laquelle elle était placée (art. 494 du code pénal) ; à la
sanction des relation sexuelles entre adultes consentants;
- Autoriser l’avortement pour les femmes qui le souhaitent et surtout, celles qui sont
célibataires, les femmes victimes de viols, celles qui ont été victimes d’inceste et,
enfin, dans les cas de viol d’handicapées mentales
- Promulguer une loi-cadre pour lutter contre la violence à l'égard des femmes.
Code de la famille
- Engager des mesures concrètes et efficaces pour une application rigoureuse du code
de la famille et réduire le pouvoir d’appréciation des juges relatif à plusieurs articles
du code tels que : les droits dus aux enfants, les droits dus à la femme divorcée,
l’autorisation de la polygamie, modalités de gestion des biens acquis durant le
mariage, divorce pour discorde, expulsion du domicile conjugal ;
-
Réviser l’actuel code afin de disposer de : l’interdiction de la polygamie et du
mariage des mineures, de l’égalité en entre pères et mères en matière de tutelle légale
sur leurs enfants; de l’égalité hommes/femmes en matière d’héritage ;
-
Supprimer le délai de cinq ans en matière d’établissement de la paternité pour que les
mères célibataires puissent recourir à la justice et donner à leur enfant le droit à une
identité et permettre à celles qui sont dans l’impossibilité d’apporter la preuve d’une
promesse de mariage de recourir à la procédure de reconnaissance de la paternité ;
-
Mettre en œuvre le fonds de solidarité familiale et doter les tribunaux de la famille
des moyens matériels et humains adéquats et assurer des formations aux ressources
humaines (juges, greffiers, administratifs, auxiliaires...) pour les qualifier et les
imprégner de l’esprit et de la philosophie du code de la famille et des conventions
internationales des droits humains.
Partie V :
Les violences à l’égard des femmes
L’absence de statistiques nationales et globales ne permet pas d’évaluer l’ampleur de la
prostitution ni celle des violences basées sur le genre. Toutefois, ces deux phénomènes sont
très développés au Maroc. La question de la violence a été soulevée d’abord par le
mouvement pour la promotion des droits des femmes qui a joué un rôle important dans la
levée des tabous relatifs, plus particulièrement, à certaines formes de violences (sexuelle,
familiale et conjugale).
La prostitution est liée à plusieurs facteurs (pauvreté, divorce, viol, etc.) qui contribuent à
fragiliser socialement et économiquement les jeunes femmes. Cette vulnérabilité contribue à
favoriser le recrutement de ces femmes par les réseaux de trafic et de prostitution forcée au
Maroc (surtout dans les villes touristiques) et à l’étranger (plus particulièrement, les pays du
Moyen orient, du golfe et certains pays européens).5 Selon plusieurs rapports, le Maroc est
devenu un pays de transit et de destination pour les femmes victimes de la traite à partir de
l'Afrique subsaharienne, l’Afrique du Nord et l’Asie.
Le Maroc n'a pas ratifié le Protocole sur la Traite des Personnes (2000). D’un autre côté, le
code pénal marocain ne sanctionne pas la prostitution en tant que telle mais les activités qui
accompagnent le proxénétisme. Par ailleurs, si le code pénal marocain interdit le travail forcé,
la prostitution forcée et la prostitution des mineurs, toutefois, aucune législation ne sanctionne
le trafic et la traite des êtres humains. Au lieu de s’attaquer aux réseaux de trafic, les
pouvoirs publics procèdent à limiter la liberté de mouvement et de déplacement des femmes
voyageant sans leurs époux vers plusieurs pays arabes, notamment les pays du golfe.
A l’opposé, durant les dernières années, plusieurs mesures destinées à lutter contre les
violences ont été mises en place par certains départements ministériels en partenariat avec des
ONG des droits des femmes et le système des Nations Unies au Maroc. C’est une prise de
conscience qui devrait être mise à l’actif des ONG de femmes qui ont contribué à donner une
visibilité sociale et politique à cette question et à favoriser les prémices de données chiffrées
sur les violences qui relevaient, dans un passé récent, du chiffre noir.
Malgré ces avancées, les femmes marocaines continuent à faire face aux violences basées sur
le genre. La perception des violences conjugales en tant que question essentiellement
domestique a contribué, dans une large mesure, à de sérieuses lacunes tant au niveau de sa
connaissance qu’au niveau de la définition de politiques et de programmes appropriés.
En effet, les données du réseau ««Anaruz»6 sur une période de 2 ans ont permis de montrer
que dans 9 cas de violences sur 10, les agresseurs sont des hommes avec lesquels les victimes
entretiennent des relations intimes (les maris dans 8 cas sur 10). Les violences conjugales
s’expliquent par trois facteurs qui sont interdépendants : le statut juridique et social des
femmes, l’acceptation sociale des violences conjugales (perçues comme une fatalité qui pèse
sur les femmes mariées) et, enfin, l’impunité des agresseurs. Tout se passe comme si la
reconnaissance des violences, surtout domestiques et familiales, enfreignait deux tabous que
la société n’est pas prête à lever: l’image idéalisée du mariage et de la famille et les rapports
5
Victims of Trafficking and Violence Protection Act of 2000: Trafficking in Persons: Report 2007, Maroc
(Niveau 1)
6
Le réseau « Anaruz» est une coalition qui regroupe 39 Centres d’Ecoute Psychologique et d’Assistance
Juridique aux femmes victimes de violences au Maroc.
de domination entre les sexes que questionnent, en dernière analyse, les violences à l’égard
des femmes.
Recommandations
La consolidation des acquis/ dépassement des limites exigent de donner la priorité à :
élaboration d’une vision commune globale, opérationnelle, cohérente, concertée ainsi
que l’opérationnalisation réelle et coordonnée des stratégies des différents départements
ministériels avec l’implication de l’ensemble des acteurs concernés;
révision de la législation pénale pour répondre à trois impératifs, à savoir: i)
l’investigation des violences perpétrées; ii) la sanction de ces violences afin de mettre fin à
l’impunité dans ce domaine et, enfin, iii) la réparation des préjudices subis par les victimes.
- renforcement de la prise en charge des femmes victimes violences par le biais de: la mise
en place des chaînes des services institutionnalisée (sorte de Samu social) dans chaque ville
dotées de ressources humaines et matérielles adéquates ; la création de cellules d’accueil et
d’orientation des victimes au sein des tribunaux de famille et de première instance; des
commissariats de police, de gendarmerie et des hôpitaux et amélioration l’accueil des
victimes par les institutions chargées de leur apporter sécurité et protection ; le soutien des
ONG par l’affectation de ressources financières conséquentes et de ressources humaines
qualifiées.
- renforcement de la prise de conscience de l’opinion publique des questions des violences
basées sur le genre par, notamment, l’intégration de cette thématique dans les cursus de
formation des juges, des médecins, infirmiers et policiers et dans les manuels scolaires; la
diversification des canaux et supports (en plus de la presse écrite et des spots télévisés) de
sensibilisation aux violences à l’encontre des femmes.

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