Crise en Andhra Pradesh (Inde).

Transcription

Crise en Andhra Pradesh (Inde).
Des dettes jusqu'à ne plus en vivre
BIM n° - 11 avril 2006
Marc ROESCH
C’est l’histoire d’un banquier qui va voir un paysan pour lui proposer d’ouvrir un compte et
y déposer tout son argent. Il lui explique comment, à partir de ce compte, effectuer ses
paiements avec des chèques. Le paysan accepte et, trouvant ce mode de paiement très pratique, décide de payer tous ses achats ainsi. Il en profite pour repeindre sa maison, changer
son tracteur… Au bout du deuxième mois, il se retrouve à découvert. Le banquier vient le
voir et lui explique qu’il manque de l’argent sur le compte. « Combien manque-t-il » demande le paysan ? « 5.000 € ? Pas de problème, je vous fais un chèque ».
Il nous est arrivé le même type d’histoire il y a deux semaines avec un emprunteur dans une
IMF du Sud de l’Inde. Il s’agissait d’un petit employé des chemins de fer qui, parce qu’il a
marié 3 de ses sœurs, s’est retrouvé endetté à ne plus pouvoir payer les intérêts de sa dette.
Il était endetté auprès de 2 moneylender (= usurier, encore que le terme français a une
connotation péjorative que n’a pas le terme de moneylender) et trois de ses collègues des
chemins de fer, tous lui réclamant des intérêts de l’ordre de 5 % par mois (60 % par an). Il
était également endetté auprès de l’IMF, à 1 % par mois. Nous discutions avec lui de la façon de racheter ses dettes, de les restructurer sous forme d’une seule auprès de l’IMF, et de
ré-échelonner celle-ci pour la rendre compatible avec ses revenus. En raison de ses charges
de famille, il ne pouvait consacrer que le tiers de ses revenus à l’apurement de sa dette. Ceci
correspondait à un tout petit peu plus que les intérêts de sa dette retransformée entièrement
en « microfinance ». Il était à 3 ans de la retraite (qui verrait ses revenus fondrent). Nous lui
demandions quelle solution il voyait pour commencer à rembourser le capital. Après une
minute de réflexion, il nous a proposé : « Faire un emprunt ? ».
Je vous rapporte cette histoire pour illustrer quatre points :
> La façon de survivre pour une frange de la population est la fuite en avant dans
l’endettement. La microfinance, au mieux, permet de ralentir cette fuite en avant, mais
n’est pas l’outil qui permet d’inverser la tendance
> Les outils dont disposent les IMF et les pressions de rentabilité auxquelles elles sont soumises ne leur permettent pas de traiter ces cas, sans parler des exigences fixées par les
bailleurs (ici en l’occurrence le gouvernement indien) en termes de nombre d’emprunteurs
et de volume de crédits déboursés. D’autres idées, d’autres services, d’autres modes
d’organisation sont nécessaires
> Dans le contexte indien, le recours systématique à la caution solidaire pour sélectionner les
emprunteurs a également un effet pervers puisqu’elle incite les IMF à ne pas se sentir du
1
tout concernées par la sélection des emprunteurs. Le choix est fait par le groupe et celui-ci
ne fait pas de contrôle du niveau d’endettement
> Les IMF, si elles participent malgré elles à l’« étranglement pas la dette » d’une frange de
la population, sont les moins armées pour faire face à une crise (crise des impayés, crise
médiatique, menaces d’effondrement du système) par rapport aux autres prêteurs. Mais
quand « crise » il y a, ce sont elles qui se retrouvent en première ligne. Ceci sera le sujet
du prochain BIM.
La fuite en avant
Les statistiques du ministère de l’Agriculture fournissent des données sur l’endettement des
agriculteurs pour l’ensemble de l’Inde. Deux des Etats du Sud dans lesquels nous travaillons
affichent des taux record. 82 % d’exploitants endettés pour l’Andra Pradesh et 74,5 % en Tamil Nadu pour un endettement moyen de 48,6 % sur l’ensemble de l’Inde (1).
Ces chiffres sont à rapprocher d’une étude menée par une ONG de microfinance auprès de
1 187 femmes des groupements microfinance (Self Help Group) en zone rurale à l’Est de Madras et que nous avons dépouillées. Il s’agit d’une population d’ouvriers agricoles et de très
petits agriculteurs de basse caste considérés comme très pauvres (moins de 1 $/jour). 95 % de
ces 1 187 femmes sont endettées.
Cette population, si elle est exclue du système bancaire, n’en a pas moins accès à de nombreuses sources de crédit et d’épargne : les « chit fund », l’équivalent des tontines, les prêteurs sur
gages (les bijoux et la vaisselle), les « moneylender », à la fois les petits qui prêtent au jour le
jour, que les « gros » qui prêtent des sommes importantes sur de longues périodes, les employeurs qui sont remboursés sous forme de travail.
L’étude en question porte sur une comparaison de leur endettement entre deux périodes, l’une
avant leur entrée en microfinance (2002), l’autre un an et demi après la mise en place de la
microfinance (2004).
Endettement 2002
95 % des femmes sont endettées pour un endettement moyen de 10 350 Rs. (environ 200 €).
Une autre étude sur cette même population estimait le revenu moyen annuel à 11 500 Rs. La
moyenne ne rend pas compte de la disparité des situations et de l’ampleur de l’endettement.
En fait environ 1/3 de ces femmes sont endettées pour moins de 5 000 Rs, un autre tiers entre
5 000 et 10 000 Rs. Le dernier tiers, celui qui tire la moyenne vers le haut, est endetté à plus
10 000 Rs avec une trentaine de familles entre 40 000 et 110 000 Rs (800 à 2 200 €). Nous
considérons que ce dernier tiers représente réellement la frange en surendettement. Lorsque
l’on demande les raisons (déclarées) de cet endettement on retrouve les éléments classiques à
savoir la santé (19 %), les cérémonies, essentiellement le mariage (17 %) et l’habitat (14 %)
puis viennent les dépenses de consommation. Les emprunts « générateur de revenus » ne
représentent que 20 % sur le total (agriculture/élevage 15 % et divers 5 %). 80 % des emprunts
ne génèrent directement aucun revenu. 60 % des femmes sont endettées d’un montant
1
State of India’s Farmers, 2006, Economic and Political Weekly February 11, 2006
2
supérieur à la moitié leurs revenus annuels, montant qu’elles sont bien évidemment incapables
de rembourser à court ou moyen terme.
Les intérêts de la dette
Ces emprunts sont faits à des taux d’intérêt qui varient, en moyenne, entre 4 et 6 % par mois.
Ce qui veut dire que les intérêts de la dette varient entre 250 et 500 Rs par mois (3 000 à 6 000
Rs par an) pour un tiers de ces personnes, plus de 500 Rs pour un autre tiers. Ces montants
représentent au mieux ¼ à la moitié du revenu moyen mensuel, mais pour un tiers de la population c’est l’équivalent d’un mois de salaire d’un ouvrier agricole employé à plein temps.
Cela signifie que pour ce tiers la totalité du salaire d’un des membres de la famille sert à payer
uniquement les intérêts de la dette. Cela veut aussi dire que pour une bonne partie de cette
population il est impossible d’envisager de commencer à payer la partie capital. D’autant plus
que les « prêteurs sur gage » et les moneylender refusent un remboursement fractionné. Ceci
oblige, pour apurer une dette petit à petit, d’emprunter par ailleurs le complément de l’argent
qui éventuellement aura pu être consacré à un début de remboursement. C’est souvent à ce
stade que les crédits microfinance ont un avantage. Mais pour les plus endettés, le paiement
des intérêts passe par de nouveaux emprunts ou par la décapitalisation. La multiplicité des
sources d’emprunts donne lieu en quelque sorte à un « jeu » qui consiste à prendre un nouveau
prêt dont une partie sert à rembourser le prêt précédent (ou simplement les intérêts) et l’autre
servira à la consommation.
L’impact de la microfinance
La microfinance est vécue comme une nouvelle source d’emprunt possible. Les Self Help
Group (SHG) se sont développés non pas à cause des possibilités d’épargne, de formation, des
possibilités de développement d’activités génératrices de revenus mais pour trois raisons :
> C’est une nouvelle source d’emprunt
> Les taux d’intérêt sont plus faibles
> La participation aux programmes de microfinance facilite l’accès à d’autres sources
d’emprunt (banques ou opérations « projet »)
Même des produits d’épargne innovants, combinant proximité et flexibilité (boîtes à domicile,
comptes d’épargne volontaires), donnent peu de résultats : dans le contexte présenté ici,
l’épargne monétaire est systématiquement considérée comme une condition nécessaire, une
obligation, pour accéder au crédit (ce qui montre que les « pauvres » ne sont pas toujours intéressés par l’épargne).
Partout où les ONG ont crée des SHG, dans l’année qui a suivi, de nouveaux groupes se sont
formés et ont demandé à être affilié à l’ONG présente. Dans les zones où se trouvaient deux
ONG, les groupes essayaient de quitter une ONG pour aller vers celle qui offrait un meilleur
accès aux crédits bancaires ou de projet. Dans le milieu ONG ce problème de « vol de
groupe » a donné lieu à des inimitiés, voire des conflits.
L’enquête susmentionnée a mis en évidence que, après un peu plus d’un an de crédit microfinance, en moyenne :
> Environ 1/3 des femmes sont restées au même niveau d’endettement
> 1/3 ont réussi à faire baisser ce niveau
> Pour 1/3 le niveau d’endettement s’est accru
3
La réduction de l’endettement
Si l’on analyse ces variations par niveau d’endettement on se rend compte que la réduction du
niveau d’endettement a été essentiellement le cas des tranches les plus élevées. Environ 2/3
des femmes endettées de plus de 20 000 Rs (400 €) ont réussi à réduire leur endettement d’un
tiers à une moitié. Nous n’avons aucune indication sur la façon dont cette réduction a été menée (accès à d’autres revenus ou plus probablement décapitalisation). Même si cette réduction
est importante l’endettement reste encore très élevé (sur 73 femmes endettées à plus de
20 000 Rs, 36 restent avec une dette supérieure à 10 000 RS, et 54 avec une dette supérieure à
5 000 Rs).
La substitution des prêts
On pourrait imaginer que les crédits microfinance se substituent aux autres crédits, permettant
d’alléger la charge des intérêts. Il semblerait que ce ne soit pas le cas : pour les personnes qui
sont restées au même niveau d’endettement ou à un niveau très proche, très peu ont pris des
crédits microfinance pour remplacer des crédits moneylender (21 crédits pour 349 femmes qui
sont restées au même niveau d’endettement, 26 sur 196 pour ceux qui ont « échangés » plus de
500 Rs de crédit et ont un différentiel à + ou – 1 000 Rs de crédit entre 2004 et 2004). Il semblerait que cette frange de population a été prudente et ne s’est que peu engagée dans de nouveaux crédits de groupes soit parce qu’elle n’y a pas eu accès, soit qu’elle n’a pas pu faire la
substitution « crédit moneylender, crédit microfinance » pour des raisons de montant inadéquat, des raisons sociales. Ce point reste un mystère.
L’accroissement de l’endettement
Comme dit plus haut 1/3 des personnes ont vu leurs dettes s’accroître entre 2002 et 2004. Pour
64 % d’entre elles cet accroissement est uniquement dû à un crédit microfinance (249 sur 398
soit 21 % du total des clients microfinance). Pour 26 % l’accroissement des dettes est dû à la
combinaison de la microfinance et d’un autre crédit. Donc dans 90 % des cas la microfinance
a participé à l’accroissement des dettes du 1/3 des enquêtés. Mais point positif, pour 24
d’entre eux (7 %) si l’endettement global a augmenté, il a permis de diminuer la part moneylender dans l’endettement total.
Quelle augmentation des revenus ?
Ce n’est pas l’endettement en valeur absolu qui pose problème, mais le déséquilibre entre revenus et endettement. La microfinance a-t-elle permis aux familles évoquées ici d’augmenter
leurs revenus, auquel cas un accroissement de leur endettement ne serait pas nécessairement
une mauvaise nouvelle. Nous ne disposons pas de données quantitatives, mais nos observations montrent, hélas, que le développement de nouvelles activités est resté très limité, pour
diverses raisons qu’il serait trop long de mentionner ici. Il est donc probable que le niveau des
revenus est resté sensiblement le même : l’accroissement de l’endettement est donc bel et bien
un problème, et le montant des intérêts à payer n’a fait qu’amplifier la nécessité d’emprunter
pour équilibrer les budgets.
4
Mais que peut la microfinance ?
Cette étude porte sur une population particulièrement pauvre, mais qui représente quand
même 26 % de la population. Comme précisé en début de texte, leurs ressources n’arrivent pas
à couvrir les besoins et la course à l’argent est permanente. Les activités agricoles sont très
irrégulières, peu rémunérées (environ 20 à 30 Rs =1/2 €) pour 5 à 8 h de travail pour les femmes, le double pour les hommes.
L’étude met en évidence :
> Que les réductions d’endettement sont rares et à quel prix (décapitalisation ?)
> Qu’une frange de la population ne fait que s’enferrer dans l’endettement, remboursant un
prêt par un autre prêt
> Que la microfinance ne fait que modifier modestement l’organisation des prêts sans pour
autant les réduire
> Au contraire pour une partie de la population c’est un moyen d’accroître l’endettement, à
un coût moindre peut-être, mais bien de s’endetter d’avantage. D’autres études plus fines
nous ont permis de mettre en évidence que le niveau des prêts microfinance ne permet pas
de racheter les dettes importantes
Face à cette situation les ONG mettent en place des formations pour apprendre à mieux gérer
son budget, à réduire ses dépenses. Mais ces formations ont lieu une fois tous les ans ou tous
les deux ans. A l’opposé les familles regardent la télévision, celle-ci pousse à la consommation à raison des 5 mn de publicité tous les quart d’heure ; Les principales raisons
d’endettement concernent des éléments fondamentaux de la vie (santé, cérémonies que la
pression sociale n’autorise pas de traiter au rabais, l’habitat) mais aussi la consommation
« attisée » par la télévision.
Le combat est inégal, les populations n’ont que le choix entre d’un côté la multiplication des
opportunités d’endettement, une impossibilité de vivre sans avoir recours à la dette, et de
l’autre une vie « au rabais ». La tentation de rembourser une dette par un nouvel emprunt est
trop forte, elle devient un « mode de vie ». Du coté des prêteurs le cloisonnement entre moneylender, banque et microfinance permet ce mode de fonctionnement un temps… Un an,
deux ans, dix ans (c’était le cas de notre employé des chemins de fer). …plus les possibilités
d’emprunt sont nombreuses, plus le système peut durer… jusqu’au jour où…
Les rythmes de travail des agents des IMF (entre 20 à 80 groupes à gérer suivant les ONG), le
système d’information, la discrétion des gens vis-à-vis de leurs dettes, considérées comme une
honte (les chiffres donnés ici sont peut-être sous-évalués), ne permettent pas d’identifier ces
populations à risque avant qu’il ne soit trop tard. Et quand il est trop tard quels sont les outils
disponibles ? Restructurer les dettes suppose une analyse fine, cas par cas. Comment l’ONG
qui a mené cette enquête peut traiter les 300 ou 400 cas ainsi repérés sachant qu’elle a 11
agents de terrain et 115 groupes à gérer ?
Pour l’instant, quand un impayé apparaît, il est plus facile d’accorder un nouveau prêt pour
couvrir l’impayé que de tenter de sortir du problème. Cela permet de rester au-dessus des
95 % de remboursement, de rassurer le bailleur. Culturellement les personnes mettent un point
d’honneur à rembourser leurs dettes. Les ONG savent cela et comptent sur cet élément pour
retrouver d’une manière l’équilibre des comptes.
5
Mais quand apparaît une crise, quand les possibilités de nouvel emprunt sont épuisées, quand
les intérêts de la dette ne peuvent plus être payés, les moneylender et les prêteurs sur gages
savent se faire rembourser. L’ONG est plus impersonnelle, est moins présente dans le village,
c’est elle qui sera la première à ne pas pouvoir retrouver ses fonds. C’est elle qui sera en première ligne quand éclate la crise.
Et la crise a éclaté il y a un mois dans un des Etats où les paysans sont les plus endettés, un
Etat déjà connu pour le nombre de suicides de paysans pour cause de dette, en Andra Pradesh.
Comment les IMF se sont retrouvées en première ligne, comment gèrent-elles la crise ? C’est
ce qui vous sera présenté dans le prochain BIM.
6
La Microfinance serait-elle devenue folle ?
Crise en Andhra Pradesh (Inde)
BIM n° - 25 avril 2006
Cyril FOUILLET
Depuis le début du mois de mars, dans les médias indiens, on entend beaucoup parler de
microfinance. Une fois n’est pas coutume mais les titres ne sont plus flatteurs. Au contraire,
depuis plus d’un mois, nous assistons à un renversement de situation. Accusé de pratiquer
des taux d’intérêt usuriers et d’être à l’origine de 10 suicides, les IMF sont aux abois,
comme l’indique le Times of India dans son édition du 15 mars, elles se « précipitent aux
abris ». Voici quelques exemples des titres que l’on pouvait trouver dans la presse : « Doiton imposer une limite aux taux d’intérêt en microfinance ? », « Les IMF risquent des poursuites », « Enquête officielle demandée à propos du fonctionnement des IMF dans l’Etat »,
« Les victimes de la microfinance déversent leurs larmes », « L’Etat prépare une loi contre
les excès des institutions de microfinance », « Un emprunteur taillade à mort un agent de
crédit », « Les IMF ont récupéré 2 milliards de roupies en coûts de transaction cachés »,
etc.
La sonnette d’alarme a été tirée. Le « train » microfinance n’a pas été stoppé mais les signaux d’alertes sont assez violents et inquiétants pour que les grands noms de la microfinance indienne aient décidé de prendre les choses en main pour ne pas, cette fois, rester
pour de bon au milieu de la voie. Ils craignent un mouvement de refus de paiement.
Dans ce BIM, nous allons tenter de mettre en perspective la situation microfinancière spécifique de cet Etat indien et de lister les évènements récents. Nous verrons tour à tour comment les institutions de microfinance (IMF) ont réagi à cette situation et nous évoquerons
quelques pistes sur les causes profondes de cette crise. Nous ferrons donc le lien avec le
BIM d’il y a deux semaines sur la question du surendettement (Roesch 2006)
La situation du secteur en Andhra Pradesh
Comme Marc Roesch nous l’indiquait dans le BIM de la semaine dernière, l’Andhra Pradesh
est, d’après les statistiques du ministère de l’Agriculture, l’Etat indien où les paysans sont les
plus endettés (82 % contre une moyenne nationale autour de 50 %). C’est également l’Etat qui
se targue de posséder le plus important réseau microfinancier du pays.
1
La variété des modèles qui y ont pris place - Self-Help Groups (SHGs) (1), Grameen, coopératives et individuel - et la croissance de ce mouvement ont offert à l’Andhra Pradesh une place
de choix dans la carte mondiale de la microfinance. Hyderabad, la capitale de cet Etat, est
considérée comme la Mecque de la microfinance en Inde. Ensemble, société civile, institutions financières privées et gouvernement ont promu plus de 28 000 organisations de village et
plus de 1 000 fédérations de SHGs enregistrés sous le Mutually Aided Co-operatives Societies
Act (MACs), un statut faisant suite à long mouvement en faveur d’un nouvel environnement
pour les coopératives en Andhra Pradesh et repris depuis par cinq autres Etats (voir le BIM du
06/12/05 sur la microfinance en Inde, Fouillet 2005). Pour C.S. Reddy, directeur général de la
Mahila Abhivruddhi Society, Andhra Pradesh (APMAS), une association de lobbying pour la
microfinance au niveau étatique, chaque village en Andhra Pradesh possède désormais au
moins un SHG (Somasekhar, 2006).
Selon les données de la Banque nationale pour le développement rural et agricole (Nabard,
2004, 2005), le nombre de SHGs ayant disposé d’un crédit est passé de moins de 6 600 pour
l’année financière 1998-1999, à plus de 107 300 en 2004-2005. Soit un rapport de 1 à 16. Si
l’on compte une moyenne de 17 membres par SHGs, c’est plus de 1 600 000 foyers qui participaient à un SHG ayant reçu un prêt en 2004-2005, soit un peu plus de 10 % des foyers en
Andhra Pradesh. Au niveau national, pour la même année, cet Etat représentait près de 20 %
de l’ensemble des SHGs financés. Même si la prépondérance de cet Etat tend à diminuer (ce
chiffre était de 30 % en 2003-2004), sa place dans le champ de la microfinance indienne reste
très importante tant en termes de volume, qu’en termes de diversités, d’innovations et de réflexions sur les outils financier utilisés. Le montant des prêts octroyés aux SHGs de l’Etat
d’Andhra Pradesh représentait 34 % du volume des crédits microfinance distribués pour
l’ensemble de l’Inde en 2005, soit près de 196 millions d’euros.
Les évènements
Dans le district de Krishna (Andhra Pradesh), 10 personnes, toutes clientes d’IMF du secteur
privées, sont mortes dans les mois passés.
En novembre dernier, un couple s’est suicidé en consommant du cyanure. Kumari avait emprunté 25 000 roupies (480 euros) à une institution pour le business de son mari. Pour compenser les difficultés financières rencontrées par son mari, Kumari prend deux nouveaux prêts
du même montant à deux autres IMF. La situation devient alors rapidement difficile et le remboursement des prêts impossible. La pression des autres membres du groupe s’accentuant, le
couple se suicide. Non loin de là, une femme, Rennu, est morte asphyxiée alors qu’elle se cachait dans un ‘rice drum’ pour fuir la visite de l’agent de crédit venu réclamer les mensualités
du prêt. Il y a quelques semaines, deux femmes d’un SHG sont secourues à temps par un fermier alors qu’elles s’étaient pendues à un arbre.
1
Les SHGs sont des groupes d’épargnants et d’emprunteurs de moins de 20 personnes. La RBI autorise
les transactions financières informelles dans des groupes ne dépassant pas 20 personnes ; au-delà,
l’enregistrement des activités est obligatoire. Ces groupes sont basés sur un fonctionnement informel,
une forme d’Association Rotative d’Epargne et de Crédit (AREC), de chit-fund, chiti, bisi ou tontine,
mais avec un lien bancaire. Souvent mono castes, les SHGs ne peuvent prétendre à des crédits du secteur bancaire qu’après une période d’épargne d’environ 6 mois. Durant cette période, ces groupes doivent faire preuve entres autres de leur capacité à épargner régulièrement.
2
La presse rapporte également plusieurs cas d’agents de crédit conseillant à des clientes
d’octroyer un nouveau prêt quand celles-ci n’arrivent plus à payer. Avec le temps la situation
dégénère et le remboursement devient impossible. Les dérives évoquées vont alors du harcèlement verbal et sexuel à la prostitution en passant par l’enfermement et la confiscation de
biens.
A la suite de nombreuses affaires de ce type dans le district de Krishna, plusieurs organisations de village décident de faire entendre leurs inquiétudes au district collector (l’équivalent
du préfet) afin qu’il entame des poursuites contre les IMF accusées d’être responsables de ces
suicides. Des élus locaux, les MLAs (députés), se retrouvent sous la pression des organisations
de villages et des médias. Les IMF sont montrées du doigt et l’on commence à s’interroger sur
leurs responsabilités. Perni Venkata Ramaiah, le MLA de Machilipatnam (district de Krishna),
juridiction dans laquelle sont mortes sept personnes en quelques mois, pose ainsi le problème :
« La mort de ces sept personnes est un mystère. Est-ce qu’elles ont mis fin à leurs jours
compte tenu de leur incapacité à supporter le harcèlement des firmes de microfinance auxquelles elles avaient souscrit un prêt ? C’est la question. ». Tout en ajoutant un peu plus loin
aux journalistes du Times of India : « Les firmes de microfinance ont progressivement détruit
les SHGs formés sous le programme gouvernemental du DWCRA. Le gouvernement doit
réagir vite. ».
La réaction ne se fait pas attendre et contre toute attente, le 11 mars, l’administration du district de Krishna en Andhra Pradesh, sous la personnalité de son district collector, Navin Mittal, prenait la décision de fermer 50 agences de deux IMF, Share Microfin Limited (SML) et
Spandana. Le recours à des taux d’intérêts trop élevés est la principale raison invoquée.
L’administration accuse également les IMF de recourir à des méthodes musclées pour recouvrir leurs prêts. A ce moment, d’après le Times of India, les poursuites du gouvernement à
l’encontre des IMF ne font que commencer.
Réaction du secteur
Très rapidement, les principaux acteurs du secteur vont s’organiser pour mettre en place des
contre feux face aux images négatives diffusés par les médias, notamment en langue telugu.
La principale réunion s’est tenue à Hyderabad le 20 mars. Je vous reproduis ci-dessous un
compte rendu que Vijay Majajan (Chairman de Basix – une des figures de la microfinance en
Inde – voir BIM du 9/11/05) a largement fait circuler par la suite (2).
Les acteurs présents lors de cette réunion sont classés en trois catégories :
> Les IMF avec SML, Spandana, SKS, BASIX, Aadarsha ;
> Les associations de microfinance et apex avec Sa-Dhan, APMAS, FWWB ;
> Ainsi que les banques et institutions financières avec Small Industries Development Bank
of India (SIDBI), NABARD, ICICI Bank, HDFC Bank, ABN Amro Bank.
2
Voir notamment le forum ‘Microfinance’ sur Nabble, un meta forum réunissant les groupes de discussions EspaceFinance, Microfinance Practice et Development Finance
(http://www.nabble.com/Microfinance-f10918.html).
3
Cette réunion a permis de mettre à jour 5 suggestions pour répondre à la crise :
L’établissement d’un dialogue proactif avec les autorités
Le point de vue des autorités et des IMF doit être partagés. Cette tâche a été confiée à
l’association Sa-Dhan (une association indienne de lobbying pour la microfinance) qui doit
immédiatement contacter plusieurs instances gouvernementales pour entamer le dialogue sur
cette crise (gouvernement d’Andhra Pradesh, gouvernement indien, ministère des Finances,
Banque centrale indienne (RBI)). Il est également décidé de monter dans la hiérarchie si les
propositions de réunions restaient lettres mortes. Les banques et les institutions financières
doivent également participer à cette action.
Il est spécifié que ces réunions doivent avoir pour objectif de clarifier le vocabulaire employé
par les autorités et les politiciens à travers les média : « taux d’intérêt usurier », « pratiques
coercitives de recouvrement », « chasse aux membres des SHGs », « détention illégale de
biens comme garanties ». Ces réunions doivent également rappeler que les actions des IMF se
déroulent en conformité avec la loi et les règles de la Banque Centrale, qu’elles ciblent les
foyers pauvres dont les besoins en crédit ne sont pas assurés par les banques, et que les IMF
ne reçoivent pas de subventions du gouvernement. Aussi, les IMF demandent à être encouragées, comme elles le sont par le ministre des Finances et par la RBI. La décision prise par
certains officiels de fermer des agences d’IMF et d’encourager les emprunteurs à ne pas rembourser va avoir de néfastes répercutions sur les pauvres et la discipline du crédit.
Un audit public
Il a été suggéré qu’un audit public du secteur de la microfinance en Andhra Pradesh soit mené.
Sa-Dhan doit établir un groupe de personnes expérimentées pour mener à bien cette mission.
Pour l’heure, il a été décidé de faire circuler la note du CRISIL (voir ci-dessous) le plus largement possible.
L’adoption d’un code de conduite par les IMF
Il a été soulevé que cette crise devait être utilisée comme une opportunité pour améliorer les
pratiques du secteur tout en se débarrassant des mauvaises. Un document de travail sur un
code de conduite a été discuté et amendé. Depuis, un « Voluntary Mutual Code of Conduct » a
été adopté. Les grandes lignes de ce document se trouvent en annexe.
L’adoption d’un code de conduite pour les banques et les institutions financières
Il a été reconnu que l’une des raisons de la crise avait été la concentration et la pression des
banques et institutions financières dans certaines zones géographiques et certaines IMF. De
plus, d’un côté, les banques privées et la SIDBI n’ont pas remis en causes les mauvaises pratiques de certaines IMF qu’elles suivent, et de l’autre, les banques du secteur public et la
NABARD ne se sont pas préoccupées d’évaluer l’impact que pourrait avoir l’offre de crédits à
des taux d’intérêts ne correspondant pas à ceux du marché. Les banques et les institutions financières ont besoin d’identifier leur part de responsabilité et de travailler avec les acteurs du
secteur pour corriger la situation. La ICICI (banque privée) et la SIDBI (agence de refinancement) ont été priées de s’occuper de ce point.
4
La question de la relation avec les médias
Il a été décidé que toutes les IMF et les banques devraient rencontrer les médias de leur propre
chef afin de leur apporter des éléments de clarification sur la microfinance. Les calomnies
colportées par les médias, et en particulier par les médias en langue telugu, doivent trouver un
droit de réponse à travers la tenue de réunions avec journalistes et rédacteurs. Dans le même
temps, les IMF et les banques doivent communiquer sur l’état des lieux en matière de taux
d’intérêt, de coûts d’opération, de collecte du remboursement, sur les garanties, etc.
L’association Sa-Dhan a été désignée pour prendre la tête du collectif conduisant cet effort.
Comme prévu, l’agence de notation Crisil a largement fait circuler une petite note précisant
que l’action du gouvernement dans le district de Krishna n’avait pas, pour l’instant, d’impact
sur les IMF de la région notées par Crisil, à savoir, la SML et Bhartiya Samruddhi Finance
Limited (BSFL). Dans le cas présent, seule la SML est concernée avec la fermeture de 12
branches de son réseau. L’agence de notation considère que ces fermetures ne sont pas suffisantes pour avoir un impact sur le profil financier et commercial de la compagnie. Celle-ci ne
mérite donc pas d’être dégradée. La part du portefeuille de prêts affectée est d’environ 5 % au
mois de février. La SML est une IMF qui offre des crédits à plus de 750 000 emprunteurs à
travers plusieurs districts des Etats de l’Andhra Pradesh, du Chhattisgarh et du Karnataka. La
compagnie possède un réseau de 295 branches et les prêts en cours au 31 décembre 2005 représentaient 3,9 milliards de roupies, soit 75 millions d’euros. A la même date, la SML affichait un PAT (Profit after tax) de 46,9 millions de roupies, soit un peu plus de 900 000 euros,
contre près de 500 000 euros les années précédentes.
Dissensions entre microfinance publique et privée
Quels sont les éléments sous-jacents qui pourraient expliquer l’apparition de cette crise en
Andhra Pradesh ? Pour certains, les IMF auraient commis l’erreur de protester contre un programme gouvernemental appelé Pavala Vaddi. Avec le scandale qui secoue la région, le gouvernement détient désormais son excuse pour passer à l’action. Car ce n’est pas seulement
Spandana et la SML qui se retrouvent sous les attaques mais toutes les IMF de la région. Les
membres du gouvernement sont assez clairs et n’hésitent pas à dire que l’Andhra Pradesh n’a
pas besoin des IMF et qu’elles devraient travailler dans les Etats où le gouvernement n’est pas
capable de gérer la distribution du crédit en milieu rural.
A la fin des années 90, le chef minister de l’Andhra Pradesh de l’époque, Chandrababy Naidu,
établit des partenariats avec la Banque mondiale afin de créer un réseau de SHGs à travers
l’Etat. Ce programme appelé VELUGU et plus tard, renommé Indira Kranti Pratham a été
principalement subventionné par des banques du secteur public. Aujourd’hui, environ 75 %
des SHGs opérant en Andhra Pradesh suivent ce modèle de financement. Les prêts octroyés à
travers le VELUGU sont fortement subventionnés. Les emprunteurs se retrouvent avec des
taux d’intérêt aux alentours de 9 % par an. De l’autre côté, les IMF principalement financés
par le secteur privé chargent beaucoup plus leur prêts. Officiellement autour de 24 % mais les
taux dépassent parfois cette limite.
L’empoignade entre acteurs publics et privés a véritablement débuté lors des élections de 2004
avec la mise en place par le nouveau gouvernement de Rajshekhara Reddy de ce fameux programme, le Pavada Vaddi. Initialement introduit comme une dernière subvention, il venait
compléter les subventions du VELUGU en permettant aux SHGs de bénéficier de crédits non
plus à 9 % mais à 3 % ! Les SHGs se voyaient alors appliquer un taux de 9 % et, une fois le
5
prêt remboursé, 6 % devait leur être crédité. Un an plus tard, l’Etat voulu aller encore plus loin
et appela les SHGs à ne plus payer que 3 % directement. L’Etat s’acquittant du reste.
A l’époque, les représentants de plusieurs IMF du secteur privé s’étaient horrifiés aux vues de
ces annonces et n’avaient pas manqué de le faire savoir. Pour eux, ces taux d’intérêt artificiellement bas rendraient le secteur privé non attractif pour les SHGs. De plus, qu’est ce qui se
passerait si les gens commençaient à créer des SHGs pour exploiter des prêts à bas prix (ce qui
est arrivé depuis) ? Plus important encore à leurs yeux, ce programme allait porter atteinte au
cœur même de l’idéal des SHGs. Avec ce régime de subventions, les disciplines financières
liées aux pratiques de crédit et d’épargne pouvaient complètement dérailler.
En résumé, pour les uns, c’est l’empressement des banques privées comme la ICICI ou la
SIDBI à prêter aux IMF qui explique la mise à feu de cette crise. Pour Vijay Kumar, le directeur général de la Society for Eradication of Rural Poverty (SERP), « Chaque activité a son
propre rythme de croissance, mais ces gens (IMF du secteur privé) ont foncé comme des fous
furieux ». Pour le leader du parti du Congrès, P. Venkat Rao, « Le gouvernement aurait dû
prendre des mesures contre ces compagnies 5 ans plus tôt lorsqu’elles ont organisé le ‘pillage’
de l’activité de prêts sous le vocable de microfinance. Le gouvernement doit identifier les
compagnies de microfinance qui ont trompé les gens et conduit des actions frauduleuses pour
se faire rembourser leurs prêts. » (TNN, 2006).
Pour les autres, le Pavada Vaddi fut un très bon coup médiatique en vue des élections mais n’a
aucun sens financier. Ce programme crée des dissensions et instabilités entre privé et public
qui affectent les pratiques. A termes, il peut porter atteinte au secteur de la microfinance dans
son ensemble.
Pour d’autres encore, les banques, devant augmenter leur part de marché en milieu urbain où
la compétition est intense et les marges maigres, se rabattent sur le milieu rural pour engranger
de confortables profits. Tout cela participe au stress de la microfinance.
Conclusion
Depuis cette réunion des principaux acteurs du secteur de la microfinance de l’Etat de
l’Andhra Pradesh que je vous ai rapportée un peu plus haut, des dizaines de conférences de
presses, d’interviews ont été organisées avec les médias. De nombreuses réunions ont également eu lieu avec des officiels du gouvernement de l’Andhra Pradesh. Les autorités locales
ont également autorisé la réouverture des 50 agences de la SML et de Spandana. Les opérations normales sur le terrain ont pu reprendre leur cours.
Néanmoins, la situation ne va pas en s’améliorant tant sur le terrain que dans les salons feutrés
du gouvernement. La controverse à propos des méthodes de recouvrement des IMF a pris,
mercredi 5 avril, une nouvelle dimension lorsqu’un client de la SML a tailladé à mort un agent
de crédit. Arrêté par la police, il a expliqué qu’il ne pouvait plus supporter le harcèlement et
les pressions de l’IMF. Ce client avait emprunté 12 000 roupies (230 euros) auprès de la SML.
C’est lorsque le prêt est arrivé à échéance et que l’agent de crédit est venu réclamer le remboursement que le meurtre a eu lieu.
Le rapport commandé par le gouvernement auprès du SERP et remis en fin de semaine dernière ne va pas non plus dans le sens de l’apaisement. Après l’analyse des transactions financières des IMF incriminées du district de Krishna, les membres du comité se sont dits choqués
par l’importance des coûts cachés qui ont été collectés sans que les emprunteurs en soient in-
6
formés. Ces coûts cachés sont estimés par l’enquête à plus de 2 milliards de roupies, soit plus
de 38 millions d’euros. Ces coûts inclus les services administratifs, les charges d’assurance, le
dépôt de sécurité, etc. On reproche également aux IMF de ne pas verser des intérêts sur
l’épargne et les dépôts de garantie collectés. Pour Vijay Kumar, à la tête du comité qui a remit
son rapport au chief minister d’Andhra Pradesh, les IMF ont violé plusieurs lois, à la fois civiles et criminelles. Le gouvernement n’a, pour l’heure, toujours pas réagit.
Le « train » microfinance n’a pas encore été ralenti dans sa lancée mais
jusqu’à quand ?
Comme venant contredire l’existence même de cette crise, le 28 mars, on apprenait que Khosla Ventures et d’autres « capital-risqueurs » avaient investi 2,1 millions d’euros dans l’IMF
SKS Microfinance. Jusqu’à ce jour, il s’agit de l’investissement le plus important jamais effectué dans une IMF indienne du secteur privée. D’après le Times of India (Sengupta, 2006),
cette opération devrait permettre à SKS de passer de 200 000 à 700 000 clients pour l’année
financière 2006-07. Fondé en 1998, SKS touche 200 000 clients dans plus de 3 000 villages et
5 Etats indiens (Andhra Pradesh, Maharashtra, Karnataka, Madhya Pradesh et Orissa). Les
trois principaux investisseurs, avec près de 400 000 euros chacun, sont les entrepreneurs Ravi
Reddy et Sandeep Tungare (les co-fondateurs de Vistaar Technologies) ainsi que Unitus
Equity Fund (Global Microfinance Accelerator).
Les taux d’intérêts s’élèvent à plus de 60 % chez les moneylender (et le lot de suicide qui y
sont associés – voir les nombreux articles parus dans la presse internationale depuis 1998 sur
ce sujet), 24 à 36 % dans les IMF, 9 % dans les banques ; les intérêts représentent des jours et
des semaines de travail pour des gens qui ont du mal à, justement, trouver du travail (BIM du
11/04/06).
Parallèlement, d’importantes IMF embauchent des spécialistes en marketing pour développer
des campagnes de promotion de prêts et assurances auprès de ces pauvres !
La crise actuelle est-elle un phénomène marginal ou le révélateur que la « machine Microfinance » serait devenue folle ?
Annexe
Voluntary Mutual Code of Conduct for Micro Finance Institutions: Mar 21, 2006
In view of the various issues about MFI pointed out by AP Government Officials and the media, the following code of conduct was adopted in a meeting in Hyderabad on March 20, 2006.
Complementing credit delivery by SHGs:
1.
MFIs will ensure that they complement the credit provided to poor households under the
SHG-Bank linkage program, and especially extend services to those not served adequately by banks.
2.
MFIs will avoid over-financing of the same household by different MFIs, by informal
information sharing on operations among themselves and with banks doing SHG lending.
7
Interest rates and Savings:
3.
MFIs will charge reasonable interest rates, which are based on schedule attached below.
MFIs will indicate interest rates, including loan processing and other charges, on an annual percentage rate basis (effective rate on declining balance basis).
4.
MFIs will collect savings from members/customers only when explicitly allowed by the
RBI or a state legislation to do so.
Recovery of loans:
5.
MFIs will not take original land titles, house pattas, ration cards, etc as collateral security
for loans but can take copies of these for fulfilling “know your customer” norms of the
RBI.
6.
MFIs will strictly instruct staff members not to use abusive language or intimidation tactics while collecting repayment and will dismiss those staff members who do so.
7.
MFIs will ensure that all borrowers are provided with life and other insurance which covers the loan outstanding and some additional amount, in conformity with IRDA guidelines.
8.
In case of death of the borrower, a family member or of livestock or any other major adversity in the borrower’s household, the MFIs will offer ways and means to reduce the
shock for the family.
Governance and Transparency:
9.
MFIs will adopt a high standard of corporate governance, with eminent independent
board members and fully involving them in policy related decision.
10. MFI leaders will declare their salary and benefits on an annual basis in the financial
statements.
11. MFIs will ensure ethical and disciplined behaviour by their staff; take action against those
who do not conform and declare the names of those staff members who have been dismissed.
12. MFIs will stay in touch with government authorities, banks and the media on a regular
basis.
Bibliographie
Aneel Kumar (2006), “MFIs on a correction course. Firms Reduce Interest Rates, Plan to
Work with State Govt”, Times of India, Business Times, 29 mars, p. 1.
Fouillet Cyril (2005), « La microfinance en Inde : données chiffrées et zoom sur les Self-Help
Groups », Bulletin d’Information du Mardi, Gret – Cirad, Espace Finance, 06 décembre, 10 p.
Guntur (2006), “MPs, MLAs cry for action against MFIs”, The Times of India, Hyderbad, 7
avril
Nabard (2004), Progress of SHG – Bank Linkage in India, 2003-2004, Mumbai, 132 p.
Nabard (2005), Progress of SHG – Bank Linkage in India, 2004-2005, Mumbai, 160 p.
8
Ravi Reddy (2006), “MFIs liable for prosecution”, The Hindu, Andhra Pradesh édition, 13
avril.
Ravi Reddy (2006), « MFIs recover Rs. 200 crores as ‘hideen costs’, The Hindu, Andhra
Pradesh édition, 14 avril.
Roesch M. (2006), “Des dettes jusqu’à ne plus en vivre”, Bulletin d’Information du Mardi,
Gret – Cirad, Espace Finance, BIM-11-04-06, 11 avril, 6 p.
Sengupta Snigdha (2006), « Destination Microfinance », Businessworld, 1 avril.
Somasekhar M. (2006), “SHGs growing on ‘weak foundation’”, The Hindu, Business Line, 8
avril.
Somasekhar S. (2006), “SHGs growing on ‘weak foundation’”, The Hindu, Business Line, 7
avril.
Surya Desaraju, (2006), “Financing deaths the micro way”, Sunday Times of India, 2 avril,
p.1.
The Economic Times (2006),“Cap the interest rate on microfinance ?”, 21 mars.
The Hindu (2006), “Ban on micro-finance companies sought. Women gather at Collectorate to
put forward demand”, 15 mars, p. 6.
The Hindu (2006), “Micro-finance victims petition rights panel”, 14 mars.
The Hindu (2006), “State mulls law against erring micro-finance institutions”, 21 mars, p. 4.
The New Indian Express (2006), “Bill soon to regulate micro-finance firms”, 30 mars, p.5.
Times of India (2006), “Microfin victims pour out woes”, 30 mars p. 1.
The Times of India (2006), “Borrower hacks small loan collector to death”, 6 avril, p. 1.
The Hindu (2006), “Mircofinance Institutions to cut interest rate in Andra Pradesh, farreaching decisions taken at the forum meeting”, 21 avril Tamil Nadu édition.
Vijayawada (2006), “Official enquires into row over functioning of MFIs in State”, The
Hindu, Andhra Pradesh édition, 30 mars.
9

Documents pareils