27.04.12 Lalala Gershwin_Cie Montalvo-Hervieu
Transcription
27.04.12 Lalala Gershwin_Cie Montalvo-Hervieu
Metz en Scènes Arsenal Jeune Public À partir de 6 ans Lalala Gershwin Séances scolaires Ven. 27. O4. 2O12 1OhOO & 14hOO Grande Salle Durée : 5O minutes © Laurent Paillier Compagnie Montalvo-Hervieu Sommaire Introduction 3 Le spectacle 4 Les chorégraphes 5 L’univers artistique 9 Le contexte historique et culturel 9 Le compositeur 12 La musique 14 Le jazz 15 La danse 18 Propositions pédagogiques 2O Pour aller plus loin… Le Crédit Mutuel Enseignant soutient les spectacles Jeune Public de l’Arsenal. — Document réalisé d’après le dossier de presse du spectacle. 2 23 Lalala Gershwin Un spectacle de José Montalvo et Dominique Hervieu José Montalvo et Dominique Hervieu Chorégraphie José Montalvo Scénographie et conception vidéo © Théâtre national de Chaillot Dominique Hervieu assistée de Siegrid Petit-Imbert Costumes George Gershwin Musique Catherine Lagarde Création sonore Renaud Pion Clarinettes solo Vincent Paoli Lumière Créé avec et interprété par 7 interprètes, en alternance : Ernest Bilé N’Draman/Richard Anegbele, Franz Cadiche/Rotha, Clarisse Doukpe/Ibrahim Diame dit Ibougaloo, Christelle Nazarin/Karla Pollux, Séverine Bidaud/Emeline Colonna, Plock/Hammani, « Fonky » Fouad, Jérémie Champagne Photos : © Birmingham Public Library, Interior of a segregated bus, Birmingham, Alabama, 1930, court. Birmingham, Alabama Public Library Archives // © Culver Pictures, Inc, 1er décor de Porgy, Alvin Ailey Theater New York, 1935 // © Getty Images Public Lynching, Hulton Archive, Students March for Integrated Schools, National Archives // © Library of Congress, Prints & Photographs Division // © Courtesy of the Ira and Leonore Gershwin Trusts // © Patrick Berger / D.R. pour les autres photos. vidéos : © INA, Nuits chaudes à Vaulx-enVelin suite à un accident. © Pathé Gaumont, Former LAPD Chief Gatges, Police Found. Pres. Williams, And Mother of Man Shot and Killed by NYC Police Diallo Discuss Police andMinorities, L’Amérique Noire Photos communication : Laurent Philippe. Copyright : CCN de Créteil. Pascal Minet et Etienne Aussel Collaborateurs à la vidéo Franck Chastanier, Sylvain Decay, Amel El Kamel, Clio Gavagni, Michel Jaen Montalvo et Valérie Toumayan Infographie Roberto Pani, Joëlle Iffrig Assistants à la chorégraphie Production : Théâtre National de Chaillot Avec l’aimable autorisation de l’Opéra national de Lyon pour l’utilisation d’éléments de la production « Porgy and Bess » – Lyon 2008 3 Le spectacle « Je suis venu te prendre la tête pour te faire voir ce qu’il y a derrière les étoiles. Laisse tomber les ondes négatives qui guident tes pas vers la violence et suis nous, tu découvriras alors la puissance de la créativité qui sommeille en toi. » Évoluant sur la musique de George Gershwin, les danseurs explorent les univers qui émergent à partir des années 30 aux Etats-Unis et qui donneront naissance à de nouveaux courants artistiques dans le domaine de la danse. Cet hommage au compositeur américain George Gershwin puise librement dans la fabrique des danses et des images de Broadway, en référence aux ÉtatsUnis du début du XXe siècle. Ce spectacle s’appuie sur l’univers et la thématique principale de l’opéra Porgy and Bess : la ségrégation et la discrimination raciale. Il alterne discours AFRIKA BAMBAATAA historique et esthétique, politique et poétique de l’imagination, faisant ainsi réentendre l’utopie positive portée par Gershwin : l’ouverture aux autres, à leurs différences. 4 Les chorégraphes Pendant plus de vingt ans, José Montalvo et Dominique Hervieu ont créé une danse jubilatoire et iconoclaste où les images foisonnent et où les corps crient leur plaisir d’être en mouvement. Leur art peint le monde d’aujourd’hui : mélange de couleurs, mosaïques de styles, palette de genres. En 1981, José Montalvo – chorégraphe – rencontre Dominique Hervieu – danseuse – et commence à chorégraphier de courtes pièces ludiques, sortes d’aphorismes chorégraphiques, dont elle est l’interprète principale. Ils élaborent ensemble une gestuelle particulière faite de fluidité, rapidité et précision qui va donner un style singulier à leurs productions. De 1986 à 1988, plusieurs prix internationaux récompensent les chorégraphies de José Montalvo (Concours de Nyon – 1986, Danse à Paris – 1987, Concours chorégraphique de Cagliari – 1988), toutes interprétées par Dominique Hervieu qui reçoit en 1988, le prix d’interprétation féminine du Concours international de danse de Paris. C’est le début d’une aventure artistique et d’une profonde complicité, qui donne naissance en 1988 à la Compagnie MontalvoHervieu. En 1993, avec la complicité du vidéaste Michel Coste, José Montalvo et Dominique Hervieu créent sur la Scène Nationale de Macon Double trouble, une pièce inaugurale qui confronte l’image technologique et la présence physique des corps des danseurs. Parallèlement à la création, ils se lancent dès 1989 dans la création d’événements in situ, qui proposent aux habitants d’une ville une pièce chorégraphique écrite sur mesure pour eux : Les 5 En 2008, José Montalvo et Dominique Hervieu consacrent un diptyque composé de deux œuvres très contrastées de George Gershwin : → Une première partie en mai 2008 à l’Opéra national de Lyon avec Porgy and Bess, mise en scène et chorégraphie de MontalvoHervieu et direction musicale de William Eddins → Une seconde partie, Good Morning, Mr. Gershwin, en septembre 2008 pour l’ouverture de la Biennale de la Danse de Lyon. En juin 2008, Dominique Hervieu et José Montalvo prennent la direction du Théâtre National de Chaillot, respectivement comme directrice et directeur artistique. En 2009, ils sont promus Officiers des Arts et Lettres et reçoivent le prix « Créateurs sans frontières » du Ministère des Affaires étrangères et européennes. En 2010, ils créent Orphée, une pièce chorégraphique à michemin entre la comédie musicale et l’opéra, version contemporaine du mythe d’Orphée. Danses à voir et à danser rassemblent entre trois cents et trois mille personnes de tous âges, de tous horizons, et constituent, sur un mode ludique, une tentative de reconquête de la fête et du plaisir de danser. En juin 1998, ils sont nommés directeurs du Centre Chorégraphique National de Créteil et du Val-de-Marne et continuent de développer sur ce territoire – au côté de leur mission de création et de diffusion – un travail de formation et d’éducation artistique en créant des actions originales qui favorisent l’accès à l’art chorégraphique. En novembre 2004, ils imaginent un parcours chorégraphique au musée du Louvre On danse au Louvre / Carte blanche à la compagnie Montalvo-Hervieu. Cinq mille spectateurs déambulent dans le musée, au cœur du mélange des époques et des arts, vivant un véritable nomadisme esthétique. En 2006, Dominique Hervieu crée un coffret DVD interactif pédagogique traitant de la diversité culturelle, conçu pour le Ministère de l’Éducation Nationale et le Ministère des Affaires Etrangères : « L’Art de la rencontre – cartes postales chorégraphiques pour les Francofffonies ! ». En juin 2006, José Montalvo et Dominique Hervieu reçoivent le prix chorégraphique de la SACD, pour l’ensemble de leur œuvre. 6 savantes et traditionnelles. Il fut le premier compositeur blanc à reconnaître le génie rythmique de la musique noire et à s’en inspirer. À cet idéal d’une musique pour la musique, les deux chorégraphes répondent par une recherche sur le pur mouvement, cette virtuosité qui traverse leur travail depuis ses débuts, et qui trouve ici à se déployer sur le plateau, convoquant les « songs » de la musique de Gershwin, les chants live et le slam, les claquettes et les percussions du « Shim Sham ». Ces deux registres, l’art savant et l’art populaire sans cesse coprésents dans leurs œuvres, sont à la fois antagonistes et complémentaires, et constituent une véritable marque de fabrique, à l’image de la société dans laquelle nous vivons, où la culture quotidienne est fondamentalement hétérogène. On parle alors de transversalité dans l’art, ou de pluridisciplinarité, c’est-à-dire la cohabitation de différents genres artistiques au sein d’une même œuvre, par un mélange soit d’époques, soit de géographies, soit de domaines d’art (mode et peinture, architecture et design, musique ou vidéo et installation). Note d’intention des artistes : La toile de fond de Lalala Gershwin José Montalvo et Dominique Hervieu puisent librement dans « l’entertainement » américain la fabrique des comédies musicales et du cinéma hollywoodien des années 30, pour offrir au jeune public un poème visuel fait de rêve et de fantaisie. En référence aux Etats-Unis du début du XXe siècle c’est toujours avec cet irrépressible goût pour la vie, un joyeux coup de boost aux émotions, qu’ils s’expriment en s’affranchissant des barrières entre les registres artistiques. Quelques œuvres emblématiques du compositeur, comme The man I love ou Strike up the band, viennent témoigner du talent syncrétique de Gershwin. En effet, sa curiosité ne s’arrêtait pas aux frontières de Manhattan, mais empruntait insatiablement à d’autres contextes culturels, dans une translation constante entre art majeur et mineur, musiques 7 Les deux chorégraphes trouvent bien des correspondances entre l’approche du compositeur américain, qui favorisait une certaine porosité entre art majeur et art mineur, et leur conception artistique. « Il y a dans Porgy and Bess du jazz, du charleston, du classique, dans une idée de collecte, voire de collage des cultures, un métissage permanent qui se retrouve dans nos ballets. Nous sommes comme Gershwin dans ce passage du savant au populaire, des registres qui s’entraînent l’un l’autre plutôt qu’ils ne s’ignorent. C’est la grande force de Gershwin » note Dominique Hervieu. Ils s’appuient également sur l'univers et la thématique principale de l'opéra Porgy and Bess : ségrégation et discrimination raciales. Cette référence à l'histoire noire américaine, a pour source l’unique opéra de George Gershwin, œuvre immense du patrimoine musical mondial qui, pour la première fois dans l’histoire, mettait en scène des noirs américains dans les rôles principaux, et évoque, au cours du spectacle, les grands moments historiques de l'émancipation des noirs jusqu'à aujourd'hui. Héritiers du geste citoyen que fit, avec cette œuvre, George Gershwin en 1937, Dominique Hervieu et José Montalvo articulent, à leur façon, discours historique et esthétique, politique et poétique de l'imagination. Ils font ainsi réentendre l'utopie positive portée par Gershwin en son temps : l'ouverture aux autres, à leurs différences, le respect d’autrui, une ode à la diversité des origines et la joie de vivre ensemble en toute harmonie, qui seule peut façonner une intelligence de la perception – une généreuse hospitalité du regard. © Laurent Paillier 8 L’univers artistique Une culture urbaine naît aux États-Unis, les villes gagnent du terrain et deviennent des avantpostes du monde moderne. Broadway foisonne de cabarets et de théâtres, les créations de comédies musicales se multiplient. Ces années correspondent aux Années Folles en France. Elles sont la preuve d’une grande richesse dans le domaine littéraire (Hemingway, Dos Passos, Faulkner, etc) et aussi dans les domaines musicaux, architecturaux et picturaux. Le contexte historique et culturel aux États-Unis Quelques évènements historiques et sociopolitiques de l’époque contemporaine de Gershwin ↓ Les années 192O-193O aux États-Unis « Quelle chance d’avoir vingt ans dans les années 20 à New York ! » S’enthousiasmait Ernest Hemingway, grand admirateur du compositeur. Ces années-là furent bien les années Gershwin : naissance de l’art urbain américain au rythme des incessantes mutations des villes, modernisation galopante... autant de phénomènes qui marquèrent le musicien de leur vertige et imprimèrent ses notes de leurs pulsations. De 19O2 à 1931, les grandes constructions Cette époque marque l’arrivée de la modernité triomphante : explosion économique et financière, âge d’or du capitalisme, début d’une société de consommation générée par une production de masse et la publicité. Cet élan sera stoppé par le krach boursier de 1929. De grandes tours comme l’Empire State Building sortent de terre en 1931, c’est aussi l’arrivée du métro souterrain et des grandes gares. La ville se couvre d’infrastructures routières. 9 l’indépendance et à la mobilité de la jeunesse. Promulgation du 19e amendement instaurant le droit de vote des femmes. Les grandes migrations des années 1915-193O Les difficultés économiques et la ségrégation très forte poussent les populations noires à s’installer dans les grandes villes du Nord Est, où la croissance génère de nouveaux emplois. Dans les villes, les noirs font de nouveau face à une discrimination féroce, la population blanche se sentant menacée. 1924-1925 : Mafia, Prohibition, KKK 1919 : Explosion du disque Naissance et explosion du disque et du phonographe. Adoption du 18e amendement de la Constitution instaurant la prohibition de la vente et consommation de l’alcool dans le pays. 192O : Essor de la société de consommation et des loisirs Essor des grandes compagnies de cinéma comme Paramount, Fox, Metro, Naissance à l’ouest de Hollywood ; à l’est c’est le théâtre qui prédomine. Production en masse de l’automobile qui participe à 10 La barre des 12 millions d’immigrants débarqués à New York est atteinte. 5 millions d’Américains sont membres du Ku Klux Klan qui devient une force politique influente. Harlem devient le lieu principal où l’on peut trouver de l’alcool. Al Capone contrôle son commerce clandestin. Naissance du mouvement « Harlem Renaissance ». Réalisation du 1er film en couleur. 1925 : La renaissance d’Harlem L’anthologie manifeste The New Negro d’Alain Locke marque la naissance officielle du mouvement le « Nègre Nouveau » qui rassemble pour la première fois des œuvres de jeunes auteurs afro-américains. Jeunes artistes et intellectuels convergèrent vers Harlem dans les années 20 qui devient le berceau de la littérature afro-américaine. Une nouvelle culture urbaine de l’Amérique favorise l’éveil des Arts et des Lettres. Des dramaturges et des acteurs créent un théâtre authentique, écrit par et pour les Noirs, traitant de thèmes jusque-là inédits. Shuffle Along, revue musicale, donne en quelque sorte le départ de la renaissance dans le domaine du théâtre populaire. 1927 1929 : Krach boursier La bourse s’effondre, la moitié de la population active est touchée par le chômage. La dépression fait ses premières victimes, des musiciens noirs sont forcés de quitter la profession. 193O : Après le jazz, le swing et les comédies musicales Sortie du 1er film parlant (chantant et musical) produit par les frères Warner, The jazz singer. Création de l’équipe de Basket Ball des Harlem Globe Trotters, entièrement composée de joueurs noirs. Le Jive, langage argotique des Noirs de Harlem apparaît et aboutira progressivement au rap du début des années 70. C’est l’époque des comédies musicales avec Fred Astaire, Ginger Rogers et Gene Kelly. The green Pastures est la première pièce jouée entièrement par des acteurs noirs et à être montée à Broadway. 1931 : Charlie Chaplin 1928 Chaplin présente Les lumières de la ville et reçoit un accueil triomphal. Oscar de Priest est le premier noir élu au Congrès. Première apparition de Mickey Mouse. 11 1932-1934 : Le New Deal et la fin de la prohibition Le compositeur Le président Franklin Roosevelt développe un programme économique et social, le New Deal, qui vise à redresser l’économie par une politique interventionniste du pouvoir fédéral et à régler le problème du chômage. Fin de la prohibition. Walt Disney réalise son premier dessin animé en couleur, Les trois petits cochons. 1935 George Gershwin est un compositeur américain, né le 26 septembre 1898 à Brooklyn (New York) et mort le 11 juillet 1937 à Hollywood (Californie). George Gershwin composa la plupart de ses œuvres avec son frère, Ira Gershwin, à la fois pour Broadway et pour le concert classique, sa musique contenant des éléments provenant des deux univers. Il connut également beaucoup de succès dans l'écriture de chansons populaires. Parmi ses compositions, de nombreuses ont été employées au cinéma, et bien d'autres sont devenues de grands standards de jazz grâce entre autres à Ella Fitzgerald, Louis Armstrong, Herbie Hancock et de nombreux autres chanteurs ou acteurs. Création de la sécurité sociale. Le 19 mars, émeute raciale à Harlem. Porgy and Bess est monté à Broadway. 12 C’est en 1910, que la famille acquiert son premier piano, dès qu'il s’assit devant l'instrument, George joua avec tant de facilité et de talent que ses parents lui payèrent des leçons. Il étudia les techniques du piano traditionnel, et les œuvres des grands compositeurs européens, et assistait à de nombreux concerts. Il était un étudiant enthousiaste, et Hambitzer son professeur disait de lui : « J'ai un étudiant qui laissera sa marque en musique [...] Le garçon est un génie, il n'y a aucun doute. » Il publia quelques partitions de piano et écrivit des chansons. Dès que son nom se fit connaître à New York, les demandes pour ses compositions se multiplièrent. George avait réalisé que c'était dans cette direction que se poursuivrait sa carrière, plutôt que vers celle de pianiste de concert. Il jouait cependant avec grand talent et charisme car son emploi chez Remick's lui avait appris à improviser et à transposer instantanément. Dans les soirées il s'asseyait inévitablement au piano, entouré de jolies femmes. Son frère Ira se révéla particulièrement doué pour trouver des paroles qui correspondaient aux chansons de son frère ; ainsi débuta une solide collaboration entre les deux hommes. L'année 1928 apporta plusieurs expériences musicales très enrichissantes à la vie de Gershwin : il eut premièrement la chance de rencontrer Maurice Ravel au mois de mars, compositeur qu'il admirait ; lorsque George lui demanda s'il pouvait lui enseigner la composition, Ravel lui répondit : « Pourquoi seriez-vous un Ravel de seconde classe alors que vous pouvez devenir un Gershwin de première classe ? » En grandissant dans les quartiers de New York, Gershwin fut exposé à d'innombrables genres de musique. À travers sa famille il était familier du style Klezmer des Juifs américains ; cette influence est apparente dans les mélodies de ’S Wonderful et Funny Face. Il connaissait également bien la musique afro-américaine et en particulier, le jazz. Ce style était considéré à l'époque comme étant exclusif aux « musiciens de race », et 13 la nature de la musique de Gershwin fut longtemps étiquetée comme étant une simple imitation du genre. Il est cependant incontestable que ses œuvres telles que Rhapsody in Blue et son rag, Rialto Ripples, emploient la tonalité « blues » et les rythmes syncopés du jazz. Enfin, Gershwin était un grand enthousiaste de la musique moderne française.(Debussy, Ravel, Milhaud) ainsi que des œuvres de compositeurs tels que Jerome Kern, Alban Berg, Dimitri Chostakovitch, Igor Stravinski, Arnold Schönberg. Sur le plan modal, il aimait particulièrement la sonorité de la gamme pentatonique, qui inspira la mélodie de I Got Rythm. Mais ses talents personnels caractérisaient le mieux son style pianistique : il jouait avec la plus grande aisance, débordant d'énergie et d'enthousiasme, en inventant toujours des nouveaux rythmes et mélodies. C'est ce qui lui donnait le plus grand plaisir : il ne s'amusait pas à une fête s'il n'avait pas la chance de s'asseoir au piano. La musique Porgy and Bess, une œuvre novatrice et engagée L'histoire se passe dans l'Amérique misérable des années 30, en pleine crise économique, alors que l'alcool, la drogue, le jeu font des ravages. Les héros sont des Noirs très pauvres. Porgy, un mendiant infirme, est amoureux en secret de Bess qui vit avec un autre homme, Crown. Lors d'une bagarre, Crown tue un autre villageois et doit s'enfuir. Porgy en profite pour déclarer son amour à Bess. Auprès de lui, Bess trouve le bonheur et renonce à la drogue. Mais Crown réapparaît et Porgy le tue. Bess se laisse entraîner par un dealer blanc, Sportin' Life, qui lui propose de la drogue, et elle finit par partir avec lui laissant Porgy désespéré. Musicalement, Porgy and Bess réussit une synthèse innovante entre les techniques orchestrales européennes, le jazz américain et la musique populaire. D’autre part, 14 dans sa forme, c’est un opéra nouveau qui se dit populaire, puisque c’est un conte populaire ayant pour sujet la vie des noirs américains. « Gershwin déploie tous les clichés associé à cette culture : son sens de l’humour, du drame, ses croyances superstitieuses et sa ferveur religieuse, son instinct de la danse et son entrain débordant. » Cette nouvelle forme qui allie opéra et théâtre devait pour Gershwin avoir la vocation de divertir le plus grand nombre plutôt que l’élite cultivée. C’est la raison pour laquelle il ne le proposa pas à ceux qui d’ordinaire patronnent l’opéra en Amérique. Dans cette œuvre, Gershwin souhaite mêler, le tragique et l’anecdotique, le désuet, l’humour, le pitoyable. Il écrit ses propres « folk songs » et « spirituals » et travaille en collaboration avec son frère Ira au piano. Il met en place une série de leitmotiv dès le début de l’opéra afin d’identifier ses personnages musicalement. L’entrelacement de ses thèmes sert à montrer les conflits entre les personnages. Après la première en 1935, la critique est mitigée, on se questionne sur le genre particulier de Porgy and Bess, opéra, comédie musicale, opérette ? Il lui est reproché aussi bien par la communauté noire que blanche d’avoir traité le problème noir avec superficialité et clichés. Il faudra attendre les années 80 pour que l’œuvre soit reconnue comme un véritable chef-d’œuvre. 15 Le jazz Ses Origines Le jazz trouve son origine dans la culture noire-américaine. Né au début du XXe siècle, il s’inspire de trois courants musicaux du XIXe : → le Negro-spiritual et le Gospel → le Blues → le Ragtime ↓ Le Negro-spiritual et le Gospel Déportés d’Afrique et arrachés à leurs coutumes et leur religion, les esclaves noirs adaptent à leur convenance la culture de leurs propriétaires. Ils créent ainsi des chants religieux imprégnés de l’Ancien Testament (le Negrospiritual) et d’autres inspirés de l’Evangile (le Gospel). Le Blues Cette musique profane dépeint les chroniques de la vie quotidienne des esclaves noirs, ainsi que leur douleur et leur désespoir à l’issue de la Guerre de Sécession, face à l’hostilité de la communauté blanche. Musicalement, cette douleur est traduite par l’introduction dans la mélodie de notes appelées « blue notes » venant déstabiliser l’harmonie du chant. Ces notes sont à l’origine d’un nouveau monde harmonique appelé "le Blues". Le Ragtime (de 187O à 193O) Il représente les premiers essais de composition, donc de musique écrite. Composé pour le piano, il s’articule autour d’une mélodie rythmée (« ragtime » signifie « mesure déchirée ») et d’une basse constante. Le côté "improvisation" n’y a pas encore sa place. Scott Joplin (1868-1917) fut l’un des plus grands compositeurs de Ragtime. Quelques grands noms : le trompettiste Louis Armstrong (19001971), le clarinettiste et saxophoniste Sydney Bechet (1891-1959), la chanteuse Billie Holiday (1915-1959)… Le swing (années 3O) Après le krach boursier de 1929, le jazz s’allie à la danse pour divertir le peuple américain. C’est le clarinettiste Benny Goodman (1909-1986) qui connaît le premier succès du swing. C’est la naissance des premiers grands orchestres de jazz : les Big Bands dans lesquels une place importante est laissée aux solistes pour leurs improvisations. Les Big Bands les plus célèbres sont ceux de Count Basie (1904-1984), Duke Ellington (1899-1974), Cab Calloway (1907-1994). Le Be-Bop (années 4O) Les courants du Jazz de 19OO à nos jours ↓ Le jazz New Orleans (vers 191O) Né dans les rues de la Nouvelle Orléans à qui il doit son nom, il marque l’apparition des jazzbands (fanfares de rues composées de cuivres et jouées par les Noirs). Le style « New Orleans » a été repris par des orchestres de Blancs : on le désignait sous le nom de « Dixieland ». Dès 1920, le jazz se répand dans le Nord des Etats-Unis : il gagne Chicago, New York … Au début des années 40, de jeunes jazzmen noirs donnent au jazz une rythmique nouvelle, plus complexe, aux harmonies parfois dissonantes. Les tempos sont également de plus en plus enlevés. Quelques grands noms : le saxophoniste Charlie Parker (19201955), le trompettiste Dizzy Gillepsie (1917-1993), le pianiste Thelonious Monk (1920-1982), le batteur Kenny Clarke (1914-1985) Le Jazz Cool (vers 195O) C’est l’époque d’un jazz au style plus calme ("cool" = "frais" en anglais) et 16 plus sobre. Les sonorités sont plus feutrées. Les deux précurseurs du Jazz Cool sont le trompettiste Miles Davis (1926-1991) et le saxophoniste Lester Young (1909-1959). Ce courant "Cool" se déplace vers la côte Ouest des Etats-Unis où il est joué principalement par des musiciens blancs. d’autres styles et influencés par de nouvelles techniques : le JazzRock, le Jazz des musiques du monde … Quelques termes propres au Jazz Chorus : improvisation sur une Le Hard-Bop (1953) grille de séquence harmonique. Face au classicisme du jazz cool, les musiciens noirs veulent préserver les spécificités de leur musique. Né à New York, le Hard Bop est l’occasion d’un retour aux racines de la musique noire, Blues et Gospel, dans une version profane, riche en rythmes. Le batteur Art Blackey (1919-1990) est parmi les plus célèbres musiciens de Hard Bop. vocale où des onomatopées sont utilisées plutôt que des paroles. Le Free-Jazz (196O) Section rythmique : ensemble Improvisation : invention sur la séquence harmonique d’un thème. Le musicien peut laisser libre cours à son inspiration. Pont : formule qui permet de passer d’un thème à un autre. Scat : forme d'improvisation Ce courant, issu du jazz moderne, ne veut retenir du jazz que les éléments fondamentaux de la musique noire : l’énergie, le son brut, l’improvisation. C’est le jazz "libre". Le saxophoniste Ornette Coleman (1930) en fut le précurseur. D’autres musiciens ont contribué à l’essor du free-jazz : le saxophonisteténor John Coltrane (1926-1967), le pianiste Bill Evans (1929-1980) qui proposa une nouvelle approche du « piano jazz ». Après 1960, le jazz connaît d’autres courants issus de fusions avec 17 des instruments qui marquent le tempo. Généralement, on y retrouve la batterie et la contrebasse, parfois accompagnées par le piano ou la guitare. Tempo : cadence choisie pour jouer un thème (lent, medium swing, ou rapide). Thème : idée musicale, mélodique, harmonique ou rythmique sur laquelle on bâtit une composition. Cela n'empêche pas que cet enchaînement puisse être dansé n'importe quand dans la soirée. Bien des danseurs de swing ont acquis le réflexe de danser un shim sham dès qu'il entendent les premières notes de T'Ain't What You Do. La danse ↓ Le Shim Sham Le Lindy Hop Le « Shim Sham Shimmy » est à l'origine un enchaînement de danse à claquettes. C'est un enchaînement amusant et qui s'apprend assez vite, que l'on retrouve traditionnellement dans nos soirées swing contemporaines, particulièrement lorsqu'il y a un orchestre en direct. Par la suite, le « Shim Sham » s'étendit au monde de la danse swing et fut dansé dans les soirées dansantes à la fois par les danseurs à claquettes et par les danseurs de swing (et en particulier de Lindy Hop). Comme le Lindy Hop s'endormit durant les années rock et disco, le shim sham survécut aussi en sommeil dans le milieu des claquettes. Le shim sham est aujourd'hui traditionnellement dansé à la fin d'une soirée swing. Les danseurs se mettent face à l'orchestre pour faire ce shim sham en guise de remerciement pour la musique sur laquelle ils ont dansé toute la soirée. 18 C’est une danse de rue qui s'est développée dans la communauté noire américaine de Harlem (New York) vers la fin des années 1920, en parallèle avec le jazz et plus particulièrement le swing. Le Lindy Hop est un mélange de plusieurs danses provenant des quatre coins des États-Unis à partir des années 1900, principalement le charleston, Le Lindy Hop utilise les mouvements improvisés des danses africaines avec la discipline de la structure en 6 et 8 temps des danses européennes. Le Lindy Hop est un mélange de danse en couple et séparée, venant de ses origines métissées. Les danses africaines séparent habituellement les hommes des femmes. La danse en couple est typiquement européenne clip, le danseur effectue une figure au sol très fréquente chez les danseurs de Hip Hop http://www.youtube.com/watch?v =14QEoEIvUuk L'origine swing du Hip Hop Le Charleston L'histoire commune du Hip Hop nous dit que cette culture (qui inclut la danse du même nom) est née dans les années 1970 dans le Bronx au sein de la population afro-américaine qui organisait fréquemment des fêtes d'immeubles (les "block parties"). Plusieurs courants de musique et de danse s'y sont mêlés et l'on a ainsi vu se développer la breakdance (aussi appelé le break), danse du sol qui a atteint la France dans les années 80. Mais le break n'est pas le seul style présent dans la danse Hip Hop, on y trouve aussi des danse debout, le Popping, le Locking, le Boogaloo, la danse au sol, etc. De nos jours, le Hip Hop se laisse influencer par la salsa dans certains jeux de jambes euxmêmes issus de la danse swing en solo. On y voit déjà quelques points communs entre le Lindy Hop et le Hip Hop : origine afro-américaine à New York, multitude d'influences, jeux de jambes en commun, etc. Pour ce qui est du travail au sol, le Lindy n'en comporte que très peu. Regardez ce clip de 1940 où les Mills Brothers chantent le titre Caravan. Des danseurs se succèdent et si vous regardez bien aux alentours d'1’50 du Danse née chez les Noirs des états du Sud des États-Unis. La ville de Charleston (Caroline du Sud) lui a donné son nom. Le Charleston est à l'origine de la plupart des danses modernes, construites sur les rythmes négro-américains et dans lesquelles les figures improvisées tiennent une place importante, avec parfois des mouvements acrobatiques inspirés des danses africaines, antillaises, etc. Sous sa forme théâtrale, le Charleston fut dansé pour la première fois au New Amsterdam Theâtre de New York le 20 octobre 1923, par Ned Wayburn (revue The Follies). En 1925, Robert Ciel le faisait connaître au public parisien (première Revue nègre, au Théâtre des ChampsÉlysées, avec les débuts de Joséphine Baker). Le charleston devint alors une danse de société à 4 temps, où les temps forts sont accentués. 19 Propositions pédagogiques Différentes pistes pédagogiques peuvent être exploitées dans le prolongement de cette expérience artistique. Il est important de commencer par procéder à une restitution du concert avec l’ensemble de la classe. Exprimer son ressenti (à l’écrit, à l’oral, par le dessin…) et argumenter celuici font partie intégrante de la formation du jeune spectateur. Les élèves peuvent aussi envoyer leurs commentaires au service des publics de l’Arsenal – Metz en Scènes à l’adresse suivante : [email protected]. Une sélection de messages sera mise en ligne. → Opéra Porgy and Bess, et son thème principal, ségrégation et discriminations raciales → Le cinéma des années 1920-1930 : du cinéma muet au cinéma parlant, Charlie Chaplin… Axes de travail et thématiques à aborder en classe : En arts plastiques : Travail sur l’amalgame, l’accumulation, le collage. Différentes thématiques pourront être abordées en classe pour resituer le contexte historique des œuvres de Gershwin et ainsi comprendre dans quel état d’esprit Dominique Hervieu et José Montalvo ont abordé la pièce. → Quelques thèmes musicaux de Gershwin : The man I love, berceuse de Summertime, Strike up the band, I got plenty → Grands artistes du jazz au début du XXe siècle : Duke Ellington, Billie Holiday, Louis Armstrong → Translation constante entre art majeur et art mineur, musiques savantes et traditionnelles, populaires et religieuses avec naissance de formes musicales nouvelles comme le ragtime, le blues, les negro-spirituals puis le jazz. → Mélange de l’art et du divertissement dans notre société. Des approches pédagogiques pour la réalisation de certaines activités : En éducation physique : Clin d’œil aux danses émergentes dans les années 30 aux Etats Unis comme le Shim sham, le Charleston, le Lindy Hop… Le corps, vecteur de communication (regard, émotions, contact) En vie de classe / vivre ensemble : L’art de la rencontre, avec l’autre, avec soi et avec son environnement, la relation entre dedans et dehors : soi à l'autre / soi à l'espace / intérieur/extérieur, la diversité des identités, l’ouverture aux autres, à leurs différences. En éducation musicale : → L’influence des musiques populaires sur les musiques savantes chez des compositeurs tels que Bartók, Bernstein, Brahms dans ses Danses hongroises, ou Ravel dans son concerto en sol dont le premier mouvement est particulièrement influencé par le Jazz. → Travail du chant Summertime (partition ci-dessous) → Ecouter la chanson l’heure d’été de Grand Corps Malade avec l’intégration de Summertime. On retrouve là un cas de métissage. 20 21 22 Pour aller plus loin… Marie Romain, La danse à l'école primaire, Retz, (2001) Proposition d'une démarche d'apprentissage autour du processus de création à travers des séquences d'activités à mettre en œuvre dans le cadre de projets pédagogiques. Bibliographie : Denis Jeambar, George Gershwin, Edition Mazarine, 195 p. (1998) Jean-Christophe Marti, Greshwin, Edition Gisserot, collection Pour la musique (2000) Claude Noel, La mallette à danser [Livre]. CRDP de Franche-Comté (Besançon) / Centre Chorégraphique national de Franche-Comté (Belfort), (2005). Mildred Clary, Une rhapsodie américaine, Edition Pygmalion (2005) Christian Rolland, Les bases du Lindy hop et du balboa, Christian Rolland éditions, (2010) Discographie : Jackie Lascar, La danse à l'école : pour une éducation artistique, L'Harmattan, (2000) Comment aborder la danse avec sa classe, comment susciter et maintenir le plaisir de danser, comment aller de l'exploration à la chorégraphie, comment construire un partenariat culturel ? Katia et Marielle Labèque / Rhapsody in blue Gershwin DVD, Porgy and Bess Les 51 plus grandes chansons, Gershwin, Goodman, Astaire, 2002 23 Bientôt à l’Arsenal Prochaines séances scolaires Jeu. 1O. O5. 2O12 1OhOO et 14hOO / Salle de l’Esplanade EAST BLOCK PARTY III Conte & Soul Toute la saison sur www.arsenal-metz.fr Arsenal Metz en Scènes Direction Générale, Jean-François Ramon Déléguée Artistique, Michèle Paradon Service des Publics, Gilles Fouquet, Salomé Mermoz Myriama Idir 3 avenue Ney F-57OOO Metz t. +33 (O)3 87 39 92 OO t. réservations +33 (O)3 87 74 16 16 24