ACTUALITE – Festival de Cannes - Aux marches du Palais

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ACTUALITE – Festival de Cannes - Aux marches du Palais
ACTUALITE – Festival de Cannes - Aux
marches du Palais
Thierry Frémeaux et Gilles Jacob
Respectivement président et délégué général du Festival de Cannes, Gilles Jacob et Thierry Frémaux
partagent une égale cinéphilie mise au service du plus prestigieux des rendez-vous du 7e art. Pour
cette 65e édition, ils évoquent leur parcours et l’évolution du cinéma dont ils sont les grands
témoins. Entretiens réalisés par Dee Brooks et Dominique Martinez
Vous avez passé une grande partie de vos jeunes années dans le quartier des Minguettes, où vous
avez mené un parcours d’éducation populaire : étudiant en histoire sociale, prof de judo, créateur
de Radio Canut. Aujourd’hui, Thierry Frémaux, entre vos fonctions à l’Institut Lumière et au
Festival de Cannes, quel regard portez-vous sur les cités, y conservez-vous des attaches ?
Thierry Frémaux : Oui, l’an dernier je suis allé voter aux Minguettes ! Je ne devrais pas le dire, car il
faudrait que je me fasse rayer des listes et que je vote près de mon domicile à Lyon ! J’habite près des
gares, à Paris et à Lyon, puisque ma vie se partage entre les deux villes. J’ai gardé des attaches aux
Minguettes. Mes amis y sont toujours, mes frères et sœurs ne sont pas loin. C’est une ville où j’ai
vécu de 1973 à 2005 et je considère ma vie lyonnaise comme étant un tout. Il y a quelque chose d’un
rapport au monde dont j’ai besoin et qui passe par Vénissieux. A fortiori, quand on est au Festival de
Cannes, où tout peut vite se dérégler dans le rapport aux gens ou à la vie quotidienne. Toute ma vie
n’est pas là, mais je ne reste pas plusieurs semaines sans y aller. J’y suis arrivé avec mes parents l’été
1973 à une époque où c’était bien d’aller aux Minguettes. On sortait à peine des années soixante, il y
avait encore des bidonvilles partout et j’ai vu se bâtir la ZUP des Minguettes, comme celles de Vauxen-Velin ou de Rilleux. D’ailleurs, je continue à dire la ZUP et non pas les cités !
À l’époque, c’était considéré comme des logements sociaux de luxe. Pour la première fois, nombre
de gens y habitaient dans des appartements avec l’eau courante… Tous mes copains d’enfance,
d’école, que je vois toujours, étaient des fils d’Italiens, de Portugais, d’Espagnols, immigration
amenée là notamment par les usines Berliet. Oui, j’ai vu évoluer la ZUP. Il y avait un mélange social et
humain de populations très fort. Je me souviens des « Zupiades », c’étaient des concours de boules
(et de pastis) pour les gens des quartiers... J’étais en effet judoka, mais je faisais du judo à SaintFonds, dont la mini-ZUP, les Clochettes, voisine avec les Minguettes. Dans les années 1980, je suis
devenu étudiant en histoire, je gagnais ma vie le soir comme professeur de judo et la journée, j’étais
soit dans les archives, soit à la maison où je rédigeais mon mémoire de licence, puis ma maîtrise, puis
ma thèse. Mes parents sont retournés dans le Dauphiné dont ils étaient originaires et je suis resté,
mes frères et sœurs aussi. On a partagé un appartement où on a vécu à plusieurs garçons dans un
même immeuble pendant des années. Et en promenant mon chien, j’ai vu la ZUP changer beaucoup
dans les années 1980. Tout ce qui s’est passé après, à partir de l’été 1981, montrait des problèmes
sociaux, une paupérisation énorme. Il y avait aussi des journalistes qui donnaient de l’argent à des
jeunes gens pour qu’ils aillent brûler des voitures afin de faire la une de quelques journaux à
sensation… Ensuite, les gens arrivés dans les années 1960 ont acheté des maisons dans le quart sudest de Lyon. Mes amis d’école étaient d’origine italienne, portugaise, espagnole, mais aussi d’Algérie,
du Maroc, de Tunisie et, avec la guerre du Viêtnam et les boat people, quelques Cambodgiens. Mais
parmi ceux originaires du Maghreb, certains n’ont jamais travaillé. Ils étaient aussi bons que nous à
l’école, réussissaient aussi bien aux examens, mais ils n’ont pas trouvé de travail.
Parce qu’ils ont été discriminés ?
Thierry Frémaux : Clairement, ils ont été discriminés et aussi écrasés par des vies de famille lourdes,
devant s’occuper de leurs frères et sœurs, voire de leurs parents. On présente cette année à Cannes
un film qui parle de Marrakech, du Maroc, qui dit le chômage, le désœuvrement. Aussi une forme
d’inculture, de soumission de la jeunesse à des codes culturels qui sont ceux de la société de
consommation, ceux de l’argent qui en font des êtres relativement vulnérables à toutes les
idéologies, quelles qu’elles soient. Les copains dont je parle ne sont pas nécessairement devenus ça,
au contraire, c’étaient parfois les juges de paix, les grands frères. À la ZUP, on s’est rendu compte
d’abord d’une présence de la religion qui n’existait pas avant dans Vénissieux, ville communiste et
complètement laïque. Il y a eu la marche des Beurs de 1986 qui a été importante. On a vu qu’il y
avait là des gens qui théorisaient cette situation, qui ne se laissaient pas faire. En même temps, il ne
fallait pas méconnaître les problèmes de violences vis-à-vis des femmes, entre les forts et les faibles.
Mais, et ça a fait le miel d’un certain nombre d’hommes politiques, il faut aussi se garder des
jugements hâtifs, de la stigmatisation sur les comportements « des petits voyous de la ZUP ». J’ai
toujours été gêné à la fois par cette stigmatisation, mais aussi par un aveuglement qui consistait à ne
pas donner le sentiment de critiquer. Il ne fallait pas stigmatiser, mais aussi dire qu’il y avait des
problèmes sociaux.
Puis peu à peu les immeubles ont été entourés de barrières, les barrières renforcées de portes
automatiques, puis de codes. Tout ce qui faisait le charme de la ZUP des années 1970 a disparu avec
un peu de paranoïa. En même temps, je garde des souvenirs éblouissants de la vie que j’ai menée làbas. Moi qui étais cinéphile, j’allais au cinéma Gérard-Philipe, au sommet des Minguettes, puis j’ai
découvert le centre de Lyon, où se trouvaient les salles art et essai. Ce que je suis modestement et
dans mes rapports avec les gens, vient de là aussi et c’est aux Minguettes que je l’ai appris.
Depuis le début des années 2000, le social semble plus présent dans le cinéma français. À cet
égard, le documentaire a beaucoup œuvré pour que cela ne soit pas un contexte mais un sujet
présent désormais aussi dans la fiction. Êtes-vous sensible à cette évolution ?
Thierry Frémaux : Au Festival de Cannes, on nous fait parfois le procès d’être un festival trop
politique. Ce à quoi on répond que ce n’est pas nous qui sommes politiques, mais les cinéastes. Sur
les 1 500 films qui sont proposés, nous retenons une sélection de 50, 60 films qui est le reflet de l’état
de la création en France et à l’international. Or, les cinéastes ne vivent pas en dehors du monde, ils
font parfois des films purement romanesques, des films d’amour, des comédies, mais très souvent ils
font des films qui parlent des réalités sociales de leur propre pays. Nous, on s’en fait l’écho. On a dit
souvent que le cinéma français n’était jamais très politique alors que le cinéma américain l’était très
directement. Il y a eu des films sur la guerre du Viêtnam pendant la guerre du Viêtnam, mais il y a eu
des films sur la guerre d’Algérie, sauf qu’ils ont été largement interdits, notamment par le
gouvernement gaulliste pendant les années 1960. Le cinéma doit désormais lutter avec d’autres
réalités de l’image, comme la télévision, les nouvelles images issues d’Internet. Il lui faut se
crédibiliser. Pour crédibiliser un personnage, il faut le placer dans son environnement social et
souvent ces films sont extrêmement puissants. L’année dernière, on a montré un documentaire qui
s’appelle Tous au Larzac, qui évoquait la décennie 1971/1981, parlant de la résistance des paysans du
Larzac contre la réquisition de leurs terres pour l’extension d’un camp militaire, c’est un film
formidable. C’est surtout au Larzac qu’est né en France l’altermondialisme et de là qu’est parti le
questionnement sur le gaz de schiste… Le cinéma sert à questionner le présent ou l’avenir. Le public
est aussi devenu plus exigeant.
Vous avez accepté, cette année, d’être le parrain d’honneur de « Visions sociales », le festival
organisé par la CCAS. Que représente pour vous cette manifestation « off » gratuite et accessible à
tous ?
Thierry Frémaux c Le Festival de Cannes est gratuit aussi, mais c’est un festival de professionnels. Il y
a des places distribuées par la ville de Cannes et aussi Cannes Cinéphiles, qui fédère les associations
de cinéphiles de la France entière. Je n’ai pas oublié la première fois que je suis venu, en 1979, de ma
ZUP des Minguettes, en voiture, avec des copains. C’était l’année d’Apocalypse Now. On n’a pas
réussi à voir un seul film, mais « on y était ». On allait dormir le soir dans notre Ford Transit sur une
aire d’autoroute. J’en ai d’ailleurs gardé une tendresse pour les gens qui sont au balcon de la grande
salle, les « Enfants du Paradis », au poulailler, car combien de fois on a essayé d’y entrer… Je me
disputais beaucoup avec les appariteurs pour entrer. D’ailleurs, quand j’ai commencé à travailler à
Cannes j’espérais qu’aucun ne me reconnaisse !
« Visions sociales » fait partie de ces manifestations parallèles au festival, qui témoignent, parfois
presque plus que ceux pour lesquels le festival est un travail et qui ne se rendent plus compte, à quel
point c’est formidable de pouvoir voir quatre, cinq, six films par jour. « Visions sociales », ce sont des
gens généreux, qui y croient, cinéphiles, comme les spectateurs de Cannes Cinéphiles, auxquels je
vais régulièrement parler, car ce sont des spectateurs « normaux ». Souvent les gens pensent que
Cannes, ce sont des privilégiés qui se gobergent pendant une quinzaine de jours pendant que les
autres triment. Les malheurs du monde sont sur l’écran et ils en parlent devant une coupe de
champagne… Oui, on en parle devant une coupe de champagne et oui, il y a les malheurs du monde
sur l’écran. Les codes sociaux du festival de Cannes sont ainsi. Mais à Cannes, les gens sont là parce
qu’ils aiment le cinéma et ne parlent que cinéma. Il faut aimer ça pour s’enfermer toute la journée
alors que c’est bientôt le début de l’été sur la Côte d’Azur ! Oui, sur l’écran, c’est l’histoire du monde !
Le dernier film de Ken Loach, par exemple, montre les gens qui préfèrent accomplir des travaux
d’intérêt général que de purger une peine de prison et vont s’associer à une bande de Pieds Nickelés
à qui il va arriver tout un tas d’aventures. Dans la salle, il y a des auteurs, des réalisateurs, des
scénaristes, des distributeurs que ce film peut inspirer, qui vont se dire, « On peut faire ce type de
cinéma ».
L’Afrique est toujours peu représentée. Le Festival de Cannes joue-t-il un rôle pour encourager les
cinémas des pays les plus défavorisés ?
Thierry Frémaux c Il y a le film égyptien de Yousry Nasrallah, le film de Moussa Touré La pirogue à Un
Certain Regard. L’Afrique est en difficulté pour faire des films, peu de salles, beaucoup de piratage, or
le cinéma s’apprend dans les salles. Mais ici, le monde entier va voir ces films, et nous nous rendons
dans tous les pays. Il faut rappeler que nous avons un rôle humaniste qui d’ailleurs est inscrit dans les
statuts de l’association du Festival de Cannes, né après la guerre et dans la dynamique de la
reconstruction européenne. Nous sommes une association loi 1901, sans but lucratif, au service du
cinéma. Nous ne faisons aucun bénéfice et ne touchons aucun pourcentage sur la masse financière
qui s’échange à Cannes.
Depuis quelques années, le cinéma est confronté à d’importantes mutations techniques. La
transformation des outils modifie-t-elle la manière dont les auteurs font des films ? Ces avancées
techniques provoquent-elles des changements dans l’organisation du Festival ?
Thierry Frémaux : Il est vrai que, lorsque nous parviennent des dizaines de petits films tournés avec
des petites caméras numériques, certains très bien, il nous arrive de dire : « Vive Max Ophüls », vive
les comédies musicales américaines, vive Lawrence d’Arabie… Nous avons été obligés de créer un
troisième comité de jeunes gens très cinéphiles pour voir ces films arrivés de nulle part. Ils ont pour
mission de nous dire, même dans un film pas bon, s’il y a une scène intéressante, prometteuse.
DVD, VOD, chronologie des médias rapprochant la sortie en salles de la parution DVD : on peut
désormais voir nombre de films sans se déplacer. Cela va-t-il changer la cinéphilie et, pour vous, le
risque d’éloigner les spectateurs des festivals existe-t-il ?
Thierry Frémaux c La cinéphilie, au sens d’une culture, d’une érudition, d’un savoir accumulé a
considérablement changé. Aujourd’hui, tout est mondial, quand un film est bon, ça se sait vite, et
nous, on est obligé de le savoir. D’un autre côté, aujourd’hui, on peut devenir cinéphile sans avoir à
faire comme Bertrand Tavernier qui, étant jeune, se déplaçait à Paris, Lyon ou Bruxelles pour voir des
films. Un jeune dans une petite ville de province peut se procurer beaucoup de films ! Sauf que
Bertrand Tavernier avait derrière lui trente ans de cinéma parlant et que maintenant, la production
accumulée est énorme.
Je pense que l’invention de Louis Lumière est inaliénable, irrésistible et indépassable. Godard avait
coutume de dire que « le cinéma crée de la mémoire et la télévision crée de l’oubli », il y a un peu de
ça. Je me souviens de tous les films que j’ai vus en salles, car il y a un rapport intime. Je pense que la
salle et à fortiori les festivals de cinéma ne disparaîtront pas, mais prendront d’autres formes. Un
festival comme Cannes, c’est comme un concert de rock. J’adore Bruce Sprinsgteen, j’ai tous ses CD,
mais en scène, c’est autre chose ! Le cinéma en salles permet aussi de mesurer l’écho et l’impact d’un
film sur des gens tous différents.
Que pensez-vous de l’état de la production en France, et notamment des difficultés à produire les
« films du milieu » ? Pensez-vous que les institutions culturelles sont assez présentes pour soutenir
ces productions ?
Thierry Frémaux c Le système français qui consiste à faire en sorte que l’argent du cinéma retourne
au cinéma n’est pas un système de subvention. Et ce système marche bien. Il y a quelque chose
d’une communauté, d’une rétrocession au cinéma, d’une aide de l’industrie, le président du CNC est
un ministère de la culture du cinéma qui protège les salles, qui met La règle du jeu de Renoir au
programme du bac. Louis Delluc ou Henri Langlois disaient que le cinéma fait partie de nos vies. Sans
la vie, l’apprentissage et la connaissance du monde que représente le cinéma, nous, nos enfants ne
serions pas les mêmes. Dans la fabrication intellectuelle, le cinéma a encore toute sa part.
Vous avez œuvré pour la présence du cinéma d’animation au Festival de Cannes, veillé à
l’articulation de la sélection officielle avec les sections parallèles, travaillé à la présentation de
films restaurés… Quel sera votre prochain défi ?
Thierry Frémaux : Pour le Festival de Cannes, le défi est de continuer à ouvrir son avenir. Le rapport
aux festivals n’est plus le même, il y en a maintenant partout. Il va falloir à réfléchir aux formes
d’autres actions comme la Ciné­fon­dation, s’ouvrir plus à l’animation, au documentaire.
Gilles Jacob, vous êtes entré au Festival de Cannes en 1976 comme délégué général après avoir
mené des « vies jumelles » entre le monde de l’entreprise et le cinéma. L’expérience acquise dans
le premier domaine vous a-t-il servi pour le second ?
Gilles Jacob : Cela m’a servi énormément et c’est là que Robert Favre Le Bret, le président de
l’époque, a fait preuve d’une véritable prémonition : il voulait un critique qui n’ait pas de chapelle et
soit modéré dans ses appréciations. Il pressentait que les temps allaient devenir difficiles, que le
festival allait devoir trouver les moyens de son développement et qu’il allait falloir gérer, administrer,
s’étoffer, financer ses actions culturelles, engager, former et diriger une équipe qui allait croître et
embellir, bref, des fonctions de chef d’entreprise.
La particularité du festival qui le rend encore plus complexe à manier est que nous passons d’une
équipe à l’année de 20 personnes à un personnel total de 1 500 personnes pendant le mois de mai,
donc une petite entreprise qui devient pour un mois une entreprise moyenne et qui, de plus, a une
activité saisonnière, dans un espace opérationnel qui n’est pas celui de sa résidence et enfin dans un
environnement particulièrement concurrentiel. C’est tout cet ensemble que je viens d’évoquer qui
fait à la fois l’intérêt et la difficulté de l’enjeu.
En 2001, vous devenez président du Festival et créez la fonction de délégué artistique que vous
confiez à Thierry Frémaux. Quelles sont les raisons de cette création ?
Gilles Jacob c Il est très difficile de décider s’il faut être deux ou trois dirigeants d’une Association
comme celle de Cannes, tant il y a du travail avec des pointes extrêmes (15heures par jour 7 jours sur
7 pendant 3 mois). Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut le faire seul. Il suffirait qu’un incident de santé
pas même grave vous arrive, disons, le 20avril, pour que le festival ne puisse se dérouler
convenablement, tant l’expérience, les relations humaines et la rapidité de décision ne peuvent
s’acquérir en un clin d’œil. Au début de ma présidence, j’ai pensé qu’il fallait former deux directeurs :
un en charge de la sélection, un en charge de tout le reste. Ainsi le travail si délicat, si chargé de
doutes, de moments d’exaltation et de déceptions qu’est cette profession atypique ne serait-il pas
perturbé par tout le reste. D’où la création d’un poste dédoublé : un directeur artistique, un directeur
général. J’avais pris soin de séparer les activités pour qu’aucun des deux ne se sente
hiérarchiquement dominé par l’autre. C’était compter sans la nature humaine, les susceptibilités et
ce besoin très festivalier d’exister, au lieu, prioritairement, de faire vivre la manifestation en se
rangeant à son service exclusif…
C’est pourquoi au bout de quelques années, j’ai proposé au Conseil d’administration de revenir à la
formule antérieure avec un président et un délégué général responsable de tous les dossiers au
quotidien ne relevant pas du domaine réservé du président. J’ai conservé le conseil d’administration,
les relations avec les pouvoirs publics, les invitations à Cannes, les partenariats, le suivi du budget,
des dépenses, de la fiscalité. Thierry Frémaux m’a été recommandé par plusieurs professionnels en
qui j’ai confiance et, par ailleurs, je connaissais son travail et sa réussite à l’Institut Lumière, à Lyon.
La Caméra d’Or, Un Certain Regard, Cinéfondation, la réduction de la durée du Festival et son
exigence d’indépendance, le film surprise, le double comité de sélection, vous avez notablement
fait évoluer le Festival de Cannes. De quoi êtes-vous le plus fier ?
Gilles Jacob : Vous en oubliez : la Résidence de la Cinéfondation, l’Atelier, les leçons de cinéma, les
films de montage, les cérémonies, les anniversaires, les livres, les grands partenariats. Ce dont je suis
le plus fier, c’est la cohérence de l’ensemble au service prioritaire du renouvellement des
générations de cinéastes : tout tourne autour de cet axe. Et fier aussi d’avoir aidé le festival à
conquérir son indépendance, y compris financière.
En 2007, le Festival a invité Bernard Thibault. Et la Caisse centrale d’activités sociales des
électriciens et gaziers (CCAS) propose parallèlement « Visions sociales ». Êtes-vous attentif à ces
passerelles entre le cinéma et le monde du travail ?
Gilles Jacob : Bien entendu. C’est drôle, cette question, car j’ai justement reçu ce matin une lettre de
Bernard Thibault qui ne peut accepter mon invitation pour des raisons bien compréhensibles. Ce
n’est que partie remise, j’espère. La CCAS est proche de nous, comme nous d’elle, et deux syndicats
des personnels du spectacle sont membres de notre conseil d’administration. Enfin, le choix de
certains films en sélection ne laisse pas de doute sur notre implication concernant les problèmes du
monde du travail.

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