Silicon Bangalore
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Silicon Bangalore
Développement Silicon Bangalore Valérie Khong Journaliste, Canal+ Depuis 1991, l'Inde développe une industrie de conception de logiciels. Elle est aujourd'hui le deuxième exportateur mondial dans ce secteur, avec 6 milliards de francs de chiffre d'affaires ; un chiffre d'affaires qui augmente de près de 60% chaque année ! Bangalore réalise à elle seule un tiers de ce chiffre, à tel point qu'on la surnomme la deuxième Silicon Valley. Vitrine de cette Inde futuriste : Electronic City, à 15 km de la ville. Un parc de 200 hectares où sont concentrées une centaine de CANAL+ Bangalore n'est pas une ville comme les autres. C'est la capitale indienne de l'industrie de pointe : électronique, télécommunications, recherche spatiale et surtout informatique car c'est dans ce domaine que la réussite est la plus éclatante. sociétés de services et d'ingénierie informatiques (SSII), des sociétés étrangères qui y ont délocalisé leur service informatique (comme Motorola, Hewlett Packard ou Siemens) et des entreprises locales. Parmi elles, Infosys est le symbole de cette réussite. Taux de croissance annuel : 60%. Ses clients : Nestlé, Reebok ou encore l'un des plus gros courtiers de Wall Street. Infosys leur fournit des services informatiques et conçoit leurs logiciels. Pendant qu'il fait nuit à New York, les ingénieurs d'Infosys peuvent, par exemple, réparer une panne informatique. Grâce aux liaisons satellites et à Internet, la communication entre Infosys et ses clients est instantanée. « Nous apprenons vite : c'est la force des informaticiens d'Infosys », nous explique l'un d'eux, « nous prenons en charge leur système informatique, nous en assurons la maintenance et nous les développons aussi ». CANAL+ Les nuits de Bangalore ne ressemblent pas aux nuits indiennes. Dans la capitale du Karnataka, le NASA café, décor de navette spatiale, show laser et musique techno, cotoient le cybercafé où se pressent les étudiants : ambiance concentrée et studieuse. Les 1800 ingénieurs qui travaillent chez Infosys sont recrutés sur examen puis for- 95 mes plusieurs mois par l'entreprise : la crème des informaticiens. Infosys l'indienne a tout d'une société californienne : bureaux paysagers, salle de sports, court de tennis et espaces vert ; chemises blanches et cravates se changent en T-shirt et baskets en fin de semaine. Les informaticiens indiens ont l'avantage d'être excellents, bon marché, anglophones et surtout nombreux dans un contexte de pénurie mondiale. « Il y a 1 600 universités qui produisent 80 000 diplômés chaque année. Il n'y a pas beaucoup de pays dans le monde qui produisent autant d'informaticiens » remarque Dr. Bhagavathula, directeur de Daimler-Benz. L'entreprise allemande a carrément installé son deuxième centre de recherche à Bangalore pour alimenter en innovations technologiques ses cinq usines asiatiques. Il est vrai que l'Inde compte six universités de renommées mondiales et dix instituts qui n'ont rien à envier à leurs équivalents occidentaux. L'Institut indien des sciences de Bangalore est la meilleure université du pays ; il travaille en accord avec les établissements les plus cotés du monde entier, comme Harvard ou Polytechnique. Autres raisons du choix de l'installation de Daimler-Benz en Inde : un régime politique démocratique stable et une classe moyenne de près de 400 millions de consommateurs potentiels. à Bangalore, l'excellence indienne s'ex- 96 futuribles 2000, CANAL+ CANAL+ N.S. Raghavan, directeur adjoint affiche une ambition sans limite : « Notre but est de devenir la société informatique la plus respectée du monde. Nous concurrençons les meilleures compagnies, les américaines comme les européennes.» prime aussi dans l'industrie de pointe. Chez Wipro, filiale du géant américain General Electric, le produit phare est un échographe portable. La conception et la fabrication de ce bijou technologique sont à 100% indiennes. Wipro vend ses appareils médicaux 2 0 % moins chers que ses concurrents occidentaux et entend ainsi conquérir les marchés du tiers-monde. Le PDG, D.A. Prasanna pense que le progrès technologique réalisé par Wipro peut agir comme une locomotive accélérant la modernisation d'une société indienne encore ancrée dans ses traditions. « Je pense que la technologie nous aide à surmonter des barrières sociales dans une société telle que la société indienne. Il y a un très grand espoir pour nous de devenir un acteur économique de premier rang dans le monde. » Un espoir tourné vers le ciel, car l'espace fait aussi décoller Bangalore : l'Indian Space Research Organisation y a installé son siège. C'est aussi là que sont fabriqués les satellites indiens — le premier a été mis en orbite en 1975 et ils ont depuis démontré leurs performances. Le budget de l'Inde consacré à l'espace est le huitième du monde. « L'espace attire la nouvelle génération qui est enthousiasmée par les promesses d'aventures et d'exploration qui lui sont offertes, sourit Dr Kasturirangan, l'un des directeurs de l'ISRO, c'est certainement une nouvelle dimension du pays qui rassemblera le peuple. » « Silicon Bangalore », figure de proue d'une Inde qui marche, du savoir-faire et de la technologie, annonce-t-elle l'Inde du futur ? Dans vingt ans, peut-être, au sud de l'Asie, un tigre se réveillera.