Plein feu sur les projets de réforme du lycée
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Plein feu sur les projets de réforme du lycée
éducation & pédagogie RÉFORME DU LYCÉE ▼ 18 Isabelle BOURHIS Plein feu sur les projets de réforme du lycée Deux rapports sur les projets d’architecture générale du lycée ont été publiés : le rapport de Richard DESCOINGS, directeur de Sciences Po, remis le 2 juin au Président de la République, et le rapport publié le 27 mai, de Benoist APPARU, député UMP et rapporteur de la mission parlementaire sur la réforme du lycée, que le groupe socialiste a refusé de valider, faisant part de ses propres propositions dans un rapport annexé. Le délégué interministériel à l’orientation, Bernard SAINT-GIRONS, a adressé au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie PECRESSE, un rapport d’étape sur l’articulation du lycée et de l’enseignement supérieur dans le cadre de l’orientation active. Le SNPDEN a été auditionné lors de l’élaboration de chacun des rapports. RAPPORT DE RICHARD DESCOINGS Après une consultation de quatre mois, l’analyse du rapport de Richard DESCOINGS montre la nécessité de faire évoluer la situation actuelle du lycée : le choix de l’immobilisme serait « explosif » au regard du degré d’inégalité sociale entre les voies et les filières de formation. Il soumet plusieurs choix en termes d’objectifs et de moyens, pour le lycée : une réforme autour de questions urgentes dont l’évaluation serait réalisable à court terme, et une refondation nécessitant une vaste concertation autour des sujets plus conflictuels du temps scolaire, de la nature des missions et des services des enseignants. Le rôle du lycée est décliné en trois points : transmission des savoirs et des connaissances, construction de la citoyenneté et insertion professionnelle. La question essentielle de l’insertion professionnelle concerne tous les bacheliers quelles que soient les voies et les séries, et pose la question des finalités du lycée. Richard DESCOINGS fixe deux objectifs urgents à la réforme : améliorer l’orientation et rééquilibrer les filières. • Repenser le système d’orientation, une priorité - de la fin de 3 e à l’enseignement supérieur, l’orientation est un processus qui doit s’inscrire dans un temps long, inclus dans le temps scolaire. Plusieurs pistes sont à développer : référent adulte, temps banalisé en 3e, possibilités de stage en entreprise pour les lycéens, journée de découverte au lycée, parrainage entre élèves, carnet de l’orientation, soutien « sur mesure », formation continue accrue des enseignants, partage des services des enseignants entre le secondaire et l’enseignement supérieur et développement du partenariat secondaire supérieur. ingénieurs, est nécessaire et doit constituer une filière de pointe. En matière d’accès à l’enseignement supérieur, les classes préparatoires technologiques doivent être développées, la part des élèves accueillis en DUT et BTS augmentée selon des objectifs chiffrés. • Valoriser les voies professionnelles et technologiques et équilibrer les voies générales. Concernant les filières de la voie générale, le lycée doit garantir la diversité et conserver un principe d’éventail de possibilités de spécialisation. La série littéraire doit être valorisée, notamment en diversifiant le champ des études supérieures, en intégrant un enseignement de culture scientifique, en renforçant l’apprentissage des langues ou l’initiation au droit. Richard DESCOINGS propose aussi un rééquilibrage des coefficients entre les disciplines du baccalauréat. Richard DESCOINGS prône une vraie seconde de détermination, comportant des enseignements de découverte obligatoires, l’introduction d’une culture technologique commune. La filière technologique doit être maintenue distincte de la voie générale, et la rénovation de la filière STI, dont la vocation est de former des cadres intermédiaires et des En matière de politique d’établissement, le rapport regrette une politique interministérielle qui « a conduit à priver de son sens l’autonomie des établissements », alors que l’autonomie juridique est pleinement reconnue, et prône de véritables marges de manœuvre pour les équipes dans le cadre d’une politique déterminée et durable. DIRECTION N° 170 JUILLET/AOÛT 2009 ▼ RÉFORME DU LYCÉE La confiance doit trouver sa traduction dans la gestion des établissements par des espaces d’autonomie et d’initiative locale qu’il faut laisser aux équipes, dans un cadre national établi. Les innovations pédagogiques doivent être valorisées et la formation continue doit favoriser la modernisation. Les programmes nationaux, laissant davantage de souplesse pédagogique aux enseignants, en renforçant les liens entre les disciplines, pourraient donner plus de sens aux enseignements, alléger les emplois du temps et motiver davantage les élèves. Richard DESCOINGS préconise un rôle accru des lycéens, notamment dans leur évaluation, en participant aux conseils de classe, mais aussi en développant l’évaluation de leurs compétences pour leur permettre de trouver des points d’appui dans leur formation, et leur autonomie, en les accompagnant, dès la seconde, de cours de méthodologie, en diversifiant les formes d’apprentissage et en renforçant leur rôle dans les instances du lycée. RAPPORT DE BENOIST APPARU Le rapporteur en appelle à une réforme du lycée ambitieuse, rapide et à moyens constants dont la mise en œuvre débuterait en 2010 et s’étalerait sur 2, 3 ou 4 ans. La finalité du lycée étant de préparer les élèves à l’enseignement supérieur, la scolarité serait définie autour de deux blocs : les années du socle commun du primaire jusqu’en 3e, le cycle d’entrée dans l’enseignement supérieur débuterait dès la première, la classe de seconde permettant la détermination. Le principe de semestrialisation est repris pour favoriser le changement et la découverte (possibilité de soutien en fin de premier semestre). Un professeur référent, et volontaire dans un premier temps, pourrait accompagner l’élève dans sa scolarité. Dans le but d’améliorer la fluidité, des passages suspensifs sont proposés : sas de réorientation, de remise à niveau, animé par des enseignants volontaires, sur une période d’un mois pendant les congés scolaires avec un conseil de classe avant la rentrée pour valider le passage en première. La voie technologique (filières STI, ST2S, STL et STG) est maintenue ; la mission recommande de réformer rapidement la filière STI et suggère l’instauration d’un quota de 50 % de bacheliers technologiques en IUT. La spécialisation est renforcée en terminale, correspondant à 50 % du temps élève. En matière de pédagogie, les logiques de projet et le travail en petits groupes doivent être privilégiés. Les enseignements disciplinaires pourraient être réduits, en lien avec une refonte et un allégement des programmes et l’année scolaire allongée de deux semaines. Les enseignements seraient organisés autour d’un triptyque : culture générale, approfondissement, accompagnement. Le baccalauréat évoluerait vers quatre épreuves terminales écrites en histoire géographie, philosophie (le français demeurant en première), et deux, liées à la spécialité, une épreuve à fort coefficient portant sur la présentation d’un dossier réalisé dans le cadre de l’accompagnement, les autres épreuves relevant du contrôle continu. En seconde, classe indéterminée, le tronc commun représenterait 70 % du temps élève (français, mathématiques, histoire géographie, langues vivantes, sciences expérimentales et EPS), quatre modules d’exploration ou d’approfondissement dont deux obligatoires en SES et sciences technologiques, pour 20 %, et 10 % du temps consacrés à la méthodologie, accompagnement du projet ou travaux de recherche. L’horaire du lycéen serait de 35 heures : 30 heures en classe, dont 27 heures d’enseignement, et 5 heures de travail personnel en présence de professeurs. L a m i s s i o n p ro pose une redéfinition des missions et des services des enseignants en termes de méthodes, contenus et horaires intégrant les heures d’activités pédagogiques (aide aux devoirs, à l’orientation) ; le service d’un professeur certifié pouvant se répartir en quinze h e u re s d ’ e n s e i g n e ment et trois heures au DIRECTION N° 170 JUILLET/AOÛT 2009 titre de l’accompagnement, celui d’un agrégé serait dépendant de son activité en enseignement supérieur. Une réelle autonomie doit être accordée aux établissements dans le cadre d’une enveloppe globalisée, dont le seul cadrage national concernerait les seuils disciplinaires minimaux obligatoires, notamment sur la politique d’accompagnement et de soutien et une marge de 10 % de la DHG laissée à l’initiative des établissements, L’évaluation des établissements fondée sur des indicateurs qualitatifs pourrait entraîner le cas échéant une modification du contrat d’objectifs. Des résultats insatisfaisants pourraient avoir des conséquences sur la carrière des chefs d’établissement. En matière de ressources humaines il conviendrait d’encourager la stabilité des équipes pédagogiques, particulièrement en éducation prioritaire, d’améliorer la formation des enseignants sur l’orientation. Les conseillers d’orientation, dont les concours seraient élargis, la licence 19 RÉFORME DU LYCÉE ▼ de psychologie ne constituant plus un préalable mais dont la formation serait renforcée sur la connaissance des métiers, pourraient être placés sous la responsabilité des proviseurs, et les CIO confiés aux régions, Un grand service public de l’orientation chapeauterait l’ensemble des structures reposant sur un pilier national et un piler régional. Dans le cadre de l’orientation active, une anticipation de la procédure dès la classe de première, plus de lisibilité sur les études, de transparence sur les prérequis des formations et leurs conditions de réussite, les perspectives d’insertion, sont nécessaires. RAPPORT ANNEXÉ DU GROUPE SOCIALISTE Le groupe socialiste de la mission d’information parlementaire, présidée par Yves DURAND, a annexé sa contribution au rapport global. La première remise en cause du rapport concerne le périmètre de la mission centré sur le lycée d’enseignement général et technologique alors que la réforme de la voie professionnelle selon le groupe, se met en œuvre dans « un état d’impréparation très inquiétant ». Le groupe s’accorde sur la nécessité d’une réforme, mais montre des divergences sur les moyens d’y parvenir. Il en appelle à une véritable concertation de tous les acteurs autour des conditions de vie lycéenne (réexamen des bourses, allocation d’autonomie pour lycéens économiquement défavorisés), des savoirs nécessaires (définition du tronc commun, introduction du droit, d’une culture technologique), du métier des enseignants, (professionnalisation, prérecrutement en licence, masters enseignements avec une véritable formation en alternance, sanctuarisation des crédits de formation), des moyens pour le lycée (gel des suppressions de poste et demande d’un plan pluriannuel de recrutement). À partir d’une consultation des acteurs de terrain et du bilan des difficultés rencontrées (nombre limité de demandes de conseils à l’université, calendrier très resserré, délai insuffisant pour réorienter le projet), les propositions de Bernard Saint-Girons visent à développer la démarche d’orientation active en l’inscrivant dans un processus continu dès la classe de première. Améliorer la lisibilité, accorder davantage de temps à la maturation du projet d’études, constituent les principaux objectifs du rapport : la procédure différencierait alors quatre étapes, information, dialogue et conseil, pré-inscription, accueil et accompagnement à l’université. L’utilisation du premier conseil de classe de terminale, les entretiens personnalisés en première et terminale intégrés dans la politique des établissements, devraient permettre d’améliorer la cohérence du projet, sa faisabilité et le cas échéant sa réorientation. Le portail Admission Post Bac (APB) serait étendu à toutes les formations, y compris les IEP, écoles de commerce, et écoles relevant du secteur paramédical et social. Le comité de pilotage national serait redéfini et resserré sur les questions politiques ; le SNPDEN y siégerait es qualités. L’évolution du portail APB devrait permettre aux établissements secondaires et supérieurs, le recueil d’éléments statistiques, afin de les aider dans leur démarche d’auto évaluation. sement des acteurs sur l’accompagnement des élèves. De nombreuses propositions, issues des différents rapports, recroisent des attentes exprimées dans nos mandats. Le SNPDEN souhaite que cette réflexion soit poursuivie dans le cadre d’une réelle concertation des partenaires. Les préconisations de R. DESCOINGS en matière de gouvernance de notre ministère, doivent laisser place à cette concertation pour qu’un projet collectif se construise autour de mesures nécessaires et urgentes pouvant faire évoluer l’architecture du lycée, et rendre notre institution moins discriminante. Le lycée a besoin de se réformer, notamment dans l’objectif européen d’amener 50 % des jeunes au niveau Bac +3. Le SNPDEN soutient les initiatives qui favoriseront le lien secondaire supérieur dans des modalités applicables. Le développement du partenariat, notamment dans le cadre de l’orientation active et du plan réussite en licences entre les lycées et universités, doit concourir à la réussite de cet objectif. La simplification, notamment par la compatibilité des applications informatiques, et la dématérialisation des dossiers de candidature dans les filières sélectives, pourraient réduire les tâches administratives et recentrer l’investis- RAPPORT DE BERNARD SAINT- GIRONS Un rapport d’étape regroupant vingt-six propositions relatives à l’articulation secondaire supérieur dans le cadre de l’orientation active, a été remis à la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, par le Délégué Interministériel à l’Orientation. 20 DIRECTION N° 170 JUILLET/AOÛT 2009 ▼ RÉFORME DU LYCÉE COMMUNIQUÉ DE PRESSE - DU 2 JUIN 2009 COMMUNIQUÉ DE PRESSE - DU 4 JUIN 2009 LE SNPDEN APPROUVE LES GRANDES LIGNES DU RAPPORT DU DÉLÉGUÉ INTERMINISTÉRIEL À L’ORIENTATION LE SNPDEN CONSIDÈRE QUE LE RAPPORT REMIS PAR RICHARD DESCOINGS TRADUIT UNE ÉCOUTE ATTENTIVE ET INCITE À METTRE EN PLACE UNE RÉELLE CONCERTATION Le délégué interministériel à l’orientation, Bernard SaintGirons, chargé par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, d’élaborer des propositions relatives à la démarche d’orientation active, vient de publier un rapport d’étape. Le SNPDEN a été entendu dans le cadre de la consultation mise en place par le Délégué Interministériel qui lui a permis de faire valoir l’importance qu’il accorde à l’articulation secondaire supérieur mais aussi au caractère pragmatique et raisonnable des dispositions retenues au regard des ressources effectivement mobilisables. Le SNPDEN approuve bon nombre de propositions qui devraient permettre d’inscrire l’orientation active dans un processus continu et salue la méthode à l’œuvre dans ce rapport d’étape : consultation des acteurs et bilan des principales difficultés identifiées. L’évolution de l’ensemble de la procédure distinguant quatre étapes (information, dialogue et conseil, processus d’inscription, accueil et accompagnement à l’université), la recherche d’un calendrier plus détendu, les formes personnalisées d’accompagnement intégrées dans la politique des établissements devraient améliorer la construction du projet de l’élève. Les objectifs de simplification (compatibilité entre les applications informatiques) et la dématérialisation des dossiers de candidatures dans les filières sélectives sont appréciés. Le SNPDEN soutient l’élargissement proposé à toutes les formations de l’Enseignement supérieur, notamment les IEP, écoles de commerce, écoles paramédicales et du secteur social. Le SNPDEN approuve la redéfinition du comité de pilotage national resserré sur la gestion politique de l’outil dans lequel il siégerait ès qualités. Les commissions de coordination académique pour les formations post-baccalauréat doivent être installées sur l’ensemble des académies. Le rapport valorise le développement de dispositifs académiques de réorientation dans le cadre du plan réussite en licence : des évolutions sont à envisager sur l’ensemble du territoire en développant les relations entre les lycées comprenant des formations post-baccalauréat et les universités. Le rapport remis par Richard Descoings au Président de la République témoigne d’une qualité d’écoute et fait un constat honnête en termes d’objectifs et de moyens pour le lycée. Le SNPDEN partage l’analyse de Richard Descoings sur la nécessité de faire évoluer la situation actuelle du lycée, objet d’une forte attente de notre société. Le SNPDEN considère que les enjeux de la réforme du lycée général et technologique sont de permettre d’élever le niveau de qualification, de revisiter les modalités d’orientation et d’évaluation des élèves, de les accueillir dans de meilleures conditions d’égalité et de mieux les préparer à l’enseignement supérieur. Le SNPDEN se retrouve sur la nécessité de faire porter la réflexion sur l’ensemble du lycée, de mettre en œuvre une véritable seconde de détermination, d’affirmer la place spécifique de la voie technologique, de renforcer la démarche d’accompagnement de l’élève dans son projet d’orientation et de développer les passerelles effectives entre les voies et les séries. Il apprécie particulièrement les éléments sur l’espace qu’il est nécessaire de laisser à l’autonomie des acteurs pour que ces objectifs puissent être atteints. En revanche, les modalités avancées sur le rééquilibrage des séries de la voie générale peuvent laisser sceptiques. Le SNPDEN prend acte des préconisations adressées au gouvernement sur la mise en place d’une concertation réelle des partenaires. Il souhaite cependant que cette consultation, qui ferait suite à une longue lignée, puisse enfin déboucher sur les évolutions nécessaires et maintenant urgentes. Philippe TOURNIER, Secrétaire général Philippe TOURNIER, Secrétaire général Le communiqué de presse sur le rapport « Apparu » figure dans Direction 169 DIRECTION N° 170 JUILLET/AOÛT 2009 21