Arrêter les antiviraux et s`injecter de l`IL2

Transcription

Arrêter les antiviraux et s`injecter de l`IL2
INT ER LEUKINE 2
questions
Une étude importante montre le rôle fondamental
des lymphocytes CD8 cytotoxiques pour contrôler le VIH
minitel1
8
Séroconversion. Je souhai terais connaître tous les
risques ainsi que tout ce qui
sera mis en œuvre pour la sé roconversion d’un nouveau
né. Il m’a été dit qu’à l’âge
de six mois nous saurions
exactement si l’enfant est
positif ou négatif, sur quoi se
base-t-on pour dire cela ?
Si le bébé n’est pas encore
né, grossesse en cours, un
traitement sera proposé à la
maman en fin de grossesse et
à l’enfant à la naissance pendant six semaines. On a également discuté le mode d’accouchement et proposé un
accouchement par césarienne. Cela permet de réduire considérablement le
risque de contamination de
l’enfant : 3 % au lieu de 19%
sans traitement. Si le bébé
est déjà né, il n’y a rien à
faire de particulier. La surveillance du bébé se fait sur
des prises de sang à la naissance, à un mois et à trois
mois. Si l’ensemble du bilan
est négatif à trois mois l’enfant n’est pas contaminé. Il
n’est pas utile d’attendre le
bilan du sixième mois pour
être certain que l’enfant est
négatif.
Résistance. Ma charge vi rale vient de passer de 200
copies environ à 3700. Est ce
le signe d’apparition d’une
résistance à mes traitements
ou est ce négligeable ? J’ai la
même trithérapie depuis
deux ans et demi. Est-il vrai
qu’il est déjà rare que la
même marche aussi long temps ? Quel pourcentage ?
La charge virale est un examen très sensible qui peut
varier pour des raisons indépendantes au virus. Toute
surinfection (grippe, rhinite,
bronchite) peut augmenter
la charge virale. Il faut donc
la contrôler de nouveau
avant d’en tirer une conclusion. Si l’augmentation se
confirme cela va effectivement dans le sens d’un
début d’échappement et de
résistance. Les échappements après 2 ans représentent à peu près 40 % des patients.
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Arrêter les antiviraux
et s’injecter de l’IL2
Arrêter un traitement antirétroviral efficace se solde habituellement par un rebond
très rapide de la charge virale, même si elle était indétectable. Il n’y a que très peu
d’exceptions, comme le fameux patient de Berlin. A l’ICAAC 1, on a beaucoup parlé
d’une petite étude qui fait part d’un succès relatif chez neuf volontaires qui ont arrêté
les antiviraux sous certaines conditions. Leur charge virale a fortement et rapide ment rebondi, comme prévu, mais elle fut par la suite partiellement contrôlée par le
système immunitaire sans qu’ils n’aient recommencé les antiviraux. Nous publions
l’interview de l’auteur de l’étude par la revue américaine Aids Treatment News
n
otons aussi que ces
patients n’étaient
pas récemment infectés, contrairement au patient de
Berlin. Tout le monde a été surpris, y
compris les chercheurs qui dirigeaient
l’étude. On admet que ce protocole
n’est pas généralisable mais ces résultats sont une étape importante vers
des traitements qui aideraient l’organisme à contrôler le virus. On pourrait
ainsi réduire voir éliminer la dépendance aux antirétroviraux chez certains patients ou simplement perfectionner les résultats obtenus avec les
multithérapies.
Au NIH 3, la dose quotidienne est de 15
millions d’unités d’IL2 Chiron administrée en deux injections de 7,5 millions d’unités dans la journée. La dose
que nous avons retenue est sept fois et
“Le jeu consiste à mettre assez d’IL2 pour
activer les lymphocytes T tout en utilisant
une dose insuffisante pour activer les natu ral killers
demie plus faible et correspond à l’équivalent de 2 millions d’unités d’IL2 Chiron administrée en une seule injection.
Equivalent car nous utilisons en fait
250.000 unités d’IL2 Amgen qui est
Cette étude a été présentée par Kenplus puissante que celle de Chiron.
dall A. Smith dont le laboratoire fut
le premier à identifier l’IL2 et ses ré- Quels sont les effets secondaires à
cepteurs à la fin des années 70 et au cette faible dose ?
début des années 80.
Nous utilisons cette dose pour qu’il
n’y ait pas d’effets secondaires systéVous avez utilisé des doses d’IL2
miques, pas de fièvre ou de syndrome
beaucoup plus faibles que dans les
pseudo grippal. Si les gens développent
deux grands essais internationaux
ces effets indésirables, nous réduisons
qui démarrent (l’essai Esprit du
la dose. Finalement, il ne persiste
NIAID avec 4000 patients et l’essai
qu’une inflammation locale au point
SILCAAT de Chiron2 avec 1400
d’injection qui n’a pas conduit les papatients). Toutefois, vos patients se
tients à arrêter le traitement.
sont injectés de l’IL2 quotidienne ment alors que dans l’essai du
Quelle théorie derrière la faible
NIAID 3 il s’agit de cures à haute
dose, pourquoi fonctionne-t-elle
dose de 5 jours toutes les 8 se sans effets secondaires ?
maines. Quelle dose exacte avezL’IL2 est une hormone naturellement
vous employée et pourquoi avezproduite par notre corps et c’est l’une
vous préféré de petites doses
des hormones les plus importantes
administrées quotidiennement ?
pour le système immunitaire. Des
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souris qui manquent d’IL2 développent une immunodépression sévère.
La justification de l’emploi d’une faible
dose repose sur le récepteur à l’IL2.
Après que nous l’ayons découvert en
1981, nous avons essayé de comprendre pendant plus de dix ans les relations entre la liaison de l’IL2 à ses réce pt eu rs et l’in duct ion de la
prolifération des lymphocytes par cette
même IL2. Ces cinq dernières années
nous avons étudié chez des volontaires
les doses d’IL2 nécessaires pour saturer
les récepteurs à l’IL2 des lymphocytes
et induire leur prolifération maximale.
L’IL2 interagit donc avec les lymphocytes qui portent à leur surface des récepteurs pour cette hormone. Ces récepteurs lymphocytaires à l’IL2 ont une
très haute affinité pour l’hormone ce
qui signifie que vous n’avez pas besoin
de beaucoup d’IL2 dans le sang pour
qu’elle se fixe aux récepteurs qui la captent très efficacement. Par conséquent,
de petites doses conduisent à de petites
concentrations d’IL2 dans le sang, mais
qui sont toujours suffisantes pour se
fixer aux récepteurs des lymphocytes T
et provoquer ainsi l’activation de ces
lymphocytes.
1 ICAAC Conférence internationale annuelle en septembre sur les maladies
infectieuses.
2 Chiron Laboratoire le plus impliqué
dans le développement de l’IL2.
3 NIAID, NIH Structures de recherche
dans le domaine de la santé et du VIH
aux USA.
4 Perméabilité capillaire Fuite d’eau
dans les tissus à partir des capillaires.
Peut induire des oedèmes.
5 Réservoir En activant les cellules réservoir à virus latent, l’IL2 induirait le
cycle du virus qui deviendrait alors accessible aux antiviraux.
Un autre type cellulaire est impliqué :
les lymphocytes natural killer ou NK.
Environ 90 % des NK portent à leur surface un récepteur à l’IL2 incomplet ce
qui diminue l’affinité à l’IL2 d’à peu
près 100 fois. Il en résulte qu’il faut utiliser de fortes doses d’IL2 pour toucher les récepteurs de toutes les cellules
NK. Une fois que vous avez appuyé sur
le bouton IL2 du milliard de NK circulant dans le sang, vous avez activé ces
cellules qui se mettent à secréter leurs
propres cytokines qui vont être source
de toxicité.
Les cytokines produites par les NK sont
dites cytokines pro inflammatoires. Le
prototype en est le fameux TNF alpha
ou Tumor Necrosis Factor (Facteur de
Nécrose des tumeurs), qui est aussi le
pire du point de vue des effets secondaires. Fièvre, fatigue et syndrome de
perméabilité capillaire 4, sont des effets secondaires du TNF mais aussi
des fortes doses d’IL2... Ces événements indésirables sous IL2 sont dus
aux cytokines secondaires relarguées
par les NK dont la principale est le
TNF alpha.
Par conséquent, le jeu consiste à mettre
assez d’IL2 pour qu’elle se lie à ses récepteurs de haute affinité sur les lymphocytes T tout en utilisant une dose insuffisante pour activer les natural
killers. Nos données indiquent aussi
que l’usage continu de faibles doses
d’IL2 est préférable à l’usage intermittent à fortes doses parce qu’il prévient
la perte de cellules par apoptose, la
mort cellulaire programmée.
riode il leur était laissé le choix de retourner à leur traitement classique,
c’est-à-dire la multithérapie sans IL2,
ou de rentrer dans la seconde phase
de l’essai consistant à arrêter les antiviraux tout en continuant l’IL2 quotidienne à faible dose.
Le but de la première phase de l’essai,
antiviraux plus IL2, était de déterminer
si l’IL2 à faible dose permettrait d’aug-
herpès comme la variole du poulet,
l’herpès simplex 6 et le CMV. Un système immunitaire normal parvient à
éliminer le virus lors de la première infection et sans aucun médicament.
Cependant, il n’élimine pas la totalité
du virus dont une toute petite partie
est conservée à l’état latent. Si la personne traverse ultérieurement une période de déficit immunitaire, que ce soit
Quand vos patients devaient-ils
s’injecter l’IL2 dans votre étude et
était-il nécessaire de la garder au ré frigérateur ?
Vous pouvez prendre l’IL2 quand vous
voulez. La plupart de nos patients se
l’injectaient le soir avant de se coucher.
L’IL2 doit effectivement se garder au réfrigérateur.
A quels critères devaient satisfaire
les volontaires recrutés ?
Leurs CD4 devaient se situer entre 200
et 500 avec une charge virale maintenue en dessous de 400 copies. Ils ont
continué à prendre leur multithérapie
pendant toute l’étude, donc en même
temps que l’IL2 dont l’utilisation a varié
de 3 mois à un an. A l’issue de cette pé-
questions
minitel2
Suivi. Je viens d’avoir confir mation de ma séropositivité.
J’habite la région parisienne.
Ou dois-je aller pour la suite
et pour quoi faire ?
Il faut faire un premier bilan
général pour connaître le
taux de réplication de votre
virus (charge virale) et vos
défenses immunitaires (taux
de CD4). En fonction de ces
résultats, on vous proposera
soit un suivi biologique régulier, soit de débuter un traitement. Vous pouvez pour
cela vous adresser à votre
médecin traitant généraliste
si vous l’estimez compétent
dans ce domaine. Il est toujours préférable d’avoir un
seul médecin qui puisse
vous faire la synthèse de
votre état de santé. Vous
pouvez aussi vous adresser à
un médecin généraliste
formé sur le VIH (Sida Info
Service peut vous donner les
coordonnées au 0 800 840
800) ou vous adresser à l’hôpital près de chez vous si
vous souhaitez un suivi hospitalier.
Sustiva. Après quelques es sais (tous d’ailleurs) de tri thérapies avec antipro téases, j’ai abandonné
celles-ci en raison des effets
secondaires digestifs systé matiques. Je prends mainte nant une trithérapie sans
antiprotéases : Ziagen +
Epivir + Sustiva. Je la sup porte mieux mais le Sustiva
est toujours anxiogène après
7 semaines de traitement et
je fais toujours des cauche mars. J’envisage de changer
Sustiva pour Viramune.
Mais j’ai des angiomes hé …
Je suis désolé, je n’ai pas eu
la fin de votre question :
"mais j’ai des angiomes
hé.". Je pense que vous voulez savoir, si vous avez des
angiomes hépatiques, s’il y a
un risque de toxicité supplémentaire avec la Viramune.
La première chose est que les
troubles du sommeil liés au
Sustiva peuvent s’amenuiser
après deux mois. Je vous
conseillerai donc de patienter encore un peu à moins
que ces troubles soient très
marqués et vous rendent la
vie impossible. En ce qui
concerne la Viramune, il n’y
a pas de toxicité rajoutée du
fait des angiomes, cela ne représente pas une contre-indication. Vous pouvez donc
l’utiliser sans risque supplémentaire.
“Le système immunitaire maintient des
virus à l’état dormant d’une façon très effi cace. Il devrait donc être possible de l’aider
à faire la même chose avec le VIH
menter le nombre de lymphocytes,
CD4 et autres types. La réponse a été
oui. On a vu les paramètres immunologiques revenir à la normale avec un
virus indétectable en raison de l’efficacité de la thérapie.
Le but de la deuxième phase était d’évaluer si l’arrêt des antiviraux avec
maintien de l’IL2 permettrait d’optimiser les capacités du système immunitaire de façon à ce qu’il puisse contrôler toute activité résiduelle du VIH dans
l’organisme.
Notre interrogation ne se plaçait pas sur
le même terrain que Tony Fauci, David
Ho et quelques autres qui cherchaient
à purger les cellules réservoir5 de leur
virus latent en les activant avec de
fortes doses d’IL2 tout en poursuivant
la multithérapie. J’étais devenu sceptique sur cette approche depuis un an et
demi, simplement à cause d’un problème de quantité : on estime que
même quand la charge virale est indétectable dans le sang, il reste au minimum un à 10 millions de cellules infectées. Dix millions, ce n’est certes pas
énorme, mais cela signifie tout de
même que vous devez réduire cette population de 7 log (un milliard de fois)
pour venir à bout de la dernière cellule. Dans d’autres maladies comme
le cancer avec les mêmes données, cela
n’a pas été possible.
Il y a d’autres maladies où, lorsque
vous avez été infecté, vous ne revenez
jamais à l’état "zéro virus". Il subsiste
un reliquat de virus dormant ou latent. C’est un phénomène bien connu
dans les infections à virus de la famille
à cause du sida, de drogues ou de quoi
que ce soit d’autre, alors ces virus qui
étaient maintenus à l’état latent ne sont
plus contrôlés et commencent à se répliquer en relançant l’infection.
Le système immunitaire maintient des
virus à l’état dormant d’une façon très
efficace. Il devrait donc être possible de
l’aider à faire la même chose avec le
VIH comme il le fait déjà avec le CMV.
La combinaison IL2 faible dose quo tidienne plus multithérapie a-t-elle
permis à tous les patients de retrou ver un nombre normal de CD4 ?
C’est une question de durée. Certaines
personnes ont besoin de plus de
temps que d’autres. En un an ou deux
d’IL2 quotidienne associée aux antiviraux, presque tous les individus retrouvent un compte normal de lymphocytes CD4 circulants, à condition
d’avoir eu, dans notre essai, plus de 200
CD4 au commencement de l’IL2.
Dès lors, la question clé est de savoir si
le retour à la normale de leur taux de
CD4 s’accompagne d’une restauration de l’immunité spécifique anti-VIH.
Le test crucial pour répondre à cette
question c’est l’arrêt de la thérapeutique antirétrovirale qui va montrer si
le système immunitaire maintient le
virus à un stade latent ou parvient à
contrôler la multiplication virale si elle
redémarre.
Nous n’avons que neuf patients qui
ont accepté d’arrêter les antiviraux en
poursuivant l’IL2 quotidienne. Ils ont
tous eu la même évolution avec une
charge virale qui redevenait détecI
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6 Herpès simplex Agent de l’herpès
banal du "bouton de fièvre" et des lésions génitales.
7 Neuf millions d’unités Divers essais,
dont celui mené par Yves Lévy pour
questions
table au bout de deux semaines et
demie à trois semaines puis augmentait
rapidement jusqu’à atteindre un pic
au bout de deux semaines. Mais ensuite, la charge virale décroissait rapidement durant les deux semaines suivantes pour se stabiliser à une valeur
d’environ 10 % du pic. La valeur
moyenne du pic de charge virale observé chez les neuf patients a été de
350.000 copies. Puis, la charge virale a
régressé à près de 26.000 copies. Une
réduction de plus de dix fois (un log) en
quinze jours et sans antirétroviraux !
Apparemment, leur organisme devenait capable de répondre à la réplication virale en la contrôlant.
minitel3
10
Fellation. L’homme risquet-il quelque chose en cas de
fellation ?
Si votre question est "Y a-t-il
un risque à se faire faire une
fellation ?", la réponse est
non, hormis s’il existe des lésions dans la bouche de
votre partenaire, type herpès
ou gingivite. Si votre question est "Y a-t-il un risque à
pratiquer une fellation ?", la
réponse est que le risque
existe mais est faible s’il n’y
a pas éjaculation, le risque
est important s’il y a éjaculation.
Fiabilité des tests. Mon mé decin m’a dit qu’un test séro logique Elisa négatif après
deux mois était très fiable et
ne demande pas de confir mation. Que dois-je en pen ser sachant que la politique
actuelle officielle est d’at tendre trois mois ?
Les tests Elisa sont effectivement très fiables. À deux
mois, l’intervalle de
confiance d’un test négatif
est de 97 %. Néanmoins,
pour le faible pourcentage
restant il est préférable de
faire un test à 3 mois. Ce
n’est pas une raison pour
changer de médecin. Le
risque d’une positivité entre
le deuxième et le troisième
mois étant extrêmement
faible, ce n’est pas une erreur de votre médecin mais
une attitude optimiste !
CD8 et IL2
Avez-vous
des hypothèses à suggérer?
Comment le corps parvient-il à faire
ça ? Nous avons découvert que le sang
de ces patients s’enrichit fortement en
cellules T tueuses, c’est-à-dire en lymphocytes T CD8+, en même temps
que se produit le rebond de la charge virale. Il est bien connu en immunologie
que ce sont ces cellules T8 tueuses qui
repoussent les infections virales. Ces
dernières années, des études chez l’animal ont bien montré que, quand vous
injectez des virus, vous provoquez une
multiplication très rapide des CD8.
Deux éléments poussent les CD8 à proliférer selon un processus dynamique.
Le premier est la reconnaissance spécifique du virus par ces cellules. Cette
reconnaissance a pour résultat de faire
exprimer au lymphocyte CD8 les récepteurs de l’IL2 à sa surface. Les
CD4, quand il y en a, collaborent à cette
activation cellulaire en secrétant de
l’IL2 qui va être captée par les récepteurs des CD8. La liaison IL2-récepteur sur les CD8 agit alors comme un
puissant signal qui donne l’ordre à ces
cellules de se multiplier.
Je pense que chez nos neuf patients, la
rapide expansion des CD8 était médiée par le même mécanisme à deux
étapes : les CD8 reconnaissent le VIH
puis répondent par leur prolifération à
l’IL2 injectée.
infoline
La ligne d’information
sur les traitements
fonctionne du lundi au
vendredi de 15h00 à 18h00
au 0143 67 00 00.
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l’ANRS, ont montré que l’injection
deux fois par jour de 4,5 millions
d’unité peut être considérée comme le
standard lorsque l’IL2 est administrée
de façon intermittente par cure de cinq
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jours toutes les huit semaines.
8 Adapté du mensuel Aids Treatments
News n°329 du15.10.99, p. 1 à 6.
Est ce que les séropositifs ont des
concentrations d’IL2 dans le sang
inférieures à la normale ?
Les données ne sont pas complètes,
mais la réponse semble être oui. Il y a
une déficience relative de la production
d’IL2 chez ces personnes. Nos propres
données établies chez 50 séropositifs
montrent qu’ils ont une production
d’IL2 déficitaire par rapport à des séronégatifs.
Je crois que même les personnes en
bonne santé, lorsqu’elles sont confrontées à une infection systémique, ont des
difficultés à produire rapidement assez
d’IL2 pour vite faire face à cette infection. L’administration thérapeutique
d’IL2 compense toute déficience en
cette hormone chez le séropositif au
VIH, mais va plus loin en corrigeant
toute déficience qui pouvait naturellement être présente.
Rappelons d’abord qu’ils étaient déjà
sous multithérapie depuis un certain
temps avant de débuter l’IL2. Leur
charge virale moyenne était de 70.000
copies avant toute thérapie. Après la
succession des traitements qu’ils ont
suivis : multithérapie, multithérapie +
IL2 et enfin IL2 sans antiviraux, la
charge virale moyenne est descendue à
25.000 copies en passant par un pic de
340.000. C’est une réduction significative. Toutefois, je pense qu’il faut maintenant faire un essai prospectif pour savoir s’il est possible, avec notre
approche, de stabiliser la charge virale
à un niveau nettement plus faible. Ce
n’était pas le sujet de la première étude,
mais nos résultats suggèrent qu’une stimulation encore plus complète du
s ys tèm e i mmu ni t ai r e p ou rr ai t
conduire à un contrôle total de la réplication du VIH (lire à ce propos l’article
sur les essais de vaccinothérapie de
Et les CD8 restent mobilisés ?
l’ANRS page 7), comme c’est le cas
Chez l’animal, lorsqu’un virus comavec les virus de la famille herpès.
mence à décroître et qu’il cesse donc de
stimuler les lymphocytes CD8, alors le Combien de temps ces neuf patients
compte de ces cellules se met à dimi- sont-ils restés sans antirétroviraux?
nuer aussi. Ce qui est spectaculaire Ils ont décidé en accord avec leur médans nos données c’est que les CD8 des decin s’il convenait de reprendre la
neuf patients n’ont pas diminué mais multithérapie, ce que cinq d’entre eux
“Nos résultats suggèrent qu’une stimula tion encore plus complète du système im munitaire pourrait conduire à un contrôle
total de la réplication du VIH
sont restés stables. Les données chez
l’animal nous montrent également que
ce qui fait diminuer les CD8 c’est le
manque de stimulation de cette population cellulaire par l’IL2. Ces cellules
qui ne sont plus stimulées finissent
alors par mourir d’apoptose. Cette
apoptose est apparemment prévenue
par l’administration d’IL2. Ainsi l’IL2
provoque l’expansion rapide des CD8,
mais elle permet aussi de les garder en
vie et fonctionnels, ce qui les fait réagir
plus efficacement contre toute multiplication virale résiduelle.
ont déjà fait. Il en reste donc quatre
qui sont toujours en arrêt de traitement
antirétroviral mais avec de l’IL2.
Jusqu’à présent, la plus longue période
d’interruption a été de neuf mois.
Quelle a été la plus grande surprise
de cette étude ?
Nous savions que la charge virale rebondirait à l’interruption en atteignant un plateau. Mais, nous pensions que ce plateau serait stable et
nous ne nous attendions pas à la voir diminuer de plus de 10 fois sans aucun
antirétroviral. En fait, les données acEst ce que ces neuf patients ont stabi - quises chez l’animal auraient dû nous
lisé leur charge virale à un niveau in - faire anticiper ce résultat.
férieur à celui qu’ils avaient avant de Nous attendions une montée de la
commencer tout traitement ?
charge virale avec stabilisation en fonc-
1 (Notes de la page 12, suite)
2 Immunogène Qui suscite une réponse
immunitaire de la part de l’organisme.
tion de travaux antérieurs déjà publiés.
Mais les patients n’étaient pas suivis
dans ces études d’une façon aussi serrée que dans la nôtre et les chercheurs
sont peut-être passés complètement à
côté du pic de charge virale. Nous mesurions la charge virale deux fois par semaine et les lymphocytes T CD4 et CD8
étaient comptés toutes les semaines.
Sans cette fréquence bi-hebdomadaire de la charge virale, nous n’aurions pas vu le pic chez certains patients. E lle peut monter puis
redescendre si vite qu’on peut manquer ses variations avec une mesure
par semaine. Dans ce cas, on peut avoir
l’impression d’avoir atteint un plateau
après le rebond de charge virale simplement parce que le pic qui précède
n’a pas été mis en évidence.
Est ce que le rebond de charge virale
a été plus tardif chez ces neuf volon taires que dans les cas déjà décrits ?
A Barcelone, au début de l’année 1999,
a été cité le cas de 10 patients traités
depuis plus de deux ans par multithérapie sans IL2 et dont la charge virale redevenait détectable deux à trois jours
après l’arrêt. A l’ICAAC, Tony Fauci et
Rick Davey ont fait état de 18 patients
sous multithérapie plus IL2, prescrite
de façon classique, avec des niveaux de
virus dans l’organisme extrêmement
faibles. A l’arrêt, 17 sur 18 ont vu la
charge virale rebondir en à peu près dix
jours. Dans notre étude, le délai moyen
du rebond était de dix-neuf jours.
La charge virale de ces 17 patients est
montée à un niveau élevée où elle
s’est stabilisée. En revanche, le dix-huitième patient a connu une évolution
semblable à ce que nous avons vu : sa
charge virale a atteint un pic puis est largement redescendue.
Les deux essais géants sur l’IL2 qui
se mettent en place, l’essai du
NIAID et l’essai de Chiron, vont-ils
compléter vos résultats ?
Non parce qu’ils sont fondés sur une
autre hypothèse que la nôtre et avec des
doses très différentes. Les comparer à
notre essai revient à comparer des patates et des poireaux.
On a l’impression que l’essai du
NIAID vise à établir si le gain de
CD4, chez des patients qui commen -
cent l’IL2 a plus de 300 CD4, ap porte un bénéfice clinique alors que
l’essai de Chiron s’adresse à des pa tients au déficit immunitaire plus
avancé, de 50 à 300 CD4, au mo ment où ils commenceront l’essai.
En effet, avec comme autre différence
que Chiron va utiliser une dose un peu
moins forte de neuf millions d’unités
par jour en deux fois quatre millions et
3 Traduit et adapté du mensuel américain Aids Treatments News n° 327 du
15.09.99, pp 1 à 4.
appel
montent à un niveau environ dix fois
supérieur à celui qui était observé avant
l’IL2. Au-delà de sept semaines d’interruption toutes ces cellules voient leur
concentration sanguine diminuer progressivement. Elle revient finalement
au niveau initial avant IL2 si une nouvelle cure n’est pas mise en route. On
ne sait pas exactement s’il y a une redistribution des cellules de la circula-
à solidarité
Débarrassez-vous
de vos médicaments désormais inutiles, et faites un
geste pour les pays du Sud !
Faites-nous parvenir les médicaments que vous n’utilisez plus et qui présentent un
intérêt dans l’infection à
VIH: antibiotiques, antifongiques et antiviraux classiques pour soigner les infections opportunistes ou
prévenir leurs rechutes et
bien sûr antirétroviraux.
Qu’il s’agisse de nous
mêmes ou de personnes de
notre connaissance, nous
avons souvent des médicaments rangés dans une armoire et que nous n’utilisons
plus. Ces médicaments qui
dorment seront d’une
grande utilité dans les pays
où leur accès est excessivement restreint et où nous
avons des contacts. Vous
pouvez nous donner ces médicaments qui seront très
utiles à Donald de Gagné.
Celui-ci a développé des
contacts directs avec des
personnes atteintes impliquées dans des structures de
prise en charge en Afrique et
en Asie et participe à des
projets : il leur expédie des
médicaments ou leur amène
lors des missions qu’il est
amené à effectuer. Vos dons
de médicaments ont déjà
permis à Donald d’apporter
directement aux personnes
touchées actives dans les
centres de traitement et de
prise en charge une aide
dont elles ont immédiatement bénéficié.
Ces quelques boîtes peuvent
paraître dérisoires face à
l’énormité des besoins des
pays du Sud. Mais il faut
bien savoir, d’une part, que
le réseau développé rassemble des destinataires
eux-mêmes atteints et impliqués dans la prise en charge
dans leurs pays respectifs,
d’autre part, que la qualité et
le sérieux de ces contacts
nous assurent que ces médicaments vont directement
aux personnes qui en ont le
plus besoin. Notre action rejoint une dynamique développée par d’autres structures en France et de par le
monde.
“L’objectif de ces essais est d’accélérer la
restauration immunitaire. Je pense que ce
sera bien le cas mais que nous ne devons
pas imposer des toxicités aux patients
demie7 par jour. L’essai du NIAID qui
emploiera quinze millions d’unités.
Qu’il s’agisse de neuf ou quinze millions, de toutes façons il y a aura des
toxicités. C’est pourquoi on doit limiter
le traitement à des cures de cinq jours,
particulièrement pour des personnes
qui travaillent et s’efforcent de mener
une vie normale.
L’objectif de ces essais est d’accélérer la
restauration immunitaire grâce à
l’IL2. Je pense que ce sera bien le cas
mais que nous ne devons pas imposer
des toxicités aux patients. On peut baisser la dose de presque dix fois et l’administrer quotidiennement au lieu de
traiter par de très fortes doses tous les
deux mois. S’ils en avaient eu la volonté, les investigateurs auraient pu
ajouter un groupe de personnes traitées
par faibles doses dans leurs essais. Il y
aurait eu dans ce cas une intéressante
comparaison sur la qualité de la restauration immunitaire et la toxicité
entre les deux méthodes.
tion sanguine vers les tissus entre les
cures avec redéploiement en sens inverse à l’interruption d’une nouvelle
cure.
Quelle a été la contribution de votre
laboratoire à la découverte de l’IL2?
Mon équipe a assuré l’une des trois
étapes de cette découverte. Tout
d’abord, Doris Morgan et Frank Ruscetti ont montré en 1976, à l’Institut National sur le Cancer dans le laboratoire
de Robert Gallo, que l’IL2 était un facteur de croissance des lymphocytes T.
Ils avaient découvert que les lymphocytes secrètent quelque chose qui induit la multiplication des autres lymph ocytes s ans avoir identifié la
substance responsable de cette activité.
Ils n’ont pas continué sur ce sujet de recherche parce qu’ils travaillaient surtout sur les leucémies et les rétrovirus.
Plus tard, à la fin des années 70 et au
début des années 80, nous avons repris
leurs travaux et nous avons caractérisé
et purifié la molécule responsable, en
Existe-t-il des données qui per l’occurrence l’IL2. Enfin l’équipe de Tamettent de savoir si le gain en CD8
datsugu Taniguchi a cloné le gène de
obtenu pendant les cures intermit - l’IL2 au Japon. Cela permit de protentes d’IL2 s’effrite durant les sept duire industriellement par génie génésemaines d’inter-cure ?
tique de l’IL2 utilisable en thérapeuLa forte dose intermittente cause tout tique.
d’abord une diminution de tous les
Adapté par Serge Le Coz 8
types de lymphocytes dans le sang,
CD4, CD8, NK, et lymphocytes B pendant les cinq jours de cure ainsi
qu’une diminution des monocytes. Ensuite, après l’interruption de la thérapie
à l’IL2, il y a un rebond et les cellules reI
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