Prendre un enfant par la main
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Prendre un enfant par la main
J a n v i e r 2 0 0 6 Prendre un enfant par la main Dans cette édition ■ La famine à l’index ■ Témoignages de miraculés ■ Le lait qui sauve www.morija.org N o 2 1 0 Sommaire Editorial: «Prendre un enfant par la main… pour l’emmener vers demain» C es paroles de la célèbre chanson d’Yves Duteil illustrent bien toute la dynamique du parrainage que propose Morija. Des enfants doivent être pris par la main parce qu’ils sont malades, malnutris, handicapés ou orphelins. Quand ils ne cumulent pas plusieurs de ces difficultés… Si la vie des enfants ne tient qu’à peu de choses, celui-ci vient-il à manquer et c’est le drame. Souvent, il aurait suffi de soins et de nourriture pour éviter le pire. C’est là que le parrainage prend toute sa valeur. Car c’est grâce à votre engagement que nos collaborateurs des Centres de récupération et d’éducation nutritionnelle (CREN) viennent en aide et parviennent à sauver des enfants pourtant dans un état parfois proche de la mort. Oui, la famine qui a sévi cette année au Sahel leur a rendu la tâche particulièrement ardue. Mais des miracles ont eu lieu et conti- nuent d’avoir lieu. Nous vous rapportons dans ces pages des témoignages de ce qui a pu être entrepris dans la vie de Moussa, dans celle de Nafissatou, dans celle encore d’Issaka. Ces bribes d’histoire peuvent se multiplier grâce à vous! Merci d’avoir pris et de prendre encore un enfant par la main, de permettre des lendemains pour ces bébés et ces jeunes à priori sans avenir. Vous aussi vous pouvez vous joindre à la famille des parrains de Morija (voir notre prospectus ci-joint). Dans ce temps de l’Avent, votre cadeau est sans prix. Nous vous souhaitons un joyeux Noël et de belles fêtes de fin d’année. «Pourquoi je parraine un enfant» (page 4) «Nous avons pu survivre grâce à vos vivres» (page 5) Issaka, petit miraculé (page 6) L’équipe de Morija But: Aide aux plus déshérités d’Afrique, du Sahel en particulier, sans distinction de race ou de religion. Association humanitaire En Reutet 1868 Collombey-le-Grand Tél. 024/472.80.70 Fax 024/472.80.93 E-Mail: [email protected] CCP 19-10365-8 Association sans but lucratif Fondée en 1979 selon les articles 60ss du Code civil Suisse MORIJA FRANCE: Jérôme Prékel La Pierre 74410 St Eustache CCP 13.875-50 W 029, Grenoble Banque: Crédit Agricole, Annecy 96702605676 Les 3 piliers de l’aide sont: • le secours d’urgence • l’amélioration des conditions de vie • les projets de développement L’esprit dans lequel notre aide est apportée prend ses racines dans l’Evangile. Siège social: Collombey-le-Grand Vérificateur des comptes: Fiduciaire R. Künzlé SA – Monthey Rédaction: Morija Mise en page: Jordi SA, Belp Impression: Jordi SA, Belp Mensuel d’information Prix de l’abonnement: CHF 25.– / € 15.– Abonnement de soutien: CHF 50.– / € 30.– Tout don supplémentaire est le bienvenu. MERCI «Nous nous sommes battus tous les jours!» Beaucoup d’enfants malnutris ont été pris en charge dans nos centres nutritionnels L’ année 2005 s’achève. Elle restera une année tristement célèbre par le fait de la famine qui a été d’une rare intensité. Elle aura marqué la population du Sahel dans son ensemble. «Pour les personnes qui ont à portée de main plus que le pain quotidien, comme vous en Occident, il est assez difficile d’imaginer ce qui se passe réellement dans une région atteinte par la famine. Réduire de moitié ou plus sa ration alimentaire journalière déjà insuffisante ou pire encore, passer 1, 2 voire 3 jours sans rien manger, tomber en défaillance de retour des champs après avoir travaillé toute la journée le ventre creux ont été le quotidien de bien des personnes ici», rapportent nos collaborateurs du centre nutritionnel de Ouagadougou. C’est dans ce contexte difficile qu’ils ont travaillé cette année. «Les enfants nous sont venus dans un état de malnutrition très grave, rendant difficile la récupération. Cela fut aggravé par les cas de maladies – comme le paludisme – mal soignées faute de moyens. Nous nous sommes battus tous les jours pour sauver le maximum d’enfants, en leur offrant des soins, de la nourriture et en prodiguant des conseils aux parents. Grâce à l’intervention de Morija, nous avons pu secourir des familles en situation de désespoir, en leur distribuant du maïs de juillet à septembre». Dans le centre nutritionnel de Nobéré, également au Burkina Faso, l’une de nos infirmières indique que les anciens ont déclaré n’avoir jamais vu les prix des denrées monter si haut. En effet les prix des céréales ont triplé et Des vivres ont été distribués même quadruplé dans certaines régions. «La situation était très difficile et nous l’avons beaucoup ressenti dans nos activités au sein du centre. En effet, certaines femmes et leurs enfants malades ont été abandonnés Certains ont été abandonnés dans nos locaux sans nourriture et sans argent dans nos locaux sans nourriture et sans argent. Des cas de suicides ont été enregistrés. Les salariés n’ont pas été épargnés parce qu’avec la flambée des prix, ils n’arrivaient pas à s’acheter les aliments nécessaires pour leurs familles et leurs proches. Morija a offert des vivres à des personnes démunies et des mamans séjournant au CREN. En effet, 34 mamans du centre ont bénéficié de 9 kg par personne et par mois pour les 3 mois de juillet à septembre. Dans la même période, 13 familles nécessiteuses ont reçu 15 kg de maïs par mois. Au niveau des grandes pesées, nous avons dû augmenter les quantités distribuées à cause de la famine qui frappe également les familles des enfants suivis après guérison. Nous avons notamment distribué du mil, du lait, du protocéréal, ainsi que du bulgur, des lentilles, de la farine de maïs et de l’huile». De nos collaborateurs des CREN de Nobéré et Ougadougou Parrainer, une façon d’être solidaire Laurence, 31 ans, parraine un enfant du Sahel depuis 10 ans. «Quand j’ai commencé à gagner ma vie comme institutrice, je me sentais très privilégiée et avais envie d’aider un enfant dans le besoin», explique-t-elle dans son appartement de Chailly s/ Montreux. «Je n’ai jamais été en Afrique, mais j’imagine sans peine les besoins des enfants, là-bas. Un parrainage, c’est une façon de se Institutrice à Boussens, Christine et sa famille parrainent un enfant depuis une vingtaine d’années. «C’était le vœu d’un de nos quatre enfants, en fait. Notre fille aînée devait avoir huit ans quand elle en a parlé pour la premiè- sentir moins démuni par rapport à la pauvreté d’autrui». Aujourd’hui mariée et mère de quatre enfants, elle indique avoir été rejointe par son mari Thierry dans sa démarche. A tel point que la famille soutient actuellement plusieurs enfants, «comme autant de gouttes d’eau qui peuvent apporter quelque chose, faire du bien». Laurence A Lausanne, Caroline, infirmière, vient de s’engager dans le parrainage d’un enfant. «Aider un enfant dans le besoin a un sens très fort pour moi. Parce que j’ai la chance de vivre ici en Suisse, que je n’ai moi-même pas d’enfants et que j’ai les moyens d’aider un petit en souffrance». Etre enfant et démuni n’est déjà pas une adéquation facile ici en Occident, estime-t-elle. «Alors j’aime savoir que l’argent que je donne prend tout son sens au Sahel. C’est une façon pour moi d’être solidaire. Oui, à 41 ans, je crois que si chacun aidait son prochain dans la mesure de ses re fois à la maison. Et puis on a reçu des nouvelles des parrainages chaque année, ce qu’on a toujours apprécié. Même si nos enfants sont aujourd’hui grands, mon mari et moi n’avons jamais mis fin à notre parrainage. Parce que nous trouvons que la démarche reste toujours aussi valable et parce que nous avons encore l’impression de pouvoir, par ce moyen, aider des personnes démunies dans le monde». Christine moyens, le monde irait mieux, serait plus juste». Et la jeune femme d’ajouter encore avoir trouvé en Morija une ONG «petite, avec des projets concrets» dont elle aime suivre l’évolution au fil des journaux qu’elle reçoit chaque mois. Caroline Dans les pays du Sahel où nous intervenons et sans parler de l’urgence provoquée par la famine, 300 000 enfants de moins de cinq ans meurent chaque année de malnutrition, de maladies liées à la consommation d’eau insalubre et de manque d’hygiène. Plus de 56 % de la population du Burkina Faso a moins de 18 ans, à peine la moitié est scolarisée et rare sont les jeunes qui ont accès à une formation professionnelle ou à des études supérieures. Le lait qui sauve N afissatou Ousmanou, âgée d’un an, a été amenée par sa mère au Centre de santé intégré de Guider. Elle est d’une famille très pauvre. «A son arrivée, Nafissatou était sévèrement frappée d’une malnutrition de type marasme au 3e stade. Elle présentait des œdèmes aux pieds et aux mains. Elle ne pesait que 4 kilos et avait des difficultés à s’asseoir. Les examens du sang au laboratoire ont révélé un paludisme grave. Naffisatou sans force à son arrivée Nafissatou a été hospitalisée au centre pour un traitement adéquat. Comme tous les autres enfants, elle a fait partie intégrante des bénéficiaires du lait enrichi à base de sucre et d’huile, qui donne une énergie importante. Au bout de 2 semaines, Nafissatou a commencé à prendre goût à la vie et atteint 4,5 kg. Elle a pu s’asseoir sur le pèse-bébé. Deux semaines plus tard, elle nous a quittés pour rejoindre son domicile avec un poids de 5,5 kg. Elle revient les jours de distribution de lait et de pesées. Bien grassouillette, Nafissatou a aujourd’hui un sourire aux lèvres et pleure comme tous les autres enfants en bonne santé. Les malnutris et les orphelins de notre centre remer- cient vivement toute l’équipe Morija et tous les donateurs!» Omarou Toumba, responsable médical Pesée de Naffisatou qui reprend goût à la vie «Nous avons pu survivre grâce à vos vivres» La plupart des mamans qui sont venues chercher de l’aide dans l’un de nos centres nutritionnels en cette période de famine étaient elles-mêmes dans le besoin. Comme Zénabo Kiendrebeogo, mère de 5 enfants. «Je suis venue au centre pour la récupération nutritionnelle de mon enfant de 15 mois», témoigne-t-elle. «Je viens d’un village appelé Guirgo, distant de 60 kilomètres de Nobéré. Nous sommes venus au centre sans provisions de nourriture parce que nous n’en avions pas à la maison. C’est essentiellement grâce aux vivres que j’ai reçu au centre que j’ai pu survivre avec mon Prenez vous aussi un enfant par la main et permettez-lui de connaître des lendemains meilleurs. CHF 50.–/€ 35.–, c’est notamment lui donner la possibilité – d’être nourri et logé – de recevoir des soins médicaux adéquats – d’être scolarisé Pour plus de détails, voir le prospectus ci-joint enfant. Je remercie de tout cœur Morija et demande que Dieu bénisse cette organisation et lui donne longue vie». Jean-Baptiste Congo et Mme Tapsoba, CREN de Nobéré Issaka, petit miraculé Aujourd’hui, Issaka se sent bien … L e petit Issaka Traoré est l’un des nombreux enfants qui ont pu s’en sortir grâce aux centres nutritionnels. Voici son histoire: «Issaka n’a jamais eu la chance de bénéficier du lait de sa mère et a été confié dès sa naissance à sa grand-mère. Vu la situation d’extrême pauvreté dans laquelle se trouvait déjà celle-ci, il a été orienté vers la pouponnière, où il fut aussitôt pris en charge dès sa 3e semaine de vie. Sa grand-mère a alors bénéficié régulièrement de lait maternisé pour le nourrir à domicile. Tout s’est bien déroulé jusqu’au 9e mois d’Issaka. Mais la famine aidant, tous les moyens ont été bons pour survivre, au point que le lait qui devait servir à préparer les biberons a aussi été utilisé pour les autres enfants de la famille. Personne à la pouponnière ne pouvait soupçonner une telle attitude et personne ne comprenait non plus pourquoi l’état de santé de l’enfant commençait à se dégrader. lée, comme celle d’un brûlé. C’est alors que l’on a compris que le lait n’arrivait pas à destination. Il fut immédiatement gardé et suivi de près par le personnel de santé. Après un régime strict convenant à son cas, il fut récupéré et retrouva une bonne forme. chaque mois de l’année à venir au CREN pour un suivi. Il recevra à chaque fois une dotation de vivres qu’il pourra partager un peu avec le reste de la famille et nous espérons ainsi que le lait fourni par la pouponnière lui servira à lui seul. Il aura fallu 29 jours d’hospitalisation pour qu’il soit complètement guéri. Durant tout son séjour, il a bénéficié – à l’instar des autres enfants – de soins et de nourriture gratuitement. Aujourd’hui, il se sent bien, en bonne santé et a retrouvé la joie de vivre au grand bonheur de sa grand-mère. Cette dernière a également bénéficié d’un bon repas chaque jour, ce qui fut très important par ces temps de famine. Issaka doit revenir Le séjour de la grand-mère au CREN lui a permis d’acquérir quelques connaissances nécessaires pour préserver ses petits-enfants de la malnutrition, même en période de famine. Tout cela a été possible grâce à votre générosité et nous vous témoignons toute notre reconnaissance». Yvonne Zouétaba, CREN de Ouagadougou Comme il fallait s’y attendre, Issaka est tombé dans un état de malnutrition grave malgré les efforts fournis par la pouponnière. Il a alors été transféré au CREN en août dernier à l’âge de 12 mois pour une prise en charge complète, avec peu d’espoir d’être sauvé. A son arrivée, il souffrait de kwashiorkor avancé avec des oedèmes et une peau craque- … pour son bonheur et celui de sa grand-mère! Rihanata, Moussa et les autres! Rihanata renaît à la vie «E tudiante en nutrition, j’ai fait un stage de mai à août 2005 au CREN de Ouagadougou. Les premiers jours furent un peu difficiles. Eh oui: pas évident de voir tous ces petits si frêles, pleurant ou gémissant, le regard triste… Puis, au fur et à mesure que les jours passèrent, l’optimisme revint grâce à la volonté de vivre de ces mêmes petits. Je vais donc vous raconter l’histoire de deux pensionnaires du CREN qui m’ont particulièrement marquée et surtout beaucoup touchée. Tout d’abord, celle de la belle Rihanata qui est arrivée au CREN avec sa grand-mère, sa maman étant décédée. Elle est hospitalisée, car elle souffre de malnutrition sévère accompagnée d’œdèmes. A son arrivée, elle est donc très affaiblie et, ne pouvant s’ali- menter par la bouche, une sonde nasogastrique est mise en place. Rihanata commence par perdre du poids en raison de la fonte des oedèmes. Mais, malgré la bonne volonté de sa grand-mère, ne grossit pas et vomit pratiquement tous ses repas. En plus de cela, elle souffre de diarrhée et se déshydrate. Après 15 jours de traitement, je ne vois pas d’évolution et je m’inquiète fortement. Enfin le miracle arrive: Rihanata commence à prendre du poids, son visage et son corps se métamorphosent. Une petite fille renaît à la vie. Elle retrouve le sourire et sa grand-mère aussi. J’ai pu revoir Rihanata un mois après sa sortie lors de la grande pesée. Elle a encore changé et grossi grâce à sa grand-mère qui continue à s’en occuper avec amour. Et puis, il y a Moussa, 3 ans et 8 mois. Quand il arrive au CREN, il souffre également d’un amaigrissement sévère s’accompagnant d’œdèmes. Il tient à peine sur ses jambes qui ressemblent à deux petites allumettes et il a un regard rempli de souffrance. Après la fonte des oedèmes, son poids va même descendre jusqu’à 7 600 grammes. Sa mère et son petit frère, Lassane, l’accompagnent. La maman n’a plus d’espoir pour Moussa et s’occupe exclusivement de Lassane, lui aussi malnutri. Mais Moussa n’a pas dit son dernier mot et s’accroche à la vie ! Pendant que tout le monde est sous la paillote afin de suivre la séance de causerie éducative, Moussa est seul avec sa double ration de bouillie et commence à manger seul. Impossible de l’approcher par la suite dans ces moments-là, car quiconque s’avance vers lui peut vouloir lui voler sa bouillie, croit-il. Or il sait que cette bouillie, c’est la vie, et il s’accroche! Qui aurait cru, à son arrivée, qu’un jour il puisse marcher à nouveau et jouer avec les autres enfants? Pourtant ce Moussa réapprend à s’alimenter fut le cas après trois semaines de traitement; et sa maman put repartir avec ses deux enfants guéris. J’ai choisi de vous raconter l’histoire de ces deux enfants, mais beaucoup d’autres sont restés dans mon cœur, car en 3 mois, j’ai pu en voir passer une centaine. Certains n’ont pas eu la chance de Rihanata et Moussa. Mais grâce à Morija, beaucoup d’enfants sont sauvés chaque année». Castan Florence, stagiaire nutritionniste française Nous vous disons merci! «Le personnel des CREN se joint aux bénéficiaires de votre aide si précieuse pour dire merci à vous tous qui avez montré de la compassion envers nous. Nous témoignons que sans votre soutien, nous aurions enregistré beaucoup de décès. Sans vous, nous n’aurions pu porter secours à toutes ces mains tendues vers nous. Que Dieu vous bénisse richement». Les collaborateurs locaux de Morija Joyeux Noël et bonne année!