Fritz David Pierre c. Fédéral Express Canada ltée et Procureur
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Fritz David Pierre c. Fédéral Express Canada ltée et Procureur
Dossier no 97 11 31 FRITZ DAVID PIERRE, demandeur, c. FÉDÉRAL EXPRESS CANADA LTÉE, entreprise, et PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC, mis en cause. __________________________________________________________________ DÉCISION PRÉLIMINAIRE __________________________________________________________________ L'OBJET DU LITIGE Le 20 juin 1997, M. Fritz David Pierre demande à l'entreprise, Fédéral Express Canada ltée, (« FedEx »), de lui fournir : [...] une copie du résultat de l’enquête interne que vous avez faite à Fédéral Express suite à mes plaintes contre M. X et M. Y. [...] N'ayant pas reçu de réponse de FedEx dans les délais prescrits par la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé1 (la « Loi sur le secteur privé »), M. Pierre sollicite, le 21 juillet 1997, une demande d’examen de mésentente auprès de la Commission d’accès à l’information (la « Commission »). Le 18 août 1997, la Commission fait parvenir à FedEx une lettre l’avisant de la demande d’examen de mésentente de M. Pierre. 1 L.R.Q., c. P-39.1. 97 11 31 -2- Le 18 novembre 1997, Me Sean McNamee, conseiller juridique chez FedEx, informe la Commission que celle-ci refuse l'accès à M. Pierre à un rapport préparé par et pour l'entreprise, à la suite du dépôt d'une plainte formulée par ce dernier en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés2. Selon Me McNamee, ce document ne peut pas être communiqué puisque sa divulgation pourrait avoir une incidence sur une éventuelle poursuite judiciaire. De plus, il ajoute que compte tenu qu'il s'agit d'un litige relatif à des relations de travail au sein d'une entreprise de compétence fédérale, FedEx se réserve le droit de contester l'applicabilité de la Loi sur le secteur privé. Le 5 décembre 1997, invoquant l'article 95 du Code de procédure civile3, les procureurs de FedEx font signifier au Procureur général du Québec (le « Procureur général ») un Avis l'informant de l'intention de leur cliente de faire déclarer inapplicable constitutionnellement, à son égard, la Loi sur le secteur privé compte tenu qu'elle est une entreprise soumise à la juridiction fédérale. Une copie de cet avis est transmise à la Commission. L'AUDIENCE L’audience de cette cause a été fixée pour la première fois au 6 janvier 1998 pour être ensuite reportée au 26 juin 1998 et au 16 août 2002. Cette cause a été entendue à Montréal, le 23 octobre 2002, en présence de M. Pierre et des témoins de FedEx. Les objections préliminaires À l'audience, Me Robert Dupont, procureur de FedEx, soumet trois objections préliminaires pouvant se résumer comme suit : 2 3 Partie 1 de la Loi constitutionnelle de 1982 [annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (1982, R.-U., c. 11)]. L.R.Q., c. C-25. 97 11 31 -3- 1. Non-respect du délai de présentation de la demande d'examen de mésentente : M. Pierre a produit à la Commission sa demande d’examen de mésentente hors du délai prescrit par la Loi sur le secteur privé. M. Pierre a fait sa demande d’accès initiale à FedEx le 30 mai 1995 qui ne lui a pas répondu dans le délai prévu à cette loi. Il a préféré présenter d’autres demandes et soumettre à la Commission une demande d’examen de mésentente, le 20 juin 1997; 2. Secret professionnel : Le rapport recherché par M. Pierre est préparé par FedEx, dans le but de présenter sa défense, à l’encontre d’une poursuite éventuelle que ce dernier pourrait présenter devant les tribunaux. Il s'agit d'un document confidentiel, couvert par le secret professionnel. 3. Inapplicabilité de la Loi sur le secteur privé à FedEx : Bien que cette loi soit constitutionnellement valide, elle ne peut pas s’appliquer à FedEx qui est de compétence fédérale. Les motifs d’inconstitutionnalité et d’inapplicabilité de la Loi sur le secteur privé à FedEx sont invoqués en ces termes dans l’Avis d’intention signifié au Procureur général : Plus précisément, Fédéral Express prétend que ces dispositions sont inapplicables à une entreprise de compétence fédérale aux termes des paragraphes 91(29) et 92(10) de la Loi constitutionnelle de 1867 puisqu’elles portent atteinte à sa spécificité en tant qu’entreprise fédérale et constituent une immixtion indue dans le domaine de sa gestion et de ses opérations. En particulier, et sans toutefois restreindre la généralité de ce qui précède, le litige opposant le demandeur à Fédéral Express porte sur une question de conditions de travail et de relations de travail. LES TÉMOIGNAGES M. Steve Morgan, témoin pour FedEx M. Morgan, qui témoigne sous serment, a occupé diverses fonctions chez FedEx depuis 1989 dont celle de gérant des opérations au bureau de « district » situé à Ville Saint-Laurent, en 1994-1995, soit à l'époque où M. Pierre y travaillait. Depuis le mois de février 2002, M. Morgan occupe un poste similaire au bureau de Mirabel. M. Morgan indique que FedEx assure le transport, la cueillette et la livraison de colis, par voie aérienne et terrestre au Canada et à travers le monde, 97 11 31 -4- incluant les États-Unis. Il explique que FedEx emploie plus de 150 000 personnes réparties au Canada et dans plus de 210 pays où elle possède des points de vente (pièce E-1, onglet 3). Ses opérations canadiennes sont divisées entre quatre districts : région métropolitaine de Toronto, Ontario (excluant Toronto), Est canadien (excluant l'Ontario) et Ouest canadien. FedEx opère dans 59 grandes villes canadiennes et dessert plusieurs aéroports; elle traite plus d’un million de colis quotidiennement et douze de ses avions quittent ou arrivent à Mirabel à tous les jours. M. Morgan explique certaines terminologies utilisées par l’industrie aéronautique pour identifier les aéroports. Par exemple, YVR représente Vancouver, YUL : Saint-Laurent, YMX : Mirabel, YQB : Québec; YYZ : Ontario. M. Morgan ajoute que FedEx dessert quotidiennement trois aéroports américains, à savoir : MEM : Memphis, AOK : Oakland et EWR : New Jersey. M. Morgan fournit, à titre d'exemple, le trajet effectué par un colis entre Los Angeles aux États-Unis et Terre-Neuve au Canada; et ensuite, un autre trajet de Montréal à Toronto, en passant par Saint-Laurent (YUL). Il affirme que les employés de FedEx procèdent au transfert, au chargement, au dédouanement de ces colis durant tout leur trajet, et ce, jusqu’à leur livraison aux destinataires. Selon M. Morgan, environ 10 % de colis sont livrés au Québec, tandis que 90 % des colis qui transitent par Mirabel, sont livrés à l’extérieur de cette province et à travers le monde. Il ajoute que FedEx est reconnue comme « courtier en douanes » au bureau de douanes de Toronto, tel qu’il est indiqué à l’ « Agrément de courtier en douane » délivré par le Ministre du Revenu national (pièce E-1, onglet 8). Les principaux compétiteurs de FedEx seraient : Purolator, DHL, UPS et Loomis. 97 11 31 -5- Contre-interrogatoire de M. Morgan par Me Jean-François Boulais, pour le Procureur général M. Morgan réitère que FedEx fait le transport, la cueillette et la livraison de colis à l'échelle nationale et internationale. À la suite d'une question de l’avocat du Procureur général qui demande au témoin une preuve selon laquelle cette entreprise serait de compétence fédérale, l’avocat de FedEx intervient et réfère Me Boulais à certains documents contenus à la pièce cotée E-1 et correspondant aux onglets 8, 16, 17, 19 et 32. Me Dupont ajoute que, pour la province de Québec, les frais d’employeur sont acquittés à la Commission de la santé et de la sécurité au travail (« CSST »), au taux imposé aux entreprises fédérales (pièce E-1, onglet 21). En réponse à une question de Me Boulais, M. Morgan souligne que FedEx applique des tarifs qui diffèrent à l'échelle pancanadienne de ceux destinés à l'échelle internationale (pièce E-1, onglet 3). Mme Giovanna Pisani, témoin pour FedEx Mme Pisani témoigne sous serment et déclare qu’elle travaille chez FedEx depuis le mois de février 1991; elle est responsable des Ressources humaines pour la province de Québec et assiste les gestionnaires dans l’application des politiques corporatives. Elle rend compte de ses activités professionnelles à sa supérieure immédiate, Mme Sue Singleton, responsable des relations avec les employés; cette dernière relève de Mme Donna Brazelton, directrice de la gestion du personnel. Leurs bureaux sont situés à Toronto (pièce E-1, onglet 5). Mme Pisani déclare que le dossier permanent d’un employé est conservé au bureau de Toronto, mais qu'une copie est disponible sur son lieu de travail. Elle souligne que FedEx est régie par le Code canadien du travail4 (le « C.c.t. ») et par 4 L.R.C. [1985], c. L-2, mod. par L.R.C. [1985], c. 9 (1er supp.). 97 11 31 -6- ses règlements (pièce E-2). Le « Manuel de l’employé » énonce les conditions de travail de tous les employés au Canada et mentionne l'existence d'une politique de FedEx contre le harcèlement en milieu de travail, mise à jour en 1993 (pièce E-1, onglet 2, p. 93; onglets 22 et 23). Par ailleurs, Mme Pisani explique qu’un employé peut faire une demande verbale ou écrite pour avoir accès à son dossier (pièce E-1, onglet 11). Elle précise cependant que FedEx ne possède pas de protocole établissant les règles pour répondre à ces demandes. Mme Pisani déclare avoir reçu les plaintes que lui avait adressées M. Pierre en date des 23, 29 mai et 6 juillet 1995 (pièce E-1, onglets 24, 25, 26 et 28), lesquelles ont trait à des allégations de discrimination contre certains de ses supérieurs. Elle ajoute avoir reçu ses demandes d’accès datées du 30 mai et 10 juillet 1995 (onglets 27 et 29) et ne pas avoir répondu à M. Pierre. Mme Pisani déclare ne pas se rappeler avoir reçu la demande d’accès datée du 20 juin 1997 de M. Pierre et prétend ignorer si un autre représentant de FedEx a donné suite à cette demande. Elle explique que, sur réception des allégations de M. Pierre, elle a immédiatement mené une enquête interne et a rédigé un rapport ayant pour but de présenter une défense dans l’éventualité où celui-ci intenterait des procédures judiciaires contre FedEx. Elle considère ce document comme étant confidentiel et s’engage à le communiquer à la soussignée sous le sceau de la confidentialité. Mme Pisani déclare qu’un exemplaire de ce rapport a été transmis à quatre personnes dont au conseiller juridique de FedEx à l’époque, Me McNamee; au directeur régional et au cabinet d’avocats pour lequel travaille Me Dupont à titre de procureur pour l'entreprise. 97 11 31 -7- Mme Pisani précise avoir aussi transmis le rapport à la direction du personnel à Toronto, à Mme Brazelton qui, le 10 juillet 1995, a informé M. Pierre qu’un comité avait examiné ses allégations et avait conclu à l’absence de discrimination de la part de FedEx (onglet 30). De plus, Mme Pisani indique avoir été interrogée par un représentant de la Commission canadienne des droits de la personne (« CCDP »). Elle explique que FedEx a refusé de remettre une copie de ce rapport à la CCDP car il contenait des informations privilégiées. Elle ajoute que l’enquête de la CCDP s'est conclue en décembre 1997 par le rejet de la plainte de M. Pierre (onglet 32). Contre-interrogatoire de Mme Pisani par Me Boulais, pour le Procureur général En contre-interrogatoire, Mme Pisani précise que : le rapport interne est daté du 1er juin 1995; l'interrogatoire pour la CCDP a été mené par M. Charles Théroux, directeur des plaintes et enquêtes; sa supérieure hiérarchique, Mme Donna Brazelton, a écrit à M. Théroux, le 30 avril 1997, pour l'informer que FedEx lui refusait l'accès au rapport interne car ce dernier revêtait un caractère privilégié, protégé par le secret professionnel. M. Pierre, demandeur M. Pierre témoigne, sous serment, qu’il a travaillé pour FedEx durant l’année 1994-1995. Il déclare détenir un diplôme en génie mécanique et avoir suivi une formation en informatique. En ce qui concerne sa demande d’accès, M. Pierre affirme en avoir soumis plusieurs à FedEx sans jamais avoir obtenu de réponse. 97 11 31 -8- PLAIDOIRIES ET DÉCISIONS SUR LES TROIS OBJECTIONS PRÉLIMINAIRES Première objection préliminaire : Non-respect du délai de présentation de la demande d'examen de mésentente Me Robert Dupont, procureur pour FedEx Me Dupont argue que M. Pierre a soumis, le 30 mai 1995, une demande d'accès à FedEx, à l’attention de Mme Pisani, qui n'y a pas répondu. M. Pierre aurait dû alors présenter sa demande d’examen de mésentente à la Commission dans un délai de trente jours tel que le prévoit l'article 43 de la Loi sur le secteur privé pour le cas du refus par une entreprise d’acquiescer à une demande ou en l’absence d’une réponse. L’avocat argue que le non-respect de ce délai devrait mener au rejet de cette demande. Il plaide qu’aucun élément de preuve n’a démontré que FedEx avait reçu la demande d’accès de M. Pierre datée du 20 juin 1997. À son avis, M. Pierre ne peut prétendre à ce que la Commission soit valablement saisie de cette nouvelle demande et qu'elle accueille sa demande d'examen de mésentente datée du 21 juillet 1997. Me Dupont rappelle que Mme Pisani a déclaré ne pas se rappeler avoir reçu la demande d’accès datée du 20 juin 1997. L’avocat admet cependant qu’une personne peut soumettre à une entreprise plusieurs demandes d’accès pour un même document, comme dans le cas en l’espèce; il considère toutefois que la demande de M. Pierre devant la Commission est hors délai, pour les motifs ci-dessus indiqués. Me Boulais, pour le Procureur général Me Boulais n’a pas de commentaires à émettre quant à cette première objection. Il cite et commente cependant une lettre datée du 18 novembre 1997 97 11 31 -9- que Me McNamee, alors conseiller juridique de FedEx, avait fait parvenir à la Commission au sujet du rapport recherché par M. Pierre : [...] Nonetheless, in the course of his complaint, Mr. Pierre has requested production of a report which was prepared by the Company after the filing of his complaint and specifically for the purpose of defending, the complaint Federal Express has maintained from the outset that this report, being prepared in contemplation of litigation, is a priviledged document which the Company cannot be compelled to produce. [...] Décision sur la première objection La preuve non contestée démontre que, le 30 mai 1995, M. Pierre a demandé à Mme Pisani une copie de son rapport interne en prenant le soin de préciser « quand ce sera terminé ». Malgré l'absence d'une réponse de FedEx, il n’a pas soumis à la Commission une demande d’examen de mésentente dans le délai de trente jours prévu à l'article 43 de la Loi sur le secteur privé. La preuve non contestée démontre également que M. Pierre a soumis une nouvelle demande, le 6 juillet 1995, qui est demeurée elle aussi sans réponse. Toutes ces demandes ont été adressées à Mme Pisani, à l’exception de celle datée du 20 juin 1997 qui le fut au « Bureau du personnel » de FedEx dont elle est la responsable. Celle-ci a souligné ne pas se rappeler avoir reçu cette dernière demande d’accès. Cependant, la soussignée constate que lorsque FedEx a été informée de la demande d’examen de mésentente de M. Pierre datée du 21 juillet 1997, elle ne s’y est pas opposée et n’a pas demandé de précision. FedEx, par l’intermédiaire de son conseiller juridique, Me McNamee, a plutôt fait connaître à la Commission, le 18 novembre 1997, sa position et les motifs qu'elle invoquait pour refuser à M. Pierre l’accès au rapport. 97 11 31 - 10 - Un extrait de cette réponse a été lu et commenté, à l’audience, par l'avocat du Procureur général. Par ailleurs, la soussignée est d’avis que la Loi sur le secteur privé n’interdit nullement à M. Pierre de présenter à FedEx plusieurs demandes pour avoir d’accès à un même document, comme l’a si bien rappelé Me Dupont. Cependant, l’article 46 de cette loi permet à une personne qui exploite une entreprise de demander à la Commission à ne pas tenir compte des demandes qui lui sont adressées si elle les considère abusives, notamment par leur nombre; cette demande n'a pas été faite. La première objection préliminaire est donc rejetée. Deuxième objection : le secret professionnel Me Dupont, procureur de FedEx Me Dupont plaide que le document recherché revêt un caractère privilégié et qu'il est protégé par le secret professionnel en vertu de l’article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne5. Il ajoute que FedEx possède une politique contre le harcèlement en milieu de travail dans laquelle il est précisé que le Service juridique exige que toute enquête soit faite en prévision d'un éventuel litige pour lequel l'entreprise aurait à se défendre (onglet 22). À cet effet, Me Dupont réfère la Commission à un jugement rendu par la Cour du Banc du Roi dans Montreal Street Railway Co. c. Feigleman6, par lequel la Cour a statué notamment que les documents rédigés pour l’information des avocats, à l’occasion ou en prévision d’un procès, sont d’une nature confidentielle et participent à l’immunité du secret professionnel. 5 6 L.R.Q., c. C-12. [1913] 22 B.R. 102, 110. 97 11 31 - 11 - Le fait que le rapport n’a pas été fait à la demande des procureurs de la compagnie, ne saurait affecter la question. [...] il importe peu que le document ait été, ou non, préparé à la demande de l’avocat; il suffit qu’il ait été préparé pour être communiqué à l’avocat, au cas du procès, afin de lui permettre de préparer et de conduire la défense.[...] Dans le cas en l’espèce, l’avocat argue qu’effectivement, Mme Pisani a préparé et rédigé le rapport à cette fin et qu'elle l'a remis à quatre personnes, dont au conseiller juridique et au procureur de FedEx. Celle-ci a refusé de remettre une copie de ce document à la CCDP. Me Dupont commente la décision Cité de Côte St-Luc c. Vecsei et Commission d’accès à l’information7, par laquelle la Cour supérieure a confirmé la décision de la Commission qui avait refusé à la municipalité l’accès à un rapport d’experts. D’autres jugements et notes d’autorités ont été commentés par l’avocat de FedEx, notamment : • Rondeau c. Fafard et Bellehumeur8; • L’administration de la preuve9 de Léo Ducharme; • AL-Zand c. Select Security inc.10; • Sécurité Assurances générales c. Gravel et Commission d’accès à l’information11; • Fédération des travailleurs du papier et de la forêt c. Commission d’accès à l’information 12. Me Boulais, pour le Procureur général L’avocat du Procureur général déclare rejoindre les arguments de FedEx sur la question du secret professionnel protégeant le rapport interne. Il ajoute avoir déjà communiqué avec M. Pierre qui n’a pas nié avoir besoin du document dans le contexte d’un litige éventuel contre FedEx, tel qu'il est mentionné au deuxième 7 8 9 10 11 12 [1989] C.A.I. 85. [1976] C.S. 1148. Léo DUCHARME, 3e édition, Wilson et Lafleur ltée, 2001. [1996] C.A.I. 157. [2001] C.A.I. 408. [1998] C.A.I. 565 (C.S.). 97 11 31 - 12 - paragraphe de la lettre envoyée, le 18 novembre 1997, par Me McNamee à la Commission. Me Boulais estime que la Commission doit faire preuve de retenue avant de se prononcer sur une question constitutionnelle, s’agissant d’un rapport identifié qui risque d’avoir un effet sur une procédure judiciaire. M. Pierre, demandeur M. Pierre, pour sa part, souligne qu’il souhaite obtenir une copie de ce rapport car il désire connaître la version des témoins qui ont été rencontrés par FedEx dans le cadre de son enquête interne. Décision sur la deuxième objection La soussignée est d’avis qu’avant de statuer sur le caractère confidentiel du document que FedEx considère être protégé par le secret professionnel, une preuve complète est nécessaire et que les parties impliquées à ce litige auront l’occasion de faire connaître leur point de vue lors de l'audience qui se tiendra sur le fond de la demande d'examen de mésentente. Cette objection préliminaire est donc rejetée. Troisième objection : l’inapplicabilité de la Loi sur le secteur privé à FedEx Me Dupont, procureur de FedEx ARGUMENTS ET JURISPRUDENCE Me Dupont rappelle que FedEx, étant de compétence fédérale, est assujettie au C.c.t., dont particulièrement aux articles 2 et 252, et à ses règlements (pièce E-2 précitée). Pour étayer cette position, l’avocat fait ressortir les éléments essentiels de la déposition de chacun des témoins de FedEx. 97 11 31 - 13 - Il argue qu’il ne met pas en doute la validité de la Loi sur le secteur privé adoptée par l’Assemblée nationale du Québec. Il met plutôt en cause l’applicabilité de cette loi à FedEx. Pour étayer cette position, l’avocat plaide que : 1. L’entreprise est assujettie au parlement fédéral; 2. La nature et l’objet de cette entreprise ne sont pas assujettis à la Loi sur le secteur privé; 3. Compte tenu la nature et l’objet de cette loi, celle-ci constitue une immixtion dans le pouvoir législatif du parlement fédéral. Me Dupont argue que lorsqu’une loi provinciale a un impact sur l’administration et sur la gestion d'une entreprise fédérale, cette loi ne doit pas s’appliquer à ladite entreprise. L’avocat rappelle les fonctions de FedEx qui fait du transport interprovincial de colis, sur un territoire qui s’étend au-delà des frontières canadiennes et à l'échelle internationale. L’avocat plaide à cet effet que les articles 91(29) et 92(10a) de la Loi constitutionnelle de 186713 traitent des pouvoirs exclusifs du parlement du Canada auquel FedEx est assujettie. Cette dernière opère ses activités, par voie terrestre ou aérienne, sur une base continue et régulière à l'échelle interprovinciale et internationale. À cet égard, l’avocat fournit en exemple les éléments factuels présentés à l’audience. De plus, Me Dupont plaide que puisque le caractère continu et régulier de son service va au-delà d’une frontière, FedEx, dans son ensemble, sera qualifiée comme une entreprise interprovinciale, indépendamment du volume de marchandises échangées, tel qu'il est statué au jugement Regina c. Toronto 13 30 & 31 Vict., R.-U., c. 3. 97 11 31 - 14 - Magistrates, Ex Parte Tank Truck Transport Ltd14, confirmé par la Cour d’appel de l’Ontario15. Dans la même lignée, l’avocat de FedEx cite et commente également d'autres décisions et de la doctrine, notamment : • Constitutional Law of Canada16, publié par M. Peter W. Hogg, selon lequel une entreprise faisant du transport interprovincial relève de la compétence exclusive du parlement fédéral; • Regina c. Cooksville Magistrate’s Court, Ex Parte Liquid Cargo Lines Ltd17; • Section locale 362 du syndicat des Teamsters c. Transport Rapide International DHL Ltée18; • Office and Technical Employees’s Union, section locale 15 c. Emery Worldwide, Richmond (B.C.)19; • Johannesson and Johannesson and Rural Municipality of West St-Paul c. Attorney General of Manitoba20. Dans le cas en l’espèce, Me Dupont rappelle que la preuve a démontré que FedEx offre un réseau intégré de cueillette et de livraison de colis à travers le Canada et à l'échelle mondiale; elle dessert plus de 210 pays (pièce E-1, onglet 3). Il rappelle notamment que FedEx possède 59 établissements principaux avec ses propres employés (onglet 6). L’avocat rappelle également que les employés de FedEx font du dédouanement de marchandises en vertu des pouvoirs qui lui sont accordés par Revenu Canada – Douanes et Accises (pièce E-1, onglet 8). 14 15 16 17 18 19 20 [1960] O.R. 497. Re Tank Truk Transport Ltd, [Court of Appeal] [1963] 1 O.R. 272. Peter W. HOGG, Volume 1, Toronto, Carswell, Thompson Professional Publishing, 1997, 22.5. [1965] 1 O.R. 84. [1994] 96 di 106, décision no 1101. [1989] 71 di 79, décision no 768. [1952] R.C.S. 292. 97 11 31 - 15 - LA LOI SUR LE SECTEUR PRIVÉ ET COMMENTAIRES Me Dupont argue que l’article 1 de la Loi sur le secteur privé ci-après mentionné s’applique aux renseignements personnels qu’une personne recueille, détient, utilise ou communique à autrui à l’occasion de « l’exploitation d’une entreprise » au sens de l’article 1525 du Code civil du Québec21 (« C.c.Q. ») : 1. La présente loi a pour objet d'établir, pour l'exercice des droits conférés par les articles 35 à 40 du Code civil du Québec en matière de protection des renseignements personnels, des règles particulières à l'égard des renseignements personnels sur autrui qu'une personne recueille, détient, utilise ou communique à des tiers à l'occasion de l'exploitation d'une entreprise au sens de l'article 1525 du Code civil du Québec. Elle s'applique à ces renseignements quelle que soit la nature de leur support et quelle que soit la forme sous laquelle ils sont accessibles: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 1525. [...] Constitue l'exploitation d'une entreprise l'exercice, par une ou plusieurs personnes, d'une activité économique organisée, qu'elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur aliénation, ou dans la prestation de services. Il indique que l’objet de cette loi consiste en la cueillette, la détention, l’utilisation et la communication de renseignements personnels des individus « dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise ». Ces renseignements sont nécessaires et font partie intégrante de la gestion et de l’administration de cette entreprise. Me Dupont fournit en exemple d’autres articles de cette loi provinciale : la constitution d’un dossier (article 4); la cueillette, la détention, l’utilisation ou la communication de renseignements (articles 6 et 9 à 14); les circonstances pour lesquelles un consentement est ou n'est pas requis (article 12 et 20), etc. L’avocat 21 L.Q. 1991, c. 64. 97 11 31 - 16 - ajoute que lorsqu’une entreprise constitue un dossier sur son personnel, la Loi sur le secteur privé vient interférer sur sa gestion et son exploitation. Me Dupont plaide également que la Loi sur le secteur privé est une loi provinciale, d’application générale, qui affecte les relations et conditions de travail des employés de FedEx. En effet, elle crée des obligations à celle-ci, quant à la cueillette, la détention, l’utilisation ou la communication de renseignements personnels concernant ses employés. Il ajoute que lorsque cette loi touche, dans un contexte fédéral, un élément essentiel à la gestion, aux relations et conditions de travail d'une entreprise, elle ne doit pas s’appliquer. L’avocat commente en ce sens la décision de la Cour suprême dans l'affaire Commission de la santé et de la sécurité du travail et Bilodeau c. Bell Canada22. Il cite et commente également le professeur Henri Brun : Le critère qui marque la limite de ce domaine d’application du droit provincial est donc une norme importante en droit constitutionnel. Sauf pour ce qui est du gouvernement fédéral, à l’endroit duquel la Cour suprême applique un critère d’immunité absolue24, c’était jusqu’en 1988, un « critère fonctionnel » qui était appliqué. Il s’agissait de savoir, dans chaque cas, si l’application envisagée du droit provincial était ou non susceptible d'empêcher de fonctionner l’entreprise fédérale ou encore, de façon plus générale, de produire un effet essentiel ou déterminant sur ce qui relève du fédéral.23 24 Alberta c. Commission canadienne des transports (1978) 1 R.C.S. 61, p. 72; P.G. Québec et Keable c. Procureur général du Canada (1979) 1 R.C.S. 218, p. 244. Dans ces circonstances et selon Me Dupont, la Loi sur le secteur privé ne peut donc pas s’appliquer. La Commission doit donc décliner compétence. 22 23 [1988] 1 R.C.S., 749. H. BRUN, « L'évolution récente de quelques principes généraux régissant le partage des compétences entre le fédéral et les provinces », dans Congrès annuel du Barreau du Québec [1992] 28. 97 11 31 - 17 - Par ailleurs, l’avocat souligne que, dans l’éventualité où la Commission rejette l’objection préliminaire de FedEx sur l'un ou l'autre des trois points, celle-ci serait prête à soumettre sa preuve lors d’une prochaine audience quant au caractère confidentiel du rapport sur lequel est invoqué le secret professionnel comme motif de refus d’accès à M. Pierre. Me Boulais, pour le Procureur général ARGUMENTAIRE SUBSIDIAIRE Me Boulais fait un résumé de la déposition des témoins incluant celle de M. Pierre. L’avocat souligne, entre autres, le témoignage de Mme Pisani qui déclare que le rapport interne est daté du 1er juin 1995. Il réfère à l’onglet 32 de la liste des pièces (pièce E-1) soumises à l’audience par FedEx et à la lettre par laquelle elle a refusé à la CCDP l’accès au rapport en invoquant le secret professionnel. De façon subsidiaire, Me Boulais fait remarquer que FedEx ne conteste pas les dispositions du C.c.Q. et les droits des citoyens à avoir accès aux renseignements les concernant et détenus par une entreprise. Cette dernière conteste plutôt l’application d’une loi provinciale valide sur FedEx qui, elle, est régie par le parlement fédéral et par le C.c.t. Me Boulais commente l’arrêt Bell24 précité où la Cour suprême traite de « la partie essentielle d’une entreprise » sans toutefois définir ce terme. Cette cour devait statuer notamment sur le retrait préventif que la CSST, créée par la Loi sur la santé et sur la sécurité au travail25, avait accordé à une femme enceinte à l’emploi de Bell Canada, entreprise fédérale. 24 25 Précité, note 22. L.R.Q. c., S-21. 97 11 31 - 18 - Dans le cas sous étude, Me Boulais insiste pour dire que la Loi sur le secteur privé ne touche pas une partie essentielle de FedEx telle le transport, la cueillette et la livraison des colis. Cette loi ne touche que de façon accessoire à la gestion de FedEx. Il indique que la loi provinciale n’a pas pour effet véritable de régir les relations de travail tel qu’il en est ressorti au jugement Transport Robert ltée c. Société québécoise de développement et de la main-d’œuvre26. Dans le cas en l'espèce, l’avocat du Procureur général souligne que M. Pierre était un employé de FedEx et qu'il ne l’est plus. Il considère que la Loi sur le secteur privé s’applique tel que l'a statué la Commission dans les décisions Jabre c. Middle East Airlines-Airliban27 et De Bellefeuille c. Canpar Transport limitée et Procureur général du Québec28. Dans ces deux cas, la Commission a décidé que la Loi sur le secteur privé ne touche pas l’une ou l’autre des parties essentielles de l’entreprise et qu'elle n’affecte pas un élément vital de sa gestion ou de son exploitation (par exemple : les relations et conditions de travail). ARGUMENTAIRE PRINCIPAL En argumentaire principal, Me Boulais invite la soussignée à faire preuve de retenue et à ne pas statuer sur une question constitutionnelle [...] lorsqu’il n’est pas nécessaire de le faire pour trancher le litige qui lui est soumis. [...] La jurisprudence dans son ensemble préconise donc la prudence des juges devant le plaidoyer d’inconstitutionnalité29. 26 27 28 29 C.A. Québec 200-09-001773-974, 11 septembre 2000, j. Michaud, Otis et Forget. [1998] C.A.I. 404 [1998] C.A.I. 178. A. TREMBLAY, Droit constitutionnel - Principes, Montréal, Les Éditions Thémis, 1993, 203. 97 11 31 - 19 - Le même raisonnement est ressorti des décisions Philips c. NouvelleÉcosse30 (Commission d’enquête sur la tragédie de la mine Westray) et Procureur général du Québec c. Cumming31. Me Boulais ajoute que la Commission est un tribunal administratif créé par sa loi constituante. Elle a notamment pour fonctions de rendre justice aux citoyens qui souhaitent avoir accès à des documents, comme dans le cas en l’espèce, sous réserve des restrictions législatives. Réplique de Me Dupont, avocat de FedEx Me Dupont réplique que la Loi sur le secteur privé a un impact majeur sur la gestion de FedEx qui est régie par le parlement fédéral et le C.c.t.; il réfère à cet effet à la définition qu’accorde l’article 1 de cette loi à « l’exploitation d’une entreprise ». En ce qui concerne l'affaire Jabre32 précitée, l’avocat mentionne que, dans cette décision, la gestion de l'entreprise n’a pas été abordée. Il réitère que, dans le cas sous étude, toutes les informations recueillies par FedEx relatives à ses employés, l’ont été dans le cadre de sa gestion et de son administration. Décision sur la troisième objection L’article 1 de la Loi sur le secteur privé définit l’objet de cette loi qui est de compétence provinciale, d’application générale, pour l’exercice des droits fondamentaux accordés à un citoyen en conformité aux articles 35 à 40 du C.c.Q. en matière de protection des renseignements personnels qu’une entreprise recueille, détient, utilise ou communique sur lui à l’occasion de l’exploitation de cette entreprise telle qu'elle est définie à l’article 1525 dudit code. 30 31 32 [1995] 2 R.C.S. 97. [1978] 2 R.C.S. 605. Précitée, note 27. 97 11 31 - 20 - La preuve non contestée démontre que FedEx fait du transport, de la cueillette et de la livraison de colis à l'échelle pancanadienne et mondiale. Par ailleurs, il importe de mentionner que les dispositions législatives décrites à l'article 94 de la Loi sur le secteur privé ci-après mentionné indiquent leur primauté sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que celles-ci ne prévoient clairement s'appliquer malgré cette loi. 94. Les dispositions de la présente loi prévalent sur celles d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur seraient contraires, à moins que cette dernière loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la présente loi. Toutefois elles n'ont pas pour effet de restreindre la protection des renseignements personnels ou l'accès d'une personne concernée à ces renseignements, résultant de l'application d'une autre loi, d'un règlement, d'un décret, d'une convention collective, d'un arrêté ou d'une pratique établie avant le 1er janvier 1994. En faisant référence à l'article 168 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels33 (la « Loi sur l'accès »), dans la décision Conseil de la magistrature du Québec c. Commission d'accès à l'information et Robert34, le juge Beaudoin a décidé qu'« il s'agit d'une loi quasi constitutionnelle » que la doctrine adopte sans détour. Il ajoute que : [50] La loi, par son rattachement à certains droits fondamentaux protégés par la Charte des droits et libertés de la personne (droit à la protection de la vie privée (art. 5); droit à l'information (art. 44)) a donc un caractère législatif fondamental. La soussignée considère que, dans un contexte similaire, ces commentaires peuvent se transposer à l'article 94 de la Loi sur le secteur privé, lequel est analogue à l'article 168 de la Loi sur l'accès. Le caractère fondamental 33 34 L.R.Q., c. A-2.1. [2000] C.A.I. 447 (C.A.). 97 11 31 - 21 - de cette loi et son caractère quasi constitutionnel laissent croire qu’elle en est une d'application générale, tel qu'il est ressorti, à une enquête menée par la Commission dans l'affaire Lamarre c. Banque Laurentienne et Konaté35. Dans la présente cause, la soussignée considère que la Loi sur le secteur privé en est une d’application générale qui interfère, de façon accessoire, dans la gestion de cette entreprise; cette loi n’a ni pour objet ni pour effet de régir les relations de travail des employés de FedEx. M. Pierre ne travaille plus pour cette entreprise depuis 1995. Le juge André Forget, de la Cour d'appel du Québec, à la décision Transport Robert36, s’exprime comme suit : […] D'ailleurs, comme le souligne le juge en chef Dickson dans l'affaire Irwin Toy, l'effet accessoire d'une loi provinciale sur une entreprise fédérale n'a pas pour effet de la rendre inapplicable à cette dernière : […] Le gouvernement fédéral a compétence exclusive en ce qui concerne les « éléments vitaux ou essentiels » d’une entreprise fédérale, y compris sa gestion, parce que ces aspects forment le « contenu de base minimum et inattaquable » du pouvoir établi par l’application du par. 91(29) et les exceptions du par. 92(1) de la Loi constitutionnelle de 1867. Aucune loi provinciale qui touche ces aspects ne peut s’appliquer à une entreprise fédérale. Toutefois, lorsque la loi provinciale n’a pas pour objet de s’appliquer à une entreprise fédérale, son effet accessoire, même à l’égard d’un élément essentiel de l’exploitation de l’entreprise, n’aura normalement pas pour effet de rendre la loi provinciale ultra vires. (Le juge Forget a souligné.) Ainsi la soussignée fait siens les commentaires des commissaires, dans l'affaire Lamarre37 précitée : 35 36 37 C.A.I. Montréal no PV 99 09 63, 21 août 2002, cc. Boissinot, Laporte et Stoddart. Transport Robert c. Société québécoise de développement de la main précitée, note 26, p. 13. Lamarre c. Banque Laurentienne et Konaté, précitée, note 35, p. 11. d'oeuvre, 97 11 31 - 22 - La Commission n'a pu retrouver, dans la loi qui nous concerne, les dispositions qui pourraient entraver ou menacer les aspects vitaux ou essentiels de la Banque. La Commission est d'avis, à la lumière de la preuve, de la jurisprudence étudiée et de l'interprétation qui peut en découler, que la Loi sur le secteur privé est applicable en l'espèce et n'est pas, comme le prétend le procureur de la Banque, inopérante. PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION : REJETTE les première et troisième objections préliminaires soulevées par Féréral Express Canada ltée, à savoir sur le non-respect par M. Pierre du délai de présentation à la Commission de sa demande d’examen de mésentente et sur l’inapplicabilité de la Loi sur le secteur privé à cette entreprise; DÉCLARE que la Commission est compétente pour entendre la demande d’examen de mésentente de M. Fritz David Pierre; CONVOQUE les parties à l’audience `sur le fond de cette cause traitant du caractère confidentiel du document que FedEx considère etre protégé par le secret professionnel ; l’avis de convocation pour cette audience leur sera communiqué à une date ultérieure par la Commission. CHRISTIANE CONSTANT Commissaire Montréal, le 20 février 2003 Me Robert Dupont Heenan Blaikie Procureurs de FedEx Me Jean-François Boulais Bernard, Roy & Associés Procureurs du Procureur général