Marseille, le 10 octobre 2006 Intervention de Mme Corinne
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Marseille, le 10 octobre 2006 Intervention de Mme Corinne
Marseille, le 10 octobre 2006 COLLOQUE « TRAJECTOIRES DE LA PRECARITE PROFESSIONNELLE ET SOCIALE EN REGION PROVENCE-ALPES-COTE D’AZUR ». Intervention de Mme Corinne BOUARD Conseillère technique aux Interventions Sociales de la CAF des Bouches-du-Rhône Mon intervention se situe à 3 niveaux : premièrement, Pourquoi le service social CAF a axé une partie de son action sur des publics en situation d’activité ? Deuxièmement, qui est ce public et quel type d’accompagnement social faisons-nous ? et je terminerai par une illustration : la situation de Mme X I. Pourquoi, quand et comment le service social CAF a axé son action sur ce public Il y a 4 ans, la CAF a redéfini les missions et les modes d’intervention de son service social en recentrant notamment l’accompagnement social individuel sur un accompagnement plus préventif et mieux qualifié. Pour ce faire, elle s’est appuyée : --d’une part sur le schéma de Robert CASTEL concernant la désaffiliation. La zone de vulnérabilité ( travail précaire + relations sociales distendues) a concouru à définir un ciblage de public sur des publics fragilisés dans une optique de prévention de l’exclusion et de la rupture de tous liens ; parmi eux des salariés en situation de précarité et de vulnérabilité. --d’autre part sur la notion de reste à vivre instituée par la loi contre les exclusions de 1998. Nous nous sommes appropriés cette notion pour qu’elle devienne une référence commune et permette : 1 aux Travailleurs sociaux d’apprécier de façon plus réaliste la situation budgétaire d’une famille et lors d’une demande d’aide financière de proposer un montage financier (prêt/subvention) adapté à la capacité budgétaire. aux administrateurs d’apprécier la situation financière et de prendre des décisions équitables. Le reste à vivre se calcule de la façon suivante : RESSOURCES - CHARGES / Nombre de personnes/ 30 Jours NB reste à vivre repère 6 à 8 euros par jour et par personne II Qui est ce public et quel type d’accompagnement social faisons-nous ? Qui est ce public ? Il est toujours difficile et hasardeux de donner un profil type mais à partir de notre expérience de terrain, je voudrais vous faire partager nos constats. Les familles que nous accompagnons sont souvent pour le public dont nous parlons aujourd’hui : des familles monoparentales dans plus de la moitié des situations. pas forcément nombreuses : 1 à 2 enfants les ¾ du temps locataires travaillant à temps partiel (CDD ou CDI) la plupart du temps. dans les secteurs de l’animation de l’aide à domicile (et ce n’est là qu’un début) ou encore comme agent d’entretien. leur reste à vivre : souvent < à 6 euros/J/pers. (46%) sachant que la plupart ont un endettement sous la forme de crédits à la consommation. Il s’agit d’apporter un soutien lors d’un déséquilibre lié à un événement particulier : quel est cet événement ou ces événements car bien sûr il y a parfois cumul : - 43% la maladie (qui entraîne une baisse de revenus lorsqu’il n’y a pas de complément employeur) - 25% la séparation, facteur de précarisation des ressources , on le sait bien maintenant. - 21% la perte d’emploi Quel type d’accompagnement social faisons-nous ? 2 axes principaux pour ces situations : 1) un accompagnement d’accès aux droits , aux services et aux équipements : Droits « Prestations familiales » pour les changements de situation pouvant permettre des abattements sur les ressources et entraîner une augmentation des « prestations logements », rétablissement de droits à ces prestations (quand faute de quittance le droit est suspendu), ouverture de droits à l’ASF par exemple… Accès aux services et équipements tels que Banque de France dans les situations de surendettement , orientation vers les équipements de quartier : types centres sociaux (car on constate aussi souvent l’isolement social et le repli) ou vers le secteur de la santé 2 2) un accompagnement budgétaire pour favoriser une gestion la plus rigoureuse et régulière possible : mensualisation, mais aussi un travail de fond sur les choix budgétaires (notamment autour des charges dites compressibles) Complémentairement à ces 2 axes, sont travaillés : 1) l’aspect éducatif et relationnel au sein de la famille (relations enfants /parents, parents /ado…) 2) l’accompagnement à l’accès à l’emploi chaque fois que l’on sent des potentialités et un projet professionnel possible III Illustration : la situation de Mme X Pour terminer et illustrer mes propos , je voudrais vous présenter la situation de Mme X Mme X: - Mme 42 ans , en instance de divorce - 2 enfants 19 ans et 14 ans - locataire d’un T3/4 dans une grande agglomération (Marseille), bailleur public -travail à temps partiel non choisi comme agent d’entretien -endettement lié à la présence de 3 crédits éléments déclenchant : --séparation en 2005 qui entraîne les premières difficultés financières, Mme conserve le logement , situé sur une petite commune alentour de Marseille,mais elle ne peut plus assumer les charges (chauffage électrique avec une moyenne de 180 euros/ mois d’EDF) le déménagement est incontournable ; il est effectif en janvier 2006. --déménagement en janvier 2006 qui entraîne des frais de relogement :600 euros + 557 euros de caution soit 1157 euros En avril 2006, l’ancien bailleur(bailleur public lui aussi) réclame 952 euro de régularisation d’eau, de frais de réparation (volets), et loyer résiduel dernier mois. Mme ne peut pas payer, c’est à ce moment là qu’elle s’adresse à notre service social --départ de son fils aîné en juin 2006, ce qui entraîne : -une perte des Allocations Familiales pour 2 enfants : 147,43 euros -une perte de l’APL: 178,30 euros -une baisse de la pension alimentaire :200 euros Quand on regarde le budget, que constate t-on ? - Au niveau des ressources : le départ de l’aîné fait baisser les ressources de 525,73 euros soit environ 32% en moins - Au niveau des charges : 2 remarques : - Les charges mensuelles n’ont guère varié (883 euros avant /866 euros après le départ de l’aîné) - Les crédits qui représentaient 20% des ressources avant le départ de l’aîné (318 / 1650,73) représentent après le départ de l’aîné 28% de ses nouvelles ressources (318 / 1125) - Et lorsqu’on regarde le reste à vivre , qui passe de 4,99 euros par jour et par personne avant le départ de l’aîné à – 0,98 euro après le départ de l’aîné, on comprend bien qu’il ne peut y avoir que des impayés et un découvert bancaire. 3 L’accompagnement social porte sur : - l’accès aux droits service et équipement : orientation vers la banque de France - l’accompagnement budgétaire - l’accompagnement à l’accès à l’emploi par un bilan de compétence pour obtenir une VAE et rechercher un emploi plus rémunérateur la situation de Mme X nous montre comment un faisceau d’événements, somme toutes ordinaires : une séparation, un déménagement, le départ des enfants, peut faire basculer à un moment donné le cours d’une vie car non seulement ces événements constituent en soi des étapes (la séparation et le départ des enfants sont malgré tout des événements familiaux marquants) mais se greffent en plus là dessus les épreuves financières alors que cette dame a un salaire qui plus est proche du SMIG même si elle est à temps partiel… 4