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SHS Web of Conferences 22, 00008 (2015)
DOI: 10.1051/shsconf/20152200008
C Owned by the authors, published by EDP Sciences, 2015
Les recueils de questions-réponses à l’Epoque Moderne : une
forme de transmission du savoir scientifique ?
Iolanda Ventura
CNRS-IRHT, Centre Augustin Thierry/Université d’Orléans ; Labex HASTEC ANR-10-LABX-85,
PC 5, COMMENT-R1 , France
Résumé. Mon article traite du genre littéraire des recueils scientifiques de questionsréponses, et en particulier des critères qui permettent une identification et une caractérisation
des différents types de textes structurés de cette façon. Ces critères, tels que la structure des
unités textuelles formées par les questions et les réponses, la présence et le rôle des sources,
la séquence des sujets et l’image du monde de la nature livrée par ces œuvres, permettent
aussi de mieux comprendre le rôle et la fonction de chaque texte et type de texte, ainsi
que du genre littéraire en général, dans le mouvement de transmission du savoir au Moyen
Age, à la Renaissance et à l’Epoque moderne. A l’aide de ces critères, je livre une analyse
de deux recueils écrits au XVIe et au XVIIe siècle, les Problemas de Francisco Lopez de
Villalobos et les Pensieri diversi d’Alessandro Tassoni.
Abstract. Collections of questions-and-answers in the Modern Area: a form of
transmission of scientific knowledge? My article deals with the literary genre of the
scientific collections written in questions-and-answers form. More particularly, I will
describe the criteria I use in order to identify and catalog the various texts structured in
this specific form, and to understand the way in which they contribute to the transmission of
scientific knowledge. That criteria can be identified in the structure shown by each textual
unity consisting in question + answer, in the mention of the sources and the function they
fulfill in the text, in the sequence of topics the compilers deal with and the image of the
natural world they deliver. With the help of such criteria, I will examine two collections
written during the 16th and the 17th century, Francisco Lopez de Villalobos’ Problemas and
Alessandro Tassoni’s Pensieri diversi.
1. Introduction
Pendant les dernières décennies, les textes encyclopédiques, la culture encyclopédique et
l’encyclopédisme ont attiré l’attention d’un nombre croissant de chercheurs2 . En particulier, le nouvel
intérêt montré par la recherche pour les textes encyclopédiques a contribué à les faire changer de statut,
1 Ce texte reprend le contenu de deux séminaires données en Septembre 2012 et en Septembre 2014. Je remercie les participants
à ces séminaires, et en particulier Mme Jeanne Peiffer, M. Bernard Vitrac, et Mme Francesca Aceto. Un merci particulier va à mes
relecteurs, Mme Giovanna Cifoletti et M. Stéphane Lamassé, et à M. Alain Bernard, sans lequel ce texte n’aurait jamais été écrit.
2 Sur la littérature encyclopédique du Moyen Age, de la Renaissance et de l’époque moderne, voir les volumes collectifs (Picone
1994, Meier 2002, De Callataÿ et Van den Abeele 2009, Zucker 2014).
This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License 4.0, which permits
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en les transformant de mélanges issus d’un simple travail de « copier-coller » complètement dépourvu
d’esprit critique et d’originalité en moyens privilégiés de collection, de transmission, de réception et
d’assimilation du savoir aux différentes époques. Une des méthodologies utilisées par les chercheurs
–et pour cette étude, la plus intéressante– consistait à mettre en relation les textes encyclopédiques avec
d’autres formes de collection, d’organisation et de transmission du savoir tels que les summae ou les
compendia philosophiques et scientifiques d’un côté, et les recueils consacrés aux sciences théoriques
(e.g., astronomie ou mathématique) ou aux « savoirs pratiques » (alchimie, pharmacie, parfumerie et
cosmétique) de l’autre. En montrant les points communs et les différences entre ces typologies de texte
et de transmission du savoir, la recherche – et en particulier les études concernant la Renaissance et
l’Epoque Moderne – a pu abstraire des textes encyclopédiques des notions plus théoriques qu’on a pu
mettre à la base d’une réflexion plus ample, comme par exemple celle de « culture encyclopédique » et
d’ « encyclopédisme ». Ces notions ont aussi acquis des significations propres : la première traduit,
grosso modo, la tentative de structurer, à travers les sources utilisées par les compilateurs et les
disciplines scientifiques qu’ils décrivent, l’arrière-plan culturel d’une époque et de le synthétiser dans
une compilation. La seconde traduit, de son coté, l’ambition plus large et profonde de maîtriser un
savoir universel et total, englobant tous les éléments du monde, tous les savoirs qui l’examinent, et tous
les livres qui en parlent.
En dépit des nombreuses recherches, les notions de texte encyclopédique, de culture encyclopédique,
et d’encyclopédisme ne sont toutefois ni bien établies ni toujours aperçues de la même manière. Au
contraire, presque chaque chercheur travaillant sur les encyclopédies de l’Antiquité, du Moyen Age, de
la Renaissance et de l’Epoque Moderne a mis à la base de ses travaux une notion d’encyclopédie et
de background culturel et intellectuel susceptible d’être défini comme « encyclopédique », en rendant
parfois le dialogue à l’intérieur de la recherche scientifique très complexe, voir impossible3 .
La situation se complique ultérieurement quand on cherche à voir une attitude ou une ambition
encyclopédique en termes d’intention de recueillir, organiser, transmettre et rendre accessible un savoir
« universel ». En premier lieu, c’est la notion même d’universalité qui pose problème, car elle peut,
en même temps, indiquer un savoir global regroupant toutes les disciplines, mais aussi un savoir
extrêmement riche et profond concernant une seule discipline, et la reflétant dans toutes ses formes
et contenus. En outre, il est parfois peu évident de retrouver cette notion (ou ambition) d’universalité
dans des textes qui ne sont pas des vraies « encyclopédies » (car ils n’ont ni de caractère universel
dans leur contenu, ni un titre qui renvoie à une universalité du savoir), mais qui relèvent d’un esprit
encyclopédique comme les recueils de secrets, les dialogues savants traitant du monde de la nature, les
dictionnaires et les recueils de « lieux communs ». Cet élargissement de sens pose une question qui est,
et reste, la suivante : le fait d’avoir traité d’un ensemble de disciplines et de notions variées, d’avoir eu
l’ambition de livrer une multitude de notions, de reproduire et de mettre à disposition un savoir plus
vaste, sans pourtant avoir le but de reproduire dans un livre la totalité du monde de la nature et/ou du
système des sciences, justifie-t-elle l’insertion de ces œuvres à l’intérieur d’une culture encyclopédique,
l’interprétation de ces textes comme « recueils encyclopédiques », la définition de ces œuvres comme
moments de l’histoire de l’encyclopédisme ?
Cet article ne peut ni ne veut livrer une réponse générale, mais cherche, plus modestement, à aborder
ces questions de catalogage, de définition et d’interprétation en traitant d’un genre littéraire bien précis,
les recueils de questions-réponses ayant pour objet l’histoire naturelle à la Renaissance et à l’Epoque
Moderne. Ces textes font partie de plein droit des systèmes de transmission et de diffusion du savoir, et
bien au delà du monde occidental. Comment peut-on les caractériser et les distinguer à l’intérieur de la
littérature scientifique et encyclopédique ?
3 Voir à ce propos le volume collectif (König et Woolf 2013), ici p. 4-5 (« Introduction »). Voir aussi la contribution de C. Macé
dans ce volume.
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Les séries de problèmes, un genre au carrefour des cultures
2. Les recueils des questions-réponses dans la recherche
L’intérêt pour ce genre de texte a déjà caractérisé le travail de plusieurs générations de chercheurs. Après
l’étude pionnière de Brian Lawn, qui avait livré, en 1963, une histoire des recueils de questions-réponses
et des dialogues scientifiques et philosophiques au Moyen Age et à la Renaissance et avait contribué à
faire connaître le « système question-réponse » comme stratégie de transmission du savoir4 , ce genre
littéraire a déjà fait l’objet, il y a quelques années, des recherches d’Ann Blair, qui a essayé dans deux
articles publiés en 1999 de livrer une définition de ce type de texte5 . Celle proposée par la chercheuse
n’arrive pas à couvrir l’éventail des textes qu’on peut définir comme « recueils de problèmes ». En fait,
le centre d’intérêt de l’analyse d’A. Blair s’identifie avec les recueils intitulés Problemata et appartenant,
au moins dans les intentions, à la tradition des Problemata pseudo-aristotéliciens. Elle implique donc
que, dans sa perspective, les recueils de « problèmes » s’identifient plus ou moins totalement avec la
perspective de l’œuvre attribuée à Aristote, à savoir l’identification de la démarche logique qui règne
sur un phénomène naturel et permet de l’expliquer, et surtout de la cause qui est à l’origine du même
phénomène6 .
Il y a quelques années, j’ai repris le dossier dans quelques études en adoptant une approche
sensiblement différente de la chercheuse américaine. Le but de mes recherches n’était pas d’identifier un
genre de texte unique et une seule tradition textuelle de recueils de questions-réponses, mais de présenter
un éventail plus large d’œuvres, de formes, de structures de textes, de niveaux intellectuels et culturels7 .
Bref, il s’agissait pour moi de décliner la typologie textuelle du recueil de questions-réponses dans ses
multiples formes et manifestations entre Moyen Age et Renaissance, et de tenter une définition de ce
genre littéraire qui pourrait mieux l’identifier et le distinguer par rapport à celui des dialogues fictifs8
ou des miscellanées encyclopédiques9 . Ce qui m’intéressait plus particulièrement était l’utilisation et
la transformation de l’arrière-plan intellectuel et culturel montrées par les compilateurs des recueils de
questions-réponses. La question n’était pas limitée à l’identification des textes de référence : le plus
important était de comprendre la manière dont ils les utilisaient et la façon de véhiculer à leurs lecteurs
non seulement la réponse à une question et l’explication ou la cause d’un phénomène naturel précis,
mais tout un bagage de connaissances variées liées de manière directe ou indirecte avec le phénomène
en question. En d’autres termes, il s’agissait de comprendre leur valeur comme forme de transmission
des connaissances et comme typologie de texte savant à lire avec plusieurs buts : en premier lieu, pour
comprendre la cause d’un phénomène naturel ; ensuite, pour acquérir des connaissances plus vastes dans
le domaine du savoir concerné par le phénomène (météorologie pour le ciel sublunaire, les vents, les
phénomènes atmosphériques, zoologie pour les animaux, etc.) ; enfin, pour apprendre la logique interne
au monde de la nature (pour ainsi dire, de percer ses causes internes). Pour atteindre cet objectif, il
n’était pas suffisant de s’appuyer sur quelques textes-phares en cherchant de dériver, à partir d’une petite
sélection, les éléments représentatifs qui permettaient de tracer l’identité du genre littéraire dans son
évolution historique ; on devait, en premier lieu, mettre ensemble un catalogue des textes susceptibles
de faire partie d’une recherche plus vaste, et structurer ce même catalogue sur la base de critères précis,
4 Voir Lawn 1963.
5 Voir Blair 1999a.
6 Cf. Blair 1999b, ici p. 173: “Although the tightly paradoxical formulation of the Aristotelian problema loosened over time, the
genre of natural philosophical and medical problemata involved exclusively causal questions (in “why ?” and synonyms), applied
to commonly known particular phenomena. The genre was built around an Aristotelian conception of philosophical knowledge as
causal knowledge, applied to the explanation of ordinary rather than specialist or abstract questions”.
7 Cf. Ventura 2004, 2007, 2009, 2015.
8 Sur le genre littéraire des dialogues, voir, pour l’Antiquité tardive et le Moyen Age, la synthèse dans Cardelle de Hartmann
2007, et pour la Renaissance, celle offerte par le volume collectif (Hempfer 2002), et par la monographie de Traninger 2012. Voir
aussi le volume collectif (Bergdolt et Pfister, 2011).
9 Sur le genre littéraire des miscellanées encyclopédiques, et en particulier sur les Quaestiones mensales de Plutarque, voir le
volume collectif Klotz et Oikonomopoulou 2011.
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capables de situer chaque texte dans une catégorie précise. La question primaire était, et est encore,
représentée par l’identification de ces critères.
3. Cataloguer les recueils de questions-réponses : critères et questions
Avec le but d’écrire une histoire du genre littéraire des recueils de questions-réponses et de tracer une
typologie de ces textes, j’ai commencé à dresser, au fil des années, un petit catalogue des recueils de
questions-réponses écrits entre le Moyen Age et l’Epoque Moderne, en me basant d’abord sur l’aperçu
de l’évolution de ce genre littéraire donné par B. Lawn dans son étude The Salernitan Questions10 . La
littérature est vaste, mais ce n’est pas son ampleur qui pose principalement problème. La vraie question
à la base de la constitution d’un tel catalogue concerne l’identification des critères les plus efficaces
à utiliser. Ces critères servent, en même temps, à identifier les recueils de questions-réponses et à les
distinguer des autres genres de transmission de savoir autres que les traités scientifiques et les textes
encyclopédiques comme les dialogues fictifs, les recueils de lieux communs, les romans érudits11 . Ils
visent en outre à leur trouver une place dans le processus de diffusion de la culture scientifique parmi
les savants et les érudits qui, tout en n’étant pas des spécialistes des différentes disciplines, montraient
un intérêt bien réel et des moyens intellectuels aptes à comprendre les informations issues de disciplines
spécifiques12 . Enfin, ces critères ne peuvent pas être seulement extérieurs : on ne peut pas, par exemple,
prendre en considération seulement les œuvres intitulées « Problemata » ou « Quaestiones », car ce
titre est trompeur. Il peut se retrouver, en fait, non seulement à la tête de recueils de questions-réponses,
mais aussi d’œuvres académiques comme des disputationes, ou des manuels spécialisés comme les
recueils de médecine structurés sur le modèle du Conciliator de Pierre d’Abano (e.g., le Conciliator
enucleatus de Gregor Horst13 ou lesProblemata miscellanea de Iohannes Jacobi14 ). Il fallait donc trouver
d’abord des critères internes aux textes, et relatifs à leur structure, au choix et au traitement de la matière
choisis par le compilateur, et à l’image du monde et du savoir livré par la compilation.
3.1 les critères de division et structuration du texte
Dans cet esprit, le premier critère de catalogage est, évidemment, la division du texte en questions et
réponses. Bien que primaire, ce critère n’est pas toutefois à accepter sans apporter des précisions.
En premier lieu, il faut examiner la question posée et sa nature, pour voir si elle part d’un intérêt
ponctuel pour un objet/phénomène naturel, pour ses causes et pour ses manifestations plus ou moins
exceptionnelles, ou si elle reflète un débat plus large (comme par exemple la génération spontanée),
examiné par l’auteur en partant d’un exemple spécifique. En d’autres termes, il faut essayer de
comprendre, dans l’œuvre, si les questions posées montrent une attention plus concrète pour un objet, ou
si elles reprennent consciemment une discussion scolastique plus profonde et cherchent soit à la rendre
plus accessible à leurs lecteurs en la liant à un cas concret, soit à la rappeler dans toutes ses nuances
et ses complications. Il faut aussi chercher à comprendre dans quel rapport se trouvent la question et
sa réponse. Dans les recueils de questions-réponses, on peut ainsi trouver des exemples de questions
très brèves et ponctuelles, suivies par des réponses tout autant brèves et ponctuelles, mais aussi des cas
qui montrent une relation plus complexe entre questions et réponses. Dans ce dernier cas, la première
10 Lawn 1963.
11 Cf. l’Introduction à ce volume, Sect. 2.2.2
12 À ce propos, il faut remarquer que la recherche en matière d’histoire des encyclopédies n’a pas encore essayé de donner une
définition exacte de la notion de « lecteur non-spécialisé », qui n’indique pas forcément un lecteur « incompétent », ni de la
présenter dans ses différentes nuances. Je remercie Jeanne Peiffer (CAK, CNRS, Paris) d’avoir attiré mon attention sur la nature
complexe de cette notion.
13 Horst 1621.
14 Jacobi 1662.
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Les séries de problèmes, un genre au carrefour des cultures
devient un point de départ, on pourrait dire un prétexte pour le plein développement de la seconde,
dont la dimension et la profondeur, le contenu et la bibliothèque des sources dépassent largement la
« banalité » de l’objet/phénomène naturel présenté comme problématique. Evidemment, l’éventail des
possibilités entre ces deux extrêmes peut être, à son tour, large.
3.2 Les sources, leur choix et leur traitement
Un deuxième critère de catalogage et d’interprétation des recueils prend en considération les sources.
Dans le cas des recueils de questions-réponses, il ne s’agit pas seulement d’identifier les sources utilisées
par les compilateurs et de définir les stratégies de leur traitement, mais aussi d’établir le rôle joué par
la ou les sources dans l’émergence de la question. A titre d’exemple, on peut présenter la question
de manière différente : dans le cas des recueils de questions-réponses, le compilateur peut utiliser sa
ou ses sources non seulement pour livrer une réponse certaine et pourvue d’autorité, garantie par le
nom de l’auteur et de l’œuvre cités et repris, mais aussi pour dériver d’un passage de la source même
une possible question artificielle, en donnant le passage comme réponse15 . Par conséquent, il n’est
pas seulement important de comprendre si, dans le cas de la zoologie, il préfère utiliser les Historiae
animalium d’Aristote, la Naturalis historia de Pline l’Ancien, ou le De animalibus d’Albert le Grand
(ou les trois textes ensemble), mais de voir de quelle manière il manipule la source pour transformer une
affirmation en un objet de doute et, donc, de question.
3.3 La structure de la compilation et l’ « image du monde »
Le troisième critère prend comme point de départ la structure du texte, la séquence des questionsréponses, le choix des sujets et leur encadrement. Ce troisième critère se concentre sur des aspects du
texte qui se révèlent très importants pour comprendre la volonté, de la part du compilateur, de rédiger
une œuvre cohérente qui utilisent la forme question-réponse ou de mettre ensemble une séquence de
questions plus ou moins pertinentes au regard de l’intention globale. Dans les deux cas, ce n’est pas
seulement la structure qui compte, mais aussi le but et l’intention de l’auteur qu’elle cache : dans le cas
d’un recueil « éclaté », sa raison d’être pourrait se retrouver dans la varietas et dans le plaisir intellectuel
qu’elle procure plutôt que dans l’harmonie et la cohérence interne d’un système et dans l’enseignement
qu’il offre16 . Le contraire vaut, évidemment, pour une structure compacte, où la séquence des questions
est encadrée dans un système logiquement cohérent, où les sujets et les questions se succèdent en suivant
un plan bien précis. Par exemple, une séquence de questions vue en tant qu’ensemble et dans le passage
d’un sujet à l’autre montre l’image que le compilateur veut fournir de l’univers du ciel à la terre et de
son décor, ou des animaux classifiés en quadrupèdes etc.17
Plus précisément, il faut voir si l’ensemble des questions-réponses ou, au moins, une partie entre
elles, forme un noyau cohérent, montre une véritable séquence logique des sujets approchés ; à savoir,
si par exemple une série de problèmes traitant du monde animal à l’intérieur d’un recueil plus varié,
ou une œuvre strictement divisée en livres ou en sections, chacun(e) desquels consacré à un sujet
spécifique. Donc, la question de la structure du texte est à aborder à un double niveau, à savoir en
prenant en considération l’entièreté du texte autant que les sections dont il est constitué18 . En outre,
15 Cf. sur ce sujet Ventura 2009 et 2015. Les deux études prennent comme point de départ la Catena aurea entium, une gigantesque
encyclopédie en 10 livres structurée sous forme de questions-réponses écrite par le dominicain Henry d’Herford pendant la
seconde moitié du XIVe siècle, et explorent la technique de constitution de cette compilation, et la relation entre questions et
réponses.
16 Cf. la contribution de G. C. Cifoletti dans ce volume.
17 Voir la séquence de questions-réponses incluses dans le Responsorium curiosorum attribué à Conrad d’Halberstadt, publié
à Lübeck en 1476 (version digitale accessible au site http://digital.staatsbibliothek-berlin.de/werkansicht
/?PPN=PPN739818120).
18 Cf. l’Introduction à ce volume, Sect. 2.1.5.3.
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la présence, ou l’absence, d’une structure et d’une cohérence interne dans le recueil, doit être prise en
considération, car elle offre des éléments ultérieurs d’évaluation de la nature, du Sitz im Leben, à savoir,
de son rôle et de sa place dans la culture du temps, des modalités de lecture et d’utilisation, et des buts
de la compilation. Par exemple, on peut se demander pour quel type de lecture soit conçu un recueil
apparemment dépourvu de structure, et basé sur le principe de la varietas et de la polymathia plutôt
que sur celui du traitement ordonné des sujets ou sur une hiérarchie des éléments naturels et/ou des
disciplines. Pour mieux dire : est-il conçu pour la consultation ponctuelle, pour la lecture in extenso, ou
bien tout simplement pour amuser le lecteur avec son choix des sujets et le contenu de ses réponses (un
emploi strictement pédagogique au sein d’une institution de formation me semble, au moins pour les
textes écrits à la Renaissance et à l’Epoque moderne, peu probable) ?
Pour évaluer la nature, la destination, les modalités de lecture des recueils de questions-réponses,
il est pourtant nécessaire de prendre en considération plusieurs aspects : à coté, évidemment, du
contenu, ce sont les éléments paratextuels qui l’accompagnent qui méritent une attention spécifique.
En particulier, il faut considérer les préfaces écrites par l’auteur et/ou l’imprimeur, une partie du texte
souvent utilisée par les auteurs et/ou les imprimeurs pour livrer une « fiche d’identité » du recueil
et tracer le portrait de son lecteur idéal. Autres éléments distinctifs, quand ils sont présents, sont les
index qui, surtout dans le cas d’œuvres apparemment incohérentes, guident le lecteur vers le repérage
immédiat des questions susceptibles de l’intéresser, et/ou offrent des regroupements et des systèmes de
navigation du texte alternatifs (par exemple, dans le cas où ils réunissent dans la même séquence des
questions consacrées au même sujets, mais éparpillées à l’intérieur du texte).
***
Les critères sélectionnés pour un premier catalogage sont en rapport avec la représentation, la
structuration, la mise en question, et la transmission du savoir dans les œuvres. Ces critères, qui sont
aussi à la base de l’analyse des textes encyclopédiques, doivent être appliqués dans le cas des recueils
de questions-réponses en tenant compte des conditions mentionnées dans les paragraphes précédents,
pour permettre à ce genre de texte et aux œuvres qui le caractérisent de trouver sa place et d’émerger à
l’intérieur de la littérature encyclopédique médiévale, de la Renaissance et de l’Epoque Moderne, ainsi
que des formes de texte qui ont l’ambition de transmettre le savoir. Pour mieux exemplifier les critères
et les difficultés d’un catalogage des recueils de questions-réponses écrits pendant la Renaissance et
l’Epoque moderne, je discuterai deux exemples dans les paragraphes suivants (Sects. 4 et 5). Ces deux
textes ont en effet en commun le fait d’être structurés dans cette forme, mais d’être aussi profondément
différents pour ce qui concerne la nature et la forme des réponses et leur rapport avec les questions de
départ, leur arrière-plan intellectuel, leur présentation, leur destination, et leurs modalités de lecture et
d’utilisation.
4. Un recueil « ludique » de question-réponses : les Problemas de
Francisco Lopez de Villalobos
Le premier texte considéré dans notre étude sont les Problemas du médecin juif espagnol Francisco
Lopez de Villalobos (c. 1473 – c. 1549), un auteur connu surtout pour son poème médical concernant
la syphilis, un des premiers témoignages littéraires de cette maladie écrits en Espagne19 . Les Problemas
19 Lopez de Villalobos 1543 (publié avec les Dos dialogos de medicina, il Tratado de las tres grandes, une Cancion, et la
Comedia de l’Ampytrion ; la pagination du texte est très aléatoire et dépourvue de cohérence interne entre une numération en
folios et en page). Le volume est entièrement numérisé sur www.books.google.com. Sur la biographie de Lopez de Villalobos,
voir Arrizabalaga 2002.
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Les séries de problèmes, un genre au carrefour des cultures
sont, en revanche, peu fréquentés par les historiens de la littérature, à l’exception des spécialistes de
littérature et de la culture scientifique en terre d’Espagne à la Renaissance. Le texte, publié en 1543, se
compose de 41 questions et réponses structurées en 2 livres, dont le premier, consacré au monde de la
nature, comprend seulement 6 questions, tandis que le second, conçu autour de l’homme et des animaux,
et en particulier de leur vie et de leurs coutumes, en contient 3420 . Les Problemas sont complétés dans
l’édition imprimée par 2 dialogues autour de fièvres interpolatae (c’est-à-dire, avec des rechutes à des
intervalles de temps fixes, pour le premier), et de la chaleur naturelle de l’homme (pour le second), et
par la reproduction d’une conversation entre Villalobos et un dignitaire du royaume de Castille21 . La
structure des questions-réponses est apparemment assez simple, mais, à bien voir, assez particulière :
chaque sujet est traité sur la base, on peut facilement imaginer, d’une question spécifique, suivie par
sa réponse. La forme et la définition de « question » et « réponse » présente déjà des caractéristiques
particulières. Dans ce recueil, la question est présentée sous forme d’un petit poème rimé défini comme
« metro » (c’est-à-dire, comme « partie poétique »), tandis que la réponse est conçue et présentée
comme une « glose » (« glossa ») au dit poème. L’ampleur de cette glose dépasse toutefois largement
la question en soi, et vise à transmettre des connaissances plus génériques. Pour ne donner qu’un
exemple : la première question du premier livre, celle qui ouvre la collection, concerne les mouvements
du soleil, la durée du jour solaire, qui est plus court de celui d’autres corps célestes, et la théorie des
épicycles. Elle est synthétisée dans les vers suivants : « Porque el Sol desde su sphera/haze un dia
naturàl/menor que otro ques su ygual/siendo toda una carrera ?/Y porque sus compañeros/Mercurio
y Venus conel/delanteros o çagueros/tampoco se apartan del? » 22 . La réponse ou « glossa » prend
plusieurs pages, mais, plutôt que de donner une solution à la question spécifique, elle se borne à offrir
surtout, et de manière très simple et didactique, une description et une explication complète des trois
mouvements du soleil. C’est seulement à la fin qu’elle aborde la question des différences entre le jour
solaire et celui de Mercure et de Vénus et la description des épicycles.
Donc, a priori, on ne peut pas parler ni d’une relation étroite entre question et réponse, ni
d’un rapport complexe entre une question apparemment« banale » (ce qui n’est pas toujours le cas
des Problemas qui contiennent des questions très profondes et complexes, de « vrais problèmes
scientifiques » 23 ) et une réponse fortement chargée d’érudition, ni enfin d’un « problème » qui reproduit
un débat scientifique d’envergure. Dans le cas de Lopez de Villalobos, la question et la réponse trouvent
leur valeur et leur importance dans sa capacité d’intéresser un public plus large, de lui transmettre,
en même temps, un savoir de haut niveau et de l’amusement, et enfin de le faire avancer, à travers
un processus didactique bien planifié et structuré, vers des connaissances plus générales, y compris
concernant des disciplines complexes comme l’astronomie ou la théorie des éléments. Cette valeur et
cette fonction sont également mises en évidence par la structure même de la réponse, dans laquelle, à
ma connaissance, aucun renvoi à une source écrite n’est présent. Cela n’implique pas que le compilateur
n’avait pas accès à une bibliothèque plus ou moins vaste, mais seulement un processus de filtrage et de
mise en valeur de l’information au détriment des textes de référence. Enfin, la réponse est structurée
de manière strictement déductive, marquée par l’utilisation de stratégies linguistiques capables de lier
fortement un passage à l’autre24 .
20 Les deux dernières questions, concernant respectivement la flatterie vis-à-vis des rois et ses conséquences négatives, et les
menteurs, sont dédiés au roi Felipe II.
21 Une note marginale écrite au f. 132v de l’édition consultée pendant la préparation de cette étude identifie le dignitaire avec le
duc d’Alba.
22 Lopez de Villalobos 1543, f. 3v.
23 Voir à ce propos les questions 4 et 5 du livre I, concernant la théorie des éléments, ibid., f. 16r-23v.
24 Voir, par exemple, la description du mouvement du soleil d’Orient à Occident (ibid., f. 4 [recte: 3v]-5r): « .. El primero
[movimiento] es el que vemos que haze ca da dia de Oriente y Poniente. Y este se cumpl˛e en veynte y quatro horas yguales, poco
mas. Conviene a saber desde que parte de Oriente hasta que rodeando todo el mundo por arriba y por abaxo buelvue a salir otra
vez. Yeste se llama dia natural que comprehende dia y noche. Y desta manera es tam grande el dia de invierno como el de estio,
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La particularité de la structure de chaque « unité question-réponse », ainsi que la forme, la nature
et la fonction de la question et de la réponse méritent aussi d’être soulignées, car elles nous disent
beaucoup sur la nature de l’œuvre. En premier lieu, elle montre que, pour notre auteur, c’est la question
qui joue le rôle vedette, qui doit attirer l’attention du lecteur, tandis que la réponse ne devient qu’un
accompagnement du problème énoncé dans le « metro » (à savoir, dans la partie versifiée), ainsi qu’un
point de départ pour transmettre un savoir et un enseignement plus généraux. La forme et la structure
de la réponse, dépourvue de toute référence à des sources et à des autorités, et caractérisée par un ton
intentionnellement didactique et rigidement déductif, ainsi que la nature « littéraire » de la question,
nous font, de l’autre coté, comprendre que Lopez de Villalobos utilise le modèle question-réponse
pour offrir à ses lecteurs une œuvre qui mêle l’esprit pédagogique à une intention « ludique », c’està-dire à une intention de mettre en place une forme de transmission du savoir où le « plaisir de lire et
d’apprendre » joue un rôle majeur. L’absence de renvois aux sources est également liée à cette dimension
ludico-didactique : elle ne doit être lue ni comme un signe d’ignorance du compilateur (un médecin
cultivé) ni de ses lecteurs (qui, au moins en partie, avaient accès à d’autres sources), ni comme une
intention de « populariser » la culture scientifique qu’il transmet qui, vu le niveau des questions, ne peut
pas être définie comme « populaire ». Plus probablement, il ne cite pas de sources pour la simple raison
qu’il n’a pas besoin de soutenir son savoir à l’aide d’une autorité. La nature linéaire de son raisonnement
est déjà suffisante à transmettre les informations sans provoquer ni de doutes, ni d’autres questions. En
outre, il est plus probable que ses lecteurs, qui lisaient le volume de Lopez pour satisfaire leur curiosité
sans alourdir leur travail, n’avaient pas besoin de renvois à d’autres sources, mais seulement de lire et
d’apprendre de manière peu compliquée.
Un dernier mot doit être dit sur la structure du recueil et la séquence des questions. Pour mieux
les comprendre, on peut parcourir à titre d’exemple la structure du livre I. Si la première question
concerne les mouvements du soleil, la deuxième a pour sujet la lumière de la lune, la troisième traite
des quatre éléments (terre, air, feu, eau) qui forment le cosmos, leur opposition en tant que tels, leur
mélange à l’intérieur des objets, et la prééminence parmi eux du feu. Quant à la quatrième –une des
questions plus longues et complexes–, elle s’intéresse à la fonction du feu céleste, la cinquième aux
convergences et les similarités entre les éléments. Enfin, la sixième aborde le problème de l’altitude du
Paradis terrestre et la possibilité qu’Adam, en raison de cette altitude, aurait pu toucher la lune avec
les mains simplement en montant sur un arbre (sic!). Apparemment, ces six questions ne livrent pas
des connaissances complètes, mais isolent et traitent des problèmes spécifiques. En conséquence, on
pourrait parler des informations livrées par Lopez de Villalobos comme d’un savoir partiel, ponctuel,
et sélectionné sur la base des difficultés qu’il présente. Si cette conclusion ne peut pas être niée si
on prend en considération exclusivement l’argument des questions, il est vrai aussi que, du point de
vue des réponses, l’ampleur et la généralité de la « glose », qui aborde le sujet à son niveau le plus
élémentaire, permet au compilateur, avant de répondre à la question spécifique, d’offrir à ses lecteurs un
petit traité général concernant l’objet de la réponse et la discipline ou le domaine du savoir concerné.
On a déjà vu ce phénomène pour la première question discutée plus haut. Donnons un nouvel exemple :
la longue réponse à la troisième question débute avec un petit rappel des connaissances de base à propos
de la théorie des éléments, et seulement après aborde les différents aspects problématiques (opposition
et mélange des éléments, prééminence du feu) contenu dans le « metro »25 . Par conséquent, on peut
affirmer que, bien que la séquence des questions semble présenter une série de questions isolées et
porque lo que se acorta del dia se alarga en la noche. Este movimiente se llama diurno, porque se haze cada dia: y llamase rapto,
porque el cielo, o sphera donde esta el Sol es arrebata do y traydo por fuerça des primer cielo mobile, que es tan grande y tan
potentissimo en su curso, que como el se mueve de Oriente a Poniente, y da una buelta entera en un dia natural, trae consigo
arrebatados y forçados a todos los cielos que esta de l’axe des y hazeles dar una buelta cada dia, y hazer el movimiento diurno
(como dicho es) en veynte y quatro horas... ».
25 Ibid., f. 10v-16r.
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Les séries de problèmes, un genre au carrefour des cultures
ponctuelles, sans véritables liens internes, celle des réponses montre une volonté de livrer aux lecteurs,
à travers l’association de quelques questions, une connaissance plus vaste, bien que non complètement
exhaustive. Une telle exhaustivité n’était d’ailleurs probablement pas dans les intentions du compilateur,
qui voulait livrer une œuvre amusante et édifiante, plutôt qu’un traité savant26 .
L’exemple des Problemas de Villalobos montre comment les trois critères de catalogage choisis
(structure des unités textuelles, présence et utilisation des sources, forme et division du texte et
choix/séquence des sujets) nous permettent d’identifier, au delà des particularités de la collection, une
typologie de texte et d’utilisation de la forme « question-réponse » avec une identité précise et des buts
spécifiques. Il montre aussi que ces critères ne peuvent pas être considérés comme des valeurs absolues,
mais donnent lieu à toute une série de « sous-critères ». Ils demandent donc à être utilisés de manière
flexible.
5. Un recueil « érudit » de questions-réponses : les Pensieri diversi
d’Alessandro Tassoni
Notre deuxième et dernier exemple se situe apparemment à un niveau diamétralement opposé à celui des
Problemas de Lopez de Villalobos, et constitue un type de recueil de questions-réponses complètement
différent. En réalité, seulement une analyse plus précise pourra confirmer si cette impression est
légitime.
Le recueil des Pensieri diversi fut publié pour la première fois en 160827 ; il fut ensuite revu plusieurs
fois et imprimé sous forme différente en 1612, 1613, et enfin en 1620, dans la version en 10 livres
que nous connaissons aujourd’hui et que nous traitons dans ce paragraphe28 . Leur auteur, Alessandro
Tassoni (1565-1635), est une des personnalités clés de la littérature italienne de l’époque baroque, connu
en particulier à cause de la rédaction d’un poème-parodie des chansons de geste à grand succès, La
secchia rapita (Le seau enlevé). Les Pensieri diversi, en dépit de leur succès au XVIIe siècle, n’ont
pas véritablement attiré l’attention des chercheurs. Selon toute probabilité, leur nature d’œuvre érudite
caractérisée par l’ « information overload » typique de l’âge du baroque italien a contribué à son oubli
et à son exclusion des histoires de la littérature italienne. Bien que parfois difficile à lire et à approcher,
elle mérite notre attention dans cette étude.
Les Pensieri diversi, contrairement aux Problemas de Lopez de Villalobos ont, au moins dans leur
version définitive, une structure comparable à celle d’une véritable imago mundi, d’une encyclopédie
universelle englobant l’entièreté du monde de la nature. Ses 10 livres traitent, respectivement, de la
conception de la matière et de la forme (livre I), du firmament et des étoiles (livre II), du soleil et de
la lune (livre III), de l’air, de l’eau et de la terre (c’est à dire, des trois autres éléments qui composent
l’univers ; livre IV), des propriétés et des accidentia des objets naturels et des êtres vivants (livre V),
de la vie humaine et de ses caractéristiques (livre VI), de la littérature (livre VII), de la vie sociale et
politique de l’homme (livre VIII), de l’histoire et de la poésie (livre IX), des biographies des hommes
illustres (livre X). Tous les livres sont structurés sous forme de questions-réponses, sauf le dernier qui,
selon toute probabilité, ne pouvait pas être structuré de cette façon, car les biographies ne se laissent pas
synthétiser facilement en une série de questions-réponses, mais seulement en forme de petits chapitres.
26 Voir à ce propos le lieu commun utilisé par l’imprimeur dans l’épitre de dédicace à Diego Nuñez Perez, qui parle des Problemas
comme d’un « apazible jardin, hallara diversidad de floridos dichos : unos que le sirvan de solo pasatiempo, y otros, que sirvan
de medicina para el cuerpo, y otros de consejos para el alma », à savoir d’un beau jardin de dits, dans lequel on trouve plusieurs
fleurs, certains qui ne sont qu’un divertissement, certains qui offrent un médicament pour le corps, et certains enfin qui donnent
des conseils relatifs à la vie spirituelle. Je me demande toutefois si dans cette image on ne doit pas voir, comme j’indique dans cet
étude, seulement une référence à la nature amusante et savante des questions en général, ou bien aussi une légère dépréciation de
celles comprises dans le livre I.
27 Pour cette étude, j’utilise l’édition Tassoni 1645, accessible sur le site www.books.google.com.
28 Sur la biographie et l’oeuvre de Tassoni, voir Fassò 1937. Sur cet auteur, voir aussi le volume collectif (Jannaco 1966).
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Par conséquent, et contrairement au cas des Problemas, nous avons à faire avec une œuvre à la forme
plus solide et compacte, structurée sur deux piliers ou axes principaux, à savoir l’univers composé des
quatre éléments (objet des 5 premiers livres, bien que le cinquième doit être plutôt considéré comme
une sorte de charnière) d’un côté, et l’être humain, la vie humaine et la culture littéraire (au centre des
livres VI-X et, au moins, d’une partie du livre V) de l’autre. Cette apparente solidité interne et l’ampleur
de l’éventail des matières ne doivent pas toutefois nous tromper : le recueil révèle en son intérieur un
manque étonnant d’équilibre dans le choix et le traitement des sujets, et un critère d’assemblage des
questions qui révèle une certaine hiérarchie interne des arguments.
Essayons maintenant de mieux expliquer ce que je viens d’affirmer. Si on observe la structure de
l’ouvrage et la séquence des domaines d’analyse et de recherche, on remarque que le monde végétal et
animal ne se voit pas consacrer une section particulière, mais que, par exemple, les questions liées aux
animaux et en particulier à l’anatomie animale, sont discutés à l’intérieur du livre V, à savoir dans une
partie spécifique qui concerne, dans une vision comparative, les caractéristiques du corps humain et les
particularités de la vie corporelle des êtres animés. Le livre V inclut donc, parmi d’autres, un groupe
des questions comparant l’homme et l’animal en général, telles que la question 27, « Quale animale sia
più simile all’uomo », la 28, « Qual eccettuando l’huomo possa chiamarsi più felice animale », la 29
« Qual sia il più crudo animale », la 30 « Qual sia il più lussurioso animale », la 31 « Perche alcune
madri inferociscano dodo [lege: dopo] il parto, e altre nò »29 . Par conséquent, on peut déjà voir que
l’apparente ambition encyclopédique de reproduire dans ce recueil un savoir universel se traduit de facto
en un système scientifique réduit et en même temps sophistiqué, dans lequel les différents arguments
sont structurés en utilisant un système hiérarchique divisé en sujets « principaux » et « secondaires ».
Le fait d’avoir mentionné une séquence de questions nous emmène nécessairement à analyser
la nature et la structure des unités formées par les questions et les réponses, leur équilibre interne,
et la contribution offerte par ces unités à la représentation unitaire d’un élément du monde et d’un
domaine du savoir. Dans un article précédent, j’avais déjà remarqué l’intérêt de Tassoni pour tout ce qui
curieux, étrange, paradoxal30 . En même temps toutefois, j’avais aussi relevé que cette nature curieuse
des phénomènes décrits par Tassoni n’impliquait ni une recherche consciente du merveilleux et de
l’exotique, mais restait enracinée dans la « quotidien », dans les petites merveilles qui caractérisent
la vie de tous les jours, et, fait encore plus important, que les curiosités montrées par notre auteur ne
dérivaient pas d’une connaissance directe de la nature, mais de la lecture de ses sources, dont il tira
non seulement la manière de répondre aux questions mais aussi le sujet lui-même. Sans renier ces
conclusions, je voudrais ici aller au delà d’elles, et analyser non pas le sujet des questions et sa nature,
mais le modus operandi de Tassoni et ses résultats.
Pour ce qui concerne la structure des questions et l’équilibre entre question et réponse, on peut
tout d’abord remarquer, même dans une lecture superficielle, une forte disproportion entre l’apparente
banalité de la question et la longueur et la profondeur de la réponse. En réalité, à bien y regarder, les
questions ne sont pas banales du tout, soit parce qu’elles proposent des questions de base, soit parce
que le problème cache, derrière son apparente futilité, un débat scientifique de taille et l’influence sur
la longue durée d’une source centrale. Rappelons ici deux exemples qui exemplifient les deux cas :
la première question du livre I, « Se ci sia l’elemento del fuoco », s’interroge sur l’existence du feu.
Sa réponse prend 8 pages, et trace une véritable histoire de la théorie des éléments qui va d’Aristote
à Bernardino Telesio, critique la vision aristotélicienne des éléments, et traite de toute une série de
questions liées à l’existence du feu, à savoir l’existence d’un feu céleste et terrestre, les différences
29 Tassoni 1645, V,27-31, p. 127-131. Traduction française: « Quel est l’animal le plus similaire à l’homme ? », « Quel est l’animal
le plus heureux, à l’exception de l’homme ? », « Quel est l’animal le plus cruel ? », « Quel est l’animal le plus luxurieux ? »,
« Pourquoi certaines mères déviennent plus féroces après l’accouchement, et d’autres pas ? ».
30 Ventura 2007, p. 303-306.
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Les séries de problèmes, un genre au carrefour des cultures
entre les deux, le mouvement du feu, son poids et son mouvement, la nature de la chaleur31 . Ce petit
traité de physique (qu’on ne peut pas reproduire ici dans son entièreté) se conclut sans une véritable
réponse à la question concernant l’existence du feu, mais reprend, d’un point de vue philosophique
et scientifique, tous les éléments du débat scolastique et savant développé à travers les siècles autour
de la nature du feu, de sa position dans le système des éléments et dans la philosophie naturelle
d’Aristote à Telesio, et de sa division entre feu céleste et terrestre. Par conséquent, on peut dire que,
dans les Pensieri diversi, le rapport entre question apparemment banale et réponse fortement érudite et
complexe n’est pas simplement disproportionné, ni que la première représente simplement un prétexte
au développement érudit de la seconde, mais que Tassoni, fort d’une érudition scientifique profonde, a
choisi de manière rationnelle des questions qui touchent au cœur du débat scientifique et savant, et lui
permettent d’explorer son histoire et son évolution.
Un exemple du second cas se retrouve dans les parties du texte qu’on serait tenté de définir comme
des divertissements érudits à dimension ludique, mais qui sont, en y regardant mieux, reprises telles
quelles d’une autre collection de problèmes ou d’un traité de philosophie naturelle. La question VII
du livre I, « Perche il pane paia più bianco raffreddato, che mentre è caldo », est accompagnée
d’une réponse qui débute avec le rappel de la source dont elle est dérivée, les Problemata pseudoaristotéliciens32 . Dans la réponse, Tassoni reprend le procède logique du Pseudo-Aristote et de Pierre
d’Abano, et les discussions concernant l’association problématique des couleurs blanche et noire à
la chaleur et au froid. En fait, tant la chaleur que le froid peuvent être associés dans le monde de la
nature aux deux couleurs, et la difficulté se retrouve dans l’identification correcte du lien « naturel » et
« accidentel ». Dans ce second cas, où une question apparemment banale est suivie d’une longue réponse
(qu’on ne peut pas reproduire ici dans son entièreté), on voit clairement comment le problème est choisi
non seulement parce qu’il touche, dans sa simplicité, une question de fond, mais surtout car il reprend
une longue tradition textuelle. Cette dernière est représentée par le Pseudo-Aristote, le commentaire
de Pierre d’Abano, et les discussions autour de la question menée par Girolamo Cardano dans le De
subtilitate (1550-1554) et par son principal adversaire, Julius Caesar Scaliger dans les Exercitationes
exotericae de subtilitate (1557)33 . Ce second cas montre clairement qu’on ne peut pas parler simplement
ni de disproportion ou de déséquilibre entre question et réponse, ni de surcharge érudite de la réponse,
mais qu’on doit bien identifier la fonction de cette érudition. Dans le cas de Tassoni, il ne s’agit pas
d’une simple décoration, mais un rappel à une tradition philosophique et scientifique précise et, en
même temps, une démonstration ultérieure de l’attitude consciente et savante – on pourrait presque dire
« livresque » – qui a guidé l’activité de notre compilateur.
Ayant rappelé la présence et la fonction des sources, on peut considérer qu’on a déjà traité du
deuxième critère de catalogage des recueils de questions-réponses, l’analyse des sources. Tassoni se
sert, il est évident, d’un florilège d’autorités principales, parmi lesquelles on trouve Aristote, Girolamo
Cardano (surtout le De subtilitate), Julius Caesar Scaliger (et ses Exercitationes), et Bernardino
Telesio. Ce qu’on peut ajouter, ou mieux rappeler, est que ces autorités ne sont pas citées seulement
en tant qu’auteurs de textes de philosophie naturelle et références phares de la culture scientifique
contemporaine, mais aussi en tant que modèles de processus logique, de raisonnement. C’est ce même
raisonnement logique que Tassoni s’efforce de suivre dans son interprétation des phénomènes naturels
tels qu’ils sont représentés dans les livres qu’il consulte. Par conséquent, dans le cas de Tassoni, la
présence des sources ne doit pas être vue en termes d’opposition à la logique et à la rationalité. Au
31 Tassoni 1645, I,1, p. 1-8.
32 Ibid., p. 14-16. Traduction française : « Pourquoi le pain semble être plus blanc quand il est froid que quand il est chaud ? ». La
source originaire est identifiable en Ps. Aristoteles, Problemata, XXI,4, Parisiis, 1520, ici f. 142vb-143ra (avec le commentaire
intitulé Expositio succincta Problematum écrit par Pierre d’Abano).
33 Sur le De subtilitate de Cardano, voir les monographies de Schütze 1999 et Grafton 1999.
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contraire, les textes de références offrent non seulement du matériel et des informations fiables et
certifiées par leur autorité, mais aussi un modèle de raisonnement à suivre.
En conclusion, l’exemple des Pensieri diversi de Tassoni a montré en premier lieu que notre
impression d’avoir affaire avec un recueil de questions-réponses diamétralement différent des Problemas
de Lopez de Villalobos peut être confirmée. Mais il a d’autre part aussi montré qu’on ne peut
pas réduire cette différence à une simple opposition entre didactique et discours savant, entre
raisonnement/rationalité et érudition/discours savant. Au contraire, on ne peut que remarquer que ces
éléments se croisent et se mêlent, et que procédé logique et culture philosophique et scientifique trouvent
leur point de rencontre dans les recueils de questions-réponses, et non seulement pour offrir à leurs
lecteurs une didactique simple et accessible, mais aussi une formation à l’approche rationnelle du monde
de la nature et des sciences.
6. Conclusions
En conclusion, nous avons montré que les critères choisis, quoique partiels et nécessitant d’autres
éléments d’analyse, peuvent contribuer à notre entreprise de dresser un catalogue de ces textes, de
caractériser cette typologie de texte dans son ensemble et de distinguer des sous-typologies, et enfin de
fournir un système d’orientation et de navigation à l’intérieur d’un genre littéraire probablement très
vaste et varié. Les trois critères servent en outre à éclaircir la contribution de ces textes, en tant que
forme d’encyclopédisme et de structure textuelle parallèle aux textes encyclopédiques, à la transmission
et à la diffusion de la culture scientifique. Cette culture scientifique, ils ne la transmettent pas seulement
de façon « non ambiguë et autoritaire », mais aussi d’une façon « problématisante », ou mieux, en tant
que forme d’exercice à la pratique de l’analyse et de l’interprétation rationnelle de la réalité.
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